J1 VS Entrecasteaux

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PROPOSITION POUR LA REQUALIFICATION DE LA CITADELLE D’ENTRECASTEAUX ET DE LA HALLE DU J1 A MARSEILLE

J1 VS ENTRECASTEAUX UN NOUVEAU PROCESSUS DE FABRIQUE DE LA VILLE

AT

Céline Teddé + Jérôme Apack architectes 48 boulevard Notre Dame . 13006 Marseille + 33( 0) 9 84 48 00 6 4 . a g e n c e @ a g e n c e a t . c o m



SOMMAIRE

Avant-propos | «La fabrique des climats»

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Origine Urbanisme d’instinct

Analyse de la situation

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Entrecasteaux J1 Opportunité Réactivation

Méthodologie d’action

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Vases communicants Identités Programme Processus Cerise sur le gâteau, passerelles entre les rives

Conclusion

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APPEL A IDÉES POUR LA REQUALIFICATION DU SITE DE L’ÉCOLE D’APPLICATION DE L’INFANTERIE À MONTPELLIER

LA FABRIQUE DES CLIMATS UN NOUVEAU CONCEPT-PARC POUR MONTPELLIER

VILLE DE MONTPELLIER AGENCE AT / JÉRÔME APACK + CÉLINE TEDDÉ / ARCHITECTES CHRISTINE DALNOKY / ARCHITECTE PAYSAGISTE DOMENE / QUALITÉ ENVIRONNEMENTALE FRANCESCO DELLA CASA / CONSULTANT FESTIVAL


«LA FABRIQUE DES CLIMATS» | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Avant-propos | «La fabrique des climats»

Origine En 2009, en pleine activité décroissante de l’agence, nous avons répondu à l’appel à idées lancée par la Ville de Montpellier portant sur la reconversion du site de l’École d’Application de l’Infanterie (EAI), vaste territoire de 24 hectares situé à seulement 10 minutes à pied du centre-ville, après son abandon soudain par l’armée à l’occasion d’un redéploiement territorial de ses activités. Soucieuse du devenir de cette «terra incognita» cernée de hauts murs d’enceinte, la Ville avait invité des équipes pluridisciplinaires à réfléchir sur son devenir, en proposant une réappropriation par la société civile du site compatible avec le faible budget dont elle disposait dans l’urgence pour y parvenir. Le site de l’EAI étant composé d’une partie bâtie (le casernement) et d’une grande vacance faiblement bâtie et largement arborée au caractère bucolique (le champ de tir), il nous avait semblé évident de s’appuyer sur ce déjà-là pour proposer à la fois le remploi des bâtiments existants pour y accueillir de nouvelles activités, mais surtout, de maintenir intégralement le vide urbain du champ de tir pour en faire un grand parc public, véritable poumon vert inexistant jusqu’alors au cœur de Montpellier.



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Face aux faibles moyens financiers dont la Ville disposait pour cette reconversion, nous avions proposé, à l’aide de Christine DALNOKY, paysagiste, de ne pas utiliser le processus traditionnel de fabrique d’un parc aboutissant à un objet «fini» souvent sans âme et ennuyeux, mais de travailler sur un processus itératif, à l’image de celui utilisé pour la reconversion des friches industrielles et ferroviaires, permettant de requalifier un site à plus ou moins long terme au gré des ressources disponibles tout en proposant une diversité et une richesse de situations bien plus appropriables par le public qu’un lieu créé ex nihilo et sans épaisseur . Nous substituions ainsi à la belle image immédiate du parc fini celle d’un parc à l’image de Montpellier, ville méditerranéenne ouverte sur le monde, construite par stratifications au gré des grands courants migratoires. Un parc dont on penserait qu’il a toujours été là, sans pouvoir être ailleurs, un parc situé.

Ci-contre, Bâtiment de l’EAI, Montpellier

Un tel processus nécessitant d’être alimenté par l’économie, nous avions proposé, à l’aide de Francesco Della Casa, alors directeur du festival Lausanne Jardins, d’adosser la fabrique de ce parc à une biennale de la médecine, qui est une discipline montpelliéraine reconnue internationalement et historiquement, et plus particulièrement de la médecine par les plantes, vaste sujet revenu dans l’air du temps par la grande porte grâce à quelques figures médiatiques qui l’ont défendu.



