Horti Hesperidum Studi di storia del collezionismo e della storiografia artistica Rivista telematica semestrale
STUDI SUL DISEGNO ITALIANO TRA CONNOISSEURSHIP E COLLEZIONISMO a cura di FRANCESCO GRISOLIA
Roma 2014, fascicolo II
UniversItalia
Il presente tomo riproduce il fascicolo II dell’anno 2014 della rivista telematica Horti Hesperidum. Studi di storia del collezionismo e della storiografia artistica. Cura redazionale: Michela Gentile, Marisa Iacopino, Marta Minotti, Giulia Morelli, Jessica Pamela Moi, Gaia Raccosta, Deborah Stefanelli, Laura Vinciguerra.
Direttore responsabile: CARMELO OCCHIPINTI Comitato scientifico: Barbara Agosti, Maria Beltramini, Claudio Castelletti, Valeria E. Genovese, Francesco Grisolia, Ingo Herklotz, Patrick Michel, Marco Mozzo, Simonetta Prosperi Valenti Rodinò, Ilaria Sforza Autorizzazione del tribunale di Roma n. 315/2010 del 14 luglio 2010 Sito internet: www.horti-hesperidum.com
La rivista è pubblicata sotto il patrocinio e con il contributo di
Università degli Studi di Roma “Tor Vergata” Dipartimento di Scienze storiche, filosofico-sociali, dei beni culturali e del territorio Serie monografica: ISSN 2239-4133 Rivista Telematica: ISSN 2239-4141 Prima della pubblicazione gli articoli presentati a Horti Hesperidum sono sottoposti in forma anonima alla valutazione dei membri del comitato scientifico e di referee selezionati in base alla competenza sui temi trattati. Gli autori restano a disposizione degli aventi diritto per le fonti iconografiche non individuate.
PROPRIETÀ LETTERARIA RISERVATA © Copyright 2014 - UniversItalia – Roma ISBN 978-88-6507-741-2 A norma della legge sul diritto d’autore e del codice civile è vietata la riproduzione di questo libro o parte di esso con qualsiasi mezzo, elettronico, meccanico, per mezzo di fotocopie, microfilm, registrazioni o altro.
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INDICE
FRANCESCO GRISOLIA, Presentazione
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FURIO RINALDI, Bernardino Luini «Mediolanensis», Aurelio Luini e Giovanni Paolo Lomazzo: disegni firmati tra autografia e documento
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LAURENCE ARMANDO, Un dessin inédit, autour de Rosso, Primatice et Thiry: Un homme nu (Apollon?) à demi-assis sur un char
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CRISTIANA GAROFALO, La Cena in casa del Fariseo tra Lodovico Cigoli e Francesco Curradi: su un bozzetto della collezione Feroni
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VIVIANA FARINA, Addenda al catalogo dei disegni di Aniello Falcone
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Horti Hesperidum, IV, 2014, 2
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DARIO BECCARINI, Una nota su Domenico Antonio Vaccaro
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ISABELLA ROSSI, Sulle tracce dell’ «immenso studio» di Pietro Stefanoni. Entità e dispersione
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LUISA BERRETTI, Anticipazioni dal fondo di disegni e stampe del Museo Civico di Pescia
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CARLOTTA SYLOS CALÒ, Al di là del visibile: il disegno italiano tra il 1968 e il 1972
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ABSTRACTS
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UN DESSIN INEDIT, AUTOUR DE ROSSO, PRIMATICE ET THIRY: UN HOMME NU (APOLLON?) A DEMI-ASSIS SUR UN CHAR LAURENCE ARMANDO
A la mémoire de Jean Gismondi
Un jeune homme, peut être Apollon, est présenté de profil vers la gauche dans une nudité sculpturale sur un char à gradins, au dossier en berceau orné d’un mascaron. Dans sa course, il tient d’une seule main, dans une posture complexe, une paire de flambeaux. Son vêtement flottant à l’arrière comme une voile, les ombres portées de la draperie, nous indiquent une illusion de vitesse. Son regard extatique, empreint de sérénité affiche une grande aisance. Sa main délicatement posée sur sa jambe témoigne de cette impassivité divine. Ce dessin a été acquis récemment par la galerie Gismondi (fig. 1)1. Ses dimensions sont particulièrement importantes puisqu’il mesure: 22 x 34 cm. Je tiens exprimer toute ma reconnaissance à Carmelo Occhipinti pour m’avoir accordé sa confiance pour cet article. A Isabelle Richard-Joly pour son soutient indéfectible. Et, enfin je tiens à témoigner toute ma gratitude à la famille Gismondi.
