Deyrolle pour l'avenir, comprendre la Terre

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LOUIS ALBERT DE BROGLIE

DEYROLLE POUR L’AVENIR

R ITÉ

TER

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AGI

UN CAPITAL MENACÉ

BIODIVERSITÉ/PATRIMOINE Les races domestiques menacées représentent une biodiversité exceptionnelle qui doit absolument être préservée pour les générations futures car elles constituent un patrimoine unique et irremplaçable. Ces races sont également un atout économique fort pour leurs régions dans lesquelles des produits de haute qualité peuvent être valorisés. Enfin la diversité animale est une donnée essentielle pour le maintien des espèces dans le temps et en particulier face à l’appauvrissement génétique constaté du fait de la sur-sélection généralement pratiquée sur les races à grande production.

Selon les études scientifiques, dont certaines portées par de grandes organisations non gouvernementales (ONG) dont le WWF, le nombre de vertébrés aurait chuté de 30 % depuis 1970. Parallèlement, notre demande en ressources naturelles est montée en flèche et dépasse désormais de moitié ce que notre planète peut produire en un an. Les principales causes de l’érosion de la biodiversité sont : la destruction ou la dégradation des habitats, la surexploitation des forêts et des océans, l’introduction d’espèces exotiques envahissantes, la pollution des milieux, le changement climatique.

LA FERME

LES É

LA BI

Les

Chèvre des fossés Belle-Île

Trait breton

Bleu du Maine

SUPPORT DE VIE Des plantes vertes qui synthétisent l’oxygène de l’air, des abeilles qui pollinisent, des vers de terre qui enrichissent les sols ou des insectes détritivores qui recyclent la matière organique… autant d’exemples de cycles naturels indispensables à l’équilibre de notre planète que seule la biodiversité est capable de générer.

Poitevine

Baudet du Poitou

Cul noir du Limousin

Grand noir du Berry

SERVICE DE RÉGULATION

es objectifs en raison d’une prise de conscience très forte qui a permis juste à temps, actions très ciblées ont été engagées. C’est ainsi qu’ont été créés des Conservatoires ue des races autrefois abondantes avaient hélas déjà disparu. Cette politique de eveurs désireux de pratiquer une agriculture raisonnée leur offrant la possibilité insi de plus en plus comme une évidence qu’un mode de production respectueux iables en parallèle des modèles existants. Ainsi le maintien de ces races authentiques quelque 220 races et espèces menacées qui ne demandent qu’à retrouver la place garantes du maintien de caractéristiques originelles de leur terroir. Elles rattachent ce patrimoine représente un lien essentiel à leurs racines, un lien à la terre.

La diversité du vivant propose des réponses naturelles et efficaces face aux risques climatiques ou encore aux menaces que constituent certains insectes, ou les maladies. Les forêts jouent un grand rôle dans la régulation du climat. Quant aux coraux, ils demeurent les meilleurs remparts contre les tempêtes. Préserver la diversité de ces écosystèmes est nécessaire pour conserver nos conditions de vie.

