DÉBAT&CO
Le site des sciences économiques et sociales MAI 2016
LE DIALOGUE SOCIAL LE MODÈLE NÉOCLASSIQUE DU MARCHÉ DU TRAVAIL DÉCRIT LA CONSTITUTION D’UNE OFFRE ET D’UNE DEMANDE DE TRAVAIL GLOBALES, EN FONCTION D’UNE RÉMUNÉRATION, LE SALAIRE. L’ÉQUILIBRE SUR CE MARCHÉ EST ATTEINT LORSQUE L’OFFRE EST ÉGALE À LA DEMANDE : LE SALAIRE D’ÉQUILIBRE (OU TAUX DE SALAIRE RÉEL) RÉMUNÈRE LES TRAVAILLEURS ACCEPTANT LES CONDITIONS FIXÉES PAR LE MARCHÉ. Dans la réalité, la fixation des salaires ne résulte pas uniquement d’un équilibre de marché. Comme le souligne le programme de sciences économiques et sociales de terminale (2.1 Comment s’articulent marché du travail et gestion de l’emploi ?), les salaires sont en partie déterminés par des négociations entre les partenaires sociaux, regroupant les représentants du patronat et les organisations syndicales représentatives des salariés. Les pouvoirs publics participent parfois aux négociations. Au terme de ce dialogue social conventionnel (formel), un accord écrit est signé. Il s’agit d’une convention collective qui est un complément au droit du travail ; elle encadre les relations entre les employeurs et les salariés. Pour que le dialogue social conventionnel soit efficace, deux
conditions sont nécessaires : les organisations patronales et syndicales signataires doivent représenter le plus de salariés et d’entreprises possibles, et les accords obtenus doivent pouvoir être généralisés aux salariés non syndiqués. Le taux de syndicalisation des salariés français est faible (7,7% en 2012), mais le taux de couverture par des accords collectifs (la part des salariés concernés par ces accords) figure parmi les plus importants de l’OCDE : près de 93% en 2008. Pour les économistes Marc Ferracci et Florian Guyot (Dialogue social et performance économique, 2015), les accords conventionnels entre partenaires sociaux ne constituent qu’un aspect du dialogue social : il faut également prendre en compte le dialogue social non conventionnel (informel) qui s’inscrit dans le cadre d’interactions quotidiennes entre les salariés et leur encadrement direct. Afin d’éclairer les multiples enjeux du dialogue social, nous avons demandé à Marc Ferracci, économiste dont les travaux portent sur le marché du travail et son fonctionnement, de nous présenter sa perception des forces et des faiblesses des négociations telles qu’elles sont pratiquées en France. Jacques Adoue, Directeur des relations sociales du groupe Capgemini, nous expliquera comment ce dialogue se construit au sein d’une firme multinationale n
Taux de syndicalisation et taux de couverture des conventions collectives. Lecture : en France en 2016, 7,7% des salariés sont syndiqués (les syndicats de salariés sont faiblement représentatifs en France). Toutefois, plus de 90% des salariés sont couverts par des conventions collectives n Source : D’après données de l’OCDE, 2016
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3 QUESTIONS À MARC FERRACCI
Professeur à l’Université Panthéon-Assas CRED. Membre du Crest Laboratoire de microéconométrie.
