MÉTROPOLISER, UNE QUESTION LOCALE Grégoire Guerin
Notice de projet de fin d’étude Département Lab 43 - Métropole / SMLXL Rémy Marciano, José Morales, Marion Serre, Jean Luc Fugier
Expliquer pour démystifier, démystifier pour projeter.
SOMMAIRE Manifeste |
p. 7
La métropole marseillaise |
p. 11
Eloge du patrimoine |
p. 14
Choix du site |
p. 17
Inventaire Usine Rivoire & Carret Initiative citoyenne pour le projet d’une médiathèque
Extension de la ligne 2 du métro
Vers une synthèse
Contexte socio-économique de la vallée de l’Huveaune
Enjeux du projet |
p. 35
Projet |
p. 37
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MANIFESTE |
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Manifeste
La métropole est un outil pour penser et agir sur le territoire. Son échelle d’intervention est une force incroyable lorsqu’elle permet une vision sur l’ensemble de la ville élargie. Cette émancipation du regard jusqu’alors focalisé sur le centre-ville est, bien entendu, une ouverture nécessaire à l’équilibre de la cité. Le périurbain, longtemps délaissé, entre enfin dans une ville qui l’avait longtemps abandonnée à ses portes. Cependant derrière cette grande idée, faire métropole ne peut se résumer à l’engagement de grands moyens financiers et politiques. C’est également et surtout de grandes transformations physiques et morphologiques du territoire. C’est une mutation qui se fabrique et se construit sur des lieux habités et vécus. Ce qu’implique la métropole est le dilemme que pose chaque passage à l’action, un changement de ce qui était, une réfutation du déjà là. Alors sans nier l’anti-urbanité que présente la périphérie de nos villes, ni le besoin de changement qui en découle, le constat qu’impose le périurbain ne peut s’arrêter là. Une vie locale s’est organisée, un équilibre périlleux subsiste, porté par un tissu associatif local vivant et enraciné. Cette parole citoyenne, cet engagement farouche pour un mieux vivre ensemble doit être entendu.
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Deux visions semblent alors s’opposer, caractérisées par des échelles d’interventions distinctes ; Échelle locale et échelle métropolitaine. Ce constat force un questionnement sur la fabrique de la ville au temps de la métropole. Peut-on concilier ces deux aspirations légitimes pour une transformation de la ville en adéquation aux différentes échelles de l’urbain ?
Privilégier sans mesure l’une ou l’autre de ces échelles d’intervention serait un acte violent. Le mince équilibre qui subsiste sur ces territoires fragilisés doit être pérennisé et non détruit. Repartir de zéro serait nier ce que seul les temps longs peuvent fabriquer ; une histoire, un tissu social et une manière d’habiter un lieu. Pour mener à bien cette volonté de synthèse, il faut s’appuyer sur ce que proposent ces deux entités en jeu. La volonté métropolitaine marseillaise, est notamment caractérisée par des notions de reconnexions, de désenclavements et d’abolitions des limites dans l’air urbaine. Cela est mis en œuvre par l’extension du réseau de transport en commun jusqu’alors concentré en centre-ville. Extension des lignes de métros existantes, création de tramway, fabrication d’un boulevard urbain traversant les territoires périphériques de la ville, ce sont autant de projets de grandes envergures à même de répondre à ces enjeux majeurs. Ce nouveau réseau à échelle métropolitaine sera une des portes d’entrée d’un projet soucieux des enjeux de la transformation du périurbain. Pour répondre aux enjeux locaux, deux pistes seront suivies. Il faudra s’appuyer sur le tissu associatif existant car il est l’espace propice à la convergence des aspirations citoyennes.
MANIFESTE |
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De nombreux projets sont portés, là où la politique a échoué. S’il s’agit d’un existant social, il ne faut pas non plus négliger l’existant architectural et patrimonial, porteur de l’histoire d’un territoire. Haut lieu industriel, le périurbain est le théâtre malheureux d’une ère post-industrielle qui a laissé place au chômage et à la pauvreté. Le paysage périurbain marseillais est jalonné par ces entités hors d’échelle et hors du temps. Ces usines dont les cheminées ponctuent l’horizon ne sont aujourd’hui que coquilles vides en voie à la ruine. Redonner vie à de tels lieux abandonnés est une façon de se réapproprier une histoire qui fut parfois cruelle.
