Hildegarde n°19 15 Février 2018

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Fanzine Hildegarde


Sommaire couverture : That's why you'll have to kill your father, Par Le Champ Clos

Edito /,P. 3 Valfretin / p.4 Helios Trivum, le Grimoire / p.5 Marie Hélène Gauthier, Le chemin de Damas et ses conditions modernes / p.11 Nils Bertho, le Château de l'avocat vaudou / p.16 Kenny Ozier et Jean Kiboi, Un lézard / p.18 Clovis trouille / p.20 Philippe Magnier et Christophe Guillouet /p.21 Calendrier Lunaire, poster à détacher Février : Chloe Schuiten et Marine Debilly Cerisier / p.22 Mars : Deedee DeMille / p.23 Sally Mara, On les emmerde tous /p.24 Emilie M'Gabo, Poussin p.26 Marine Aïello, vie et mort d'un alchimiste / p.28 La Machine, problème réaction solution / p.29 Claire Morel, 4 vertus cardinales / p.30 Ness, 15 ans /p.32 Céline Maltère et Audrey Faury, Nativité /p . 33 Sevastiani Bogiatzoglou -texte original et traduction /p.35 Sandy Ott, extrait du recueil Dealane /p.37 Les grenouilles qui demandent un roi, Jean de Lafontaine /p. 39 Domenica di Donato, ce matin là /p.41 A Pierre / p.42 Contact / p. 43 Rabi Wakid, Fonte Vivi / p.44

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Edito Quand je suis bête, Je ne vois que deux types de personnes Ceux qui croient en l'existence de la vérité Et les autres.

Populie

Harry Clarcke illustration de Tales of mystery and imagination, Edgar Allan Poe (1889-1931) Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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Valfretin Fanzine Hildegarde n°19 / 15 FÊvrier 2018

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Helios Trivum Le Grimoire

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Illustrations Harry Clarcke

« Je vais T'accompagner, Seigneur. » lui dit Napellia avec douceur. Elle se leva et aida l'Ancien. Elle lui tenait le bras. Lentement, ils marchèrent vers l'ouverture qui conduisait à l'océan. Devant eux, le rivage était couvert par une brume épaisse. Ils continuèrent à marcher le long du rivage silencieux. Deux serpents aquatiques les suivirent avant de disparaître sous un rocher. Napellia aida l'Ancien à s'asseoir sur une pierre couverte d'un lichen marin. Elle tenait toujours son bras. « Je sens que je ne peux pas aller plus loin mais je vais attendre ici jusqu'à ce qu'Elle vienne. » lui murmura doucement Napellia. L'Ancien était assoupi mais elle sentait que ses bras et son corps tremblaient de plus en plus. Elle lui donna une accolade et l'embrassa. « J'aime toutes les fleurs de Ton jardin. Je T'adore aussi. » lui-dit elle. Napellia aurait voulu rester plus longtemps mais elle ressentait sans aucune ambiguïté qu'elle *devait* maintenant partir. La brume environnante créait une ambiance surnaturelle et indicible. Au-dessus de ce qui était supposé être l'Orient, un croissant de Lune