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LA FRANCE EST SOUVENT PRÉSENTÉE COMME UN PAYS DANS LEQUEL LE DIALOGUE SOCIAL SE RÉSUME À UN AFFRONTEMENT ENTRE LES EMPLOYEURS ET LEURS SALARIÉS, ABOUTISSANT À DE NOMBREUSES GRÈVES : EST-CE RÉELLEMENT LE CAS ? Depuis une trentaine d’années, la conflictualité a tendance à diminuer en France : en 2013, seules 1,2% des entreprises françaises ont déclaré au moins une grève. Mais cette conflictualité est très peu homogène : elle est faible dans les petites entreprises et plus importante dans les grands groupes. Plus généralement, on ne peut pas dire que le dialogue social fonctionne bien en France. Les enquêtes internationales montrent que le dialogue social informel (qualité des échanges et confiance qu’ont les parties prenantes entre elles) est de moins bonne qualité que dans les autres pays développés. Par ailleurs, il est difficile de transformer le dialogue social informel en dialogue social formel (en accords légaux). Thomas Breda le montre dans son ouvrage publié en mars 2016, Les représentants du personnel : seules 10% des entreprises où il existe une possibilité de signer des accords collectifs le font effectivement. L’absence de représentants du personnel et surtout le manque de confiance des partenaires sociaux expliquent la faiblesse de ce taux n
QUELLES SONT LES PARTICULARITÉS DU DIALOGUE SOCIAL « À LA FRANÇAISE » EN COMPARAISON DE CELUI DES AUTRES PAYS DÉVELOPPÉS COMME L’ALLEMAGNE OU LES PAYS ANGLO-SAXONS ? Du point de vue du dialogue social formel, les Allemands sont mieux armés que nous. Leur taux de syndicalisation n’est pas le plus élevé des pays développés (18%), mais il existe une culture de la participation des salariés aux décisions de l’entreprise plus forte qu’en France. Dans les entreprises de plus de 500 salariés, leurs représentants constituent un tiers des membres du conseil d’administration, et disposent d’une voix délibérative. En somme, la pratique allemande est plus volontariste, coordonnée et davantage empreinte de confiance qu’en France. Dans les pays anglo-saxons, pour bénéficier des accords collectifs, l’adhésion syndicale des salariés est obligatoire. Les syndicats recrutant plus, ils sont plus opiniâtres pour négocier des accords avantageux. En France, un accord signé par un syndicat représentatif couvre légalement tous les salariés de la branche ou de l’entreprise, qu’ils soient ou non adhérents de ce syndicat. Cela aboutit à un taux de couverture élevé (93% des salariés français), mais l’incitation à se syndiquer demeure faible, dégradant la qualité du dialogue social n
LE DIALOGUE SOCIAL PEUT-IL CONTRIBUER À LA FOIS À L’AMÉLIORATION DU BIEN-ÊTRE DES SALARIÉS ET À CELLE DES PERFORMANCES DE L’ENTREPRISE ? Ce que nous disent les études économiques, c’est qu’un dialogue social de qualité, à la fois dans sa dimension formelle et informelle, génère des bénéfices économiques. Il y a évidemment des bénéfices en termes de salaires, mais également en termes de productivité et de profitabilité pour les entreprises. Le dialogue social est donc facteur d’efficacité mesurable. Lorsqu’il est de qualité au sein d’une entreprise, il se traduit par plus de productivité que dans des entreprises similaires mais dépourvues de présence syndicale ou d’accords signés n
Chiffre étonnant 30,2%
des accords interprofessionnels et de branches ont été signés par la Confédération générale du travail (CGT ; syndicat d’opposition) en 2014, contre 85% pour la Confédération française démocratique du travail (CFDT ; syndicat réformateur). Le taux de signature correspond à la part des accords signés par un syndicat dans l’ensemble des textes négociés.
L’ESSENTIEL SUR “LE DIALOGUE SOCIAL” • Définitions
• Repères historiques
DIALOGUE SOCIAL Conventionnel, il correspond aux négociations entre les partenaires sociaux ; non conventionnel, il correspond aux relations sociales quotidiennes entre les salariés et leur hiérarchie.
21 MARS 1884 Loi Waldeck-Rousseau autorisant la création de syndicats professionnels, mettant fin à l’interdiction des corporations professionnelles de 1791.
CONTRAT DE TRAVAIL Document à valeur juridique qui mentionne qu’un individu s’engage à travailler, moyennant rémunération, pour le compte d’une entreprise et sous le contrôle de son employeur ou/et d’une hiérarchie. CONVENTION COLLECTIVE Accord écrit résultant de la négociation entre des représentants des employeurs et des syndicats de salariés. Elle porte sur les conditions de travail et l’emploi des salariés. La négociation d’une convention collective permet d’adapter les règles du code du travail aux spécificités d’une branche d’activité, sans pour autant y déroger.