Le projet présenté se veut une synthèse impartiale. Une position de mesure qui ne blâme pas mais qui au contraire s’évertuera à encourager ce qui fait la force de cette ville et de ses habitants en tirant profit de la formidable mutation que propose la métropole.
MARSEILLE / FIGURES DE LA VILLE NEOLIBERALE Grégoire Guerin - Yann Roussel
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Grégoire Guerin et Yann Roussel, Carnets Curieux, La ville néo-libérale
LA MÉTROPOLE MARSEILLAISE |
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La métropole marseillaise
La métropole n’est pas neutre. Métropoliser, entendre l’acte de faire métropole, ne l’est pas davantage. Il est essentiel avant toute chose de comprendre pourquoi nous travaillons aujourd’hui non plus sur la ville de Marseille mais bien sur la métropole Aix-Marseille. C’est également une porte d’entrée pour comprendre l’intime relation qu’entretient ce projet aux ambitions de la métropole. Les quelques réflexions à venir sont le travail d’un semestre qui fut un point de départ dans l’examen minutieux de la fabrique de la métropole marseillaise. La métropolisation est un processus. Cela implique un certain nombre d’opérations qui affectent la ville dans ses formes et dans ses fonctions. S’il fallait décrire ce qu’est la métropolisation, on pourrait la désigner par le mouvement de concentration de populations, d’activités et de valeurs dans des ensembles urbains de grande taille. Cette concentration spatiale des fonctions stratégiques de la ville peut avoir plusieurs facteurs. On remarque cependant que les raisons économiques sont le plus souvent prépondérantes. Dans un monde globalisé, au système économique également globalisé, les politiques menées localement ne peuvent ignorer cette globalisation. La métropolisation est une des réponses à cet état de fait.
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Il faut donc entendre l’acte de métropolisation comme une réponse à la compétitivité économique nécessaire et inhérent au système économique actuel. Plus simplement, qualifions la métropole comme un outil à même de faire face aux maux dont souffre Marseille, ville désignée comme l’une des plus pauvre de France. Cela a deux avantages très clair, le premier étant l’apport de ressources financières importantes mais également la constitution de concertations impliquant de nombreux acteurs pour une réflexion globale du territoire marseillais. En sommes, c’est fabriquer une vision à long terme tout en s’en donnant les moyens. Cela implique de grands bouleversements urbains à l’image du projet d’Euromediterranée, figure de proue de la métropole, que l’on pourrait aisément qualifier de violent. Cette appréciation tient à sa caractéristique première, celui de sa création ex-nihilo.
« Dans les quartiers transformés par le projet d’Euromediterranée, il apparait plus qu’ailleurs une homogénéité caractéristique de la fabrication de nouveaux quartiers. Le temps n’a pas encore fait son office et cela apparait comme criant lorsque l’on s’y ballade. Le temps, justement, permet l’appropriation et les mutations permettant d’atteindre un équilibre dans son fonctionnement. Cet équilibre est possible mais il ne peut advenir que s’il est mis en balance par des forces existantes. Cela amène naturellement la première conclusion de ce mémoire qui n’est rien d’autre qu’une des grandes maraudes de l’architecture : Le projet ne peut s’affranchir d’un site. Il ne peut faire fi de ce qui l’entoure et c’est bien là une des récurrences de la
LA MÉTROPOLE MARSEILLAISE |
Grégoire Guerin, Yann Roussel, Carnets Curieux, La ville néolibérale
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fabrique de la ville contemporaine. Cela on l’a vu pour des considérations économiques et de rentabilité. C’est bien là un des drames de cette fabrique de la ville qui soustrait au dialogue et à l’échange, ce qui ressemble bien plus à une confrontation stérile. »
Nous concluions nos travaux sur cet appel à la mesure, au bien fait propre aux temps longs et à la prise en compte d’un passé devenue histoire commune à même de constituer une base pérenne pour le futur de Marseille. Ce constat est au cœur des volontés engagées dans ce projet. Deux paradigmes s’opposent donc dans la fabrique de la ville contemporaine. Celui d’une volonté de rentabilité traduite par des temps courts face à l’existence d’une histoire et d’un équilibre d’une vie locale de quartier. La métropole doit donc s’inscrire en considérant la nécessaire mutation de Marseille mais sans nier sa caractéristique intrinsèque de ville du sud, portuaire et deux fois millénaire. C’est donc dans la synthèse que pourra s’épanouir une vision juste et crédible de cette métropole du sud. C’est en abordant ces deux échelles complémentaires ; celle du grand territoire Marseillais, et celle d’une intervention plus cadrée sur des préoccupations locales.