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Tous les deux ans, un pays invité aurait fait part de son savoir en la matière. Cela aurait été l’occasion de déployer dans la ville et sur site des activités permettant de maintenir et promouvoir l’économie locale mais aussi de construire une partie du parc avec des plantes acclimatées du pays en question. Chaque partie du parc aurait proposé alors un climat particulier reflétant celui du pays invité. Le thème du voyage des plantes, mouvement migratoire à part entière et de leur acclimatation était convoqué. La boucle était bouclée... La «fabrique des climats», nouveau concept de genèse d’un parc était né. Il n’y avait plus qu’à en tirer les fils pour restructurer le site : le casernement aurait servi à héberger un centre de recherche sur la médecine par les plantes, chercheurs et étudiants de tous pays, auraient été hébergés sur site en transformant d’autres bâtiments en logements, d’autres auraient été transformés en bibliothèque spécialisées, salles de projections, centre de congrès, le mess en cafétéria, etc. Une étude typologique avait été menée pour exploiter au mieux le bâti existant et les financeurs de cette grande opération de réemploi auraient fait partie des grands groupes pharmaceutiques forcément enclins à donner une image positive de leur activité de recherche.



«LA FABRIQUE DES CLIMATS» | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Urbanisme d’instinct Six équipes avaient été retenues pour poursuivre le développement de leurs idées en concertation avec la Ville mais aussi avec chacune des autres équipes à l’occasion de tables rondes organisées par la Ville. La mise en forme de la synthèse de nos réflexions étant libre, nous avons remis notre réflexion sous forme d’un petit livret façon mode d’emploi de la «fabrique des climats» en lieu et place d’un plan d’urbanisme précis que l’on aurait attendu d’un tel projet. Cette forme nous paraissait plus ouverte, plus facile à communiquer aux différents acteurs pouvant être amenés à être engagés dans l’aventure et plus propice à lancer un véritable travail opérationnel sur une base partagée par le plus grand nombre.

Ci-contre, études des micro-climats en vue de l'implantation des futurs jardins

Par la suite, la Ville de Montpellier a lancé une consultation d’urbanistes sur une base programmatique formant synthèse des propositions des six équipes. Malheureusement, l’idée du festival a été abandonnée, mettant en crise l’équilibre financier de notre proposition. Le parc a été maintenu, mais à l’inverse des grands parcs urbains structurants les grandes villes, les franges du site seront plus ou moins densifiées par de la promotion privée. Profitant des atouts et du «génie du lieu», l’équipe d’urbanistes saura sans doute proposer quelques originalités et mixités typologiques mais le processus de fabrique de ce morceau de ville ne permettra pas autant le foisonnement et l’appropriation par le public qu’un processus long et itératif l’aurait permis. Ici, l’urbanisme de tracés, fort à propos dans certaines situations s’oppose à un urbanisme que nous qualifierons d’»instinct» et d’opportunités, plus enclin à l’émergence d’une ville véritablement nouvelle, avec les nouveaux usages qui l’accompagnent.




Halle du J1



Projet S6

Groupe APACK / JULIENNE

Belvédère

Photomontage

Toboggan

Photomontage

Escalier

Photomontage

Gradins

Photomontage

Toboggan

Photomontage

MICHELETTI Gaspard, BLANDIN Maxime, CHAREYRE Yohann, MENDOUR Soumaya

Belvédère

Photomontage


ANALYSE DE LA SITUATION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Analyse de la situation

Entrecasteaux Il faut l’avouer, lorsque la Ville de Marseille a lancé l’appel à projet pour la reconversion du site d’Entrecasteaux, nous sommes allés le visiter, plus par curiosité que par réelle intention de répondre à cette consultation.

