La préfabrication comme outil de narration

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LA PRÉFABRICATION COMME OUTIL DE NARRATION PAS D’ARCHITECTURE SANS STRUCTURE par GUERIN Grégoire



SOMMAIRE

Préambule à la préfabrication

Définition Pourquoi le préfabriqué Pourquoi ne pas préfabriquer Et l’architecte ?

Techniquement, comment ça marche ?

L’atelier La table de préfabrication Le précontraint Le transport Le clavetage

La préfabrication et les architectes

La reconstruction La préfabrication comme un langage L’architecture métaboliste L’architecture sans le sous L’architecture en milieu extrême

Étude de cas : Le Laboratory Building de David Chipperfield

La préfabrication En façade Verticalité Horizontalité

Conclusion Bibliographie



INTRODUCTION Aborder le thème de la préfabrication, c’est se confronter aux changements que les différentes révolutions industrielles ont produits sur notre société. Ce sont des évolutions techniques majeures qui ont transformé le monde dans lequel on vit et par conséquent l’architecture produite. C’est une histoire commune qui s’est nouée entre technique et esthétique dont l’industrie et l’architecture sont chacun un des tenants. L’erreur serait de considérer la préfabrication comme l’outil d’une industrie dont la rentabilité serait le seul dessein. Déconstruire cette affirmation sera le sujet de ce mémoire. L’architecte y prend une place prépondérante car nous le verrons, il lui revient la tâche délicate de sa mise en œuvre. C’est dans sa volonté de donner du sens que se crée la narration propre aux grandes histoires et aux grands édifices. Cette narration est l’essence même du métier de l’architecte. Alors parler de l’outil revient à parler de celui qui en fait usage. C’est dans cette optique que le travail de l’architecte fait sens. Dans une société ou l’architecte perd en crédibilité face aux constructeurs, il est urgent de comprendre ce que peut être la plus-value d’un architecte. La préfabrication, outil de construction pensé par l’industrie, semble alors devenir un des meilleurs arguments pour défendre intelligemment le rôle de l’architecte. Pour développer cet argumentaire, je m’attacherai dans un premier temps à expliciter ce qu’est la préfabrication. Dans un second temps, il s’agira de faire le tour de ce que peut produire la préfabrication dans les mains des architectes. Comment s’est-il approprié ce procédé constructif pour le sublimer et en faire autre chose qu’une méthode de construction pas cher. Enfin, au travers d’un exemple, essayer de comprendre la richesse et la complexité du travail de l’architecte.


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I. PRÉAMBULE SUR LA PREFABRICATION « On construit un bâtiment ; on fabrique un camion. Le langage usuel traduit ainsi deux activités bien différentes, le chantier et l’usine » Pol Abraham

1. DEFINITION La préfabrication est une technique de construction permettant de réaliser des ouvrages au moyen d’éléments standardisés fabriqués d’avance et que l’on assemble suivant un plan préétabli. Cette préfabrication peut avoir lieu en usine ou dans un chantier externe, ou même sur le site de la construction.


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2. POURQUOI LE PRÉFABRIQUÉ Les avantages de la préfabrication sont nombreux mais correspondent souvent à des impératifs un peu éloignés des intérêts de l’architecte. Ce sont avant tout les constructeurs qui y trouveront leur compte. Cela tient à la nature même de l’architecture qui se trouve être fortement dépendante d’intérêt économique. Chacun des avantages avancés par la préfabrication semble plus ou moins amené à l’économie du projet. Préfabriquer induit un processus industriel. Les pièces sont fabriquées en usine à la chaine. Ce ne sont pas des exemplaires uniques synonymes de coût de production élevé. C’est aussi une facilité dans le chiffrage d’un chantier. La pièce préfabriquée à un coût que l’on multiplie plus facilement. Enfin la préfabrication permet une maîtrise plus fine du chantier. La sécurité est accrue et l’on construit plus vite. Cela induit moins d’aléa, des délais plus courts et donc une certaine sécurité financière. Les raisons économiques sont prédominantes concernant l’utilisation de la préfabrication mais elles ne sont pas les seules. Cela serait une erreur qui aujourd’hui encore est fortement présente dans l’imaginaire collectif. La préfabrication permet de réaliser des chantiers propres et revêt donc une dimension écologique non négligeable. Cela permet également de construire ou les méthodes traditionnelles ne le peuvent pas. En montagne par exemple où des machines ne peuvent pas être acheminées.


