Revue peche mouche gratuite - gobages.com la revue

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Numéro 7

Norway, another way.

ISLANDE: De Test ailes l'or à l'argent. sedges JMC.

Gobages.com

Fête de la pêche à la mouche Argentat

Relâchez vos rêves... Novembre 201 2

Octobre 201 2

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8. De l'or à l'argent par Stanislas Freyheit 4. Test des ailes de

20. Fête de la pêche

44. Peser sa soie

Spent82

Patrick Faure

Faure

sedge JMC par

6. Norway another

way par Didier Rodriguez

Argentat 2012

par

42. Le lancer arbalète

par Francois

Rouillon

naturelle

par Patrick

47. La Dame de

Saint Ursanne une nouvelle de Bleuvague

Couverture : Gobages sur la Gacka photos de Yann Abdallah Gobages.com la revue est un webzine destiné à être lu en ligne et partagé en ligne. Vous pouvez l'imprimer dans le cadre d'un usage personnel, ne pas jeter ou distribuer sur la voie publique. Ce webzine est produit quand nous en avons le temps et l'envie, il rentre dans l'objet de notre association qui consiste à faire la promotion de la pêche à la mouche et la remise à l'eau des poissons.

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L’hiver, saison morte pour la mouche ? Pas si sûr.

I

l n’y a encore pas si longtemps, les moucheurs sortaient leurs fouets aux beaux jours, le temps de pêcher les grosses éclosions des mois de mai et juin puis ils remisaient leur matériel pour l’hiver. Les temps ont bien changé. Aujourd’hui les moucheurs pêchent toute l’année. Les truites, même si elles occupent toujours une place de choix dans leur cœur ne sont plus les seules recherchées. Les ombres, les poissons blancs, les carnassiers, les bars font aussi partie des partenaires de jeu courants du pêcheur à la mouche moderne. L’automne par exemple est la saison rêvée pour trouver des ombres au sommet de leur forme. Même si les rivières pêchables sont rares en France, les possibilités de prendre du bon temps au bord de l’eau offertes par le vieux Rhône ou la Dordogne sont grandes. La Fête de la Pêche à la mouche et de la Dordogne qui s’est tenue récemment à Argentat a été l’occasion de mesurer la vitalité de l’engouement des pêcheurs pour ce poisson. Le potentiel offert par la pêche en mer est immense. Le bar est actuellement très agressif et c’est le moment de profiter de sa présence près des côtes pour lui proposer vos streamers. Si vous habitez dans les terres pas de panique. Les brochets, les perches, les sandres voire les silures sont eux aussi au top de leur forme. Il n’est pas une rivière, un canal ou un étang qui ne permette d’avoir une montée d’adrénaline au moment de l’éclair qui se produit lorsque le prédateur engloutit en surface un poissonnet de fibres dans un remous gigantesque. Pas besoin d’avoir une technique irréprochable pour avoir des touches, il suffit juste d’essayer. Mais l’hiver, c’est aussi le temps des salons, de la préparation des voyages, de quelques sorties entre amis en réservoir, du rêve et des lectures. C’est ce que nous vous proposons sur notre site Internet qui connaît tous les ans un regain d’activité à cette saison tout comme dans cette webrevue. Comme toujours chez nous, le partage et la gratuité sont la règle. Pas besoin d’abonnement, de se déplacer chez votre buraliste ou de codes d’accès pour se connecter. Un simple clic suffit pour ouvrir ou télécharger la revue. Encore une fois le sommaire est très riche et nous avons dû faire des choix dans les articles à publier. J’en profite pour remercier ici tous les contributeurs qui avec patience et gentillesse nous ont proposé leurs services. Grâce à eux, et à toute l’équipe qui réalise la revue, je suis certain que vous allez passer un bon moment à feuilleter la gob’revue. Fred

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AILE DE SEDGE JMC

Aile de sedge préformée en matière synthétique par Spent 82

Aile de sedge préformée en matière synthétique légère, translucide, avec de fines marbrures. Ce produit existe en 3 coloris : Gris, marron clair et noir. Le test porte sur les ailes de couleurs grises et noires. Le produit présenté sous pochette plastique, est composé de 12 ailes préformées (je devrais plutôt dire

UTILISATIONS: Avec des ailes de sedge… on monte des sedges ! Produit parfaitement adapté, ces ailes permettent de monter des sedges légers qui ne vrilleront pas les bas de ligne fins. Sur des hameçons H14 et H16 standards, les proportions sont parfaites. La fixation se fait très facilement, la matière Les petites nervures présentes sur la dans laquelle sont thermoformées les ailes matière donnent une impression de réalité intéressante, surtout sur la version grise. La est vraiment fine et suffisamment souple. version noire est moins translucide.Je

CONCLUSION :

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thermoformées) dans une matière synthétique très légère qui se rapproche beaucoup du médallion (produit que j’utilise déjà pour le montage des ailes d’éphémères). Chaque aile mesure environ 1,5cm de long pour 3mm de large. Une pochette permet de monter 6 sedges. regrette qu’il n’y ait qu’une taille d’aile dans la pochette. J’aurais bien essayé ce produit sur un bon gros sedge en Hameçon de 10. La taille des ailes ne s’y prête pas vraiment. Les ailes font preuve de solidité, on peut tirer dessus, les déformer et les remettre en place, elles ne bougent pas. Dans le cas de poissons gourmands au coup du soir, cet avantage peut s’avérer intéressant. Les possibilités de montage (en parallèle, en «_v_», à plat légèrement superposé) donnent une couverture d’imitation intéressante.

Les + du produit:

La fiche de montage pour vous guider dans Je trouve ces ailes de sedge vraiment bien l'utilisation des ailes de sedges est adaptées à leur utilisation, bien plus solides, disponible sur le site : légères et réalistes que des plumes vernies Sedge Para Black ou pas. La gamme de couleur est complète, la forme de l’aile thermoformée bien proportionnée pour des hameçons H14 et H16.

- La gamme de couleur permet de couvrir une large palette d’imitation. - La souplesse, la solidité et la finesse de la matière. - Utilisation et mise en œuvre a la portée de tous. - La forme de l’aile bien proportionnée.

J’aurais aimé que la quantité d’aile présente dans la pochette soit un peu plus conséquente, 12 ailes, cela permet de monter une seule série de 6 sedges.

- La taille unique des ailes dans une pochette. - Le nombre d’aile dans une pochette.