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Eloge du patrimoine
Il existe dans la métropole marseillaise des lieux particuliers, des reliques. Témoins d’un passé aujourd’hui révolu, ils ont été en leur temps le souffle d’une certaine modernité. Ces édifices qui jadis furent des lieux d’usage ultra spécifique ont cessé de vivre en même temps que se perdaient leurs activités. Ces lieux sont nombreux, disséminés dans la ville et vont des arsenaux militaires comme les citadelles Vauban, jusqu’aux usines et entrepôts d’un XXème siècle industriel. Patrimoine d’une culture commune, ces lieux racontent l’histoire des cités qui les abritent, tout autant que celle des gens qui les habitent. Pièces maitresses des paysages de la métropole, ils racontent une identité propre, personnelle, parfois conflictuelle mais jamais erronée. Marseille, citée doublement millénaire n’y est dans tous les cas, pas indifférente. Comment le pourrait-elle ? Elle porte en elle les prouesses et les stigmates de son histoire, aussi brillante ou cruelle soit-elle. La culture est une construction qui découle de cette histoire. Elle permet de rassembler des individus autour de symboles communs, appropriables par tous. Ces lieux, nous ne pouvons pas les abandonner ni les laisser mourir. Prenons des exemples concrets comme le fort d’Entrecasteaux, le J1 ou les usines de la vallée de l’Huveaune. Ce sont de véritables pièces urbaines qui par leur situation et leur taille ont un pouvoir d’attraction incroyable. C’est un terrain des possibles qui laisse rêveur. Tout peut advenir si l’on s’en donne les moyens.
ÉLOGE DU PATRIMOINE
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La catastrophe serait d’abandonner ces sites aux plus offrants dans une logique de pure rentabilisation financière. Les exemples malheureux sont nombreux. Citons la réhabilitation du stade Vélodrome qui par son impératif lié à la coupe d’Europe de football fut obligé de céder ses abords à du logement bas de gamme ainsi qu’à un centre commercial qui l’est tout autant. Il est dit que les pouvoirs publics n’ont plus les moyens d’assurer le renouvellement des équipements culturels et sportifs par eux-mêmes. Certes, dans la culture du prêt à consommer et de l’immédiateté, les temps longs propres à toute forme de pérennité et d’autonomie ne peuvent exister. Et si l’on pensait la ville dans une perspective qui regarderait un peu plus loin que demain matin sous peine de se réveiller avec une sévère gueule de bois. Les logiques du coup par coup et de l’investissement qui doit rapporter vite et beaucoup, sont des logiques qui répondent à des intérêts privés et sont de fait, très limités. Ils entrent en opposition à la notion de bien commun développée précédemment. Ne bradons pas notre patrimoine.
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RelevĂŠ des sites potentiels
LE SITE
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Choix du site
Partant de la triple volonté de travailler à l’échelle de la métropole, d’opérer sur des édifices patrimoniaux abandonnés et enfin d’agir sur des pièces urbaines à l’échelle de la ville, un relevé non exhaustif fut réalisé afin de déterminer un site aux potentialités fortes sur lequel un projet aurait du sens.
