Emile & Ferdinand n°11 (2015-3)

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Emile& Ferdinand Gazette du

Juillet-Août 2015 | N°11 Bimestriel gratuit Bureau de dépôt : 3000 Leuven Masspost | P-916169

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Carte blanche Olivier Fréget Pourquoi l’action de la Commission européenne contre Google devrait inquiéter les Européens plus que les réjouir ?

10 Parcours

d’étudiants Amélie Dopchie Une semaine au Palais des Nations…

14 Web TV

Ensemble, Agissons ! Le Congrès 2015 d’AVOCATS.BE en vidéos

Et aussi

 Les dates à ne

pas manquer 

...

Actu Alain Zenner

’’

Il faut révolutionner le droit de l’insolvabilité”


ÉDITO

Chers lecteurs, Chers auteurs, Nous vous avons concocté quelques lectures

estivales...

Vous n’avez pas pu assister au Congrès biennal, #Agissons, d’AVOCATS.BE organisé en mai dernier ? Et vous souhaitez prendre connaissance des conclusions de cette journée consacrée à l’avenir de la profession d’avocat ? Aucun problème ! En tant que sponsor principal du Congrès, le Groupe Larcier a filmé les conclusions des différents ateliers. Les vidéos sont disponibles sur la chaîne YouTube du Groupe Larcier. Il ne vous reste donc plus qu’à vous installer devant votre écran, confortablement assis dans votre fauteuil.

A

colophon Rédacteur en chef Élisabeth Courtens Secrétaire de rédaction Anne-Laure Bastin Équipe rédactionnelle Anne-Laure Bastin, Élisabeth Courtens, Charlotte Claes et Muriel Devillers Lay-out Julie-Cerise Moers (Cerise.be) © Groupe Larcier s.a. Éditeur responsable Marc-Olivier Lifrange, directeur général Groupe Larcier s.a. rue Haute 139 - Loft 6 1000 Bruxelles Les envois destinés à la rédaction sont à adresser par voie électronique à emileetferdinand@larciergroup.com

lain Zenner revient pour nous sur la loi relative à la continuité des entreprises. Entrée en vigueur le 1er avril 2009 dans sa version originale, la loi a permis à plusieurs entreprises de se restructurer. Elle a toutefois déçu de nombreux créanciers mis eux-mêmes en péril par le défaut de paiement, d’où la réforme de 2013. Cette réforme porte-telle ses fruits ? Alain Zenner nous livre ici ses propres réflexions dont la nécessité, selon lui, de « révolutionner » le droit de l’insolvabilité. En mars dernier, Amélie Dopchie, membre de l’association LouvainMUN a vécu une semaine au Palais des Nations à Genève, avec une dizaine d’étudiants de l’Université catholique de Louvain. Elle nous raconte cette belle expérience.

Avocat au Barreau de Paris, Olivier Fréget nous fait réfléchir sur le droit de la concurrence. Deviendrait-il une machine produisant de l’arbitraire ? Selon lui, l’action de la Commission européenne contre Google devrait davantage inquiéter les Européens plutôt que de les réjouir. Enfin, l’été pour le Groupe Larcier rime avec nouveauté. En effet, en juin, le Groupe a lancé Strada lex Luxembourg, la nouvelle base de données juridique dédiée au marché luxembourgeois. Retour sur ce lancement avec Marc-Olivier Lifrange, CEO du Groupe Larcier.

Belles lectures… L’équipe rédactionnelle d’Émile & Ferdinand

Cette gazette est la vôtre ! N’hésitez pas à proposer des articles, à formuler des suggestions, à réagir aux articles publiés et, ainsi, à faire évoluer et faire grandir Émile & Ferdinand. Adressez-nous vos messages à l’adresse suivante : emileetferdinand@larciergroup.com

2|Emile & Ferdinand| N°11 |Juillet-Août 2015


LE MOT DE L'ÉDITEUR

STRADA LEX

LUXEMBOURG www.stradalex.lu Marc-Olivier Lifrange CEO Larcier Group Le Groupe Larcier vient de lancer sa nouvelle base de données Strada lex Luxembourg, une nouvelle offre de contenu spécialement dédié au marché luxembourgeois. Comment un projet de cette ampleur est-il conçu et préparé ? Quelles sont les principales qualités de cette nouvelle base de données ?