Ci contre, travaux d'étudiants de 3ème année de licence autour d'un programme d'école élémentaire, ENSA-M, semestre de printemps 2017. Proposition d'occupation du pied du Fort d'Entrecasteaux.

Quelques enseignants de l’École Supérieure d’Architecture de Marseille, dont nous faisons partie, avaient repéré le potentiel urbain du site et venaient d’y faire travailler les étudiants de 3ème année à l’occasion d’un programme public de groupe scolaire intitulé «La nouvelle école de la République». Les réponses des étudiants étaient sans appel : le site devait permettre de relier l’avenue de la Corse et le boulevard Charles Livon grâce à un parc public ponctué tantôt d’oeuvre d’arts, tantôt de micro-équipements (théâtre de plein air, buvette, etc.) profitable à tous les publics y compris ceux de l’école conçue sur le site. De nombreuses agences d’architecture et d’urbanisme répondront certainement à l’appel à projet et proposeront sans doute ce lien urbain ainsi qu’une programmation plus ou moins surprenante s’adossant sur les qualités urbaines et paysagères incroyables du lieu tout en préservant l’activité d’insertion pré-existante.





Citadelle d’Entrecasteaux



ANALYSE DE LA SITUATION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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J1

Un peu plus tard au court de l’été, l’appel à projet «Oser le J1» pour la reconversion du site éponyme est lancé par le Grand Port Maritime de Marseille (GPPM). Là encore, il s’agit de faire des propositions pour réactiver ce site qui a été un des points forts de la manifestation Marseille Provence 2013, capitale européenne de la culture, avec notamment l’exposition magistrale sur l’œuvre de l’architecte Le Corbusier qui a su tirer pleinement partie de la situation exceptionnelle de ce môle situé en entrée du bassin du Port. Ci-contre, exposition Le Corbusier dans la halle du J1. Marseille 2013

Tout comme pour l’appel à projet sur le site d’Entrecasteaux, nombre d’équipes pluridisciplinaires répondront sûrement, là encore en proposant pléthore de programmes tirant partie des opportunités du bâtiment existant et du «génie du lieu».


021 MP2

MARSEILLE PROVENCE

2021

CAPITALE MÉDITERRANÉENNE DE LA MER ET DES NOUVELLES PRATIQUES URBAINES


ANALYSE DE LA SITUATION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Opportunité

La reconversion de sites tels que le fort d’Entrecasteaux ou le hangar du J1 est une formidable opportunité pour restituer au public marseillais des «terrae incognitae» situées en plein cœur de la ville et qui ont compté dans son histoire. Gageons que la Ville et le GPPM sauront maîtriser cette situation grâce à leur propriété du foncier et leur objectif commun de poursuivre la réconciliation des habitants avec leur ville et leur port, telle que l’a laissé entrevoir l’engouement des marseillais pour les infrastructures créées à l’occasion des manifestations culturelles de 2013. Le modèle d’Istanbul est pris ici en exemple par les décideurs par opposition aux marinas de Floride mais le danger de telles opérations placées entre les mains d’opérateurs privés est de dévoyer l’objectif premier d’usage public des sites vers un objectif plus mercantile qui tendrait à produire des propositions génériques et décontextualisées qui, sous prétexte de vouloir s’adresser à tous les publics, ne s’adresserait à (presque) aucun, et certainement pas aux marseillais. Dès lors, que faire pour que ces sites une fois reconvertis «soient marseillais»?



ANALYSE DE LA SITUATION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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S’adresser à des opérateurs privés, c’est avant tout apporter du capital opérationnel que les collectivités ne possèdent plus. C’est aussi s’assurer de la réussite contractuelle d’une opération dans un laps de temps le plus court possible, assorti de pénalités en cas d’échec. Tous les bâtisseurs (élus, opérateurs, promoteurs, urbanistes, maîtres d’œuvre et entreprises) connaissent cette méthode de construction de la Ville et de son architecture qui est un processus soumis au nécessaire remboursement de prêts et aboutissant à un objet fini de moins en moins compatibles avec la fulgurance de l’évolution de nos sociétés et avec les aspirations de chacun. Aujourd’hui, de tels projets doivent être ouverts, évolutifs, convertibles, mutables. Leurs prix sont tellement exorbitants qu’ils doivent être construits pour durer ou bien se construire par phases successives dans le long terme avec les moyens dont on dispose au fil de l’eau. Peut-être que ces appels à projet doivent être l’occasion de mettre en œuvre de nouveaux processus de fabrique de la Ville, dans un esprit de résistance aux pratiques convenues, qui est un trait de caractère de Marseille, et pour que la réussite de ces reconversions aille au-delà de la simple réhabilitation urbaine et architecturale d’un lieu.


