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LE M AGAZI N E Q U I P RE N D SO I N DE VOUS
NUMÉRO
22
ERREURS MÉDICALES, CRISES SANITAIRES
À QUI
LA FAUTE
• CE MAGAZINE VOUS EST OFFERT PAR LES ENSEIGNES VIADY S E T PHARMA RÉFÉRENCE •
Lettre ouverte par Lucien Bennatan, pharmacien
FRANÇAIS, VOTRE SANTÉ EST EN DANGER Alors qu’une nouvelle crise sanitaire vient d’éclater en France, le conseil d’État a choisi d’élargir la vente en ligne de médicaments sans ordonnance, entrebâillant ainsi la porte d’une mise à disposition probable de ces médicaments dans les rayons des grandes surfaces françaises.
NOUS, PHARMACIENS, considérons cette libéralisation inutile et de surcroît dangereuse voire criminelle. Il faut le rappeler haut et fort, les médicaments ne sont pas des produits de grande consommation, ce sont des substances actives susceptibles de provoquer des effets indésirables. NOUS, PHARMACIENS, avons su mettre au point le dossier pharmaceutique, un véritable outil de santé publique qui permet d’éviter les risques d’interactions médicamenteuses. Non renseignée, ni suivie, de combien d’incidents, d’accidents, d’hospitalisations, de décès, la vente de médicaments sur Internet sera-t-elle responsable ? NOUS, PHARMACIENS, évoluons constamment dans notre pratique en offrant aux patients de nouveaux services d’accompagnement assumant ainsi nos responsabilités d’acteurs de santé. Dans les pharmacies françaises, vous pouvez bénéficier de conseils et de rendez-vous prévention, vous informer sur le bon usage de votre traitement, être suivis régulièrement si vous êtes atteints de maladies chroniques dans le cadre des entretiens pharmaceutiques. NOUS, PHARMACIENS, assurons aux côtés des industriels et des grossistes répartiteurs la responsabilité de la maîtrise de la chaîne d’approvisionnement et de la traçabilité du médicament. Jusqu’à ce jour, aucun médicament contrefait n’a été détecté dans les pharmacies françaises. À l’inverse, l’OMS le confirme, 1 médicament sur 2 vendus sur Internet est un faux médicament, y compris dans les pays où la vente en ligne est adossée à une pharmacie physique. Demain, ils feront leur apparition sur le marché français sans qu’il soit possible de les identifier. NOUS, PHARMACIENS, livrerons une bataille féroce contre la médecine à deux vitesses induite insidieusement par l’ouverture de la distribution du médicament. Il est injuste que certains patients puissent continuer à bénéficier des conseils du pharmacien tandis que d’autres devront se contenter de déchiffrer les étiquettes en espérant ne pas s’être trompés de produit. NOUS, PHARMACIENS, sommes convaincus que ces nouveaux opérateurs réclameront très vite le droit de vendre des médicaments soumis à prescription. Cette banalisation du médicament aura pour conséquence le déremboursement progressif de ces spécialités et donc un accroissement des inégalités de santé.
NOUS, PHARMACIENS, avons organisé une saine concurrence entre nos officines pour que le médicament soit en France moins cher que dans la majorité des pays européens. Contrairement à ce que l’on vous répète en boucle depuis deux ans, le prix du médicament a baissé en France tout comme sa consommation. La promesse d’une baisse de prix supplémentaire de 30 % annoncée à grand renfort de spots publicitaires est en réalité un leurre. Car de quoi nous parle-t-on exactement ? Les Français dépensent par an et par personne 76 € pour les médicaments non remboursés. C’est donc pour vous faire économiser très provisoirement 1,90 € par mois que l’on joue avec votre santé. Tôt ou tard, les pouvoirs publics seront incités à les considérer comme des produits de consommation courante et à modifier leur taux de TVA de 7 à 19,6 %. Mécaniquement, leur prix de vente en sera d’autant augmenté. NOUS, PHARMACIENS, contribuons chaque jour au rétablissement des comptes publics en favorisant le développement du médicament générique envers et contre tous. 2 milliards d’euros ont été économisés en 2011 alors même que le taux de substitution peut encore progresser de 15 %. NOUS, PHARMACIENS, sommes présents sur tout le territoire et assurons en plus de toutes nos missions, le maintien du lien social essentiel à la qualité de vie dans la cité. Au moment où l’on constate les dysfonctionnements du contrôle étatique de la mise sur le marché des médicaments, nous pensons qu’il est paradoxal de fragiliser le seul réseau professionnel capable de mettre en place la surveillance des effets secondaires des traitements. Face au malaise de l’hôpital, au délicat problème de la désertification médicale, aux défaillances du système de surveillance du médicament, ce coup de butoir qui vise les pharmacies françaises aura pour conséquence la modification du modèle français de santé au profit d’un système à l’anglo-saxonne. Soyez-en assurés, ces manœuvres sont loin d’être désintéressées. Osons poser la question : pourquoi la grande distribution ne commence-t-elle pas par appliquer des baisses de prix sur le lait infantile (plus cher en grande surface), sur les produits de première nécessité ou simplement sur les fruits et légumes si importants pour conserver une bonne santé ? Nous, pharmaciens, sommes prêts à relever le défi des nouvelles technologies en construisant aux côtés d’une pharmacie physique une pharmacie « e-services ». Nous ne nous contenterons pas d’y proposer des produits mais nous accompagnerons au quotidien les patients dans leur parcours de soins en respectant, comme nous nous y sommes engagés, notre code de déontologie et le serment de Galien.
I D É IN
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Votre santé nous est précieuse
0 800 636 636 NUMÉRO VERT GRATUIT POUR RÉPONDRE À VOS QUESTIONS SUR LES PILULES CONTRACEPTIVES
éditorial
© DR
touche pas à ma pilule Les crises sanitaires sont elles une spécificité française ?
O
n peut légitimement se poser la question
nous en prescrivons une autre. Nous savions qu’il y avait un surrisque
après les récentes affaires du Mediator, des
de thrombose avec ces pilules mais nous avons fini par l’oublier. »
prothèses PIP, des pilules de 3e et 4e génération,
Tout est dit. Ces médecins n’ont ils pas également oublié que
de Diane 35. Les fervents partisans du complot,
les pilules contraceptives sont des médicaments et qu’à ce
dont le fonds de commerce est d’entretenir une méfiance sans
titre elles contiennent des principes actifs qui exposent à des
nuance sur les médicaments, désignent un seul et même
risques ? Et, en l’espèce, ces risques étaient énoncés, connus et
coupable. Mais ces oiseaux de mauvais augure, pseudo experts
identifiés. N’est il pas de leur responsabilité de procéder à un
qui interviennent en boucle sur tous les plateaux de télévision et
questionnaire précis, de vérifier l’histoire médicale, d’évaluer
que les journalistes feraient bien d’interpeller sur leurs propres
les risques familiaux, de procéder en cas de doute à des tests
fiascos médicaux, n’ont pu cette fois nier l’intérêt de ces pilules
sanguins ? D’informer les patientes sur les signes qui peuvent
de dernière génération pour des milliers de femmes qui les
les alerter ? Certes, nos médecins manquent cruellement de
utilisent dans la bonne indication. Idem pour Diane 35,
temps pour réaliser une véritable consultation, pour se former
un médicament présent dans 116 pays depuis 25 ans et qui n’a
après l’université, pour étudier la littérature scientifique ou
fait l’objet d’aucune demande de retrait, précise à juste titre
pour signaler et suivre les incidents ou les accidents dont ils ont
le laboratoire qui la commercialise.
connaissance. Mais on ne peut que sursauter à la lecture d’une
À qui la faute alors ? Dans toutes ces aff aires, les responsabilités
étude publiée en septembre 2012 (Fecond Inserm) : 69 % des
sont multiples et croisées et tiennent en grande partie
gynécologues et 84 % des généralistes refusent de poser
à l’organisation du système de santé français.
des stérilets parce qu’il ne serait pas indiqué chez les femmes
Les agences sanitaires autour du médicament sont pourtant
qui n’ont pas eu d’enfants, alors même que toutes les études
nombreuses. Pour preuve, la Haute autorité de santé apprécie
scientifiques prouvent le contraire.
l’intérêt thérapeutique des traitements, le Comité économique des produits de santé fi xe les prix et le niveau de remboursement,
En annonçant précipitamment le déremboursement
l’Agence nationale de sécurité du médicament délivre les autorisations
des pilules contraceptives de dernière génération et en
de mise sur le marché et coordonne le système de pharmacovi
interdisant Diane 35, la ministre de la Santé a créé une panique
gilance au niveau national. Mais force est de constater que ce
totalement injustifiée chez les utilisatrices. Un affolement
système complexe est faillible. William Dab, ancien directeur
qui aura pour conséquence l’abandon chez certaines femmes
général de la santé, l’explique simplement : « Qui est réellement
de toute forme de contraception et donc une augmentation
responsable du contrôle du bon usage du médicament ? Il n’y a pas
du nombre d’avortement. Une enquête Ipsos réalisée pour le
de réponse claire. Il existe une dispersion des responsabilités qui a
magazine Elle le confirme : 29 % des 15 25 ans prenant la pilule
pour conséquence une politique du médicament sans réelle vision de
envisagent désormais de l’arrêter.
santé publique. L’usage du médicament n’est pas systématiquement
Toutes ces jeunes femmes ignorent à quel point leurs aînées se
surveillé, aussi il peut être utilisé massivement de façon non conforme
sont battues pour obtenir le droit de programmer librement
aux recommandations de bonne pratique sans que cela soit détecté
leurs grossesses. C’est la raison pour laquelle je leur adresse
suffisamment tôt pour permettre une réaction efficace. »
cet appel. Sous couvert de sécurité sanitaire, perce le lancinant et dangereux discours des « croisés » de l’ordre moral, partisans
En outre, que penser de ce médecin qui avoue, avec
des méthodes de contraception « naturelles ». La pilule a
une certaine franchise cette fois, à l’antenne de France
bouleversé l’histoire des femmes. Ne nous laissons pas confisquer
Culture : « Nous sommes pris dans une politique d’efficacité de
cette victoire si chèrement acquise.
la contraception à tout prix. Il ne faut surtout pas que ces jeunes filles avortent. Alors, lorsqu’une pilule ne marche pas bien,
FABIENNE ATTALI DIRECTRICE DE LA RÉDACTION
sommaire
numéro 22
8.
Enquête sur les erreurs médicales.
12. 14. 16. 18.
Petit déjeuner : mode d’emploi. 3 ouvrages pour vous aider à associer les saveurs. C’est l’heure du goûter. Comment décrypter les étiquettes alimentaires ?
22. 24.
Entrez dans la danse. Petit guide du démaquillage parfait.
nutrition & saveurs
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belle & bien prévention et santé 26. 30. 32. 37. 38. 40.
Maladies émergentes, la menace aux multiples visages. Santé au féminin : zoom sur l’endométriose. Vaccins, une protection menacée. La tuberculose fait de la résistance. La literie, premier outil du sommeil. Prévention, diagnostic, traitement, ce qu’il faut savoir sur la DMLA.
42.
Handicap : une romancière et un philosophe ouvrent le débat sur les assistants sexuels.
vivre ensemble
Une galerie d’art en ligne Permettre aux artistes contemporains de s’adresser à tous les publics, c’est le défi que s’est lancé Emmanuel, ce jeune homme talentueux passionné par la création. Pari réussi avec la mise en ligne de buycurious.fr. Dans la pure tradition du cabinet de curiosités, le site propose à la vente des objets aussi inédits qu’ hétéroclites Par Natalia Gruszeka comme une molaire en feutrine, un photophore en forme de visage de bébé, un carnet en moleskine femme à barbe ou encore un savon à la poire enveloppé dans un étui de laine mérinos… Les thèmes changent tous les mois, tout comme les artistes invités (à partir de 10 €). www.buycurious.fr
Directeur des publications Lucien Bennatan. Directrice des rédactions Fabienne Attali. Assistante Cindy Doorgah. Ont collaboré à ce numéro : Marco Albrizzi, Ghislaine Andréani, Luc Biecq, Marie-Christine Clément, Cyrienne Clerc, Catherine Holué, Michèle Lajoux, Romain Loury, Aline Périault, Pascal Turbil. Le gai savoir : Monique Atlan, Roger-Pol Droit, Jean-Philippe Klein.
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Secrétariat de rédaction Laurence Roch. Direction artistique Julien Imbert. Maquette et iconographie Virginie Bazot. Directrice de la publicité Nadia Riou. Tél. : 01 55 20 93 72. Port. : 06 64 09 42 46. e-mail : nadia.riou@pausesante.fr Suivi de fabrication Rivages. Impression Imprimerie Léonce Deprez.
Pause Santé est édité par la société Com’Access 78, boulevard de la République 92100 Boulogne-Billancourt. Tél. : 01 55 20 93 72. Site internet : www.pausesante.fr e-mail : redaction@pausesante.fr ISSN : 1968-93-30. Dépôts légaux à parution. Illustrations Couverture, pages 8 et 28 Bertrand Dubois.
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erreurs médicales la vérité d’abord
PAR C Y R I E N N E C LE RC ILLUSTR ATIONS B ERTR AN D DU BOI S
600 000 patients sont victimes chaque année d’un accident médical. Si l’indemnisation est juste, le dialogue et la transparence sont indispensables pour surmonter l’épreuve.
«C
omment imaginer que le traitement d’une maladie grave, qui nécessite des équipements techniques complexes et qui fait appel à l’humain, puisse se dérouler sans qu’il y ait d’erreurs ? », s’interroge Dominique Davous, 15 ans après le décès de sa fille Capucine, une adolescente de 14 ans, victime d’une erreur de dosage après une greffe de moelle osseuse. « L’erreur n’est jamais celle d’un individu, c’est celle d’une chaîne », poursuit elle. Sa parole résonne humaine, sincère et courageuse dans un documentaire* réalisé par Nils Tavernier et Gil Rabier. Les parents de Nicolas, Raphaël, Capucine, les médecins, les infirmières, les familles témoignent. « Il faut absolument qu’une confiance très forte s’établisse dès le début entre tout ce monde là pour que cela fonctionne et pour qu’on monopolise notre énergie dans le même sens », celui de la survie de l’en fant, souligne Stéphane, le père de Nicolas.
Celui ci soigné pour un lymphome a reçu une première poche de nutrition parentérale dont la date de péremption était dépassée puis une seconde destinée à un autre enfant. « Il est vrai que j’aurais dû probablement et de façon très simple dire : "C’est une erreur médicale" et après donner toutes les explications », avoue aujourd’hui, le médecin référent de Raphaël, sauvé de justesse après avoir été victime d’un surdosage, puis d’une carence vitaminique non diagnostiquée. Comment annoncer l’erreur ? Faudrait il mieux se taire ? Comment conserver un lien de confiance entre les parents et l’équipe médicale ? Comment tirer des leçons de ces expériences douloureuses ? Les regards croisés interrogent et rompent le silence. « Il faut apprendre des erreurs, il faut absolument en parler », souligne le pédiatre référent dans le service où était traitée Capucine.
3 questions à Loïc Ricour directeur du pôle Santé du défenseur des droits Quels types de conflits observez-vous ? L’incompréhension est un problème majeur. Le patient veut comprendre ce qui a été fait et ce qui sera fait. Il est en attente d’un nouveau dialogue. Le médecin doit admettre un devoir de vérité. Or il donne d’autant moins de précisions que les conséquences sont graves et les informations sont souvent trop tardives ou trop floues. La mauvaise communication, la dissimulation et le mensonge sont les principaux pourvoyeurs de contentieux.
Quel est votre rôle ? Nous tentons de renouer le dialogue avant que la judiciarisation n’intervienne. Un aléa thérapeutique qui n’est pas compris ne peut être accepté. Nous tentons de rationaliser des relations passionnelles. La première démarche consiste à se rendre à la source, à inciter le patient à rencontrer les médiateurs des commissions internes à l’hôpital, les CRUQPC. La médiation permet de régler environ un quart des dossiers.
Le système fonctionne-t-il ? En 2011, nous avons reçu 4 000 requêtes relatives à des erreurs médicales et ouvert 1 300 dossiers dont les deux tiers engageaient la responsabilité d’un professionnel de santé ou d’un établissement. Nous avons orienté environ 40 % des dossiers vers les CRCI pour une indemnisation à l’amiable. Mais quand il y a indemnisation sans conciliation, c’est que nous avons, en quelque sorte, échoué. Parfois, la judiciarisation est nécessaire pour permettre aux patients de comprendre, car les CRCI ne jugent pas. ☛ WWW. PA U S E S A N T E . F R
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enquête de santé
☛
Plus de transparence Qu’il s’agisse d’une erreur médicale, d’un aléa thérapeutique comme une infection nosocomiale (contractée à l’hôpital) ou même d’une complication courante, « il est légitime que le patient qui se sent victime d’une injustice se manifeste et que l’équipe médicale puisse donner une explication simple sans utiliser le jargon médical », estime René Amalberti, conseiller à la sécurité des soins à la Haute autorité de santé. Quand le dialogue est rompu, les patients peuvent saisir un médiateur interne à l’hôpital grâce aux Commissions des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC). Une innovation de la loi Kouchner du 4 mars 2002. Mais les patients en ignorent souvent l’existence ou « les considèrent comme la voix de l’établissement, donc partiales », regrette maître Patrick de la Grange, avocat au barreau de Paris. Si les problèmes ne sont pas résolus en amont, les associations de patients ou le défenseur des droits (ex médiateur de la République) peuvent aider les patients à établir un dossier. Ils vérifient notamment qu’il existe un lien certain entre l’événement indésirable et une erreur médicale ou une mauvaise prise en charge. « L’important, c’est de prendre du temps et de dialoguer
les chiffres
En France, 900 accidents médicaux surviennent en moyenne chaque jour dans les hôpitaux et les cliniques dont près de 400 sont considérés comme évitables*, soit entre 275 000 et 395 000 événements indésirables graves (EIG) par an. Les médicaments sont en cause dans presque la moitié des cas. *Enquête Eneis ministère de la Santé.
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avec la personne qui fait appel à nous et, parfois, de lui expliquer pourquoi la complication de son état ne relève pas de la responsabilité du médecin. Ainsi un patient qui fait une infection après un accident de la route et une fracture ouverte souillée aura parfois tendance à mettre en cause l’équipe médicale », souligne Bruno Landi, médecin coordinateur du pôle santé du défenseur des droits.
Plaintes et indemnisations : une longue marche Quand une indemnisation s’avère nécessaire, les tribunaux et surtout les CRCI (Commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux) prennent la relève. Aujourd’hui, plus de la moitié des dossiers se règlent à l’amiable devant ces instances. « Les CRCI permettent d’indemniser les victimes d’accidents médicaux plus rapidement et gratuitement, y compris en l’absence de faute. C’est l’innovation majeure des vingt dernières années. Le critère principal est celui de l’importance des séquelles. Par ailleurs, une nouvelle notion est apparue : un simple défaut d’information de la part du chirurgien engage désormais sa responsabilité même en l’absence de perte de chance », explique maître de la Grange. En cas de faute, l’indemnisation est du ressort de l’assurance. Suite à un aléa thérapeutique, elle est à la charge de la solidarité nationale grâce à la création d’un établissement public, l’ONIAM. « L’intérêt de tous est d’éviter de longues procédures judiciaires, et permet de ne pas encombrer les tribunaux. Ce filtre est plutôt efficace. Il est toujours possible d’engager ultérieurement ou en parallèle une procédure en justice », souligne t il. Si les patients sont désormais mieux indemnisés, ils ne sont pas plus nombreux à porter plainte. « Les chiff res sont stables. À Paris, la CRCI examine 6 000 à 7 000 dossiers par an et en accepte la moitié », souligne maître de la Grange. Un chiff re à comparer aux 12 millions d’actes de soins effectués chaque année dans les hôpitaux parisiens (AP HP). « Le système hospitalier inclut de plus en plus de patients aux parcours de plus en plus complexes avec des risques de plus en plus importants », souligne René Amalberti. L’événement indésirable, c’est l’envers de la médaille, le risque face au bénéfice du progrès médical, car « nous gagnons depuis dix ans, chaque année, trois mois de survie supplémentaire », conclut il. ●
la douleur des soignants « Quand on doit injecter une chimiothérapie, il y a un premier calcul qui est fait par une infirmière et qui, ensuite, est contresigné par la collègue avec qui on travaille pour être sûre de ne pas faire d’erreur. J’ai fait ce calcul, je me suis trompée dans le calcul, j’ai mal placé ma virgule et j’ai été contresignée par ma collègue. J’ai injecté, du coup, la mauvaise dose à un enfant (…). Je me suis dit : ma place est en prison parce que voilà, je ne suis même pas capable de faire bien mon métier, raconte l’infirmière référente de Raphaël, dans le documentaire réalisé par Nils Tavernier. Cela aurait été vraiment très, très, très difficile pour moi de revoir ces parents dans les jours qui ont suivi cette erreur. » Parfois, le soignant se retrouve en garde à vue comme dans l’affaire du petit Ilyès, décédé la nuit de Noël 2008. À tort ou à raison ? Le débat est loin d’être clos.