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3. POURQUOI NE PAS PRÉFABRIQUER ? La préfabrication a bien mauvaise presse, non pas au regard de la critique architecture mais à un niveau plus large de la société qui l’associe à la période de reconstruction d’après-guerre et aux grands ensembles. Cela est assez compréhensible au vue de l’échec social et architectural qu’ils constituent. La population fut marquée à juste titre par l’échelle qu’on put aborder ces opérations, élément aggravant d’autant plus leur défaite. Les griefs sont nombreux et s’attachent quasi uniquement à cette période. Il s’agit de la face visible de l’iceberg sur laquelle se stigmatise tous les reproches. - La préfabrication n’existerait que pour aller vite et pour pas cher. La qualité ne serait alors pas possible dans les constructions réalisées grâce à la préfabrication. - Cela produirait une architecture répétitive. Cet argument à l’encontre de la préfabrication est plus rare mais existe quand même. Tous les grands ensembles se ressemblent, la préfabrication serait générateur de monotonie urbaine. Ces arguments, loin d’être ridicule, constituent une partie réelle de ce que fut et ce que peut être encore la préfabrication. Cela se rapporte à une industrialisation de la construction et en l’occurrence du logement poussé à son paroxysme. Cette industrialisation outrancière n’est pas souhaitable et d’autant moins voulu par les habitants comme par les architectes.


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4. ET L’ARCHITECTE ? Au final, la préfabrication n’est qu’un outil pour construire. Juger l’outil n’a absolument aucun intérêt. Un marteau n’est ni bon, ni mauvais, seul la manière de s’en servir aura de l’importance. C’est dans cette optique que les architectes se sont emparés de cette question. C’est aussi pour cela que la critique architectural ne juge pas un projet pour sa simple utilisation de la préfabrication mais bien par rapport à son emploi conscient. La préfabrication comme outils permet donc certaines libertés d’action à l’architecte. En premier lieu, cela lui permet de se saisir des questions de construction et d’économie du projet. Si cela pouvait être une évidence dans la première partie du XXème siècle, les changements qu’a subi le métier d’architecte a éloigné la profession de ces questions. De nouveaux corps de métiers ont progressivement récupéré certaines tâches qui lui étaient dévolues. L’affaiblissement de sa position qui en résulte, bénéficie à de nouveaux acteurs plus à même de prendre en charge la construction et l’économie du projet. La préfabrication est alors une façon de reprendre à sa charge ces questions. Cela peut sonner comme une simple question de pouvoir mais concerne en fait le projet d’architecture. Maîtriser son projet, c’est entre autre chose dessiner ce que l’on sait construire. Sans cela, les ingénieurs, les économistes et les professionnels du bâtiment en général, sont autant de filtres qui nuisent aux volontés initiales. La préfabrication permet dans une certaine mesure de livrer un bâtiment dont le projet n’aura pas été amoindri dans le processus de construction.


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II. TECHNIQUEMENT, COMMENT ÇA MARCHE ? La préfabrication consiste en la fabrication d’élément identique et de leur assemblage. Elle présente de fait une affinité certaine avec le béton. On parle plus généralement d’assemblage quand il s’agit de matériaux comme le bois ou l’acier. Leur nature induit une mise en œuvre sous forme d’élément unitaire. La préfabrication se distingue donc de la mise en œuvre classique du béton qui consiste à le couler directement sur place grâce au système de banchage. On peut également parler de préfabrication sans se référer au béton en considérant des assemblages complexes de plusieurs matériaux réalisés en usine. Les parois en sont le meilleur exemple quand elles sont pensées comme un objet fini au sorti de l’usine. Pour le béton, plusieurs subtilités existent en préfabrication. Si l’usine semble le lieu le plus approprié pour réaliser des éléments complexes préfabriqués, il est également possible de réaliser ces éléments sur le site de construction ou même à l’écart. Cela fait entrer en jeu un des éléments primordiaux de cette technique, la transportabilité des éléments. C’est un des enjeux de ce système car aussi primaire que cela puisse paraître, le transport reste souvent déterminant dans le dessin d’un élément préfabriqué. Si le transport n’est pas possible, il reste la solution de préfabriquer sur chantier. Cette solution plus pratique empêche néanmoins d’arriver à la complexité possible en usine. L’atelier de préfabrication est constitué de table de préfabrication. Ce sont sur ces machines que le béton va être coulé pour prendre sa forme voulue. Elles peuvent être assimilées à des moules de taille particulièrement importante. Le processus de fabrication est assez simple. Sur la table est fabriqué le négatif de la pièce désirée, le béton est coulé puis grâce à un système de vibration le béton est compacté puis mis en pression grâce à un système hydraulique. Cela permet également de réaliser des éléments précontraints par l’ajout d’éléments dans le béton. L’assemblage de ces éléments préfabriqués constitue la dernière étape de sa mise en œuvre. Comme pour une mise en œuvre classique du béton sur chantier, il


Atelier de prĂŠfabrication

Table de prĂŠfabrication


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faut penser les jonctions qui existent la plupart du temps sous la forme d’acier en attente. Il s’agit au final d’un jeu d’emboîtement dont les pièces sont constituées d’éléments mâles et femelles. Les aciers constituent la jonction mais ne sont pas suffisant pour permettre une continuité de matière. C’est la technique du clavetage qui va permettre d’encastrer définitivement les deux éléments préfabriqués. Cela consiste en général au coulage d’une petite quantité de béton aux intersections afin de solidariser les deux parties. Le clavetage doit être pensé puisqu’il détermine la possible déconstruction de l’édifice. Si le clavetage est trop important alors la déconstruction sera la même qu’un édifice construit traditionnellement.