Les ­ du produit:


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Norway, another way

Ne voulant pas déranger les ombres de la Glomma, histoire de les laisser tranquilles pour “Patpêche » ! par Didier Rodriguez

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epuis le pont, Patrice regarde, inquiet, l’eau pourtant limpide à deux doigts d’envahir la pelouse du camping et menacer les premiers mobil­homes. L’eau est vraiment claire mais à la voir, furieuse, rouler contre les buissons, recouvrir les caltha palustris et quelques morceaux de prairie, nous nous doutons bien qu’il se passe quelque chose. Il a encore plu une bonne partie de la nuit mais notre hôte, Tor GrØthe, le sourire aux lèvres nous invite à nous préparer.

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Hemsedal compte deux mille âmes l’été, goulûment. Notre guide provisoire, affirme dix mille en hiver. utiliser des bas de ligne de neuf mètres et nous recommande d’être pointilleux dans Le parcours débute au pied de la station de la sélection des artificielles car le poisson ski sous la forme d’un torrent impétueux ; est extrêmement sélectif. plus bas dans l’ancienne vallée glaciaire, il s’étale sur plus de cinquante mètres de Malgré les conditions, rendant le wading large comme un sage chalk stream. très aléatoire, nous constatons la présence de nombreux pêcheurs. La renommée du C’est sur ce dernier secteur que nous allons coin et la relative proximité d’Oslo en font faire connaissance avec la Hemsila. La un haut lieu de rencontre des moucheurs végétation immergée nous fait estimer un norvégiens. Cela explique le niveau niveau supérieur à la normale de l’ordre de d’éducation de ces dames mouchetées qui soixante­dix ou quatre­vingts centimètres. s’arrangent toujours pour se tenir au­delà Pourtant à intervalles réguliers quelques de distance de lancer. museaux avides crèvent la surface


frustration car il s’agit d’un superbe cours d’eau, réputé, dans sa partie basse, pour les migrateurs. Les conditions sur la Holselva semblent favorables. Tor nous a recommandé d’utiliser des imitations un peu plus grosses sur ce parcours. En cette fin de matinée, les montages que j’utilise en début de saison sur la Dordogne font un malheur. Patrice n’en revient pas de voir un modèle si basique faire un carton. Faut­il que je dépose un brevet ? Sauf que, passé l’heure du casse croûte, ce satané vent se lève et anéantit toute ambition que l’accalmie du matin avait fait naître.

Pour résumer : nous avons des poissons très sollicités, une portion très large, une eau cristalline qui s’écoule lentement dans cette partie plane, la possibilité de wading quasi nulle en raison du niveau, il faut arriver à détecter l’insecte choisi malgré la distance et enfin réaliser une présentation parfaite que contrarie sans cesse dieu Eole quand il ne met pas un terme définitif aux éclosions. Cependant la taille moyenne d’une prise sur la Hemsila incite à persévérer toujours plus. Un bas de ligne 6x semble un minimum raisonnable, en tous cas c’est ce que conseille Tor à raison (pardonnez moi

Une météorologie optimale n’étant pas vraiment au rendez­vous, nous n’avons pu exploiter toutes les possibilités lors de notre séjour mais promener sa mouche devant des truites de quarante cinq ou cinquante centimètres ce qui représente ce vilain jeu de mots) car mes essais en 7x seulement une taille moyenne pour la ont eu chaque fois la même sanction. Hemsila laisse rarement indifférent. Refus, manqués, casses furent la règle et quelques prises, la cerise sur le gâteau, tout cela nous ramenant à beaucoup L’accueil, l’hospitalité, la gentillesse et les d’humilité. conseils de Tor Les jours qui suivent sont plus secs, la précieux rivière baisse nous montrant son vrai (http://www.hemsila.no/id30.htm) visage et les possibilités qu'elle peut offrir apportent une dimension particulière au sans pour autant rendre opérant le secteur voyage et donne un goût de revenez­y. amont, demandant une période d’étiage Sans compter la multitude d’options halieutiques, comme les nombreux lacs pour dévoiler les coups pêchants. La Borgundselva, encore plus haute que la d’altitude sur la zone d’Hemsedal, qu’offre Hemsila et balayée en permanence par un cet attachant pays où les arbres poussent vent à décorner les Elans, ruina tout espoir sur le toit des maisons. de pêche, seule demeure une immense .

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De l'or à l'argent par Stanislas Freyheit

Rando pêche en Islande Acte 4/4

Il faudrait sûrement 4 heures pour faire le tour de cet immense lac. Mais nous avons acquis beaucoup d’expérience dans la pêche en lac, et nous avons maintenant les meilleurs spots

Chercher la cassure des lacs islandais, la clé de la réussite….

rapidement. Tout n’est qu’une histoire de cassure. Les truites se tiennent souvent en bordure des pierriers aquatiques et des herbiers. C’est une

Dicton islandais « Si le temps ne te plaît pas, attends 5 minutes ! »

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tenue logique car elle leur apporte un refuge (les pierres) et de la nourriture (les herbiers) Les sensations de pêche sont au top, mais le vent incessant est un fardeau.

Le Stan aux anges, qui remplit le réservoir de rêves… Il nous est parfois arrivé de rater trois fois de suite les poissons au ferrage, et de les prendre au final ! Lorsqu’on aborde un nouveau lac, il faut La pêche est généreuse en Islande, et nous constamment marcher quelques kilomètres avons tous pris sensiblement la même quantité pour pêcher avec le vent dans le dos. La rive face au vent est sensée être la meilleure car elle reçoit les flux d’insectes, mais pour la pêche au streamer, la logique veux que l’on choisisse l’autre berge. La pêche au streamer restera la plus efficace tout au long du voyage… Le vent est à double tranchant : il vous rabote la gueule et vous empêche de pêcher lorsqu’il est face à vous, alors qu’il vous soutient dans votre marche, et propulse la soie au loin lorsqu’il souffle dans votre dos. Marco, pêcheur infatigable, n’avait pas peur de fouetter face au vent pour raquer un gros fish. En Islande, il faut donc pêcher avec le vent de fishes… comme complice, car vous céderez avant lui ! Rares ont été les moments où les lacs étaient au Nous n’avons noté aucune différence dans les repos, calmes, la surface apaisée. couleurs efficaces des streamers. Toutes les mouches marchaient, le seul problème était de Le peu d’occasions où nous avons rencontré localiser le poisson. des lacs d’huile, les portes de la nymphe à vue Toutes les couleurs étaient efficaces…. s’ouvraient à nous. Etant un novice de la pêche en eaux closes, j’ai La pratique de la plus belle des pêches est regretté de ne pas avoir plus pratiqué la pêche possible en Islande. Car bien que le fond soit en réservoir pour maîtriser mieux les lancers sombre, l’eau reste toujours limpide. C’est lointains et surtout les techniques gagnantes de simplement ce foutu vent qui empêche réservoir (bobbies, chiros….) d’exercer l’art si cher à Philippe Boisson. En Mongolie, en eau teintée, ou sur les bordures noires islandaises, Marco fait mouche en NAV… Mais attention, il ne faut pas croire que parce que ces truites sont voraces, elles sont faciles à prendre en nymphe à vue. Les berges sont souvent en surplomb, et l’eau est tellement cristalline que ces diablesses vous voient approcher de loin, et s’enfuient en laissant derrière elles un fin sillage en surface. Parfois un sillage caresse la surface, petit requin d’eau douce… Nos streamers ont rendu les poissons dingues. Bien souvent ces truites, surexcitées par la nage Moi qui crache tellement sur la pêche en saccadée du streamer, rataient leur cible sur les réservoir, j’en suis revenu ! premières attaques. Si vous me lisez et que vous allez pêcher dans

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Petite mais si belle…

Joli bécard bien fier !

