Scooters retro

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Scooters rĂŠtro Chris Haddon Photographies de Lyndon McNeil


Le Heinkel Tourist

22. Scooters rétro

« “Recherche scooters anciens, toutes marques.” On ne peut pas faire plus simple. Voici l’intitulé de l’annonce qui devait me permettre de calmer mon insatiable appétit de scooters qui remonte à l’époque où je traînais avec un ami d’origine allemande. Tout comme moi,  il était à fond dans la scène northern soul depuis le milieu des années 1970. Or, cette musique était étroitement liée aux scooters. Moi, j’avais déjà mon Lambretta, mais mon ami voulait un scooter qui lui rappelle son pays : un Heinkel Tourist. Comme il n’avait pas encore son permis, nous avons été le chercher ensemble. Je ne connaissais rien aux scooters allemands. En tout cas, après les quatre-vingt-dix minutes de trajet pour le ramener, non seulement je voulais tout savoir sur les Heinkel, mais j’en voulais un pour moi. J’ai alors publié une autre annonce plus ciblée sur ma nouvelle passion. Il n’était certainement pas aussi rapide qu’un italien – on n’accélère pas, on accumule de la vitesse –, mais il était confortable, solide comme un roc et économique », explique Graham, qui a acheté en 1982 son Heinkel importé en Grande-Bretagne en 1956. En effet, à l’époque, afin de ne pas manquer le boom du scooter, le constructeur Excelsior, basé à Coventry, avait importé des Heinkel sur lesquels il avait simplement ajouté son logo.


Souvent surnommé “Rolls-Royce des scooters” en Angleterre et “Cadillac des scooters” aux États-Unis, ce luxueux modèle est l’œuvre d’Ernst Heinkel, fondateur de Heinkel Flugzeugwerke, société allemande de construction aéronautique. Ce quatre-temps à entraînement par chaîne était vendu avec compteur de vitesse, guidon antivol, horloge, porte-bagage et roue de secours. Il est constitué d’un cadre tubulaire couvert par un carénage en acier embouti. À cause de cela et de son moteur à quatre temps, il est considérablement plus lourd que les autres, ce qui le rend plus stable, plus agréable à conduire et, donc, idéal pour les longues distances. Il en a été produit plus de cent mille entre 1953 et 1965. Graham poursuit : « Les réponses à mon annonce ont commencé à arriver et la plupart des conversations commençaient par des choses du genre: “J’ai cet affreux scooter, je ne sais pas trop ce que c’est. Ça vous intéresse ?” Pour les trois quarts des gens, si ce n’était ni une Vespa ni un Lambretta, ça n’avait aucune valeur. Sur une période de dix ans, j’ai acheté environ cinquante machines aussi bizarres que merveilleuses pour à peine trente euros à chaque fois. Même s’ils ne sont pas aussi cotés que les scooters italiens, on peut dire que la trentaine de modèles que j’ai conservés se sont toujours avérés de bons investissements. »


Un scooter pop

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« J’ai quitté le nord du pays pour m’installer à Londres en 2004 et les transports en commun ont eu vite fait de m’insupporter. Un scooter me paraissait idéal, mais, étant naturellement très sensible au design et adepte du vintage, m’acheter un scooter neuf était hors de question. Une petite tranche de légende italienne était plus à mon goût. J’ai donc acheté une Vespa VBB de 1961, supposément de premier ordre. Les deux mille euros dépensés au contrôle technique ont prouvé le contraire. La somme était faramineuse pour un scooter  qui avait coûté mille euros. Je n’ai pas tardé à m’apercevoir que, dans les rues quelque peu agressives de la capitale, un scooter en parfait état n’était pas forcément une bonne idée. En un rien de temps, il a été incendié, puis volé. Ayant compris la leçon, j’ai utilisé l’argent de l’assurance pour m’offrir un vieux Lambretta déglingué. Un vrai italien avec une peinture ringarde qui allait forcément exiger un peu de travail, explique Andrew, fondateur de Bolt, une nouvelle marque d’articles liés au scooter et à la moto.



Le Goggo Roller

Survenue à la fin des années 1940, une chute brutale de la demande pour certains types de machines agricoles a mené la société bavaroise Hans Glas GmbH à se réorienter vers un nouveau secteur alors en expansion : le scooter. Les prototypes du Goggo sont apparus en 1951 et, rapidement, on a commencé à les assembler sur les chaînes de montage d’un nouveau site de production de l’usine de Dingolfing. Au cours des cinq années suivantes, la marque a construit quarante-six mille légendaires Goggo aux courbes prononcées avant de se lancer dans la fabrication de mini-voitures, dont la tout aussi légendaire Goggomobil. Malgré sa qualité et le nombre d’exemplaires produits, peu ont survécu. Et, hors d’Allemagne, le Goggo n’a jamais vraiment joui du prestige de ses cousins italiens. Ce modèle de 1955, récemment restauré par Mark Battye, est donc extrêmement rare.