Le transport

Le clavetage


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III. LA PRÉFABRICATION ET LES ARCHITECTES Pour appréhender la préfabrication, je fais le choix d’aborder la question d’un point de vue thématique et stylistique en rapport à l’architecture.

1. LA RECONSTRUCTION

La seconde guerre mondiale a détruit énormément de villes et a laissé la France en grand déficit de logement. La reconstruction commencera dès 1945 et s’attardera essentiellement sur ces deux points, la reconstruction des villes et le logement. Les infrastructures seront le troisième grand chantier de la reconstruction mais concerneront moins directement la préfabrication et les architectes. La préfabrication connait pendant cette période sa première utilisation à grande échelle. Les exigences auquel fait face la société rendant son emploi obligatoire dans une France qui compte une majorité de petites entreprises artisanales aux méthodes de constructions traditionnelles. Son emploi étant alors le fruit de considération économique, de quantité à fournir et de temps de construction. Le logement sera alors industrialisé pour répondre à une demande extrêmement importante. Les grands ensembles qui auront vu le jour dans l’entre guerre sous l’impulsion de Tony Garnier à Lyon pour la Cité des Etats Unis ou d’Eugène Beaudouin à Drancy pour la Cité de la Muette, se révèleront être une des meilleures réponses à cette demande immédiate de logement.


Affiche du Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme de 1944


Cité des Etats Unis à Lyon

Cité de la Muette à Drancy


Cité de la Muette à Drancy


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LA CITÉ ROTTERDAM À STRASBOURG PAR EUGÈNE BEAUDOUIN En 1950, Eugène Claudius-Petit, ministre de la reconstruction, lance le concours de la Cité Rotterdam à Strasbourg. Ce programme doit comporter 800 logements, mais le concours, ouvert à un architecte associé à une entreprise de BTP, prend en compte des critères de coût et de rapidité d’exécution. Le projet est gagné par Eugène Beaudouin qui réalise un des premiers grands ensembles d’après-guerre en 1953. Cette cité, une des premières constructions du genre est encore assez épargnée des défauts qui existeront par la suite dans les grands ensembles. Le plan masse assez flexible n’est pas totalement attaché au chemin de grue. Le contexte urbain et social local est très nettement pris en considération dans son plan. Il s’agit certes d’une architecture assez répétitive mais dont le dessin reste assez soigné.

LE HAUT-DU-LIÈVRE À NANCY PAR BERNARD ZEHRFUSS Le Haut-du-Lièvre, construit à partir de 1958 au-dessus de Nancy, est constitué de deux barres géantes : le Cèdre bleu (400 mètres, 15 niveaux, 917 logements) et le Tilleul argenté (300 mètres, 17 niveaux, 716 logements), les plus longues de France. Le chemin de grue est net et semble être l’élément directeur du projet. Les mots d’ordres sont rentabilité, bas coût et quantité de logements. On arrive ici aux aberrations provoquées par la reconstruction. Si la préfabrication a permis ce genre de projet, elle ne reste qu’un outil au service des nécessités de l’époque.

LE CENTRE-VILLE RECONSTRUIT DU HAVRE (1945 - 1964) Le centre-ville reconstruit du Havre est l’œuvre de l’architecte Auguste Perret qui se vit confier par le Ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme, la réédification de la ville du Havre après sa destruction à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le


Cité Rotterdam à Strasbourg

Le Haut-du-lièvre à Nancy


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Le centre-ville reconstruit du Havre


site est inscrit au patrimoine mondial de l’Humanité par l’UNESCO en 2005. D’une superficie totale proche de 150 hectares, cet ensemble comprend plus de 12 000 logements et de nombreux bâtiments civils, commerciaux, administratifs ou religieux. Pour reconstruire, Perret va utiliser principalement le béton armé notamment sous la forme d’éléments préfabriqués. Il en résulte une architecture particulièrement rythmée et homogène, à même d’apporter une identité à cette ville que l’on pourrait qualifier de nouvelle. Concernant la méthode de construction Perret insistera sur l’utilisation d’un module générateur d’architecture et de ville. « La construction n’a pas été laissée au hasard, et l’adoption d’un module – ou trame – de 6,24 m qui se trouve dans toute la ville neuve assure son unité profonde . Cette trame dans laquelle peuvent être installées deux pièces d’habitation est en accord avec l’Économie au sens le plus élevé du mot » Il surgit ici les notions propres à la préfabrication comme l’économie au sens noble du terme mais aussi de la facilité constructive que cela permet.