Tout comme nos autres projets, Strada lex Luxembourg nous a été inspiré par les demandes du marché. Cela fait aujourd’hui plus de quinze ans que le Groupe Larcier s’investit dans l’édition juridique au Grand-Duché de Luxembourg. L’expansion prise récemment grâce à Promoculture-Larcier nous a naturellement conduits au développement d’une base de données juridique dédiée au droit luxembourgeois (législation, jurisprudence et doctrine). L’utilisateur de notre base pourra, en autres, retrouver à coté de sources publiques comme le Mémorial, les Recueils Promoculture-

Larcier, les Codes mais aussi le Journal des tribunaux Luxembourg et la nouvelle Revue générale de fiscalité luxembourgeoise. Strada lex Luxembourg bénéficie de toute l’expérience que nous avons acquise avec nos autres bases de données en termes d’ergonomie, d’efficacité de recherche et d’exploitation de documents. Strada lex Luxembourg sera aisément consultable à la fois sur PC, sur tablette et sur smartphone. La recherche juridique devient donc plus facile, plus rapide et plus efficace. Strada lex Belgique, Strada lex Luxembourg et alors demain, un Strada lex Europe ? Avec l’européanisation du droit n’est-ce pas naturellement l’étape suivante ?

Le « droit européen » en ligne est en effet notre prochaine étape et ce, à très courts termes. Le Groupe Larcier a acquis via, entre autres, Bruylant une réputation d’innovation et de qualité au-delà de

nos frontières dans les matières européennes et internationales. Ce projet qui se concrétisera dans les prochaines semaines est réellement passionnant car il nous permet de nous adresser à de nombreux professionnels du droit au-delà de nos frontières. Le Groupe Larcier avec sa filiale DBIT continue donc à développer des outils et à innover. Quels sont les autres projets ?

Les possibilités qui nous sont aujourd’hui offertes nous permettront dans un avenir proche de proposer à nos clients des services innovants. Le numérique a, depuis longtemps, dépassé le stade de l’archivage et la recherche de documents. DBIT, la filiale qui assure nos développements IT, travaille sur plusieurs projets tels que la synthèse vocale automatique et la réalité augmentée. J’y reviendrai dans les prochains mois.

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ACTU

“il faut révolutionner le droit de l’insolvabilité” La loi relative à la continuité des entreprises, arrivée à point nommé pour faire face à la crise, a permis à plusieurs d’entre elles de se restructurer. Mais elle a aussi déçu de nombreux créanciers mis euxmêmes en péril par le défaut de paiement, trop souvent aggravé par des abus. D’où la réforme de 2013. Cette réforme porte-t-elle ses fruits ? Voilà la question que se sont posée divers spécialistes à l’occasion d’un colloque organisé le 1er avril dernier par l’Ordre des experts comptables et comptables brevetés de Belgique et par les Éditions Larcier. Leurs contributions ont été rassemblées dans l’ouvrage Paiement, insolvabilité et réorganisation – S’organiser pour être payé, payer ou se réorganiser, publié dans la collection des Dossiers du Journal des tribunaux (n°97). 4|Emile & Ferdinand| N°11 |Juillet-Août 2015

Alain Zenner Avocat au Barreau de Bruxelles

Émile & Ferdinand : Pouvez-vous résumer les différentes contributions qui composent l’ouvrage Paiement, insolvabilité et réorganisation – S’organiser pour être payé, payer ou se réorganiser dont vous assumez la direction scientifique ?