à voir *Que reste t il de nos erreurs ? Un film de Nils Tavernier DVD disponible en adressant votre demande à erreurlefilm@gmail.com.
à lire Dix ans de l’application de la loi Kouchner, sous la direction de Laurent Bloch. LEH Édition.
qui contacter ? > Pôle santé du défenseur des droits au 0 810 455 455. > Le CISS, Collectif interassociatif sur la santé, qui regroupe 40 associations intervenant dans le champ de la santé, au 0 810 004 333 (Santé Info Droits). > L’association d’aide aux victimes d’accidents médicaux (AVIAM) au 01 60 49 05 26. www.aviamfrance.org. > Le Lien, association de défense des patients et des usagers de la santé, au 01 46 99 04 45 ou par courriel : reseausante@hotmail.fr.
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je mange quoi le matin ?
petit-déjeuner mode d’emploi 85 % des Français passent chaque matin par la case petit déjeuner. Un repas considéré comme indispensable par la plupart des nutritionnistes. À condition de bien le composer.
A
près une nuit de jeûne, le petit déjeuner est un repas important qui doit apporter entre 20 et 25 % de l’énergie totale de la journée. Pain ou céréales, sucré ou salé, que choisir ? Dans tous les cas, le pire et le meilleur se côtoient dans les rayons.
Avantage au pain complet Le petit déjeuner est le repas au cours duquel on consomme le plus de pain : 80 grammes par adulte en moyenne selon la dernière étude sur les consommations alimentaires des Français publiée en 2010 par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc). Pain blanc, complet, au levain, aux céréales, l’off re est de plus en plus diversifiée. Lequel choisir ? « Préférez les pains complets aux pains blancs de type baguette généralement fabriqués avec des farines très raffinées moins riches en minéraux », répond le nutritionniste Christian Rémésy, ancien directeur de recherche à l’Inra et auteur de l’étude Quels types de produits céréaliers pour le petit déjeuner publiée dans les Cahiers de nutrition et de diététique. De nombreuses études montrent 12
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en effet que la consommation de céréales complètes plutôt que raffinées est associée à une diminution du risque de diabète, de maladies cardiovasculaires et de cancer. L’idéal, opter pour un pain complet au levain, procédé de fabrication qui a l’avantage d’augmenter la biodisponibilité des minéraux. « Les consommateurs qui n’aiment pas le goût du pain complet peuvent choisir du pain semi complet », précise le chercheur. Les produits céréaliers industriels de type pain de mie dont la qualité nutritionnelle est globalement très moyenne sont en revanche à éviter. Pour augmenter leur durée de conservation, les industriels utilisent des matières grasses de mauvaise qualité comme les huiles végétales partiellement hydrogénées. « Ces matières permettent d’obtenir des pains qui se conservent longtemps mais qui contiennent parfois des acides gras trans néfastes pour la santé », explique t il.
Trop de sucre au rayon céréales Pétales de blé, maïs soufflé, muesli, les céréales du petit déjeuner trônent en bonne place dès le matin sur les tables familiales.
Si 17 % seulement des adultes en consomment, près de 60 % des enfants de 3 à 17 ans en font leur petit déjeuner, selon l’Étude individuelle nationale sur les consommations alimentaires (INCA 2) menée par l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa). Mais ces produits archi transformés n’ont souvent plus de céréales que le nom. Une organisation indépendante américaine de santé publique, Environmental Working Group, a passé au crible plus de 80 paquets de céréales industrielles. Verdict : selon les marques, un bol de céréales peut apporter jusqu’à l’équivalent de 10 morceaux de sucre. Or de nombreuses études montrent en effet qu’un apport en sucre trop important dès
© Steve Hix/Somos Images/Corbis
PAR ALI N E PÉRIAU LT
sauter le petit-déjeuner fait-il grossir ? Les enfants qui ne prennent pas de petit-déjeuner sont plus enclins au surpoids que les autres. Les études portant sur ce point sont quasi unanimes. Ce constat est-il également valable pour les adultes ? Pas sûr. Certaines études de grande envergure concluent que les personnes qui sautent un repas – le petit-déjeuner par exemple – ne compensent pas en mangeant plus aux autres repas. Au total, elles consommeraient moins de calories dans la journée. À condition d’éviter le piège de la barre chocolatée de 11 heures. adeptes du « tout prêt », quelques mueslis industriels contiennent peu de sucre ajouté et des céréales complètes, n’hésitez pas à décrypter les étiquettes.
Sucré ou salé ?
le matin a des conséquences néfastes sur l’attention et la vigilance des élèves au cours de la matinée.
Avantage aux flocons de céréales Alors que choisir si l’on est un adepte des céréales ? « L’idéal est de consommer des flocons de céréales : blé, orge et surtout avoine. Ils ont l’avantage de conserver la céréale entière. Pour obtenir des flocons, les grains sont simplement écrasés puis précuits et séchés », répond Christian Rémésy. Et s’ils sont un peu difficiles à avaler pour les plus petits ? Vous pouvez ajouter des fruits ou des fruits secs pour les agrémenter. Enfin, pour les
En France, la tartine matinale est presque toujours accompagnée du duo beurre et confiture, cette dernière pouvant éventuellement céder la place à de la compote, moins sucrée. Mais remplacer les glucides par un produit protéiné de type jambon, œuf ou fromage à l’image de nos voisins d’Outre Manche peut être nutritionnellement intéressant. De nombreuses études ont comparé le petit déjeuner protéiné et son homologue glucidique. Verdict : les glucides favorisent la somnolence en fin de matinée. En revanche le petit déjeuner protéique permet de lutter contre les fringales et d’éviter le fameux coup de barre de 11 heures. Si vous êtes un adepte du salé, mieux vaut éviter le bacon très prisé par les Anglo Saxons, il contient trop de graisses saturées. En revanche du pain complet avec un œuf, du jambon blanc et un morceau de fromage vous maintiendront en forme toute la matinée. ●
à lire L’alimentation durable pour la santé de l’homme et de la planète de Christian Rémésy aux éditions Odile Jacob.
les viennoiseries un aliment plaisir Pain au chocolat, croissant, brioche, chausson aux pommes, les viennoiseries sont souvent associées au petit-déjeuner. Leur consommation doit cependant rester occasionnelle. Ces aliments sont en effet très riches en matières grasses et en sucre et n’apportent que très peu de vitamines et de minéraux. S’ils sont parfaits pour un dimanche matin, n’en faites pas votre pain quotidien. WWW. PA U S E S A N T E . F R
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je cuisine autrement
associons les saveurs PAR M A R I E- C H RI S TI N E C LÉ M E NT
Chocolat au lard, boudin noir à la menthe, ces associations originales peuvent elles être goûteuses ? Marie Christine Clément propose 3 ouvrages pour vous aider à réussir de délicieux et subtils mélanges.
Le répertoire des saveurs, Niki Segnit, éditions Marabout.
The Flavor Principle Cookbook, Elisabeth Rozin, Hawthorn Publishers.
La cuisine note à note, Hervé This, édition Belin.
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Le répertoire des saveurs Néophyte en cuisine, Niki Segnit, de natio nalité anglaise, a longtemps cherché un livre qui l’aiderait à comprendre « comment une saveur s’accorde à une autre, quels sont leurs points communs et leurs différences ». Elle décide de l’écrire tout en reconnaissant l’ambition un peu démesurée de sa démarche et sa nécessaire subjectivité. Son répertoire compile 99 saveurs et omet volontairement certains hydrates de carbone comme le riz et les pâtes ainsi que les assaisonnements de base comme le poivre, le sel ou le vinaigre. Elle répartit ces saveurs en 16 catégories : torréfiée, carnée, fromagère, terreuse, moutardée, sulfurée, marine, saumurée et salée, verte et herbacée, épicée, boisée, fruitée fraîche, fruitée crémeuse, agrume, ronce et haie, fruitée florale. Une méthode qui a ses limites car certains goûts, comme celui des graines de coriandre par exemple, sont difficilement classifiables dans une seule catégorie. À partir de cet inventaire, elle rassemble des « paires » pouvant fonctionner ensemble et commente les associations, des plus classiques aux plus insolites. On peut ainsi trouver celles du chocolat et du lard, du bœuf et du café, du boudin noir et de la menthe ou des bananes et du caviar…
Certains rapprochements peuvent surprendre mais l’auteur les justifie sans état d’âme ni a priori. L’intérêt de l’ouvrage est surtout de conter quelques anecdotes de l’histoire culinaire (américaine et sud américaine) et d’encourager une certaine ouverture d’esprit. En revanche, l’exercice a ses limites et pèche par le manque d’expérience de l’auteur. On regrette quelques classifications approximatives et hasardeuses comme celle du panais classé dans les notes épicées au lieu des notes terreuses ou celle du safran perdu dans les notes herbacées. Le grand écueil étant le mélange sans rigueur scientifique des saveurs qui ne peuvent prendre sens que dans un contexte culturel donné. Manger du caviar avec des bananes aurait pu avoir de l’intérêt pour les jeunes enfants du tsar au début du siècle dernier (proximité et familiarité du caviar, exotisme de la banane) mais n’en a pas forcément pour nous !
Les marqueurs culinaires En publiant, en 1973, The Flavor Principle Cookbook, Elisabeth Rozin, l’épouse du célèbre sociologue américain Paul Rozin, a pour objectif de démontrer comment certaines ethnies, certains groupes sociaux, tissent au fil des plats l’identité culinaire et donc culturelle d’une région ou d’un pays. Pour preuve, en France, on utilise des herbes et des alliums, comme l’ail et le persil, l’échalote et le thym. Comme l’avait judi cieusement démontré l’historien Jean Louis Flandrin, les types de graisses utilisées sont aussi des indicateurs géographiques d’une identité régionale stable dans le temps : l’huile d’olive pour le Midi, le beurre doux en Normandie, le beurre salé en Bretagne, tout comme certains modes de cuisson. Dans les pays anglo saxons, on associe la menthe à l’agneau, le gingembre au chocolat. Au Japon, on assaisonne les plats au wasabi ou à la sauce soja. Quant au basilic et à la noix de coco, on les retrouve dans la cuisine thaïe. La seule limite que l’on pourrait opposer à cette démonstration est l’internationalisation récente des pratiques culinaires. Cette fusion food tend
à brouiller ces codes, en les mélangeant les uns aux autres. Mais, même si le soja intervient aujourd’hui de plus en plus dans l’assaisonnement français, les principaux marqueurs culinaires restent bien actifs et ces emprunts sont identifiés comme des écarts dus à la modernité d’une interprétation. Après Elisabeth Rozin d’autres auteurs anglo saxons ont abordé le sujet sans procéder à une analyse culturelle. Michael Roberts affirme par exemple dans Secret Ingrédients que l’asso ciation de l’agneau avec des fromages à pâte persillée lui semble inévitable, alors qu’elle ne viendrait à l’esprit d’aucun cuisinier français. Dernièrement, Karen Page et Andrew Dornenburg ont publié un ouvrage pour recenser « l’essentiel de la création culinaire basée sur le savoir des plus imaginatifs chefs américains ». Décidément l’imaginaire anglo saxon semble très obsédé par le secret de la création culinaire.
© Wrobleski/Masterfile
La cuisine note à note en douze questions souriantes Pionnier de la cuisine moléculaire en France, Hervé This propose dans son dernier ouvrage « une nouvelle approche du goût » ambitieuse : « la réalisation de mets à partir de composés purs, mélangés habilement. » Ainsi il préconise de substituer aux champignons du 1 octène 3 ol pour donner le goût de l’humus, de remplacer le citron par du limonène ou l’odeur de noix ou de curry par le sotolon. À quand le poulet au sotolon et la tarte au limonène en lieu
et place du poulet au vin jaune et de la tarte au citron ? Le scientifique propose d’ajouter ces molécules pures sur notre étagère d’épicerie à côté du sel, du poivre, du gingembre et de la noix de muscade. La démarche peut sembler provocatrice au moment où nous éprouvons une Les valeurs sûres de Didier Clément, chef certaine défiance du Grand Hôtel du Lion d’Or à Romorantin. envers les procédés de l’industrie agroalimentaire > De l’avocat avec de la pomme. qui a l’habitude > Du jambon cru avec des figues. d’utiliser des > Des coquilles Saint-Jacques rehausseurs de avec de la mangue et du curry. goût. Sans compter > Du pamplemousse avec de l’anis. les noms rébarbatifs > Des tomates avec du concombre des molécules et de la menthe. utilisées qui, si elles > Du poulet avec du thym et du bois de réglisse. sont coutumières > Des carottes avec de l’orange. aux chimistes, ne > Du fromage de Roquefort avec de la poire. seront pas faciles à > Du chocolat noir avec du piment doux. assimiler par nous, > Du café avec de la fleur d’oranger. pauvres néophytes, qui préférons les valeurs d’authenticité et de locavorisme (privilégier l’achat de produit locaux). Mieux vaut laisser ces expériences à quelques initiés et aux grands chefs. ●
alliance des saveurs
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je grignote sainement
à l’heure du goûter, conjuguez plaisir et santé
PAR ALI N E PÉRIAU LT
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heures, le repas de midi est déjà loin. Plusieurs heures vous séparent encore de celui du soir. C’est l’heure du goûter pour les enfants, celle de la collation, de l’en cas ou encore du grignotage pour les adultes. D’après les derniers résultats de l’étude NutriNet Santé, 6 Français sur 10 sont adeptes de la « consom mation d’aliments entre les trois principaux repas de la journée ». Si les femmes sont un peu plus nombreuses que les hommes à s’adonner au grignotage, les produits gras et sucrés de type industriel sont en tête des aliments consommés par tous. Et pour cause. Ce sont souvent les seuls que l’on trouve à proximité quand la faim survient. Distributeurs ou cafétéria, même combat : biscuits, confiseries et barres chocolatées
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En-cas mode d’emploi Les alternatives santé pour grignoter ne manquent pourtant pas. En premier lieu, pensez aux oléagineux, à choisir de préférence non grillés et non salés. Évitez le rayon apéritif, vous les trouverez le plus souvent à côté des fruits et légumes ou avec les aides culinaires. Noix, noisettes, amandes sont riches en fibres, en acides gras de bonne qualité et sont une bonne source de protéines. Elles vous garan tissent une meilleure satiété que les produits sucrés. Trop caloriques ? Des chercheurs de l’université de Stuttgart ont publié en 2012 une étude sur la consommation de noix dans la revue Nutrition*. Selon eux, « ajouter des noix à votre alimentation ne provoque pas de prise de poids et ce malgré leur apport énergétique important ». À condition de savoir se limiter. Pour une portion, comptez 6 noix ou 20 amandes. Ce qui représente une centaine de calories par portion en moyenne, soit moitié moins qu’une barre chocolatée. N’hésitez pas à les accompagner d’un fruit frais, idéalement
de saison, par exemple une pomme ou deux mandarines. Pensez aussi aux fruits secs, très pratiques à conserver dans le tiroir d’un bureau à côté des oléagineux. Trois abricots, pruneaux ou figues vous apporteront fibres et minéraux dont sont dépourvues les confiseries. Les compotes qui trônent dans les cartables peuvent également trouver leur place dans le goûter des plus grands. Et pour les adeptes du salé, une tranche de pain complet et un morceau de fromage sont préférables aux chips. Côté boisson, faites la part belle au thé et aux tisanes plutôt qu’aux sodas.
Règle de base : anticipez ! Simple en théorie… Mais plus difficile à mettre en œuvre au dernier moment car vous ne trouverez quasiment aucun de ces en cas au distributeur ou à la cafétéria. Prévoyez donc vos collations pour la semaine au moment de faire vos courses. Si vous avez des noix et des fruits secs sous la main, vous serez moins tentés de vous rendre au distributeur. Et votre barre chocolatée ou vos biscuits préférés resteront un plaisir occasionnel. ● *Nutrition, novembre/décembre 2012, Health benefits of nut consumption with special reference to body weight control, par V. Vadivel, C.N. Kunyanga, H.K. Biesalski.
© Jaunty Junto/Gettyimages
Comment combler les petits creux en cours de journée sans tomber dans le piège des biscuits et confiseries ?
règnent en maîtres. Mais ces aliments gras et sucrés apportent peu voire n’apportent aucun nutriment intéressant pour la santé. Ce sont ce que l’on appelle couramment des calories vides.
je choisis les bons produits
comment décrypter les étiquettes alimentaires ? PAR ALI N E PÉRIAU LT
30 secondes. C’est le temps moyen nécessaire à un consommateur pour choisir un produit dans un rayon. Mais comment décoder la multitude d’informations qui figurent sur l’emballage dans un délai aussi court ? Pause Santé vous donne les clés pour comprendre une étiquette et vous dévoile les pièges à éviter rayon par rayon.
La liste des ingrédients C’est la seule mention que les fabricants sont strictement tenus de faire figurer sur une étiquette. Bon à savoir : ils sont nécessairement listés par ordre décroissant de poids. D’une manière générale, plus la liste des ingrédients est longue et riche en additifs, plus l’aliment a été transformé.
1 : LES ALLÉGATIONS QUANTITATIVES
Elles laissent entendre que la composition d’un aliment est bonne pour la santé. Exemples : un aliment « pauvre en calories » ne peut pas afficher plus de 20 Kcal pour 100 grammes. Un produit « riche en vitamines » doit apporter 30 à 45 % des apports journaliers recommandés pour 100 grammes d’aliment.
Le tableau nutritionnel Ces informations nutritionnelles détaillées ne sont obligatoires que si le fabricant met en avant les qualités nutritionnelles de son produit. En pratique, elles figurent sur la quasi totalité des produits. Elles précisent : La valeur calorique : c’est la quantité d’énergie contenue dans 100 grammes d’aliments. Les protéines. Les glucides (les sucres). Ils peuvent être complexes, comme l’amidon, ou simples, comme le glucose. Les lipides, c’est à dire les matières grasses. Et éventuellement la quantité de fibres, vitamines, minéraux, sodium.
Les allégations nutritionnelles Présentes sur la très grande majorité des aliments industriels, les allégations sont strictement réglementées. Elles sont de 4 types. 18
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2 : LES ALLÉGATIONS COMPARATIVES
Les fabricants les utilisent pour positionner leur produit par rapport à un concurrent. On lira alors « Teneur accrue en… », cela signifie que l’aliment en contient 25 % de plus qu’un aliment comparable, ou « Teneur réduite en… » pour un aliment qui contient 25 % de substance en moins. 3 : LES ALLÉGATIONS QUALITATIVES
Elles font référence à la nature du produit et à son mode de fabrication. « Naturel » signifie issu directement de la nature. « Maison », que le produit est fabriqué sur le lieu de vente. « À l’ancienne » ou « traditionnel » qu’il doit être fabriqué selon des usages anciens répertoriés et ne doit pas contenir d’additifs. « Sans additifs », que les produits n’en contiennent pas alors que la réglementation les y autorise.
