Pourquoi on déteste les clichés

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Pourquoi on déteste les clichés



Personne n’aime les clichés, certaines oeuvres en joue, d’autres les établissent et d’autres encore les accumulent. Mais nul ne les apprécie. Prenons l’exemple des archétypes qui sont souvent rencontrés. Même omniprésents dans la culture commune, on ne peut s’empêcher de les percevoir d’une façon négative une fois qu’on les a identifier. Mais à quoi cela est-il du? Et pourquoi sont-ils utilisés? Si les clichés sont repérables c’est qu’ils sont quasiment identiques dans les différentes oeuvres que l’on rencontre. Et si ils sont utilisés c’est que leurs utilités est avérée. Un élément de construction du récit, c’est ainsi on peut le considérer comme un cliché. Un cliché est défini par un ensemble de critères. • Sa réutilisation de façon quasi identique dans différentes oeuvres. • Son identification rapide. • L’énervement qui découle de son usage Si nous les détestons, il doit y avoir une raison. Mais il doit aussi avoir une raison au fait qu’il soient encore utilisés. Et cette dernière doit prévaloir sur notre dégoût du cliché. Je me suis alors fait la réflexion qu’il existe certains clichés très récurrents dans certains genre. Et que l’on pourrait facilement définir un genre uniquement par les clichés qui sont le plus récurrents dans celui ci. Par exemple, prenons l’exemple du cliché du barbare dans la culture populaire. Il est propre au genre de la fantaisie et de ses dérivés, même s’il a une base historique, il était considéré dans les années 70 comme une nouveauté audacieuse et un avatar de liberté et d’indépendance. Notamment grâce au personnage de Conan. Mais aujourd’hui il est considéré comme un cliché, je prends pour exemple les différentes parodies existantes qui campe désormais un barbare maladroit, stupide et bourrin qui n’est la que pour prêter à rire et servir de comic relief. Un cliché évolue donc bien dans le temps.



Le nombre de clichés existants est théoriquement illimité. Mais avec notre capacité à les reconnaître instantanément, il est nécessaire qu’ils se retrouvent en nombre limité dans l’imaginaire collectif à un moment donné, Dans le cas inverse, l’identification et la reconnaissance seraient beaucoup plus longues. Et puisque les clichés évoluent dans le temps et sont en nombre limités alors il doit exister des règles qui définissent leurs évolutions tout en en maintenant un nombre restreint. Si leurs représentations sont à l’évidence dues à leur popularité (mesurable par leur fréquence d’utilisation sur une période donnée), leur évolution ne doit pas être régie uniquement par cette popularité. Pour illustrer, il serait absurde de réduire les genres musicaux et leurs changements à leurs renommées. Leur évolution est soumise à d’autres conditions, comme l’évolution de la technique ou la découverte par une population d’un nouveau genre et du mélange que celui ci engendre avec les genres déjà connu. Je pense que ce principe se retrouve concernant les clichés. Afin de trouver les règles qui déterminent l’évolution des clichés, il faut revenir à leur essence même, non à l’utilisation que l’on en fait. Mais, si le cliché est une brique de sémantique. Il apporte avec lui son lot d’informations inhérentes à lui même. On peut dire qu’il sert de raccourci, de passerelle pour rentrer dans un univers fictif car on identifie rapidement le sens que le cliché utilisé dans l’oeuvre a, nous permettant de nous concentré sur d’autres éléments du récit, d’autres briques sémantiques. Et cela il le peut grâce au fait qu’il soit répéter de nombreuses fois sur différents supports de la même manière. Ainsi, hormis la première fois ou l’on identifie un cliché (et donc qu’on le définie comme tel), il est immédiatement assimilé car reconnu. Seulement, si nous le reconnaissons, alors nous considérons alors aussi toutes les connotations qu’il apporte. Nous nous retrouvons avec une intégration immédiate de ce que nous avons en face de nous. Le récit n’a donc plus besoin de définir un cliché comme il l’avait fait la première fois ou l’on a identifié.