Inventaire La grande majorité des lieux découverts sont en rapport au travail et aux outils de production. Ce sont principalement des usines datant du début du XXème siècle, époque de forte industrialisation de Marseille. Elles sont situées le long des grands axes pénétrant dans Marseille comme dans la vallée de l’Huveaune et le nordouest de la ville. Citons également les grands édifices portuaires ainsi que les carrières en périphérie de la ville. Enfin, les anciens édifices militaires aujourd’hui désaffectés présentaient également les caractéristiques recherchées.
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Corps principal de l’usine Rivoire & Carret
Situation de l’usine Rivoire & Carret
LE SITE
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Usine Rivoire & Carret
Cet inventaire réalisé, un des sites choisis est sorti du lot par l’incroyable concordance qu’il pouvait opérer entre velléité métropolitaine et local. Il s’agit de l’usine Rivoire et Carret situé dans la vallée de l’Huveaune, boulevard de la Valbarelle dans le 11ème arrondissement de Marseille. Avant toute chose, un bref historique de cette usine s’impose. C’est en 1860 avec les cousins Carret et Rivoire que débute l’histoire de l’industrie des pâtes alimentaires françaises. En 1925, les frères Francisque et Joannès Carret achètent le terrain de La Pomme – La Valbarelle, et y font construire un ensemble de bâtiments industriels qu’ils équipent de tous les éléments, outils et fluides nécessaires à la fabrication de pâtes alimentaires. C’est en grande partie l’usine Rivoire & Carret que nous connaissons aujourd’hui. Le groupe de bâtiments industriels livré en 1931 couvrait une superficie de 13 521 m2. Dans les nombreuses dépendances de l’usine se trouvaient la chaufferie, les logements du directeur et du concierge, le poste électrique et la salle de pompe pour l’alimentation en eau ainsi que deux réservoirs en béton armé de 135 m3. Un système de canalisation en grès permettait l’évacuation des eaux vers l’Huveaune. C’est en mars 2003 que l’usine cesse son activité et est rachetée par la Mairie.
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Affiche vintage Rivoire & Carret, 1937
LE SITE
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PublicitĂŠ vintage Rivoire & Carret
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Initiative citoyenne pour le projet d’une médiathèque
Depuis 2003, ce sont plusieurs associations locales dont principalement le collectif « Rives et Culture », qui œuvrent pour la survie de ce lieu. En 2012, grâce à ce travail, l’usine est officiellement labélisé « Patrimoine du XXème siècle ». En parallèle, ces associations militent pour faire entrer la culture dans un quartier que la population n’hésite pas à qualifier de désert culturel. Pour remédier à ce constat, c’est un projet de médiathèque qui est porté par les associations, la population locale et en 2008 par des candidats de l’opposition aux élections municipales. En 2014, la ministre de la culture, Aurélie Filippetti, accompagnée d’élu locaux, visite l’usine pour apporter son soutien et celui de son ministère à ce projet de médiathèque. Chacun est convaincu qu’il s’agit d’un « vrai projet culturel territorial », que le site « en vaut la peine », et que cette visite débouchera sur un « sacré coup d’accélérateur à ce projet ». Aurélie Filippetti conclue en disant :
« Vous savez, les médiathèques, la lecture publique, la mise à disposition pour les jeunes et les anciens dans les quartiers d’espaces pour avoir accès aux livres et au multimédia, aujourd’hui, c’est essentiel pour le développement d’une ville. On constate qu’il y a malheureusement un sous équipement à Marseille. On a neuf médiathèques pour une ville aussi importante, c’est peu, donc il y aura besoin d’un soutient de l’état pour des projets aussi essentiel »
Aurélie Filippetti, Ministre de la culture, 3 février 2014
LE SITE
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Depuis, rien de neuf si ce n’est les batailles constantes des associations riveraines pour enclencher un processus de projet sur ce site. La dimension locale de ce site est aujourd’hui indéniable, il porte des enjeux locaux extrêmement fort pour une population qui veut reprendre le contrôle de son territoire. Ces initiatives populaires et citoyennes doivent être prise en compte et ne peuvent pas être laissée lettre morte.