La robe tourne à l’argent….

L’instinct du hot spot !

La nuit est silence quand le vent décide de mourir…

Marco


Ca manque un peu de thymallus l’Islande… !

De retour en France, l’immensité des lacs nous manque….

Nos mollets se souviennent encore de ces satanés pierriers… La connectique des lacs…

o, une fois de plus trouve la pépite…

Mon charr, ma fierté !


Catch and release… Le reflexe des jeunes pêcheurs !

des lacs sauvages, ne faites pas la même erreur que moi, développez votre lancer, et intéressez vous aux techniques de réservoir, vous ferez plus de poissons ! Nous avons réussi à nous faire vraiment plaisir, mais je n’imagine pas le carton qu’aurait fait un pro du réservoir comme Bertrand Jacquemin ou Laurent Gagneux… Nous avons également commis l’erreur de ne pas essayer de pêcher en soie plongeante dans les hauts fonds. Qui sait ? Les grosses truites étaient peut être là…. La pêche à la mouche en lac est totalement différente de la pêche en rivière. Il faut reprendre à zéro l’analyse de tous les éléments qui permettent de trouver la technique gagnante. J’ai adoré les paysages, l’esthétique et la combativité des poissons, mais il faut avouer que de « bananer » du streamer pendant 10

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jours devient vite lassant ! Nous revenons le lendemain sur ce grand lac, car nous suivons une rivière qui s’y jette. Elle nous guide dans une superbe vallée perdue, où paissent les chevaux semi­sauvages. Le spot de la confluence lac/ rivière est très prometteur ; le pierrier s’étale sur quasiment un kilomètre en s’effaçant vers le large dans une cassure béante, aux reflets turquoise


douloureusement mes articulations sur les pierres de lave abrasives comme jamais. Je fixe la plus petite mouche de ma boîte (hameçon de 16 !) sur mon 22 centièmes, qui s’apparente vraiment à du câble. J’ai honte ! Lumière. Discrétion. Position ; j’ai les pleins pouvoirs pour présenter mon cadeau piégé au roi du pool. Le vent me laisse faire un premier posé correct, Encore lui ! qui n’intéresse pas le moins du monde monsieur bécard, qui papillonne des pectorales opalescents. Les truites sont là, c’est certain. Voilà pour la description du fond. En ce qui sereinement. concerne la forme, le paysage m’évoque étonnamment un lieu situé entre Hawaii et la Je suis un peu vexé qu’il ne s’intéresse pas à ma Nouvelle Zélande. Il souffle un vent à dépeloter belle nymphe. Puisqu’il le prend ainsi, je vais passer au niveau les moutons, et le soleil brille comme jamais. supérieur. Une bonne pheasant tail bien dodue Sur l’écran de l’immense lac ressort une sur hameçon de 12 va lui faire frétiller les alternance entre le vert émeraude, reflet des papilles. herbiers, et l’anthracite des pierriers. Même lancer correct. Même ignorance débonnaire. Est­il aveugle ? Atmosphère idyllique. Nous n’avons pas pu tout prendre en photo, et Alors puisqu’il veut jouer à ce petit jeu­là, on va jouer ! c’est tant mieux ! Nous entrons dans l’eau, et nous nous plaçons Je branche une grosse nymphe à bille hameçon stratégiquement pour stripper nos streamers de 8. Je lance plein amont pour que mon au­dessus des herbiers, où les truites sont en « plouc » ne le fasse pas fuir. Je vois ma mouche stabilisée entre deux eaux poste. Une « riquette » Islandaise… par l’épaisseur de mon nylon. Elle reste en Les poissons ne sont pas gros, mais ils sont bien suspension à la gauche du poisson, véhiculée là, et bien argentés ! Le lendemain, le soleil est toujours au rendez par un courant d’une extrême lenteur. vous. Je décide d’aller pêcher seul l’après midi, Le reste n’est qu’une fiction qui devient réalité, car j’aime ces moments de solitude avec la ou mieux, une aquarelle de James Prosek qui nature sauvage, j’ai quelques confessions à lui prend vie sous forme d’un dessin animé. Mon bécard se met à tourner la tête vers mon faire. Je remonte la rivière pour accéder à un lac qui côté, et sa gueule tordue se retrouve avait donné de bons résultats. Je scrute les jolis parfaitement aligné dans ma ligne de vision. pools dans lesquels ont avait cru apercevoir des poissons de taille décente, quelques jours Dans l’ordre de gauche à droite : ­Les yeux de Stan, écarquillés auparavant. ­ L’adrénaline qui pulse dans mes veines Les premiers pools regorgent de truitelles. Je m’approche discrètement d’un pool ­ Une couche de verre polarisant ­Une mouche en lévitation prometteur. Soudain, le rêve percute la réalité en pleine ­ Un bécard aux proportions indécentes face, et j’aperçois un somptueux bécard Cette gueule tordue s’ouvre, révélant le blanc si suspendu en lévitation dans ce pool cristallin, lumineux qui tapisse la gueule des grosses truites, et se referme sur ma nymphe. tel un roi sur son trône. Instinctivement, le ferrage tombe de lui­même. Mes premières pensées sont les suivantes Le poisson n’a aucune chance en 22 centièmes Toi mon gros, je ne vais pas te louper ! dans ce micro pool, et se retrouve vite dans mes Je m’approche à genoux, en traînant mains.

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Première

Haaam !

otre der niè re v isio nd es t erre s sa uva ges de gla ce, d’o r et

Observation…

Pique nique douille… Aujourd’hui, c’est streamer

d’a rge nt…


Comme un air de Mongolie….

Et on treuille, on treuille… Que c’était bon !

Dis bonjour à l’appareil de Stan !

Mon dernier poisson en Islande… Un petit charr.

