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Scientifique et clinique
SOMMET 2023 DE L’IMWG – – SUITE DE LA PAGE 3
Le myélome de diagnostic récent et les stratégies thérapeutiques
Le Dr Nisha Joseph (Winship Cancer Institute, Université Emory, Atlanta, États-Unis) est revenue sur les données cliniques concernant les anticorps monoclonaux anti-CD38 en traitement d’induction. Elle nous a présenté l’essai clinique GRIFFIN, qui portait sur l’ajout de Darzalex® (daratumumab) au triple traitement d’induction Velcade® (bortézomib) + Revlimid + dexaméthasone (VRd). Quant à l’essai clinique GMMG-HD7, il étudiait la quadruple association Sarclisa® (isatuximab) + VRd (Isa-VRd). Par ailleurs, le Dr Joseph a présenté les données de l’Université Emory.
Toutes les études ont montré une réponse plus profonde et des taux supérieurs de négativité de la MRM lorsque des anticorps anti-CD38 étaient ajoutés au traitement d’induction. Les médecins sont d’accord pour considérer que, selon la profondeur de la réponse, l’ajout d’un anticorps anti-CD38 dans le traitement d’induction devrait devenir la pratique standard face à la plupart des myélomes de diagnostic récent. À noter que le myélome est de risque standard dans environ 85 % des cas et à haut risque chez 15 % des patients. Les médecins considèrent que l’association anticorps anti-CD38 + Vrd est supérieure en cas de risque standard. Chez les patients à haut risque en revanche, les résultats ne sont pas concluants, comparativement à l’association VRd.
Le Dr Joseph a également passé en revue les données concernant les inhibiteurs du protéasome dans le cadre des thérapies initiales, notamment le Velcade et Kyprolis®
(carfilzomib). Elle a expliqué que les inhibiteurs du protéasome ont un rôle à jouer dans les traitements de première ligne face au myélome à haut risque.
Greffes
Le Dr Peter Voorhees (Atrium Health Levine Cancer Institute, Charlotte, États-Unis) est revenu sur l’historique de cette stratégie, avant d’aborder le présent et l’avenir des greffes de cellules souches face au myélome. D’après lui, la guérison passe par le statut de la MRM. En effet, les patients qui obtiennent durablement un statut de MRM négative ont tendance à rester en rémission plus longtemps. Or de nombreux essais cliniques ont montré que pour obtenir une négativité de la MRM, la meilleure stratégie est d’administrer immédiatement une triple ou quadruple association thérapeutique en tant que traitement d’induction / de consolidation, avant une autogreffe de cellules souches (AGCS).
Le Dr Voorhees a ensuite évoqué les essais cliniques actuels, qui éclaireront les futurs traitements face au myélome. Ainsi, l’étude MIDAS porte sur le concept du traitement de consolidation et d’entretien adapté en fonction du niveau de risque, via la détection de la MRM. Parallèlement, l’essai CARTITUDE-6 compare l’AGCS et les CAR-T cells par Carvykti® (cilta-cel). Plusieurs essais de phase II examinent par ailleurs les anticorps bispécifiques (mobilisateurs de lymphocytes T) chez les patients nouvellement diagnostiqués. Les médecins se montrent optimistes quant à l’amélioration des traitements, amélioration qui nous rapprochera d’un remède face au myélome.
Prise en charge de la rechute précoce
Le Dr Philippe Moreau (CHU de Nantes, France) présidait la session concernant la prise en charge de la rechute précoce.
Quelle approche face à la rechute précoce ?
Le Dr Meletios A. Dimopoulos (école de médecine de l’Université d’Athènes, Grèce) a abordé la rechute précoce, c’est-à-dire la rechute survenant au cours des trois premières lignes de traitement. Le Dr Dimopoulos a expliqué que des facteurs liés à la maladie, au traitement et au patient sont à prendre en compte dans le choix du traitement après une première rechute. Le traitement a notamment pour objectif de maximiser la réponse, de maîtriser durablement la maladie et de trouver un équilibre entre efficacité, tolérance et qualité de vie. Lorsque l’on choisit un traitement ultérieur, il est essentiel d’examiner les molécules auxquelles la maladie résiste ou est réfractaire, ainsi que la durée de la rémission précédente. De nombreux patients résistent ou sont réfractaires au Revlimid en cas de rechute, car ils ont souvent reçu cette spécialité en traitement d’entretien pendant une durée prolongée. Si les anticorps anti-CD38 sont déjà largement utilisés en deuxième ligne, ils sont également de plus en plus prescrits en première intention. De ce fait, d’autres traitements comme les CAR-T cells et les anticorps bispécifiques pourraient être administrés plus tôt. Pour les 10 à 15 % de patients qui présentent une rechute rapidement après le premier traitement, la bonne approche est difficile à trouver, car cette rechute précoce est souvent le signe d’un myélome agressif. Les médecins s’accordent à considérer que chez ces patients, les essais cliniques sont parfois une bonne solution.