COMPRENDRE LA TERRE



P R É FA C E

D’UN DEYROLLE À L’AUTRE

L

a maison Deyrolle, institution scientifique qui reste un lieu unique dans le monde, n’a jamais failli à sa vocation pédagogique depuis sa fondation en 1831 par Jean-Baptiste Deyrolle. Ce passionné d’entomologie développe, avec l’aide de son fils Achille, un commerce florissant basé sur la vente d’insectes, d’animaux naturalisés et de matériel pour les collections d’histoire naturelle en provenance du Brésil, d’Afrique, d’Asie et des quatre coins de l’Europe. Ils participent ainsi à la création de grands cabinets de curiosités privés et à la constitution de collections naturalistes avant que les muséums ne prennent le relais. En 1866, la troisième génération en la personne d’Émile Deyrolle reprend le flambeau. Tout autant passionné de sciences naturelles que son père et son grand-père, il développe tout le matériel d’enseignement : les modèles anatomiques en staff, les pièces de biologie, le matériel d’expérimentation en physique, en chimie, en météorologie, etc., et surtout l’édition de planches murales, publiées sous le nom de « Musée scolaire Deyrolle ». Destinées à différentes classes, des primaires aux secondaires, plusieurs centaines de sujets y sont traités, incluant les leçons de choses, la botanique, la géographie, la zoologie, l’anatomie humaine ou encore l’instruction civique… À la fin du XIXe siècle, Deyrolle est l’un des premiers fournisseurs de l’Instruction publique. Son matériel d’enseignement est distribué dans plus de cent pays et ses planches pédagogiques sont traduites en portugais, espagnol et arabe. Un véritable langage s’instaure : un mode d’explication quasi universel fondé sur le sens de l’observation et l’émerveillement. Inspirée par la phrase d’Émile Deyrolle – « L’Éducation par les yeux est celle qui fatigue le moins l’intelligence, mais cette éducation ne peut avoir de bons résultats que si les idées qui se gravent dans l’esprit de l’enfant sont d’une rigoureuse exactitude » –, cette pédagogie par l’image fait aujourd’hui partie du patrimoine national. Au début de l’éducation laïque, gratuite et obligatoire, les planches se devaient d’expliquer les domaines de la vie et de la nature, ainsi que leur fonctionnement. Mais les enjeux environnementaux et sociétaux ont considérablement évolué dans la seconde moitié du XXe siècle. Après les années 1950, la pédagogie par l’image avait donc besoin d’un nouveau souffle. Aujourd’hui, ces enjeux dépassent les générations pour devenir universels et transgénérationnels. La compréhension doit être au centre de l’action, et la synthèse de l’essentiel devient un objectif majeur pour mesurer les enjeux et changer les comportements. Comment Deyrolle a-t-il repris le chemin de l’observation, de ce langage universel, pour participer à l’émergence de nouveaux paradigmes ? C’est le hasard des routes qui m’a conduit à créer au château de la Bourdaisière en Touraine, il y a près de vingt ans, une collection de variétés de tomates qui est devenue par la suite le Conservatoire national de la tomate. Étrange ou extraordinaire, cet exemple de richesse variétale que l’on nommerait aujourd’hui « biodiversité », a suscité beaucoup de curiosité, d’interrogations et d’intérêt. Ce travail m’a aussi fait pren-

dre conscience que la méconnaissance de la diversité avait conduit à la destruction de variétés et à leur uniformisation. Ce constat de l’urgence de la préservation et de la compréhension s’est produit parallèlement au rachat de la maison Deyrolle. J’y ai découvert une richesse formidable, et un vecteur d’éducation, de compréhension. Il m’est apparu clairement qu’après avoir expliqué la Terre, Deyrolle pouvait expliquer comment la préserver et ainsi reconstruire une autre relation avec cette Terre dont nous ne sommes ni les maîtres ni les flibustiers, mais seulement les dépositaires notre vie durant. Et puis il y a eu l’incendie. Ce feu du matin du 1er février 2008 a révélé la puissance de cette maison Deyrolle dans l’inconscient populaire lorsque les Parisiens, la presse française et internationale se sont alarmés de la disparition probable de cette institution bicentenaire. Cet événement a suscité consternation, inquiétude, bienveillance, et a amené à réfléchir sur la fragilité de la nature, fragilité qui interroge nos valeurs, qui remet en question l’attrait pour l’immédiat et le matériel aux dépens du vivant qui nous entoure, qui nous nourrit et nous soigne. Nous avions décidé, avant l’incendie, qu’une série de planches sur les sujets environnementaux (eau, déchets, biodiversité, énergies renouvelables, recyclage…) et sociétaux (économie sociale et solidaire, microcrédit, citoyenneté…) était fondamentale pour un monde en quête de compréhension et de nouveaux paradigmes. Cette nouvelle collection de planches intitulée Deyrolle pour l’Avenir souligne l’engagement de la société dans son ensemble. Grands groupes privés, institutions, comme l’ONF, le WWF, l’Unesco, ou encore ministères, comme ceux de l’Écologie et de l’Éducation nationale, tous ont participé à la rénovation d’une pédagogie par l’image qui emprunte à la leçon de choses, entrée dans l’inconscient collectif, pour réveiller une conscience de la préservation. Peut-être devrions-nous, en ces temps perturbés, nous référer à nouveau aux grands éducateurs : Coménius, Fröbel, Pestalozzi, Freinet, Montessori, Steiner, qui font appel à l’observation et à l’intuition pour comprendre les choses de la nature, pour fonder une pensée critique permettant d’appréhender la complexité de notre monde afin de mieux le vivre. Dans le « théâtre de la nature », il ne peut y avoir compréhension sans observation, il ne peut y avoir sensibilisation sans regard, sans odorat, sans toucher… sans émerveillement, entêtement des cinq sens. Rappelons-nous ici des mots de Rousseau : « Les premières facultés qui se forment et se perfectionnent en nous sont les sens. Ce sont les premières qu’il faudrait cultiver : ce sont les seules qu’on oublie ou celles qu’on néglige le plus. » Alors, fixer la connaissance et transmettre le savoir par l’image est essentiel, et ces planches didactiques fournissent une leçon de choses toujours aussi moderne, car elles peuvent investir tous les lieux où la conscience est en éveil : l’école, la rue, l’entreprise, chez soi, l’ordinateur, les médias, et redevenir ce langage transgénérationnel et universel, le gage d’un message Pour l’Avenir. Louis Albert de Broglie 5