R

Marseille Jazz des cinq continents

Il y ade plusieurs FidMarseille, Festival International Cinémaconstations face à l’offre de z des cinq continents festival à Marseille : Rencontres Internationales Sciences & Cinéma Festival International de Cinéma - Elle est multiple bien que fortement Festival Marsatac nternationales Sciences dominée par les festivals de musique. Le atac Festival Etang d’Arts cinéma, la danse et les arts de rue sont eux g d’Arts aussi bien représentés.

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LA SITUATION | «ENTRECASTEAUX VS J1» | 29 Mars Relevé ANALYSE des DE festivals d’importance à

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Biennale Internationale des Arts du Cirque Le site du fort d’Entrecasteaux s - Les festivals ont tendance à étendre Festival de Marseille Danse dansmultiples une des zones peu innervées leur programmation sur tout le territoire Mar- et Arts seille et se trouve donc idéaleme seillais. Pour exemple, festival de Marseille Babel le Med Music pour servir de relais culturel sur la (musique et danse) s’approprie pas moins de du vieux port. 10 lieux dans Marseille.

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- Les lieux capables d’accueillir ce genre d’événement forment un maillage abstrait

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ANALYSE DE LA SITUATION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Réactivation

L’histoire de la «fabrique des climats» nous semble ici pouvoir être réactivée, chacun de ces sites pouvant se reconstruire patiemment à l’aide d’un processus itératif lent. En effet, pourquoi être pressé ? Pourquoi ne pas permettre aux marseillais et aux touristes de s’approprier tout ou partie du site dès maintenant ? D’admirer la vue sur le Vieux-Port et la rade depuis Entrecasteaux ? De profiter de la brise au bout de la digue du large ? Ci dessus,la toiture de la Friche de la Belle de mai avant réhabilitation

À Marseille, un tel processus existe. C’est celui de la reconversion de l’usine de la SEITA en pôle culturel à la Belle de Mai. Une réussite. Quel plaisir d’assister à un concert sur son toit un soir d’été. Un temps suspendu... Reste à trouver le vecteur du processus.

Ci-contre, Le toit terrasse de la Friche de la Belle de mai réhabilité par l’agence Marseillaise ARM.

Une biennale ? Si cela peut suffire à l’échelle d’un parc, c’est bien peu crédible à l’échelle des deux sites... Gourmands en énergie, mais plus humanistes, de tels processus innovants nécessitent néanmoins un pragmatisme économique à toute épreuve !


Musée

Support d’événements


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Méthodologie d’action Vases communicants Le lancement concomitant des deux appels à projet constitue à ce titre une opportunité. Plutôt que de considérer chaque site comme une entité autonome, en lien avec la ville proche qui l’entoure mais déconnecté l’un de l’autre, ils pourraient être imaginés comme fonctionnant ensemble, en réseau, et se nourrir mutuellement, à l’image de vases communicants. L’idée peut paraître naïve mais elle est néanmoins cohérente dans une logique de requalification de la façade maritime de Marseille et de la mise en relation des deux rives du VieuxPort, comme un symbole de la réunification du Sud et du Nord de la ville grâce à son littoral. Le J1, occupé par du bâti, doit accueillir une activité ayant besoin de s’abriter. Pourquoi ne pas imaginer un programme de musée en guise de bernard-l’hermite principal. La vastitude de ses espaces permettrait d’accueillir des programmes complémentaires dont la thématique tournerait autour de celle du musée. Le fort d’Entrecasteaux est une butte paysagère, une sorte de tumulus, sépultures en moins... C’est déjà en quelque sorte un parc possédant des espaces de formes et de tailles variées capables d’accueillir des activités de plein air ou bien une biennale dont le thème entrerait en résonance avec celui du musée.



MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Identités

Quel(les) identité(s) donner à ces lieux pour y fédérer les marseillais mais aussi les voyageurs, touristes et visiteurs de la région, sources d’apport de capitaux extérieurs et portes paroles au monde des qualités de la Ville ? Marseille est une ville à deux visages.

Ci-dessus, La corniche Kennedy

Ci-contre, Le Panier

Il y a celui de son littoral et de sa rade que nombreux définissent avec orgueil comme «la plus belle rade du monde», de sa lumière exceptionnelle, de la blancheur de ses îles calcaires et de la ville au loin. C’est celui de la terre d’accueil qui a fait dire un jour aux Grecs : «c’est ici et pas ailleurs». Il y a aussi son visage urbain plus ambiguë et plus sombre, du centre à sa périphérie justement amputée de moitié par la rade, visage multi-culturel jugé sale et peu accueillant voire dangereux jusqu’il y a peu par les voyageurs et les marseillais eux-mêmes. Depuis quelques années, les efforts des collectivités publiques tendent à lui donner une nouvelle image, celle d’un territoire urbain qui s’approprie, se pratique par les différentes communautés qui constituent Marseille, se grime de tags parfois sympathiques, jusqu’à voir certaines de ses façades habillées des photos géantes de l’artiste JR, comme un signe de sa rédemption.



MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

Ci-dessus, oeuvre de JR, UNFRAMED, Marseille, 2013

Ci-contre, Artiste inconnu, Callelongue

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Ces deux visages se rencontrent parfois, souvent avec bonheur quand cela est possible comme au Sud du VieuxPort, le long de la corniche Kennedy jusqu’au village des Goudes, comme une sœur et un frère qui se retrouveraient après un moment passé loin de l’autre. Ne pourrait-on pas imaginer ces deux visages se rencontrer ici pour former l’identité du Fort d’Entrecasteaux et du J1, comme un signe supplémentaire en plein cœur de Marseille de la réconciliation de la ville avec son littoral. Une identité au goût doux-amer que Marseille peut laisser parfois, à l’image des menus gastronomiques «terre-mer» cherchant à mêler deux identités culinaires que tout opposerait à priori.


MarchĂŠ des produits de la mer

R+1

MusĂŠe de la mer


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Programme Imaginons donc deux musées et non plus un seul, deux biennales alternées comme celles d’Art et d’Architecture de Venise et non plus une seule. Deux musées qui s’adresseraient à la fois aux marseillais et aux voyageurs. Deux biennales aux thématiques ancrées dans la culture de la ville et intéressant le monde. Ce n’est pas simple... Et pourtant, tout pourrait être simple. Nous avons constaté qu’un des visages de Marseille est tourné vers la mer, il lui faudrait donc un musée. L’autre est tourné vers la ville, un autre musée pourrait en parler aussi... Un musée de la mer, étrangement absent de Marseille à l’heure actuelle, pourrait occuper l’étage supérieur du J1. On pense à l’attrait des aquarium de Gênes et Monaco, ou à la reconversion du vélodrome olympique de Montréal de 1976 en biodôme. A processus nouveau, nouvelles façons d’exposer les choses, entre aquariums géants sur fond d’îles du Frioul et réalité augmentée pour une immersion totale.


Culture urbaine

RDC

Street-art


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Le musée de la mer pourrait être accompagné d’une halle de marché aux produits marins, comme les belles halles des marchés de Barcelone ou de Lisbonne dans lesquelles on peut également se restaurer sur le pouce. On y autorise dès lors des petits kiosques de restauration rapide à base des produits du marché, comme les échoppes qui vendent des sandwiches aux calamars que l’on peut trouver dans les petites rues de Venise.