Lingot d’or en lacs obscurs…


d’ordre spirituel. Mais je sais que tous ces souvenirs indélébiles infuseront pendant des années dans les profondeurs de mon esprit comme un spiritueux s’affine dans une bonne cave. Le relent

Encore quelques poissons en sèche…

C’est l’heure de compter son or, et d’examiner tous les détails de ce trésor. Cette truite est dans un état de maturation extrêmement avancé ; son système endocrinien a catalysé l’alchimie des couleurs, des formes et des proportions pour tordre son bec au fil des mois, afin d’arborer le sourire le plus incisif, celui qui assénera les plus violents coups de mâchoires sur les frayères, où il tentera de séduire sa concubine. Voila une autre pièce inestimable du musée de la beauté de la nature islandaise. La belle repart dans son élément, elle attendra de meilleurs jours pour rallier les lacs plus accueillants que ce pool étriqué. J’ai déjà mon exploit halieutique du jour avant d’atteindre le lac promis. Je me permets donc de célébrer ce moment précieux en sifflotant avec mon ami le courlis qui me suit en sautillant dans les tourbières. J’arrive au lac convoité, que je commence à bien connaître. Je file directement à la cassure abritée du vent que je nommerais en d’autres termes un « hot spot du feu de Dieu » ! Je fais trois truites. Normal. C’est le neuvième jour de pêche, et je commence à sentir que la magie du début, s’évapore petit à petit… Nous avons percé de jour en jour le mystère des lacs islandais. Nous connaissons la robe des poissons, et nous savons comment les berner.

de la réalité se diffusera dans le tanin du rêve. Mon esprit pourra ensuite s’abreuver de ce distillat de bien­être, qui s’évaporera dans des volutes de souvenirs, et dont je savourerai chaque goutte. Parfois, partir pêcher dans la nature sauvage, c’est comme plonger la main dans un sachet de friandises.

Le plaisir est toujours là, mais moindre. Mais j’ai l’habitude. C’est le spleen du moucheur. Il est Au début, le plaisir est intense, complet, inhérent à la destination. C’est une affliction puissant.

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On observe les poissons sous toutes les coutures, on les compare à ceux que l’on connaît, on les estime. Nouvelles couleurs, nouvelles sensations. Puis on se gave, on se goinfre de nature extrême. On dévore des yeux les courants et les bordures, on avale les kilomètres de berges, et

candide d’un enfant : « le poisson, il a voulu de moi ». Les détails de la robe que j’ai examinée pendant si longtemps dans les magazines de pêche prennent vie… Et ce bécard, il a voulu de moi. Et pour le remercier, je le relâche avec ce sourire figé qui me donne l’air d’un abruti. Je célèbre une fois de plus la victoire, affalé dans l’herbe moelleuse, en admirant les solfatares de ma cigarette dans le ciel chargé, et en me disant surtout de ne pas oublier que la vie est belle. Dans un écran de fumée, je laisse se cristalliser les images de ma capture, et je flatte mon ego pour le coup de ligne, sous le regard invisible de l’esprit de la rivière. Je rentre au camp, en gambadant dans la toundra. Mes deux camarades sont à la sieste. La question classique est inévitable. Marco me répond qu’il a pris 2 charrs ; oui mais 2 gros charrs. Il me montre les photos sur son reflex rutilant. Je suis jaloux. C’est le genre de charr dont je rêvais. Bossu, bicolore, arraché d’un bec arrogant comme un bulldog. Mais Marco le mérite, c’est un des meilleurs pêcheurs à la mouche que je connaisse. Il est à la fois calme et précis. Il possède un sens de l’eau très affûté. J’aime à le regarder pêcher à vue, c’est inné pour lui. Une fois de plus, il remporte le magot, il rafle la mise.

Tous les plus beaux poissons sont bien au chaud dans son panier en osier numérique. Il nous reste un dernier jour de pêche. Nous on s’enfile des grandes lignes d’horizons. avons décidé de finir notre boucle en longeant Nos petits campements de misère, pour la mer, il nous reste 60 kilomètres jusqu'à l’arrêt quelques secondes de somnolence dans une de bus. On se donnera 3 jours pour les orgie de pêche… parcourir. On atteint ensuite la satiété, l’esprit est repu, et on aime à être fier d’avoir vérifié que la nature La pêche au streamer nous fatigue. Nous ne est bien aussi belle que dans nos rêves. faisons pas les enfants gâtés, mais nous sommes 88. Marco, force jaune…. gavés ; Nous avons pris notre dose de nature. L’autosatisfaction est au summum. J’ai maîtrisé On aurait aimé plus de pêche palpitante en la destination, au delà des mes peurs. J’ai réussi sèche ou à vue. Mais il en est ainsi pour les lacs à être plus malin que la nature. islandais J’ai toujours cette si belle phrase d’Henri On ne regrette rien. On passe le reste de l’après Limouzin en tête, qu’il prononçait avec l’air midi à recharger les batteries, allongés au soleil

Novembre 201 2 Cette robe !

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Un autre charr, plus maigre

Le retour… les souvenirs commencent à infuser…

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sur des confortables coussins de lichens. Les truites peuvent voguer en paix, nous avons pris notre part de paradis ici en Islande, elle nous sera déduite après notre mort. Dans les livres que j’ai dévorés durant mon voyage, Sylvain Tesson affirme que dès que l’aventure est finie, il a déjà envie de repartir. Je ne suis pas de cette école. J’aime à reprendre le cours des choses, retrouver mon confort d’homo sapiens de 2012, après avoir vécu pendant 15 jours comme un homo erectus. Je prends autant de plaisir dans la préparation du voyage que lorsque sur le chemin du retour, le chapelet des kilomètres qui s’égrainent me fait accoucher des lignes de mon récit. J’aime les nœuds de connexion célestes que sont les aéroports. Le fluide en mouvement des esprits voyageurs me rappelle que de partir c’est bien, mais que de revenir, c’est encore mieux Car le syndrome de la berge opposée n’est qu’un mythe, un mirage. On se persuade d’aller voir ailleurs seulement pour être sûr qu’on est bien chez soi.

Moselle, pour lui raconter mon odyssée, et lui dire que si les hommes n’avaient pas souillé ma rivière natale, elle serait la plus belle du monde. Finalement, on nous prend en stop au bout de 5 kilomètres de marche. Bitume, chiffres, et formes carrées. Ecrans de contrôle, moteurs et horaires. Décollage, transferts et péages. Heureusement, il nous reste, pris dans la glace de nos esprits, l’argent du ciel d’Islande, et l’or de ses truites. Si vous n'avez pas lu les trois premiers chapitres de cet opus, ils sont disponibles dans la rubrique "voyages de pêche" accessible depuis la page d'accueil de gobages.com. Si vous avez aimé sachez que Stan l'auteur vends des mouches sur le site mr­ mouches.com mais pas que. En effet il publie dans le blog associé à la boutique des interviews forts sympatiques.