Immunothérapie
Cette session était présidée par le Dr Munshi.
CAR-T cells et anticorps bispécifiques : choix des patients et prise en charge des effets indésirables
Le Dr Ajai Chari (école de médecine Icahn du Mount Sinai, New York, États-Unis) s’est penché sur les CAR-T cells et les anticorps bispécifiques, dont les taux de réponse exceptionnels atteignent environ 70 à 100 % face au myélome. Malheureusement, ces nouvelles approches thérapeutiques s’accompagnent d’effets indésirables significatifs, eux aussi nouveaux dans le cadre du myélome. Bien que généralement léger, un syndrome de libération de cytokines (SLC) est observé chez la plupart des patients. Ce syndrome inflammatoire systémique aigu, qui se manifeste par de la fièvre et un état grippal, se traite par des stéroïdes et/ou du tocilizumab. L’infection est un autre effet fréquent en cas de traitement par CAR-T cells ou anticorps bispécifiques.
L’IMWG a d’ailleurs récemment publié des recommandations pour la prévention des infections, qui peuvent être dangereuses en cas de myélome. Certains patients présentent une neurotoxicité, qui est un effet indésirable rare, mais grave. Par conséquent, les signes de neurotoxicité doivent être surveillés attentivement afin de pouvoir intervenir rapidement, le cas échéant. Face aux nombreuses immunothérapies nouvelles qui sont désormais disponibles, et face à l’évolution du traitement initial standard, la séquence thérapeutique doit être mûrement réfléchie.
Immunothérapies nouvelles et émergentes
Le Dr Thomas Martin (UCSF Helen Diller Family Comprehensive Cancer Center, San Francisco, États-Unis) a présenté le taux de réponse inédit obtenu grâce à des CAR-T cells et des anticorps bispécifiques qui ciblent les antigènes de maturation des lymphocytes B (BCMA), protéine présente à la surface des cellules myélomateuses. Le Dr Martin a ajouté que les traitements à venir s’attaqueront à de nombreuses cibles nouvelles. Les traitements pourront être administrés selon de nouvelles méthodes, de nouvelles associations et à des stades différents (en première ou deuxième ligne, ou en traitement d’entretien). Les premières données semblent indiquer que les CAR-T cells et les anticorps bispécifiques permettraient d’obtenir de meilleurs résultats au début du traitement. En effet, ces immunothérapies stimulent le système immunitaire des patients afin qu’il élimine lui-même les cellules myélomateuses. Or le système immunitaire est souvent plus efficace lors des premières lignes de traitement.
L’essai clinique RedirecTT-1 a associé l’anticorps bispécifique Tecvayli™ (teclistamab) et le talquétamab, autre anticorps bispécifique qui s’attaque à une cible différente. Cette étude a révélé un taux de réponse impressionnant de 96,3 % pour l’une des posologies. En outre, le traitement était également efficace sur les myélomes extramédullaires.
Les comités de l’IMWG
Malgré toutes ces avancées, des questions restent sans réponse ; des données en conditions réelles sont nécessaires pour trouver le traitement optimal et la bonne séquence thérapeutique chez chaque patient. À la fin du sommet, les comités de l’IMWG consacrés au MMI, à la maladie osseuse, aux immunothérapies, à la spectrométrie de masse et à la MRM ont présenté leurs rapports.
Ce 14e sommet annuel de l’IMWG fut très dynamique et productif. Une collaboration exemplaire qui devrait permettre de nouvelles avancées, et ainsi améliorer la vie des patients atteints d’un myélome. MT
Rendez-vous sur le site videos.myeloma.org pour visualiser la série de conférences de l’IMWG : Making Sense of Treatment (Comprendre les traitements) ainsi que la série de vidéos utiles intitulée Ask Dr. Durie (Questions au Dr Durie). Rendez-vous sur blogs.myeloma.org pour lire la série d’articles Week in Review (Revue de la semaine) par le Dr Brian G.M. Durie.