Un musée des nouvelles pratiques urbaines, innovant mondialement par sa thématique, occuperait le rez-dechaussée du J1, plus en lien avec la ville... En accompagnement de ce musée, on pourrait mettre en place des activités qui convoquent la culture urbaine, et plus particulièrement la culture urbaine marseillaise : streetart, micro-terrains de sport, sports de découverte urbaine (marche urbaine, footing, vélo urbain, kayak, paddle), skatepark, cinéma de plein air, etc. Ce musée serait un musée vivant. En complément de retracer l’histoire des pratiques urbaines, il proposerait aux visiteurs des activités et des parcours urbains pour découvrir la ville. Ce serait un musée dans les murs et hors les murs...


festival

parc public


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Le site d’Entrecasteaux accueillerait les deux biennales, celle des nouvelles pratiques urbaines et celle de la sardine, à portée de vue de l’entrée du vieux-port. C’est une boutade bien sur, le thème de cette biennale reste à trouver mais il serait forcément en lien avec le musée de la mer. Le reste de l’année, le fort d’Entrecasteaux a le statut de parc public, comme le jardin des Giardinis à Venise. Il permet de relier l’avenue de la Corse avec le boulevard Charles Livon. Les activités actuelles y sont maintenues, tel le tir des feux d’artifice. On pourrait y accueillir ponctuellement des festivals, et notamment ceux à la dérive sans domicile fixe, tant l’offre marseillaise est riche en la matière. L’association

d’insertion

continuerait

méticuleusement

à remettre en état le bâti tel qu’elle le fait parfaitement aujourd’hui. Ci-après, carte des parcours GR13 balisés.

Une école publique y serait éventuellement implantée à son pied.




Halle du J1

Parcours urbain Ancien rempart


2 Le Panier

3 St Charles

4 La Friche de la Belle de Mai

5 Le cours Julien

6 Place de l’OpÊra

7 Place du palais de Justice

7 Plage du Prado

8 Plage du Prado


Halle du J1

Parcours en mer, navette maritime


2 La digue du large

3

L’Estaque

4 Le Frioul

5

Les Calanques

6 La Corniche Kenedy

7

Le Marégraphe

8 La Criée

9 Marché aux poissons



MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Processus

Il faut que la mécanique de financement soit simple pour garantir la réussite du projet et chacun doit pouvoir récupérer sa mise de départ par la suite. Ci-dessus, oeuvre de Bansky, LA FILLE AVEC UN BALLON, Londres, 2002

Ci-contre, oeuvre de JR, UNFRAMED, La Belle de mai, Marseille, 2013

Il s’agira d’abord de trouver deux investisseurs, un pour chaque musée, capables de semer les premières graines. Soit les collectivités territoriales s’y engagent, soit il sera fait appel à du mécénat privé en prenant l’exemple de la fondation Luma en Arles par exemple. Les premières graines serviront à (re)mettre en conformité le J1 pour l’accueil du public. Au début, il s’agira de faire peu mais spectaculaire pour lancer le processus et fédérer le public : par exemple pour le musée des nouvelles pratiques urbaines, faire venir des artistes tels que Banksy (sans que l’on puisse le reconnaître) et JR pour produire les premières œuvres du musée in situ lors d’un grand happening. Ils font l’unanimité, le succès est garanti.


Association de réinsertion et réhabilitation du fort d’Entrecasteaux

Mise en sécurité du site, accessibilité PMR, service d’accueil, sanitaires, etc

Coûts de fonctionnement des deux musées et des deux biennales


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Le processus s’enclenche dès lors avec, pour chaque entrée payante dans les deux musées du J1 :

• Une fraction reversée à l’association de réinsertion qui réhabilite actuellement le fort d’Entrecasteaux pour qu’elle puisse continuer à le faire jusqu’au bout. Ils le font bien et c’est pour la bonne cause, tout le monde sera d’accord.

• Une fraction utilisée pour faire des aménagements sur le fort que l’association de réinsertion ne sait pas faire : mise en sécurité du site, accessibilité PMR, service d’accueil, sanitaires, etc.