Alain Zenner : Une première contribution de Éric Van den Broele apporte d’utiles statistiques et commentaires sur le comportement de paiement des entreprises, qui s’améliore, et sur les procédures de réorganisation judiciaire, où la demande a chuté de moitié depuis l’instauration du droit de greffe de 1000 € le 1er janvier dernier. Une seconde porte sur les garanties de paiement : Michèle Grégoire y commente la récente modification du Code civil en ce qui concerne les sûretés réelles mobilières. L’évolution de la jurisprudence sur la LCE fait l’objet d’un rapport de Cédric Alter et Arnaud Levy Morelle. Mais la loi, c’est avant tout ce qu’en font les praticiens ; d’où trois contributions de Gérard Delvaux, de Jean-Philippe Lebeau et de Zoe Pletinckx sur les obligations et responsabilités de ces praticiens – professionnels du chiffre, barreau, magistrats – dans la prévention et dans la préparation, la conduite et l’exécution des procédures de réorganisation judiciaire. Enfin,


ACTU

dans ma contribution conclusive, j’ai ramassé les constats des intervenants et livré mes propres réflexions. Vous évoquez une amélioration du comportement de paiement des entreprises et des pouvoirs publics ?

Oui, les statistiques sont encourageantes : en laissant de côté quelques cas particuliers, comme celui du SPF Justice, elles illustrent une augmentation du nombre de paiements dans les délais convenus et une diminution du volume des défauts de paiement graves. Le transfert de divers contentieux aux tribunaux de commerce et le regroupement de ceux-ci permet au surplus d’espérer que le recouvrement des créances impayées – du moins de celles qui ne sont pas sérieusement contestées – puisse dans l’avenir intervenir plus rapidement. Mais la procédure d’injonction de payer devrait être adaptée pour permettre aux créanciers de bénéficier des mêmes facilités que celles qui sont octroyées en droit européen dans la constatation judiciaire de la créance. Président de l’OECCBB-sr et ancien président de l’IEC, Gérard Delvaux déplore la doctrine professée par les Instituts du chiffre pour ce qui concerne la mission de leurs membres dans les entreprises en difficulté. Quelle évolution prône-t-il ?

Les Instituts n’ont certes pas manqué d’informer leurs membres des dispositions légales qui les visent en matière de prévention et de les éclairer sur leurs devoirs. D’aucuns témoignent néanmoins toujours d’une belle inconscience, comme le montre un jugement inédit du 25 février 2015 du tribunal de commerce de Bruxelles que je cite dans mon rapport. Il faut par ailleurs constater – et déplorer – que ces Instituts se sont efforcés de limiter outre raison les devoirs de leurs membres lors de la confection de la loi d’ajustement, et qu’ils ont défendu par la suite des interprétations inappropriées de ses dispositions légales les concernant. Gérard Delvaux rappelle la genèse de la loi et le but du législateur en confiant aux professionnels du chiffre la supervision des comptes à joindre à la requête en réorganisation, à savoir fournir au tribunal une « objectivation » de ces documents , ce qui suppose « une mission de contrôle limité ». On ne s’explique pas comment les Instituts ont pu contester que leurs membres auraient à contrôler la situation comptable. La jurisprudence a heureusement mis bon ordre en la matière : les arrêts des cours d’appel de Mons du 3 novembre 2014 et de Liège du 27 mars dernier sont très clairs.

PAIEMENT, INSOLVABILITÉ ET RÉORGANISATION S’organiser pour être payé, payer ou se réorganiser Sous la direction de Alain Zenner Avec les contributions de Cédric Alter, Gérard Delvaux, Michèle Grégoire, Jean-Philippe Lebeau, Arnaud Lévy Morelle, Zoé Pletinckx, Éric Van den Broele et Alain Zenner Larcier – Édition 2015 – 316 p. Mise en perspectives de la loi relative à la continuité des entreprises, entrée en vigueur le 1er avril 2009 dans sa version originale et le 1er août 2013 dans sa version remaniée.

Les éléments de langage des Instituts en matière de signalement au Président du tribunal de commerce des difficultés d’entreprise menaçant leur continuité sont tout aussi confus. En répétant que, s’il autorise leurs membres à informer le président du tribunal de commerce de ce que les dirigeants d’une entreprise en difficulté ne prennent pas les mesures nécessaires pour assurer la continuité de l’entreprise pendant une période minimale de douze mois, l’article 10 LCE ne les y oblige pas, les Instituts les incitent à s’abstenir plutôt qu’à agir, eu égard

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ACTU

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à la réalité des affaires, ce qui peut être cependant bien dangereux. Concrètement, la position des Instituts débouche sur ce résultat patent : les signalements sont exceptionnels, sinon inexistants. C’est d’ailleurs pour cela que Gérard Delvaux et plusieurs autres spécialistes prônent que le signalement soit rendu obligatoire ; dans pareille hypothèse, le professionnel du chiffe n’aurait au surplus plus à craindre que son client le quitte pour un confrère plus laxiste.