Plusieurs choses prennent alors sens. 1. Plus un cliché est employé, plus il est reconnaissable rapidement. 2. Plus un cliché est reconnaissable, moins le récit à besoin de s’étendre dessus. 3. Moins le récit prends de temps (ou d’espace) pour le définir, plus il laisse de la place à d’autres briques sémantiques Le cliché même s’il est moins important en terme d’espace utilisé, apporte toujours la même charge sémantique. Un récit avec ses briques sémantiques

Un cliché repéré

Un cliché repéré et donc moins représenté Bien sur cela n’est valable que si l’oeuvre dispose de place limité, comme une page blanche qui deviendrait illisible si l’on écrivait trop dessus. Et cette taille est défini ipso facto par le média employé. Pour un film cela sera ça durée, le format de l’image, ect, pour un bâtiment cela sera la surface et le volume et pour un livre sa place sera le nombre de page et le format du livre. Evidemment, les codes peuvent être cassés mais cela doit être justifié avec beaucoup d’application, car sortir de ces cadres protecteurs signifie aussi devoir en expliquer la raison au spectateur. Exactement comme des clichés immuables. Les codes permettent une reconnaissance immédiate des affiliations de l’oeuvre sans avoir



besoin de réexpliquer au spectateur la raison de ce choix. Et bine sur ces codes évoluent dans le temps. On peut donc certifier l’analogie avec les clichés, et les traité comme tels. Les seules différences notables sont, le temps qu’ils mettent à évoluer, beaucoup plus long, et, leur charge de haine, beaucoup plus réduite. Les codes sont donc des clichés discrets. Si l’utilité d’avoir plus de briques sémantiques n’est pas à débattre car pur évidence (apporter plus de détails pour renforcer un sens ou à l’inverse le nuancer), l’impact sur l’évolution des clichés peut être deviné. J’ai émis plus haut l’idée que le nombre de clichés sur une période donnée est limité. Mais si un cliché est par son usage de plus en plus récurent, il devient de plus en plus agaçant car rapide à identifier. D’où un sentiment de lassitude à son apparition. Or, nous ne détestons pas les clichés à cause de l’usage qu’il en est fait, mais pour une autre raison. La lassitude ressentie serait alors notamment responsable. Un cliché évolue dans le temps, non seulement par son utilisation répétée, mais aussi afin de répondre à cette lassitude. Si un cliché est prend moins de place alors on peut le modifier pour ajouter à cette brique sémantique d’autres connotation qui seront du aux façon dont le cliché est utilisé. Si une utilisation d’un cliché associé à une autre connotation est réemployer alors le cliché évolue en lui même et devient une version 1.2 du cliché. Cette version remplacera la version initiale sur le moyen terme et si jamais le cliché avait reprit une taille plus importante, il sera à nouveau être réduit et l’on pourra lui ajouté d’autres connotation et ainsi recommencer un cycle. Ce cycle ayant donc un double avantage, ne pas lasser le spectateur/récepteur mais aussi gagner encore de la place dans l’oeuvre. Mais cette évolution dans le temps, bien que sommaire explique aussi pourquoi le cliché est délaissé. En effet, un cliché ne peut se détacher d’une connotation qui lui a été ajouté. La version 1.0 du cliché étant détruite/oublié lors de la création de la version 1.2.,



un cliché ne peut qu’évoluer que dans un seul sens, l’accumulation de connotations associés. Le spectateur/récepteur étant quasiment instantanément lassé du cliché par sa nature même de raccourci «facile», on ne peut lui présenter une version dont il a déja été lassé. Cela signifierait la mort du cliché. Un cliché ne peut donc qu’accumuler les connotation sans retour en arrière possible.