C’est pour cette raison qu’après chaque voyage je retourne me confesser au bord de ma

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Fête de la pêche à la Mouche et de la Dordogne

par Patrick Faure

Argentat Octobre 2012 , 2ième édition

L

un maximum de personnes « du monde de la e week­end du 13 et 14 octobre avait lieu sur les mouche ». quais d'Argentat la 2ème édition de la fête de la Notre site avait, bien entendu annoncé cette fête et était présent dans un des chalets. L'occasion pour pêche à la Mouche et de la Dordogne. nous de rencontrer les « gobnautes » et de présenter Cette manifestation organisée par l'AAPPMA locale, quelques animations. la Garlèche d'Argentat* regroupe au bord de la Dordogne, professionnels de la pêche à la Mouche, Voyons tout cela dans le détail... associations diverses, sites internet etc... Le vendredi matin sur les quais : * garlèche ou gardèche : nom donné aux vairons en Limousin. Cela permet aux moucheurs, tout en se promenant sur les magnifiques quais d'Argentat, de rencontrer

Il faut maintenant monter les chapiteaux qui accueilleront les professionnels. Dès le jeudi, les premiers chalets apparaissent.

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Pendant ce temps, Matthias, confortablement (lol) installé dans son bureau, s'arrache les cheveux pour savoir où il va « caser » tous ses « invités.

Tout le monde met la main à la pâte et le chapiteau prend forme.

Ici, ce sera le stand Gobages.

Puis vient le temps des finitions.

Le vendredi soir, tout est monté, les pro commencent à arriver et installer leur matériel.

Vient donc le moment du presque traditionnel (ben oui, c'est deuxième) repas qui réunit l'équipe organisatrice et les exposants. Un très bon moment de convivialité, même s'il ne faisait pas très chaud (c'est un euphémisme) au bord de la Dordogne. Nous étions il est vrai à une heure « légèrement » avancée de la nuit.

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Vue d'ensemble de la fĂŞte sur les quais d'Argentat.


Le stand des guides de pĂŞche (Patrick Taillard


d).


Ici les coqs des Mouches Guy Plas Le grill tourne à plein régime avec Mimosa comme Chef. Fishbone, « chez Eddy »

Guides de pêche

Le samedi, la fête commence, florilège de photos : Quelques exposants, Aspe­Angler

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Dumont Rod (l'ami Bertrand) et Pêche à Soie


Avozetto De « vieilles connaissances » sur le stand de Charles La FFPML était elle aussi présente. Gaidy Et bien sûr le stand Gobages...

Nos voisins du Club Mouche Sarladais, avec un Stephan en train de s'installer, un peu seul stand animé où le montage de mouche se pratique parfois en musique!

Mais ça change dès qu'il commence à monter des mouches … Ca discute ferme … sans doute du dernier échange de mouches.

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Un des superbes coqs de la maison Guy P


Plas.


D'excellents monteurs Ă l'oeuvre.



Les animations Gobages...

Le "Prête moi ta canne" deviendra une habitude !

Démonstration par Vincent Béraud (Mouches Guy Plas) d'une plumaison de coqs.

Essai d'une « mouche » … qui fera beaucoup parler sur le forum, comme sur le bord des quais d'Argentat.

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Interview de Matthias Parre Une histoire de passion ...

Id'Argentat. l est l'un des initiateurs de la fête de la pêche à la mouche Nous l'avons rencontré à l'issue de la deuxième édition.

par Patrick Faure

telles structures sur les quais d'Argentat et au bord de la Dordogne, à cause des normes de sécurité et de tous les obstacles présents sur le site. "Mais c'est en essayant les mouches que l'on trouve la bonne..."

Gobages : Matthias, la deuxième édition de la fête de la pêche à la mouche vient de s'achever. Quel premier bilan peux­tu tirer ? Gobages : Le proverbe dit jamais deux sans trois, verra t­on à nouveau pousser des chalets sur les quais d'Argentat l'an prochain Matthias : La FDLP, cette année comme l'an passé, a été bien sûr ou à un autre moment ? une réussite. Nous avons créé un rassemblement de passionnés, de professionnels et d'intéressés de tous âges venus des 4 coins de Matthias : Après 2 manifestations, nous allons faire le bilan avec la France sur les bords de notre belle Dordogne à Argentat, çà c'est les points positifs et les points à améliorer afin d'envisager une déjà génial! éventuelle 3ème Fête de la Pêche à la Mouche et de la Dordogne. Ce qui a le mieux marché, c'est bien sûr notre rivière..! Et oui, Elle devrait être prévue pour Octobre 2014, ça nous laissera le créer une manifestation dans une salle aurait obligé le public à temps de trouver des sponsors, des partenaires et des bras rester concentré, mais garder ce même public de pêcheurs au "motivés" pour nous aider à créer la "plus belle" fête de la pêche à bord la Dordogne sans pêcher, c'est quasiment impossible... la mouche en France... ;) Il est possible que le lieu soit différent mais tout aussi charmant et Et j'en souris encore, de cette phrase, souvent entendue pendant toujours au bord de la Dordogne... le week­end: "Sympa cette fête, désolés on reviendra tout à l'heure mais là on va pêcher!" Pour tous ceux qui souhaiteraient nous aider ou participer à la prochaine édition, vous pouvez nous contacter via notre site : Bref, ce furent 2 années très riches en rencontres, en échanges et wwww.aappma­argentat.com ou sur matthias.parre@laposte.net en plaisirs autour d'une même passion... Gobages : conclusion, tu as quartier libre pour faire la conclusion ... Gobages : Vous êtes une équipe de "copains" à vous en occuper, n'est­ce pas à la fois là votre force et votre faiblesse ? Risque de Matthias : En conclusion, un grand merci à tous ceux qui ont lassitude par exemple ? participé, de près ou de loin, à la réalisation de nos 2 manifestations. J'ai été très touché par les copains qui ont pris des Matthias : Effectivement notre force vient de la bonne ambiance jours pour venir nous aider, ils se reconnaîtront. ;) de notre groupe autant à la pêche qu'aux réunions à l'aappma Merci à Gobages.com d'avoir participé pendant ces 2 années et à d'Argentat. tous les autres stands pro ou pas de nous avoir fait confiance. Notre faiblesse ? Elle vient peut­être du fait que la plupart des membres du bureau Ah, j'allais oublier... merci à nos femmes qui nous supportent sont assez éloignés d'Argentat, et donc tous ne peuvent pas être toute l'année malgré notre maladie : "la passion..." présents quotidiennement sur les lieux pour l'organisation. Sans oublier que nous avons tous des obligations professionnelles et Halieutiquement,Matthias PARRE familiales. De la lassitude? nous, impossible!!! Gobages : Merci Matthias, un grand bravo à toute l'équipe et … à bientôt pour une nouvelle fête de la pêche à la mouche et de la Côté chalets et chapiteaux, il est assez compliqué de monter de Dordogne.

