Émile & Ferdinand numéro 24

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Emile& Ferdinand Gazette

2017/4 | N°24 Bimestriel gratuit

Bureau de dépôt : 3000 Leuven Masspost | P-916169

Rencontre avec Isabelle Tasset Le nouveau bâtonnier du Barreau de Liège

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L e mot de l’éditeur

Hommage à Chantal Lambrechts Bientôt la première bibliothèque publique à Yaoundé…

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Notariat

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Sponsoring

Erik Van Tricht FEDNOT et les défis du notariat

communication

déontologie

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information accès à la justice

Le notariat liégeois à nouveau sur le gazon…

8 Réflexion formation

Patrick Hofströssler et Patrick Henry L'avocat demain Un plan pour l'avenir de la profession d'avocat

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L e mot de l’éditeur

Découvrez notre nouveau site

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L'Incubateur d'AVOCATS.BE

Jean-Pierre Buyle Il est temps de craquer une allumette…


ÉDITO

bonne lecture !

Chers lecteurs, Chers auteurs, Le Congrès des Notaires qui a eu lieu du 20 au 22 septembre à Gand a, cette année encore, rencontré un beau succès. Vous avez été nombreux à nous rendre visite sur notre stand Larcier Group et à y découvrir les nombreuses nouveautés de Strada not, votre base de données accessible depuis l’e-Notariat. Émile & Ferdinand en profite pour mettre le notariat à l’honneur. Larcier Group, avec ses marques d’édition Larcier et Bruylant, constitue depuis plus d'un siècle et demi la référence et la source de confiance des notaires. Erik Van Tricht, Président de FEDNOT, a accepté de nous présenter le fonctionnement de sa Fédération et le processus de modernisation qui constitue une priorité. Il décrit également les défis auxquels font face les notaires et les chantiers actuels et à venir de la Fédération.

colophon Rédacteur en chef Élisabeth Courtens Secrétaire de rédaction Anne-Laure Bastin Équipe rédactionnelle Anne-Laure Bastin, Élisabeth Courtens, Charlotte Claes et Muriel Devillers Lay-out Julie-Cerise Moers (Cerise.be) © Groupe Larcier s.a. Éditeur responsable Paul-Étienne Pimont ELS Belgium s.a. Rue Haute 139 - Loft 6 1000 Bruxelles Les envois destinés à la rédaction sont à adresser par voie électronique à emileetferdinand@larciergroup.com

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De défis, il en sera question comme fil conducteur tout au long de ce numéro automnal. Et notamment en ce qui concerne l’avocature. En effet, le Ministre de la Justice prépare pour le printemps 2018 un plan de politique qui contiendra des propositions de modernisation des professions juridiques, dont celle d’avocat. Dans ce cadre, les avocats Patrick Henry, ancien président d’AVOCATS.BE, et Patrick Hofströssler, ancien directeur du Service d’études de l’Ordre des barreaux flamands,

ont été désignés en tant qu’experts. Ils assisteront le Ministre dans la rédaction du plan relatif à l’avenir de la profession d’avocat. L’Incubateur d’AVOCATS.BE, cela vous dit déjà quelque chose ? Émile & Ferdinand est parti à la rencontre de Jean-Pierre Buyle et de son équipe qui ont décidé de créer un incubateur spécialement dédicacé aux besoins des avocats. Leur objectif est d’aider le barreau à y voir clair, à comprendre et à innover. « Là où il y a la volonté, il y a le chemin. » C’est avec cette pensée attribuée à Lao Tseu, Lenine et W. Churchill qu’Isabelle Tasset terminait la carte blanche que nous lui avions consacrée dans le numéro 2016/2 de notre Gazette, à l’occasion de sa candidature au poste de futur bâtonnier du Barreau de Liège. Nous l’avons rencontrée afin d’aborder plus en détails le cœur de son programme.

Belles découvertes et belles lectures… L’équipe rédactionnelle d’Émile & Ferdinand

Cette gazette est la vôtre ! N’hésitez pas à proposer des articles, à formuler des suggestions, à réagir aux articles publiés et, ainsi, à faire évoluer et faire grandir Émile & Ferdinand. Adressez-nous vos messages à l’adresse suivante : emileetferdinand@larciergroup.com


MOT DE L’ÉDITEUR

Bientôt la première bibliothèque publique à Yaoundé… Chantal Lambrechts La compagnie de Théâtre L’Archer ASBL s’est associée à l’OTHNI-Laboratoire de Théâtre de Yaoundé pour mettre sur pied une bibliothèque publique, gratuite et accessible à tous au quartier populaire Nfandéna à Yaoundé au Cameroun. Ce lieu sera amené à devenir un pôle central, centre de ressources documentaires mais surtout de travail, pour les artistes, les étudiants et professeurs, les personnes de

En hommage à Chantal Lambrechts qui a été directrice Marketing de De Boeck et de Larcier durant plusieurs années et qui nous a quittés en août 2016, il nous tient à cœur de communiquer sur la création de la première bibliothèque gratuite à Yaoundé. Chantal Lambrechts aura largement contribué à ce projet en léguant sa bibliothèque personnelle. passage à Yaoundé ou toute personne désireuse d’avoir un contact avec la culture. Il contribuera à l’épanouissement de la jeunesse, non seulement celle du quartier, mais celle de la ville toute entière. À ce jour, grâce à une opération lancée depuis 2015, nous avons d’ores et déjà collecté et envoyé des centaines de caisses de livres, dont le legs de la bibliothèque

théâtrale de Laurence Adam, femme de théâtre aux multiples talents et de la bibliothèque personnelle de Chantal Lambrechts, figure marquante de l'édition française et belge. Merci à ces deux femmes. Leur amour pour la littérature et les livres se perpétuera. Une allée de la bibliothèque portera d’ailleurs le nom de Chantal Lambrechts et une photo y sera installée.