La provence Article du 29 juin 2011
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Marseille l’hebdo, Article du mercredi 19 mars 2014
LE SITE
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Etude de pré-faisabilité
Extension du réseau de métro ligne 2 entre Sainte-Marguerite Dromel et le site de Rivoire et Carret
NT35 - Extension ligne 2 du métro jusqu’au site de Rivoire et Carret
Etude de pré-faisabilité
Extension du réseau de métro ligne 2 entre Sainte-Marguerite Dromel et le site de Rivoire et Carret NT35 - Extension ligne 2 du métro jusqu’au site de Rivoire et Carret Version B – 15 septembre 2015
Version B – 15 septembre 2015
Tracé prévisionnel de l’extension du métro ligne 2
LE SITE
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Extension de la ligne 2 du métro vers l’usine Rivoire & Carret
En 2015, les premières études de faisabilité d’une extension de la ligne 2 du métro marseillais voient le jour. Ces études indiquent le site de l’usine Rivoire & Carret comme un point d’arrivé stratégique. La décision de prolongement de cette ligne n’est pas anodine et se veut faire face à la grande pauvreté des transports en commun dans la vallée de l’Huveaune. Il y a une forte nécessité dans ces tissus périurbains qui voient le règne de la voiture saturer les différents noyaux villageois qui s’étendent dans la vallée. L’échelle d’intervention n’est sans commune mesure aux initiatives locales portée par les habitants de ce quartier. Elle est celle d’une métropole soutenant une politique et une vision territoriale.
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LE SITE
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Vers une synthèse
Ce site porte donc aujourd’hui deux projets que tous semblent opposer en terme d’échelle et de programmes. Ce sont deux visions qui s’affrontent. L’une est une initiative citoyenne portée par les gens qui vivent ce lieu. De l’autre, la ville avec une dimension plus politique, à une échelle plus large, celle de la métropole et de son développement. Il n’y a cependant pas de doute quant au bénéfice de ces deux projets pour la vie de ce quartier. Ce sont dans les deux cas des nécessités pour son développement et plus généralement pour le développement de la vallée de l’Huveaune. Ma position est simple. Ces deux projets doivent exister. L’usine Rivoire & Carret doit faire la preuve que nous pouvons conserver notre patrimoine en le faisant évoluer, pour être au service de la volonté métropolitaine de Marseille sans pour autant nier ce qui existe à l’échelle locale.
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Relevé des usines historiques et actuelles de la vallée de l’Huveaune
Relevé de la construction actuelle de logement dans la vallée de l’Huveaune
LE SITE
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Contexte socio-économique de la vallée de l’Huveaune
Baptiste Lanaspèze, Marseille ville sauvage
« Marseille est un territoire hétérogène, à la fois rural et industriel, une ville pleine de vide, un étalement urbain qui a croisé une baisse démographique et une désindustrialisation forte. Ces vides, constitués de paysages urbains et naturels forment une ville de Faubourg hybride, sauvage certes, mais coupée des centralités »
La vallée de l’Huveaune est de par sa morphologie une des entrées privilégiées de Marseille. Elle accueil ainsi l’autoroute A50 et une voie ferrée. Historiquement, la vallée fut dédiée à l’activité agricole, puis maraîchère pour Marseille. A partir du milieu du XIXe siècle, la vallée s’industrialise avec de nombreuses usines, comme la chocolaterie Nestlé ou l’usine de pâte Rivoire & Carret, les activités chimiques (Lafarge) et la métallurgie (Coder, fabricant de remorques routières et ferroviaires). Au cours des vingt dernières années, elles ferment les unes après les autres. Cette histoire industrielle est encore bien visible tant les usines abandonnées façonnent le paysage. Aujourd’hui c’est une vallée en grande mutation ou fleurissent de nombreux projet notamment marquée par l’abondance de la promotion privée immobilière, conséquence directe de la pression foncière en centre-ville. Cette multiplication de logement entraine une saturation du réseau routier de la vallée marquée par la pauvreté d’infrastructure lié au transport en commun. La voiture
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Boulevard urbain sud
Extension du métro ligne 2
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LES PEPINIERES DU GARLABAN
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Etude de pré-faisabilité
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Version B – 15 septembre 2015
Projet de transports dans la vallée de l’Huveaune
LE SITE
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est prédominante face à des voies sous dimensionnée attelé à des noyaux villageois étroit. C’est une situation propre au périurbain et particulièrement courante à Marseille. Enfin, la vallée de l’Huveaune est caractérisée par un urbanisme de zonage distribué entre logement (grands ensembles et tissus pavillonnaire), centres commerciaux et activités tertiaires. C’est un tissus mono fonctionnel dont la culture est totalement absente. Pour reprendre les mots de la ministre de la culture, « On constate qu’il y a malheureusement un sous équipement à Marseille ».