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Sur le plan graphique, le trait discontinu à la plume, encre brune et lavis sur un papier crème laisse parfois apparaître un tracé sous-jacent à la pierre noire. Le papier possède un filigrane répertorié (Briquet 2141), intitulé «quadrupède indéterminé», en usage à Utrecht entre 1539 et 1553. Le thème de cette feuille est en rapport avec un recueil de planches gravées par un auteur anonyme, d’après Rosso, représentant «les dieux de l’Olympe roulant sur un char sur des nuées»2. Ces planches, au nombre de 22, éditées par Jacques Grandhomme, sont numérotées. L’estampe portant le chiffre «11» représente Apollon tenant dans ses mains un soleil; elle est gravée en sens inverse par rapport à notre dessin. Nous connaissons au musée du Louvre, une feuille comparable à la notre, mais de dimensions plus petites et probablement coupée, ne laissant apparaître qu’une partie de la composition3. L’iconographie de ce dessin et de certaines de ces gravures appartient à l’un des aspects des plus captivants de l’art bellifontain: l’art de la mascarade. Ces divertissements ont occupé la cour des Valois de François Ier à Charles IX. Tout événement était un prétexte à des déguisements (réceptions, baptêmes, noces, bals, carnavals). Artistes, architectes, sculpteurs, antiquaires étaient mis à contribution pour la réalisation des somptueux décors éphémères d’une inventivité et ingéniosité rares. Les thèmes les plus savants devaient susciter une véritable surenchère dans l’émerveillement des acteurs et des spectateurs. La renommée de ces fêtes en Europe était bien connue et commentée par de nombreux historiens (le père Dan, Cassiano del Pozzo) au point que selon Vasari, Rosso et Primatice qui
Paris, Hôtel Drouot, 9 mars 2012, lot 33. Paris, Bibliothèque Nationale de France (= BNF), cote Bnf; Ba-12 (1)-Fol, à l’œuvre de Rosso. PRIMATICE 2004, pp. 125-126. 3 Paris, Musée du Louvre, Département des Arts Graphiques (= DAG), inv. 1587. 1 2
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s’en partageaient la conception, s’en étaient fait une grande réputation4. Les correspondances des Ambassadeurs auprès des princes d’Este et Gonzague sont des apports incontournables dans la connaissance de la vie de la cour en ce temps. Retranscrites et publiées en 2001 par Carmelo Occhipinti, elles sont précieuses car elles décrivent scrupuleusement les costumes et autres artifices dans les plus infimes détails5. Elles constituent l’un des rares moyens d’identification de ces fêtes. Les déguisements peuvent en être le fil conducteur mais une grande prudence se justifie car ces derniers ont pu servir à une ou plusieurs fêtes ou rester à l’état de projets. Bien que ces festivités aient été documentées dès les années 1530, nous ne nous attacherons qu’aux lettres décrivant les habits antiques apparus probablement vers 15396. Durant cette époque et jusqu’en 1540, Rosso est le concepteur général de Fontainebleau. Il est assisté par des collaborateurs comme Primatice, Léonard Thiry ou des architectes et des sculpteurs. En 1539, l’événement le plus attendu dans le royaume est la venue de Charles Quint. D’après Vasari, pour l’entrée à Paris de l’Empereur, Rosso se surpassa en tant qu’architecte de l’éphémère, construisant des arcs et des colosses d’une beauté édifiante. Charles Quint, attendu à Fontainebleau, visite le palais, ses somptueux décors et assiste probablement aux réjouissances données en son honneur. Finalement, on ne sait pas grand-chose des fêtes qui s’y déroulèrent et il est difficile de relier certains documents avec des projets dessinés. Il est certain que des agapes festives, avec des animations, eurent lieu7. DoVASARI 1985, pp. 170, 188-189. OCCHIPINTI 2001. 6 La figure d’Hercule dans une gravure de Léon Davent (Paris, BNF) d’après Rosso a été peut être utilisée pour l’arrivée de Charles Quint, mais nous n’en avons aucune certitude. 7 PRIMATICE 2004, p. 125 : «Pourtant, aucun document ne relate de divinités nues montées sur des chars, à moins qu’ils les comptent au nombre de toute sorte de divertissements offert par François Ier à l’Empereur». 4 5