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Malgré les efforts de clarification et de simplification du législateur de 2013, une incertitude juridique déplorable continuerait à régner sur de nombreuses questions en matière de réorganisation judiciaire ?

Hélas ! Le panorama de l’évolution de la jurisprudence est à cet égard édifiant. Un exemple topique en est livré par deux arrêts récents en sens contraire de la Cour de cassa-


ACTU

“ tion sur l’assimilation des dettes de précompte et d’ONSS à des « dettes de masse » en cas d’échec de la PRJ et de faillite subséquente. Le 16 mai 2014, une chambre française de la Cour suprême a consacré la thèse favorable à l’administration fiscale et à l’ONSS ; mais le 27 mars une chambre flamande de la même Cour a au contraire condamné cette thèse. Le fait prêterait à rire s’il ne s’inscrivait pas dans une tendance « autonomiste » toujours plus poussée de nos magistrats, qui, à force d’en appeler aux principes généraux malléables à leur gré plutôt que de s’en tenir à l’application de la loi, s’érigent de plus en plus en « jurislateurs ». Il se constate que ce comportement « percole » aussi dans l’application de la loi relative à la continuité des entreprises, et notamment dans la controverse sur la validité de la procuration donnée par le créancier au débiteur ou à son avocat pour le vote du plan de réorganisation. La prévention des difficultés d’entreprises, écrivez-vous, reste le talon d’Achille du droit de l’insolvabilité ?

C’est la conclusion la plus dramatique que je dois tirer de nos travaux : la prévention ne marche pas ! Or, selon l’UCM, 72,4 % des entreprises ont connu des difficultés les cinq dernières années. Et 50.000 de nos entreprises seraient « en graves difficultés », c’est-à-dire menacées de discontinuité ! Le constat que je dressais déjà il y a près de cinq ans reste malheureusement valable : la plupart des entreprises dont les chambres d’enquête commerciale connaissent les dossiers sont déjà virtuellement en faillite au moment où elles sont convoquées. Il n’est dès lors pas étonnant que les tribunaux de commerce ne soient pas le moteur de la réorganisation judiciaire, comme ils devraient l’être, et qu’il est souvent trop tard quand les entreprises en difficulté recourent à la procédure. D’où, clamez-vous, la nécessité d’une « révolution » du droit de l’insolvabilité » ?

Le regroupement des tribunaux de commerce et l’extension considérable de leurs attributions ainsi que la diminution des moyens alloués à la justice me paraît appeler une réforme fondamentale du droit de l’insolvabilité, pour ne pas parler d’une révolution. Axée jusqu’ici essentiellement sur la liquidation, cette branche du droit doit désormais être axée prioritairement sur la prévention et la résolution des difficultés d’entreprise. La réallocation des moyens disponibles que devrait permettre pareil bouleversement suppose évidemment une adaptation législative conséquente.

L es statistiques sont

encourageantes : elles illustrent une augmentation du nombre de paiements dans les délais convenus et une diminution du volume des défauts de paiement graves