É mile & Ferdinand fait appel à votre générosité L’OTHNI-Laboratoire de Théâtre de Yaoundé dispose déjà d’un local, mais les moyens manquent pour financer un employé polyvalent sur place qui en assurera la gestion quotidienne. L’OTHNI-Laboratoire sera responsable du recrutement de cette personne. Si vous désirez aider l’ASBL La Compagnie L’Archer pour ce projet, qui comme tout premier projet, rencontre des dépenses imprévues, tout don est le bienvenu pour pouvoir rémunérer un employé à la bibliothèque. (Numéro de compte : BE85 0017 1808 4006 - communication : Soutien au projet Création Bibliothèque Yaoundé). Merci déjà pour eux.

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NOTARIAT

et les défis du notariat À l’occasion du Congrès des Notaires qui s'est tenu en septembre dernier à Gand, Émile & Ferdinand met le notariat à l’honneur. Larcier Group, avec ses marques d’édition Larcier et Bruylant, est depuis plus d'un siècle et demi la référence et la source de confiance des notaires. Dans le cadre du partenariat mis en place depuis longtemps entre la Fédération des Notaires belges (Fednot) et Larcier, chaque notaire bénéficie d’un accès à la banque de données Strada not, via l’e-Notariat. Erik Van Tricht, Président de Fednot, a accepté de nous présenter le fonctionnement de sa Fédération et le processus de modernisation qui constitue une priorité. Il décrit également les défis auxquels font face les notaires et les chantiers actuels et à venir de la Fédération. Erik Van Tricht Président Fednot et notaire à Merksem

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AU SUJET DE FEDNOT Fednot a célébré son 125ème anniversaire en juin 2016. Les notaires belges ont uni leurs forces en 1891 pour répondre de manière professionnelle aux changements sociaux et à leur impact. La situation n’a pas changé aujourd’hui. Mais le contexte dans lequel nous travaillons a, bien entendu, tout à fait changé. Beaucoup de choses bougent dans le notariat. Il suffit de regarder ces 10 ou 15 dernières années, pour constater que le notariat a subi une vraie métamorphose. Je pense à l’affluence de nouvelles forces vives, à la féminisation, à la tendance à l’association et à l’emploi croissant (voir les chiffres en fin d’article). Il est positif de constater que les notaires ont toujours pris en main eux-mêmes la modernisation permanente. Nous avons fourni des efforts au niveau de l’organisation, de la qualité, des formations, de la gestion du personnel et nous avons fait du notariat la profession juridique la plus informatisée. Si je devais répartir nos efforts concernant l'informatisation en phases, la première phase se caractérisait par des développements au niveau interne : l’enotariat, notre intranet qui est dispo-


NOTARIAT

Erik Van Tricht

nible pour toutes les études notariales, avec toutes ses applications.

LES DÉFIS À RELEVER POUR LE NOTARIAT

La phase 2 était le démarrage d'une série de projets en collaboration avec les différents pouvoirs publics. Citons, par exemple, eDepot (créer une société en ligne en 48 heures) et eRegistration (enregistrement en ligne d’actes auprès du SPF Finances).

Notre société est de plus en plus stressante, exigeante. Elle comporte beaucoup d'incertitudes, mais elle est également passionnante. Le monde juridique n’échappe pas à ces évolutions. Nous constatons que nos clients, qui recherchent une sécurité juridique et un esprit tranquille aux moments-clés de leur vie (cohabitation, mariage, divorce, location, achat, prêt, donation, succession, entreprenariat), sont de moins en moins sûrs d’eux et ne s’y retrouvent plus, car « l’arbre cache la forêt. »

Maintenant, nous arrivons à la phase 3 qui concerne les outils en ligne pour le citoyen. Bientôt, il sera par exemple possible d’acheter un logement par le biais d’une vidéoconférence dans votre étude notariale. Les acheteurs, vendeurs et notaires ne devront plus se réunir en un seul endroit pour passer l’acte. C’est pratique et efficace. Cela permet de gagner du temps et c’est écologique ! Sur le site notaire.be, les personnes auront accès au registre central des contrats de mariage. Via leur eID, ils peuvent vérifier dans quelle étude leur contrat de mariage ou de cohabitation a été enregistré à l’époque. Davantage d'applications suivront au cours des futurs mois et années.

La demande d’avis « sur mesure » est dès lors de plus en plus grande. Nous constatons cela purement à travers les chiffres. Nos sites www.notaris.be et www.notaire.be n’ont encore jamais connu autant de visites que l’an dernier (9 millions de visites). Jamais le notariat n’a reçu autant de monde (au moins 2,5 millions de personnes). Cette tendance se traduit aussi, bien entendu, par le nombre d’actes : le record historique de 2015 (925.000) a été battu en 2016 (presque 950.000 actes). En outre, nous constatons en tant que notaires, que nos clients nous considèrent de moins en moins comme un

passage obligé auquel le notariat était associé jadis, mais bien comme un homme ou une femme de confiance, un « trusted third party », avec qui l’on peut confronter ses propres idées ou informations obtenues, et auprès de qui on peut donner forme à ses besoins juridiques. L’avis que les clients peuvent obtenir chez nous permet de contracter un engagement juridique, l’esprit tranquille, tant au niveau de la relation personnelle entre individus, de la croissance d’une entreprise, que de la construction d’un patrimoine et du transfert plus tard de ce qu’il en reste.