COMMENT EST UTILISÉE LA PRÉFABRICATION PENDANT CETTE PÉRIODE ? De nombreux procédés de préfabrications sont mis en œuvre sur les chantiers permettant un gain de temps et d’argent. Expérimentés au cours des chantiers de la reconstruction après la Seconde Guerre mondiale, ces procédés permettent la construction en série de panneaux de bétons, d’escaliers, d’huisseries, mais aussi d’éléments de salles de bain à l’intérieur même du logement. Chacun de ces procédés est désigné par l’entreprise ou l’architecte qui l’a mis en œuvre : procédé Camus (expérimenté au Havre et exporté jusqu’en URSS), procédé Estiot (au Haut-du-Lièvre à Nancy) ou procédé Tracoba (à la Pierre Collinet à Meaux), par exemple. Les formes simples (barres, tours) sont privilégiées le long du chemin de grue (grue posée sur des rails) avec des usines à béton installées à proximité du chantier, toujours dans une recherche de gain de temps.


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Le centre-ville reconstruit du Havre


Le centre-ville reconstruit du Havre


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2. LA PRÉFABRICATION COMME UN LANGAGE (RÉPÉTITION, MONUMENTALITÉ) Sans nier tous les avantages économiques et constructifs que permet la préfabrication, il est possible d’identifier une esthétique de la préfabrication. Ces considérations esthétiques permettent de regrouper certains projets d’époques différentes qui s’inscrivent pourtant dans des canons semblables. Il s’agit de grand thème récurrent en architecture comme l’ordonnancement, l’utilisation d’une trame et de répétition qui mènent à des effets de monumentalité et de rigueur. Les projets retenus pour illustrer mon propos s’inscrivent dans des familles de projets différents mais dont on peut aisément trouver une lignée. Dominique Amoureux dans un livre consacré à Marcel Breuer y fait notamment référence : « Marcel Breuer donne aux éléments préfabriqués un élan esthétique et technique qui ne sera renouvelé que deux décennies plus tard lorsque Ricardo Bofill (en région Parisienne et à Montpellier) et Manolo Nuñez (à Marne-la-vallée) leur donneront l’aspect du marbre » Cette esthétique, on la retrouve attachée à des programmes nobles. En l’occurrence une institution politique, lieu de pouvoir, pour le siège de l’ONU à Paris, du logement à Abraxas par Ricardo Bofill et une bibliothèque, lieu de culture, avec Gordon Bunshaft. Il y est question de monumentalité, de répétition mais aussi de matérialité avec le béton.

SIÈGE DE L’ONU À PARIS Ce bâtiment emblématique, inauguré en 1958, est le fruit du travail de trois architectes, le Français Bernard Zehrfuss, l’Américain Marcel Breuer, et l’Italien Pier Luigi Nervi. Il n’entre pas directement dans la logique de reconstruction, bien qu’il s’agisse de considération économique quant au choix de la préfabrication. La préfabrication fabrique ici de la répétition à une grande échelle. Il fallait une architecture démonstrative à même d’accueillir une institution telle que l’ONU.


Siège de l’ONU à Paris en construction

Le centre-ville re Siège de l’ONU à Paris


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Beinecke library

Les espaces d’Abraxas


C’est dans le domaine du symbole, celui de l’autorité, que l’esthétique de la préfabrication va s’exprimer. Pour ce lieu de pouvoir, la préfabrication va s’anoblir et se distancer de ce qu’il sera produit par la reconstruction.

GORDON BUNSHAFT ET LA BEINECKE LIBRARY DE YALE Réalisée en 1963, il s’agit de la bibliothèque de l’université de Yale aux Etats Unis. Egalement lieux de pouvoir et de culture, cet édifice accueil une des principales bibliothèques patrimoniales du monde. Il s’agit ici également d’une institution dont le rayonnement doit se lire architecturalement. La préfabrication remplie ce rôle grâce à la répétition d’éléments en béton. Une rigueur et une certaine autorité se dégagent de l’édifice. Il s’agit bien d’un monument dédié à la culture.

LES ESPACES D’ABRAXAS DE RICARDO BOFILL Avec Abraxas, Ricardo Bofill réalise en 1983 un projet de logement que l’on pourrait qualifier sans peine d’utopique. Il ne s’agit pas ici de juger la réussite de ce projet mais plutôt ce qu’une telle architecture fabrique en terme d’espace et en terme social. L’échelle de ce projet est particulièrement importante. C’est 600 logements qui sont produits à Abraxas, ainsi qu’un théâtre. A elle seule, la dimension de cette opération est génératrice de monumentalité. Si l’on rajoute à cela l’esthétique de la préfabrication, on se retrouve face à une monumentalité décuplée, presque absurde. Cela est clairement revendiquée par Bofill qui tout au long de sa vie a prôné une architecture social dans laquelle il n’y aurait pas d’économie de moyen. Les habitants d’Abraxas sont souvent interrogés pour comprendre comment l’on vit dans un tel espace. Le sentiment d’être possédé par les lieux est une réponse qui revient souvent. La monumentalité écrase, elle rend difficile tout appropriation. Cependant, un réel plaisir existe à habiter un lieu empreint de grandeur et de noblesse.