rubis s'était levé. Une silhouette féminine marchait vers l'Ancien qui était assoupi. Au-dessus de l'horizon oriental, le croissant de la Lune montante brillait d'un éclat écarlate. La lueur de la Lune permettait à peine de révéler ses traits. Son visage semblait sans-âge mais très pâle avec des boucles peintes autour de ses yeux et des symboles dessinés sur les joues. Ses lèvres étaient noires, tout comme ses long cheveux ondulés qui se dissolvaient dans le voile nocturne qu'elle portait. Elle donna un baiser sur le front de l'Ancien et le prit dans ses bras. L'Ancien était immobile. « Mon Empereur et Fils... » murmura-t-elle. Napellia pensait à la dernière soirée autour de la table heptagonale. Avant qu'il ne s'endorme, le jeune chevalier lui avait parlé de la Citadelle. Celle-ci possède de nombreuses entrées et de nombreux murs concentriques. Elle existe dans chaque univers. Le chevalier avait une fois visité la Citadelle Solaire mais il n'avait pu franchir le hall du Miroir. Elle se souvenait clairement de tous les mots de celui-ci, qui était habillé de noir et d'argent. « Au centre de la Citadelle se trouve le Jardin aux Roses. » murmura-t-elle. Sophia, qui savait à quoi Napellia pensait (comme la plupart du temps), lui dit : « Il y a aussi des chemins qui, à partir de l'Observatoire, mènent à la Citadelle mais ils conduisent au côté Nocturne. » Napellia eut un sourire discret. « Le côté Nocturne apporte aussi une grande sagesse à celui qui peut franchir la Porte de Plomb. La Prêtresse m'avait donné une fiole de brume. J'ai l'impression qu'elle est de la plus grande utilité lorsque l'on s'approche de cette Porte. » dit-elle à Sophia. La voiture de la formation (artistique et musicale) "Les Soleils de Nuit", qui se présentaient aussi en concert sous le nom de "Solénacées", approchait des confins d'Héliopolis. Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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« Je dois visiter la Vieille Dame vers midi, je dois descendre près de la Riviére-aux-Trois-Flots et ensuite marcher jusqu'à sa maison. » dit Napellia aux autres. « Donne-lui nos plus profondes salutations. » répliqua le Chamane. Napellia descendit de voiture et marcha sur un sentier bordé par des buissons. Elle connaissait ce lieu mais cette fois-ci ces buissons épineux portaient de nombreuses baies noires et rouges bien appétissantes et elle ne put résister d'en cueillir quelques-unes. La maison de la Vieille Dame n'était pas visible depuis le sentier principal. Il y avait un croisement auquel se trouvait une pierre entourée de Datura, les Pommiers épineux. « Voila une vraie manière de souhaiter la bienvenue aux Soleils de Nuit! » pensa Napellia. La branche latérale du sentier était souvent gardée par des fougères et des orties et elle conduisait à une zone marécageuse. Les marais sont toujours pleins de vie et leur terre boueuse possède des propriétés régénérantes des plus extraordinaires. Tout comme les rivages, ils sont à l'interface entre la Terre et l'Eau. La Vieille Dame avait dit à Napellia que près du marais se trouvait une ancienne fontaine à argile. Mais cette argile accomplissait ses merveilles seulement la nuit lorsque l'on dort et l'on rêve. Napellia trouva facilement la maison de la Vieille Dame et frappa à sa porte. A chaque fois qu'elle venait ici, le bois de la porte semblait lui montrer de nouveaux motifs. « Bonjour Napellia! Je suis dans le jardin. » Napellia franchit un petit porche ouvert décoré avec des rosiers grimpants. La Vieille Dame cueillait les fruits de ses arbres et avait déjà un panier empli de pommes rouges. « Elles ont l'air fantastiques! Puis-je en goûter une ? » demanda Napellia. « Bien-sûr! » Elle prit une pomme du panier. « Elle est aigre-douce. Elle laisse une sensation indéfinie de bien-être ! » dit Napellia. « Oui, ce sont en vérité des pommes sauvages, une variété que l'on ne trouve qu'aux alentours. La Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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graine de ce pommier fut plantée par la famille du Philosophe. La récolte de cette année semble être plutôt intéressante. La Vielle Dame donna à Napellia ce qui semblait être un couteau dont la lame était faite d'obsidienne. « Vas-y, coupe une pomme ! Tu vas être surprise. » Napellia prit le couteau et sépara une pomme en deux moitiés, horizontalement, pour en révéler le compartiment en forme d'étoile qui contient les graines. « Mais c'est une étoile à sept branches ! » dit Napellia. « N'est-ce pas ? » répondit la Vielle Dame qui ajouta: « Ces pommes ne sont pas les plus communes. Comme tu peux le voir elles sont des images de celles du Jardin de L'Impératrice. Elles portent Son symbole. La Vielle Dame invita Napellia à prendre une tisane à l'intérieur. Elle prit le panier de pommes et elles allèrent toutes deux dans la pièce principale de la maison en bois. Un petit serpent argenté s'était enroulé près d'une pierre dans le parterre où les rosiers poussaient. « Elle est ma voisine la plus proche. » la Vielle Dame riait. « Il y en a un autre avec des écailles vertes. Il doit bien être quelque part. » elle ajouta. Napellia regarda le serpent argenté et sourit. « Elle est certainement heureuse dans votre jardin. » Elles arrivèrent dans un grand salon bien rangé, sans chaise mais avec des coussins sur le sol. Un grand placard se tenait contre un mur. « S'il te plait prend place autour de la table. Je vais à la cuisine pour préparer de l'eau pour la tisane. » La Vielle Dame partit. L'air était rempli d'une fragrance florale indéfinissable. A coté du placard se trouvaient des étagères de livres. « C'est vraiment un endroit agréable. » Pendant que la Vieille Dame était à la cuisine, Napellia décida de jeter un œil aux étagères de livres. Certains des volumes étaient écrits à la main et d'autres imprimés. Elle prit un volume manuscrit et l'ouvrit au hasard : • III° Les Voies de la Citadelle • “Les Portes d'Héliopolis. Sept bougies grises le Jour de Saturne dans le Cercle Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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un soir de brume. Racines de Pommes-épineuses, racines de Houblon. Parle à la Déesse Triple. Elle connait le chemin. Napellia remit le livre. « Il y a donc un chemin vers la Citadelle à partir d'Héliopolis. Je dois en parler à Sophia ! » pensa-t-elle. La Vielle Dame revint avec une bouilloire à tisane. « Quelle est ta tisane préférée ? » Napellia lui sourit. « Je crois que je sais. » répondit la Vielle Dame. La Vielle Dame alla à son placard et ouvrit un tiroir contenant de petits sacs d'herbes et de fleurs séchées. « Les voici. » Sur les étagères du dessus elle prit deux coupes en grès avec de petits bas-reliefs montrant des motifs serpentins, et elle les plaça sur la table. « Ces tasses sont absolument exquises ! » s'exclama Napellia. La Vielle Dame revint au tiroir du bas de son placard et prit les sacs d'herbes séchées. « Fais ton propre mélange, chère Napellia. » Elle pouvait reconnaître plusieurs plantes et racines. Elle pensa alors à Asphodel, le sage barman de l'Oniria Gothic Venue qui avait l'habitude de mélanger des plantes sauvages pour les soirées des membres du samedi. « Ça va faire une tisane plutôt extraordinaire ! » pensa-t-elle. Les herbes infusaient dans l'eau des coupes serpentines. La Vielle Dame souriait doucement à Napellia. « Veux-tu aussi goûter de la tarte que j'ai faite ? Il en reste. » demanda-t-elle. « Absolument ! Elle est faite avec les pommes de votre jardin ? » demanda Napellia. « Bien-sûr! » répondit la Vielle Dame qui s'en retourna dans sa cuisine. Napellia pouvait sentir le parfum subtil des herbes qui infusaient. La Vielle Dame revint en portant un plateau de bois sur lequel se trouvaient deux morceaux de tarte aux pommes en forme de croissants de Lune. Elle posa le plateau sur la table et s'assit sur un coussin. « S'il te plait, chère Napellia, prend une part de tarte. » La fille aux longs cheveux noirs ondulés prit un croissant de tarte et remercia la Vielle Dame. « Nous pouvons maintenant commencer à boire la tisane. » ajouta cette dernière. Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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La tarte sucrée aux pommes acidulées se combinait parfaitement avec l'amertume légère de la tisane. « J'ai mis du miel cru dans la tarte. » dit la Vieille Dame. « Et j'ai aussi ajouté de la confiture de framboises sauvages sous les pommes. » La tarte était un véritable enchantement. Napellia commença à siroter la tisane. « Je vais maintenant aller me reposer un peu. Tu peux rester autant que tu veux ici. Fais comme chez toi ma chère Napellia! » La Vielle Dame mit sa tasse vide sur le plateau de bois et s'en alla dans sa cuisine. « La Vieille Dame est si gentille! » Napellia finit le reste de la tisane et pensa à ce qu'elle avait lu sur la Citadelle. « Jetons à nouveau un œil dans ce livre! » se dit-elle. Elle revint aux étagères de la bibliothèque et retrouva le livret écrit à la main qu'elle avait regardé plus tôt. « Il semble que la Vieille Dame sait beaucoup de choses sur la Citadelle. » Napellia prit à nouveau le manuscrit et s'assit sur un coussin près de la table. « La Citadelle se reflète sur les eaux de la conscience. Elle existe dans chaque monde manifesté. Elle possède de nombreux murs et de nombreuses entrées. » Sur la table, les deux serpents du motif de la coupe de la tisane étaient maintenant vivants. « Bonjour à vous deux ! » leur dit-elle. A suivre./.