• Une fraction utilisée pour financer en alternance la biennale du street-art (ou une autre sur les nouvelles pratiques urbaines) et la biennale de la sardine (ou une autre sur le thème de la mer) qui se tient à Entrecasteaux, en complément des musées.

Le solde pour les coûts de fonctionnement et d’accueil des deux musées.



MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Les vases peuvent maintenant communiquer par l’intermédiaire des entrées payantes aux deux biennales qui servent à alimenter à leur tour les fonds d’acquisition des deux musées et des programmes complémentaires d’accompagnement sur les quais du J1 et à ses abords. Avec le temps, les projets prendront de l’ampleur et les deux sites se reconvertiront peu à peu sur les opportunités financières et conjoncturelles de l’instant, et non sur la base d’un master plan figé des années auparavant à l’aide d’un plan d’investissement où le risque d’obsolescence programmatique entre les besoins d’origine et ceux à venir est fort probable. Les pratiques urbaines évolueront, le musée s’en fera l’écho. La reconversion de chacun des sites se fera par sédimentation, par stratification, à l’image de Marseille, ville méditerranéenne.



MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Cerise sur le gâteau

Tout cela ne fonctionnera pas de manière optimale sans un fil, ou plus précisément un lien. Nous voulons parler ici de la nécessité de relier les deux sites entre eux sans avoir à faire le tour du Vieux-Port.

Ci-dessus, le pont transbordeur, Bilbao

Il y avait l’emblématique pont transbordeur qui a laissé à la ville et dans les mémoires une image prégnante. Le plus simple serait de tendre entre les forts les mêmes passerelles que celles du MUCEM, comme autant de fils de pêche pour espérer rapporter du poisson. Ou encore, utiliser le modèle du pont habité par du logement ou du petit commerce pour relier les deux rives...

Ci-contre, Le pont Transbordeur du Vieux-Port, Marseille

Mais il y a aussi le téléphérique. Ce projet qui s’en va et revient pourrait trouver là tout son sens en partant du J1, s’arrêtant au Fort Saint Jean, franchissant le Vieux-Port pour faire une halte au fort d’Entrecasteaux et terminer sa course à la Bonne Mère. Les marseillais pourraient le prendre au vol alors que les touristes et les voyageurs le prendrait (presque) depuis le quai par lequel ils sont arrivés.


Projet de pont à Bordeaux, Rem Koolhaas

Projet de pont à Bordeaux, Rem Koolhaas


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

Ponte Vecchio, Florence, Italie

Téléphérique de Lisbonne, Portugale

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Passerelles reliant le fort St Jean à la citadelle d’Entrecasteaux


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Entrecasteaux

Notre-Dame de la Garde


MÉTHODOLOGIE D’ACTION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

J4

J1

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CONCLUSION | «ENTRECASTEAUX VS J1» |

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Conclusion Le lancement concomitant des 2 appels à projet constitue à ce titre une opportunité. Plutôt que de considérer chaque site comme une entité autonome, en lien avec la ville proche qui l’entoure mais déconnecté l’un de l’autre, ils pourraient être imaginés comme fonctionnant ensemble, en réseau, et se nourrir mutuellement, à l’image de vases communicants. L’idée peut paraître naïve mais elle est néanmoins cohérente dans une logique de requalification de la façade maritime de Marseille et de la mise en relation des 2 rives du vieux-port, comme un symbole de la réunification du Sud et du Nord de la ville grâce à son littoral. Le J1, occupé par du bâti, doit accueillir une activité ayant besoin de s’abriter. Pourquoi ne pas imaginer un programme de musée en guise de Bernard L’hermite principal. La vastitude de ses espaces permettrait d’accueillir des programmes complémentaires dont la thématique tournerait autour de celle du musée. Le fort d’Entrecasteaux est une butte paysagère, une sorte de tumulus, sépulture en moins... C’est déjà en quelque sorte un parc possédant des espaces de formes et de tailles variées capables d’accueillir des activités de plein air ou bien une biennale dont le thème entrerait en résonance avec celui du musée.


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