31 JANVIER 2007 Loi relative à la modernisation du dialogue social ; tout projet gouvernemental en matière de relations de travail ou d’emploi donne lieu à concertation préalable des partenaires sociaux. 14 DÉCEMBRE 2013 L’accord national interprofessionnel (ANI) relatif à la formation professionnelle porte sur deux points majeurs : le financement de la formation professionnelle et le compte personnel de formation. 17 AOÛT 2015 Loi relative au dialogue social et à l’emploi qui permet aux entreprises de 50 à 300 salariés de regrouper les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, dans une délégation unique du personnel (DUP).
1,2%
(en France)
des entreprises de dix salariés ou plus ont déclaré, en 2013, avoir connu au moins une grève.
36 500
nombre d’accords collectifs signés en 2014 par tous les syndicats au niveau des entreprises.
POUR “FAIRE LE POINT ” À la fin du XVIIIe siècle, la Révolution française assure la liberté du travail et celui-ci devient une marchandise vendue sur un marché […]. À partir de la fin du XIXe siècle se met en place la « société salariale » avec l’industrialisation : de plus en plus de travailleurs sont salariés et la profession devient un des éléments centraux du statut social. Parallèlement, la croissance et l’intervention de l’État s’accompagnent de protections collectives comme les assurances sociales. Au XXe siècle, les relations professionnelles se sont institutionnalisées par la reconnaissance légale des partenaires sociaux, c’est-à-dire des syndicats de salariés et d’organismes de représentation des employeurs, et la construction de normes d’emploi. L’évolution des rapports de force entre les partenaires sociaux, l’essor et les transformations des syndicats affectent la relation salariale et le rythme de croissance des salaires. Les grandes dates du mouvement ouvrier en France (1936, 1968) marquent des ruptures dans les conditions de travail, le temps de travail, l’évolution des salaires. Plus globalement, l’institutionnalisation des syndicats structure ce qu’on a appelé le « compromis fordiste » […]. C’est aussi la naissance du rapport salarial, qui s’accompagne de la norme de l’emploi stable durant la période des Trente Glorieuses (1945-1973) : le rapport salarial « fordiste » repose ainsi sur la rationalisation du travail qui permet des gains de productivité, une consommation de masse, le développement des services publics et des protections collectives plus fortes avec le renforcement du droit du travail. Enfin, sous l’égide de l’État, les négociations collectives entre employeurs et salariés deviennent possibles […]. La suite sur Melchior : http://www.melchior.fr/Faisons-le-point.11865.0.html
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Testez vos connaissances A) À partir de quelle date les syndicats de travailleurs sont-ils reconnus en France ? 1) 1791 2) 1884 3) 1936 B) Vrai ou faux ? 1) Les négociations conventionnelles sont les seules formes de dialogue social au sein des entreprises : V/F 2) La qualité des relations hiérarchiques au sein d’une entreprise a des répercussions sur les performances économiques : V/F C) Comment expliquer le faible taux de syndicalisation des salariés français par rapport à celui des autres pays européens ? 1) Les salariés bénéficient d’une bonne couverture par des accords conventionnels sans avoir besoin d’être syndiqués. 2) Les salariés n’ont pas toujours confiance en leurs syndicats. 3) Les salariés sont de plus en plus individualistes. Réponses : A2 / B1=faux / B2= vrai / C1,C2,C3 = vrai
Chiffres clés
PARTENAIRES SOCIAUX Ensemble des représentants des organisations patronales et des syndicats de salariés qui négocient les conventions collectives et participent à la gestion de la Sécurité sociale.
AOÛT À DÉCEMBRE 1982 Les lois Auroux instaurent une obligation annuelle de négocier dans l’entreprise, sur les salaires, la durée et l’organisation du travail.