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minique Cordellier a envisagé de mettre en rapport la série de gravures d’après Rosso éditées par Jacques Grandhomme (BNF) et certains dessins de Rosso et de Primatice représentant ces Dieux et Déesses sur des chars8. L’édification du palais de Fontainebleau est le grand témoin de la passion du roi pour l’Antiquité, avec la création de la grande galerie où la mythologie est exaltée sur les parois. Les bals masqués sont de véritables mises en scènes vivantes où l’on tente, le temps d’une soirée, de faire revivre les grands mythes antiques. L’Ambassadeur Carlo Sacrati, décrit le 6 février 1541 à Ercole d’Este un Carnaval donné à Fontainebleau par François Ier. Trois jours après, une autre fête est à nouveau signalée par le même auteur. Il s’agit d’une mascarade à laquelle le roi y prit part avec Charles d’Angoulême. Ce diplomate italien mentionne: «[…] six dieux et déesses avec leurs symboles et attributs, tous vêtus à l’antique, parés d’or et d’argent apparaissant assis sur un trône de toile d’argent alors qu’ils se tenaient debout»9. Dans une autre lettre du 26 septembre 1541, il relate que «des danseurs dit morescanti (acrobates) dansaient nus, les mains au sol, la tête en bas et les pieds en l’air»10. L’Ambassadeur, Ludovico da Thiene décrit dans une correspondance du 25 février 1542, la célébration des noces de Claude de Clermont, baron de Dampierre et de Vivonne de la Châtaigneraie ainsi que deux bals masqués pour le Carnaval à Paris. Le thème choisi que nous livrent les dessins est à nouveau l’Antiquité personnifiée par les dieux de l’Olympe. Le costume de la déesse Diane, dessiné par Primatice (Musée du Louvre, fig. 2)11 est quelque peu différent de la description laissée par Ludovico da Thiene. PRIMATICE 2004, pp. 125-127. OCCHIPINTI 2001, chap. IX, p. CXVII, 56-57 n. LXXXIX. 10 OCCHIPINTI 2001, chap. IX, p. CXVII, note 467 et 468. 11 Paris, musée du Louvre, DAG, inv 1593. PRIMATICE 2004, n. 24, p. 126. «De plus, on ne peut déterminer si cette Diane est ou pas en rapport 8 9
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A la lecture de ces missives, on notera le regard rétroactif et comparatif que porte le diplomate sur l’évolution esthétique des costumes réalisés par Rosso. Selon Carmelo Occhipinti «L’interprétation du florentin de l’antiquité est assez subjective par rapport au Primatice qui est plus documenté. Celui-ci conçoit de nouveaux costumes ‘àl’Antiqua’ libéré de l’ascendance du florentin»12 (il vient de succéder à Rosso, à Fontainebleau en 1540). Primatice peut ainsi montrer sa culture plus érudite grâce à sa collaboration avec Giulio Romano à Mantoue et ses voyages à Rome, où il collecte des antiques pour le roi. Un changement se produit dans l’interprétation de l’antique sur le plan stylistique et intellectuel. Il se manifeste en peinture comme le souligne Occhipinti: «le dialogue entre la peinture et la sculpture qui avait commencé à la galerie de Rosso, parvenait à une nouvelle phase»13. Les dessins de Rosso et de son collaborateur Léonard Thiry en témoignent. Leurs personnages ressemblent dans certains cas à des masques14, alors que Primatice donne une autre vision de l’antique lorsqu’il tente d’insuffler la vie à ses personnages pour montrer la supériorité de la peinture sur la statuaire. N’avait-il pas essayé d’illustrer cette manière dans sa fresque de l’Union féconde de Vertumne et Pomone pour le petit pavillon construit en dur à Fontainebleau15. Ses dessins sont d’ailleurs les premiers à être colorés alors que ceux de Rosso étaient monochromes. La manière plus humaine de Primatice de faire revivre l’Antiquité, correspond à des années plus tardives que la série des vingtdeux gravures des Dieux sur des chars de la BNF d’après Rosso, citées précédemment. avec la série gravée de la BNF édité par Jacques Granhomme car la planche 12 qui devait l’illustrer est manquante, «les dieux gravés marchent par couple, Apollon (planche 11) est le frère de Diane (planche 12)». 12 OCCHIPINTI 2001 , chap. IX, pp.CXVIII-CXIX. 13 OCCHIPINTI 2001, p. CXIX. 14 LE DESSIN EN FRANCE AU XVIE SIECLE 1994, n. 37 pp.108-121. 15 OCCHIPINTI 2011, pp. 33-64.