© Eric AUDRAS/Onoky / Photononstop
les pièges à éviter > Au rayon céréales du petit-déjeuner Si le sucre apparaît en premier sur la liste d’ingrédients, cela signifie que le produit contient davantage de sucre que de céréales. À éviter. Même conseil au rayon biscuits, privilégiez ceux qui affichent le plus de céréales, de préférence complètes. > Au rayon plats préparés Soyez surtout attentifs à la quantité de légumes et de viande ou poisson qui composent le plat. Ces derniers apparaissent souvent en pourcentage. Il n’est pas rare de croiser des poissons panés contenant 30 % de poisson ou des hachis parmentier contenant 10 % de viande. Fuyez. > Au rayon soupe Une brique estampillée « soupe de légume » peut faire figurer la pomme de terre en première ou deuxième position. Préférez une soupe qui fait la part belle aux légumes, elle sera plus riche en fibres et plus pauvre en calories. > Au rayon yaourts Évitez les produits allégés qui contiennent souvent plus d’additifs. Pour compenser la perte d’onctuosité apportée par les lipides, les fabricants ajoutent des épaississants comme l’amidon modifié, peu recommandable. > Au rayon poisson en conserve Choisissez les sardines à l’huile d’olive ou de colza plutôt qu’à l’huile de tournesol, ce sont des graisses de meilleure qualité nutritionnelle. > Au rayon charcuterie Optez pour des jambons sans additifs, allégés en sel et dont la liste des ingrédients bannit les sels nitrités. Ils sont utilisés comme conservateurs mais augmentent le risque de cancer digestif. > Au rayon œufs Privilégiez ceux dont la boîte porte le code commençant par 0 ou 1. Ce sont des œufs issus de poules élevées en plein air.
Sodium ou sel, quelle différence ? Les étiquettes portent souvent la mention « sodium » plutôt que sel. Pour faire la conversion en sel, il faut multiplier la quantité de sodium par 2,5. L’Organisation mondiale de la santé recommande de limiter la consommation quotidienne de sel à moins de 6 grammes par jour soit 2,4 g de sodium.
4 : LES ALLÉGATIONS DE SANTÉ
Elles vantent les bénéfices santé des produits en évoquant les nutriments qui le composent. Exemple : « le calcium augmente la densité osseuse ». Ou encore « les fibres augmentent le transit intestinal ». Leur utilisation est strictement réglementée par le droit européen et seules les allégations qui ont été prouvées scientifiquement peuvent être utilisées. En revanche, il est interdit de laisser entendre qu’un aliment permet de prévenir ou de soigner une maladie.
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je choisis les bons produits
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vers des étiquettes plus simples ? Apposer un logo officiel sur la face avant des produits est peut être la solution pour nous aider à faire les bons choix. Caroline Méjean, chargée de recherche à l’INRA (Institut national de la recherche agronomique), a sondé les consommateurs pour imaginer les logos de demain. Elle répond à nos questions. Pensez-vous qu’il soit nécessaire de simplifier l’étiquetage nutritionnel ? Nous avons posé cette question à plus de 38 000 volontaires qui participent à l’étude NutriNet Santé et 80 % d’entre eux apprécient l’idée d’avoir un logo d’information nutritionnelle sur la face avant des emballages des produits alimentaires pour les orienter dans leurs choix. Un logo qui leur fournirait une information rapide et globale sur la qualité nutritionnelle de l’aliment. Nous leur avons donc soumis 5 logos plus ou moins complexes pour savoir lequel leur paraissait le plus efficace. Quelle a été la réaction des consommateurs à ces propositions ? La majorité des sondés a voté pour le feu tricolore multiple qui juge trois critères : sucre ajouté, matière grasse saturée et sel. L’autre logo plébiscité est le feu tricolore simple. C’est celui que nous recommandons au terme de l’étude car il est mieux accepté par les populations moins favorisées économique ment, populations dont
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il est primordial, en termes de santé publique, d’améliorer les comportements alimentaires. Qui décidera d’attribuer un logo rouge ou vert aux produits alimentaires ? Il faut que ce soit le ministère de la Santé, selon des critères de jugement nutritionnels validés scientifiquement et par les autorités sanitaires. Cependant, les industriels ne sont pas très favorables à ce projet car ils ont peur de voir les ventes
de leurs produits « rouges » chuter. Ce projet de logo sous forme de feu tricolore a déjà été soumis au Parlement européen en 2010 et les eurodéputés ont voté contre. De là à imaginer que le lobby de l’industrie agroalimentaire ait influencé les députés dans ce choix, il n’y a qu’un pas. Connaît-on l’impact de ces logos sur les achats ? Oui, car ils sont utilisés en Angleterre, mais uniquement
par les fabricants volontaires. Les Britanniques ont constaté que la mise en place de ce logo améliorait la qualité nutrition nelle des paniers d’achat. D’une part parce que le consommateur choisit des produits meilleurs pour la santé, d’autre part parce que les industriels poussés par la peur du « feu rouge » font des efforts pour améliorer la qualité nutritionnelle de leurs produits. Malheureusement, en France, l’arrivée d’un nouveau logo n’est pas pour demain. ●
les bons réflexes Si vous hésitez entre deux produits dans un rayon, focalisez-vous sur les 5 points suivants pour faire votre choix. 1. Optez pour celui dont la liste d’ingrédients est la plus courte. C’est le signe que le produit est moins transformé et contient moins d’additifs. 2. Choisissez les produits composés d’ingrédients naturels. Préférez « farine » à « amidon modifié », « sucre » à « sirop de glucose » ou encore « lait » à « protéines de lait ». 3. Préférez le produit qui contient des graisses de bonne qualité nutritionnelle. L’huile d’olive et de colza sont préférables au tournesol. Les matières grasses végétales non hydrogénées sont à favoriser. 4. Choisissez celui qui contient le moins de sucre ajouté, qu’il s’agisse de glucose, de fructose, de saccharose, de sirop de glucose-fructose. 5. Privilégiez celui qui contient le plus de fibres, soit parce qu’il est plus riche en légumes, soit parce qu’il est fabriqué avec des céréales complètes et non pas raffinées.
SHE es un programme innovan de out en par les pa rs pou répondre aux besoins des femmes v vant avec le V H/SIDA L’objectif du programme HE ( trong, HIV positive, Empowered Women) est de contribuer à développer l’autonomie et la confiance des femmes et des jeunes filles atteintes du VIH. Elles pourront trouver des réponses à leurs questions au travers : - d ne b î e out femme à femme -
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je bouge en musique
entrez dans la danse PAR PA SCAL TU RB I L
Surfant sur le phénomène zumba, les salles de sport proposent des cours qui mêlent danse et fitness.
Big Dance, c’est énorme !
Les profs français viennent seulement d’être formés à cette discipline venue de Californie. Un cours de fitness dansé créé il y a 8 ans par le danseur et musicien d’origine sud africaine, Paul Mavi. Son nom provient de la combinaison de deux mots : « BO » qui reprend les deux premières lettres du mot boxe et « KWA » qui symbolise le kwaito, une danse traditionnelle. Son succès aux États Unis tient essentiellement à la simplicité du cours. « Si vous pouvez bouger et épeler un mot, alors vous pouvez danser le Bokwa », prévient le créateur. Les chorégraphies ne présentent pas de réelles difficultés. On ne compte pas les pas, il suffit simplement de suivre la musique et de bouger en rythme. Il s’agit de reproduire des chiff res et des lettres avec le corps (le L, 3, J, K et des dizaines d’autres pas). Le tout est proposé sur des tubes entraînants que les pratiquants entendent chaque jour à la radio.
Le Big Danse réunit 10 danses en une seule d’où, serait on tenté de croire, l’origine de son nom. Même pas ! BIG est l’acronyme de Ballroom In Gym. Cette discipline mêle les danses de salon au fitness, l’esthétique au cardiovasculaire. On bouge sur des airs de salsa, samba, chacha, jive, rumba, quick step, tango, valse, merengue et rock. Déjà star au Japon et aux USA, elle remet au goût du jour certaines danses de salon, trop longtemps confinées au rayon des thés dansants des grands parents. C’est d’ailleurs autour de cette ingénieuse idée que tourne le succès populaire de l’émission de TF1 « Danse avec les stars », un programme diffusé dans le monde entier. Elle se pratique seul(e) ou à deux mais surtout, elle est accessible à tous. Une séance de Big Dance débute par un échauffement sur un rythme de samba. Puis le rythme s’accélère, avec des airs latinos, et se poursuit sur des mouvements de valse, salsa, tango, rumba. Un marathon d’où les pratiquants sortent épuisés mais heureux. Le cours se termine par une phase d’étirements, plus que nécessaires pour éviter les cour batures du lendemain. Aujourd’hui, cette discipline se développe essentiellement dans les salles de sport du sud ouest de la France, mais quelques clubs parisiens l’ont aussi inscrite à leur programme.
www.bokwafitness.com/fr
www.bigdance.fr
Bokwa, c’est quoi ?
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Vestron Pictures/DR/TCD
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rois nouvelles danses vont enflammer les parquets en 2013. Venues des 4 coins du monde, elles nous font bouger pour notre plus grand profit et plaisir. Voici le Bokwa, le Big Danse et la K’ Danse, de tout nouveaux succès fitness en puissance.
BRÈVES Le bon sens près de chez vous Monique Duchâtelier, psycho thérapeute, a conçu un agenda pour prendre soin de soi au quotidien. Un programme en 52 étapes, basé sur le rythme des saisons. Rien de magique, juste une forme de discipline de tous les jours basée sur le bon sens. « Il s’agit de jeux ou d’exercices pratiques et positifs : s’accorder du temps, noter ses pensées ou tout ce que l’on a sur le cœur. » De fait, ce livre grand format, est bien loin du pensum. C’est un carnet de bord ludique à remplir chaque jour. Être bien, il suffisait d’y penser, aux éditions Amalthée.
Fish Bodycure sous le signe du poisson K Danse, y’a plus K Cette discipline marque un tournant dans le fitness, celui du branding. Car le « K » de K Danse est bien celui des céréales que vous croisez en rayons. De fait, le Groupe Moving et Spécial K se sont associés pour créer ce cours. Ils ont fait appel à des spécialistes du genre, Desty le chorégraphe des stars (Tina Arena, Amel Bent, Zaz, Camélia Jordana, Bénabar, Lorie, le DJ Laurent Wolf ou encore Céline Dion) et la coach consultante du Groupe Moving, Pascale Caudron. Résultat, un cours dansé de 45 minutes, avec des mouvements sans difficultés techniques, mais néanmoins très toniques. Il est calqué sur la courbe de montée en puissance cardio classique. La musique, à la sonorité plus dance que latine, est mixée et arrangée par DJ Kastilla. Un cours qui fait travailler le cœur comme tous les autres muscles du corps, ainsi que les articulations. Il améliore la circulation veineuse des jambes, problème typiquement féminin, accroît la résistance physique et favorise le sommeil. K Danse est proposé dans les diverses enseignes du groupe Moving (Lady Moving, Fitness Park, Moving et Moving Express).
Après la Fish Pédicure et la Fish Manucure, voici la Fish Bodycure. La technique consiste à se faire exfolier le corps par des petits poissons. Il suffit pour cela de se plonger dans un bassin individuel et d’attendre que les « garra rufa » passent à table. Outre l’aspect original du soin, ses promoteurs mettent en avant les aspects naturels, relaxants, voire écologiques de la prestation. www.rufafishspa.com
Vive le sport ! La Fédération française d’éducation physique et de gymnastique volontaire (FFEPGV) a lancé son deuxième Baromètre annuel Sport Santé. Résultat : 37 % des Français font de l’activité sportive une priorité contre 32 % l’an dernier.
www.monspecialk.fr ●
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gommer, oui mais pas trop L’ajout d’acides de fruits s’étant répandu dans les crèmes de soin, les dermatologues recommandent aujourd’hui de limiter le gommage traditionnel qui peut se révéler irritant. Cédez à ce petit plaisir, mais jamais plus d’une fois par semaine.
PAR LUC B I ECQ
un démaquillage parfait
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este clé de la beauté au quotidien, le déma quillage procure une sensation de propreté en libérant la peau des impuretés accumulées tout au long de la journée : la transpiration, le sébum, les oxydes de fer qui pigmentent le maquillage mais aussi les poussières et les particules polluantes. Goudrons, gasoil, plomb, pour ne citer qu’eux, produisent des molécules nommées radicaux libres, toxiques pour la peau. Des ennemis cutanés qui altèrent ses propriétés et sa structure. Se démaquiller deux fois par jour est donc absolument nécessaire pour sauver sa peau. Évitez, bien sûr, le gel douche sur le visage et, si vous êtes pressée, fondez pour l’eau micellaire. Son succès est dû aux micelles, de mini sphères nettoyantes en suspension dans une solution aqueuse douce.
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Imbibez généreusement le disque à démaquiller. Ne frottez pas vos yeux, mais pressez le coton en douceur sur vos paupières pour ôter le mascara et les fards. LES BONS OUTILS
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Pour décupler l’effet de votre démaquillage et le transformer en rituel de préparation aux soins, vous pouvez utiliser chaque soir, le nettoyage du coucher devant être plus approfondi que celui du lever, une brosse électrique. Elle déleste la peau des salissures et lutte contre les pores dilatés qui donnent un teint brouillé. Les 21 femmes qui ont testé la nouvelle brosse nettoyante Philips l’ont jugée 10 fois plus efficace qu’un démaquillage classique. Et, comme le souligne Naïma Midoun, dermatologue, « cet outil en fibres de soie permet une meilleure répartition du démaquillant, y compris sur le cou, souvent oublié ». LE BON GESTE
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maladies émergentes, la menace aux multiples visages PAR RO MAI N LO U RY ILLUSTR ATIONS B ERTR AN D DU BOI S
Peste au Moyen Âge, variole sous l’Ancien Régime, choléra au XIXe siècle, désormais éradiquées ou sous contrôle dans les pays du Nord, ces maladies ont laissé la place à de nouvelles, originaires des pays du Sud. 26
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est la fin d’une « tranquille certitude ». Après les succès médicaux du XXe siècle, l’arrivée du sida au début des années 80 aura prouvé que le risque d’épidémie mondiale était loin d’être écarté, rappelle le rapport* publié cet été par la sénatrice Fabienne Keller. Depuis, ce sont de nouvelles variétés de grippe (H5N1, H1N1), le paludisme, le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère), le chikungunya, la dengue, la fièvre du Nil occidental qui font peser une menace sanitaire sur la planète. Ces maladies infectieuses, dont le nombre a quadruplé au cours des 50 dernières années, ne constituent encore que 1 % des causes de mortalité dans
les pays du Nord, contre 43 % dans ceux du Sud. Mais la menace semble croissante. Leur incidence a augmenté de 10 à 20 % ces 15 dernières années dans les pays industrialisés. Sous observation, certaines ont déjà envoyé des signaux d’alerte à l’Europe et à la France. LE RETOUR DU PALUDISME
Parmi les maladies les plus répandues au Sud, le paludisme, qui a frappé 216 millions de personnes et en a tué 655 000 en 2010, pour la plupart des enfants africains. Selon l’Institut de veille sanitaire (InVS), la France, avec environ 5 000 cas par an, arrive en première position des pays
occidentaux pour le nombre de cas « impor tés », c’est à dire de personnes ayant contracté la maladie à l’étranger, tandis que les cas dits « autochtones » sont encore rares sous nos latitudes tempérées. Mais depuis quelques années, le paludisme fait son retour en Europe, notamment en Grèce. Peut être du fait de la crise, qui fragilise son système de santé, mais surtout parce que le pays est une porte d’entrée des migrants sur le continent. Nombre d’entre eux vien nent de pays où le paludisme fait rage et travaillent temporairement dans les exploi tations agricoles des provinces de Laconie et d’Attique, des régions au climat humide qui favorise la prolifération du moustique anophèle, vecteur du paludisme. Excepté Mayotte et la Guyane, où le palu disme est endémique, il faut remonter à 2006 pour retrouver le dernier cas autoch tone en France, survenu en Corse. Une situation très isolée, qui ne constitue en rien un signe avant coureur de réintroduction. « En France, il n’y a plus de contact entre les parasites du paludisme et les moustiques des marécages. Les personnes porteuses, comme les migrants d’Afrique et les personnes revenant de voyage, vivent plutôt dans de grandes villes », explique Vincent Robert, chercheur au Mivegec, unité de recherche sur les insectes vecteurs basée à Montpellier**. En France métropolitaine où plusieurs régions maré cageuses (Camargue, golfe du Morbihan, Landes, Sologne) ont payé un lourd tribut au paludisme jusqu’au XXe siècle, les risques de réintroduction sont a priori écartés.
LE CHIKUNGUNYA ET LA DENGUE
Présentes dans les départements d’outre mer, toutes deux liées à un virus, ces maladies ont pour autre point commun d’être véhiculées par le moustique tigre, originaire d’Asie. Arrivé par l’Italie en 2004, cet « albopictus aedes » progresse rapidement sur le territoire français. Alors que dix départements du sud sont d’ores et déjà classés en niveau 1 (vecteur « implanté et actif » selon le plan gouvernemental dengue/ chikungunya), le moustique a été repéré cet été en Île de France. Il ne lui reste plus qu’à croiser la route d’un virus pour que la dengue ou le chikungunya engendrent des cas autochtones. Ce qui fut le cas en septembre 2010, à Nice, avec deux cas de dengue survenus au voisinage de personnes ayant contracté la maladie lors d’un voyage. Le chikungunya, qui se caractérise par une fièvre intense, des maux de tête et des douleurs articulaires, comme la dengue, s’est fait connaître du grand public à l’occasion d’une épidémie explosive en 2005 2006 à La Réunion. Après y avoir touché un tiers de la population, la maladie a resurgi fin 2007 en Italie, où elle a fait une centaine de victimes, puis deux cas autochtones ont été détectés en septembre 2010 à Fréjus (Var). Si la Côte d’Azur semble en bonne position pour devenir le point d’éclosion du chikun gunya en France métropolitaine, « personne ne peut prédire où se situeront les foyers de la maladie, explique Vincent Robert. On va apprendre à gérer la situation, mais on sait déjà qu’il n’est plus possible d’éradiquer ce moustique, et que le virus sera un jour présent dans toute la France ». ☛ WWW. PA U S E S A N T E . F R
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maladies émergentes
☛ Parmi les digues érigées par les autorités, la détection des cas importés, afin d’éviter qu’ils ne dégénèrent en cas autochtones. Pour cela, les médecins généralistes exerçant dans un département de niveau 1 sont sensibilisés au risque d’extension de ces maladies. Une fois averties, les auto rités sanitaires dépêchent des experts en démoustication au voisinage du foyer de la personne malade. Ce traitement préventif « permet d’empêcher que la situation ne s’emballe et n’entraîne des cas autochtones en chaîne », explique Vincent Robert. LE VIRUS DU NIL OCCIDENTAL
Moins médiatisés, d’autres pathogènes pourraient également engendrer les épidémies de demain. Parmi eux, le virus du Nil occidental (West Nile Virus), transmis 28
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En chine en 2009, un homme porte un masque chirurgical pour se protéger du SRAS et de la gripppe aviaire.
par la piqûre de moustiques du type Culex. La maladie, dont le tableau clinique évoque celui de la dengue et du chikungunya, n’avait plus fait parler d’elle en France depuis les années 60, avec 13 victimes en Camargue. Là aussi, c’est sur la Côte d’Azur, dans le Var, que la maladie s’est de nouveau manifestée chez l’homme, en 2003. Une surveillance renforcée était en place depuis 2001, après que des dizaines de chevaux avaient été atteints. Bien implanté aux États Unis, le virus poursuit sa marche en Europe. Selon l’InVS, 387 personnes ont été touchées dans sept pays méditerranéens en 2010, avec un bilan de 42 décès. LES FACTEURS FAVORISANTS
Les causes d’émergence ou de réémergence de ces maladies sont aussi complexes que
Campagne de sensibilisation sur les mesures d’hygiène pour lutter contre le SRAS et la grippe à Hong Kong.
multiples. Il y a bien sûr l’explosion démo graphique, avec 9 milliards d’êtres humains attendus en 2025, contre 6,5 milliards en 2012. Une population qui se masse dans des villes gigantesques, notamment au Sud (Chine, Inde), où se concentrent les problèmes d’accès à l’eau propre et de promiscuité, autant de « viviers pour de potentielles explosions virales », estime la sénatrice Fabienne Keller dans son rapport. Or les déplacements humains ne cessent de croître : migrations du Sud au Nord, voyages touristiques du Nord au Sud. Entre autres exemples cités par le rapport, « le virus West Nile s’est propagé en 1999 à New York par l’in termédiaire d’un passager contaminé venu du Moyen Orient ». Quant au virus du SRAS, « il est arrivé de Chine (il a débuté chez l’homme à Shanghai) à Vancouver et à Toronto en 2003,
© JESUS ALCAZAR/AFP © MIKE CLARKE/AFP © PATRICE COPPEE
Vaccination contre la grippe H1N1 en mars 2011 dans une prison mexicaine.