LES CHANTIERS DE FEDNOT Les chantiers entrepris par la Fédération sont dictés par le souci constant de la part des notaires de fournir des services de toujours meilleure qualité aux consommateurs, entrepreneurs et pouvoirs publics. Nos services, qui comptent un peu moins de 200 personnes, sont répartis sur 5 domaines de travail : juridique, communication, finances, TIC et aspects sociaux. Au cours de l’an dernier, pas mal de choses ont été réalisées. Je pense aux réalisations suivantes :

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NOTARIAT

l’espoir et avec la conviction qu’une bonne justice est bénéfique aussi pour le notariat. « Ayez confiance en nous », au moins du côté du notariat, s’est avéré ne pas être un message vain. • Au niveau international, nous surveillons également les tendances: nous suivons ce qui se passe dans d’autres pays européens, et là où c’est possible, on collabore au niveau européen.

... •À la demande de la Chambre nationale, l’an dernier, les efforts ont porté sur le développement d'un nouveau logiciel permettant de garder une surveillance permanente sur la comptabilité de tous les notaires belges. Les premiers essais sont prometteurs. La Chambre nationale pourra par ce biais mieux conseiller les collègues dans la tenue de leur comptabilité, mais à plus long terme aussi dans le management de leur étude. •L a capacité de stockage des données numériques au sein des études notariales a été fortement augmentée. •C ette année, on démarre la transformation de notre intranet sécurisé entre toutes les études notariales en Belgique (qui veulent s’y connecter) d'une part et nos clients et différentes autorités d'autre part. Dès lors, la porte d’accès à intranet ne se trouvera plus sur chaque ordinateur personnel dans chaque étude, mais bien sur Fednot. De cette manière, Fednot veut aussi créer de la sécurité, tant pour les notaires que pour les clients et les autorités publiques.

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Notre intranet renouvelé doit aussi permettre aux études notariales connectées de tenir des vidéoconférences de manière sécurisée et de passer des actes à distance. Ce n’est pas dans un futur lointain. Cela démarre maintenant. Le notariat belge souhaite créer de la sécurité non seulement dans les actes rédigés, mais aussi dans l’environnement TIC renouvelé. •L e département juridique s’est aussi montré sous son meilleur jour en 2016 par le biais de plus de 5.000 avis aux notaires, au développement de clauses et d’actes, mais aussi par le soutien au Ministre de la Justice dans le développement du nouveau droit successoral, du droit de cohabitation et du droit des régimes matrimoniaux, du droit des entreprises et du droit des sociétés, du droit des biens et l’adaptation de la loi des notaires. •N ous avons un Ministre de la Justice qui en demande beaucoup. Je suis convaincu que nous sommes aussi une Fédération qui donne beaucoup, dans

Un point qui mérite également l’attention est la communication avec nos clients. Je renvoie au rapport annuel de l’Ombudsman pour le notariat. Le service a obtenu en 2016 un peu plus de 1.000 demandes. C’est relativement peu en comparaison avec les 900.000 actes dans lesquels plus de 2,5 millions de personnes sont impliquées. Mais chaque demande est bien entendu traitée en profondeur. Il ne s’agit d'aspects juridiques que dans 16% des cas. Ce chiffre signifie que les connaissances juridiques des notaires n’entrent pas en considération. Il est intéressant de constater cela alors que les dossiers deviennent de plus en plus complexes. Les demandes qui entrent au service de l’Ombudsman concernent surtout des aspects liés à la forme : pourquoi un dossier prend-il un certain temps ?, quels sont les frais y liés ?... La communication concernant ces aspects de forme doit donc recevoir plus d'attention, plus particulièrement dans les dossiers sensibles comme les successions et les divorces. Il faut une information claire au sujet de la durée des dossiers, au sujet de la structure des coûts. Fednot a déjà pris une initiative supplémentaire en mettant en place la rédaction d'un décompte standard. En effet, une confusion règne souvent chez les consommateurs en ce qui concerne la différence entre les impôts, les recherches et les honoraires.


NOTARIAT

Q uelques chiffres ➔ Féminisation

➔ Collaborateurs

➔ Associations

La profession de notaire requiert, outre les connaissances juridiques, aussi une dimension humaine.

Les études notariales sont de vraies équipes multidisciplinaires de juristes qualifiés.

Les notaires collaborent pour offrir un meilleur service.

2000

2000

1.226 notaires

moins de 5.000

2000-2005

122

collaborateurs

nouvelles associations ont été créées comportant 2 notaires ou plus.

2016

2016

2016

1.550 notaires

collaborateurs

133

1.093

509

8.000

1.041

332

associations au total.

SPONSORING

Le notariat liégeois à nouveau sur le gazon…

Découvrez toutes les photos et les vidéos de l’édition 2017 sur le site www.notariatcup.com ou sur la page Facebook de la NotariatCup www.facebook.com/ NotariatCup.

Heureux du succès rencontré par la première édition de la NotariatCup, les notaires liégeois se sont à nouveau mis au mini-foot le temps d’une journée. La compétition a eu lieu le samedi 6 mai dernier et a réuni des équipes de 7 joueurs, toutes composées de notaires et collaborateurs. Les différentes études de la Province de Liège se sont ainsi affrontées sur le gazon du Soccer Club.

Le Group Larcier a eu le plaisir, cette année encore, de sponsoriser l’événement footballistique. Le tournoi permet aux collaborateurs et aux notaires de se rencontrer dans le cadre d’un évènement décontracté, sportif et festif.