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Le Caravagge La conversion de Saint Paul (entre 1600 et 1604)

Marie-Hélène Gauthier Le Chemin de Damas et ses conditions modernes

« La vérité est que les Français d’hérédité catholique, que les désaffectés du catholicisme qui se croient le plus loin de la croyance de leurs ancêtres, ne sont séparés de celui-ci que par un mince rideau, qu’ils prennent pour un mur blindé… Ce mince rideau, qui sépare de la foi les hommes de tempérament catholique, n’a jamais été plus flottant qu’à notre époque, où d’une part, la surabondance des notions, la suractivité intellectuelle provoquent et nécessitent des crises du sensible, – où d’autre part la cause de la Religion et celle de la Race apparaissent comme inséparables. C’est pourquoi le chemin de Damas n’a jamais été plus fréquenté, plus carrossable. Je prévois que beaucoup de nos contemporains s’y engageront en automobile. Le goût effréné de la vitesse s’appliquera même à la conversion. » Léon

Daudet,

Le

chemin

de

Damas,

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avril

1903

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« La plupart des gens désirant se convertir au catholicisme, font cette démarche par rejet de la société moderne, ils ne vont naturellement pas être séduits par l'Eglise conciliaire qui est, en exagérant un peu, une excroissance du cosmopolitisme mondial (…) Faut bien comprendre que pour beaucoup d'entre nous souhaitant recevoir le baptême, venons de milieux anticléricaux, anti catholiques, de gauche... Et avons été " dressés" à détester les catholiques et à moquer leur austérité apparente. Les personnes sur le chemin de la Vérité, iront directement chez des traditionalistes, c'est à ce moment qu'arrive la confrontation entre la provenance sociale du pré-néophyte et le "milieu tradi (…) En résumé, les communautés de catholiques traditionalistes, devraient, selon moi, être aux petits soins des nouveaux venus, ils sont très loin de s'imaginer le chemin extraordinaire qu'empruntent ceux qui désirent devenir catholiques. Ils ne se rendent pas compte, et c'est normal, que des types comme moi, nés et élevés dans une banlieue française sordide, dans une famille de gauche anticatholique, ayant écouté du rap, éduqués dans les écoles laboratoires de la république, ayant voulu émigrer vers les Etats-Unis par haine de la France...etc, ne sont pas prédestinés à retourner vers le Christ. Nous venons du bas et devons monter la pente. » Témoignage