Les autorités sanitaires de Martinique se sont mobilisées pour enrayer le fléau de la dengue. Ici une démoustication dans une HLM.
après avoir essaimé en moins de deux semaines dans différents hôpitaux de Hong Kong, de Singapour et de Hanoï ». Autre cause d’émer gence ou de réémergence, les activités humaines qui modifient l’environnement. L’agriculture est devenue plus intensive, notamment l’élevage animal, ce qui favorise les transmissions à l’homme. La grippe, avec une souche H5N1 née chez la volaille d’Asie du Sud Est et une souche H1N1 apparue au Mexique chez le porc, en est un exemple. Quant à la déforestation, elle met l’homme en contact avec des pathogènes jusque là enfouis dans la jungle, tels ceux des grands singes, hôtes originaires du virus du sida et de la fièvre Ebola. Autre conséquence des activités humaines, le réchauffement climatique. De l’avis des experts, il créerait des zones d’implantation inédites pour
des insectes vecteurs jusqu’alors restreints aux pays tropicaux. Face à ces menaces sanitaires mais aussi économiques, la recherche de nouveaux médicaments s’avère particulièrement importante. D’autant que les résistances aux antibiotiques se répandent, dans les pays du Nord mais aussi dans ceux du Sud, qui n’ont la plupart du temps tracé aucune politique pour en limiter l’usage abusif. Si les inquiétudes sont grandes, Vincent Robert estime que la France « est l’un des pays les mieux préparés face à ces maladies ». Héritage de son passé colonial, elle dispose de nombreux chercheurs spécialisés dans ces maladies du Sud, chercheurs « qui tirent souvent la sonnette d’alarme ». « Son système de santé fonctionne bien, et elle a des départements tropicaux qui lui permettent de se maintenir en activité », juge t il. ●
* Les nouvelles menaces des maladies infectieuses émergentes (www.senat.fr). ** Le Mivegec (Maladies infectieuses et vecteurs : écologie, génétique, évolution et contrôle) est une unité mixte de recherche (UMR) des universités Montpellier 1 et Montpellier 2, du CNRS et de l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
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au féminin
l’endométriose, une maladie à ne pas prendre à la légère PAR G H I S L AI N E AN D R E AN I
Les douleurs intenses pendant les règles, relativement courantes chez les femmes entre 25 et 40 ans peuvent être le signe d’une affection gynécologique, responsable de stérilité.
INEXPLIQUÉE MAIS BIEN IDENTIFIÉE
La cause est encore mystérieuse, mais on sait que ce trouble survient plutôt en cas de puberté précoce, lorsque la femme présente des cycles courts et en cas d’antécédent familial. Environ 10 % des femmes en âge de procréer, pourcentage qui augmente au fil des ans (femmes qui n’ont pas ou peu d’enfants, qui deviennent mères tardivement) avant de diminuer vers 45 ans et de disparaître à la ménopause. Autre facteur, l’anxiété 30
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et le stress qui entraînent une contraction au bas de l’utérus. Quels risques ? Une stérilité chez 30 % des femmes. Les fragments de muqueuse bouchent les trompes, empêchant la rencontre de l’ovule et des spermatozoïdes, ou bien recouvrent les ovaires, ce qui bloque la libération d’un ovule. Enfin, comme il y a une association entre l’endométriose et le risque de survenue d’un mélanome (cancer de la peau), il faut être attentif à son épiderme. DES SYMPTÔMES À LA GUÉRISON
Les signes sont légion : règles abondantes qui font souffrir. Sensation pénible de traction vers le bas ventre en période d’ovulation. Douleurs pelviennes à la fin des règles ou entre les périodes. Rapports sexuels douloureux. Autres manifestations plus trompeuses pouvant égarer le diagnostic : douleurs diges tives ou dorsolombaires, sciatique, troubles urinaires. Cela dit, la douleur n’a pas de lien avec l’importance de la maladie. On peut souffrir atrocement d’une endométriose légère et a contrario ne pas avoir mal alors que la maladie disséminée est sévère. Le diagnostic est peu aisé. L’examen clinique (utérus ou ovaires augmentés de volume et sensibles, présence de lésions violacées, granulation, au fond du vagin) suffit parfois, mais étant
donné la petite taille des fragments recherchés et les endroits où ils se logent des examens complémentaires sont nécessaires : dosage d’un marqueur dans le sang (le CA 125) élevé en cas d’endométriose, échographie, hystérographie (radiographie de l’utérus et des trompes), IRM et cœlioscopie. STÉRILITÉ EN LIGNE DE MIRE
Des médicaments bloquant les sécrétions hormonales (progestatifs à haute dose ou pilule fortement dosée) et des traitements hormonaux plus puissants (mise au repos des ovaires) suffisent souvent à faire régresser les lésions. Ces derniers comportent des inconvénients (prise de poids, pilosité, acné, bouffées de chaleur) mais disparaissent à l’arrêt du médicament. En cas de contre indi cation, le médecin peut prescrire un mélange d’hormones, du sur mesure. Parfois des anti épileptiques et des antidépresseurs à petites doses sont conseillés pour leur effet antalgique ou encore des thérapies comportementales dispensées dans les centres anti douleur. En cas d’échec des traitements médicaux, la chirurgie sous cœlioscopie (laser, coagula tion) ou classique s’avère nécessaire pour traiter les douleurs chroniques et sauvegarder ou améliorer les possibilités de grossesse. ●
© ImageZoo/Corbis
L’
endométriose est une pathologie caractérisée par la présence de fragments de la muqueuse utérine (endomètre) en dehors de leur localisation normale. Ces fragments non éliminés par les règles vont se fi xer sur un organe de la région pelvienne, formant de petites lésions ou des nodules le plus souvent sur les trompes, les ovaires, le muscle utérin et sur la cloison séparant le rectum du vagin. Plus rarement sur le péritoine, la vessie, l’intestin voire sur les poumons et sur les cicatrices cutanées. Le processus ? Obéissant aux fluctuations hormonales, ces fragments s’épaississent en fin de cycle, le sang s’y accumule et ils saignent un peu au cours des règles ce qui provoque une inflammation locale.
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une méfiance injustifiée
L
es vaccins sont « victimes de leur succès », estime d’emblée le professeur Jean Paul Chiron, ancien président de l’Académie nationale de pharmacie. Des succès pourtant nombreux. Grâce à eux, plusieurs maladies, dont la redoutable poliomyélite, ont pu être éradiquées en France au cours du XXe siècle. Pourtant, les chiffres restent en dessous des attentes. À l’exception, chez l’enfant, de la diphtérie, du tétanos, de la poliomyélite (groupés sous le nom de DTP), de la coqueluche et de l’infection par haemophilus influenzae B, tous se situent au dessous d’une couverture de 95 % de la population, objectif fi xé par les autorités publiques. Conséquence, certaines maladies que l’on espérait voir disparaître continuent à circuler en France, tandis que d’autres tendraient même à réapparaître en Europe. 32
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L’HÉPATITE B, UNE COUVERTURE VACCINALE ENCORE INSUFFISANTE
Si le discours antivaccinal de certaines associations n’est pas une nouveauté, les raisons de cette méfiance sont avant tout à chercher du côté des polémiques qui ont émaillé la question vaccinale depuis deux décennies. Comme celle qui a éclaté en 1998, lorsque le secrétaire d’État chargé de la santé, Bernard Kouchner, a suspendu la vaccination contre l’hépatite B dans les établissements scolaires. À l’origine, l’identification de plusieurs cas de sclérose en plaques survenus chez des personnes vaccinées. Bien que les études n’aient montré aucun lien, l’affaire perdure dans les esprits. 15 ans plus tard, la vaccination anti hépatite B peine à trouver ses marques. Certes, « la tendance est à l’amélioration chez les nourrissons »,
vaccins une protection menacée Malgré la révolution de santé publique qu’ils ont entraînée au XXe siècle, plusieurs vaccins sont actuellement à la peine en France. La conséquence de polémiques médiatisées aux fondements scientifiques douteux qui ont laissé des marques dans l’opinion publique.
© Edith Held/CORBIS
PAR RO MAI N LO U RY
avec une couverture vaccinale anti hépatite B de 64,6 % en 2010, après une longue stagnation à 30 %, note le professeur Daniel Floret, qui préside le Comité technique de vaccination (CTV) du Haut comité de santé publique (HCSP). Une embellie liée au fait que l’hépatite B ne fait plus l’objet d’un vaccin séparé, elle est désormais jointe au vaccin hexavalent (qui contient en outre des antigènes DTP, coqueluche et haemophilus influenzae B), remboursé depuis mars 2008. Mais la couverture demeure toujours médiocre chez les grands enfants et les adolescents, d’environ 40 %. « Le risque est d’observer une recrudescence de cette maladie [sexuellement transmissible] lorsqu’ils entreront dans la période à risque », celle du début de la vie sexuelle, craint Daniel Floret.
CRAINTES POUR LA ROUGEOLE
Même insuffisance avec la rougeole. Là aussi, en raison d’une polémique née en 1998, au Royaume Uni cette fois, avec les travaux du Britannique Andrew Wakefield montrant un risque d’autisme chez les enfants ayant reçu le vaccin ROR (rougeole oreillons rubéole). Seul hic, les résultats de ce chercheur, financièrement téléguidé par une association antivaccins, étaient fortement biaisés dans le sens qui l’arrangeait. Retrait de l’article en 2010, publication de nombreux travaux concluant à l’absence de tout lien entre vaccin et autisme, rien n’y a fait. Le doute demeure dans l’opinion publique, notamment au Royaume Uni, où la vaccination peine à redémarrer, après une chute brutale dans les années 2000. En France, la vaccination par le ROR reste
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une méfiance injustifiée
95 % des français ignorent où ils en sont de leur vaccination. Un chiffre effrayant qui a interpellé les dirigeants du Groupe PHR en pointe dans la prévention à l’officine. Les clients des pharmacies affiliées ont désormais la possibilité de créer et de compléter avec leur pharmacien le carnet de vaccination électronique. ☛
en deçà des attentes. En 2010, 60,9 % seulement des enfants de 24 mois avaient reçu leurs deux doses, 65,7 % chez les adolescents de 15 ans. Conséquence, alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) espérait une disparition de la rougeole en 2010 en Europe, la maladie continue à y circuler. Notamment en France, où une épidémie survenue entre 2008 et 2011 a engendré près de 22 000 cas, dont 1 008 ont débouché sur une pneumopathie (complication pulmonaire), 26 sur une complication neurologique et 10 sur un décès. « S’il y avait un seul cas mortel lié au vaccin ROR, cela ferait la une des journaux. Or ces dernières années, la rougeole a fait plusieurs morts en France, et personne n’en parle », déplore le professeur Liliane Grangeot Keros, du Centre national de référence (CNR) pour la rubéole et experte auprès de l’OMS.
passant d’une couverture de 63 % en 2008 à 54 % en 2011. Un niveau très inférieur aux 75 % visés par les autorités pour ces groupes à risque. Ce désaveu, la plupart des experts l’imputent aux controverses nées lors de la crise de la grippe A (H1N1), fin 2009. 94 millions de doses vaccinales achetées par l’État, dont seulement 6 millions ont été utilisées, pour une pandémie qui s’est au final avérée bénigne. « Un flop total », juge Jean Paul Chiron, qui tempère aussitôt : « Si les autorités n’avaient pas pris de précautions, les Français auraient dit que l’État n’avait rien fait. » Dans un pays où l’affaire du sang contaminé reste dans toutes les mémoires, ce principe de précaution s’est au final avéré excessif, se retournant contre un État et des experts accusés de faire le jeu de l’industrie pharmaceutique. « Cette campagne maladroite n’a pas amélioré l’opinion publique vis à vis de la vaccination », observe le professeur François Bricaire, chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière. HPV ET BCG
Plus récente, la vaccination contre le papillomavirus humain (HPV), qui vise à prévenir la survenue de cancers du col de l’utérus à l’âge adulte, peine à décoller chez les adolescentes. En 2011, 39 % d’entre elles seulement avaient reçu leurs trois doses. Un faible engouement que plusieurs experts expliquent par les attaques dont ont fait l’objet ces vaccins lors de leur lancement en 2007, notamment quant à leur innocuité, leur coût et leur intérêt en termes de santé publique. Quant au BCG, administré en prévention de la tuberculose, il stagne à une couverture de 78,2 % chez les nourrissons. Une évolution attendue, le BCG n’étant plus obligatoire depuis 2007, mais seulement recommandé aux enfants à risque, dont ceux originaires d’un pays à forte prévalence ou ceux vivant dans des régions à risque plus élevé (Île de France, Guyane, Mayotte).
LA VACCINATION CONTRE LA GRIPPE EN DÉCLIN
Également en panne, la vaccination contre la grippe saisonnière, recommandée à certaines populations à risque, dont les personnes âgées, les femmes enceintes, les personnes souff rant de certaines affections de longue durée (ALD) et les professionnels de santé. En 3 ans, elle a connu un déclin de plus de 10 % chez les plus de 65 ans, 34
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VERS UN « NOUVEAU SOUFFLE »
Les polémiques n’ont pas fini de fleurir. Dernière en date, celle lancée par l’association E3M, qui regroupe des patients atteints de myofasciite à macrophages, maladie liée à des douleurs musculaires, une fatigue généralisée et des troubles cognitifs. S’appuyant sur les travaux
© Dan Pangbourne/Image Source/CORBIS
d’un neurologue français, E3M impute la maladie à la présence d’aluminium dans les vaccins, où il est utilisé comme adjuvant*. Face à la grève de la faim menée en décembre par des membres de l’association, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a décidé de lancer une étude sur d’éventuels liens entre l’adjuvant aluminium et cette maladie. Une initiative que comprennent les experts, tout en craignant qu’elle soit perçue comme un nouveau message alarmiste. Comment restaurer la confiance du public envers les vaccins ? Dans un rapport publié en décembre, la Cour des comptes, qui dresse un bilan très critique de la politique vaccinale française, appelle à un « nouveau souffle ». Notamment par « une communication beaucoup plus active et continue, beaucoup plus réactive » face au « discours antivaccinal qui se développe sur les réseaux sociaux ». Un constat que dresse aussi Liliane Grangeot Keros, selon laquelle « on ne parle même plus des vaccins à l’école, on n’y vaccine plus, il faut désormais l’autorisation des parents, à qui on a transféré cette responsabilité ». « On pouvait également contrôler le statut vaccinal lors du service militaire, ce n’est plus le cas aujourd’hui », renchérit Jean Paul Chiron. Un manque de confiance, d’occasions, peut être aussi un problème d’organisation. Selon la Cour des comptes, le calendrier vaccinal, devenu « davantage un document scientifique qu’un guide pour les familles », doit être clarifié. Un manque de lisibilité qui expliquerait pourquoi « peu d’adultes savent où ils en sont de leurs rappels vaccinaux », reconnaît Daniel Floret. En charge du calendrier vaccinal, le Comité technique des vaccinations qu’il préside devrait en publier une version 2013 simplifiée en mai prochain. Autre piste prometteuse, un carnet de vaccination électronique adossé au dossier médical personnel (DMP) qui permettrait à chacun de ne pas rater ses échéances. Un outil crucial que, pour sa part, le Groupe PHR s’apprête bientôt à généraliser dans les 2 200 pharmacies qu’il compte en France. Également à revoir, le parcours vaccinal du patient. Pour Daniel Floret, les rappels pourraient aisément être confiés à des non médecins, dont les infirmières et les pharmaciens. Une ouverture qui faciliterait les
démarches, mais promise à un accueil plus que réservé de la part des médecins. Certains experts vont même plus loin dans leurs préconisations, allant jusqu’à prôner l’obligation de certains vaccins. La France est l’un des rares pays où certains vaccins demeurent obligatoires : DTP pour l’enfant, hépatite B pour les professionnels de santé, ce qui explique pourquoi l’objectif de 95 % de couverture vaccinale y est atteint. Les autres ne sont que recommandés, notamment le ROR, dont Liliane Grangeot Keros souhaiterait qu’il ne soit plus soumis au bon vouloir de chacun. Une ligne également soutenue par l’Académie nationale de pharmacie, mais qui peine
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Pour Daniel Floret les rappels de vaccins pourraient être confiés à des non-médecins : infirmières ou pharmaciens. WWW. PA U S E S A N T E . F R
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à trouver un écho au niveau de l’État : « Comme toujours, les gens nous disent oui, mais au vu des coûts économiques, cela n’est pas forcément une priorité », regrette l’infectiologue. « Dans certains pays scandinaves, lorsque l’on dit d’un vaccin qu’il est recommandé, les gens comprennent qu’il est obligatoire. En France, on l’interprète comme optionnel, ce n’est pas la même culture », poursuit elle. Pour Jean Paul Chiron, « il faut lever cette ambiguïté entre recommandé et obligatoire. Si un vaccin n’est que recommandé, il cesse de facto d’être obligatoire ». « Si le DTP n’était pas obligatoire, il n’y a aucun doute que l’on verrait la poliomyélite ressurgir (…). Il faut que les Français comprennent que la vaccination est certes un choix individuel, mais pour un bénéfice collectif », ajoute Liliane Grangeot Keros. Reste aussi à mieux mobiliser les médecins, jugés moins conscients de maladies qu’ils n’ont pas soignées depuis longtemps, voire jamais pour les plus jeunes d’entre eux. Pire, la couverture vaccinale des professionnels de santé s’avère étonnamment basse, parfois plus qu’en population générale. Selon l’InVS, 27,6 % seulement des médecins hospitaliers étaient vaccinés contre la grippe saisonnière en 2010 11, alors qu’ils font l’objet d’une recommandation. De même pour la rougeole, contre laquelle 49,7 % d’entre eux seulement ont reçu une dose vaccinale. Des cordonniers bien mal chaussés, un risque infectieux qui perdure. ● * Par adjuvant, on entend une substance visant à stimuler le système immunitaire contre l’antigène d’intérêt. Sans eux, tout vaccin perdrait son efficacité au delà de quelques mois. Raison pour laquelle les vaccins sans adjuvant sont en général, par mesure de précaution, prescrits aux femmes enceintes pour une protection provisoire. Idem pour le vaccin contre la grippe saisonnière.
POUR EN SAVOIR PLUS > www.inpes.fr Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes) > www.invs.sante.fr Institut de veille sanitaire (InVS) > www.inserm.fr/thematiques/microbiologie -et-maladies-infectieuses/dossiers-dinformation/vaccins-et-vaccination Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). 36
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BRÈVES Astucieuse voire indispensable Une nouvelle application gratuite permet de localiser tous les professionnels de santé qui se trouvent autour de vous qu’ils soient généralistes, spécialistes ou chirurgiens dentistes. L’application s’adresse au grand public mais elle aide également les profes sionnels de santé dans leur pratique quotidienne en leur donnant la possibilité de visualiser l’ensemble de l’offre de soins autour de leur cabinet. Geomedica, disponible sur App Store (compatible iPhone et iPad) et consultable sur www.geomedica.fr.
Curie s’engage dans le dépistage très précoce 40 520 nouveaux cas de cancers colorectaux par an, 9 038 nouveaux cas de cancers du pancréas, 9 206 nouveaux cas pour le foie. Les chiffres des cancers digestifs ne cessent de progresser. Vieillissement de la population, apports caloriques trop élevés et manque d’exercice physique sont en partie responsables de cette augmentation. Pour répondre à cette prise en charge et pour organiser une meilleure prévention, l’Institut Curie vient d’ouvrir des consultations dédiées. Ouvertes à tous, elles représentent un accès au dépistage précoce, gage d’un meilleur pronostic. On sait aujourd’hui que la mortalité concernant le cancer colorectal pourrait être réduite de 20 % si 50 % de la population concernée participait au programme national de dépistage organisé depuis 2009.
la tuberculose fait de la résistance PAR RO MAI N LO U RY
On assiste depuis quelques années à une augmentation des cas de tuberculose qui résistent aux traitements. Faut il craindre le retour de cette maladie ?