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3. L’ARCHITECTURE MÉTABOLISTE

C’est en 1959 que le mouvement métaboliste est créé par un groupe d’urbanistes et d’architectes japonais. Le but de ce mouvement est de réaliser une architecture dont la structure extensible s’apparente au processus de croissance organique. L’architecture métaboliste tient une place de choix lorsque l’on parle de préfabrication. Le point de convergence en est la modularité. Les métabolistes travaillent à partir d’un module unique qui se trouve déployé avec le plus de souplesse possible dans l’édifice. La préfabrication étant l’art de la fabrication de module primaire, on comprend bien l’affinité qu’il peut exister. Au-delà d’une affinité certaine, on peut avancer que la préfabrication est un des éléments indispensables dans le dessin d’une architecture qui se veut métaboliste. Chez les métabolistes, l’élément primaire ne s’empile plus mais bourdonne dans l’espace. Kisho Kurokawa parlera de macroélément habitable dont la superposition modulable génère l’édifice. Si l’impression de grand hasard règne dans les bâtiments métabolistes, on parlera plus volontiers de combinatoire, laissant à l’architecte le soin d’exprimer son art de la composition. C’est dans le logement que les métabolistes expérimenteront et construiront le plus. Ils produiront quelques bâtiments qui aujourd’hui revêtent une dimension iconique.

LA NAKAGIN CAPSULE TOWER DE KISHO KUROKAWA C’est en 1970 que Kisho Kurokawa réalisera la Nakagin Capsule Tower. Cette tour est composée d’un noyau central porteur sur laquelle viennent se fixer des capsules préfabriquées en usine. Ce projet, fortement utopique, fait partie des pionniers du mouvement. Les éléments préfabriqués sont directement identifiables. Ils se donnent clairement à lire en façade et en plan et constituent l’essence même du projet. Une des composantes importantes de ce projet est sa vision prospective. Les capsules étaient ainsi censées pouvoir être remplacées facilement pour permettre


Capsule Tower


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Muralla Roja


une évolution du bâtiment en fonction des changements de modes de vie. Conçues à l’origine pour vingt-cinq ans, aucune n’a cependant été changée depuis 1972. Le bâtiment est aujourd’hui fortement dégradé, en particulier du fait des variations climatiques et des pannes de bon nombre des équipements.

RICARDO BOFILL ET MOSHE SAFDI Deux architectes, Ricardo Bofill et Moshe Safdi réaliseront respectivement La Muralla Roja et l’Habitat 67 dans le plus pure style métaboliste. La technique utilisée est évidement la préfabrication. De grandes proximités s’installent entre ces deux projets d’un point de vue formel. On parlera plus volontiers d’agrégation et de travail sur l’horizontalité là ou Kurokawa proposait un déploiement vertical de ses éléments préfabriqués. Ici aussi, le module primaire est clairement affiché et dessine une architecture de la préfabrication modulaire.


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Habitat 67


Habitat 67


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4.

L’ARCHITECTURE SANS LE SOUS

La préfabrication, nous l’avons vu, est d’un point de vue économique très avantageux. La contrainte économique est une des composantes fondamentales de la pratique de l’architecture. Les projets pouvant se permettent de ne pas prendre en compte ce facteur sont rares. Dans la majorité des constructions, il s’agira plus d’une contrainte pour le projet. Se tourner vers la préfabrication est l’occasion de transformer cette contrainte en élément directeur du projet. Lacaton et Vassal en sont l’exemple le plus parlant. Leur œuvre se concentre sur la problématique de donner plus d’espace et de confort pour un coût minime. Il y a une dimension sociale évidente qui ne peut être atteinte que par ce procédé constructif.