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DĂŠmonst


tration de lancer et d'adresse.


ExpĂŠrience, talent, amitiĂŠ et passion.



Des commerçants attentifs et du beau matÊriel.



Le lancer dans la peau. Cet h


homme est nĂŠ avec une canne au bout des doigts!


Le lancer arbalète par François Rouillon

Rassurez­vous, nous n’allons pas vous expliquer

comment transpercer d’une flèche tirée avec une arme médiévale de pauvres poissons venus gober en surface. La pêche à l’arbalète est en fait une technique de pêche qui consiste à utiliser le lancer du même nom. Très simple à effectuer et à apprendre, l’arbalète permet d’envoyer une mouche à courte distance (environ 2 longueurs de cannes). Comment effectuer un lancer arbalète ? C’est assez facile : en tenant la mouche entre le pouce et l’index de votre main libre, vous pouvez bander votre canne, c'est­à­dire tirer dessus pour lui imposer une flexion de sorte que le scion revienne vers vous. Attention alors à l’hameçon qui ne demande qu’à partir. La mouche doit être fermement maintenue par la pince du pouce et de l’index, au niveau de la courbure de l’hameçon. La libération de celle­ci la propulse alors vers l’endroit visé avec la canne. Bien entendu, la précision et la rapidité d’exécution s’acquièrent avec un peu d’entraînement, mais ce lancer est très facile à apprendre. La pêche à l’arbalète est principalement une pêche de bordure. Le plus discrètement possible, le pêcheur évolue sur les berges au ras de l’eau en scrutant les alentours avec ses lunettes polarisantes sur le nez. Les subtilités du placement, la discrétion de l’approche et les techniques de détection des

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poissons sous la surface s’apprennent avant tout avec la pratique assidue de la pêche à vue et avec la lecture des articles de Grégory Treille, Piam ou autres pêcheurs de renom. Une remarque cependant, j’ai quand même noté avec ma maigre expérience qu’une truite est beaucoup moins méfiante (et donc facile à faire mordre, au moins à ne pas faire fuir) quand c’est elle qui est en mouvement et nous immobiles que l’inverse. En gros, il est important de limiter au maximum les déplacements et de maximiser les temps d’attente sur les passages potentiels des poissons, soit qu’on en ait déjà vu passer à ces endroits, soit qu’on « les sente bien ». Un mot encore : être bien posté exige une couverture partielle du corps par un (des) élément(s) naturel(s) afin de se fondre dans l’environnement. Le plus possible, utilisez les buissons, les arbres, les souches, les carcasses de bagnole pour vous cacher. En bref, dissimulez vous et attendez un peu, le jeu en vaut souvent la chandelle ! Les truites évoluent très souvent au ras des berges à la recherche de nourriture. Elles effectuent un circuit d’alimentation qu’il convient de découvrir pour leur présenter notre imitation au bon endroit et au bon moment. La pêche à l’arbalète est une pêche de précision et de rapidité. Il est capital d’être toujours prêt à lancer sa mouche, c'est­à­dire qu’il faut maximiser le temps lors duquel elle est pincée par les doigts, avec une


bannière suffisante pour pouvoir lancer à bonne distance (2 longueurs de canne), mais pas trop grande car sinon, on n’a pas assez d’allonge pour bander la canne. Ma maigre expérience m’a appris à optimiser le temps d’efficience car un poisson peut apparaître n’importe quand et n’importe où. Il vous arrivera certainement d’apercevoir un poisson trop éloigné pour lui expédier une mouche à l’arbalète. Tentez quand même ! En effet, les truites (et les ombres) ont quand même une vision suffisante pour repérer le mouvement d’une larve d’assez loin, et la clarté de l’eau impliquant la pêche à vue conjuguée au caractère aléatoire du déplacement du poisson fait que vous avez quand même une chance. Soit il vient vers vous, parce qu’il a vu votre nymphe tomber ou qu’il a « entendu » son impact à la surface, ou parce qu’il change de direction par un heureux hasard, soit il continue son trajet et s’en va paître ailleurs, alors tant pis, vous aurez quand même essayé sans regrets.

Il est parfois intéressant d’expédier aveuglément une nymphe à proximité d’une cache à poisson (racines, berge creuse, souche, derrière un rocher…). Un exemple : l’année dernière, sur la Bienne, j’aperçois à ma droite une belle truite toute jaune d’environ 45cm juste avant qu’elle ne passe sous ma berge. Elle est littéralement passée sous mes pieds. J’ai anticipé et ai immergé ma nymphe à gauche à un demi­mètre de la bordure. La truite s’est jetée dessus en sortant de sous la berge et je l’ai prise. L’arbalète est indispensable sur les bordures encombrées et elle permet parfois de pêcher des poissons inattaquables avec d’autres techniques. Bien sûr, et c’est valable pour les autres, l’exclusivité de la pratique de cette technique est rébarbative et prive des avantages des autres. C’est donc une technique complémentaire à celles qui composent la pêche à la mouche. Et c’est dans la complémentarité que l’on progresse le plus…

L'arbalète vous intéresse ? Saviez vous qu'il est également possible de pratiquer la pêche à l'arbalète en mouche sèche? Sur le site gobages.com vous avez accès à cet article sur la pêche en sèche à l'arbalète

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Peser sa soie naturelle par Patrick Faure

Quel numéro pour une soie ?

Il faut peser les 9,15 premiers mètres de la soie (ça correspond en fait à 30 pieds). Pour réaliser facilement cette opération, Michel a La scène se passe lors de la fête de la Pêche à la fait fabriquer un meuble de 91,5 cm de long. Il ne mouche d'Argentat. J'étais avec Jean­Yves sur le lui « reste plus » qu'à compter 10 longueurs pour stand « Pêche à soie ». obtenir la longueur de test. Après avoir admiré la quantité de fils présentés, La soie est ensuite enroulée autour de la main. Une nous bavardions avec Marc de la fabrication des petite boucle signale la fin des 9,15 mètres. soies naturelles lorsque Michel, qui était à côté, nous pose une question : vous savez comment on détermine le numéro d'une soie ? Nous : « oui, le poids, les premiers mètres etc.. ». Notre réponse approximative n'a pas eu l'air de le satisfaire car il a aussitôt poursuivi : « je vous explique »

Puis vient la pesée. Bien sûr dans la vraie vie, le bas de ligne n'est pas présent, mais pour la démo , Michel a utilisé la soie de Bertrand qui a refusé q'il coupe son bas de ligne … mais ce n'est pas passé très loin (lol). La balance affiche 7,83 grammes.

