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CHRONIQUE : DR. LAHCEN HADDAD, EXPERT BANQUE MONDIAL ET CONSULTANT
BlockChain aura certainement un impact énorme sur les technologies de l’information, l’internet des choses et l’économie en général. Cet article se concentre sur l’explication de la Blockchain et de ses usages ainsi que des domaines qui commencent à connaitre des bouleversements grâce au recours à cette technologie hautement innovante. Je finirai en présentant quelques pistes pour les gouvernements et les entrepreneurs afin de s’adapter et profiter des opportunités offertes par la révolution technologique induite par l’utilisation des chaines de bloc. La première conceptualisation de la technologie Blockchain a été formulée dans le «livre blanc» (https://bitcoin.org/ bitcoin.pdf) développé par Satoshi Nakamoto (une personne ou un groupe de personnes dont nous ignorons l’identité) en 2008 afin de s’assurer une base technologique fiable pour
*Consultant Banque Mondiale et écrivain Harvard Business Review.
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La révolution Blockchain : un autre sursaut de la quatrième révolution industrielle ?
la monnaie digitale, le Bitcoin, et éviter le problème de la «double dépense» ou l’utilisation de la monnaie numérique plusieurs fois. Grâce à l’utilisation d’un codage cryptographique et d’un système de validation distribué, comme on le verra plus en détail en bas, Nakomoto a pu mettre en place un système fiable et non-piratable des données. La technologie Blockchain stocke les données dans des lots appelés blocs et connectés les uns aux autres sous forme chronologique et sur une ligne continue en tant que série. Si vous modifiez un bloc particulier, vous ne le « réécrivez pas », mais le changement est stocké dans un nouveau bloc qui se trouve à la fin de la chaîne. C’est une sorte de livre de records financiers qui enregistre toutes les transactions financières et la date de leur exécution. Cependant, la « base de données en série est différente du grand livre traditionnel dont les données sont saisies sur papier ou sur ordinateur ou au niveau d’un système de base de données». Les données ne sont pas centralisées mais distribuées sur un vaste réseau d’ordinateurs éparpillés géographiquement et physiquement. La décentralisation de l’information rend tout tentative de falsification des données presque impossible. (Lucas Mustazo, https://www.youtube. com/watch?sns=em&v=3xGLc-zz9cA&app=desktop). Ainsi, la technologie blockchain génère de la confiance dans l’authenticité des données. Avant d’ajouter un bloc spécifique à la série, vous devez d’abord résoudre un puzzle chiffré et ainsi créer un nouveau bloc. L’ordinateur qui configure le nouveau bloc indique à tous les autres ordinateurs ce que l’on appelle la «preuve de travail». Une fois l’ensemble du réseau atteste que la « preuve du travail » est authentique, le bloc est ajouté à la chaine. Et parce que le processus nécessite un chiffrage mathématique et la confirmation de tous les autres ordinateurs et parce que chaque bloc est associé à celui qui le précède d’une façon organique, cela génère une confiance presque absolue dans la fiabilité des données. La technologie nous donne ainsi la possibilité de traiter les données directement et en temps opportun sans l’intermédiation des banquiers, des brokers financiers, des avocats, des notaires, des gestionnaires de réservation électronique ou des départements gouvernementaux chargés de l’enregistrement de la propriété, ou de l’authentification et le stockage des documents dans un registre central. (Lucas Mostazo, « What is Blockchain: the Best Explanation of Blockchain Technology » https://www.youtube. com/watch?sns=em&v=3xGLc-zz9cA&app=desktop). C’est la technologie utilisée par Nakumoto pour assurer une circulation fluide et sécurisée du Bitcoin. Parce que le Bitcoin est sécurisé malgré certains problèmes qui ont entravé son démarrage, sa capitalisation boursière à la fin de 2017 s’élevait à environ 237 milliards de dollars. Mais l’évolution de la technologie Blockchain ne se limite plus à la sécurisation des monnaies numériques comme le Bitcoin. Les soi-disant « contrats intelligents » (conçus par Nick Szabo, «Smart Contracts: Building Blocks for Digital Market » http:// www.fon.hum.uva.nl/rob/Courses/InformationInSpeech/ CDROM/Literature/LOTwinterschool2006/szabo.best.vwh. net/smart_contracts_2.html et “Formalizing and Securing Relations on Public Networks” http://journals.uic.edu/ojs/index.php/fm/article/ view/548/469 ) qui ont considérablement évolué après l’invention de la technologie Blockchain ont créé un sursaut important dans le domaine de la fiabilité des documents relatifs à la propriété privée et aux relations contractuelles entre les différentes parties. La technologie des «contrats intelligents» fonctionne d’une façon décentralisée et reste immuable et inaltérable car elle utilise la technologie des blocs en série. Imaginons qu’un groupe particulier vise à développer un projet et veut obtenir du financement via le « crowdfunding » (le « financement public » au lieu du financement bancaire classique) (« Smart Contracts : Simply Explained » https:// www.youtube.com/watch?v=ZE2HxTmxfrI&sns=em ). Avant, ils avaient besoin d’un intermédiaire (comme Kickstarter https://www.kickstarter.com) qui gère la relation entre les