PA R T I E 1 : L E S M É C A N I S M E S D E L A N AT U R E

Une interprétation, fort discutable, de l’œuvre de Darwin a imposé la compétition et la lutte comme moteurs de la vie, aussi bien dans la nature que dans la société. Or la nature met en œuvre d’innombrables systèmes de symbiose et de solidarités, qui ont joué un rôle déterminant dans l’évolution biologique et sans lesquels il serait impossible de comprendre le fonctionnement des écosystèmes : les lichens comme les coraux sont des êtres doubles où chacune des parties rend service à l’autre. Jean-Marie Pelt 2004

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AGIR POUR L’AVENIR

UN CAPITAL MENACÉ Selon les études scientifiques, dont certaines portées par de grandes organisations non gouvernementales (ONG) dont le WWF, le nombre de vertébrés aurait chuté de 30 % depuis 1970. Parallèlement, notre demande en ressources naturelles est montée en flèche et dépasse désormais de moitié ce que notre planète peut produire en un an. Les principales causes de l’érosion de la biodiversité sont : la destruction ou la dégradation des habitats, la surexploitation des forêts et des océans, l’introduction d’espèces exotiques envahissantes, la pollution des milieux, le changement climatique.

COMPRENDRE LES ÉQUILIBRES NATURELS

60 DES RESSOURCES PRÉCIEUSES La biodiversité rend des services gratuits à l'ensemble des êtres vivants, qui sont appelés des services écologiques. Sans la biodiversité, manger, boire, nous abriter, nous vêtir, nous déplacer ou même nous soigner serait impossible. S’il est difficile d’évaluer la valeur économique de ces fonctions naturelles irremplaçables, les préserver est un investissement, non seulement pour les populations qui en dépendent aujourd’hui mais aussi pour celles de demain!

LA BIODIVERSITÉ Les services écologiques

LA BIODIVERSITÉ

SUPPORT DE VIE

Désignant la diversité du vivant, des plus petits éléments de la vie (le gène, la bactérie) aux plus grands ensembles que constituent les milieux (les océans, les déserts, les forêts etc), la biodiversité intègre l’ensemble des plantes, des animaux et des bactéries. Tous les échanges liant ces diverses formes de vie sont également des manifestations de la biodiversité. Grâce à l’immense variété des espèces, la vie s’organise, s’adapte, et se réinvente chaque jour !

Des plantes vertes qui synthétisent l’oxygène de l’air, des abeilles qui pollinisent, des vers de terre qui enrichissent les sols ou des insectes détritivores qui recyclent la matière organique… autant d’exemples de cycles naturels indispensables à l’équilibre de notre planète que seule la biodiversité est capable de générer.

SERVICE D’APPROVISIONNEMENT Les légumes, la viande, le bois, ou même les médicaments, tout ceci provient de la nature, et permet à l’Homme de répondre à ses besoins fondamentaux. Nous avons mis longtemps avant d’apprendre à utiliser au mieux ces produits issus de la biodiversité. L’enjeu est désormais de veiller à ne pas gaspiller ces ressources en ajustant nos besoins de manière à ne pas exiger plus que ce que la planète peut nous fournir.

SERVICES CULTURELS SERVICE DE RÉGULATION La diversité du vivant propose des réponses naturelles et efficaces face aux risques climatiques ou encore aux menaces que constituent certains insectes, ou les maladies. Les forêts jouent un grand rôle dans la régulation du climat. Quant aux coraux, ils demeurent les meilleurs remparts contre les tempêtes. Préserver la diversité de ces écosystèmes est nécessaire pour conserver nos conditions de vie.

Pour réaliser leur créativité, les hommes se sont depuis toujours tournés vers la nature. Avec ses couleurs, ses formes, elle constitue une source d’inspiration sans équivalent. Que ce soit dans la religion, la peinture, la sculpture, la littérature et même la musique… art et nature sont intimement mêlés !