Les tribunaux de commerce devraient être déchargés du fatras de formalités qu’entraînent les faillites, les liquidations volontaires et les réorganisations judiciaires par transfert d’entreprise, qu’il faudrait remplacer par une seule et unique injonction d’arrêt d’activité en cas de comportement attentatoire à la concurrence relevant de la police économique des tribunaux, quelle qu'en soit la cause, suivi , au cas où l’actif suffit réellement à couvrir l’ensemble des frais prévisibles et où il existe un réel intérêt collectif, mais seulement dans ce cas, d’une procédure de défaisance simplifiée par rapport aux régimes actuels, étant entendu que dans l’alternative chaque intéressé conserverait sa totale liberté d’action pour faire valoir ses droits et sûretés. L’initiative de l’injonction pourrait être prise par le ministère public ou par un juge, en généralisant mutatis mutandis le système prévu par l’article 41 LCE ou en en simplifiant encore le système de l’article 8 LF. Parmi les critères d’atteinte à la concurrence figurerait la méconnaissance des dispositions relatives au paiement, étant entendu que les notions de cessation et d'ébranlement de crédit, qui ouvrent toute grande la porte à des appréciations nourricières de controverses et phagocyteuses en temps, seraient remplacées par des critères clairs et précis. La procédure sommaire d’injonction de payer doit être modernisée pour devenir praticable, sur le modèle du droit européen. L’exécution provisoire doit devenir la règle, plutôt que l’exception, qui peut évidemment subsister. Le rôle des professionnels du chiffre dans la prévention doit être accentué. Les greffes peuvent être déchargés du traitement des données relatives aux retards de paiement, qui sont déjà informatisées et qui ne demandent pas vraiment d’analyse. Les chambres d’enquête commerciale peuvent être supprimées et l’enquête confiée aux seuls juges consulaires, avec un rôle limité à un rappel à la loi, à ses contraintes et à ses facilités, et à l’octroi d’un bref délai pour engager le cas échéant les procédures appropriées ou trouver les moyens de relance hors prétoire. Le rapport du juge consulaire serait adressé à une chambre du tribunal qui examinerait si les conditions d’un arrêt d’activité et d’une procédure de défaisance sont ou non réunies. On me répliquera que la justice ne peut être automatisée, qu’il y a les principes : je répondrai avec cette considération de De Page que « Les juristes excellent toujours à manier les principes avec une virtuosité étonnante sans doute, mais (…) en oubliant les réalités. C’est pour les réalités que le droit est fait, et non pour la beauté des principes ». ■

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CARTE BLANCHE

Pourquoi l’action de la Commission Européenne

contre Google

devrait inquiéter les européens

plus que les réjouir ? Avec l’exemple de Google, Olivier Fréget nous fait réfléchir sur le droit de la concurrence. Deviendrait-il une machine produisant de l’arbitraire ? De manière générale, la décision de la nouvelle Commissaire à la Concurrence d’adresser à Google une communication de griefs a été saluée comme le retour en force du droit de la concurrence européen.

Olivier Fréget Avocat au Barreau de Paris Maître de conférence à l’Institut d’Études Politiques de Paris

Pour autant, voir le ou la Commissaire à la Concurrence, quel qu’il ou elle soit, cumuler la fonction de procureur avec celle de juge devrait continuer de surprendre. Un pas en outre est franchi lorsque la « procureur-juge » annonce publiquement l’envoi d’un acte d’accusation qu’elle a visé et approuvé, tout en prétendant que l’entreprise aura devant elle la possibilité de la convaincre qu’elle s’est éventuellement trompée. Difficile à croire. Personne n’accepte aisément de voir sa position remise en cause surtout lorsqu’elle a été rendue publique.

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Sans même préjuger de ce que la Commission reproche à Google, cette mise en accusation publique interroge ainsi nécessairement au regard de nos principes les plus fondamentaux. Il n’en va pas seulement de la présomption d’innocence mais également du droit à un procès équitable et du respect du principe d’égalité des armes. Par ailleurs, cette médiatisation après 5 années de négociations ne pose-t-elle pas un problème plus fondamental encore quant à la qualité du droit qui sortira de cette procédure ? La durée de cette instruction démontre la grande difficulté qu’a rencontrée la Commission à définir une « théorie du dommage » convaincante alors pourtant qu’il s’agit d’un droit répressif. Si l’infraction était évidente, il lui aurait suffi d’envoyer l’acte


CARTE BLANCHE

d’accusation bien avant. Si elle ne l’est pas, le doute devrait profiter à l’accusé.

de la Commission à défendre l’engagement politique de sa Commissaire.