développeurs (de l’idée) et les « supportes » (qui la financent). Si le but est atteint, l’argent est transféré par ce tiers partie aux développeurs,sinon, l’argent est retourné aux «investisseurs». Avec les « contrats intelligents » qui utilisent la technologie Blockchain, les développeurs n’ont pas besoin de Kickstarter ou d’un autre intermédiaire parce qu’un programme tel que Etheruem ( https://www.ethereum.org ) offre la possibilité de développer un « contrat intelligent » sans superviseur ni courtier ni risque de fraude. (Konstatinos Christidis et Michael Djevisakiotis, «Blockchains and Smart Contracts for the Internet of Things » https://ieeexplore.ieee.org/abstract/ document/7467408/ ). La technologie utilisée par la Blockchain entraînera une véritable révolution dans « l’Internet des Objets» et bouleversera de nombreux secteurs classiques tels que les banques, l’intermédiation financière, le supply chain, la logistique, la sécurité de l’information, les assurances, les transport, le stockage de l’information, la santé, la gestion de l’énergie, le commerce en détail, etc. Même les élections, l’industrie de la charité, le développement et l’entreprenariat social seront profondément affectés. «L’Internet des Objets» est un réseau de machines et d’outils domestiques et mobiles avec des programmes électroniques, des caméras, des microphones et des clips de signaux qui leur permettent de communiquer et d’échanger des informations. Plusieurs exemples comprennent des dispositifs médicaux qui sont placés dans le cœur humain pour suivre l’activité artérielle, des puces électroniques placées sur des oiseaux en voie de disparition, et des capteurs montés à l’intérieur des avions, des voitures et autres. Steve Huckle, Rituparna Bhattacharya, Martin White et Natalia Belovff dans un article sur « Internet of Things, Blockchain and Shared Economy Applications « (https://www.sciencedirect. com/science/article/pii/S1877050916322190) ont conclu que la combinaison de la «chaîne de blocs» et de « l’Internet des Objets» pourrait grandement contribuer à «développer des systèmes de performance parmi les pairs, des programmes d’échange, la gestion des droits numériques, le patrimoine et autres» grâce à des applications distribuées et non-centralisées. L’effet de la « chaine des blocs» sur des industries spécifiques et des secteurs multiples n’est plus à démontrer. Maximilian Friedelmaier, Andranik Tumasjan et Isabelle M. Welpe déclarent que «les startups basées sur la technologie Blockchain sont présentes au niveau de toutes les industries mais plus influentes dans la collecte de fonds, l’assurance, le réseautage et l’informatique» (« Disrupting Industries With Blockchain: The Industry, Venture Capital Funding, and Regional Distribution of Blockchain Ventures » https://papers. ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2854756). Tout cela signifie que le rôle des institutions économiques, financières et gouvernementales traditionnelles sera bouleversé, pour ne pas dire ébranlé, surtout avec le recours grandissant d’un grand nombre d’utilisateurs à la technologie Blockchain. Cette technologie peut donner un coup de fouet à la démocratisation de l’accès au financement de la part des pauvres, car elle éliminera les intermédiaires et permettra au grand public de commercer et d’échanger entre eux sans intermédiaires qui contrôlent les marchés, les transactions et les prix.
Il y a beaucoup de hype qui accompagne l’évolution de la technologie Blockchain, mais ce qui est certain et vrai est qu’elle créera une révolution en elle-même dans le cadre de la quatrième grande révolution industrielle. Certains pays, tels que les Émirats arabes unis, ont élaboré des stratégies pour les utiliser à diverses fins, y compris le stockage de documents officiels. Des gouvernements tels que la Géorgie, l’Estonie, le Royaume-Uni, Singapour et l’État du Delaware aux ÉtatsUnis les utilisent à diverses fins, y compris l’enregistrement et la gestion des terres, la gestion des services sociaux, le vote, l’accès aux services de santé, les transactions bancaires ou le stockage des contrats (Tan Wee Kwang «How are governments using blockchain technology?», https://www. enterpriseinnovation.net/article/how-are-governments-usingblockchain-technology-1122807855). Mais tous les États sans exception seront, tôt ou tard, obligés d’adopter de nouvelles lois pour faciliter l’utilisation de cette technologie et absorber la nouvelle réalité émergente de la Blockchain. Par ailleurs, les entrepreneurs devraient compter sur cette nouvelle technologie pour accélérer et optimiser leurs opérations. Les sociétés de sécurité de l’information peuvent utiliser le cryptage et la distribution sécurisée de la Blockchain pour obtenir une sécurité plus efficace pour leurs systèmes d’information. De même pour une livraison rapide et traçable des produits au niveau logistique et de la supply chain, ou par rapport au transport participatif, qui peut fonctionner sans intermédiaires. Laa gestion de l’approvisionnement énergétique peut se faire sans la présence d’une entité qui exploite le réseau d’électricité et se charge de la distribution, et ce, grâce à la technologie Blockchain. (Future Thinkers, « 19 Industries Blokchain will Disrupt », https://futurethinkers.org/industries-blockchain-disrupt/). Cela signifie qu’un changement grandiose aura lieu dans la façon dont certaines entreprises, entrepreneurs et institutions publiques fonctionnent. Certains d’entre eux sont appelés à changer leur modèle économique et leur mode de fonctionnement. Les entrepreneurs ont besoin de mieux s’imprégner des avancées de cette technologie et d’examiner comment ils peuvent en bénéficier et élaborer des plans d’adaptation et de changement pour l’avenir. S’ils ne le font pas, ils risquent de disparaitre, mais s’ils le font, ils seront précurseurs et pionniers dans un domaine révolutionnaire fort prometteur. LA TECHNOLOGIE BLOCKCHAIN GÉNÈRE DE LA CONFIANCE DANS L’AUTHENTICITÉ DES DONNÉES.
La version originale de cet article a été publié par Harvard Business Review le 2 mai 2018 sous le titre : لحسن حداد كيف يمكن لرائد الأعمال أن يستفيد من ثورة البلوكتشاين Tous les droits sont réservés à Harvard Business School Publsishing Coproration.