sa 26 nov Génétique Comment la médecine person nalisée et Big Data va changer nos vies Samedi 26 novembre 2016 SwissTech Convention Center EPFL 17h –19h, Auditoire Cloud
Comment la médecine personnalisée va changer nos vies Génétique et Big Data
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SwissTech Convention Center, EPFL Sa 26 novembre 2016, 17h–19h, Auditoire Cloud 4 exposés de 15 minutes Débat dans la dernière période édecine personnalisée : de quoi parle-t-on ? M Pr Denis Hochstrasser
Qu’est-ce que cette médecine peut m’apporter maintenant ? Pr Nicolas Senn
Quels progrès en attendre pour demain ? Pr Didier Trono
ig Data : suis-je allié, complice ou victime ? B Faut-il avoir peur ? Pre Samia Hurst
Quelle médecine pour demain ?
Au début des années 2000, une révolution silencieuse s’est mise en marche. Son nom : la médecine personnalisée (aussi appelée médecine de précision, ou encore santé personnalisée). De quoi s’agit-il ? Grossièrement résumé, ses buts sont d’adapter le traitement à chaque personne, en tenant compte de son profil génétique, et de prédire et prévenir la survenue de maladies. On ne soigne plus telle ou telle maladie mais chaque personne selon ses particularités, et on agit avant que la maladie ne soit vraiment déclarée. Pour cela on utilise la génétique et, de plus en plus, quantité d’autres données personnelles, qu’elles soient issues de la médecine ou des applications et autres objets connectés utilisés par les personnes elles-mêmes. Le projet de la médecine personnalisée ne cesse donc d’évoluer. Pour les médecins et les hôpitaux, cette démarche centrée sur les données des personnes devient essentielle. Mais ils ne sont pas les seuls à vouloir entrer dans ce nouveau monde. D’autres acteurs, comme les mastodontes que sont Google, Facebook, Apple, Microsoft et Amazon, cherchent à utlliser les données pour améliorer la santé de la population. Tous, en effet, développent des systèmes de stockage de données en santé couplés à de l’intelligence artificielle. Grâce à leurs gigantesques moyens économiques, ils s’apprêtent à cartographier les profils de santé de populations entières et à proposer différents services qui leurs seront liés.
L’arrivée de cette nouvelle médecine, qu’elle se réalise complètement ou non, va transformer toutes les pratiques actuelles et pose évidemment d’énormes questions de société. Que faire avec les données des individus et comment assurer leur confidentialité ? Comment gérer dans le temps le savoir sur chaque personne ? Que faire des informations prédictives si aucun traitement n’existe ? Ce nouveau paradigme médical va se mettre en place progressivement. Pour l’instant, les différents acteurs ne font que tester leurs solutions et la technologie n’est pas autonome. Il est donc encore temps de penser et de cadrer les avancées thérapeutiques et technologiques qui s’apprêtent à changer nos existences. C’est au fond tout le but de ce petit magazine qui accompagne la conférence « Comment la médecine personnalisée va changer nos vies ? » qui se déroulera le samedi 26 novembre à 17 heures, dans le cadre du Salon Planète Santé live au SwissTech Convention Center de l’EPFL. Bertrand Kiefer Rédacteur en chef de la Revue Médicale Suisse Michael Balavoine Rédacteur en chef de Planète Santé
Impressum Responsable de la publication : Bertrand Kiefer, Rédacteur en chef de la Revue Médicale Suisse Coordination : Michael Balavoine Textes : Elisabeth Gordon Edition : Joanna Szymanski Concept graphique et mise en page : Adrien Moreillon Editeur : Planetesante.ch Tirage : 80 000 exemplaires Avec le soutien de la Fondation Leenaards
Des traitements sur mesure La médecine personnalisée suscite de grands espoirs. Elle vise à prendre en compte les caractéristiques biologiques de chaque individu, afin d’affiner le diagnostic et le traitement des maladies qui l’affectent. Cette nouvelle approche soulève toutefois déjà des questions. Prescrire le bon traitement au bon patient et au bon moment : tel est l’objectif que se fixe la médecine personnalisée, que certains préfèrent appeler médecine de précision ou même, plus globalement, santé personnalisée. Plutôt que de donner à tous les patients atteints d’une maladie donnée le même type de traitement, il s’agira d’offrir à chacun la thérapie la