PA R T I E 1 : L E S M É C A N I S M E S D E L A N AT U R E

Il est certain qu’en matière d’exploration géographique on ne va plus découvrir de nouveaux continents… Mais il y a tout de même encore les abysses océaniques dont on ne sait pas grand-chose, et puis tout le cosmos, Mars, etc. En matière d’exploration terrestre, ce qui change avec le temps, en revanche, c’est l’échelle de la découverte. Il y a toujours de nouvelles explorations et celles-ci s’appuient sur de nouveaux outils : on fait appel à la génétique des populations pour comprendre la migration des espèces, on fait des prélèvements plus précis, etc. Les nouveaux outils ouvrent de nouveaux champs d’exploration. Jean-Louis Étienne 2012

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PA R T I E 2 : L A D I V E R S I T É D E S M I L I E U X N AT U R E L S

Notre tâche urgente en tant qu’écologistes est (donc) d’inverser la tendance qui détruit les villes et les campagnes, les rendant aussi inhabitables les unes que les autres. Mais surtout de les réinventer, les rendre à nouveau aussi humaines que possible. Empêcher que se perpétue l’indifférence vis-à-vis de la nature, je veux dire vis-à-vis de notre milieu, la faire cesser d’être la règle dans l’aménagement de nos villes, l’éducation, la production. Voilà notre tâche politique et pédagogique. Serge Moscovici 2002

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LA NATURE EN VILLE La ville est un réservoir de biodiversité insoupçonnée ! Si la nature s’y fait discrète, elle est loin d’être absente. Ainsi, il y a en ville une grande variété de plantes et de fleurs à butiner presque en toute saison.

PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ LE RUCHER DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE

122 LE SAVIEZ-VOUS ? À Paris, l’installation des ruches est réglementée depuis mai 1895. Les ruches doivent être à au moins 5 mètres des propriétés privées ou de la voie publique.

LES ABEILLES DANS LA VILLE Installation d’un rucher sur les toits de l’Assemblée Nationale en avril 2013, à l’initiative de son Président Claude Bartolone.

LES VILLES, DES ESPACES NATURELS Perçues comme des espaces d’où la nature est absente, les villes offrent pourtant des refuges exceptionnels pour les abeilles. Elles s’y épanouissent et y produisent du miel en abondance. La qualité du milieu exempt de pesticides favorise leur présence et contribue à entretenir la biodiversité.

UNE PRÉSENCE HISTORIQUE Le premier rucher-école fut installé à Paris en 1856 au jardin du Luxembourg. Aujourd’hui, on compte près de 400 ruches dans les espaces verts publics, jardins privés ou sur les toits de Paris.

BIODIVERSITÉ Les abeilles contribuent à la reproduction de la plupart des plantes à fleurs en les pollinisant. Paris est une immense forêt constituée de 500 000 arbres. Plus de 200 essences différentes peuplent les rues, offrant pollen et nectar aux abeilles.

Les ruches du jardin du Luxembourg.

LIEN SOCIAL L’installation de ruches et la formation à l’apiculture contribuent à développer le lien social. La récolte du miel ou même la découverte des plantes sont ainsi des activités conviviales qui peuvent se pratiquer en famille, entre collègues ou entre amis.

SENSIBILISER À LA NATURE La présence des abeilles dans les villes donne l’occasion d’éduquer le grand public et de le familiariser avec le monde du vivant en lui expliquant pourquoi il faut le préserver.

LES ABEILLES ET LES HOMMES Elles ne piquent que lorsqu’elles sont dérangées ou pour défendre leur colonie. La mise en place de ruches dans les villes doit donc être soigneusement étudiée afin d’éviter tout danger.