IDÉES ET DÉBATS
Débat scientifique en classe : quel est l’effet du dialogue social sur la performance économique de l’entreprise ? Marc Ferracci et Florian Guyot, Dialogue social et performance économique, Presses de Sciences Po, 2015 Quatrième de couverture : « Selon l’Organisation internationale du Travail (OIT), le dialogue social inclut tous types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs selon des modalités diverses, sur des questions relatives à la politique économique et sociale
Principaux thèmes négociés en commission mixte partitaire (en % par rapport à l’ensemble des thèmes négociés en 2014)
présentant un intérêt commun […]. Les processus de dialogue social peuvent être institutionnalisés ou associer – ce qui est souvent le cas – ces deux caractéristiques ». Dans cet ouvrage, l’objectif des auteurs est de décrypter les liens qui existent entre le dialogue social et la performance économique, tant au niveau microéconomique que macroéconomique. Le dialogue social, son intensité et sa qualité, est lié aux institutions du marché du travail : en France, les réformes de la protection de l’emploi, de l’assurance chômage ou encore de la formation professionnelle sont négociées au préalable par les partenaires sociaux. […] Marc Ferracci et Florian Guyot évoquent plus en détail les relations entre la syndicalisation, les salaires, l’emploi et les inégalités. Quel est par exemple l’impact de la syndicalisation sur les salaires ? Cet impact, loin d’être systématique, dépend du pouvoir de négociation des syndicats : ainsi dans les entreprises en situation monopolistique ou oligopolistique, la « prime syndicale » peut être plus élevée, car elles peuvent reporter plus facilement la hausse de leurs coûts salariaux sur les prix de vente, tout en maintenant leurs profits. Par ailleurs, l’adhésion syndicale ou la couverture par des accords collectifs peut maintenir le niveau des salaires en période de récession, et soutenir la demande globale. Pourtant, les travaux disponibles montrent que le niveau de cette « prime salariale » dépend lui-même du niveau de négociation salariale et du cadre institutionnel en vigueur dans le pays n La suite sur Melchior.fr
Évolution trimestrielle du salaire de base et du salaire conventionnel
Champ : Salariés des entreprises de 10 salariés ou plus d’un échantillon de 247 branches.
Source : d’après le Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Notes de lecture : - Le salaire mensuel de base (SMB) correspond au salaire brut ; il ne comprend ni les primes ni les heures supplémentaires. Le salaire conventionnel résulte des conventions de branches. - Au troisième trimestre de l’année 2012, le salaire conventionnel des salariés des entreprises de 10 salariés ou plus a augmenté en moyenne de 0,3% et leur salaire de base de 0,5%. Notes : - En cas de difficulté de négociation entre les partenaires sociaux, le code du travail permet d’avoir recours à une commission mixte paritaire (CMP) présidée par un représentant du ministère chargé du travail. Les textes conventionnels négociés en CMP sont des accords de branches. - Les deux principaux thèmes abordés en 2014 sont le salaire (19,4% de l’ensemble des thèmes) et le temps de travail (18,9%).
Les 3 niveaux de fixation des salaires en France
Source : La négociation collective en 2014, Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Source : La négociation collective en 2014, Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, Mai 2015.
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DIALOGUE SOCIAL : LES CINQ CLEFS DE LA REFONDATION APRÈS L’ECHEC DE LA NÉGOCATION SUR LE DIALOGUE SOCIAL [AU DÉBUT DE L’ANNÉE 2015], APRÈS LES IMAGES DE VIOLENCES SURVENUES CHEZ AIR FRANCE PENDANT UN COMITÉ D’ENTREPRISE, APRÈS LE REFUS DE LA CGT DE PARTICIPER À LA CONFÉRENCE SOCIALE DU 19 OCTOBRE 2015, D’AUCUNS POURRAIENT CONSIDÉRER QUE LE DIALOGUE SOCIAL N’A PLUS D’AVENIR EN FRANCE. […] Les entreprises sont confrontées à des situations de transformation et de rupture […]. Des modèles économiques volent en éclats en quelques mois. […] Certains annoncent la fin du salariat. Nous avons dépassé le million d’auto-entrepreneurs en France à l’été 2015. D’autres pensent que la destruction d’emplois sera de plus grande ampleur que les créations et que ces deux mouvements ne seront pas concomitants. Il est donc probable qu’il n’y a pas que chez Air France que nous rencontrerons des réactions de révolte. […] Dans un tel contexte, est-il raisonnable de penser qu’il y a encore du temps pour dialoguer et du « grain à moudre » pour la négociation d’accords ? […] Les solutions sont connues. […] Celles-ci tiennent en quatre points.