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RÉFLEXION

L’avocat demain

Un plan pour l’avenir de la profession d’avocat

Patrick Hofströssler Avocat au Barreau de Bruxelles Ancien directeur du Service d’études de l’Ordre des barreaux flamands

Patrick Henry Avocat au Barreau de Liège Ancien président d’AVOCATS.BE

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Le Ministre de la Justice prépare pour le printemps 2018 un plan de politique qui contiendra des propositions de modernisation des professions juridiques, dont celle d’avocat. Dans ce cadre, les avocats Patrick Henry, ancien président d’Avocats.be, et Patrick Hofströssler, ancien directeur du Service d’études de l’Ordre des barreaux flamands, ont été désignés en tant qu’experts. Ils assisteront le Ministre dans la rédaction du plan relatif à l’avenir de la profession d’avocat. Comment améliorer la formation initiale des avocats ? La création d’un master spécialisé en contentieux judiciaire serait-elle une bonne solution ? Faut-il lui préférer un certificat universitaire ? Ou, mieux, prévoir que la cinquième année de droit est divisée en différentes options dont une seule donnerait accès aux professions judiciaires (magistrats, huissiers, avocats) ? Si cela est impossible, ne faut-il pas, au moins, réformer nos centres de formation professionnelle, imposer une formation de base, concentrée sur deux ou trois mois, à réussir avant l’inscription à la liste des stagiaires ? Dans tous les cas en s’assurant du caractère pratique de la formation et, dès lors, de la participation des instances du barreau à l’organisation et à l’administration de la formation.


RÉFLEXION

Peut-on améliorer la gouvernance de notre profession, en évitant les déperditions d’énergie liées à la multiplicité des organes qui la représentent, en rassemblant les compétences aux niveaux les plus pertinents, en encourageant la fusion des barreaux ? Peut-on augmenter la représentativité et la légitimité des Ordres communautaires, par exemple en prévoyant que leurs présidents (et administrateurs) sont élus au suffrage universel direct de tous les avocats ? Faut-il garantir, dans les organes représentatifs, une stricte – ou au moins une certaine – égalité hommes/femmes ? Il faut en tout cas corriger quelques imperfections dans les dispositions qui organisent notre procédure disciplinaire. Ce pourrait être l’occasion d’être un peu plus ambitieux, d’améliorer la procédure d’instruction, de renforcer la place du plaignant, de diversifier l’éventail des sanctions, etc. La profession d’avocat est incompatible avec l’exercice d’une industrie ou d’un négoce, avec tout emploi ou activités rémunérés publics ou privés, avec une charge d’agent de l’État, avec les fonctions de notaire ou d’huissier de justice. Est-ce toujours pertinent ? La notion de commercialité tend à disparaître, pour être remplacée par celle d’entreprise. Pourquoi, dès lors ne pourrions-nous pas être avocat le matin, conseil juridique, syndic, agent sportif, lobbyiste, conseiller en compliance ou en prévention du blanchiment, en protection des données personnelles ou en gestion des alertes, voire restaurateur, chauffeur de taxi ou travailleur sur chantier, l’après-midi ? Bien sûr, dans le respect de nos règles d’indépendance, de secret professionnel, de dignité, de loyauté et de probité …

Dans la même perspective, ne peut-on envisager d’autoriser la création de véritables associations multiprofessionnelles, au moins avec des notaires et des huissiers ? N’est-il pas temps de permettre à des sociétés d’avocat(s) de s’inscrire directement au tableau, comme cela est admis chez les architectes ? De permettre une plus grande limitation de notre responsabilité, dans le respect des intérêts des justiciables ? Comment assurer une meilleure promotion de l’acte d’avocat ? En lui donnant force exécutoire ? En en assurant une meilleure conservation, via l’électronique ? L’aide juridique pourrait-elle être, éventuellement dans certains domaines particuliers, comme ceux du droit des étrangers ou du droit des jeunes, partiellement prise en charge par des avocats d’État, ou de barreau, qui consacreraient la totalité, ou l’essentiel, de leur activité à cette charge, contre une rémunération fixe ? Faut-il repenser les règles organisant les actions collectives, pour permettre aux avocats d’y jouer un rôle plus prégnant ? Cela implique-t-il l’abolition, au moins dans ce contexte, de la prohibition du pacte de quota litis ? À propos d’honoraires, nos règles traditionnelles sont-elles toujours adaptées ? Les critères de discrétion et de juste modération, qui sentent le XIXe siècle, restent-ils pertinents au temps de la contractualisation, du Code de droit économique, de la forfaitisation, de la désintermédiation/réintermédiation/ concentration des services ?

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RÉFLEXION

... Comment, au-delà, favoriser l’intégration par les avocats des nouveaux outils que les développements technologiques mettent à leur disposition ? Les aider à mieux gérer l’innovation ? Faire en sorte que ce soit les avocats qui gouvernent les robots et non l’inverse ? Une grande partie des jeunes avocats qui prêtent serment quittent assez rapidement la profession, spécialement les jeunes femmes. Ce n’est pas toujours parce qu’ils n’ont pas les qualités nécessaires pour y exceller, loin s’en faut. Comment leur permettre de mieux s’y épanouir ? Voici quelques-unes des questions que les avocats doivent se poser et résoudre s’ils souhaitent garder, au sein de notre société en pleine mouvance, le rôle important qu’ils y jouent aujourd’hui. En nous confiant le soin de rédiger un plan pour l’avenir de la profession d’avocat, L’avocat demain, Monsieur le ministre de la Justice Koen Geens, nous donne l’occasion de nous consacrer à cette tâche.