PRÉSERVER LA NATURE MENACÉE

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Q

uel rapport entre la forêt d’Amazonie, les Andes tropicales du Nord-Pérou, les côtes sableuses de Méditerranée, la grande barrière de corail d’Australie et nos étangs d’Europe ? Tous ces sites naturels se trouvent en première ligne des menaces planétaires sur l’environnement. Sur les terres émergées, le péril principal reste la déforestation. Selon la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture), environ treize millions d’hectares de forêts disparaissent annuellement sur Terre. C’est l’équivalent de la surface de l’Angleterre, soit quarante terrains de football par minute. Mais les menaces se concentrent aussi sur les océans et les zones côtières. La barrière de corail d’Australie en constitue un exemple emblématique. Le Premier ministre Tony Abbott veut autoriser le rejet de déchets industriels au cœur du Parc naturel marin et permettre la construction de ports à proximité. Ce projet lui a valu la protestation de six cents scientifiques réunis en juillet 2014 à Cairns (Australie) pour l’assemblée de l’Association pour la biologie tropicale et la protection de l’environnement. Au-delà de la nécessaire pression sur les gouvernements et les organismes internationaux, le sauvetage des zones menacées passe par l’information et l’éducation des populations qui y vivent. Il faut saluer, à cet égard, l’action initiée dans les Andes péruviennes par Patrick Blandin, professeur émérite au Muséum national d’histoire naturelle de Paris. Ce biologiste, qui effectue des voyages réguliers au Pérou pour

étudier les papillons, a eu l’idée en 2008 de réaliser des documents pédagogiques afin de sensibiliser les enfants (et leurs parents) aux conséquences néfastes de la déforestation qui frappe ces montagnes. Avec l’appui de Louis Albert de Broglie et des éditions Deyrolle à Paris, d’un imprimeur local, de collègues du Muséum de Lima et d’une ONG de défense des écosystèmes andins, Patrick Blandin a supervisé la réalisation d’une planche pédagogique en espagnol sur les plantes et animaux des Andes du Nord, que vous trouverez en version française dans ce livre. Les atteintes à la biodiversité se traduisent aussi par la raréfaction et la disparition de nombreuses espèces. Sur les 73 686 espèces animales et végétales recensées sur la liste rouge de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), pas de moins de 22 103 sont menacées d’extinction. Ainsi, la population de chimpanzés, estimée à deux millions au début du XXe siècle, est aujourd’hui inférieure à 150 000. Selon l’UICN, le taux d’extinction des espèces est actuellement de cent à mille fois plus élevé qu’au cours des temps géologiques passés. Face à la montée de ces atteintes au patrimoine naturel, de nombreuses actions foisonnent. Idée force : valoriser commercialement, pour les sauver, les ressources menacées (tomates et fruits oubliés, races animales anciennes, richesses forestières et piscicoles…). Autant d’avancées qui dessinent les pistes d’un authentique développement durable, où la protection de notre « capital nature » va de pair avec des activités économiques relocalisées. Laurent Samuel

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PA R T I E 1 : L A N AT U R E M E N A C É E

Le corail constitue l’une des merveilles les plus impressionnantes de la nature. D’abord par sa beauté. Ensuite par sa spécificité, puisqu’il est placé en quelque sorte au croisement des trois règnes. Un animal profite d’une algue qu’il porte en lui et grâce à laquelle il édifie une structure minérale : cette genèse n’est tout de même pas commune. Et la production ne connaît aucune pause. Chaque année, la masse de corail dans le monde augmente de trois milliards de tonnes, ce qui en fait le plus grand architecte de la planète. Conséquence directe : le monde corallien forme avec la forêt tropicale l’un des plus riches écosystèmes qui soient, une usine à fabriquer de l’oxygène et à stocker le gaz carbonique. Il dépérit, d’ailleurs, dans plusieurs régions du monde à cause de l’accroissement de ce même gaz carbonique. Nicolas Hulot 2004

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PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ

BONNES PRATIQUES

LES MILIEUX MENACÉS

1 Réaliser que les récifs coralliens comptent parmi

les milieux les plus riches en espèces, mais aussi les plus sensibles aux saccages, aux pollutions et au réchauffement climatique. 1 Visiter ces merveilles en plongée, mais en respectant le code de bonne conduite du plongeur : observer, admirer, ne rien perturber, ne rien toucher, ne rien casser, ne rien cueillir, ne rien emporter.

10 LE SAVIEZ-VOUS ? 1 La Grande Barrière australienne a reçu le surnom

d’« Amazonie bleue » en raison de sa prodigieuse richesse en espèces. 1 Elle s’étend sur 2 300 km de longueur, entre la Papouasie-Nouvelle-Guinée et l’île Lady Eliott. 1 On y recense plus de 2500 complexes récifaux, répartis sur une surface maritime totale de 230 000 km2.

LA GRANDE BARRIÈRE D’AUSTRALIE LE CORAIL CORNE-DE-CERF ET LES POISSONS-DEMOISELLES BLEUS Acropora sp. et Chrysiptera caerulolineata

Familles des acroporidés et des pomacentridés. Les coraux de la Grande Barrière se reproduisent tous à la même époque, au printemps. Les poissons-demoiselles (10 cm) font partie des nombreuses espèces qui logent dans le dédale du récif.