mieux adaptée à son cas, en se fondant sur ses caractéristiques biologiques, notamment génétiques. A l’origine de la conception de cette future prise en charge « sur mesure » se trouve le décryptage complet du génome humain, réalisé pour la première fois en 2001. Depuis, les outils de séquençage de l’ADN utilisés ont gagné en puissance, ce qui a considérablement accéléré la vitesse du décryptage tout en réduisant son coût. A terme, l’analyse du génome devrait devenir aussi routinière que celle du sang aujourd’hui. L’idée est donc de recueillir les données génétiques de multiples personnes et de les stocker dans des banques de données, afin de pouvoir les
traiter et les comparer. Les scientifiques espèrent ainsi trouver les facteurs génétiques qui sont à la base d’une pathologie donnée, mais aussi ceux qui prédisposent à son développement (lire « A chacun son génome, à chacun son traitement »). Car la médecine personnalisée sera non seulement curative, mais aussi prédictive : elle nous informera des risques que nous avons de souffrir, à une échéance plus ou moins lointaine, de diverses affections. Des avancées dans le traitement du cancer Cette médecine de précision est déjà à l’œuvre et elle a fait la preuve de son intérêt, notamment dans la lutte anticancéreuse. Les oncologues disposent de quelques médicaments dits « ciblés » qui s’attaquent précisément à des tumeurs possédant des caractéristiques biologiques particulières, limitant ainsi les effets secondaires des traitements. En outre, dans certains cas, les spécialistes peuvent prédire, sur la base de l’analyse génétique de la tumeur, si leur patient réagira favorablement ou non à une chimiothérapie. Cette approche a déjà permis d’améliorer le pronostic de certains cancers.
L’objectif est de l’affiner et de l’étendre à des pathologies comme le diabète, l’hypertension, les maladies cardiovasculaires, la maladie d’Alzheimer, les troubles bipolaires et bien d’autres. La tâche est cependant très complexe, car ces affections résultent à la fois du dysfonctionnement de plusieurs gènes et de facteurs liés à l’environnement. De nombreuses interrogations La médecine personnalisée va donc bouleverser la pratique médicale. Si elle est porteuse de nombreuses promesses, elle soulève aussi des interrogations. Nous dirigera-t-elle vers une prise en charge toujours plus scientifico-technique ou permettra-t-elle au contraire de réhumaniser la médecine ? (lire « Vers une médecine encore plus technique ou réhumanisée ? »). Quel rôle – et quelle responsabilité – nous donnera-t-elle sur la maîtrise de notre santé ? Par ailleurs, qui stockera nos données personnelles ? Des institutions neutres et fiables ou des multinationales qui les exploiteront à des fins commerciales ? (lire « Quel sera le sort de nos données personnelles ? »). Avec la généralisation des biobanques, qu’adviendra-t-il de
la confidentialité de nos données et du secret médical ? (lire « Quelques questions éthiques »). Parviendra-t-on à élaborer des réglementations capables de protéger les individus, surtout les plus vulnérables, contre d’éventuelles dérives du système qui conduiraient à des discriminations ? Une autre question en suspens concerne l’évolution des dépenses de santé. On peut espérer les voir diminuer grâce à la mise en place de traitements plus ciblés qui permettront d’éviter certains actes inutiles et de diminuer les complications. On peut craindre aussi de les voir exploser sous l’effet de thérapies très coûteuses. Quoi qu’il en soit, qu’on l’appelle de ses vœux ou que l’on redoute ses conséquences, la médecine personnalisée est en marche et on ne pourra pas arrêter son essor. Il nous revient donc à tous, en tant que citoyens, d’en débattre et de faire entendre notre voix.