Nous ne l’assumerons pas seuls, évidemment. Ce plan est pour tous. Il doit être l’affaire de tous. Nous nous appuyons bien sûr sur les travaux entrepris, au cours des dernières années, par les Ordres, et notamment sur le rapport Horizon 2025. Nous avons déjà rencontré plusieurs personnes-ressources importantes, au sein et en dehors du barreau. Une table ronde a réuni, sur ce thème, plusieurs jeunes avocats, dans le cadre des Universités d’été d’AVOCATS.BE, le 29 août 2017, au Château de Courrière. Un autre débat a eu lieu à Mons, dans le cadre du cycle Justice en vérités, le mercredi 11 octobre 2017, aux Cours de justice. Mais, si vous n’avez pas eu l’occasion de nous rencontrer à ces occasions, venez à nous. Le temps qui nous est imparti étant limité, il ne nous sera pas possible d’aller à la rencontre de tout le monde. Une boîte mail à suggestions est à votre disposition : avocatdemain@just.fgov.be. Utilisez-la. C’est l’affaire de tous, mais c’est aussi l’affaire de chacun. Luttons,

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MOT DE L’ÉDITEUR

Il n’y a pas

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L'INCUBATEUR D'AVOCATS.BE

Il est temps de craquer une allumette… L’Incubateur d’AVOCATS.BE, cela vous dit déjà quelque chose ? Émile & Ferdinand est parti à la rencontre de Jean-Pierre Buyle et de son équipe qui ont décidé de créer un incubateur spécialement dédicacé aux besoins des avocats. Leur objectif est d’aider le barreau à y voir clair, à comprendre et à innover. Les temps changent. À côté du rôle classique de régulateur, AVOCATS.BE est devenu, depuis quelques mois, un entrepreneur en matière de services informatiques. Nous avons lancé une centaine de nouveaux logiciels de gestion des Ordres. D’autre part, notre institution s’est vue confier une tâche importante d’informatisation de la justice : RegSol, DPA, e-Box, e-Deposit, e-Payement… Tous ces projets sont en cours de réalisation. Les outils de production de nos cabinets sont touchés par l’automatisation, la robotisation, la numérisation et petit à petit par l’intelligence artificielle.

Jean-Pierre Buyle Président d’AVOCATS.BE

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Ces évolutions techniques sont irrésistibles. Le marché des legal technology est en pleine expansion. Nous ne pouvons pas y être indifférents. C’est une opportunité pour la profession et une chance pour nos clients. Il est temps de craquer une allumette et de prendre en main notre avenir.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de créer un incubateur spécialement dédicacé aux besoins des avocats. Notre objectif est d’aider le barreau à y voir clair, à comprendre, à innover et à mieux servir les clients. Nous voulons diffuser la connaissance sur la numérisation du droit pour les avocats. Nous voulons promouvoir l’innovation au sein des barreaux. Nous voulons encourager les avocats à travailler avec des legal tech qui adhèreront à une charte éthique pour un marché du droit en ligne, respectueux de nos valeurs : qualité, sécurité, secret professionnel, conflits d’intérêts, responsabilité, … Ce projet innovant sera géré par une équipe de jeunes avocats wallons et bruxellois. Je les remercie infiniment pour leur engagement exemplaire, leur audace et leur détermination à faire avancer notre profession.


L'INCUBATEUR D'AVOCATS.BE

De gauche à droite : Alexiane Wyns, Essya Kastally, Adrien van den Branden, Naël El Berkani, Florian Ernotte et Julie Neuray L’Incubateur, c’est quoi exactement ?

L’Incubateur d’Avocats.be. a pour objectif de placer l’avocat au cœur de l’innovation. Cet objectif est assuré par la mise en œuvre de trois missions principales : diffuser la connaissance sur le digital parmi les avocats; promouvoir l’innovation au sein de la profession d’avocat et partager l’information vers le monde extérieur. Comment est née cette initiative tournée vers l’innovation ?

L’Incubateur a été créé sur base d’un constat : le digital est un phénomène irrésistible qui transforme tous les secteurs de la société, y compris les avocats, et un diagnostic : trop peu d’avocats en Belgique sont sensibilisés par rapport aux profondes implications que le digital entraîne sur la profession d’avocat. Ce constat et ce diagnostic ont été révélés à l’occasion de la conférence « Électrochoc Numérique » qui a eu lieu en décembre 2016. De cette conférence ont émergé plusieurs idées, donc celle de créer un Incubateur pour Avocats.be, sur le modèle d’initiatives similaires qui ont vu le jour en France notamment. Quels sont les pôles d’activité qui constituent l’Incubateur ?

Les missions de l’Incubateur se traduisent concrètement par la mise en œuvre d'un certain nombre de projets. Tout d'abord, deux évènements majeurs seront organisés :

Premièrement, le 14 décembre prochain aura lieu la Cérémonie de Remise des Prix de l’innovation. Des projets innovants dans le domaine du droit seront récompensés, à la fois dans la catégorie “LegalTech" et dans la catégorie “Avocat”. Deuxièmement, au début de l’année 2018, une conférence sera organisée sur un thème lié à l’innovation. Nous pensons à un thème tel que les nouveaux business modèles du droit ou l’intelligence artificielle appliquée au droit. L’objectif est d’informer les avocats sur les évolutions majeures qui impactent aujourd’hui la profession d’avocat. À côté de ces évènements, où nous espérons voir affluer le plus de monde possible, nous développerons un certain nombre d’initiatives innovantes. Par exemple, nous réfléchissons activement à l’élaboration d’une charte éthique à destination des acteurs du droit. L’idée ici est d’inviter les entreprises LegalTech à suivre un certain nombre d’engagements tirés de la déontologie et adaptés à la réalité des relations entre ces entreprises et les justiciables (par exemple, en matière de conflits d’intérêts, de confidentialité, etc.). Nous élaborons également un comparateur des solutions logicielles des avocats. Partis du constat que les avocats éprouvaient beaucoup de difficultés à s’y

retrouver dans toutes les fonctionnalités offertes par les fournisseurs de logiciels de cabinets d’avocats (enterprise ressource planning, content management system, intranets, etc.), ce comparateur vise à aider les avocats à choisir la solution qui convient à leur déontologie et à améliorer la transparence. Enfin nous développons un site internet dédié à l’Incubateur et venons de lancer notre groupe LinkedIn. Ces outils serviront à relayer les informations touchant au droit et à l’innovation. Quels barreaux vont être concernés par l’Incubateur ?