CONSIDÉRER LA NÉGOCIATION AU NIVEAU DE L’ENTREPRISE COMME LE CŒUR DU MOTEUR DES TRANSFORMATIONS NÉGOCIÉES. C’est le niveau le plus pertinent pour garantir la meilleure adéquation entre les enjeux business et les enjeux humains. Plus de 36 000 accords ont été signés dans les entreprises en 2014. C’est la preuve d’un réel dialogue social. PRIVILÉGIER L’ACCORD MAJORITAIRE. La mise en œuvre de la loi de 2013 sur les restructurations en a apporté la preuve. 80 % des procédures de plan social, le sujet le plus difficile qu’une entreprise ait à affronter, ont fait l’objet d’une négociation qui, dans plus de 50 % des cas, s’est conclue par un accord majoritaire ! C’est donc possible. DONNER À UN ACCORD MAJORITAIRE D’ENTREPRISE QUI PORTE SUR UN ENJEU D’EMPLOI LE POUVOIR DE DÉROGER AUX DISPOSITIONS D’ACCORDS DE BRANCHE ET AUX DISPOSITIONS DES CONTRATS INDIVIDUELS DE TRAVAIL. C’est le nœud du problème entre l’agilité économique et l’intérêt général. […]
LIMITER LA DURÉE DES ACCORDS MAJORITAIRES À 3 ANS LORSQU’ILS PORTENT SUR LE TEMPS DE TRAVAIL, LES SALAIRES ET L’EMPLOI. Dès lors que ces accords peuvent s’imposer aux clauses des contrats individuels de travail, leur durée doit être limitée, comme le mandat de ceux qui ont été élus pour les signer. RELEVER À 15 % (RÉSULTATS AUX ÉLECTIONS DE COMITÉ D’ENTREPRISE) LE SEUIL DE LA REPRÉSENTATIVITÉ D’UNE ORGANISATION SYNDICALE APTE À SIGNER UN ACCORD MAJORITAIRE DANS UNE ENTREPRISE OU UNE BRANCHE. Ce seuil est aujourd’hui à 10 % (8 % au niveau branche). Signer un accord majoritaire est un acte de représentants responsables. Ils doivent pour cela se sentir soutenus par une représentativité solide. Est-ce suffisant ? Certainement pas. C’est un socle minimum. Le second pilier repose sur la sécurisation apportée à chaque personne active lorsqu’elle se trouve dans une transition entre deux activités. C’est tout l’enjeu du compte personnel d’activité (CPA), concept encore un peu flou qui reste à définir très concrètement n
Pierre BERRETTI (Président d’Altedia, cabinet de conseil en ressources humaines), Les Échos, le 26 octobre 2015.
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REGARD SUR L’ENTREPRISE ET SON ÉCOSYSTÈME
Le nouvel accord triennal sur le handicap. Le recrutement de 168 personnes handicapées et l’accueil de 180 stagiaires en situation de handicap : c’est l’un des engagements contenus dans le nouvel accord triennal 2016-2018 sur le handicap conclu entre la direction de Capgemini France et les syndicats CGT, CFE-CGC, CFDT et FO. Cet accord, qui a pris effet le 1er janvier dernier, est le quatrième – le premier date de 2006 – que déploie le groupe de conseil dans l’Hexagone. Une politique qui lui permet d’afficher un taux d’emploi de salariés handicapés de 2,8 % à fin 2015, contre 1,4 % pour l’ensemble de la branche Syntec. Au total, 452 collaborateurs en situation de handicap évoluaient au sein de Capgemini à fin 2015. Sans compter les 119 stagiaires handicapés, ainsi que l’emploi de 144 personnes généré par le recours au secteur du travail protégé et adapté. L’entreprise reconnait toutefois rencontrer de grandes difficultés pour recruter des candidats pour des métiers qui exigent une qualification professionnelle de niveau ingénieur. Et ce malgré la présence de chargés de recrutement et d’intégration (CRI), répartis sur l’ensemble des sites de Capgemini en France n Jean-François Rio, « Capgemini signe un nouvel accord en faveur de l’emploi des personnes handicapées », 14 mars 2016.