Cette description succincte suffit à mettre en lumière les insuffisances de ce territoire. Par ailleurs, cela devient également un formidable terrain à projet pour accompagner sa nécessaire mutation. Ce présent projet tend donc à répondre à ces enjeux :
- Enjeux territoriaux de transport et de connexion - Enjeux d’usage face à la mono fonctionnalité de la vallée - Enjeux d’architecture à visée patrimoniale
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Autoroute
Tramway
ENJEUX DU PROJET
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Enjeux du projet
Enjeux territoriaux :
Relier, reconnecter, désenclaver et éviter la dépendance à la voiture en proposant des modes de transports en commun et écologique. Faire entrer la vallée de l’Huveaune dans la métropole et la reconnectant au centre-ville. Reconnecter Aubagne et Marseille autrement que par des axes routiers.
Enjeux d’usage :
Repenser le territoire monofonctionnel du périurbain pour imaginer des programmes ou des espaces partagés qui pourront redonner du sens, du lien et de la valeur à des quartiers et lotissements. Amener de la culture, des lieux de vie et de partage, et de l’espace public dans un territoire qui en est complétement dépourvu.
Enjeux d’architecture :
Réhabilité un patrimoine industriel à l’abandon pour lui donner une deuxième vie et réactiver les tissus alentours. Mettre en lumière l’histoire d’un territoire.
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Le projet
Usine Rivoire & Carret L’usine Rivoire & Carret est au centre de ce projet. Sa réhabilitation aura pour rôle de porter les espaces culturels comme la médiathèque et des grands ateliers. Des espaces partagés dédiés aux associations riveraines sont également prévus. Les grands espaces générés par la structure métallique de l’édifice permettront également de générer des espaces capables, utilisables par tous. L’organisation spatiale du projet s’agence autour d’axes de circulation permettant de relier chacun des espaces de l’usine. Ces axes sont fabriqués par la soustraction de tous les éléments maçonnés à l’exception des fermes métalliques. La structure reste ainsi intacte, ce qui permet de conserver la morphologie initiale du bâtiment. Cela permet également de faire entrer la lumière et la végétation dans un édifice particulièrement dense. Ces axes de circulation sont proportionnés de façon hiérarchique suivant les espaces qu’ils desservent. Lorsque cela est nécessaire, ce sont des patios qui jouent ce rôle d’aération. Au-delà des axes de circulation, ce sont des espaces publics plus généreux qui sont fabriqués. Ils sont pronfondément nécessaire face au réel manque de tels espaces dans le quartier Le bâtiment principal de l’usine accueille également le terminus de la ligne 2 du métro. Cette arrivée suit les directives proposées par les études de faisabilité amorcée par la ville de Marseille.