L’Incubateur étant une émanation d’Avocats.be, tous les barreaux de Belgique francophones et germanophone sont concernés. Les trois ressorts des cours d’appel (Bruxelles, Liège et Mons) sont par ailleurs représentés dans la composition de l'Incubateur. L’Incubateur est constitué de deux organes. Le Conseil de supervision, composé d'Olivier Haenecour (barreau de Mons), Pierre Henry (barreau de Verviers) et Stanislas van Wassenhove (barreau de Bruxelles), préside aux bonnes destinées des missions de l'Incubateur. Le Comité, composé de jeunes avocats inscrits dans différents barreaux, s’occupe du day-to-day de l’Incubateur et de la mise en œuvre des différents projets.

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L'INCUBATEUR D'AVOCATS.BE

Pouvez-vous nous présenter les membres actuels du Comité de l’Incubateur ? 4 1

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1. Adrien van den Branden

Adrien a prêté serment en octobre 2014 et est inscrit au Barreau de Bruxelles. Il se spécialise dans le droit des TIC, conseillant des clients belges et internationaux sur tous les aspects liés à la protection des données à caractère personnel, les licences sur logiciels, l'architecture cloud, le commerce électronique et la cyber sécurité. Pour l’Incubateur, Adrien est chargé des contacts avec l’extérieur. Il organise également la Cérémonie de Remise des Prix de l’Innovation. 2. Julie Neuray

Julie est inscrite au Barreau de Liège depuis 2009. Sa pratique est tournée vers le droit commercial, le droit des sociétés, la transmission des entreprises, le recouvrement de créances et la rédaction de contrats au sens large. Elle est également médiatrice agréée en matière civile et commerciale. Au sein de l’Incubateur, Julie est chargée de mettre en place le comparateur de logiciels à destination des avocats. 3. Naël El Berkani

Naël a prêté serment en septembre 2014 et est inscrit au Barreau de Bruxelles. Il pratique le droit des sociétés, le droit des fusions et acquisitions et le droit des transactions commerciales.

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Naël est en charge du projet d’élaboration de la charte éthique à destination des nouveaux acteurs du droit.

6. Alexiane Wyns

Essya est inscrite au Barreau de Bruxelles, et ce de depuis 2014. Elle pratique le droit immobilier, le droit de la construction, le droit de baux, le droit commercial, le droit des entreprises, le droit des contrats et de la distribution et le droit bancaire et du crédit. Essya est chargée du secrétariat de l’Incubateur. Elle s’occupe également du projet d’élaboration de la charte éthique.

Alexiane est inscrite au Barreau de Bruxelles depuis 2011 et pratique le droit de l'entreprise au sens large. Elle a développé des compétences en matière de conseil et de contentieux, en droit des sociétés, fusions et acquisitions, crowdfunding et droit commercial. Entre autres activités, Alexiane anime une chaine YouTube où elle publie quotidiennement des vidéos éducatives sur des questions juridiques. Alexiane s’occupe de l’organisation de la conférence de l’Incubateur sur le thème de l’innovation.

5. Florian Ernotte

7. Victoria Renson

Florian est inscrit au Barreau de Liège depuis octobre 2014. Il pratique le droit des entreprises en difficultés, le droit des sociétés, le droit commercial et le droit fiscal. Sensible aux questions des nouvelles technologies au sens large et à l’évolution que rencontre la profession d’avocat, il a intégré la Commission Communication du Barreau de Liège et la Commission technologies de l’information et de la communication commune aux Barreaux de Liège, Verviers et Huy en septembre 2016. Au sein de l’Incubateur, Florian s’occupe de l’animation du groupe LinkedIn.

Victoria a prêté serment en septembre 2014 et est inscrite au Barreau de Verviers. Elle pratique le droit des sociétés, le droit commercial ainsi que le droit pénal général. Au sein de l'Incubateur, Victoria s'occupe des questions au croisement de la déontologie et de l'innovation.

4. Essya Kastally

8. Carol Evrard

Carol a prêté serment en 2014 et est inscrite au Barreau de Bruxelles. Elle pratique le droit des technologies, de la propriété intellectuelle et de la protection des données. Son engouement pour l'innovation l'a poussée à rejoindre le projet de l'Incubateur.


RENCONTRE

Isabelle Tasset, le nouveau bâtonnier du Barreau de Liège Isabelle Tasset

“Là où il y a la volonté, il y a le chemin.” C’est avec cette pensée attribuée à Lao Tseu, Lenine et W. Churchill qu’Isabelle Tasset terminait la carte blanche que nous lui avions consacrée dans le numéro 2016/2 de notre Gazette, à l’occasion de sa candidature au poste de futur bâtonnier du Barreau de Liège. Nous l’avons rencontrée afin d’aborder plus en détails le cœur de son programme.

Émile & Ferdinand : Pouvez-vous nous retracer brièvement votre parcours professionnel ?