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Notre dessin appartient à un corpus graphique représentant des dieux dans leur stricte nudité, la plupart gravés en sens inverse par un auteur inconnu et édité par Jacques Grandhomme. On citera les dessins de Neptune sur un char par Rosso du musée Pouchkine de Moscou (fig. 3)16, le Neptune de Primatice (?) du Musée National de Stockholm (fig. 4)17, l’Apollon du Louvre18 et celui de la galerie Gismondi. Ce dernier de dimensions similaires (22 x 34 cm) aux deux dessins de Neptune est plus grand que celui du Louvre. Il laisse ainsi apprécier la quasi-totalité de la composition et sa force expressive. Ces deux feuilles d’Apollon montrent le dieu sans son attribut, le soleil. Il présente à la place une paire de flambeaux, peut-être pour une parade nocturne19 contrairement à la gravure de la BNF (pl. 11) qui montre Apollon tendant dans ses mains un soleil, monté sur un char roulant sur des nuées. Ces nuages sont absents de l’ensemble des feuilles dessinées. Nous sommes en présence de copies anciennes pour celles qui ne sont pas de Rosso, car de nombreux dessins de l’artiste ont disparus et sont connus par les copies de Primatice et de Thiry et ses gravures qui demeurent les seuls témoignages de sa production. Certains dessins de Rosso, Primatice et Thiry, ainsi que notre feuille, présentent des difficultés d’identification, tant la proximité stylistique entre ces artistes est importante dans certains cas. Avec Primatice, nous pouvons mettre en relation la feuille de l’Ecole des Beaux-arts de Paris Diane au bain avec trois de ses
UOMINI, SANTI E DRAGHI 1992, Inv. 14075. ROSSO 2004, p. 53, fig. 50. PRIMATICE 2004, n. 23, p. 125. Stockholm, National Museum, Inventaire ANCK. 588. (21,3 x 29,3 cm). 18 Paris, Musée du Louvre, DAG, Inv. 1587. PRIMATICE 2004, cat. 23, p. 125. 19 Les flambeaux, torches odoriférantes avec les costumes d’Hyménées que nous connaissons par le dessin de Primatice conservé à Florence (Biblioteca Nazionale Centrale, Pala.C.B.3 53, II, c. 46) ont été décrits par Ludovico da Thiene dans une lettre de 24 février 1542 lors du mariage du baron Dampierre. 16 17
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compagnes apercevant Actéon20. Le profil de Diane est dessiné en quelques traits et montre l’œil globuleux avec une pommette saillante tandis que la bouche et le menton sont bien marqués. Dans un autre dessin de Diane assise sur un char du Louvre21, le visage, les mains et les ongles, rapidement dessinés, sont vraiment proches de la feuille Gismondi. Quant au Neptune de Primatice (?) de Stockholm22, la facture du pied droit est similaire au dessin de cette collection. Parmi les caractéristiques graphiques de Rosso visibles dans L’Apollon assis, tenant la lyre et la peau de Marsyas (musée du Louvre)23 on observe le profil du visage avec sa joue rebondie, la bouche entre-ouverte, la cavité oculaire saillante, les oreilles ourlées, le traitement de la chevelure et la présence des repentirs qui se retrouvent sur le dessin Gismondi, mais traités avec un tracé plus fort. La production graphique de Léonard Thiry qui est inégale, se rapproche de notre dessin par certains aspects comme par exemple quelques profils appartenant au recueil des vingt bustes dessinés par le flamand conservés à l’Ecole nationale des Beaux-arts de Paris. Par contre, elle s’en éloigne avec certaines feuilles du flamand dont: Céphale et Procris de la BNF (fig. 5)24, par une facture plus rapide, les nez des personnages pointus, leurs oreilles vides, leur corps plus sommaires et leur chevelure dans le vent. En revanche, le traitement du modelé des corps, exprimés par des petits traits successifs, se retrouve sur l’Apollon Gismondi. Cette même technique d’expression du modelé des corps est présente dans les feuilles de Rosso et de SUITE FRANÇAISE 2006, n. 2, pp. 44-47. Paris, Musée du Louvre, DAG, Inv. 1587. PRIMATICE 2004, n. 24, pp. 125-126. 