LACATON & VASSAL ET DRUOT « PLUS » Il s’agit d’une étude réalisée pour le Ministère de la Culture et de la Communication et la Direction de l’architecture et du patrimoine en 2004. Frédéric Druot, Anne Lacaton & Jean Philippe Vassal réalise ici ce que l’on pourrait appeler un manifeste architectural et social. Ce travail se concentre sur les citées de logement modernes construites à la périphérie des grandes villes Françaises au cours des années 60 et 70. Leur analyse est la suivante. Ce sont de véritables villes nouvelles qui sont créées pour des populations de migrants originaires d’Afrique du nord. Caractérisé par un revenu faible, ces populations sont l’objet d’une ségrégation sociale et ethnique traduit par un taux élevé de chômage et de criminalité. Il en découle des tensions sociales qui renvoient une image publique exécrable. Cela se traduit par la stigmatisation de l’architecture de ces citées, faisant des grandes tours d’habitation le symbole patent de la misère sociale et de l’échec de la politique d’intégration Française. Ce constat établi, la solution généralement admise consiste à démolir. Dans « Plus », il n’est plus question de détruire mais bien au contraire de rénover ces tours. Cela est proposé comme une méthode qui serait applicable à toute les citées datant de cette période. Le principe est simple, il s’agit de doubler la


Transformation de 530 logements, quartier du Grand Parce, Bordeaux


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Plus


Transformation de 530 logements, quartier du Grand Parce, Bordeaux


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superficie des espaces habitables. La mise en œuvre l’est également et consiste à rajouter en façade un espace qui à sa propre logique constructive. C’est ici que la préfabrication entre en jeu. Son faible coût en fait la méthode constructive la plus évidente. Un autre aspect non négligeable concerne l’aspect rénovation de l’opération. Intervenir sur un existant implique la création de nouvelle contrainte au sein de l’édifice. L’extension créée doit alors générer des surcharges relativement faibles pour ne pas mettre en péril l’existant. La préfabrication permet dans ce cas-là de fabriquer une épaisseur avec une logique structurelle propre. Ce projet est l’exemple même d’une architecture à bas coût qui pourtant ne choisit pas la préfabrication pour cette simple qualité.

RESIDENCE ÉTUDIANT PAR H ARQUITECTES ET DATAAE Le programme de la résidence étudiante est omniprésent lorsque l’on parle d’architecture à bas coût. En réalité, il s’agit moins d’un problème d’argent que de mentalité. Le logement étudiant est pensé comme un dortoir. Les espaces proposés sont extrêmement limités en termes de taille et par conséquent en termes de confort. C’est ici que l’on rejoint les motivations de Lacaton et Vassal, construire plus grand pour le même prix. La préfabrication devient alors un outil dans la main de l’architecte pour atteindre ce but. Et il s’agit bien d’une problématique d’architecte. Il fait partie des rares intervenants dans le milieu de la construction à pouvoir défendre par essence la création d’espace généreux. C’est le cas de cette résidence étudiante qui propose à ses occupants des espaces plus grands que la commande habituelle dans ce genre de programme. A la manière de Kisho Kurokawa et de sa Capsule Tower, les unités de vie sont préfabriquées en atelier. Comme souvent, la préfabrication se comprend sur le chantier car l’on distingue encore les éléments de gros œuvres. Le moyen d’acheminement de ces éléments se comprend également dans cette phase qui est ici réalisé en camion.


Chantier résidence étudiante par H arquitectes et dataAE

Résidence étudiante par H arquitectes et dataAE


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Laboratory buildind, David Chipperfield


1.

ETUDE DE CAS

LE LABORATORY BUILDING À BÂLE PAR DAVID CHIPPERFIELD Ce laboratoire voit le jour en 2006 dans le cadre de la création d’un nouveau campus dans la banlieue de Bâle. L’emprise du bâtiment ainsi que sa hauteur furent fixés par le masterplan. Pensé comme un laboratoire du futur, le projet se veut proposer des espaces de travail flexibles, à la fois partagés et temporaires et dans lesquels il y aurait une certaine fluidité de déplacement entre bureaux et les espaces d’expérimentation. Pour permettre cela, c’est un plan libre que l’on retrouve à l’intérieur du bâtiment. Cette configuration spatiale est permise par une façade porteuse constituée d’éléments préfabriqués et de deux noyaux porteurs. Son intérêt provient de sa méthode constructive et de l’architecture que cela génère. C’est un mode constructif qu’affectionne Chipperfield et que l’on peut retrouver dans bon nombre de ses travaux.

LES FAÇADES Penser la façade comme un élément structurel est profondément générateur dans le dessin d’un projet. Cela va évidemment se lire en façade par des épaisseurs et un dimensionnement à même d’assurer la descente des charges. Cette épaisseur va également engendrer une certaine monumentalité à l’édifice. Il ne s’agit pas d’un simple effet que l’on pourrait rapporter à de l’éclectisme, mais bien au contraire à la manifestation concrète des éléments qui font tenir le bâtiment. Cela génère également un dessin en plan. La structure repoussée en façade permet de dégager l’intérieur de l’édifice d’un grand nombre de points porteurs. Un plan libre dégagé de tout poteau est de ce fait constitué grâce à cette façade structurelle. Le projet est cependant pourvu de deux noyaux centraux qui permettent de reprendre les grandes portées de l’édifice. Dans son dessin d’ensemble, la façade utilise un langage classique faisant intervenir un soubassement et un attique permettant le dénombrement et donc une lecture du bâtiment. Ces variations ne sont pas formelles mais dimensionnelles. Le soubassement mesure 6 m de hauteur, les étages courant 4.50 m et l’attique ne mesure plus que 3.60 m. On a donc ici déjà trois éléments préfabriqués distincts.