trouvé

sur

Facebook

le

31/10/2017

***** J’en ignore le nombre mais j’ai eu l’occasion d’en rencontrer virtuellement cet automne d’où l’idée de ce texte : les nouveaux convertis - à l’image de Saint Paul passé du pharisianisme au christianisme qu’il combattait jusque là - lorsqu’ils passent de l’autre côté du miroir, comme ce sont des personnalités entières et passionnées, ils vont au bout des choses. Ils se tournent généralement vers l’église catholique (je parle du Catholicisme, c’est ce que je connais le mieux et elle est particulièrement honnie tout de même) mais pas l’église catho gentillette qui fait Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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des happenings dansants en entonnant des chants gospel en tapant des mains dans les églises pour bien montrer qu’ils sont ouverts à tout. Non, les « nouveaux Paul » eux, se tournent vers le Catholicisme traditionnel, celui à chapelets, à curé en cols romains, à rogations et attaché à la messe en latin. Et pourquoi donc, sinon peut-être par esprit de provocation ? C’est là que les « conditions modernes » interviennent : internet. Cette invention, probablement destinée à abrutir les masses à coup de sites de scandales, de consommation en ligne, de ragots et de pornographie a accompli en partie sa mission. Sauf que, panique générale chez nos prescripteurs d’opinion : internet sert aussi à diffuser des informations et des informations que nos « grands médias » ne diffusent pas et nos Paul de Tarse modernes ont décortiqué, recoupé, mis en perspective toutes les informations, un procédé décuplé lorsque on peut lire dans plusieurs langues, en particulier l’anglais, la langue de « l’Empire ». D’ailleurs, à la Pentecôte, lorsque Dieu envoie l’Esprit Saint aux apôtres, ceux-ci se retrouvent également polyglottes… Certains, d’une grande curiosité, lisent aussi des livres sur la question car selon eux, une certitude s’impose : il y a depuis longtemps un complot contre la chrétienté et l’on a éloigné les gens de ses valeurs pour leur faire accepter le grand désordre moral, sexuel et économique que nous connaissons actuellement. La déliquescence morale et le relativisme des prélats tombaient aussi à pic! Car en plus, les nouveaux convertis ne se contentent pas d’égrener le chapelet ou de déplorer l’avortement, ils se renseignent sur le fonctionnement de l’économie et réalisent que tout est fait pour que l’on s’endette de plus en plus et qu’une poignée de gens possède une très grosse proportion du magot. Et ça, si des bons économistes non croyants comme Bernard Maris l’ont compris, des catholiques l’ont compris aussi.. C’est le cas de Pierre Jovanovic par exemple, un journaliste spécialisé dans la finance. Ca a été aussi le cas d’un révérend catholique irlandais, Denis Fahey (1883/1954) que j’ai découvert il y a peu (grâce à un « Paul de Tarse » d’aujourd’hui) et qui a imaginé un modèle social basé sur le catholicisme différent du libéralisme comme du communisme. On pourrait citer aussi Alexandre Douguine, orthodoxe, qui a théorisé une « quatrième économie politique » Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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qui fait la synthèse entre conservatisme et socialisme. Et la souplesse d’esprit de ces nouveaux convertis fait qu’ils passent aussi par des penseurs de gauche comme Jean-Claude Michéa par exemple pour essayer de trouver la vérité, et qui aboutit, avec un prisme a-religieux, au même constat. C’est ainsi qu’un jour, ils tombent de leur cheval : si les super riches n’aiment pas le catholicisme, c’est qu’il doit y avoir quelque intérêt à voir de plus près ce que cette religion apporte comme message au delà de l’Inquisition, les Croisades et le train de vie scandaleux de certains ecclésiastiques. Certains font un virage à 180° et passent du communisme parfois la tendance la plus fidèle à la grande époque des régimes que « les pays du Bien », les Etats-Unis en tête, ont utilisé comme épouvantails aux peuples pour qu’ils se tiennent tranquilles pendant des décennies - au catholicisme, ou imaginent une combinaison entre les deux… Au fond, on change simplement de religion et le marxismeléninisme étant très iconique, cette idéologie fait l’objet pour certains d’une vraie dévotion avec ses figures tel que Lénine, Marx, Engels… comme autant d’icônes… « l’athéisme est une idéologie impossible (et c’est quelqu’un qui a été athée pendant une grande partie de sa vie qui le dit); Rien ne vient de rien (Ex Nihilo nihil fit). Cela clos le débat. Je ne vois l’athéisme ni comme progressiste ni comme nécessaire pour la construction du socialisme. » (témoignage trouvé sur Facebook) Pourtant l’athéisme est l’un des piliers du marxisme-léninisme mais certains ont du comprendre avec justesse que le christianisme c’est également la défense du pauvre, du faible, des valeurs de partage avec en plus, une dimension transcendantale. Et les nouveaux convertis le comprennent bien mieux que bien des « catholiques » bien installés avec leurs certitudes dans leurs manoirs, leur patrimoine familial conséquent, qui ont fait énormément de mal à la foi chrétienne en Occident. Mais, si nous sommes bien éloignés d’une époque où des moines en robe de bure parcouraient les routes européennes un livre enluminé à la main, de nos jours, sous des oripeaux Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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technocratiques, équipé d’un smartphone, d’un ordinateur et empruntant les lignes aériennes, on peut être mus par un désir de transmettre la vérité évangélique et d’avoir soif de vérité. D’autres, moins dotés en moyens technologiques et matériels, vont néanmoins trouver des moyens plus modeste d’agir, en premier lieu de tourner le dos à la consommation effrénée et aux injonctions médiatiques qui rendent hystérique, névrosé et ignorant. L’important est de suivre le logos. En lisant ces lignes, certains vont craindre que nos nouveaux convertis soient des opportunistes, des gens irrationnels aux passions violentes, qui changeront à nouveau d’avis dans quelques mois ou quelques années, mais il est néanmoins troublant de constater que dans les milliards de kilomètres des circuits électroniques, au coeur de ce web conçu et promu par des transhumanistes et des globalistes, des anges plaisantins se soient glissés dans les circuits, ce qui peut rappeler cette belette, petit animal facétieux, qui a enrayé le fonctionnement du grand collisionneur de hadrons en avril 2016…/.

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Nils Bertho, le château de l'avocat vaudou Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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Hévélius, Selenographia, 1647

Gengis Kant, 2017

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Keny Ozier

Un lézard

Y'a un lézard avec les putes un lézard avec les dieux les prêtres les maçons les franc-maçons les mioches un lézard avec les coiffeuses aux ongles verts un lézard avec les bouchers qui regardent la viande d'un air inquiet comme si … elle allait bouger d'un coup y'a un lézard avec les menuisiers les électriciens les BM oué y'a un lézard avec les mathématiques chrétiennes les insectes pornographiques un lézard avec le boudin noir le boudin blanc un lézard avec les sorciers les naguals Castaneda y'a un lézard avec rêver montrer qu'on rêve s'assoir sur une chaise faire le rêve du pendu rêver comme nouer dénouer renouer une natte de fillette de la rue mal propre genoux noirs y'a un lézard avec dire " ta gueule, je mange" avec répéter " je ne suis pas là, je tombe " … les étoiles ne s'éteignent pas toutes seules ... Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

Jean Kiboi

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y'a un lézard avec la nuit ! un lézard qui fait la nuit quoi faire avec tes yeux y'a un lézard qui te fait dire " sales cons " aux employés du ciment de l'immobilité des silences y'a un lézard avec la vie on en parle pas assez ... Y'a un lézard avec vivre c'est le tambour c'est le poumon c'est le sang qui noir qui rouge te suce de l'intérieur y'a un lézard avec vivre et s'arrêter avec les cadavres et les poupons y'a un lézard avec naître renaître ce sont les mamelles ce sont les cuisses et le petit petit bout d'agneau rose et tendre qui flotte entre ces cuisses ... y'a un lézard avec la vie les cris le premier le dernier y'a un lézard avec la vie c'est sourire mourir ... le vieillard qui rit dans les ténèbres, ne l'avez-vous jamais vu ? ses dents mi noires mi blanches ses dents toutes molles et moches y'a un lézard avec la mort c'est s'écraser devant le diable baisser les yeux regarder ses souliers s'excuser dire " pardon monsieur pardon je faisais que passer " ./.