Cette médiatisation participe ainsi d’une stratégie d’intimidation à l’égard de l’entreprise américaine. Mais si Google finalement « transige », la décision qui sortira de ce compromis sera forcément imparfaite : elle produira une « norme » imprécise, essentiellement politique, donc difficilement transposable et ayant intégralement échappé au débat judiciaire. À l’inverse, si Google « ne transige pas », la possibilité d’obtenir un renversement de la décision de la Commission sur le fond devant les juridictions de l’Union sera affectée par l’acharnement

Est-ce faire en outre injure au tribunal et à la Cour que de constater que le contrôle qu’ils exercent habituellement porte peu sur la plasticité dont peut faire preuve le droit de la concurrence en matière d’article 102, voire pas du tout, sur l’adéquation des injonctions ou engagements à la réalité d’un problème de concurrence ? En sera-t-il différemment dans une affaire dans laquelle la Commission s’est ainsi mise en scène ? Dans les deux cas, le droit de la concurrence n’en sortira pas gagnant et pas

davantage le fonctionnement du marché. Celui-ci a besoin de normes claires préexistant à la condamnation, pas de suivre une vindicte, fut-elle relayée par des députés. Cette affaire rappelle ainsi l’importance qu’il y aurait à ce qu’avant que toute décision de concurrence – engagement ou sanction – ne soit rendue, elle soit revue par un corps indépendant du Commissaire à la Concurrence qui s’interdirait par ailleurs toute communication sur la décision. La qualité du droit s’en trouverait nécessairement améliorée et la publicité d’une mise en accusation pourrait alors apparaître acceptable. Pas en pleine confusion des pouvoirs. ■

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PARCOURS D’ÉTUDIANTS

La délégation LouvainMUN

Une semaine au En mars dernier, une dizaine d'étudiants de l'Université catholique de Louvain partait à la conquête du Palais des Nations à Genève. Les membres de l'association LouvainMUN s’apprêtaient à vivre une semaine de débats acharnés dans le cadre de la prestigieuse conférence Geneva International Model United Nations (GIMUN). Le Groupe Larcier a sponsorisé le voyage.

Amélie Dopchie Membre de l’association LouvainMUN

10|Emile & Ferdinand| N°11 |Juillet-Août 2015

Palais des Nations… Les conférences Model United Nations (MUN), très appréciées des étudiants passionnés de relations internationales, leur permettent de se glisser dans la peau d'un diplomate pour quelques jours. C'est également une occasion incomparable de se confronter à d'autres cultures, d'une part, en rencontrant des étudiants venus des quatre coins du monde, d'autre part, en représentant les intérêts d'un pays étranger. Le samedi, consacré aux formalités administratives, et le dimanche, plus culturel, ont permis aux membres de la délégation néolouvaniste de se familiariser avec les délégués et les présidents de leurs comités respectifs avant de se plonger dans des négociations passionnées. Au sein de chaque comité de la conférence, le Conseil des Droits de l'Homme, l'Organisation Internationale pour les Migrations et le comité juridique de l'Assemblée Générale, pour n'en citer que trois, les étudiants confrontent leurs positions respectives dans le but de rédiger une résolution proposant des solutions réalistes à une problématique d'actualité. Le lundi tant préparé est enfin arrivé. Les diplomates d'une semaine passent le contrôle de sécurité, s'avancent dans des corridors témoins d’événements ayant marqués l'histoire en direction de la cérémonie d'ouverture. C'est une invitée de marque, Charlotte Warakaule, responsable des affaires politiques auprès du directeur général des Nations Unies à Genève, qui prend la parole, partageant aux étudiants sa vision d'une nouvelle architecture mondiale. Après ce discours aussi passionnant que passionné, chacun se dirige vers la salle de travail où il passera la plupart de son temps jusqu'à la fin de la semaine.