LE POISSON-PAPILLON À SELLE Chaetodon ephippium

Famille des chaetodontidés. L’un des plus beaux locataires du corail. La tache noire de son dos est un leurre : elle « casse » sa silhouette et trompe les prédateurs, qui ont du mal à localiser sa tête.

LA GORGONE ORANGE Subergorgia sp.

Famille des subergorgiidés. Les gorgones, cousines des coraux, tendent leurs ramures en travers des courants pour capturer les petits animaux du plancton.

LE REQUIN À POINTES NOIRES Carcharhinus melanopterus

Famille des carcharhinidés. Il atteint 1,80 m et se reconnaît aux extrémités foncées de ses nageoires. Il rôde sur le récif et chasse surtout de nuit. La femelle, vivipare, a des portées de trois ou quatre bébés.

LE POISSON-PAPILLON À LONG NEZ Forcipiger longirostris

Famille des chaetodontidés. Il se sert de son rostre pointu pour fouiller les coraux ou les gorgones et y dénicher de petites proies. Ses vives couleurs constituent un langage que comprennent ses congénères.

LA LANGOUSTE ORNÉE Panulirus ornatus

Famille des palinuridés. Sa carapace, qu’on dirait rehaussée de métaux précieux, lui donne des airs de chevalier en armure. Ce crustacé utilise ses longues antennes pour trouver ses proies et se défendre. Longueur 30 cm.

LE BÉNITIER GÉANT Tridacna maxima

Famille des tridacnidés. Le colosse des mollusques dépasse 1 mètre de hauteur et 250 kg. Ses tissus regorgent d’algues minuscules, les zooxanthelles, qui le colorent et avec lesquelles il vit en symbiose.


PA R T I E 1 : L A N AT U R E M E N A C É E

La conscience écologique, c’est d’abord la conscience que l’environnement est une totalité vivante auto-organisée d’elle-même. C’est ensuite la conscience de la dépendance de notre indépendance, c’est-à-dire de notre relation fondamentale avec l’écosystème. L’homme doit se considérer comme le berger des nucléoprotéinés – les êtres vivants – et non comme le Gengis Khan de la banlieue solaire. Edgar Morin 2007

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HISTOIRE ÉVOLUTIVE 1 Les premiers vrais félins sont apparus il y a 30 millions d’années, bien

avant les premiers hominidés. De nombreuses espèces de félins ont existé mais beaucoup ont disparu. C’est le cas des lignées des félins à dents de sabre. 1 Les 36 espèces subsistant aujourd’hui sont issues d’un même ancêtre qui a commencé à diverger il y a 10,8 millions d’années et on les trouve sur tous les continents sauf en Océanie. 1 Ces superbes prédateurs sont maintenant, tous à différents degrés, menacés de disparaître. Voici 7 espèces particulièrement menacées.

PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ

86 COMMENT LES PROTÉGER ? 1 Bannissez tous les produits alimentaires et cosmétiques contenant

de l’huile de palme. Sa production provient le plus souvent de palmiers plantés à la place de forêts ancestrales, dans les zones tropicales. Elle est, de plus, déconseillée par certains médecins en raison de ses graisses saturées. 1 Préférez pour vos mobiliers et parquets des bois provenant de votre région ou pays et issus de forêts gérées durablement. 1 Partagez votre admiration devant la beauté et la rareté des félins sauvages, chez vous et en voyage.

FÉLINS MENACÉS D’EXTINCTION

LE CHAT DES ANDES

LE CHAT À TÊTE PLATE (Prionailurus planiceps)

(Leopardus jacobita) Ce félin vit sur les hauts plateaux andins, rarement en dessous de 3 000 m. d’altitude. Seuls quelques spécimens ont été étudiés et on estime sa population totale à 2 500 individus. Le morcellement de ses populations, sa faible diversité génétique et la dégradation de son habitat et la chasse le menacent particulièrement.

Cet étrange petit félin, présent en Thaïlande, en Malaisie, à Sumatra et Bornéo, vit à proximité des cours d’eau, des marais et dans les mangroves. L’espèce a évolué en se spécialisant dans la capture de poissons, d’amphibiens et de crustacés. Classé « en danger », il est menacé par l’assèchement et la dégradation des zones humides.