Bâtonnier au Barreau de Liège, Avocate et médiatrice agréée en droit familial et en droit social

Isabelle Tasset : C’est en 1983 que j’ai prêté serment, après avoir terminé mes études de droit et mon agrégation à l’ULg. J’ai ensuite commencé mon stage chez le Bâtonnier Henri Hoven avant de rejoindre le bureau que

mon père avait créé et où on pratiquait essentiellement le droit du travail et des entreprises en difficulté. De mon côté, j’ai développé d’autres matières dont le contentieux fiscal et le droit de l’expropriation. Parallèlement, j’ai très vite été chargée de cours en droit du travail dans le programme du graduat en sciences juridiques de la Haute École Libre Mosane

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RENCONTRE

déontologie

information communication

accès à la justice

... qui est devenu le bachelier en droit de l’HELMO. J’y donne encore cours. À la fin des années 1990, j’ai été très interpellée par les travaux de la québécoise Lorraine Filion. Elle développait à Québec la médiation familiale au sein des tribunaux avec une approche pluridisciplinaire qui impliquait les magistrats, les avocats ainsi que les travailleurs sociaux. Depuis lors, je reste très attentive à tout ce qui touche aux modes mieux adaptés

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de règlement des conflits qui permettent finalement aux justiciables de sortir du litige avec davantage de sérénité. En mai 2016, vous confiiez à nos lecteurs « poser votre candidature au vice Bâtonnat de Liège afin de préparer l’avenir de la profession d’avocat dans la concertation et dans le respect de tous ». Aujourd’hui, quel est votre état d’esprit par rapport à l’avenir de la profession d’avocat ?

formation

Je reste optimiste et je suis persuadée que, si nous nous adaptons, nous résisterons au changement. Je souhaite d’ailleurs préparer l’avenir avec des professionnels du changement et notamment le G.R.I.S. et HEC Executive School et le professeur Philippe Destatte. Le monde judiciaire est associé aux mots procédure, plaidoirie, décisions qui tranchent… Et je me rends compte que les justiciables ne comprennent plus toujours pourquoi ils doivent attendre si


RENCONTRE

longtemps à chaque étape : attendre un rendez-vous, attendre l’introduction de la procédure, attendre les plaidoiries, attendre les conclusions et décisions. Tous les justiciables n’ont pas besoin qu’un juge tranche. Par exemples, certains hommes d’affaires veulent préserver leurs relations commerciales et certains couples souhaitent gérer eux-mêmes leur divorce. Parallèlement à ce constat, le Ministre de la Justice, Koen Geens estime aujourd’hui que seules les procédures complexes valent la peine d’être jugées de manière traditionnelle par des magistrats experts. Les autres dossiers pouvant être traités en dehors des prétoires. Nous devons participer à l’organisation d’une autre justice, par exemple, faire en sorte que les divorces puissent être traités en dehors des procédures classiques, par acte d’avocat. Le client serait alors réellement placé au centre du dossier. C’est une opportunité intéressante qui s’ouvre aux avocats et cela mérite qu’on y soit attentif et que l’on se forme. Nous avons effectivement le monopole de la plaidoirie et du droit collaboratif, mais nous n’avons pas le monopole de la conciliation, de l’arbitrage et de la médiation. Quels sont les principaux axes de votre programme ? La déontologie

La déontologie constitue une véritable plus-value de notre profession qui nous distingue de certains « marchands de droit ». Toutefois, ces règles ne sont

La déontologie constitue une véritable plus-value de notre profession qui nous distingue de certains « marchands de droit » pas toujours faciles à interpréter et il est parfois difficile pour un avocat de comprendre ce qui est permis et ce qui ne l’est pas dans son nouvel environnement. Cela constitue un frein important à l’heure où l’information circule de plus en plus rapidement grâce aux nouveaux modes de communication. Je souhaite donc clarifier les choses, notamment en organisant un colloque lors de la rentrée solennelle du Jeune barreau le 17 novembre prochain. En se libérant d’une approche souvent trop intellectuelle, des règles seraient établies en partant de situations et de cas concrets. Ce colloque s’intitule : déontologie 3.0 do or don’t. L’information

Nous ne pouvons nier le développement de plus en plus important des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle au sein de notre profession. Les avocats ne sont pas des informaticiens et il est primordial d’apprendre à maîtriser ces nouveaux outils qui peuvent nous faire gagner un temps précieux dans l’exercice de notre fonction. Une des missions de l’Ordre est d’ailleurs de fournir aux avocats formation, documentation et bibliothèque. J’ai dernièrement participé à un colloque à Lille où le Barreau lillois présentait son propre logiciel d’intelligence prédictive créé en

collaboration avec l’Université, la Cour d’appel et une maison d’édition. Un projet semblable me trottait déjà dans la tête depuis un bon moment. Et cela rejoint le programme que le Groupe Larcier est en train de développer en droit fiscal. À ce jour, nous avons déjà réuni Monsieur le Bâtonnier Matray et Maître Luc Herve, Conseiller de l’Ordre et spécialisé en droit fiscal. Le 1er septembre, j’ai lancé un appel aux magistrats de la Cour d’appel et du travail de Liège. Nous avons pris contact avec le doyen de la Faculté de droit de l’Université de Liège ainsi qu’avec Marc Bourgeois, professeur à l’HEC Liège, l’École de gestion de l’Université de Liège. Nous pourrons également bénéficier de l’appui de la Commission du Conseil de l’Europe, la CEPEJ qui a soutenu le projet lillois. En travaillant en étroite collaboration, nous pourrons mettre sur pied un programme de ce type qui sera utile à tous, car adapté aux besoins spécifiques de chacun. Les avocats et les magistrats pourront faire part de ce dont ils ont besoin et disposeront au final des mêmes outils de travail ; ce qui est primordial pour garantir les droits de la défense. Nous devons travailler ensemble pour construire notre propre outil.