22 PRIMATICE 2004, n. 23, p. 125. 23 Paris, Musée du Louvre, DAG, Inv. 8632; il fut attribué à Thiry en 1976 (CARROLL 1976, pp. 406-408) et redonné en 1987 à Rosso par le même historien E.A. Carroll (ROSSO FIORENTINO 1987, p. 48 note 29). 24 GASNAULT, LEPAPE 2013, pp. 4-13. 20 21
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Primatice mais moins systématique que dans celle de Thiry. Par ailleurs, l’œuvre graphique de Thiry ne possède pas de dessin proche de la série gravée des Dieux sur des chars cités précédemment. Les liens entre ces artistes sont méconnus. Ils ont réalisés des copies minutieuses d’après le maître florentin, au point qu’il est difficile d’identifier le style de chacun25. Un ensemble de dessins donné au buriniste René Boyvin a été récemment désattribué en la faveur de Thiry. Il s’agit de la série des trois dessins représentant une Nativité25, dont l’invention du sujet revient probablement à Rosso. La connaissance actuelle de cet artiste en tant que dessinateur, fait actuellement débat. On ne connait qu’un petit nombre de feuilles dessinées par ce graveur. Le travail d’Hélène Gasnault sur l’œuvre de Léonard Thiry26 va permettre de clarifier la part de chaque artiste. Sur les soixantedix dessins de l’artiste, quarante-six sont repassés au stylet. Il a été le principal collaborateur de Rosso et a conçu avec les deux burinistes, Pierre de Milan et René Boyvin, de nombreuses gravures, perpétuant ainsi l’œuvre de son maître. Thiry a «mis au net» les compositions originales et les a repassées au stylet en vue d’être gravées. Vasari était lui-même surpris face à «la mode de la gravure qui avait pris un tel essor avec Rosso au point qu’il possédait un dessinateur attitré qui copie ce qu’il fait de beau pour le publier». Selon H.Gasnault, «les burinistes semblent avoir travaillé directement d’après les dessins de Thiry et non d’après des copies qu’ils auraient eux-mêmes réalisés» 27. Le dessin Gismondi possède un filigrane de la ville d’Utrecht (Briquet 2141); cette marque est présente sur des papiers en cirGASNAULT 2011, chap. IV: «Il n’est pas aisé de savoir où s’arrête l’œuvre du florentin et où commence celle du Flamand (L. Thiry)». 26 Paris, BNF, Département des estampes et de la photographie, Réserve, Res B5a (3); Londres, The British Museum, inv. 1863-1-10-6; Collection privée. 27 GASNAULT 2010. GASNAULT 2012, note 2, p. 62. 25
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culation dans cette ville entre 1539 et 1553 et peut apporter une réponse d’attribution, car elle semble correspondre à la datation de l’Apollon. En revanche, les feuilles répertoriées par la spécialiste de Thiry ne possèdent pas cet d’emblème. De nombreuses incertitudes entourent cette période féconde, où une incroyable volonté de vulgarisation de l’œuvre de François Ier a été mise en place. C’est bien à Fontainebleau que toute forme de copie était considérée comme une œuvre à part entière, tels les moulages d’antiques, les fontes de bronzes, les tableaux, les dessins et les gravures, dans le but ultime de diffuser le style bellifontain dans toute l’Europe28.