LE CHAT BAI (Catopuma badia) Cette espèce, endémique des forêts denses de Bornéo, a été découverte en 1855. Seuls 12 spécimens ont été observés, ce qui en fait le plus méconnu des félins. La petite taille de l’île et la déforestation au profit de plantation de palmiers à huile le mettent en péril.

LE TIGRE (Panthera tigris)

LE LYNX PARDELLE

L’un des animaux les plus emblématiques de notre planète, le tigre, est uniquement présent en Asie, dans différents écosystèmes forestiers. Menacé par la déforestation et le braconnage, les tigres sauvages ne sont plus que 3 000 et ils auraient déjà disparu sans leur protection effective depuis 40 ans.

(Lynx pardinus) Proche cousin du lynx boréal présent dans toute l’Europe, le lynx pardelle est le félin le plus menacé au monde ! Environ 300 individus subsistent dans la péninsule ibérique, sur des territoires réduits et fragmentés. L’extension du réseau autoroutier, le remplacement de la végétation native et la diminution drastique de sa seule proie, le lapin de garenne, sont ses principales menaces. Pour le sauver, un centre d’élevage a été créé en 2003 et des individus sont maintenant relâchés en Espagne et bientôt au Portugal.

LA PANTHÈRE DES NEIGES (Panthera uncia) Aussi appelée once, la panthère des neiges est parfaitement adaptée à la vie en très haute altitude, jusqu’à 5 000 m. Présente dans 12 pays d’Asie centrale, au milieu de terrains escarpés et, quelquefois, dans des forêts de conifères, elle est menacée par la diminution de ses proies naturelles, son braconnage et la destruction de son habitat (extraction de minerais). Sa population compte entre 4 500 et 6 000 individus.

LE CHAT PÊCHEUR (Prionailurus viverrinus) Ce proche cousin du chat à tête plate est aussi un excellent nageur mais son régime alimentaire est un peu plus varié et il possède une aire de répartition plus grande : on le rencontre de l’Inde et du Sri Lanka jusque dans la péninsule malaise et l’île de Java. Nous n’avons aucune estimation de ses effectifs mais il est de moins en moins observé. La surpêche, la disparition des zone humides et la persécution dont il est victime le mettent en danger.


LA MAISON DEYROLLE, FONDÉE EN 1831, A BÂTI SA NOTORIÉTÉ SUR L’ÉDITION DE MATÉRIEL SCOLAIRE, DONT SES FAMEUSES PLANCHES PÉDAGOGIQUES MURALES QUI FONT DÉSORMAIS LE BONHEUR DES COLLECTIONNEURS. CETTE INSTITUTION, RACHETÉE EN 2001 PAR LOUIS ALBERT DE BROGLIE, S’ENGAGE MAINTENANT DANS UNE NOUVELLE VOIE. DANS LA CONTINUITÉ DE SA VOCATION ÉDUCATIVE, ELLE A CONÇU LE PROJET « DEYROLLE POUR L’AVENIR » : UNE NOUVELLE COLLECTION DE PLANCHES ABORDANT LES ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX ET SOCIÉTAUX CONTEMPORAINS – LES ÉCOSYSTÈMES, LA BIODIVERSITÉ, LES ESPÈCES MENACÉES, L’IMPORTANCE DE L’EAU, LE RÔLE DE LA FLORE… DANS CET OUVRAGE, CHAQUE DOCUMENT EST ACCOMPAGNÉ D’UN TEXTE D’AUTEUR, DE DARWIN À NICOLAS HULOT, DE HUBERT REEVES À PIERRE RABHI. IL MET EN PERSPECTIVE L’OBJECTIF DU PROJET : ÉCLAIRER LE PLUS GRAND NOMBRE SUR LES CONNAISSANCES ET LES COMPORTEMENTS SUSCEPTIBLES DE PRÉSERVER LA PLANÈTE.

LES URELS

ON

65 LA POLLINISATION 1 Préalable à la fécondation, donc à la reproduction des plantes à

fleurs, la pollinisation, c'est-à-dire le transport du pollen depuis les anthères productrices jusqu’au stigmate du même ou d’un autre individu, reste aujourd’hui encore un phénomène fugace, fascinant et méconnu.