Un cliché v1.0 avec une connotation souvent ajouté

L’association des deux

Le cliché v1.2 avec à nouveau une place réduite Les connotations vont donc se greffer au cliché originel avec le temps, faisant évoluer son sens. Reprenons l’exemple de l’archétype du barbare pour clarifier mon propos. à l’origine il était un avatar de liberté et d’indépendance, mais avec le temps les connotations maladroit, stupide et bourrin. On a donc un «noyau» de sens auquel se sont ajouté les connotations car un cliché ne se débarrasse pas de ses connotations. Mais le système n’est pas infini. à un moment le cliché va saturé de connotation. Rien qu’avec l’exemple du barbare, on voit que le sens global a été déformé



par l’ajout des connotations secondaires. Alors à long terme il est logique que le cliché soit abandonné car trop contraignant par son poids sémantique, la brique est trop lourde, même si sa taille ne change pas vraiment, la densité d’informations qu’il transporte devient trop encombrante.

Les clichés sont donc voué a disparaître et à retourné dans la réserve illimité de cliché que l’imaginaire humain peut concevoir. Mais certains cliché après une période d’oublis resurgisse à nouveau. Les cliché peuvent resurgir car l’humain garde une trace de ces cliché dans son patrimoine. Ils peuvent donc être exhumés lors de recherches, lecture, visionnage d’oeuvre passées. Mais ils quand ils sont exhumés, ils reprennent leurs forme originel pour suivre une évolution différente de celle qu’ils avaient vécu. L’archétype du barbare existait déjà au temps de l’empire romain, il suffit d’ouvrir «La Guerre des Gaules» de Jules César et de voir la flopée d’oeuvre qui ont repris sa vision du barbare gaulois pour la retranscrire dans des oeuvres de fiction. Mais déjà à l’époque, le barbare était



synonyme de liberté (non soumis aux règles et aux dogmes romain, donc libre de leur point de vue). Or ce sens profond, la connotation originel, le noyau du cliché est le même que celui du barbare des années 70. Je pense que cela n’est pas un hasard. Les clichés ont un noyau qui ne disparaît jamais, seul les connotations ajoutés lors de l’évolution du cliché précédemment évoqué disparaissent. Les cliché ont un cycle de vie en trois étapes. • Nouveauté, le cliché est découvert ou redécouvert avec uniquement son noyau, sa connotation profonde. • Référence, le cliché s’enrichit de connotation et son sens global change. • Cliché parfait, le cliché s’est enrichie d’un nombre maximal de connotation secondaires et ne peut plus évoluer.

Nouveauté

Références

Cliché parfait

Les clichés ont donc un cycle de vie. Immuable et tragique. Il les condamne dès leurs apparitions à une disparition inévitable avant d’être redécouvert à nouveau.



On a donc un cliché qui est la pour nous servir de raccourcit, mais qui doit être répéter pour fonctionner, nous sommes lassé de ce cliché et le forçons à évoluer, le rendant ainsi plus fort sémantiquement, finissant par le rendre trop lourd pour son propre poids, le faisant disparaître avant d’être redécouvert. Les connotations que les clichés transportent sont constitués d’un sens profond, immuable dans le temps, de connotation secondaires, qui s’accumulent avant de disparaitre lors de l’oublie du cliché, et d’un sens global qui résulte du cumul de son noyau et des connotations secondaires, sens global qui change à chaque nouveau cycle du cliché. Le cliché est donc une brique sémantique que nous devons détester pour la voir évoluer, sinon is devient un code. Ces clichés sont plus que des outils, il définissent la culture commune par leurs présences ou leurs absences. Le sens que nous leurs donnons dépend de notre vision du monde, de nos réflexions personnelles et de notre connaissance de leurs histoire. Leurs évolutions nous renseignent sur l’humanité et ses pensées à une période précise. Prenons l’exemple du vampire. La base du vampire moderne (en occident, en Asie le vampire est plus souvent associé à la revanche et à l’emprisonnement) peut être placé au Dracula de Bram Stocker. Ce Dracula était un symbole du mal sans concession, très âgé, à la pilosité hyper développée, animal, en une expression, un anti-humain. Le vampire revêt par la suite une image plus noble, incarné par Bella Lugosi il devient un symbole de l’humanité corrompu. De nos jours, le vampire est plus humain, révélateur de la lutte de l’humain contre ses propres passions. à travers son humanisation le vampire est devenu ce qu’il est mais garde un noyau d’animalité, de non-humain, de nature. Il révèle que le vampire qui nie sa propre mort, ne peut le faire qu’en tuant, en niant la vie des autres. En marquant son déni de la vie il marque son déni de la mort. Mettant ainsi en exergue le lien immuable et logique entre vie et mort. Renvoyant à cette loi naturelle éternelle et incontournable. Les clichés nous permettent don bien de voir les évolutions des préoccupations