PARCOURS D’ÉTUDIANTS

Assemblée générale, 6ème comité (ou Comité juridique) de GIMUN (Geneva International model United Nations) Les estomacs se serrent, les cœurs battent fort, il est maintenant temps de se faire entendre. Le jeu se confond avec la réalité et les enjeux deviennent réels... Au sein du sixième comité de l'assemblée générale, ou comité juridique, les débats tourneront autour du cadre juridique des missions de maintien de la paix. Chaque pays présente d'abord sa position de manière globale, les uns craignent pour le respect de leur souveraineté tandis que les autres insistent sur le caractère utile et bénéfique des missions de maintien de la paix. Il faut ensuite aborder les aspects techniques de la problématique. Les délégués se penchent sur l'évolution des principes directeurs des missions et sur le consentement de l'État hôte. La première journée de travail s'achève enfin. LouvainMUN se réunit pour partager les impressions au sujets des comités, des présidents et de l'évolution des débats. Les diplomates redeviennent étudiants afin de profiter de la soirée "musiques du monde" organisée pour eux. Les néolouvanistes se mélangent aux autres "MUNers" pour partager leur conception belge de la fête. Mardi matin, l'équipe enfile rapidement costume ou talons hauts pour rejoindre le Palais des Nations. Il s'agit aujourd'hui

de commencer la rédaction de propositions de résolution. La tension monte. Les pays de l'Union européenne s'allient au Japon, aux États-Unis et à la Turquie pour poser par écrit des solutions au problème. La Russie tente de faire passer sa position, l'Iran se lance dans un discours enflammé contre l'hypocrisie des États-Unis. On tente les compromis. Les discutions sont techniques, un mot suffit pour changer le sens d'une clause. Les alliances s'affrontent, chacun tente de persuader son adversaire du bien fondé de ses proposions. Le mandat accordé par le Conseil de Sécurité peut-il être modifié en cours de mission?

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Juillet-Août 2015|N°11|Emile & Ferdinand|11


PARCOURS D’ÉTUDIANTS

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L'ensemble des participants et organisateurs de la conférence GIMUN

On cherche des bases juridiques, on les interprète dans un sens puis dans l'autre... Même lors de la pause-dîner, les délégués ne peuvent se retenir de discuter des clauses rédigées! L'après-midi commence plus calmement par un exposé du professeur Marco Sassoli, directeur du département de droit international de l'Université de Genève. Des pistes de réflexion sont ouvertes mais bien évidemment, aucune solution miracle n'existe. Les débats reprennent donc avec ferveur. Il aurait fallu terminer la rédaction de la proposition et des amendements mais l'heure tourne, et déjà, il est temps d'éteindre les micros. Une délicieuse fondue suisse récompense les efforts de la journée. Mercredi matin, au sein du comité juridique, chacun s'empresse de terminer la rédaction de ses clauses, qui seront votées le ven-

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dredi. Il est temps de se tourner vers le second sujet de débats : le principe de juridiction universelle. Les alliances ont changé, mais le but reste identique: il faut rédiger une résolution. Les discours s'enchaînent. Traités et coutume sont mentionnés pour soutenir ou critiquer le principe. Il faut délimiter les crimes, appliquer la compétence universelle, chercher des terrains d'entente avec ses adversaires pour faire avancer la discussion. Ce soir-là, la fin des débats ne rimait pas avec repos pour une partie de l'association LouvainMUN. En effet, le représentant permanent de la Belgique auprès des Nations Unies a accueilli LouvainMUN et une autre association belge, VVN Youth (Vereniging voor de Verenigde Naties), à l'ambassade de Belgique. Monsieur Bertrand de Crombrugghe a partagé sa grande expérience aux étudiants belges, prenant le temps de répondre aux


PARCOURS D’ÉTUDIANTS

Les conférences Model United

Nations (MUN), très appréciées des étudiants passionnés de relations internationales, leur permettent de se glisser dans la peau d'un diplomate pour quelques jours.

Quelques membres de LouvainMUN posant avec M. de Crombrugghe, représentant permanent de la Belgique aux Nations Unies

questions de chacun. La discussion, agrémentée de petits fours, a porté sur des thématiques aussi variées que les techniques de négociation, la situation en Syrie ou encore la conception des droits de l'homme des républiques bolivariennes. Le lendemain, le sixième comité de l'assemblée générale a accueilli un autre invité de marque, Robert Roth, professeur à l'Université de Genève. Celui-ci a expliqué aux délégués les bases idéologiques et historiques du principe de compétence universelle puis a soulevé les problèmes pratiques que posait ce mode de lutte contre l'impunité. Les négociations ont ensuite repris leur cours entre les représentants des pays. En soirée, les membres de LouvainMUN ont retrouvé leurs condisciples flamands de VVN pour un barbecue, avant de se