Photo patio intĂŠrieur


Plan ĂŠtage courant


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Coupe détail

400

200

100

1.100.96

600

Plan poteau détail



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LA PRÉFABRICATION Au premier regard, on la devine aisément mais elle n’est pas la chose la plus frappante pour un non initié. Les éléments répétés sont visibles et identifiable et pourtant en observant en détails l’édifice, on remarque un grand nombre de variation. Deux éléments composent cette façade. Les éléments verticaux qui font offices de poteaux et des éléments horizontaux qui viennent lier les poteaux à leur base et à leur tête.

LE DESSIN DES POTEAUX Comme vu précédemment, le dessin de la façade génère trois différentes tailles de poteaux. En plan, on remarque qu’ils sont dessinés de la même façon dans tout le bâtiment. Ils prennent la forme d’un carré auquel on aurait appliqué un chanfrein sur l’un des angles. Deux positions existent différenciées par une simple symétrie. Ce travail est subtil mais confère à la façade de fines variations rompant une possible monotonie. Parler de mouvement serait exagéré mais cela permet néanmoins un dessin plus souple. C’est aussi et surtout une manière de capter la lumière comme le feraient des facettes. Leurs différentes orientations permettent de les faire apparaître ou disparaître en fonction du point de vue et de la position du soleil. On retrouve ce travail à l’encontre de la rigidité imposée pas la préfabrication dans d’autres projets de Chipperfield comme au Centre commercial d’Innsbruck. Cela peut figurer du détail mais semble nécessaire au vu de la réputation de monotonie que peut représenter la préfabrication. On dénombre donc seulement trois éléments préfabriqués verticaux dans l’ensemble du bâtiment. Leur différentiation n’est pas formelle mais bien dimensionnelle. On comprend assez bien la dimension économique d’un tel choix. Cependant, ce parti pris ne nuit en aucun cas à l’architecture. Le sentiment de construction à bas coût est absent. Construire pas cher en Suisse, dans une ville comme Bâle semble d’ailleurs impensable.



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LA DIMENSION STRUCTURELLE DES POTEAUX Ils sont chargés d’effectuer la descente de charge de l’édifice et sont donc dimensionnés en conséquence. Leur section est de 60x60cm. Ils sont ferraillés seulement en tête et en pied afin d’assurer la continuité entre chacun des éléments. Ils fonctionnent donc uniquement en compression. Chacun des poteaux à un entraxe égal sur tout le bâtiment mesurant 2.12 m. Cela forme une trame assez resserrée au vue des dimensions en largeur et profondeur des poteaux qui est compensé par leur élancement. Les poteaux et plus généralement la façade sont uniquement structurels. Dans le détail, on remarque qu’aucun fluide et réseaux ne traversent ces éléments. Cette fonction est assurée à l’intérieur du bâtiment par les deux noyaux forts.

ELEMENTS DE LIAISONS HORIZONTAUX Le deuxième élément préfabriqué de ce projet prend place entre les poteaux sous la forme d’éléments de liaison. On pourrait croire qu’il s’agit des planchers mais ce sont bien des éléments dissociés appartenant à la façade. Ces éléments ont une section de 60x30cm. A première vue, on peut identifier trois longueurs différentes qui correspondraient à une longueur équivalente à une, deux et trois travées. En réalité, à ces longueurs identifiées existent de petites variations faisant monter à neuf le nombre d’éléments de longueurs différentes. Pour une travée, l’élément peut mesurer 2.33m, 2.73m ou 3.13m. De la même façon pour deux travées on a 5.06m, 5.46m et 5.86m. Enfin pour trois travées on a 7.69m, 8.19m et 8.59m. Les raisons de la création de ces neufs éléments distincts sont techniques mais aussi profondément liées à des considérations de dessin de la façade. Cette variété de longueur semble anodine mais exprime pourtant l’essence même du travail de l’architecte dans toute sa complexité. Prenons du recul et examinons la façade de l’édifice dans son ensemble. Elle présente une symétrie évidente dont l’axe de symétrie se situe non pas sur un poteau mais sur une travée. Il s’agit d’une composition classique qui fut la règle pour le dessin de colonnade. Cela a pour conséquence de générer un nombre de travée impair.