Denis Duboule
A chacun son génome, à chacun son traitement Adapter à chaque individu la thérapie appropriée en se fondant sur son ADN. C’est l’objectif, à long terme, de la médecine personnalisée. « Le génome humain contient un peu plus de trois milliards de signes, soit cinq cents fois plus que La recherche du temps perdu de Marcel Proust », précise Denis Duboule, professeur de génétique à l’Université de Genève et à l’EPFL. En fait, souligne-t-il, « il est faux de parler DU génome humain », car il y a autant de génomes que d’individus. Chacun d’entre nous porte dans son ADN de petites modifications qui le distinguent de son voisin. Ce constat est à l’origine de l’émergence de la médecine personnalisée. Son objectif est en effet de parvenir à « associer l’une de ces variations à une pathologie particulière », selon le généticien. Cela permettra de disposer de diagnostics de précision et de traitements, qui pourront être curatifs ou même anticipés puisqu’ils prendront en compte notre risque de souffrir dans le futur de telle ou telle maladie. « A terme, prédit Denis Duboule, on peut imaginer que l’on fera une analyse globale du patrimoine génétique du nouveau-né qui nous fournira une sorte de feuille de route génomique sur laquelle on pourra se baser pour les événements futurs ». On n’en est pas encore là. Jusqu’ici, les scientifiques ont essentiellement étudié les séquences génétiques qu’ils appellent
« codantes », celles qui gouvernent la production des protéines et qui « ne représentent au mieux que 1,5 % du génome ». L’important est sans doute ailleurs. Car ce ne sont pas les gènes eux-mêmes, mais la manière dont ils s’expriment – en « s’allumant » trop ou pas assez – qui « est probablement à l’origine de très nombreuses maladies », selon le généticien. Avant de pouvoir traiter chaque individu sur la base des informations contenues dans son génome, il faudra donc comprendre les mécanismes régulant l’expression des gènes qui sont très complexes et qui varient selon le tissu ou l’organe concerné. Une énorme tâche en perspective.
Denis Hochstrasser © UNIGE, Jorg Brockmann
Vers une médecine encore plus technique ou réhumanisée ? La médecine personnalisée va-t-elle mettre Si la médecine de précision adopte une apla maladie ou la personne au cœur de la proche centrée sur la maladie, elle se fondera prise en charge ? essentiellement sur des outils technologiques – équipements de séquençage du génome La médecine personnalisée n’en est qu’à du patient, imagerie médicale, etc. – pour diagses balbutiements, mais on peut déjà s’inter- nostiquer une affection et proposer un traiteroger sur la manière dont elle évoluera et sur ment, ainsi que sur les calculs de probabilité la place qu’elle accordera au patient. Pour pour évaluer les risques que cette affection ne Denis Hochstrasser, chef du Département se développe. de médecine génétique et de laboratoire des Une autre voie consisterait « à placer la Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), personne, considérée dans ses différentes la question est de savoir si elle placera « la dimensions – biologiques, psychologiques, maladie, ou la personne, au centre de la prise sociales et culturelles – au centre des préen charge ». occupations », selon le professeur des HUG. La cause des maladies n’est, selon lui, Car la médecine personnalisée ne change pas « qu’une combinaison de l’effet des gènes et uniquement la prise en charge médicale. Elle de l’environnement », ce dernier se résumant modifie aussi les rapports patient-médecin et dans ce cas « aux toxiques et aux microbes ». peut affecter la manière dont un individu se Certaines résultent de la défaillance d’un seul construit par rapport à sa santé et même à gène (comme la mucoviscidose ou la dystro- la société. « Connaître son propre génome phie musculaire), d’autres sont provoquées peut donner une autre image de soi », prépar des intoxications (à l’alcool, aux drogues, cise Denis Hochstrasser. etc.) ou par des agents pathogènes. Entre les Le défi est d’arriver à concilier ces deux deux figurent la plupart des pathologies (du approches, l’une allant dans une direction diabète à la maladie d’Alzheimer, en passant toujours plus technico-scientifique et précise par les thromboses et de multiples cancers) des soins, l’autre permettant de « réhumaqui ont une composante génétique – faisant niser la médecine » en considérant le patient d’ailleurs intervenir plusieurs gènes – et qui « comme un membre participatif d’une société sont aussi liées à l’environnement. responsable et durable ».