Bernard Vaissière INRA d’Avignon

SATION

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PRÉSERVER LA BIODIVERSITÉ

LE SAVIEZ-VOUS ? 1 Les arbres pouvant vivre le plus longtemps sont les pins

et les plus volumineux sont les séquoias géants. Le pin le plus vieux au monde a plus de 8 000 ans et a été découvert en Suède. 1 L’arbre le plus vieux de France est un chêne de 2500 ans que vous pouvez admirer à Pessines, en CharenteMaritime. L’arbre le plus grand de France est dans le Doubs, il s’agit un sapin pectiné de 55 mètres de haut.

1

L’ARBRE

LA

GRAND OUEST

LES ESSENCES D’ARBRES Il existe 60 000 espèces d'arbres dont 8 000, soit 15 %, sont menacées de disparition. La France métropolitaine recense 136 essences d'arbres et sa forêt progresse de 40 000 hectares par an. Deux tiers des forêts de France métropolitaine sont des feuillus et les conifères représentent un tiers du couvert forestier.

Bretagne, Pays de Loire, Poitou-Charentes, Basse Normandie et Haute Normandie sont les cinq régions qui composent le Grand Ouest. Au fil des siècles les agriculteurs ont façonné leur espace et y ont développé nombre de races domestiques parfaitement adaptées à leur terroir. C’est le cas pour le Grand Ouest dans lequel ont évolué et survécu des animaux d’une grande variété. Leur préservation est due à la ténacité de quelques intervenants déterminés et à la foi inébranlable d’éleveurs passionnés qui ont permis la sauvegarde de ces animaux de ferme remarquables, souvent au prix d’efforts considérables. Malgré cela, les effectifs demeurent encore souvent faibles avec le risque parfois réel d’une possible extinction.

RAC

ANIMAUX

… OU VOLONTAIRE Pour les besoins de la colonie transporté sur les pattes arrière, il sera, avec le miel, la base de la nourriture des larves. Froment du Léon

E ONTAIRE…

Bretonne Pie Noir

ur

RAMEAU Les rameaux des arbres croissent chaque année et leur vigueur dépend de la sève qu’ils reçoivent. L’étêtage ou écimage des ramifications primaires permet de les renforcer et de favoriser l’apparition de rameaux secondaires ou latéraux.

FLEURS Tous les arbres ont des fleurs, plus ou moins discrètes, qui produisent des graines afin d’assurer la reproduction de l’espèce. Certaines fleurs sont pollinisées par des insectes et d’autres sont pollinisées par le vent.

O2

Nantaise

Coucou de Rennes Canard de Challans

O2

POLLINISATION DES FLEURS SAUVAGES… O2

Si la nature nous offre une grande richesse de fleurs sauvages, remercions-en les insectes pollinisateurs qui ont permis la formation des graines.

Marans

Pictave

Trait Mulas

taines fruitiers ment

Noire du

Châtaignier CO2

Solognote

CO2

CO2

COUPE DU TRONC

PHOTOSYNTHÈSE

Les cercles concentriques ou « cernes » visibles sur une coupe de tronc d’arbre permettent de donner l’âge de l’arbre, sachant qu’un cercle représente un an.

L’arbre respire c’est-à-dire qu’il absorbe de l’oxygène et rejette du dioxyde de carbone. Le jour cependant, il produit aussi de l’oxygène par le mécanisme de la photosynthèse. Lors de la photosynthèse, l’arbre utilise un des pigments de ses feuilles, la chlorophylle, pour transformer le dioxyde de carbone en matière organique et en oxygène.

Hêtre

RACINE Les racines des arbres ont deux fonctions : une fonction d'accrochage car elles permettent de maintenir l’arbre au sol, et une fonction d'absorption. Les racines qui ont une fonction d’absorption se développent plus aux endroits où la matière organique est le plus directement accessible.

Bouleau

Charme

www.hoebeke.fr ISBN :

24,50 € 9782-84230-509-3

Chêne

Peuplier

Pin

Oie grise du marais

La politique mise en place dans les années 50 visant à limiter le nombre de races dom à partir des années 70, d’éviter la disparition définitive de nombre des races aujourd Régionaux dont l’un des principaux objectifs fut de préserver les ressources gén préservation, appuyée notamment par les collectivités locales, a permis de mene de valoriser des produits de qualité autour : du lait, des fromages, de la viande p de l’environnement et tourné vers la consommation locale permet également de déve doit-il permettre de faciliter le redéploiement d’une agriculture traditionnelle dur qu’elles occupaient autrefois dans le paysage rural français. Ces races anciennes fon tous ceux qui les ont accompagnées en les façonnant et les générations fut


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