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remiers touchés par ces formes résistantes de la maladie, les migrants. En particulier ceux venant d’Afrique, d’Asie et, de plus en plus souvent, d’Europe de l’Est. Le phénomène semble encore limité. En 2011, 69 des 1 187 souches reçues par le Centre national de référence (CNR) de la tuberculose étaient dites MDR, c’est à dire résistantes à deux antituberculeux de première ligne, la rifampicine et l’isoniazide. C’est toutefois 40 % de plus qu’en 2006, hausse qui semble s’être confirmée en 2012. Faut il craindre pour autant un retour de la tuberculose, alors que le nombre de cas français a été divisé par 2 entre 1993 et 2010 ?
© Veer
DES SOUCHES DIFFICILES À SOIGNER
Plus difficiles à traiter, les souches MDR de mycobacterium tuberculosis (agent de la maladie, également appelé bacille de Koch) posent aussi un problème de dépistage. En cause, les difficultés d’accès aux soins que peuvent rencontrer les migrants, en particulier les sans papiers. Particularité qui, selon Didier Che, épidémio logiste à l’Institut de veille sanitaire (InVS), peut retarder la prise en charge : « il faut identifier
les cas relativement vite pour limiter la période pendant laquelle les malades peuvent contaminer leur entourage. » Une fois le patient détecté, « le système français est suffisamment efficace pour l’amener jusqu’à la guérison », estime t il. « Quant au risque pour la santé publique, il demeure limité, vu le faible nombre de cas de MDR », ajoute l’épidé miologiste. La France est elle assez immunisée face à ces tuberculoses résistantes ? La question peut se poser, le vaccin BCG n’étant plus obli gatoire depuis 2007 ; il n’est plus que « recom mandé » à certains groupes, comme les enfants des régions les plus touchées (Île de France pour la métropole) ou originaires de zones à risque, notamment l’Afrique. Reste que le BCG, seul vaccin disponible contre la tuberculose, n’est vraiment efficace que pour empêcher les formes graves de la maladie, comme les ménin gites, chez les enfants infectés. Si la couverture vaccinale du BCG dans les groupes où il est « recommandé » est en dessous de l’objectif de 95 %, aucune flambée de tuberculose n’a été observée depuis 2007. LA TRANSMISSION PAR LES ANIMAUX
Encore plus lointaine, l’hypothèse d’un retour de la tuberculose par les animaux,
en particulier les bovins. La transmission de l’animal à l’homme se produit surtout par consommation de lait cru issu d’un animal infecté, plus rarement par contamination d’un professionnel au contact des animaux (éleveurs, vétérinaires). « Dans la première moitié du XXe siècle, les cas humains de tuberculose liés à mycobacterium bovis n’étaient que de quelques pourcents », rappelle Jean Jacques Benet, professeur émérite à l’École nationale vétérinaire d’Alfort. Grâce à la pasteurisation du lait dès 1952, puis à l’élimination des animaux infectés, la France a acquis en 2001 le statut « officiel lement indemne » de la tuberculose bovine, moins de 0,1 % de ses élevages étant touchés. Quant aux cas humains de tuberculose liés à mycobacterium bovis, la France ne dépasse pas une dizaine de cas par an, souvent contractés à l’étranger. Que ce soit par voie alimentaire ou par contact direct avec des animaux touchés, le risque d’un retour significatif d’une tuberculose humaine liée aux bovins « est totalement hypothétique », estime Jean Jacques Benet. Bien avant d’être sanitaire, le risque serait avant tout commercial… raison pour laquelle le ministère de l’Agriculture prend très au sérieux les foyers persistants dans les élevages de Côte d’Or, de Dordogne, des Pyrénées Atlantiques et de Camargue. Parmi les mesures adoptées, un observatoire de la tuberculose bovine dans la faune sauvage, certaines espèces, en particulier le blaireau, pouvant constituer un réservoir de la maladie. ● WWW. PA U S E S A N T E . F R
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la literie, premier outil d’un bon sommeil
PAR MARCO ALB RIZZI
Une étude* coordonnée par le professeur Damien Léger dresse un état des lieux des perceptions des Français sur la qualité de leur sommeil et son lien avec une bonne literie.
92
% des Français estiment qu’avoir une bonne literie est important pour la santé et 69 % d’entre eux s’accordent à dire qu’une literie de qualité l’améliore. À souligner également, 72 % des personnes interrogées déclarent avoir eu, au cours des 4 dernières semaines, et ce une à trois fois par semaine, la sensation que leur sommeil n’avait pas été suffisamment réparateur. Sachant que nous passons 1/3 de notre temps à dormir soit, en moyenne, 24 ans de notre vie, il est essentiel de dormir sur une literie de qualité.
Une mauvaise literie nuit…
Comment choisir ?
Pour bien dormir, il faut renouveler sa literie, c’est à dire son matelas et son sommier, au moins tous les 10 ans, soit toutes les 3 650 nuits, après environ 30 000 heures d’utilisation. Dès que l’on commence à sentir les ressorts, que les enfoncements deviennent excessifs, il est temps de changer de lit. L’une des raisons de cette usure est le nombre de mouvements effectués pendant notre sommeil. À raison de 40 par nuit, on effectue sur 10 ans plus de 150 000 mouvements… Par ailleurs, nous perdons 40 cl d’eau chaque nuit. Pour un couple, le matelas doit donc absorber et évacuer près de 300 litres d’eau par an.
Une bonne literie doit être adaptée à la morphologie du dormeur. Que l’on dorme sur le dos ou sur le côté, le matelas doit soutenir de manière uniforme toutes les parties du corps. Épaules, hanches et fesses peuvent s’enfoncer un peu. Elle doit également favoriser le relâchement musculaire. Allongé, notre corps se libère des contraintes liées à la pesanteur et se détend. La literie doit être ferme, mais pas trop, car si le couchage est excessivement dur, l’alignement de la colonne vertébrale n’est pas assuré. ● *Étude épidémiologique APL Literie et Santé TNS Healthcare (base 20 000 foyers français).
la nuit des enfants « Le sommeil des enfants est à la fois semblable et différent de celui des adultes. Semblable, car tout comme le sommeil de leurs aînés, il se compose de quatre à six cycles d’une heure et demie à deux heures, comprenant chacun du sommeil lent et du sommeil paradoxal. Le sommeil paradoxal joue un rôle important chez le jeune enfant pendant la période d’apprentissage car il contribue au développement de la mémoire et à l’organisation de la pensée. Différent, car chez les 38
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enfants, le sommeil est beaucoup plus riche en sommeil lent profond (30 à 40 % contre 20 % chez les adultes), un sommeil qui donne une impression de plénitude. C’est au cours de ce sommeil profond qu’est sécrétée l’hormone de croissance indispensable pour grandir. Ainsi, chaque heure de sommeil contribue durant la nuit au bon développement physique et intellectuel de l’enfant. » Remerciements à infoliterie.com et au professeur Damien Léger, responsable du Centre du Sommeil et de la Vigilance de l’Hôtel-Dieu de Paris.
© Masterfile
par le Professeur Damien Léger
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NOUVEAU
DMLA
ce qu’il faut savoir La dégénérescence maculaire liée à l’âge représente, dans les pays industrialisés, la première cause de malvoyance chez les plus de 50 ans. PAR C ATH E R I N E H O LU É
prévenir la DMLA
Trois formes principales › La MLA, ou maculopathie liée à l’âge « Dès 50 ans et sans que la personne ne ressente 40
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de symptôme, des « drusen » (accumulation de dépôts sur la rétine) et des anomalies de la pigmentation rétinienne peuvent être observés lors de l’examen du fond d’œil. Cette situation peut évoluer en DMLA avec perte de vision », explique le professeur Laurent Kodjikian, ophtalmologue à l’hôpital de la Croix Rousse (Hospices civils de Lyon). › La DMLA atrophique ou « sèche » Une perturbation du métabolisme cellulaire entraîne une dégénérescence atrophique des cellules rétiniennes, avec une baisse progressive de l’acuité visuelle. Cette forme évolue en général lentement et n’a à ce jour pas de traitement. › La DMLA exsudative ou « humide » Des vaisseaux anormaux, appelés « néovaisseaux », se développent dans la région maculaire, laissant diff user du sérum et pouvant entraîner des soulèvements rétiniens et des hémorragies. Les traitements doivent être engagés au plus vite, sous peine de lésions irréversibles.
Alerte et diagnostic Les premiers signes d’alerte (déformations des lignes droites, diminution brutale de l’acuité visuelle ou des contrastes, tache au centre du champ visuel) doivent entraîner une consultation rapide par un médecin ophtalmologiste. « Il s’agit d’une urgence thérapeutique. Si la secrétaire médicale ne donne pas un rendez vous dans la semaine, il faut se présenter directement aux urgences de l’hôpital », souligne le professeur Kodjikian. L’examen comporte une mesure de l’acuité visuelle et un examen du fond de l’œil au biomicroscope. Une angiographie (photographie du fond d’œil après injection veineuse d’un produit de contraste) et une tomographie en cohérence optique (image en coupe de la rétine) aident à préciser le diagnostic.
© Tetra Images
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aladie dégénérative de la zone centrale de la rétine (macula), la DMLA entraîne une perte parfois rapide de la vision centrale. Une tache floue au centre du champ visuel peut rendre progres sivement impossibles la lecture, la reconnaissance des détails, la conduite automobile. Cette maladie multifactorielle est d’abord liée à l’âge. Le risque augmente La prévention de cette maladie consiste dès 50 ans, pour à supprimer ses facteurs favorisants : ne pas dépasser 15 % après (ou ne plus) fumer, avoir une alimentation 85 ans. L’hérédité équilibrée et contrôler son poids. Les aliments à joue également un privilégier sont les fruits, les légumes verts riches rôle, avec un risque en pigments caroténoïdes comme les épinards, de DMLA environ les brocolis, les choux frisés ainsi que 4 fois plus important le jaune d’œuf, les poissons gras riches en oméga si des parents sont 3 (saumon, hareng, maquereau, thon), et les déjà atteints. La sources d’antioxydants que sont le thé, le cacao, consommation de les noix, le soja. Le médecin peut aussi prescrire tabac, la mauvaise des compléments alimentaires. L’étude AREDS a alimentation et montré en 2001 que des patients de 55 à 80 ans, l’obésité abdominale déjà touchés et recevant des antioxydants à favorisent également forte dose, ont vu leur risque de développer la survenue de la une DMLA du deuxième œil diminuer de 25 %. maladie. Plus de 600 000 personnes sont déjà touchées en France, et ce nombre devrait doubler d’ici trente ans.
Traitements Le traitement le plus ancien de la DMLA humide est la photocoagulation au laser thermique, qui a pour but de brûler les néovaisseaux lorsqu’ils n’ont pas encore atteint le centre de la vision. Dans les stades plus avancés, la photothérapie dynamique (PDT) consiste à injecter un colorant qui se fi xe dans les vaisseaux anormaux, puis à faire pénétrer dans l’œil une lumière spécifique (laser froid) afin de les oblitérer. Ce traitement peut stabiliser l’acuité visuelle. Mais le vrai progrès, depuis 2007, réside dans les « anti VEGF », qui s’injectent à l’intérieur de l’œil et peuvent faire régresser la maladie. « D’autres molécules et techniques très prometteuses sont en cours de validation scientifique, y compris contre la DMLA atrophique », assure le professeur Kodjikian. Pour les deux types de DMLA, lorsque la baisse de l’acuité visuelle devient invalidante, le médecin met en place une rééducation de la basse vision et propose l’utilisation d’aides optiques. ●
dépistage gratuit Comme chaque année, du 24 au 28 juin, l’association DMLA organise en partenariat avec la Société française d’ophtalmologie (SFO) et le Syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF) les Journées nationales d’information et de dépistage de la DMLA. L’occasion de se faire dépister. Les ophtalmologistes participant à la campagne* recevront gratuitement, sur rendez-vous, les personnes qui le souhaitent. D’autres initiatives existent localement. « L’an dernier, dans le Rhône, un dépistage gratuit proposé dans les centres de santé de l’Assurance maladie a permis de découvrir, chez un millier de patients, 16 % de cas de MLA et de DMLA », souligne le professeur Laurent Kodjikian. * Leurs coordonnées sont consultables sur le site : www.journees-dmla.fr.
3 questions au professeur Jean-François Korobelnik
© Thomas Veer/Veer
Ophtalmologue au CHU de Bordeaux.
Comment agissent les anti-VEGF dans le traitement de la DMLA humide (exsudative) ? Les anti-VEGF bloquent la protéine VEGF, laquelle stimule la croissance de néo-vaisseaux. Ils sont utilisés par voie intraveineuse contre certains cancers, notamment le cancer colorectal métastasé. En ophtalmologie, on en injecte des doses beaucoup plus faibles dans l’œil des patients afin de contrer l’apparition des vaisseaux anormaux sous-rétiniens. Ce traitement améliore nettement la vision de 30 % des patients
et permet une stabilisation pour 50 % d’entre eux. Comment se déroulent les injections ? Lors d’une consultation auprès du spécialiste libéral ou hospitalier, l’ophtalmologue anesthésie l’œil avec des gouttes, puis pique dans le blanc de l’œil avec une aiguille très fine. La douleur est minime, la personne repart avec une vision un peu trouble mais ressent le bénéfice de l’injection dans les jours qui suivent. Le nombre d’injections nécessaires, à raison d’une par mois, dépend du stade de la maladie. De nombreux patients
évitent ainsi de perdre la vue. De nouveaux traitements sont-ils attendus prochainement ? Le Lucentis, disponible depuis juillet 2007, a représenté une grande avancée dans la prise en charge de la DMLA. Avec Eylea, qui devrait être commercialisé à partir de cet été, nous pourrions disposer d’un anti-VEGF qui agit plus fortement et plus longtemps. Ce qui impliquerait moins de consultations et moins d’injections nécessaires, mais cela reste à démontrer en pratique. Un suivi régulier restera néanmoins toujours indispensable.
POUR EN SAVOIR PLUS > L’Association DMLA compte plus de 1 500 patients adhérents et 110 ophtalmologistes. www.association-dmla.com n° vert : 0 800 880 660. > Le rapport HAS, juin 2012, sur le site www.has-sante.fr. Dégénérescence maculaire liée à l’âge : prise en charge diagnostique et thérapeutique.
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handicap et sexualité PAR M IC H È LE L A JO UX
Intellectuels et politiques s’affrontent sur le sujet des assistants sexuels. Certains l’assimilent à de la prostitution, d’autres revendiquent le droit pour tous à une vie affective et sexuelle. La romancière Michèle Lajoux et le philosophe Bertrand Quentin ouvrent le débat.
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orothée parle haut, éclate sans cesse de rire. « J’aimerais bien avoir des aventures sexuelles et amoureuses, vivre avec un garçon, mais surtout pas handicapé. Deux fauteuils roulants dans un appartement, des soins en double c’est impossible. » Ceux qui ont dû aff ronter provisoirement une situation de handicap savent à quel point elle peut s’avérer aliénante. Mais le passage du provisoire au définitif oblige à faire le deuil de son autonomie. Vivre
avec un handicap impose souvent une aide, technique ou humaine, y compris dans ce qui constitue l’essence de la vie, l’acte sexuel. Une personne handicapée n’est pas un être asexué, objet non désiré et sujet non désirant. Et si la beauté des corps et la réussite de l’acte restent les archétypes de tout rapport 42
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sexuel, la réalité n’est pas ainsi. La relation physique s’inscrit rarement dans les critères de la perfection.
Chaque handicapé suit un parcours personnel dans sa vie affective et professionnelle. Les chanceux s’assument seuls ou en couple, les autres sont contraints à habiter dans un foyer spécialisé. En collectivité, les résidents sont des patients hypermédicalisés. L’intimité est proscrite : les cabines de douches ne ferment pas toujours, les soignants se succèdent pour laver, masser, animer les muscles, manipuler les articulations. Sans cesse stimulé, le corps est toutefois privé de sensualité et asexué. Les pulsions érotiques sont niées. « Un jour, raconte Alain, la main de la soignante m’a touché au moment de la toilette, j’ai éjaculé.
Elle a hurlé que c’était mal, que plus personne ne s’occuperait de moi. » Didier et Solange sont hébergés dans le même foyer de vie, ils sont jeunes, ils s’aiment mais on les a avertis : « Ici, pas question de faire autre chose que de se toucher la main. » Certains établissements rendent impossibles les relations sexuelles. Il n’existe pas de chambres pour deux et il arrive que le personnel entre brutalement dans les espaces privés et réprimande les couples d’amoureux. Aucun responsable n’a accepté de me recevoir. Est ce la peur des mots ? La crainte des sanctions pour ceux qui enfreignent le règlement intérieur en acceptant les pratiques sexuelles « clandestines » des résidents ? Leur réticence témoigne de la difficulté à aborder la sexualité dans des lieux où l’intimité est bannie. Les médecins, en revanche, m’ont volontiers parlé des difficultés de la vie sexuelle des « personnes en situation de handicap », terme adopté depuis 2005. La loi prévoit que, dans les foyers de vie pour adultes handicapés, soit dédié un lieu favorable au développement de la sensualité et de la sexualité, mais les décrets d’application ne sont toujours pas signés. Ces « chambres d’intimité » n’existent que dans de rares établissements. La France se refuse aussi à imiter ses voisins européens comme la Suisse, l’Allemagne,
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vivre ensemble
il n’y a pas de « droit à la sexualité »
la Belgique et les Pays Bas où des assistants sexuels permettent à des hommes et des femmes de vivre le plaisir sexuel. Beaucoup veulent découvrir cette émotion inconnue.
D’autres, qui en sont privés depuis une atteinte à la moelle épinière à l’âge adulte, enragent et espèrent retrouver la motricité de leurs membres inférieurs et leurs pulsions sexuelles. Une quête désespérée qui peut aller jusqu’au suicide. Pourtant, il est possible d’éveiller la sexualité grâce aux caresses d’autres zones érogènes, d’attiser des circuits nerveux qui conduisent à une jouissance. « J’étais prisonnière dans mon corps, dit Aline. J’ai découvert avec l’assistant sexuel que la chaleur d’une autre peau pouvait faire fondre cette carapace. » La découverte de la sensualité lui a redonné le goût de la vie. La nécessité d’aménagements techniques pour faciliter le déplacement des personnes à motricité réduite est une évidence, en revanche leur accès à une vie sexuelle reste toujours tabou. La législation est là pour réduire la disparité entre les citoyens non valides et les valides. Mais Il reste encore un grand pas à franchir, celui des change ments des mentalités. Derrière la silhouette d’un corps brisé, il y a un homme ou une femme qui désire et qui a le droit au plaisir. ●
Image tirée du film The Sessions. L’histoire d’un homme paralysé qui apprend à aimer grâce à une thérapeute.
POUR EN SAVOIR PLUS www.chs-ose.org www.cerhes.org Pour dire oui à l’assistance sexuelle en France, vous pouvez signer l’appel de l’association Ch(s)OSE http://assistancesexuelle.blogs.apf. asso.fr
Précisons d’emblée que l’idée d’un « droit à la sexualité » revendiqué par des associations militantes n’a aucun sens juridique. L’État peut bien autoriser les individus à développer ou non leur sexualité, il ne peut certainement pas leur garantir une prestation dans ce domaine. À ce rythme, un célibataire malheureux pourrait réclamer d’un juge qu’il lui trouve une partenaire sexuelle. La frustration ne peut donc être le critère pour faire voter une loi. Rappelons aussi que les personnes adultes en situation de handicap peuvent aller librement chez une assistante sexuelle tarifée. C’est seulement pour les personnes qui ne disposent pas de l’autonomie physique nécessaire que la question se pose, car l’intermédiaire qui les mettra en relation avec une assistante sexuelle tombera sous le chef d’accusation de proxénétisme. Faut-il changer la loi pour cela ? Le faire offrirait vraisemblablement un cheval de Troie aux proxénètes. Ne faut-il pas assumer qu’un risque pénal soit maintenu afin que tout adulte sente le poids de sa responsabilité mais postuler que tout juge prononcerait un non-lieu dans les cas où la bienveillance est réellement de mise face à une souffrance aiguë ? Nous ne pouvons en tout cas réduire la sexualité à un simple besoin. Elle relève d’un rapport à l’autre et d’une symbolique qu’il ne faut pas sous-estimer. Ne la réduisons jamais à de simples problèmes techniques. C’est ce qui peut nous gêner dans la manière directe dont la Belgique francophone, la Suisse, le Québec, l’Allemagne ou les pays scandinaves résolvent le problème. Les institutions nordiques peuvent ainsi ériger en loi une déconnexion trop mécanique entre corporalité et sentimentalité. Tout le monde n’a pas le même rapport au sexe. N’étant pas réduite au génital, il faut que la sexualité de l’individu puisse avoir le temps de la maturation, le temps de s’approprier son propre désir. Bertrand Quentin est maître de conférences en philosophie à l’université de Paris-Est Marne-la-Vallée, enseignant en master d’éthique médicale et hospitalière. Il est l’auteur de La Philosophie face au handicap, à paraître le 10 mai aux éditions Érès.