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Infrastructures et transports en communs Les infrastructures liées au déplacement sont nombreuses. L’arrivée du métro n’est que le point de départ d’un dispositif bien plus vaste. Il existe un projet de tramway desservant la vallée de l’Huveaune depuis Aubagne. Le projet n’étant pas pleinement défini, je profite de l’arrivée du métro pour établir une connexion entre ces deux transports. Grâce à cela, c’est toute la vallée de l’Huveaune entre Marseille et Aubagne qui est desservie par les transports en commun. Le projet consiste donc en la fabrication d’un pôle d’échange entre les deux terminus des lignes de métro et de tramway. Le terminus du métro étant défini par les études de faisabilité, c’est à 15 mètres en sous-sol du bâtiment principal de l’usine qu’il se situera. Pour favoriser la fluidité des flux, le tramway viendra se situer dans la stricte emprise du métro, au R+1 du bâtiment. De grandes circulations verticales permettront de relier ces deux terminus. Il est également à noter que la gare SNCF de la Pomme fut réhabilitée en 2017. Elle se situe à 200 m au nord de l’usine. Un accès piéton est créé, permettant une connexion directe à celle-ci. Enfin, la création d’un chemin le long de l’Huveaune permettra le déplacement piéton et à vélo de manière sécurisée et plus agréable que par les boulevards étroits existant. Un espace de stockage à vélo sera créé pour encourager cette pratique et ce mode de déplacement doux. C’est donc quatre modes de transport en commun qui sont mis en œuvre pour faciliter les déplacements sur ce territoire. A cela, il faut ajouter le réseau de bus existant. Tout cela ne serait cependant pas complet sans une réflexion profonde autour du mode de déplacement roi dans le périurbain, l’automobile.
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Infrastructure et automobile
Dans le périurbain et dans ce quartier en particulier, il est impossible de ne pas prendre en compte la nuisance que peut engendrer l’automobile. Son omniprésence est compréhensible face au manque aigu de transports en commun. Cela n’en est pas moins problématique lorsque l’on voit les trottoirs submergés et les rues continuellement embouteillées aux heures de pointe. Et si l’on arrive à faire abstraction de la situation, l’autoroute qui coupe la vallée en deux nous la rappelle. Cette problématique de l’autoroute ne pu se résoudre qu’en la considérant comme un atout et non plus seulement comme une nuisance. En effet, la mitoyenneté des nouveaux transports en commun et de cet important axe routier fut un révélateur quant aux possibilités que cela pouvait générer. L’autoroute A50 est l’entrée principale de Marseille depuis l’est. Elle arrive dans le centre-ville, ce qui génère des embouteillages mais également l’arrivée d’un flot continu de voiture dans les rues de Marseille. A l’exception du train, c’est le seul moyen d’entrer dans la ville. L’extension de la ligne 2 du métro devient alors une alternative crédible pour pénétrer dans la cité.
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Partant de ce constat, la proposition de ce projet est la fabrication d’un parking de grande capacité en lien direct avec la ligne de métro. L’idée est de permettre aux automobilistes de laisser leur voiture à l’entrée de la ville, évitant ainsi les embouteillages quotidiens de l’autoroute. Depuis le parking, la possibilité est offerte de prendre le métro pour rejoindre le centre-ville mais également le tramway pour accéder à Aubagne et enfin la gare de la Pomme pour accéder à la gare St Charles mais aussi à Aubagne et Toulon. Cette alternative à la voiture ne peut faire sens que par la création de ce pôle d’échange à l’échelle métropolitaine. Le fonctionnement du parking est relativement simple. Il est possible d’y accéder depuis les deux sens de l’autoroute, qu’on entre ou qu’on sorte de Marseille. Il n’est cependant pas possible d’y accéder directement depuis les abords du site pour éviter de surcharger le trafic du quartier déjà saturé. Il s’agit d’un parking sous-terrain qui prend la forme d’un silo pour maximiser le nombre de place disponible (2500 places). Cela permet également de fabriquer une structure simple avec un faible nombre d’éléments structurels différents. Il se positionne sous l’autoroute pour diminuer l’infrastructure nécessaire à une sortie d’autoroute. Le choix d’un parking sous-terrain est lié à la volonté de ne pas ajouter de l’infrastructure liée à la voiture dans un paysage déjà saturé. C’est une façon d’enterrer la voiture sous un symbole déjà très fort sur le territoire. C’est également une manière de ne pas accentuer la violence que génère déjà l’automobile dans ces quartiers.