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Michel explique à Jean­Yves (remarquez sa belle casquette gobages.com flushia !) qu'il va maintenant utiliser un tableau de conversion qui lui donnera la Chaque soie est ainsi pesée avant d'être emballée et correspondance en numéro de ces 7,83 grammes. son poids est inscrit sur un papier qui lui est joint. Cela permet, pour un même numéro de soie, de fournir au client une soie plutôt « lourde » (même si la différence est minime) qui chargera plus vite la canne ou une soie plus légère. La soie sera ainsi celle qui convient le mieux au type de canne et au « style » du lanceur. Merci à Michel et Marc pour leur accueil et leur disponibilité. Vous trouverez bien sûr d'autres informations sur les soies naturelles sur le site : Il existe un tableau qui donne les poids mini et www.pecheasoie.com maxi de chaque numéro de soie. Ainsi notre soie, dont les 9,15 premiers mètres pèsent 7,83, se situe dans la « fourchette » 7,39 – 8,16 grammes qui correspondent à une soie de 4.

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Calendrier 2013 Dispo Ă la vente sur gobages.com 21â‚Ź 46


Les confessions romancées d’un pêcheur mythomane *

La Dame de Saint Ursanne Il y a ceux, et c’est certainement l’écrasante majorité, qui placent le début de l’année en plein milieu de l’hiver avec son morne mois de janvier. Ceux, en plus petit nombre, qui utilisent comme point de repère le mois de septembre, comptant ainsi en année scolaire, sans doute parce qu’au fond d’eux, ils ont oublié de grandir. Ceux, et non des moindres, qui aiment l’aléatoire, attendant sagement le mariage de la lune et du soleil pour établir le premier jour de l’an ! Mon nouvel an à moi, et je vous parie que je ne suis pas le seul, se veut être le messager de l’espoir ! Il se doit donc d’être au printemps et opère sa naissance avec les belles éclosions, vers mi­mai. Mais surtout il coïncide avec l’ouverture de l’Ombre Commun : Thymallus thymallus pour les intimes, le poisson à « l’étendard », trésor de nos rivières, il est l’alter ego de Dame Fario ! Quoique plus fou, plus intrépide, plus imprévisible ! Que dire encore pour qualifier le poisson d’argent comme je me plais à l’appeler ? Capricieux ! Voilà, Thymallus thymallus le Capricieux ! J’en ai vu des fines cannes sur les berges des rivières de l’hexagone maudire à grands cris leurs aïeux, et leurs descendants aussi, utilisant des noms d’oiseaux très exotiques, après s’être cassé les dents, les pieds et même parfois le bambou sur un ombre « capricieux », y avoir passé tout leur RTT sans autre résultat que la frustration de ne pouvoir « travailler plus pour gagner moins ». C’est tellement compliqué l’ombre et dangereux pour les nerfs que, de l’autre côté de la Manche, les sujets de Sa Gracieuse Majesté ont classé ce poisson comme « nuisible ». Il ferait soi­disant de l’ombre à la truite en pratiquant une concurrence déloyale sur les nymphes de trichoptères ! Rien du tout ! Nos cousins ont

simplement peur d’y laisser leur flegme légendaire. L’Ombre, ça se mérite. Ce n’est pas ici juste une question d’expérience dans le choix de la mouche ou d’habileté dans le geste au moment du posé, pas plus que d’une aptitude digne d’un chamane sioux lors de l’approche ! Pour l’ombre, c’est une autre histoire. Qu’on se le dise une fois pour toutes : aux fantasques de Thymallus le beau, la réponse ne peut être qu’ésotérique et se transmettre de sage en sage lors de longues séances d’initiations. Mais parfois cela ne suffit même pas, alors il ne reste qu’à se raccrocher à la chance, implorer le hasard en espérant un coup de pouce du destin… Ma quatrième saison de pêche commençait à peine, le printemps doucement s’accrochait aux branches et c’est avec délectation que j’usais mes semelles en feutre sur les sentiers menant aux rivières. Si je pouvais me prévaloir d’un tout petit brin d’expérience en matière de truite, l’ombre à ce stade restait pour moi un mystère encore non élucidé. J’en avais bien aperçu quelques­uns çà et là. Le problème c’est qu’eux aussi m’avaient aperçu, alors, l’étendard dédaigneux, ils avaient passé leur chemin laissant mes mouches en plan, sans la moindre considération. Découragé par tant de mépris, j’avais choisi de filer à l’anglaise et par là­même d’ignorer une bonne fois ce personnage hautain. Nous longions la rive, le pas traînant, fatigués par une longue matinée de pêche débutée avec les caresses de l’aube. C’est Bertrand qui l’aperçut le premier. Il me fit un rapide signe de la main pour que je stoppe ma progression. Du coin de l’œil, j’observais mon ami.

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Sur son front commençait à se dessiner le sillon de la malice ! –– Ce type est anglais ! affirma Bertrand, sûr de lui. –– Ah ! Fut la seule réponse qui me vint à l’esprit. –– Si, si, je t’assure ! La soixantaine bien tassée, droit comme le I d’un Irish mist cream, la casquette en tweed, une 7 pieds 5 en bambou à la main, le lancé (lancer) académique à faire blêmir Joan Wulff, le tout planté sur une veine à ombre, c’est so british… –– Je croyais que les Anglais ne portaient pas les ombres en haute estime ? –– Ha, ça non ! Sauf qu’une fois traversé the Channel, ni une ni deux, les masques tombent, les convictions avec, et plus l’ombre d’un brouillard, Thymallus thymallus devient une cible acceptable ! –– Je sens là une pointe d’ironie, non ? Aurais­ tu un contentieux avec les «homards » ? –– Quand ils viennent piquer MES ombres, oui ! –– Et possessif avec ça ! Ils ne font rien de plus que nous ! Nous aussi, nous traversons une frontière pour taper les ombres du voisin. Disons toi plutôt, car moi les ombres : pffff !?? Et d’un geste éloquent je marquai mon mépris. Bertrand me toisa du regard et fronça ses sourcils épais. –– Quoi ? T’aimes pas les ombres ? –– Pas plus que ça, ce poisson m’indiffère ! Il insista en forçant la voix, contrarié : –– Mais personne, jamais personne, exception faite des Anglais quand ils prennent l’eau sur sol britannique, n’oserait abjurer de la sorte en reniant ainsi Monsieur le prince des courants,