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Tamasaburô Bandô - Jiuta © Marie-Noëlle Robert
Du 5 au 16 février, Tamasaburô Bandô, grand acteur d’onnagata (ces rôles de femmes interprétés par des hommes), présente deux spectacles au théâtre du Châtelet. Ici il joue Jiuta, solos de danse Kabuki.
LE GAI SAVOIR #22 POUR ALLER PLUS LOIN DANS LA RÉFLEXION SANTÉ
SOMMAIRE Témoignages Virginie, Estelle, Alain et Nabil travaillent malgré leur maladie ....................................... II par Pascal Turbil Sciences Entretien avec Louis Pasteur ................................................................................................IV par Jean-Philippe Klein Psychanalyse Masculin et féminin, genre et sexe .......................................................................................VI par Paul-Laurent Assoun
COMITÉ DE DÉONTOLOGIE Composé de médecins, de politiques, d’enseignants, de juristes et d’une psychanalyste, notre comité se passionne pour les débats liés à la santé. Il pose un regard indépendant et constructif sur le contenu de ce magazine. Magistrat et spécialiste du droit international, CHRISTIAN BYK a rencontré la bioéthique « par hasard ». Depuis plus de 20 ans, il contribue à la géopolitique de la bioéthique à travers l’Association internationale droit, éthique et science (www.iales.org).
ALAIN-MICHEL CERETTI a créé l’association Le Lien, qui lutte contre les infections nosocomiales. Il est aujourd’hui conseiller santé auprès du médiateur de la République.
Philosophie Le mystère du lien humain .................................................................................................. XII par Roger-Pol Droit
GENEVIÈVE DELAISI DE PARSEVAL
Livres La sélection de Monique Atlan et Roger-Pol Droit ......................................................... XIV
est psychanalyste, enseignante et essayiste. Elle est membre associé des principaux centres d’éthique biomédicale dans le monde. Ancien directeur général de la Santé, WILLIAM DAB est médecin, docteur ès sciences et professeur titulaire de la chaire Hygiène et Sécurité du CNAM. Il est l’auteur de 4 livres, dont un « Que sais je ? » intitulé Santé et environnement, et d’une centaine de publications scientifiques.
OLIVIER MARIOTTE est médecin. Après avoir exercé des fonctions marketing dans des entreprises du médicament, il a pris la direction des affaires économiques et publiques du laboratoire Schering Plough. Il a créé « nile », une agence conseil dédiée aux acteurs de santé. Pharmacien, PHILIPPE MINIGHETTI a suivi des cursus en nutrition, orthopédie, oncologie, et a travaillé sur la prise en charge des patients stomisés. Enseignant, il participe à de nombreux congrès.
VALÉRIE SEBAG est juriste et maître de conférences en droit privé. Spécialiste de l’encadrement de la biomédecine, elle a rédigé de nombreux articles sur le statut de l’embryon et la gestation pour autrui.
TRAVAIL ET SANTÉ
PAR PASCAL TURBIL AVEC L’AFP
Accompagner les salariés malades un défi pour les entreprises
« PASCAL TURBIL Journaliste spécialisé en forme et santé, il anime le blog www.addictmag.info.
II | LE GAI SAVOIR
Au travail, c’est catastrophique, mon patron ne comprend pas ma demande pour un poste adapté. Heureusement, ma famille et mes amis sont très présents. » Virginie, 32 ans, atteinte d’une maladie de Crohn, se heurte de plein fouet à l’inadé quation entre maladie chronique et monde du travail. Sida, Crohn, Parkinson, diabète, cancers, hépatites, sclérose en plaques, les maladies chroniques sont de plus en plus connues, de mieux en mieux diagnostiquées et traitées. Elles concernent même 35 % de la population active française, selon Annick Montfort, responsable de l’Association de la gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph). Mais, au delà des chiffres en régulière augmentation, ces cas sont d’abord des histoires de personnes. Des hommes et des femmes qui se battent sur tous les fronts pour continuer d’exister.
Face à la maladie d’abord. Toujours avec des traitements lourds et inconfortables. Face à leur famille et leurs proches, ensuite. Le regard des autres change nécessairement, confirme Alain 57 ans (Loiret), atteint d’un cancer récidivant. « J’ai de moins en moins d’amis. On ne vient presque plus me voir. Même le téléphone sonne moins, comme si la maladie pouvait se trans mettre par les ondes. » Et face aux collègues et employeurs, enfin. Parce qu’au delà de la nécessité de travailler pour gagner sa vie, conserver son emploi est aussi une question de survie morale pour l’essentiel des malades. Une nuance qui s’accommode mal des notions de performance et de productivité qui font loi en entreprise. Estelle, 43 ans (Seine Saint Denis), diagnostiquée maladie de Crohn depuis 1999, témoigne : « Ma vie a été bouleversée. J’étais mariée avec deux enfants en bas âge. Je devais rester allongée, j’ai immédiatement
perdu mon travail. Je me suis séparée de mon mari (pour qu’il puisse continuer à avancer) et j’ai mis en place les contacts avec les services sociaux pour qu’ils nous aident, mes enfants et moi. » Même lorsque l’employeur est conci liant, l’issue est encore trop souvent négative. Nabil Kort (65 ans) en a fait la triste expérience. Ce technico commercial était un homme heureux en famille et au travail jusqu’à ce que, en 1998, on lui découvre une maladie grave. « Un jour, brutalement, j’ai été pris de diarrhées saignantes, de terribles douleurs abdominales. Les médecins hésitaient entre une maladie de Crohn et une RCH (rectocolite hémorragique). Je ne connaissais ni l’une ni l’autre, mais à entendre leurs commentaires et ceux des infirmières, j’ai compris que c’était grave… Après deux semaines d’arrêt maladie, je suis retourné travailler. J’étais fatigué, irritable à cause des médicaments, mais j’ai tenu bon deux ans sans rien dire autour de moi. La nature de mon travail (commercial), qui me permettait de gérer mon temps,
© Stéphane de Bourgies (www.bourgies.com)
La plupart des personnes atteintes de maladies chroniques (15 millions en France) travaillent ou désirent travailler. Une question de survie pour les salariés comme en témoignent Virginie, Estelle, Alain et Nabil.
© Michael Nicholson/Corbis
TRAVAIL ET SANTÉ
jouait pour moi. Je connaissais toutes les toilettes de toutes les autoroutes de ma région. Mais entre les clients qui me voyaient filer aux toilettes en plein repas et mes collègues que je croisais le lundi pour la réunion hebdomadaire qui observaient le changement, il a bien fallu que j’en parle à mon patron. Il a été très compréhensif, d’autant que sa propre fille était atteinte également d’une maladie chronique. Mais, au fil des hospitalisations et des opérations (ablation du colon) et de l’installation de réservoirs et de poches, j’ai dû me résoudre à quitter mon emploi. En 2001, lorsque le PDG m’a indiqué que nous devions nous séparer, le monde s’est écroulé. Mon travail, c’était ma raison de vivre et d’être. Et je venais de tout perdre. J’ai compris que ma vie était finie. L’accumulation de problèmes, avec la baisse de revenus à la clé, a joué sur le moral de ma famille. Ma femme d’abord puis ma fille ont fait une dépression. Et c’était moi, avec mes couches et mes poches, qui devais m’occuper de tout le monde. J’ai conservé le statut de « malade longue durée » durant 2,5 ans, puis je suis passé à celui de retraité. Ma femme m’a quitté. Sans mon implication dans l’association de malades François Aupetit, je n’aurais plus aucune raison de vivre. Mais je suis de nouveau dans la vie sociale grâce à mon nouveau “métier” au sein de l’association. J’ai suivi une formation de “malade expert” qui me permet d’animer des ateliers. Je fais de l’éducation thérapeutique, du coaching. Je suis même devenu délégué régional de l’association. C’est mon nouveau travail. Ce qui me permet de tenir. Il m’arrive d’ailleurs souvent de confondre les termes de malade et de client. » Il y a encore 15 ans, ceux qui se préoccupaient du lien social et de l’importance de conserver leur emploi étaient rares car,
Atteint d’une maladie des poumons, Molière est (presque) mort sur scène le 17 janvier 1673.
pour la grande majorité des malades, la problématique, c’était d’abord le soin, la question du travail ne se posait même pas. Mais aujourd’hui, l’enjeu est économique, il faut que ces personnes trouvent leur place dans l’entreprise « avec le moins de conséquences possible en termes de pro ductivité », souligne Annick Montfort. Il n’empêche, l’identification des salariés concernés « est toujours très compliquée, notamment parce que les effets de la maladie sont souvent invisibles », souligne Dominique Baradat, membre de l’Association régionale pour l’amélioration des conditions de travail (Aract) en Aquitaine. Beaucoup de malades préfèrent rester discrets. 62 % des personnes séropositives choisiraient de garder leur pathologie secrète au travail. D’autres malades, par souci de discrétion, « prennent les traitements à des heures différentes, voire ne les prennent pas, au détriment de leur santé », souligne Mme Baradat. Elle s’appuie sur le cas de cette caissière de supermarché qui, en raison de sa pathologie,
devait aller aux toilettes très fréquemment. N’ayant pas la possibilité de quitter son poste, elle devait se sonder pour travailler, ce qui l’épuisait et la conduisait à se mettre en arrêt maladie. « Son absentéisme était lié à l’organisation du travail et non à sa pathologie », relève Mme Baradat, expliquant que la mise en place d’un roulement des postes avait permis de résoudre son problème et d’améliorer du même coup les conditions de travail de l’ensemble des caissières. Pour Julien Pelletier, responsable international de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact), agir sur ces questions est un investissement pour les employeurs et a un impact sur la performance, impact dépassant même le cadre de l’entreprise. Pour Catherine Dalm, médecin inspecteur régional du travail, près de 20 % des proches apportent un soutien aux malades dans leur travail. La moitié d’entre eux (55 %) évoquent un effet sur leur propre activité en termes de concentration, d’attention ou encore d’efficacité. • LE GAI SAVOIR | III
LAST INTERVIEW
PAR JEAN- PHILIPPE KLEIN EN PARTENARIAT AVEC ATTYPIQUE.COM
Entretien avec… Physicien et chimiste de formation, Louis Pasteur a lutté sa vie durant contre les préjugés, bousculé les idées reçues tout en ayant soif de reconnaissance.
JEAN-PHILIPPE KLEIN Journaliste et auteur, il enseigne et collabore à plusieurs revues. Il est le créateur du blog attypique.com, spécialisé dans les interviews posthumes (Einstein, Freud, Mozart) et contemporaines.
N
é à Dole le 27 décembre 1822, Louis Pasteur est décrit le plus souvent comme un homme exemplaire : bon mari, bon père, bon chrétien, bon patriote. La réalité est un peu plus complexe. Célèbre pour avoir mis au point le vaccin contre la rage, on lui doit quantité de découvertes et la naissance d’une nouvelle discipline, la microbiologie. En bouleversant le savoir de votre époque par la découverte des germes et de leur rôle, vous vous êtes intéressé à la médecine vétérinaire puis à la médecine humaine. De la chimie, vous vous acheminez logiquement vers la pathologie
IV | LE GAI SAVOIR
infectieuse et l’immunologie, domaines propres à la recherche médicale. Vous avez mis au point un vaccin sans être médecin. Tous ces travaux vous ont valu de sérieuses critiques de la part du corps médical. Comment les avez-vous accueillies ? J’appelle de tous mes vœux les jugements et les critiques. Peu tolérant pour la contradiction frivole ou de parti pris, dédaigneux du scepticisme vulgaire qui érige le doute en système, j’appelle le scepticisme militant qui fait du doute une méthode, et dont la règle de conduite a pour devise : encore plus de lumière. (1) Avant vous, Claude Bernard, chercheur et médecin, s’est également heurté à l’hostilité de membres de l’Académie de médecine. Dans sa leçon inaugurale au Collège de France, il déclarait : « La médecine scientifique que j’ai pour mission de vous enseigner n’existe pas. » En effet, un médecin est davantage un
praticien qui applique un savoir alors qu’un scientifique se consacre à leur recherche. Pour vous, quel rôle doit tenir un expérimentateur au sein d’une équipe médicale ? L’expérimentateur, homme de conquêtes sur la nature, se trouve sans cesse aux prises avec les faits qui ne se sont point encore manifestés et n’existent, pour la plupart, qu’en puissance de devenir dans les lois naturelles. L’inconnu dans le possible et non dans ce qui a été ; voilà son domaine, et, pour l’explorer, il a le secours de cette merveilleuse méthode expérimentale, dont on ne peut dire avec vérité, non qu’elle suffit à tout, mais qu’elle trompe rarement, et ceux là seulement qui s’en servent mal. (1) Comment l’idée juste peut-elle naître en matière de recherche ? Est-ce de l’intuition, du hasard ? Au préalable rappelons qu’il ne faut jamais rien avancer que nous ne puissions prouver par l’expérimen tation. J’ajoute que, dans le champ
© DR
Cet entretien posthume a été rédigé à partir de différentes sources : correspondances, archives, interviews, conférences, extrait de livres, témoignages et notes authentifiés par des biographes, des historiens et des experts. Toutes les réponses proviennent de ces sources sans aucune modification.
LAST INTERVIEW
LIVRES Louis Pasteur Patrice Debré, éditions Flammarion, 1995. Louis Pasteur, franc-tireur de la science René Dubos, éditions La Découverte, 1995. Louis Pasteur, l’empire des microbes Daniel Raichvarg, éditions Découvertes Gallimard, 1995. Pasteur Janine Trotereau, éditions Folio biographies, 2008.
La Science et l’Humanité, fresque de Louis-Edouard Fournier (vers 1900) dans le bureau de Louis Pasteur à l’École normale supérieure, Paris.
Pasteur, cahiers d’un savant Collectif CNRS, éditions Zulma, 1995.
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de l’observation, le hasard ne favorise que les esprits préparés. Les idées préconçues sont le phare qui éclaire l’expérimentateur et qui lui sert de guide pour interroger la nature. Elles ne deviennent un danger que si on les transforme en idées fixes. C’est pourquoi je voudrais voir inscrites sur le seuil de tous les temples de la science ces profondes paroles : le plus grand dérèglement de l’esprit est de croire les choses parce qu’on veut qu’elles soient. (2) Il semble que, durant votre vie de scientifique, vous ayez pratiqué les sciences appliquées en aidant les éleveurs de poules et moutons, les industriels du ver à soie, de la bière... Non, mille fois non, il n’existe pas une catégorie de sciences auxquelles on puisse donner le nom de sciences appliquées. Il y a la Science et les applications de la Science,
liées entre elles comme le fruit à l’arbre qui l’a porté. Je suis un scientifique pas un médecin. Ainsi, j’avoue que je n’ai jamais songé, en pensant à une maladie, à lui trouver un remède mais toujours au contraire à trouver une méthode capable de la prévenir. (3) Pour quelles raisons avez-vous sermonné les médecins à propos de l’hygiène dans les hôpitaux ? À l’Académie de médecine, en avril 1878, j’ai déclaré au sujet d’un débat sur la fièvre puerpérale et sur les épidémies dans les maternités : ce qui cause l’épidémie ce n’est rien de tout cela, c’est le médecin et son personnel qui transportent le microbe d’une femme malade à une femme saine. J’ai aussi précisé : si j’avais l’honneur d’être chirurgien, je ne me servirais que d’instrument d’une propreté parfaite, mais après avoir nettoyé
mes mains avec le plus grand soin et les avoir soumises à un flambage rapide. (4) Pensez-vous que votre institut parviendra à éradiquer la plupart des maladies infectieuses dans le monde ? J’attends avec confiance les conséquences que cette méthode de l’atténuation des virus tient en réserve pour aider l’humanité dans sa lutte contre les maladies qui l’assiègent. (5) •
SOURCES 1 - Décembre 1854 puis juin 1881 (Œuvres de Pasteur Tome VI et Tome VII). 2 - Lettre au Professeur Grancher, Paris 13 mai 1892. 3 - Extrait du discours de réception de Pasteur à l’Académie française. 4 - Extrait d’une intervention à l’Académie de médecine, en avril 1878. 5 - Extrait d’une lettre ouverte de Pasteur adressée à R. Koch le 25 décembre 1882.
Pasteur, des microbes au vaccin Annick Perrot et Maxime Schwartz, éditions Casterman/ Institut Pasteur, 1999. Pasteur, Histoire d’un esprit Emile Duclaux, imprimerie Charaire, 1896. Œuvres de Pasteur réunies et annotées par Louis Pasteur Vallery-Radot, éditions Masson, 7 tomes, 1939. Pasteur Maurice Vallery-Radot, éditions Perrin, 1994.
LE GAI SAVOIR | V
PSYCHANALYSE
RUBRIQUE DIRIGÉE PAR PAUL-LAURENT ASSOUN
Masculin et féminin Genre et sexe
PAUL-LAURENT ASSOUN EST PSYCHANALYSTE ET PROFESSEUR À L’UNIVERSITÉ PARIS-VII.
VI | LE GAI SAVOIR
Une notion et une réalité nouvelles sont venues questionner la différence sexuelle : la transsexualité et les transsexuels. Celle ci a entraîné une réflexion croissante sur la catégorie de genre, qui est passée dans le domaine social. Le sujet transsexuel est défini, il se définit lui même, par le sentiment profond et la conviction d’appartenir à un autre sexe que son sexe biologique de naissance. Remise en question de l’identité sexuelle, en son évidence. D’où l’idée d’identité de genre, imposée par un certain état d’ambiguïté sexuelle. La psychanalyse a à se situer par rapport à ce phénomène. D’abord en ce qu’il implique évidemment une dimension intéressant la sexualité, mais sur un mode différent de ses propres objets de réflexion. Ensuite parce que, curieusement, ce trouble de l’identité, flagrante anomie sexuelle que constitue la transsexualité, a relancé la problématique de l’identité,
dans un sens identitaire, alors que ce qui est en jeu, comme on va le voir, est l’identification. De plus, ce trouble au sein de la sexualité aboutit paradoxalement à l’idée d’une désexualisation et contribue à réaccréditer ainsi une sorte de mé connaissance du sexuel, soit le genre contre le sexuel. Le transsexuel, ce sans papiers du sexe, n’aspire en effet à rien davantage qu’à acquérir une identité stable et attestable, que son sexe (subjectif), véritable à ses yeux, s’affiche sur sa carte d’identité qu’il désire mettre à jour, ce qui est une question de survie sociale et psychique. Il y a là au reste une véri table douleur psychique reproduite au quotidien par un malaise social. Il semble ainsi tendre à la recon naissance identitaire et à obtenir de la société une attestation d’identité, le sexuel passant à l’arrière plan. Cela passe par le bistouri. C’est en effet sur la table d’opération qu’est né le mot, d’origine chirurgicale
(Harry Benjamin, 1953), auquel l’on s’est ensuite évertué à conférer un statut psychique pour les personnalités transsexuelles ce qui culmine avec Robert J. Stoller (Recherches sur l’identité sexuelle à partir du transsexualisme). Au point qu’accéder à une normalisation de l’identité sexuelle semble être, pour beaucoup de transsexuels, une façon de se débarrasser du sexuel, l’essentiel étant moins de vivre un désir qu’accéder à une identité. Tout cela contribue à induire une confusion, voire une régression eu égard à l’apport de la psychanalyse, tout en mettant celle ci à l’épreuve d’un phénomène socio médical inédit qui doit assurément être pris en compte, par la psychanalyse également. Bref, le genre ou le sexe, il y a bien en effet à penser une disjonc tion qui va permettre de revenir à une question difficile mais essentielle, celle du masculin et du féminin comme dimensions psychiques.