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Les places de parking se déploient autour d’un espace central circulaire permettant de faire entrer la lumière naturelle en profondeur. Il est donc possible depuis l’autoroute mais également en tant que piéton, d’apercevoir les entrailles du parking. Un dispositif de saut de loup permet de mettre en scène cet espace atypique et d’accentuer l’effet de profondeur. En tirant parti de la morphologie du silo, il est possible d’enrichir ce programme monofonctionnel. Le cœur du parking est une arène qui permet d’être vu mais aussi de voir. Cet espace peut alors être considéré comme un drive-in dont la scène serait le puit central. Les gradins seraient les places de parking que les spectateurs occuperaient dans leurs voitures. Comment alors ne pas imaginer des acrobates du cirque du soleil évoluer dans un tel espace ?
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Requalification des limites Pour finir, il est nécessaire d’élargir son regard pour éviter de concentrer tous les efforts en un point unique. Le boulevard de la Valbarelle jouxte l’usine au sud de la parcelle. Il est situé à 4 mètres au-dessus du niveau du sol de l’usine et constitue aujourd’hui une limite infranchissable. Un réaménagement urbain est réalisé sur toute sa longueur pour permettre une grande porosité entre le quartier et les nouveaux espaces créés. De l’autre côté de la rue se trouve un tissu pavillonnaire très peu dense, parsemé de terrains en friche. Ils n’offrent à la rue que de pauvres murs maçonnés aveugles. Après une étude de chacune des parcelles, des gabarits d’implantation de logements sont proposés afin de densifier cette frange urbaine. C’est également une façon de fabriquer une forme urbaine cohérente. A l’est de la parcelle, la création du tramway permet également l’implantation de logements le long de ces voies. C’est toute la frange urbaine qui est repensée, en mettant à distance les entrepôts qui longent l’autoroute. La fabrication de nouveaux logements est une nécessité à Marseille. Densifier pour lutter contre l’étalement urbain est capital dans le périurbain. Faut-il encore le rendre crédible en n’ajoutant pas à la mono fonctionnalité déjà exacerbée sur ce territoire. Les espaces publics et culturels générés par la réhabilitation de l’usine ainsi que le développement des transports en commun permettent de donner du sens à cette démarche.
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Un peu de prospective
Penser l’avenir d’un projet, c’est lui donner la possibilité d’évoluer. C’est également permettre d’inscrire une démarche dans un temps long. L’usine réhabilitée est aujourd’hui un espace culturel et associatif. Ce programme est une volonté de la population locale, il entend répondre à des impératifs actuels. Cependant, rien n’empêche l’évolution des activités qui s’y déroulent. La typologie de l’usine s’y prête d’ailleurs parfaitement. Les vastes espaces générés par la structure métallique peuvent accepter tous types de configuration spatiale. C’est alors une question de dénomination et de propriété qui est en jeu. En nommant cet espace « équipement public de quartier », il devient un espace évolutif à même d’accueillir n’importe quel programme. En ce qui concerne les transports en commun comme le métro et le tramway, peu de doutes subsistent quant à leur évolution. Si le site du projet constitue aujourd’hui un terminus logique, les projets à long terme de la métropole prévoient une extension des lignes. La densification effrénée de la vallée de l’Huveaune mènera au prolongement du réseau pour répondre aux mêmes problématiques que celles rencontrées aujourd’hui. Le dernier point du projet concerne l’automobile. Contrairement aux deux points abordés précédemment, aucune certitude ne peut être avancée.
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Imaginons alors la mort de l’automobile.
Elle fut le symbole des excès individualistes d’une époque consumériste. Écologiquement désastreux, elle était la grande responsable de la pollution de nos villes. Fonctionnant grâce au pétrole, on peut également lui imputer la responsabilité de quelques guerres. La voiture a donc disparu. L’immense parking silo s’est apaisé. La mystique des entrailles grouillantes a laissé place à la sérénité des profondeurs. Le vaste cylindre est devenu cimetière, la terre retournant à la terre.
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Juin 2018 GrĂŠgoire Guerin