Courrier
BIMESTRIEL
D’INFORMATION JURIDIQUE DE L’ADMINISTRATION SANITAIRE, SOCIALE ET DES SPORTS.
87
N° Juillet Août
uridique J
2011
des
Affaires sociales et des
DOSSIER
Sports
LES LOIS DE VALIDATION
Si l’article 2 du code civil dispose que « la loi ne dispose que pour l’avenir; elle n’a point d’effet rétroactif », cette disposition n’a que la valeur d’une loi ordinaire à laquelle le législateur est libre de déroger (sauf en matière répressive). C’est ce qu’il fait lorsqu’il adopte des lois de validation qui ont pour objet de modifier rétroactivement l’état du droit afin de faire obstacle aux conséquences d’une décision rendue par une juridiction. Face à une propension du législateur de plus en plus grande à recourir à de telles lois et à la méfiance qu’elles suscitent, le contrôle exercé par le juge constitutionnel mais également par les juges administratifs et judiciaires s’est sensiblement renforcé au fil du temps, sous l’influence décisive de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui examine la compatibilité des lois de validation avec l’exigence d’un droit à un procès équitable consacré par l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Depuis ces trente dernières années, les jurisprudences combinées de ces différents ordres de juridiction ont permis de fixer les conditions encadrant le recours à la technique de validation législative (les principales étant que celle-ci ne doit pas porter une atteinte directe à l’autorité de chose jugée, ni chercher à influer sur un litige en cours), lesquelles invitent à un usage parcimonieux de celle-ci.
Les lois de validation ont pour objet de valider, c’est-à-dire de proclamer conformes ab initio aux normes de droit supérieur des actes administratifs qui ne l’étaient pas. Ces actes peuvent être des dispositions réglementaires, le plus souvent organisant des procédures et sur le fondement desquelles de nombreuses décisions individuelles sont prises, ou bien des actes produisant des effets à l’égard de nombreuses personnes, produits ou opérations ou encore des actes « collectifs » tels que le tableau d’avancement à un grade dans un corps de fonctionnaires. Ces lois ont pour objet de conforter la sécurité juridique de situations qui se sont déjà constituées et d’éviter la multiplication de contentieux. Toutefois, l’invalidité de ces actes ayant été révélée par des décisions de justice, les lois de validation ont d’emblée eu pour objet et pour effet, d’une part, de faire obstacle à l’exécution de ces décisions, d’autre part, d’influer sur le cours d’instances encore pendantes pour éviter des
annulations. L’exécution de décisions de justice est en effet parfois susceptible de créer d’inextricables difficultés à l’administration ou de préjudicier gravement à des administrés qui ne sont en rien responsables de l’illégalité censurée. Les lois de validation constituent, ce faisant, une immixtion du pouvoir législatif dans le déroulement de procès et donc une atteinte à la séparation des pouvoirs en favorisant l’une des parties au litige. Technique grave de conséquences, ces validations font l’objet d’un encadrement renforcé de construction essentiellement jurisprudentielle résultant de l’effet conjugué des contrôles opérés tant par les juridictions de l’ordre administratif et judiciaire, que par le Conseil constitutionnel et la Cour européenne des droits de l’homme. La principale recommandation qui résulte de ces jurisprudences est qu’une loi de validation ne doit pas porter une atteinte directe à l’autorité de chose jugée, ni chercher à influer sur un litige en cours.