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l’aboutissement en matière de Sainte Quête, à moins d’être complètement « zinzin » ou pire encore : « carpiste » ! Sans me démonter, je continuai mon semblant d’argumentaire : –– Eh bien le « kéké » des rivières, avec sa « mèche » en coin, sa petite bouche de nobliau et ses faux airs bling­bling, très peu pour moi et puis…, soupirai­je, il me le rend bien… ! Mon ami sembla réfléchir tout en me dévisageant longuement. Je m’attendais à une réponse qui ne vint pas. Au fond de sa pupille, une étincelle ! Son œil s’alluma et avec lui, Bertrand tout entier s’enflamma d’un rire compulsif à tel point que l’Anglais se figea dans son somptueux lancé. Bertrand à bout de souffle fini par lâcher un gros « Nooooooon !??!» traînant et bien sonore. Je sus alors que mon ami savait ! Il avait saisi d’où pouvait me venir cette bouffée de morgue. –– Tu fréquentes la région depuis trois, quatre ans peut­être et tu n’as encore jamais touché d’ombre ? T’es un vrai Peter Pan ma parole ! Je ne devrais pas me moquer, mais avoue­le : tu l’as fait exprès, non ? Ici par endroits, les ombres pullulent et supplieraient presque pour qu’on les arrache à la rivière. Alors, faut vraiment s’appliquer et plutôt deux fois qu’une pour ne pas réussir à en saisir au moins un de temps en temps ! T’as jamais songé à te mettre à l’ablette ou je ne sais pas moi, au macramé ? Bertrand, bon public de lui­même, s’esclaffait de plus belle. L’Anglais, intrigué par notre manège, s’était approché de nous. Il me regardait, curieux, me laissant penser qu’il venait de surprendre un morceau du monologue et par là même de percer un pan entier de mon intimité halieutique ! Il prit la parole : –– Ah ça, pour sûr, les ombres, c’est pas bien facile !!!! Tenez, l’autre soir j’en causais justement à Janine, ma femme ! Que je lui disais même : tu vois Janine dans ma vie, j’ai tout bien fait, sauf que j’ai encore jamais réussi à t’choper un bel ombre. Faut dire que d’là d’où que j’viens, les ombres, eh ben ça court par (pas) vraiment l’étang ! Pour sûr, dans la Dombes, du blanc en voici en voilà, mais les ombres, ça s’y plaît pas trop ! Nous lâcha d’une bouffée l’Anglais avec un accent bourguignon ou


quelque chose s’en approchant, mais très certainement aussi éloigné de l’Angleterre qu’aurait pu l’être une ballerine comparée à Bertrand ! Mon ami s’en étouffa presque et cessa tout net de rire avant de questionner, inquisiteur : –– Vous n’êtes pas Anglais, vous ? –– Anglais moi ? Quelle drôle d’idée bizarre vous avez là ! Ah ça, pour sûr, je suis pas ben Anglais, mais alors pas ben du tout ! Notez que j’ai rien contre les Tommies, tant qu’y m’invitent pas à becter ! Mais aussi vrai que je suis de la Dombes y’a pas une goutte de sang anglais qui coule dans mes canaux ! Avec tout ça j’oublie la politesse. Moi, c’est Marcel, de Bouligneux en Dombes entre l’étang Neuf et l’étang du Château, ici jusqu’à demain et bien décidé à m’choper un ombre. Marcel nous avoua que tout comme moi jamais encore il n’avait eu la chance de piéger un de ces merveilleux poissons. Une fois, il avait bien été à « un cul de poule », comme il disait, d’en piquer un, mais la bête s’était contentée de taper du nez dans sa mouche et avait pris lâchement la fuite, laissant un Marcel tout vexé, jurant ses grands dieux que la prochaine fois il sortirait un harpon. J’avais trouvé en lui un compagnon d’infortune, ce qui le rendait à mes yeux fort sympathique. Bertrand aussi semblait apprécier Marcel même si, en définitive, ce dernier n’avait rien d’anglais. Si jusqu’ici, Marcel avait manqué de chance avec Thymallus thymallus, il n’en restait pas moins qu’au vu de son lancé (lancer) il paraissait en connaître un sacré bout sur l’art et la manière halieutique, ce qui selon les critères « élitistes » de Bertrand suffisait à le rendre bien plus que fréquentable. En effet, pour Bertrand le monde des hommes est d’une simplicité mathématique et peut être divisé en trois catégories. Les hommes qui savent pêcher à la mouche, à qui Bertrand se plaît à accorder son amitié éternelle et pour lesquels il éprouve une très haute estime. Les hommes qui croient savoir pêcher à la mouche, à qui Bertrand peut éventuellement et avec une certaine réserve concéder quelques miettes de sa sympathie. Et les hommes qui pêchent autrement qu'à la mouche. Pour cette dernière

catégorie, Bertrand voit rouge et espère un jour la rédemption. Quant au reste des hommes, ceux qui ne pêchent pas, Bertrand ne s’y intéresse plus depuis longtemps ! Pour les femmes, il en va autrement, mais c’est une autre histoire. Marcel appartenait à la catégorie reine, c’était une certitude. Bertrand, trop heureux d’avoir fait la connaissance d’un nouvel adepte, nous proposa de sceller cette amitié tout juste née avec un verre de Vin Jaune et surtout derrière une belle saucisse de Morteau. Il était midi passé du quart d’heure et l’ogre qui sommeille au fond de mon ami commençait à se réveiller. Sur le chemin qui nous menait tous trois vers l’hôtel et sa cuisine du terroir, Bertrand revint sur cette histoire d’ombre. Il était sincèrement désolé d’apprendre que jamais encore nous n’avions savouré la joie de cueillir ce si beau « fruit ». Selon lui, rien n’égalait « la première fois », c’était comme une naissance en bien mieux, car elle resterait gravée à tout jamais dans nos souvenirs et rien ni personne ne pourrait à l’avenir nous enlever ce petit bout d’éternité. Alors, Bertrand, solennel, se tourna vers nous et comme si sa vie en dépendait, il nous fit le serment qu’avant demain soir chacun d’entre nous aurait caressé l’étendard d’un ombre ! A cet instant précis un cygne blanc glissa, majestueux, sur la surface de l’eau, on y put voir le reflet d’une prophétie … © Bleuvague 2012 www.bleuvague.com

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