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La transsexualité permet d’interroger, via la psychanalyse, le masculin et le féminin comme dimensions psychiques.
PSYCHANALYSE
CE TROUBLE AU SEIN DE LA SEXUALITÉ ABOUTIT PARADOXALEMENT À L’IDÉE D’UNE DÉSEXUALISATION . DU GENRE AUX GENRES Considérons d’abord le terme. Le mot genre (du latin genus) est apparu en français vers 1200, comme abrégé de genus humanorum, le genre humain. Il a pris le sens de manière, sorte, vers 1400. Ce double sens indique la référence à l’espèce, d’une part, au sexe d’autre part le terme allemand Geschlecht comportant d’ailleurs cette double acception. Le genre humain est scindé en deux genres, c’est un fait accompli depuis la naissance ô combien encore énigmatique de la sexualité. Il y a donc une espèce humaine, mais scindée en deux manières de l’être humain, homme et femme.
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LA DIFFÉRENCE AU PREMIER REGARD L’entrée de Freud la plus directe dans la question se fait en évoquant un regard littéralement ex centrique : « Si en renonçant à notre corporéité, comme êtres simplement pensants, venant en quelque sorte d’une autre planète, nous pouvions voir les choses de cette terre avec fraîcheur, rien ne frapperait plus notre attention que l’existence de deux sexes parmi les humains, qui, par ailleurs si identiques entre eux, montrent nécessairement leur diversité par les signes les plus extérieurs » (Les théories sexuelles infantiles). Il faudrait donc un regard frais, extra terrestre et même incorporel, pour se réaviser de cela, la différence
sexuelle, tant nous sommes, sur cette planète, accoutumés à rencontrer des spécimens des deux sexes, afin de ressaisir la perplexité : « qu’est ce que c’est que ça ? », « qu’est ce que cela signifie ? ». Quoique le garçon ouvrant les yeux sur les filles, dans l’éclosion de son printemps pubertaire, éprouve le sentiment d’une étrangeté radicale, garçons et filles constituent deux planètes qui s’attirent, sans appartenir totalement au même monde. Aujourd’hui, avec les transsexuels, un tel spectateur extérieur pourrait s’y tromper et il faudrait avertir l’extraterrestre qu’il peut tomber sur un semblant de femme ou d’homme (car la demande de transformation va dans les deux sens), candidat à la problématique fonction de troisième sexe ! Quoique, s’il a une bonne oreille, il ouïra, chez le mutant d’homme en femme, une voix qui a gardé un timbre incurablement masculin, ce qui, on le sait, constitue le caractère le plus résistible de la transformation de l’identité sexuelle. Qu’il tombe aussi bien sur un travesti, et il pourrait s’y tromper a fortiori, puisqu’il est des hommes travestis avec un talent tel qu’ils apparaissent plus femmes que nature. Une femme à cent pour cent d’apparence pourrait bien dissimuler un homme savamment travesti. Il faut aussi compter avec les hermaphrodites, mais, bref, ce sont les exceptions qui confirment la règle.
LA SEXION SEXUELLE, UN FAIT PLANÉTAIRE La règle en effet, c’est la sexion, section de l’un. Il y a une différence de visu, que les signes sexuels dits secondaires viennent manifester et que la dialectique de l’identification sexuelle va confirmer. Comment l’espèce humaine s’est elle sexuée, c’est un mystère, mais depuis cette origine, c’est bien le fait planétaire le plus patent. Reste que ce fait d’une évidence aveuglante (de la sexualité) s’adosse à une énigme (celle du sexuel). C’est pourquoi l’approche biologique de la sexualité doit être spécifiée par l’approche psychanalytique du sexuel. Freud note bien néanmoins que la curiosité de l’enfant dans l’élaboration de ses théories ne commence pas par cette énigme là. Les théories sexuelles infantiles ne s’inaugurent pas par l’énigme sexuelle, mais par la question :
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PSYCHANALYSE
☞ « d’où viennent les enfants ? » (cf. notre
Certains l’aiment chaud, film de Billly Wilder, 1959. Avec Marilyn Monroe et Tony Curtis.
contribution Pourquoi les enfants demandent ils pourquoi ? (Pause santé n° 21). Aux yeux de l’enfant, papa = homme, maman = femme. Si cela se complique, avec des recompositions présentes et à venir de la structure sexuelle familiale, cela n’en garde pas moins sa permanence structurale de questionnement. Le petit (la petite) d’homme va de toute façon se référer aux autres de l’environnement familial pour se situer et en venir à problématiser cette identité si évidente. Il rejoindra l’intuition de la chanson que, si le soleil et la lune sont d’une évidence éblouissante, comme le jour et la nuit, il n’est pas évident qu’ils se rencontrent, à l’heure du rendez vous.
LE GENRE EST UN PRINCIPE DE DISTINCTION PHYSIOLOGIQUE ET SOCIAL FONCIÈREMENT GRAMMATICAL . DU GENRE À LA POLARITÉ MASCULIN / FÉMININ Avant donc de tracer une frontière entre les champions du genre (avec à leur tête les théoriciens de la transsexualité) et les autres (les psychanalystes notamment), il nous faut situer le genre incons cient, tel que la psychanalyse peut l’éclairer. Cela nous renvoie donc aux deux fonctions inconscientes du masculin et féminin. Que peut on en dire en substance ? Masculin et Féminin, ce sont : Des cas dans toutes les langues : c’est ce qu’on appelle un genre.
Le substantif se décline et s’accorde au masculin ou au féminin (et l’adjectif avec) (cf.« le » « la », il y a un sexe des mots, ce qui fonde la « classification lexicale »). Exception, les épicènes, noms communs au mâle et à la femelle (aigle, caille, crapaud) ou mots qui ne varient pas selon le genre (enfant, toi, jaune). Véritables hermaphrodites de la langue. C’est donc d’abord, il faudra s’en souvenir, une notion grammaticale. Une mention sur la carte d’identité, document qui nous permet de décliner notre identité de genre. Nous voyons cela aussi aux devantures de coiffeurs masculin et féminin, indiquant la spécialité dames ou messieurs. Différenciation capillaire… Ce qui figure dans les toilettes, c’est dames/messieurs avec de petites icônes, car il est essentiel en ces lieux d’aisance de ne pas se tromper ni de perdre le sens de l’orientation ce que Lacan désigne avec humour comme la ségrégation urinaire. De ce sondage, ressort que le genre est un principe de distinction physiologique et social foncièrement grammatical. Ce qui nous intéresse, c’est ce que cela veut dire dans la langue inconsciente et la logique inconsciente du sujet.
« La vie sexuelle, rappelle Freud, est dominée par la polarité du masculin et du féminin. » C’est un fait, VIII | LE GAI SAVOIR
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VIE, SOCIÉTÉ, PSYCHÉ : LES AVATARS DE LA POLARITÉ
PSYCHANALYSE
Tamasaburô Bandô © Takashi Okamoto
Le pavillon aux pivoines est l’une des œuvres majeures de l’opéra chinois classique. Ce spectacle a été donné au théâtre du Châtelet. Ici Tamasaburô Bandô interprète le rôle d’une jeune femme, Du Liniang.
qui installe cette dualité au centre de la psychosexualité. Par ailleurs, l’anatomie c’est le destin, rappelle t il. En effet, présence de spermatozoïdes ou d’ovocytes ou, en termes génétiques, la dualité XX/XY, voilà qui embraye la petite diffé rence littérale déterminante pour la réalité sexuelle. Comment faire rimer ces deux dimensions ? Pour cela, il convient de distinguer les fonctions du masculin et du féminin en les étageant en trois plans : « biologique » (mâle et femelle), assortie de certaines caractéristiques morphologiques. « social », lié à la division des fonctions dans une société et une culture données. « psychologique », sauf à ajouter
que celle ci est beaucoup plus épineuse à déterminer il dira plus directement encore en 1909 qu’elle « ne vaut rien ». Il faut bien pourtant l’employer, c’est une métaphore précieuse et surtout inévitable. Et c’est cela qui rend la question intéressante : soit la façon dont l’individu assigné à son sexe biologique construit son sexe psychique et symbolique en quelque sorte. Cela ouvre la question de la sexuation, à partir des données psychiques, sociales et biologiques et, au delà, symboliques. Faute de la définir, on peut du moins l’approcher par deux autres dualités : l’actif et le passif, à spécifier par le phallique et le castré.
«LA VIE SEXUELLE, RAPPELLE FREUD, EST DOMINÉE PAR LA POLARITÉ DU MASCULIN ET DU FÉMININ.»
LA BISEXUALITÉ, CLÉ DU MASCULIN ET DU FÉMININ : IDENTIFICATION ET FANTASME Tout part de la bisexualité. Freud, on le sait, a été enseigné sur ce point par Wilhem Fliess, mais, chez ce dernier, c’est l’objet d’une spéculation biologique et numérologique Wilhem Fliess cherchant à locali ser la bisexualité par sa théorie de la latéralité (le rapport du corps aux parties droite et gauche) et le repérage d’un cycle chez l’homme supposé homologue au cycle menstruel. « Je m’habitue à considérer chaque acte sexuel comme un événement impliquant quatre personnes », conclut Freud en écho. En deçà, les mythes se sont spécialement excités sur cette question, le mythe platonicien en constituant le sommet (Le Banquet). Pour Wilhem Fliess, c’est une donnée biologique, pour Freud c’est plutôt une complication de la description psychologique. Il ne suffit pas de dire que nous
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Torse de jeune homme (1923), sculpture, Constantin Brancusi (1876-1957). Musée national d’Art moderne, centre Georges Pompidou, Paris.
avons tous en nous quelque chose de masculin et de féminin formule au fond vide tant que l’on n’a pas compris comment le sujet, fille ou garçon, s’identifie psychiquement à son sexe. Ainsi il n’est pas possible de penser le complexe d’Œdipe complet sans prendre en compte chez le garçon, outre l’hostilité envers le père rival, l’amour du père (féminisant) qui pose la mère en rivale ce qui trouve écho chez la fille par la composante d’amour de la mère combiné au rapport agressif à la mère rivale. Autrement dit, c’est au sein de la famille que l’enfant en vient à trouver les marqueurs identifi catoires qui lui donnent l’envie, pour le dire directement, de se prendre pour un homme ou une femme. Par la dimension bisexuelle psychique,
on accoste au fantasme, tel que le détaille la matrice du fantasme un enfant est battu (essai Freud 1919). Le fantasme nous fait parvenir au cœur du problème : la clé de la soi disant identité, c’est bien l’identification. Prenez une petite fille. Elle peut ressembler à un petit bonhomme, sans que cela ne dise rien de sa future orientation sexuelle, parce qu’elle s’identifie à papa. Comment cet être à tendances bisexuelles qu’est l’enfant féminin devient une femme, voilà la question pour Freud. De même le garçon guette en quel que sorte la conduite du père pour rejoindre sa propre virilité future.
la cour d’appel de Dresde, célèbre pour ses délires psychotiques), ima ginant qu’il doit devenir la femme de Dieu pour amener l’humanité à la rédemption montre sa position de transsexuel accomplie par le délire, ce qui le dispense du bistouri ! La perversion est particulièrement intéressante ici, car le pervers considère la division comme une catastrophe et joue avec. Il rêve de conjurer la malédiction de la scission des sexes, par une stratégie fétichique et transgressive.
LA CASTRATION, ENJEU DE LA DIALECTIQUE MASCULIN / FÉMININ
Revenons à partir de là à la trans sexualité. On voit qu’elle n’est pas un dossier hors inconscient, mais qu’elle s’éclaire de la dialectique inconsciente, pour peu qu’on ne la laisse pas piétiner dans le discours médico social qui, parlant d’emblée à juste titre en termes de droits et de libertés, recule devant la complexité du processus psychique engagé. La transsexualité n’échappe évidemment pas à la question de la castration. La question se pose, complexe à souhait, il est vrai, de la référence à la structure inconsciente dans la genèse de cette conviction transsexuelle. Un pôle en est la dimension psychotique, l’autre en est la perversion. Dans l’un et l’autre
Ainsi c’est, avec l’Œdipe, sur le terrain du fantasme de castration, que va se livrer la bataille décisive. La femme, on l’a compris, est tout sauf passive, comme l’indique son parcours de la mère aimée à l’homme en passant par le père idéalisé, recons tituant inlassablement un rapport à l’objet perdu. Mais la vérité est qu’aucun des deux sexes ne veut advenir à la position passive, chacun se débrouillant avec les donnes de sa position. Névrose et psychose renvoient à cette dialectique. Le pousse à la femme dans la psychose du président Schreber (président de
LA « LOGIQUE DE LA SEXUATION », AU-DELÀ DE LA GRAMMAIRE DU GENRE
C’EST AU SEIN DE LA FAMILLE QUE L’ENFANT EN VIENT À TROUVER LES MARQUEURS IDENTIFICATOIRES QUI LUI DONNENT L’ENVIE DE SE PRENDRE POUR UN HOMME OU POUR UNE FEMME. X | LE GAI SAVOIR
© ADAGP, Paris 2013 © Centre Pompidou, NMAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais /Adam Rzepka
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© ADAGP, Paris 2013 © Centre Pompidou, NMAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais /Christian Bahier/Philippe Migeat.
cas, l’opération utilement mutilante aux yeux de l’intéressé(e) a pour fonction paradoxale de tenter de liquider cette angoisse de castration qui engage l’être même du sujet en corrigeant ce qui leur apparaît comme une erreur d’assignation. Nous rappellerons que s’en détachent trois étages, de l’assignation biolo gique de la différence sexuelle, du discours social et last but not least, car c’est sur ce point que la psycha nalyse a le plus à dire, la sexuation, soit la subjectivation singulière du sexe, son assomption propre. La logi cisation lacanienne du problème a donc pour effet (sinon pour finalité) de faire sortir la notion de genre de son statut classificatoire et gram matical. C’est assurément un drôle de genre que le transsexuel, mais par son biais, plutôt que de revenir dans le giron de l’identité, l’on est induit à parler de genre impossible.
LE SEXE, LA CASTRATION, LA MORT « Le genre se déchire dans la différence des sexes », rappelait Hegel. Cette formule, bien comprise, objecte à l’aplatissement du sexuel, à l’identité de genre. C’est en effet une façon de rappeler que les deux sexes ne font pas somme, au cœur du genre humain, mais marquent un déchire ment qu’ils viennent incarner. C’est aussi ce qui fait la force du lien entre ces deux moitiés décomplétées que sont hommes et femmes. Or, on en trouve un écho dans l’un des ultimes aphorismes freudiens (22 septembre 1938). On y entend en effet cet ultime dialogue de Freud avec lui même, s’interrogeant si « la naissance du vivant » n’aurait pas été simultanée avec « la désagrégation en substance m
et f » (masculin et féminin). Idée vertigi neuse. C’est en naissant que le vivant se serait scindé en ces deux principes, masculin et fé minin, ce qui est du même pas un premier pas vers la mort de cette monade, divisée au moment même de son engendrement. La mort serait donc présente dans le vivant à l’état de nais sance, c’est le cas de le dire, à travers la différence sexuelle. Cela implique que le sexe est intimement lié à la mort. Cela ne remet pas en cause l’idée que les pulsions sexuelles travaillent émi nemment au cœur des pulsions de vie et de l’Éros. Mais précisément c’est le cœur de la contradiction d’Éros, à la fois porte parole des pulsions de vie et partenaire de Thanatos. C’est à l’approche clinique de détermi ner comment, par exemple, une identification profonde d’un enfant mâle à sa mère peut incorporer une identification psychique féminine ou comment une fille peut se phalliciser. La sexualité ne se réduit décidé ment pas à la pastorale où Jeannot rencontre sa Janette (et vice versa), quoique les meilleurs moments de l’amour donnent aux humains « les plus grands vécus de satisfactions », comme l’affirme Freud par delà l’énigme du masculin et du féminin. •
Princesse X, (1916), sculpture en bronze poli, Constantin Brancusi (1876-1957). Musée national d’Art moderne, centre Georges Pompidou, Paris.
BIBLIOGRAPHIE Sigmund Freud, Trois essais sur la théorie sexuelle, 1905.
Leçons psychanalytiques sur Masculin et Féminin, Paul-Laurent Assoun, éditions Economica, 2007.
Lacan, Paul-Laurent Assoun, Presses Universitaires de France, « Que sais-je ? », 2009.
LE GAI SAVOIR | XI
OÙ LA PHILO MÈNE…
RUBRIQUE DIRIGÉE PAR ROGER-POL DROIT
Le mystère du lien humain Les hommes sont ainsi faits : dans les situations de danger, ils s’entraident spontanément. Mais quelle est la nature de ce lien ?
Ancien élève de l’École Normale Supérieure (Saint-Cloud), agrégé de philosophie, Roger-Pol Droit est chercheur au CNRS (histoire des doctrines de l’Antiquité), directeur de séminaire à Sciences Po et membre du Comité National Consultatif d’Éthique pour les sciences de la vie. Il est également chroniqueur au Monde, au Point, aux Échos, à Clés. Il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages, dont plusieurs sont traduits dans le monde entier. www.rpdroit.com
XII | LE GAI SAVOIR
L’
QUELLES QUE SOIENT L’ÉPOQUE ET LA CIVILISATION, LES HUMAINS EN CAS DE RISQUE VITAL SE PORTENT SECOURS. Or cette scène nous parle encore, aussi nettement qu’il y a deux mille ans. Elle n’est ni chinoise, ni africaine, ni européenne. N’importe quel passant, n’importe quand, n’importe où, peut sauver un enfant inconnu qui va mourir. C’est une évidence, mais c’est aussi, dès que l’on regarde de plus près, une profonde énigme. Quelle est donc la nature de ce lien qui unit le passant et l’enfant, et plus généralement les humains entre eux, de manière directe, sans réfléchir ? On peut nommer ce lien, mais il est plus difficile de le comprendre. Parmi les termes capables de le désigner : « entraide », « humanité », « com passion », « pitié », « empathie »… Sans être synonymes, tous ces mots
tournent autour du même noyau de sens, et du même mystère celui du lien qui rend les humains solidaires. En effet, même s’ils sont égoïstes et rivaux, ils tentent toujours de sauver les naufragés, les incendiés, les égarés, les victimes de catas trophes. Tout le monde sait cela, le constate, y participe à sa façon un jour ou l’autre. Pourtant, dès que l’on cherche à comprendre com ment fonctionne ce lien, sur quoi il se fonde, on constate aussi qu’il n’est pas aisé d’y voir clair. Car le problème est de rendre compte de cette émotion subite qui nous fait agir. Nous ne sommes pas en danger, nous ne souffrons pas, et soudain nous éprouvons comme insupportable le risque que l’autre est en train de
© Bruno Lévy
ROGER-POL DROIT
enfant est monté seul sur la margelle du puits. À présent, il commence à se pencher, à regarder ce qu’il peut y avoir en bas, tout au fond de ce trou béant. Encore un instant et, inévitablement, le poids de sa tête va l’entraîner dans une chute mortelle, sauf si… Heureu sement, un passant le rattrape et le sauve. L’homme ne s’est pas demandé, avant d’agir, qui était cet enfant, pourquoi il était seul, où donc étaient ses parents. Il s’est précipité, sans réfléchir, mû par une impulsion irrésistible, une évidence sans discussion, pratiquement sans paroles. Les humains, en cas de risque vital, se portent secours. Cela est vrai quelles que soient l’époque et la civilisation. Cette histoire d’enfant qui va tomber dans un puits est intemporelle. Son auteur, un philosophe chinois, Mencius, qui vivait au Ier ou IIe siècle de notre ère, voulait déjà montrer combien chacun de nous, spontanément, peut se comporter de manière solidaire.