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Clovis Trouille (1889-1975)

Stigma Diaboli : Le Grand Inquisiteur (Ayant les traits d'André Breton)

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Philippe Magnier

Au tout commencement, le ventre d'une femme et un enfant qui mâche son naître... Dans ce lieu , l'être écoute , cherche, caresse ... Au commencement, le verbe est chair ... Il est nu dans ce marécage du commencement, il respire le souffle ... Dans cette chair , il prend couche ! Dans ce noir, il se façonne; il mouille en mère ... Il marine, elle couve ... Le foetus monte en chair, dedans; et dehors ? L'ouvrage d'une mère tombe de la lune, la marée de la vie, et il chemine vers la mort... Naître, c'est mourir ! Et de cette poussière , une étoile est née dans le ventre de l'univers .../.

Christophe Guillouet, Figures du hasard. Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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PHASES DE LA LUNE FEVRIER/MARS 2018

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Chloe Schuiten (dessin) et Marine Debilly Cerisier (texte)

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Mars 2018 Fanzine Hildegarde n°19 / 15 FÊvrier 2018 Par Deedee deMille

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Sally Mara On les emmerde tous Le voile qui "fait débat", le juif agressé parce que juif, le noir qui se prend des vannes sur sa couleur de peau, la femme qui est une victime universelle, le gay qui réclame plus de droits, le musulman amalgamé à tort, l'handicapé qui ne baise pas, l'homme blanc prédateur, l'usager pris en otage... Une galerie de personnages formatés venus du monde de la tévé pour semer la discorde entre ceux qui prennent tout ça au sérieux.

Heureusement : ça nous fait marrer, ça nous sauve la vie. On se marre parce que nous ne sommes pas ces caricatures grotesques, réduites et triées comme du linge en fonction d'une caractéristique physique. Oui, c'est vrai, on les emmerde tous, ceux qui savent pleurer devant les caméras. Nous on ne sait pas faire ça, on ne pleure que dans le secret de notre coeur.

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Fucking Rocket

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POUSSIN Emilie M'gabo Mardi 26 avril. 11h39, Mirepeix. Poussin, J’étais en train de rincer ton blaireau, ce matin, quand j’ai réalisé que je ne t’aimais pas. Je ne m’y attendais pas, ça m’a vraiment surprise, tu n’imagines même pas. Je voulais faire un tour au pressing, chez Dalier, pour la veste de ta mère. Je n’avais pas prévu de te quitter un jour. C’est étrange. Je ne t’aurai même pas dit au revoir, tout à l’heure. Tu venais de partir lorsque je suis entrée dans la salle de bain. Ça sentait le Synthol. Ta buée sur le miroir, le robinet gouttait, ton marcel chiffonné sur le carrelage trempé. Cette drôle de lumière rosée, presque dorée, tapant aux jalousies. Il allait faire si beau. J’ai passé ma robe rouge et collecté tes poils qui gisaient ça et là. L’araignée est revenue, je l’ai encore tuée. J’ai remis le savon à sa place, sous la glace. J’avais vraiment bonne mine, j’ai jeté l’anticernes. La lumière rosée virait à l’orangé et tu avais vidé le fond du dentifrice dans le lavabo. Je présume que j’allais me dire à cet instant que je me brosserais ce midi ou ce soir, c’était pas grave, au fond. J’ai eu comme une absence... J’avais enfin trouvé ton si joli blaireau au fond du verre à dents où tu le mets souvent. J’avais donc entrepris de le passer sous l’eau lorsqu’il m’a échappé, tapant sur la faïence et roulant sur ma robe avant de s’écraser juste sur mon pied gauche. Je venais de me faire les ongles, quand l’araignée est morte. C’était pas sec. Alors j’ai demandé calmement au blaireau s’il se foutait de ma gueule. Poliment, sans m’énerver, juste comme ça, pour savoir. Il s’est étalé un peu plus, à son aise. Puis il s’est appuyé contre mon gros orteil et a secoué ses poils tout Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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englués de mousse. J’attendais, je ne disais rien. Là, il m’a regardée bien en face, dans les yeux. Et il m’a dit OUI. Alors je ne me souviens plus. Je revois la lumière à travers la fenêtre, cette touffe de poils sur le carreau brisé et le savon partout collant aux jalousies. Je crois que j’ai dansé. Il faisait beau beau beau, tellement beau, c’était beau. Le blaireau s’était tût, j’avais dû le tuer. Et j’ai pensé à toi. Tu allais le défendre. Tu rentrerais ce soir et tu voudrais comprendre. -« Qu’est-ce que tu lui as fait ? Mais qu’est-ce qu’il t’avait fait ? Mon blaireau, mon blaireau… »-Tu comprends, mon poussin, tu ne m’aurais pas crue, tu m’en aurais voulu, n’est-ce pas ? Alors je suis partie. J’ai pris la Laguna, repassé ta chemise et mis dans l’habitacle tout ce qui était à moi. J’ai oublié d’éteindre le feu sous la bouilloire mais ça n’était pas grave car tout avait déjà sûrement bien brûlé lorsque j’arrivai à la BNP pour clôturer nos comptes. Je n’avais pas prévu de faire ça aujourd’hui, j’étais tellement surprise. Pense à chercher le chat. Et la veste de ta mère, chez Dalier, au pressing. Je ne peux pas y aller, je ne reviendrai jamais, tu sais ? Et je t’embrasse. Poupine. ./.