CAPGEMINI en 5 chiffres clés
Source : Capgemini, Document de référence 2014, Avril 2015
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• 143 650 SALARIÉS DANS LE MONDE • IMPLANTATION COMMERCIALE DANS 40 PAYS • CHIFFRE D’AFFAIRES : 10 573 MILLIONS D’EUROS EN 2014 • RÉSULTAT NET : 580 MILLIONS D’EUROS EN 2014 • MARGE OPÉRATIONNELLE (OU MARGE D’EXPLOITATION ; ELLE EST ÉGALE AU RAPPORT ENTRE LE RÉSULTAT D’EXPLOITATION ET LE CHIFFRE D’AFFAIRES) : 9,2% EN 2014
POUR “ALLER PLUS LOIN ” OCDE (2013), « Perspectives de l’emploi de l’OCDE 2013 », Éditions OCDE. http://dx.doi.org/10.1787/empl_outlook-2013-fr Institut de l’entreprise (2013), « Dialogue social : l’âge de raison. Faire du dialogue social un levier de performance ». http://www.institut-entreprise.fr/les-publications/dialoguesocial-lage-de-raison-faire-du-dialogue-social-un-levier-deperformance
3 QUESTIONS À JACQUES ADOUE
Directeur des relations sociales du groupe Capgemini.
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POUVEZ-VOUS NOUS PRÉSENTER LA VISION DU DIALOGUE SOCIAL DÉVELOPPÉE PAR LE GROUPE CAPGEMINI ? Le dialogue social a toujours été un facteur structurant pour le groupe. Au niveau international, Capgemini a été un des premiers groupes du CAC 40 à mettre en place un International Works Council, c’est-à-dire un comité de groupe européen élargi aux pays non-européens. En France, le dialogue social a toujours été une priorité. En tant que directeur des relations sociales du groupe, je passe beaucoup de temps à parler avec l’ensemble des syndicats de salariés, qu’ils soient ou non représentatifs. Nous négocions bien entendu sur les thèmes qui sont rendus obligatoires par la loi, mais nous faisons toujours en sorte d’innover en anticipant les avancées du cadre légal. Ainsi il y a trois ans, avant que la loi ne le demande, Capgemini a signé un accord portant sur le statut et le parcours professionnel du personnel élu au sein de l’entreprise avec les syndicats représentatifs. Il nous semblait important, allant dans le sens de ce que la loi a ensuite imposé, de valoriser dans l’entreprise les fonctions des représentants de salariés. Notre initiative était destinée à rassurer les collaborateurs souhaitant s’engager dans une fonction de représentation, et à montrer également au management qu’être délégué syndical, membre du comité d’entreprise (CE) et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), constituent
des missions importantes, qui ne doivent pas mettre en cause une évolution professionnelle normale. Cette prise de conscience était nécessaire pour susciter les vocations. La crise du syndicalisme est une réalité en France, mais les responsables ne sont pas uniquement les centrales syndicales : il faut également que l’entreprise valorise l’action des représentants des salariés n CAPGEMINI S’EST ENGAGÉ À RÉDUIRE LES INÉGALITÉS SALARIALES ENTRE FEMMES ET HOMMES AU SEIN DES UNITÉS DU GROUPE IMPLANTÉES EN FRANCE. DANS QUEL CADRE ET COMMENT CETTE QUESTION EST-ELLE NÉGOCIÉE AVEC LES SYNDICATS ? Un accord a déjà été signé avec les syndicats concernant les inégalités entre femmes et hommes au sein des sociétés françaises du groupe. Cet accord répond à deux exigences : éviter que la situation actuelle ne se détériore, et rattraper le passif. Il se déploie à différents niveaux au sein de l’entreprise : recrutement, développement de carrières, promotions, etc. Concernant la situation actuelle, les taux de promotions et les augmentations de salaires annuels doivent être au moins équivalents pour les femmes et les hommes au sein de l’entreprise. Pour rattraper le passif, un budget de 500 000 € a été alloué au rattrapage des inégalités femmes/hommes pour les années 2015 et 2016. S’y est ajouté, dans le cadre des négociations salariales annuelles, un budget supplémentaire de 400 000 €