Marcel SalathĂŠ
Quel sera le sort de nos données personnelles ? L’élaboration d’une médecine personnalisée nécessite la mise en place de banques de données biomédicales. Par qui seront-elles gérées et à quelles fins ? A l’heure de sa personnalisation, la médecine entre, elle aussi, dans le monde du Big Data, car elle repose sur le stockage et le traitement de volumes toujours plus considérables d’informations. Les chercheurs doivent en effet pouvoir comparer les données génétiques, médicales et même relatives au mode de vie d’un très grand nombre d’individus, malades ou sains, afin de déterminer quels sont les facteurs responsables de telle ou telle pathologie. Les biobanques mises en place en Suisse recueillent déjà les informations que les hôpitaux collectent sur les patients qui y consentent et à qui ils garantissent l’anonymat. Mais avec la multiplication et la mondialisation du stockage de l’information, cela devient de plus en plus difficile. En croisant les données biomédicales d’une personne avec celles extraites des réseaux sociaux auxquels elle participe, de son téléphone portable, de sa carte de crédit, etc., il est désormais relativement aisé de connaître son identité. En outre, il sera difficile de savoir où seront stockées nos données personnelles – dans les serveurs d’institutions publiques ou dans ceux de Google, Facebook et autres multinationales du numérique qui investissent massivement dans le domaine de la santé. Surtout, nul ne sait quel usage
en sera fait, ni par qui – établissements médicaux, compagnies d’assurance, gouvernement ? « Comment être sûr qu’elles ne seront pas utilisées contre nous ? », s’interroge Marcel Salathé, professeur associé à la Faculté des sciences de la vie de l’EPFL. Actuellement, seuls les organismes qui stockent toutes ces données y ont accès. Compte tenu de la valeur de ces informations, les posséder, « c’est concentrer le pouvoir, précise-t-il, car le Big Data est le Big Power ». Pour redonner confiance aux individus et faire en sorte qu’ils acceptent de partager leurs données – gage des avancées de la recherche – le professeur de l’EPFL estime que chacun devrait avoir accès aux informations qui le concernent. Il plaide pour l’élaboration d’une « régulation » dans ce domaine et pour l’élaboration de biobanques « neutres et inspirant la confiance ». Une chance à saisir pour la Suisse.
Samia Hurst
Quelques questions éthiques Le respect de la confidentialité de la vie privée, la confiance des patients et les dérives de moralisation de la santé et de la maladie sont au centre du débat éthique. « En diffusant la médecine personnalisée dans le contexte historique et social qui est le nôtre, quelles sont les valeurs qui risquent d’être mises à mal ? ». Cette question, que pose Samia Hurst, directrice de l’Institut Ethique, Histoire et Humanité de la Faculté de médecine de l’Université de Genève, est au centre du débat éthique. Le développement et l’explosion à venir des biobanques (lire « Quel sera le sort de nos données personnelles ? ») peuvent fragiliser la confidentialité de la vie privée. Révéler ses données, notamment biomédicales, peut non seulement exposer la personne à des dommages de la part de diverses entités publiques ou privées, mais aussi « lui faire honte », souligne l’éthicienne, ou entacher sa réputation. En outre, si la confidentialité n’était plus assurée, de nombreux patients seraient réticents à confier certaines informations sensibles à leurs médecins. D’autre part, on ne peut accepter de partager ses données biomédicales que si l’on a confiance dans les personnes à qui on les confie. Or, précise Samia Hurst, « la confiance est donnée de manière ciblée » à des individus ou des groupes précis dont on pense qu’ils vont agir pour notre bien. Le problème est
actuellement très concret, puisque l’émergence du Big data conduit à communiquer ses données à des entités « indéterminées qui en feront un usage qui nous est inconnu et dont on ne connaît ni les compétences, ni l’honnêteté, ni la fiabilité ». Enfin, la médecine de précision pourrait conduire à « une moralisation de la santé et de la maladie », craint Samia Hurst. Puisque chacun connaîtra ses risques de développer telle ou telle pathologie, il sera tentant de considérer qu’un malade « est en quelque sorte coupable de sa maladie » puisqu’il n’a pas fait tout ce qu’il fallait pour l’éviter. A l’heure de l’augmentation des coûts de la santé, la solidarité et la mutualisation des risques qui sont à la base des assurances pourraient être mises à mal.
24 - 27 NOVEMBRE 2016 SWISSTECH CONVENTION CENTER (EPFL)
NTÉ E SA E R T U VO Z LE Q TEL E L’AVE N ! S E VOU AIS VU JAM AVEC LE SOUTIEN DE :
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