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RENCONTRE

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N ous ne pouvons nier le développement de plus en plus important des nouvelles En bénéficiant des technologies de l’intechnologies et de l’intelligence telligence artificielle, la justice devient une « justice prédictive ». Il est ici question de « prédire le droit ». L’idée est de pouvoir disposer très rapidement d’un maximum de décisions qui viennent confirmer ou infirmer la thèse défendue. Ce qui permettra d’appréhender l’avenir avec le plus de renseignements possibles. À l’heure actuelle, lorsque l’on effectue des recherches, l’on obtient une série de décisions qui doivent encore être triées, analysées avant d’être gardées ou rejetées. Le temps gagné pourra être consacré à développer la vraie valeur ajoutée de l’avocat. La formation

Par année judiciaire, plus de 500 formations sont proposées aux avocats du Barreau de Liège. C’est à la fois beaucoup et pas suffisant, car toutes les thématiques n’y sont pas abordées. En partenariat avec l’Université de Liège et le Service des formations continues, je souhaite proposer une nouvelle façon de travailler en élaborant une plateforme qui centralise les demandes et les offres de formations juridiques et non juridiques. L’Université mène en effet beaucoup de recherches dans le domaine pédagogique. Grâce à ce partenariat, nous bénéficierons de techniques d’enseignement plus modernes et de la possibilité de recevoir un certificat universitaire et des chèques formation.

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artificielle au sein de notre profession

L’accès à la justice

Une des premières questions que les clients nous posent est de savoir combien va leur coûter notre intervention. C’est plus que légitime d’ailleurs. Or, les avocats ne sont pas en mesure de répondre à cette question en début de dossier. Je voudrais encourager une réflexion sur la clarification du coût de nos interventions. Je suis assez séduite par le projet qui a été mis en place au sein du Barreau de Mons et qui s’inspire d’un modèle français. ING, le « partenaire historique » de l’avocature, accepte de financer l’intervention de l’avocat moyennant un système de prêt. Concrètement l’avocat évalue le coût de son intervention et ING prête cette somme qui est placée sur un compte ; l’avocat prélevant en fonction de l’évolution du dossier sur base d’un état des lieux régulier qu’il adresse à son client. Le client rembourse alors une somme modique par mois. Cela permet de rassurer et le client et l’avocat. Cette formule est très intéressante pour la classe moyenne.

L’idée est aussi d’installer un autre système de tarification : de passer d’une tarification horaire à une tarification forfaitaire. Mais à ce propos, tous les avocats ne partagent pas mon avis et il y a de gros débats au sein d’Avocats.be. Nous devons en discuter avec des professionnels du chiffre. Je suis pour ma part convaincue qu’un forfait bien calculé mérite réflexion. Le forfait me permet de rebondir sur un autre projet qui est celui de l’assurance protection juridique. Là, les négociations nous échappent sur le terrain car elles sont vraiment menées par Avocats.be et son Président, l’OVB, Assuralia et le Ministre Koen Geens. Il serait aussi question de forfait et de conventionnement. En ce qui concerne l’aide juridique, nous avons gagné certaines batailles, mais il nous reste des combats à mener. Nous avons intérêt à nous associer aux justiciables les plus défavorisés pour ensemble faire entendre notre voix.


RENCONTRE

L 'avocat apparaît comme celui qui attise le conflit juste pour multiplier ses prestations alors que la majorité

d'entre nous travaille avec passion dans le seul but de trouver la solution la plus adéquate pour leurs clients

La communication

Nous devons repenser notre communication, car l’image que l’on donne ne correspond pas à ce que nous sommes. L'avocat apparaît comme celui qui attise le conflit juste pour multiplier ses prestations alors que la majorité d'entre nous travaille avec passion dans le seul but de trouver la solution la plus adéquate pour leurs clients. Nous devons davantage communiquer vers l’extérieur. Nous sommes en train de travailler sur un nouveau website. Tout en conservant les spécificités de chaque barreau et en maintenant une justice de proximité, je suis persuadée que nous avons intérêt à construire un grand Barreau Liège – Huy – Verviers voire plus si affinités ! Avez-vous d’autres projets qui vous tiennent à cœur ?

Je souhaite également mener une discussion constructive avec les juridictions de la famille en réunissant magistrats et avocats. Bien qu’étant un tribunal encore « jeune », le Tribunal de la famille souffre aujourd’hui d’un afflux énorme de dossiers. Cela donne une mauvaise image au justiciable ; le Tribunal de la Famille a été conçu avec l’objectif d’être davantage à l’écoute des citoyens. Dans les faits, c’est très difficile à mettre en place parce que les magistrats ne sont pas assez nombreux. Justiciables, magistrats et avocats restent donc avec un goût amer. Mettons-nous ensemble autour de la table afin de dégager des pistes de solution. En cela, je rejoins l’intention de Koen Geens de pouvoir traiter certains dossiers en dehors des procédures classiques. En tant que fille et mère d’avocate, quelle importance représente pour vous le passage de flambeau entre les différentes générations d’avocats ?

L’échange d’expertise entre les différentes générations constitue une véritable richesse pour notre profession. Nous avons la chance d’avoir de jeunes avocats qui maitrisent les nouvelles technologies et qui apportent une vague de nouveauté et d’enthousiasme très communicative. Et les plus anciens qui ont l’expérience de la profession et qui sont attentifs au respect de la déontologie et à une certaine tradition qui malgré tout garde son importance. Nous formons une belle communauté ! Pas mal de jeunes se lancent dans la profession et quittent le barreau après dix ans pour faire autre chose. Personnellement, je ne vois pas nécessairement cela comme un échec, mais plutôt comme une expérience intéressante. Changer d’activité tous les dix ans devient quelque chose de courant aujourd’hui. Il faut y voir une évolution de la société tout en restant attentif au bien-être de l’avocat.

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SAVE THE DATE

COLLOQUES ET FORMATIONS Journée d’étude bilingue – Le projet actuel du nouveau Code des sociétés et des associations

Sous l’égide du Centre belge du droit des sociétés (CBS) Mercredi 8 novembre 2017 – Bruxelles Colloque anniversaire de la Revue de Jurisprudence de Liège, Mons et Bruxelles (J.L.M.B.)

La défense demain Jeudi 7 décembre 2017 - Bruxelles

28e journée du juriste d'entreprise Le droit économique en mouvement

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Jeudi 9 novembre 2017 - Bruxelles

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