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Marine Aïello Vie et mort d'un alchimiste (Retranscription du début de la conférence Naissance et Renaissance de P. Burensteinas)

Qu'est-ce que la vie ? Qu'est ce que la mort ? Dès que l'on naît on n'est plus. Naître = n’être= non-être On vit, on meurt, on vit, on meurt, jusqu’à être de nouveau. On dit que le contraire de la vie c'est la mort, mais le contraire de la naissance c'est quoi ? Peut-être que l'on ne fait que naître une fois et que le contraire de la naissance c'est être. Et peut-être que finalement naître c'est se couper de quelque chose, de cette espèce d’unité, cette espèce d’univers. Et c'est sans doute ce qui nous rend malheureux. On a l'impression d’être fractionné, coupé de quelque chose. Et la question c’est comment retrouver cette unité ? Cet univers où nous sommes tous unis vers… Peut-être que la peur de la mort est la peur du fractionnement, d’être coupé. Mais si la mort c’est l’âme hors, ce n'est jamais qu’un changement d’état. Ce véhicule que nous avons dans ce monde est très temporaire, on le quitte comme on quitte une voiture, mais ce n'est pas pour autant que le conducteur disparaît. C'est peut être là la clé. La mort est une clé très intéressante. Quand on arrive dans ce monde on apparaît et quand on quitte ce monde on disparaît, on ne fait donc que paraître ? On est quand ? Peut-être qu'on naît quand on est. Le mot mort : le M est une femme qui accouche Le O c’est l’élément eau Le R l’élément air Et le T l’élément terre. Il manque le feu. Et c’est ce qui arrive quand on est mort. Feu mon grand-père. Et c'est sans doute pour ça qu'ici on s’éteint./.

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La Machine Fanzine Hildegarde n°19 / 15 FÊvrier 2018

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4 Vertus Cardinales Claire Morel La Prudence

La Force

La Tempérance

La Justice

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Dans la vie, il y a toujours des moments qu'on veut effacer ou réécrire, des lieux qui t'obligent à y revenir, une chanson qui te fait rappeler tant de choses, un moment qui restera dans ta mémoire pour longtemps, il y aura toujours des instants, des personnes qui changeront ta vie pour toujours. Il y a ceux qui laissent des empreintes dans ton cœur et ceux qui y laissent des petits souvenirs. Dans la vie tu vas avoir des regrets, tout le monde en a un jour. Comme je l'ai dit, il y a toujours des moments qu'on veut effacer ou réécrire. Tu ne t'es jamais dit "et si?", mais tu vois les regrets ce ne sont pas que des erreurs, ce sont également des leçons de vie, elles nous font survivre à des choses dont nous n'avions même pas idée. Ce sont ces regrets qui nous font nous lever chaque matin pour arranger, changer, améliorer les choses. Ouais, tout le monde à ses regrets. Une histoire d'amour mal fini, une dispute avec un ami, des paroles blessantes lâchées par la colère d'un proche, un refus, une mauvaise décision, un avenir mal défini... Mais l'important c'est de reconnaître que l'on en a, que malgré ça la vie continue et que tout va bien. L'important au fond, c'est d'affronter ses regrets du passé et de sourire à l'avenir. Quoi ? Tu n'es pas d'accord ? Tu préfères continuer à t'enfoncer jusqu'au jour où tu feras le geste de trop c'est ça ? Mais écoute moi, il te reste toute ta vie à vivre, que tu le veuilles ou non. Et c'est en ce moment que tout se joue, tu peux choisir de croire que le destin est responsable de tous tes malheurs et que tu n'as pas eu de chance ou tu peux choisir de te battre. Dans le monde réel la vie ne sera pas toujours juste, elle mettra peut-être fin à certaines choses et tu pourras toujours lire des anciennes conversations, regarder des photos du passé et pleurer jusqu'à en inonder ton coussin mais ce n'est pas ça qui changera les choses, la vie elle t'enlèvera peutêtre des personnes à qui tu tiens plus que tout et tu pourras Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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toujours te blâmer de ce que tu n'auras pas pu faire, te révolter, hurler, détester le monde entier, te détester. Tu pourras toujours t'infliger cette douleur comme quelque chose de mérité, mais ça ne fera revenir personne. C'est la vie, elle te donne des raisons de pleurer et des raisons de rire, parfois elle te fait boire la tasse et tu crois que tu vas mourir, puis elle te rattrape par les cheveux et te dépose plus loin. Parfois elle t'écrase et peut devenir ta pire ennemie, elle te met des bâtons dans les roues, elle te plante des couteaux dans le dos, tuer des gens que tu aimes par dessus tout, des personnes en qui tu ne pourras plus jamais avoir confiance, elle peut te briser en mille morceaux, te décevoir, te donner envie de crever, et toi? Tu vas la laisser faire, mais ce n'est pas ça la solution ! Tu ne peux pas continuer à pleurer dans ta chambre en accusant les autres, en buvant, en prenant des médicaments pour amortir le choc. Je sais ce que tu me dis, que personne ne peut remarquer ce qui est en train de se passer dans ta vie, que tu es seule, parce que c'est comme si tu recevais des électrochocs tellement fort que ça te fait sursauter la nuit, dans ta tête tu cries à en crever, tout bascule, tout chamboule, tu te questionnes, tu rêves d'une vie plus féerique, plus belle mais maintenant je vais te dire, le bonheur il peut se trouver dans les moments les plus inattendus et pour être heureux il faut savoir prendre la vie comme elle vient, sans réfléchir il faut savoir franchir les épreuves qu'elle t'envoie, pour te rendre plus fort. Faut lui montrer que malgré tout ça tu ne baisseras pas les bras, que tu ne perdras jamais espoir. Tout le reste de ta vie dépend de ce que tu fais en ce moment, des rêves que tu poursuis, des décisions que tu prends et de la personne que tu choisis d'être, il te reste toute ta vie à vivre, c'est long mais aujourd'hui est un nouveau départ alors vis pour de vrai./. Ness, 15 ans