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On compte onze travées sur la façade est. Cela pose plusieurs problèmes comme l’impossibilité de réaliser un élément unique pour composer la façade (voir schéma). La seule possibilité serait de réaliser un élément préfabriqué unique d’une longueur d’une travée. Cette solution pose alors un problème d’ordre technique. Avec une longueur d’une travée, cela formerai des rectangles qui ne répondent pas au nécessité de contreventement. Cela explique que l’on trouve trois éléments de dimensions distinctes. A ces trois éléments s’en rajoutent six autres qui ne sont en fait que des dérivés des premiers auxquels l’on aurait rajouté ou enlevé 40cm. Cela s’explique par la forme asymétrique des poteaux qui génère trois positions possibles et donc trois longueurs différentes pour chaque travée. Enfin et pour finir, il existe un dernier élément horizontal qui permet de gérer les angles. Pour éviter des jonctions complexes et disgracieuses, les éléments prenant place dans l’angle sont d’un seul tenant. Chacun des éléments d’angles sont identiques avec pour dimension une travée par deux travées. A l’image des éléments de façade, quatre variations existent permettant d’absorber les variations que génère l’asymétrie des poteaux. Cela porte à quatre le nombre d’éléments que nous pouvons distinguer.



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Il est à ce stade possible de dénombrer tous les éléments préfabriqués du projet. Ce sont tous les éléments qui composent l’enveloppe structurelle. Comme nous l’avons vu, ils sont de trois types pour un total de 457 éléments préfabriqués.



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ET AU FINAL ? Il y aurait bien plus à raconter sur ce projet mais il serait question d’éléments de second plan qui ne font pas l’essence de celui-ci. Alors, s’il fallait ranger ce projet dans une des catégories énoncées plus tôt dans ce mémoire, il prendrait place dans ce que j’ai appelé la préfabrication comme un langage. C’est cette architecture de la préfabrication qui n’est pas le simple résultat de nécessité économique. C’est celle qui a su transcender cette question pour raconter bien plus. C’est lorsque les architectes ont su utiliser la préfabrication comme un outil de narration. Cet édifice est un laboratoire dédié à la recherche scientifique. Il s’agit d’un programme qui revêt une certaine noblesse, suffisamment au moins pour en faire un monument dans la ville. Et pourtant, nulle monumentalité absurde n’apparait. A l’image de ce que peut être la science, ce n’est pas le lieu d’un pouvoir écrasant mais plutôt l’espace d’un jeu subtil entre rigueur et élégance. Il est ici affaire de mesure, sans doute le terrain le plus propice à la rencontre de la science et de l’architecture. Enfin, le jeu savant, correct et magnifique de la lumière fait vivre ce volume. Derrière cette rigueur propre à la préfabrication se jouent les surprises à même d’insuffler la vie à cet amas de pièces de béton.



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CONCLUSION La préfabrication peut sembler être une méthode constructive permettant certaine facilité. Et si cela s’avère juste dans une certaine mesure, le risque serait de la considérer comme simpliste. Cela illustre selon moi exactement le dilemme de l’architecte. Il doit être pourvoyeur d’évidence. Quand il construit, il ne parle pas à ses confrères avec qui il partage peu ou prou ses connaissances mais plutôt à ce conglomérat un peu flou qu’est la société. L’architecte construit pour les autres, pas pour ses semblables. Alors ce qu’il dessine, ce qu’il essaye de dire doit être compréhensible, simple et évident. La réalité de l’architecte est bien souvent plus complexe qu’il n’y paraît. La préfabrication, sous une apparente simplicité, l’est tout autant. Cette convergence prend corps en particulier dans l’édifice étudié au travers de ce mémoire. Au premier regard, certaines choses apparaissent de manière plutôt directe, ce sont les évidences. Il s’agit d’un exosquelette constitué d’une trame en béton préfabriqué. A l’intérieur deux noyaux pour libérer les planchers. C’est évident, ça marche et ça se voit en plan comme en photo. La deuxième lecture, celle que je me suis attaché à retranscrire à travers ce mémoire, raconte l’histoire du travail de l’architecte. Ce sont les richesses, invisibles à l’œil nu, qui pourtant écrivent dans un langage universel la réussite d’un édifice. Ce sont chacune des subtilités qui séparées ne pèsent pas grand-chose mais qui permettent un tout cohérent. Alors pourquoi ça marche aussi bien ? Sans doute parce que Chipperfield sait créer le substrat nécessaire à l’émergence des évidences. Sans doute aussi que la méthode constructive qu’est la préfabrication permet de convoquer le dialogue subtile d’une architecture savante à une certaine simplicité. Cela serait une erreur de considérer la préfabrication uniquement comme un outil froid et malléable entre les mains de créateurs omnipotents. La mesure de ces potentialités semble être la seule voie permettant une architecture raisonnée.


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BIBLIOGRAPHIE Dominique Amoureux, Marcel Breuer, les réalisations Françaises, Paris : Ed. du Patrimoine, 2014 EXE, Prefabrique prefab, n° 16, Juin 2014 Lacaton & Vassal, Druot, Plus, Ed. Gustavo Gili; Édition 2007 El croquis, David Chipperfield, n° 150, 2014



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