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Bibliografia BRIQUET = C.M BRIQUET, Les filigranes. Dictionnaire historique des marques de papier dès leur apparition vers 1282 jusqu’en 1600, 4 voll., Leipzig 1923. CARROLL 1976 = E.A. CARROLL, The Drawings of Rosso Fiorentino, (Outstanding dissertation in the fine arts. Diss. Harvard University, Cambridge, Mass., 1964), New York-London 1976. LE DESSIN EN FRANCE AU XVIE SIECLE 1994 = Le dessin en France au XVIe siècle: dessins et miniatures de l’Ecole des Beaux-arts de Paris, catalogue de l’exposition (Paris, 23 septembre-6 novembre 1994), sous la dir. de E. Brugerolles, D. Guillet, Paris 1994. GASNAULT 2010 = H. GASNAULT, Léonard Thiry invenit, recherches sur un peintre flamand de l’Ecole de Fontainebleau, mémoire de Master II, Histoire de l’art. Université Paris-Sorbonne Paris IV (dir. Mr Grivel), 2 voll., 2010. GASNAULT 2011 = H. GASNAULT, Léonard Thiry (ca.1500-ca1550), dans l’ombre de Rosso, thèse, Ecole des Chartres (dir. T. CrépinLeblond et M. Grivel), 2 voll., 2011. These.enc.sorbone.fr, 2011. GASNAULT 2012 = H. GASNAULT, Léonard Thiry, de l’Estampe au dessin et du dessin à l’estampes: Procédés de la création chez un artiste de la première école de Fontainebleau, in Le dessin dans la Révolution de l’Estampe, 7e rencontres internationales du Salon du dessin, actes du colloque Dessiner pour graver, graver pour dessiner, Paris 2012. GASNAULT, LEPAPE 2013 = H. GASNAULT, S. LEPAPE, Rosso ou Thiry ? Autour d’un dessin inédit, Céphale ou Procris, in «Nouvelles de l’estampe», 242, 2013, pp. 4-13. OCCHIPINTI 2001 = C. OCCHIPINTI, Carteggio d’arte degli Ambasciatori estensi in Francia (1536-1553), Pisa 2001. OCCHIPINTI 2010 = C. OCCHIPINTI, Primaticcio e l’arte di gettare le statue di bronzo. Sul mito della «Seconda Roma» nella Francia del XVI secolo. Roma 2010. OCCHIPINTI 2011 = C. OCCHIPINTI, Su l’unione feconda di Vertumno e Pomona della Galleria Gismondi. Primaticcio e Rosso e la cultura artistica di Fontainebleau, in «Horti Hesperidum. Studi di storia del collezionismo e della storiografia artistica», I, 2011, 2 Primaticcio e le arti alla corte di Francia, atti dell’incontro di studio (Pisa, Scuola Normale Superiore, 10-12 ottobre 2008), pp. 33-67. PRIMATICE 2004 = Primatice, maître de Fontainebleau, catalogue de l’exposition (Paris, Musée du Louvre, 22 septembre-3 janvier 2005), sous la dir. de D. Cordellier, Paris 2004. 68
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ROSSO 2004 = Rosso. “Le Christ mort”, catalogue de l’exposition (Paris, Musée du Louvre, 22 septembre 2004-3 janvier 2005, sous la dir. de C. Scaillierez, Paris 2004. ROSSO FIORENTINO 1987 = Rosso Fiorentino, Drawings, Prints and Decorative Arts, catalogue de l’exposition (Washington, National Gallery, 1987-1988), sous la dir. de E.A. Carroll, Washington 1987. SUITE FRANÇAISE 2006 = Suite française. Dessins de la collection Jean Bonna, catalogue de l’exposition (Paris, Ecole des Beaux-Arts, 14 février-23 avril 2007), sous la dir. de E. Brugerolles, Paris 2007. UOMINI, SANTI E DRAGHI 1992 = Uomini, santi e draghi, capolavori del Museo Puškin di Mosca. Disegni italiani del XV al XVIII secolo, catalogue de l’exposition (Aosta, Centro Saint-Benin, 18 juillet-8 novembre 1992), sous la dir. de M. Mayskaya, Milano 1992. VASARI 1985 = G. VASARI, Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, trad. et édition commentée sous la direction d’André Chastel, vol. VIII, Paris 1985.
Didascalie Fig. 1. Un homme nu à demi-assis sur un char (Apollon?). Paris, Collection Jean Gismondi. Fig. 2. F. Primatice, Diane assise sur son char. Paris, Musée du Louvre, Département des Arts Graphiques, Inv. 1593 recto. Fig. 3. Rosso Fiorentino, Neptune sur son char. Moscou, Musée Pouchkine, Inv. 14075. Fig. 4. Francesco Primaticcio?, Neptune sur son char. Stockholm, Musée National, Inv. Anck. 588. Fig. 5. Léonard Thiry, Céphale et Procris. Paris, Bibliothèque Nationale de France, Département Estampes et Photographie, Réserve boite Fol-B-6 (A).
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