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Nativité Lorsque j’ai rencontré la vierge des machines, j’ai parié trois jetons, sûre de la féconder, de voir germer sur elle mille pézizes orangées. Mais les hommes qui la manipulent ont la force du bélier. Certains la déboulonnent ; d’autres s’amusent à percer sa peau métallique. Après une journée de patience, témoin des malfaisances, je vois double et m’épuise contre la carapace, lustrant et m’espérant le zéro et la genèse. Je l’entends soudain qui crie (elle s’enfle et se sextuple ; ses bras tombent et se cautérisent) : « Pas d’héritage ! J’enfanterai encore pour les joies du hachis. » Une guirlande de petits cadavres sort de son ventre dur, un grand rire à la barbe des années condamnées. Tête baissée, elle met au monde des fœtus qui dansent sur les tombes, sœurs rieuses et mort-nées prêtes à jouer les coquettes. J’éprouve la lueur intestine, l’œil accroché aux seins multiples. Un septième crâne s’exile... La parturiente lève son verre à la fontaine intarissable — Nativité macabre que les vivants fêteront, promenant leurs ombres en laisse, les chiens sans flair au rythme maïeutique.

Céline Maltère Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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Audrey Faury

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Sevastiani Bogiatzoglou I write, then I erase. What has happened? I cannot understand. People expire, they say. It is something biological, they add. The body can take it all but only up to a point. Then, it stops. Love stays, they say. Of course it does. You cannot unlove someone. Especially when you know you cannot love anyone else again in the same way. Some people are irreplaceable. You fought hard. I know you did. I wasn't there but I was there. You had to let go. I know. Your body had to let go. But you are still here, in a very hurtful yet happy way. I see you everywhere. It feels pointless and cold to go on without you. We never said goodbye. Not directly. Now I get it. It is being continued, my love. This is not a movie. Remember? I am yours and you are mine. We belong together. The only way for me to be happy is you. The best way. The only way. We are still valid. Always valid. Our love. We know what we want. We want us. I will find you. You know how stubborn I am. I love you. Find that home we talked about. I want that goat, too. I dont know if you got all my messages. What I do know is that you know every little detail, with or without messages. You know what happened and who truly helped us stay connected. All I wanted was to keep you warm. Maybe you should have let me. We will fight about it when we meet. On our next date. On that bench in that park. Buy me ice cream. Then, kiss me. I love you, babe. Thank you for the happiness you give me. Traduction page suivante : AP Illustrations : Gérard Lebègue, Infanticide et Labyrinthe (page suivante)

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J'écris, puis j'efface. Que s'est il passé ? Je n'arrive pas à comprendre. Les gens expirent, dit-on. C'est quelque chose de biologique, ajoute-t-on. Le corps s'occupe de tout jusqu'à un certain point. Et puis, ça s'arrête. L'amour persiste, dit-on. Bien sûr que c'est vrai. Tu ne peux pas désaimer quelqu'un. Surtout quand tu sais que tu ne peux pas aimer quelqu'un d'autre de la même façon. Certaines personnes sont irremplaçables. Tu t'es battu très fort. Je le sais. Je n'étais pas là, mais j'étais là. Tu devais te laisser partir. Je sais. Ton corps devait partir. Mais tu es toujours là, d'une façon douloureuse et heureuse. Je te vois partout. On dirait que c'est inutile et froid de continuer sans toi. On ne s'est jamais dit au revoir. Pas directement. Maintenant j'ai compris. ça perdure, mon amour. Ce n'est pas un film, tu te souviens ? Je suis à toi et tu es à moi. Nous appartenons l'un à l'autre. La seule façon d'être heureuse pour moi, c'est toi. La meilleure façon. La seule façon. Nous sommes encore valides. Toujours valides. Notre amour. Nous savons ce que nous voulons. Nous nous voulons. Je te trouverai. Tu sais comme je suis têtue. Je t'aime. Trouver ce foyer dont nous parlions. Je veux cette chèvre aussi. Je ne sais pas si tu reçois tous mes messages. Ce que je sais, c'est que tu connais tous les petits détails, avec ou dans message. Tu sais ce qui s'est produit, et qui nous a vraiment aidé à rester connectés. je voulais seulement te garder au chaud. Peut-être que tu aurais du me laisser faire. On débattra de ça quand on se retrouvera. A notre prochain rendez-vous. Sur ce banc-là dans ce parc-là. Achète moi une glace. Et puis embrassemoi. Je t'aime, chéri. Merci pour le bonheur que tu m'as donné./.

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Sandy Ott Extrait du recueil Dealane MELANIE. T’en es à combien ? DEALANE. Toujours comme tout à l’heure. MELANIE. C’est-à-dire ? DEALANE. J’ai pas encore ouvert. MELANIE. C’est chaud aujourd’hui. DEALANE. Hier c’était pareil. Une vente à cinquante euros pour un vendredi, ça craint. MELANIE. Maintenant on est samedi c’est pire. DEALANE. Ouais, on verra bien. C’est la mort aujourd’hui. MELANIE. Faut s’accrocher. Sûrement que les gens viendront plus tard dans l’après-midi. Là ils sont tous à la plage. T’as vu le soleil ? Tu viens pas faire les boutiques avec un temps pareil. DEALANE. Ouais on verra bien. MELANIE. Il fait chaud en plus. Ils ont pas envie d’essayer. C’est logique qu’il y ait personne. DEALANE. Ouais on verra. MELANIE. C’est l’angoisse quand même. Il n’y a rien à faire. J’ai fait le ménage. Le repassage. Lu tous les mails. Les chiffres c’est bon. Les inventaires aussi. J’ai même recompté les stocks. J’ai fait tout ce que j’avais à faire. Le stand il est nickel. Il n’y a plus qu’à attendre.