sur 2 ans, portant l’effort total pour le rattrapage des salaires à 900 000€. Outre cet accord déjà signé, le groupe compte ouvrir des négociations avec les syndicats afin que l’entreprise soit encore plus attractive pour les femmes, que les collaboratrices s’y sentent mieux intégrées, et qu’elles disposent des mêmes opportunités de carrière que les hommes n PENSEZ-VOUS QUE LE DIALOGUE SOCIAL AIT UN EFFET SUR LES PERFORMANCES ÉCONOMIQUES DU GROUPE CAPGEMINI ? Un dialogue social constructif et une société apaisée favorisent l’activité commerciale. Les managers ne sont pas occupés à « éteindre des incendies » sociaux et peuvent développer leur portefeuille clients. Les collaborateurs se sentent bien dans l’entreprise. Tout cela a un effet positif sur la compétitivité de l’entreprise : un bon dialogue social permet d’éviter les blocages sociaux ; les collaborateurs peuvent donc plus facilement se concentrer sur leur activité professionnelle. Pour toutes ces raisons, Capgemini cherche à anticiper les attentes de ses salariés et à innover en matière de dialogue social n
RETROUVEZ CHAQUE MOIS, CES REGARDS CROISÉS ENTRE L’ACTUALITÉ, LA THÉORIE ÉCONOMIQUE ET LA RÉALITÉ DE L’ENTREPRISE SUR UNE THÉMATIQUE INSCRITE DANS LES PROGRAMMES DE SES DU CYCLE TERMINAL. ADOSSÉ AU SITE MELCHIOR.FR, CE JOURNAL THÉMATIQUE MENSUEL EST LE FRUIT DE LA COLLABORATION D’UNE ÉQUIPE DE PROFESSEURS DE SES. LE MOIS PROCHAIN, DÉBAT&CO VOUS PROPOSE LES CLÉS POUR LA COMPRÉHENSION DE LA THÉMATIQUE «ETAT ET MARCHÉ». CONTRIBUTEUR : DANIEL DIDIER. RELECTEURS : VINCENT BAROU ; STÉPHANIE LE CLER ; AGATHE ROY ; CLAIRE VANHOVE. AGENCE DE CRÉATION : RGB.
DÉBAT&CO , LE SITE MELCHIOR ET LES ENTRETIENS ENSEIGNANTS-ENTREPRISES, S’INSCRIVENT DANS LE CADRE DU PROGRAMME ENSEIGNANTS ENTREPRISES (PEE) DE L’INSTITUT DE L’ENTREPRISE.
SAVE THE DATE 25 ET 26 AOÛT 2016
LittleQuizz Chaque publication est accompagnée d’un petit quizz autocorrectif de 5 questions pour tester en ligne ce que vous avez retenu de votre lecture. Retrouvez notre « LittleQuizz »
Les Entretiens Enseignants-Entreprises
Thématique : « L’Europe dans tous ses Etats : un impératif de réussite ! » Lieu : à l’Ecole polytechnique (91) La thématique de l’Europe choisie pour ces EEE vise à apporter un état des lieux sur les défis de l’Europe au regard des crises qu’elle traverse (crise économique, crise des dettes souveraines, immigration, diplomatie, terrorisme, brexit, etc). Articulés autour de grandes conférences et d’ateliers destinés à éclairer l’analyse académique par des cas pratiques d’entreprise, ces EEE sont le fruit d’un travail collaboratif qui mobilise plus d’une vingtaine d’enseignants de Sciences économiques et sociales (SES), d’Economie-gestion et d’Histoire-Géographie pleinement impliqués dans la préparation de ces échanges et qui animeront les ateliers. Au-delà de cette thématique, de nombreux temps d’échanges vous seront proposés, notamment des rencontres libres entre des Directeurs de ressources humaines, des visites de sites d’entreprises, etc. Informations et inscriptions sur : www.eee2016.fr
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Étude de cas A lire sur www.melchior : l’étude de cas sur le dialogue social qui propose un état des lieux des configurations du dialogue social en France et en Europe puis étudie l’évolution du dialogue social en France. http://www.melchior.fr/L-evolution-dudialogue-social.12718.0.html