MotoBaldet était un magasin de scooters tenu par Baldet, un personnage haut en couleur et connu pour sa vision peu orthodoxe du marketing. Il s’est, par exemple, lancé dans une expédition à Vespa de cinq mille huit cents kilomètres en dix jours sur les routes d’Europe avant de parcourir les six mille kilomètres du circuit de montagne de l’île de Man en moins de cent heures. Et ces exploits ont effectivement boosté ses ventes. « Il faut avoir un scooter pour comprendre comme il est compliqué de se procurer des accessoires très recherchés ou des pièces vieilles de cinquante ans. Mais quand on les trouve, c’est là que la vraie rigolade commence. Convaincre son propriétaire de s’en séparer est rarement facile, surtout si c’est un type dans mon genre. La vérité sur les collectionneurs, c’est que nous sommes tous de grands malades ! Mon GS est d’un manque de fiabilité insolent – d’où son nom, Précieux. S’il n’était pas si beau, il y a un moment que je l’aurais balancé. Je le supporte parce qu’au bout de dix-huit ans, on ne peut s’empêcher de l’aimer. Dans un moment de courage, j’ai décidé de l’amener au rallye de l’île de Wight. En route, sous un tunnel, j’ai allumé les phares et le moteur s’est coupé. Le problème a été rapidement résolu en éteignant les phares. J’ai toujours un certain nombre de pièces détachées avec moi car on ne peut jamais savoir ce dont on va avoir besoin. Mais ce qu’il ne faut surtout pas oublier, ce sont les papiers de l’assurance dépannage. »



Waterloo Sunset

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« J’ai eu un Lambretta au début des années 1970, c’est-à-dire après l’apogée de l’époque mod. J’étais fan de cette période, mais les scooters n’étaient plus à la mode et on n’en voyait plus beaucoup dans les rues. Ceux qui pouvaient se le permettre s’offraient une voiture. J’aimerais bien me souvenir de ce que j’ai fait de mon Lambretta. Nous avons déménagé et j’ai sûrement dû laisser à notre successeur le soin de s’en débarrasser. Aujourd’hui, c’est un modèle très recherché, précise John, propriétaire de ce scooter d’inspiration mod. Femme, enfants et petits-enfants sont arrivés et, sans que j’aie vu le temps passer, nous nous sommes retrouvés en août 1989, en week-end sur l’île de Wight. La famille était en train de s’installer sur la plage quand une horde de scooters a débarqué. Ma femme m’a demandé si nous ne ferions pas mieux de nous déplacer. Je lui ai nonchalamment répondu : “Non, on est très bien ici.” Et j’ai passé le reste de la journée à examiner ces magnifiques machines. Au mois d’octobre suivant, je me suis racheté un scooter et je n’ai jamais fait marche arrière depuis. Je me suis offert ce TV175 de 1961 en 2007, à l’insu de mon épouse. Elle ne refusait pas que j’en aie un…, mais que je puisse en avoir deux lui posait problème. Il a été livré à ma porte et j’ai juste eu le temps de le cacher avant qu’elle rentre à la maison. C’était mon secret honteux.




De la mythique Vespa sur laquelle Gregory Peck fait découvrir Rome à Audrey Hepburn dans Vacances romaines au légendaire Lambretta de Mamma Roma, ce sont les marques italiennes qui ont créé les classiques du scooter et suscité l’engouement pour ce nouveau mode de transport. À leur suite, des entrepreneurs du monde entier ont tenté de prendre leur part de ce marché en pleine expansion, ce qui n’a pas échappé à l’auteur, toujours en quête de nouveaux modèles suprenants. À l’image de cet Heinkel Tourist rouge du constructeur allemand Excelsior surnommé par les connaisseurs la « Rolls-Royce des scooters », de ce Honda Spacy au look futuriste ou encore de cet étonnant scooter Fuji Rabbit produit par la compagnie aéronautique Nakajima, une entreprise japonaise qui produisait des avions avant de se reconvertir dans les scooters à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Des scooters tous plus originaux les uns que les autres dont les propriétaires ont compris qu’ils leur rendraient mieux hommage en les utilisant au quotidien qu’en les entreposant dans un musée. Ces passionnés nous racontent comment ils ont su redonner vie à leur deux-roues ou les entretenir au fil des années à force d’obstination et de patience !

25,50 €

isbn : 9782-84230-531-4

www.hoebeke.fr


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