OÙ LA PHILO MÈNE…
DONNER SANS RÉFLÉCHIR
Dans son dernier ouvrage Roger-Pol Droit nous invite à réaliser des expériences insolites : débrancher le téléphone, faire silence à plusieurs, mixer des proverbes… L’étonnement n’est-il pas l’origine de la philosophie ? Petites expériences de philosophie entre amis, aux éditions Plon.
courir, l’épreuve qu’il endure. Les philosophes, indépendamment de Mencius, n’ont pas manqué de s’interroger. Jean Jacques Rousseau considère la pitié comme un socle du lien social, Arthur Schopenhauer en fait le fondement de la morale, Adam Smith y situe l’origine des sentiments moraux et, plus près de nous, Emmanuel Levinas place dans la relation à l’autre l’essentiel de ce qui constitue notre humanité. Malgré tout, si leurs différentes analyses soulignent toutes le carac tère central de cette relation sans intermédiaire entre des inconnus, elles ne parviennent pas à expliquer complètement ce qui se produit, ni pourquoi il en est ainsi. Si fréquent et si puissant qu’il soit, le lien humain reste encore, en grande partie, terre inconnue. Pour l’approcher, je vous suggère deux petites expériences.
© Blue Lantern Studio/Corbis
TENTER D’ÉTOUFFER LA PITIÉ À la télé, une grande catastrophe humanitaire tremblement de terre, tsunami, inondations, incendie monstre, famine, épidémie… Vous voyez le désarroi de ces gens que vous ne connaissez pas.
Vous êtes bouleversé, prêt à aider, disposé à envoyer un don. Que se passe t il si vous tentez de vous raisonner ? Après tout, vous n’êtes pas concerné : votre maison est sur pied, votre région préservée, vos enfants sains et saufs et vous n’êtes pas responsable du sort de ces malheureux. Certes, ce n’est pas très glorieux, mais ce n’est pas faux non plus. Ce que vous allez pouvoir constater par vous même, c’est le balancement en tre l’émotion et le raisonnement. Ce qui vous émeut est soudain, intense, spontané. Quand vous réfléchissez, cette tempête affective commence à se calmer, des distances s’inter posent entre vous et le malheur des autres. Rousseau va jusqu’à dire que le philosophe, à force de raisonner, peut étouffer en lui la voix de la pitié naturelle et finir par laisser mourir de faim un homme criant sous sa fenêtre. À vous de voir si vous lui donnez raison ou non. Les arguments rationnels sont ils vraiment capables d’éteindre tout à fait notre émotion ? Les images du malheur sont elles devenues froides ? Ou bien nous entraînent elles toujours ?
C’est un souvenir de mon enfance. Je devais avoir huit ou neuf ans, je sortais de l’école et la dame qui venait me chercher m’avait apporté, comme souvent, un petit pain au chocolat. Sur le chemin pour rentrer à la maison, il y avait un SDF, barbe blanche et vieux chapeau, assis sur le trottoir. J’ai vu son regard sur mon petit pain et j’ai continué à marcher, quelques dizaines de mètres. Puis j’ai rebroussé chemin en courant, et je lui ai donné mon goûter. J’ai vu son regard, de nouveau, autrement. Évidemment, ce n’est pratiquement rien, à peine une miette infime. Sauf que plusieurs dizaines d’années après je me souviens encore de ce moment si bref. J’ai oublié, cela va de soi, tous les autres goûters, mais pas ce pain au chocolat que je n’ai pas mangé. Juste parce que, ce jour là, un si court instant, j’ai fait passer un autre avant moi. Tentez donc sans hésiter la première expérience venue qui pourra vous faire vivre une situation du même ordre. Ou bien pensez aux scènes que vous avez déjà vécues dans un registre semblable. Vous y retrou verez, certainement, toujours les mêmes caractéristiques : pas de réflexion, mais un geste impulsif et soudain ; une mémoire très aiguë de ce qui s’est passé, même si cela paraît, en fait, insignifiant ; sans oublier une qualité particulière de joie liée à ce souvenir vif. Et aussi, inévitablement, le sentiment que tout cela demeure hors du cercle de ce qui se comprend clairement. Comme si c’était au bord de ce qui est pensable. • LE GAI SAVOIR | XIII
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DOSSIER La responsabilité sociétale de l’entreprise au cœur des enjeux du développement durable.
développement
durable
pause s a nté
par
F ab i enne
A ttal i
« Agir local, penser global »
René Dubos*
Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à intégrer des préoccupations sociales et environnementales dans leur activité. Rencontre avec Benoît Gallet, vice-président des affaires publiques du laboratoire Bristol-Myers Squibb en charge de la politique de responsabilité sociale (RSE).
Médecin généraliste, Benoît Gallet a rejoint BMS en 1989. Après avoir exercé des responsabilités dans la division virologieinfectiologie et la division douleur-neurosciences, il occupe depuis 2004 la fonction de vice-président des affaires publiques.
Bristol-Myers Squibb est une société américaine qui emploie en France 2 700 personnes. Quel est son positionnement au sein de l’industrie pharmaceutique ? Je dirais plus exactement que Bristol Myers Squibb est une entreprise biopharmaceutique qui emploie 28 000 collaborateurs dans le monde dont 2 700 en France. Il y a 5 ans, BMS a opéré un virage stratégique pour s’intéresser plus particulièrement aux maladies graves, celles pour lesquelles les besoins médicaux ne sont pas satisfaits. Pour cela, nous nous sommes particulièrement concentrés sur la recherche et l’innovation dans les domaines de l’oncologie, l’athérothrombose, les maladies du métabolisme, le VIH, les hépatites, la maladie d’Alzheimer… Notre ambition n’est pas d’être la plus grande ni la plus puissante entreprise du secteur mais plus simplement d’apporter une expertise dans le traitement de ces maladies. Pour ce faire, nous avons adopté la stratégie
2 | S U P P L É M E NT D É V E L O PPE M E NT du rab le
dite du « collier de perles » en développant des alliances et en réalisant des acquisitions très ciblées. Le dernier accord dont nous sommes très fiers est celui que nous avons signé avec Innate Pharma, une biotech française basée à Marseille spécialisée dans l’immunologie.
Dans les années 70, l’économiste Milton Friedman écrit dans les colonnes du New York Times « la seule responsabilité de l’entreprise est d’accroître ses profits ». Aujourd’hui, même si la réglementation est peu contraignante en France, les entreprises de plus de 500 salariés sont tenues de publier des informations sur leurs performances sociales et environnementales, on parle de responsabilité sociale ou sociétale des entreprises. Comment comprenez-vous cette évolution ? L’évolution a été progressive. On a commencé par parler de développement durable, un concept très bien défini dans le rapport
développement du rab le Quelle réglementation ? La RSE est une démarche volontaire des entreprises. En Europe, seuls la France et le Danemark l’ont réglementée. Ainsi l’article n°116 (intégré au code de commerce) de la loi sur les nouvelles régulations économiques votée en 2001 prévoit que les entreprises cotées en bourse indiquent dans leur rapport annuel une série d’informations relatives aux conséquences sociales et environnementales de leurs activités. Suite à la conférence environnementale du 14 et 15 septembre qui s’est tenue au Conseil économique et social, palais d’Iéna à Paris, le nombre d’entreprises concernées par ce reporting devrait être élargi en supprimant la distinction entre les sociétés cotées et non cotées. Le critère retenu étant la taille de l’entreprise. Un suivi devrait également être mis en place.
* Chercheur français expatrié aux États-Unis, René Dubos a été corédacteur du rapport de la conférence des Nations Unies sur l’environnement en 1972. Pour la première fois, les questions écologiques ont été placées au rang des préoccupations internationales. Ce sommet a donné naissance au programme des Nations Unies pour l’environnement. Une prise de conscience qui s’est élargie d’une dimension sociale et humaine dans l’activité des entreprises.
Brundtland : « Répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre à leur besoin. » La notion s’est ensuite enrichie d’une dimension sociale tant à l’intérieur de l’entreprise avec ses salariés, qu’à l’extérieur avec ses partenaires, ses clients, ses fournisseurs. On a réalisé que l’entreprise ne pouvait agir seule mais qu’elle devait aussi agir dans la société. Les entreprises doivent créer du profit, mais également être des actrices à part entière de la société, c’est pourquoi on parle aujourd’hui de responsabilité sociétale.
un projet en République démocratique du Congo qui concerne la délégation de tâches. L’Afrique (tout comme la France) manque de médecins. Il est capital qu’un certain nombre d’actes et de soins puissent être pris en charge par d’autres personnels soignants comme les infirmières ou les pharmaciens. En Asie, nous défendons le programme Delivering Hope contre l’hépatite, selon le même principe que Secure The Future. Dans les deux cas, ce n’est pas le siège de BMS à New York qui détermine les besoins, mais des comités locaux.
Quelles actions concrètes mène BMS dans ce domaine ?
En France, vous êtes à titre personnel également président de Tulipe.
Notre fierté, c’est notre Fondation, créée en 1958. Elle a pour vocation de lutter contre les inégalités dans l’accès à la santé. Nous intervenons sur plusieurs continents, en ciblant des régions. En Afrique, contre le VIH, nous avons mis en place le programme Secure The Future. Pour exemple, aujourd’hui je travaille sur
Oui, cette association ne dépend pas de BMS. Tulipe rassemble des entreprises de santé qui donnent des médicaments et du matériel médical pour faire face à des situations d’urgence dans des pays pauvres. L’association vit grâce aux cotisations des adhérents et aux dons en nature. Mon gros souci était de ne pas
106 800
boîtes de médicaments ont été distribuées par BMS à Tulipe en 2009.
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pause s a nté La mission de Tulipe / Organisation non gouvernementale régie par la loi de 1901, Tulipe est l’association d’urgence et de solidarité internationale des entreprises de santé. Elle répond aux besoins des populations en détresse, lors de crises sanitaires aiguës, de catastrophes naturelles et de conflits en fournissant des kits d’urgence de produits de santé neufs. Dotée du statut d’établissement pharmaceutique, Tulipe prend également en charge l’assistance technique aux ONG. www.tulipe.org
Ci-dessus : 200 vélos ont été offerts par la Fondation BMS dans le cadre du programme
Secure The Future pour aider les malades et les soignants à se déplacer. Ici, des enfants de l’orphelinat Bana Ba Keletso (Molepolole, Botswana).
rester franco français et de ne pas multiplier les engagements pour les entreprises donatrices. Aujourd’hui, grâce à l’appui de BMS qui nous a parrainés, Tulipe travaille avec une association basée à New York, The Partnership for Quality Medical Donations (PQMD), association qui fédère les entreprises et les ONG au niveau international. Nous sommes adhérents depuis 3 ans et il est beaucoup plus facile pour nous maintenant de récolter des dons. À ce jour, nous sommes intervenus dans 25 pays avec 38 ONG.
BMS a développé des molécules innovantes dans le traitement contre le sida. Votre entreprise a-t-elle engagé des actions spécifiques en faveur des pays en voie de développement particulièrement touchés par cette maladie ? Oui, en 2001 nous avons mis en place le pro gramme Access. Plusieurs entreprises, dont BMS, se sont engagées à vendre des médicaments en Afrique subsaharienne sans réaliser de profits. Nous avons adopté une politique de prix différenciés à travers le monde. Les prix sont très fortement 4 | S U P P L É M E NT D É V E L O PPE M E NT du rab le
réduits en Amérique latine, au Moyen Orient, en Asie et en Europe centrale. BMS n’exerce pas son droit de protection de brevet dans ces pays. Par exemple, pour l’Afrique, en 2006, alors que le brevet de Reyataz court jusqu’à 2017 (mé dicament contre le sida), nous avons fait un appel d’offre en direction des génériqueurs locaux pour leur proposer un transfert de technologie et une formation de leur équipe sur le manufacturing. À notre grande surprise, les grands du secteur n’ont pas voulu jouer le jeu. Finalement, ce sont deux laboratoires, un indien et un second situé en Afrique du Sud, qui ont accepté.
Nous l’avons évoqué, la responsabilité sociale concerne aussi les salariés. En moyenne, dans les entreprises françaises, à travail égal, les femmes gagnaient en 2009 environ 28 % de moins que les hommes. Chez BMS, existe-t-il des programmes pour réduire les inégalités entre hommes et femmes sur le plan salarial ou pour lutter contre d’autres formes de discrimination ? Concernant l’égalité entre les hommes et
développement du rab le Nos quartiers ont des talents /
Créée en 2005, l’association a mis en place un système de parrainage pour accompagner dans leur recherche d’emploi les jeunes diplômés (bac + 4 et plus) des quartiers populaires. Le rôle des parrains chefs d’entreprise ou cadres supérieurs consiste à leur redonner confiance, à les aider à intégrer les codes de l’entreprise, à adapter leur projet professionnel, à préparer les entretiens de recrutement, à ouvrir leur réseau. Des actions concrètes qui permettent de décliner le principe d’égalité des chances. www. nosquartiers-talents.com
les femmes, nous comptons 40 % de femmes au comité de direction. Même si ce n’est pas parfait, nous avons réalisé de réels progrès. Le vrai sujet restant la discrimination sur les salaires. En effet, bien que les femmes soient très nombreuses dans l’industrie pharmaceutique, l’égalité des salaires ne suit pas toujours. Nous avons entrepris une politique de rééquilibrage des salaires et également des promotions et nous avons mis en place un système de suivi qui confirme ce rééquilibrage. D’ailleurs, le numéro deux du groupe BMS est une femme, une Française, Béatrice Cazala, qui vit à New York. Très concernée par ce sujet, elle le défend avec force. Nous sommes très vigilants sur les discriminations. Nous avons signé la charte de la diversité, entrepris des formations pour tous les managers et nos cabinets de recrutement ont pour mission de sélectionner les postulants sur la base de CV anonymes. Nous avons également adhéré à une association formidable Nos quartiers ont des talents. Elle parraine les jeunes des quartiers défavorisés, qui n’obtiennent pas de rendez vous en raison de la consonance étrangère de leurs
noms de famille. Très souvent, il s’agit de jeunes diplômés avec des bacs plus 4, plus 5, parfois plus 8. Notre entreprise compte plus de 180 parrains qui aident, suivent et assistent un jeune homme ou une jeune fille dans sa recherche d’emploi. Nous agissons aussi sur le handicap grâce à des activités de sensibilisation très fortes. Deux exemples. Nous avons monté dans notre auditorium, avec la compagnie Théâtre à la carte, un spectacle sous forme de saynètes pour expliquer ce que représente le handicap. Autre action concrète, nous avons fait venir Grégory Cuilleron. Ce jeune homme a participé à des émissions de télévision Un dîner presque parfait et Top Chef malgré son handicap
Ci-dessus : Dans un township de Cape Town (Afrique du Sud), grâce à l’ONG
Grandmothers Against Poverty and AIDS, des grands-mères s’unissent contre le sida, elles élèvent leurs petits enfants dont les parents sont décédés du virus.
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centres de traitements communautaires existent aujourd’hui dans les pays d’Afrique australe grâce au programme Secure The Future.
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pause s a nté Et la crise dans tout ça ? / Les politiques de responsabilité sociale n’ont pas été impactées par la crise, elles se sont même renforcées. Selon Novethic, le marché français de l’investissement socialement responsable est passé de 30 milliards d’euros en 2008 à 115 milliards d’euros en 2011. 77 % des consommateurs considèrent qu’il est important pour une entreprise d’être socialement responsable. Il ne s’agit plus de mesures cosmétiques ni d’un effet de mode, mais bien réellement d’une stratégie d’entreprise.
Ci-contre : Avec 2 700 collaborateurs en France,
Bristol-Myers Squibb France est la première filiale du groupe hors États-Unis.
au bras. Nous lui avons demandé de préparer un déjeuner pour l’ensemble des collaborateurs au restaurant d’entreprise. Il nous a expliqué que son rêve était de devenir cuisinier et qu’à aucun moment son handicap ne l’avait empêché de le réaliser. Nous avons tous été très impressionnés par sa détermination.
BMS est une entreprise de santé, que fait-elle en dehors de la médecine du travail pour la santé de ses collaborateurs ? Nous avons élaboré un programme d’accom pagnement avec des consultations gratuites de tabacologues pour les salariés qui souhaitent arrêter de fumer, des journées de sensibilisation sur l’hypertension artérielle ou de dépistage du diabète.
Santé du corps mais aussi santé de l’esprit puisque régulièrement des philosophes, des écrivains, des sociologues, interviennent dans vos locaux à Rueil-Malmaison. Pourquoi avoir organisé de tels débats ? 6 | S U P P L É M E NT D É V E L O PPE M E NT du rab le
Vous voulez parler des entretiens de Cristalia. J’en ai eu l’idée lorsque j’ai été nommé à ce poste, il y a 8 ans aujourd’hui. Je trouvais que l’on faisait beaucoup pour nos clients et partenaires, mais pas suffisamment pour nos salariés. J’en ai parlé au philosophe André Comte Sponville qui a accepté d’animer un premier débat sur le thème d’un de ses livres : Le capitalisme est il moral ? Je voulais offrir à tous nos collaborateurs une fenêtre sur le monde extérieur et leur permettre de nourrir une vraie réflexion personnelle. Ils sont réellement enthousiastes de participer à ces conférences et d’échanger avec des personnalités telles que Luc Ferry, Michel Serres, Yves Coppens, Erik Orsena. Le débat avec Michel Onfray a donné lieu à des échanges passionnants et à des prises de parole étonnantes avec la salle. Dernièrement, nous avons assisté à deux interventions remarquables, celle d’une journaliste du New York Times, Elaine Sciolino, et celle de Malek Chebel sur l’islam « éclairé ». Des invités très différents donc, mais à chaque fois nous faisons salle comble. Le public est également très éclectique, des services généraux à la présidence.
développement du rab le Sensibiliser les responsables économiques / L’Observatoire de la responsabilité sociétale des entreprises (association créée en 2000) fournit aux dirigeants, managers, responsables des relations humaines, des outils et des guides pratiques pour les aider à avancer sur le sujet. L’Observatoire édite également des ouvrages de qualité. À retenir, Le guide de la parentalité : promouvoir la parentalité auprès des salariés masculins. Plus d’infos sur www.orse.org.
Est-ce que La RSE s’intéresse à la formation des salariés ? Il existe bien entendu un service formation, mais au titre de la RSE nous avons formé en interne 12 apiculteurs et nous avons récolté 180 kilos de miel grâce aux ruches que nous avons installées au siège de Rueil Malmaison. Nous avons même réussi a organisé une distribution de miel pour nos collaborateurs.
Nous arrivons au cœur de notre discussion. Ces actions, aussi généreuses soient-elles, ne sont-elles pas ce que l’on appelle du greenwashing, des actions marketing pour se donner une image d’entreprise responsable ? Tout existe bien sûr, il ne faut pas se le cacher, mais j’insiste vraiment sur la sincérité de notre démarche. Nous ne nous contentons pas d’annonces, nous sommes sur le terrain en Afrique, en Asie. En interne, il est important que nos salariés soient heureux de venir le matin travailler et qu’ils soient fiers de leur entreprise. C’est vraiment le message de notre jeune président.
La crise est-elle une des raisons pour lesquelles les entreprises sont plus attentives ?
Ci-dessus : Des ruches
Pas du tout, au contraire. La crise est là depuis 4 ans et elle a pour conséquence de ralentir certains programmes. Mais nous assistons à un véritable bouleversement et à une prise de conscience. Je pense que nous ne travaillerons plus jamais de la même façon. Nous avons vu les limites du capitalisme financier à outrance. Comment ne pas réfléchir aux produits que nous voulons fabriquer, à la manière dont nous voulons les fabriquer et avec qui ?
12 apiculteurs ont été
ont été installées au siège de Rueil-Malmaison. formés dans le cadre de la RSE, 180 kilos de miel ont été récoltés.
Est-ce que les entreprises sont dans leur rôle quand elles interviennent sur la santé et le bien-être de leurs salariés ? Tout à fait. Elles doivent s’intégrer à la vie du lieu où elles sont implantées. Elles se doivent d’être citoyennes et leur croissance doit être respecteuse de la nature et des hommes. Sans être naïf, je crois que le moment est venu de s’orienter vers une société du partage.
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