DEALANE. Pareil pour moi. On se fait chier. MELANIE. J’ai compté. Il y a dix clients dans toute la galerie. Dix clients. Tu te rends compte c’est rien. Il n’y a personne. C’est vide. On ne sert strictement à rien. DEALANE. C’est sûr. Ils ont pas envie d’acheter et ils veulent pas qu’on les fasse chier. MELANIE. Ouais d’ailleurs je me suis faite jeter tout à l’heure. Je lui ai rien dit à la vieille. Je lui souris, j’allais lui demander si elle avait besoin de quelque chose ou quoi, tu vois juste pour aider quoi. Elle m’agresse. Elle me dit « je veux qu’on me foute la paix ». Tu te rends compte. Les gens ils sont vraiment mal élevés. Surtout quand ils sont vieux ils se croient tout permis. Toute façon plus ils sont vieux plus ils sont cons, c’est comme ça. DEALANE. Carrément. T’as vu celui-là là-bas. Il est perdu le pauvre. Sérieux. « Les vieux faudrait les tuer à la naissance ». J’adore cette phrase c’est tout. Il n’y a plus aucun respect aujourd’hui. Regarde comme ils nous traitent. Même pas bonjour ni merde. Tout de suite « c’est combien ? » On est des putain de bornes de prix. MELANIE. J’avoue c’est vrai. Quelle heure tu as ? DEALANE. Moins vingt. MELANIE. Putain ça passe pas. C’est dingue. DEALANE. Tu l’as dis. Tu finis à quelle heure ? MELANIE. Dix-neuf et toi ? DEALANE. Dix-huit. MELANIE. La chance. ./.

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Les Grenouilles qui demandent un roi Les Grenouilles, se lassant De l'état Démocratique, Par leurs clameurs firent tant Que Jupin les soumit au pouvoir Monarchique. Il leur tomba du Ciel un Roi tout pacifique : Ce Roi fit toutefois un tel bruit en tombant Que la gent marécageuse, Gent fort sotte et fort peureuse, S'alla cacher sous les eaux, Dans les joncs, dans les roseaux, Dans les trous du marécage, Sans oser de longtemps regarder au visage Celui qu'elles croyaient être un géant nouveau ; Or c'était un Soliveau, De qui la gravité fit peur à la première Qui de le voir s'aventurant Osa bien quitter sa tanière. Elle approcha, mais en tremblant. Une autre la suivit, une autre en fit autant, Il en vint une fourmilière ; Et leur troupe à la fin se rendit familière Jusqu'à sauter sur l'épaule du Roi. Le bon Sire le souffre, et se tient toujours coi. Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

Jupin en a bientôt la cervelle rompue. Donnez-nous, dit ce peuple, un Roi qui se remue. Le Monarque des Dieux leur envoie une Grue, Qui les croque, qui les tue, Qui les gobe à son plaisir, Et Grenouilles de se plaindre ; Et Jupin de leur dire : Eh quoi ! votre désir A ses lois croit-il nous astreindre ? Vous avez dû premièrement Garder votre Gouvernement ; Mais, ne l'ayant pas fait, il vous devait suffire Que votre premier roi fût débonnaire et doux : De celui-ci contentez-vous, De peur d'en rencontrer un pire. Jean de La Fontaine

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Ce matin là Elle avait livré bataille la nuit durant, draps chiffonnés témoins de ses pensées évanescentes, sitôt l’aube venue. Des traces obsédantes gravaient en sa mémoire les sillons acides d’un évènement oublié qui dérangeait l’ordre de ses pensées. Se souvenir, toujours, à jamais, déchirer le voile de l’oubli, comme naitre à nouveau, sentir l’étreinte d’une mère, le parfum de sa peau tiède, alanguie dans ses bras. Elle, si tôt disparue, l’empreinte s’était effacée, se remémorer, réincarner les sens, réenchanter la vie était devenu impossible. Lasse, en ce matin opaque, laissant au corps les rênes de l’esprit si longtemps endeuillé, ses pas la glissèrent jusqu’au petit bois familier, refuge fidèle de son chagrin. Naitre pour mourir, quelle hideuse insanité, un saut dans le vide, une absence monstrueuse. Le flot de larmes ruisselant qui la traversait la contraint à s’allonger, elle s’abandonna à la vie frémissante de la terre, aux odeurs joyeuses de la mousse, et s’endormit. De l’eau chagrine, qui goutte à goutte berçait le sol, naquit un tapis de violettes. Leur odeur sucrée, qui la caressait, fit s’éveiller en elle, telle une fulgurance, le souvenir si lointain. Un matin, le même matin, à cette date précise, elles avaient semé, ensemble, les grains violets de la mémoire, pour que ne meure jamais leur amour indicible. Chaque année il renaitrait, incarné à ses sens, au rythme des cycles de la vie, naissance et mort pour unique mission, comme ce matin-là…

Domenica Di Donato 28 janvier 2018

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Au revoir Pierre

Tu étais un ours Un cactus. Tu n'es plus. Plutôt : tu n'as plus. Tu ne possèdes plus rien, est accomplie ton oeuvre de dépouillement. Tu fais l'oiseau migrateur, toi l'indélogeable. Toi l'inconforme, l'allergique aux apparences, Vogue le coeur net.

Alice Photographie : Michèle Fanzine Hildegarde n°19 / 15 Février 2018

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Rabi Wakid, Fonte44 Vivi


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