rendre à la soirée karaoké de GIMUN. Le dernier jour de la conférence, les délégués se sont adonnés au vote des différentes résolutions et amendements. Ce travail laborieux couronnait cinq jours de travail et chacun avait à cœur de se battre jusqu'à la dernière minute pour défendre sa position. La conférence touche à sa fin, le rideau se ferme, les masques sont déposés. Après la cérémonie de clôture et les incontournables photos de groupe, les étudiants rentrent enfiler leur plus beau costume ou leur robe la plus élégante pour partager ensemble une dernière danse. C'est, épuisés, mais récompensés par quatre mentions spéciales, que les futurs diplomates belges ont rejoint leurs auditoires de Louvain-la-Neuve, avec la tête remplie de souvenirs inoubliables.

Juillet-Août 2015|N°11|Emile & Ferdinand|13


WEB TV

Ensemble, Agissons ! Le Groupe Larcier a soutenu en tant que sponsor principal le Congrès #Agissons organisé par Avocats.be le 29 mai dernier à l’UCL. Durant une journée entière, plus de 400 avocats ont réfléchi à l’avenir de leur profession. Vous n’étiez pas présent au Congrès ? Ou vous souhaitez revoir les conclusions de la journée d’étude ? Pas de souci ! Les différentes conclusions sont disponibles en vidéos sur la chaîne YouTube du Groupe Larcier. Prenez une tasse de café et installez-vous confortablement dans votre fauteuil !

Ensemble, continuons à agir !

14|Emile & Ferdinand| N°11 |Juillet-Août 2015

❱❱


WEB TV

Découvrez les vidéos : ❱❱ L’avocat augmenté

❱❱ L’avocat spécialisé

❱❱ L ’avocat éclaté

❱❱ L ’avocat au féminin

❱❱ L ’avocat d’État

❱❱ L’avocat d’assurance

❱❱ L’avocat salarié

❱❱ Patrick Henry #Agissons

❱❱ L’avocat dématérialisé

❱❱ L ’avocat en entreprise

❱❱ L’avocat financé

Découvrez toutes nos vidéos sur notre chaîne YouTube www.youtube.com/larcierbruylant

❱❱ Les conclusions de Patrick Henry, Président d’AVOCATS.BE

❱❱ Les conclusions de Koen Geens, Ministre de la justice

❱❱ L es conclusions de Dominique Matthys, Président de l’OVB

❱❱ R apport Horizon 2025

Juillet-Août 2015|N°11|Emile & Ferdinand|15


MOT DE L’ÉDITEUR

SAVE THE DATES

Le Groupe Larcier a déménagé…

➔ FORMATIONS COMMISSION - UNIVERSITÉ PALAIS (CUP) ➔ Octobre 2015 : Actualités de droit pénal. Hommage à Ann Jacobs Liège 16 octobre (date unique) ➔ Novembre 2015 : La vente immobilière Liège 13 novembre – Louvain-la-Neuve 20 novembre – Charleroi 27 novembre ➔ Décembre 2015 : Droit administratif et contentieux Liège 4 décembre – Bruxelles 11 décembre – Charleroi 18 décembre

Colloque international – Cent ans de droit luxembourgeois des sociétés Jeudi 15 et vendredi 16 octobre 2015 Grand-Duché de Luxembourg - Esch-sur-Alzette

Depuis le 1er avril 2015, la salle d’exposition de Bruxelles, sise numéro 39 rue des Minimes, a fermé définitivement ses portes et le siège social est dorénavant situé à l’adresse suivante :

Espace Jacqmotte Rue Haute 139 Loft 6 1000 Bruxelles

Formation – Masterclass ISOC – Session d’automne Vendredi 30 octobre 2015 Louvain-la-Neuve Formation – L’avocat et les médias Jeudi 12 novembre 2015 Bruxelles Colloque de la revue Res et Jura Immobilia La copropriété – 20 ans d’application de la loi du 30 juin 1994 Mercredi 2 décembre 2015 Bruxelles - Bibliothèque royale de Belgique INFOS ET INSCRIPTIONS :

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16|Emile & Ferdinand| N°11 |Juillet-Août 2015

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