de l’humain dans le temps mais aussi ses préoccupations essentiels. Ils nous renseignent alors sur la nature profonde de l’homme. Les clichés nous renseignent donc autant sur les préoccupations de l’humain sur une période précise mais aussi sur celle qui traversent les époques et sont fondamentales. Je pense que le décalage entre les vieux clichés et les clichés modernes est du à la différences entre le sens global de la version du cliché dans un cycle ancien et un cycle moderne. Mais si nous parvenons à les comprendre c’est bien que le sens profond, le noyau reste le même. Savoir identifier les clichés est utile à toute personne souhaitant raconter une histoire, quelque soit son média, graphisme, écrit, peinture, tout les conteurs modernes. Connaître le fonctionnement des clichés nous permet de jouer avec sans en détruire le sens profond. On a donc la possibilité de tordre les clichés, les prendre à rebrousse poil, jouer avec la culture commune, racontant ainsi une histoire de façon unique et donc remarquable. Car on connaît les connotations que l’on peut changer et celles qui sont immuables. Même les codes, comme dit plus tôt, sont des clichés discrets. Si l’on connaît les règles qui régissent les codes et que l’on sait identifier le sens profond des codes ont peut leurs apporter des modifications et jouer avec leurs sens, leurs connotations et leurs manifestations graphiques. Les signes sont des outils puissants pour les manieurs de sens, les designers. Car si l on sait comment représenter les choses. On sait comment transmettre un message en jouant avec la culture communes car les clichés ne sont que l’expression de la culture commune. Les clichés sont donc vital pour notre façon de raconter les choses. Mais alors, si le sens profond des clichés est le même à travers les ages, les histoires que nous racontons ne sont que des variantes dépendant de la culture commune et donc de l’époque. Je dois alors évoqué la théorie du monomythe de Joseph Campbell. Il y dit que toutes les histoires que nous racontons depuis la nuit des temps ne sont des variations du même récit. Seul la forme changerait selon lui. Cela rejoint sur un point ce qui est raconter ici. Car en donnant les



mêmes outils sémantiques au différents créteurs, on devrait voir ressortir les mêmes histoires raconter de façon différentes. Nous condamnant ainsi un un univers de création limité. Se joue alors le rapport amour/haine que nous avons tous face aux clichés. Car cette amour naturel pour la nouveauté et ce rejet du cliché trop contraignant permettent de réguler le nombre de cliché et leurs état de vie dans leur cycle propre. Ce recyclage des clichés permet ,grâce à l’ajout des connotations secondaires , de changer les outils sémantiques et donc de raconter une histoire de façon différente. Si Campbell a raison, nous racontons la même histoire en boucle depuis la nuits des temps. Je refuse d’y croire, car l’imagination humaine est sans limites. Certes elle se nourrit du réel, mais la diversité des choses que nous racontons, avec l’infinie de possibilités à notre disposition nous ferrons toujours voir des nuances qui créerons quelque chose de nouveau. Le rapport d’amour/haine au cliché est donc un régulateur. Un régulateur qui s’arrange pour que les outils trop usés soient renouvelés permettant de nouvelles créations. L’amour est donc nécessaire à la redécouverte des clichés mais la haine est nécessaire à leur disparition.

Pourquoi nous détestons les clichés? Par ce qu’il faut les détester pour pouvoir raconter une bonne histoire.



Bibliographie La Guerre des Gaules, Jules CĂŠsar Le hĂŠros aux milles et un visages, Joseph Campbell Dracula, Bram Stocker



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