El valle, calle Sol, écrire sur la ville

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Isaline Maire Notice de projet de fin d ’études

El Valle, Calle Sol écrire sur la ville



El Valle, Calle Sol écrire sur la ville

isaline maire notice de projet de fin d’étude sous la direction de Gilles Sensini École Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille 2015



« As coisas em ruínas dão forma às novas estruturas,

transfiguramse, modificam-nas. Como a cauda de um cometa desprendem-se das catedrais. O mundo inteiro e a memória inteira do mundo continuamente desenham a cidade. Porto, Março de 1990.

« Les choses en ruine donnent forme à de nouvelles structures, se transfigurent et les modifient. Pareilles à la queue d’une comète, elles se détachent des cathédrales. Le monde entier et toute la mémoire du monde, continuellement, dessinent la ville. » Porto, Mars 1990. Alvaro Siza, Évora.



S

OMMAIRE

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5

Evora, Alvaro Siza

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Sommaire

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Charade

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« Caro diario », Nanni Moretti

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Immersion

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Incipit

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Séville, ville kaléidoscope

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Séville, lignes tracées

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Le fil d’Ariane des situations à projet

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La leçon de Kairouan

22

El Valle, Calle Sol - écrire sur la ville

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L’îlot à densité horizontale

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Figure simple et tracés palimpsestes

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Fabrique d’un système : dualité et porosité

54

Tisser avec l’existant

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Demain, ailleurs ?

66

Traduction

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Bibliographie

70

Remerciements


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Charade

Mon premier est une rencontre, Mon second est un souvenir, Mon troisième est une envie. Une rencontre, comme une invitation à un ailleurs. Séville, cité aux sonorités ensoleillées et enivrées de flamenco, s’est offerte au jeu de la découverte. C’était en avril 2014, lors d’un voyage organisé durant le studio de projet autour de la thématique « Les formes urbaines à densité horizontale ». Arpenter la ville à pieds, la toucher presque des mains, l’observer des heures durant, écouter ses bruits, ses gens, leurs vies, et surtout essayer de la comprendre a été ma première expérience. Une expérience banale, naïve, une manière de s’approprier la ville et de se fondre dedans. Un souvenir, celui d’un voyage à Vespa. Nanni Moretti m’a toujours fasciné par sa capacité à raconter des lieux, de manière commune à travers les films qu’il réalise. Une sorte d’invitation à nous transporter dans son quotidien, sans le dénaturer; une invitation à comprendre l’autre, à partager des émotions simples. Caro diario reste un de mes souvenirs cinématographiques les plus importants. Derrière lui, sur sa Vespa, j’ai déambulé dans Rome. J’ai visité des quartiers, regardé des immeubles, les uns après les autres, loin des clichés de la Ville éternelle, des monuments maintes et maintes fois revus, du Colisée aux berges du Tibre. Sur sa Vespa j’ai vu les immeubles, laids, vieux, usés, jeunes, beaux, ceux dits sans intérêt, où vivent chaque jour plus de quatre millions d’habitants. Et c’est pour ce sans intérêt-là que je me pose aujourd’hui des questions : où vivons-nous? qui sommes-nous? comment habitons-nous? Une envie, née d’une rencontre. En 2012, lors d’un stage à Milan, les architectes avec qui j’ai eu l’occasion de travailler durant plusieurs mois m’ont amené à réfléchir sur mon positionnement par rapport à l’architecture. Nous étions nombreux, de différents horizons et chacun avait sa propre idée de l’architecture, son propre regard. J’ai nagé entre leurs idées et au fil des projets j’ai appris à confronter mon point de vue avec le leur. En partant, mon maitre de stage m’a demandé: quelle était mon envie sur le monde, à dessiner? La question, quelque peu déroutante était en fait une véritable invitation à comprendre ce qui motiverait mes choix, et ce qui aujourd’hui me conduit à la réponse de ce projet.


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« Caro diario, C’è una cosa che mi piace fare più di tutte ! ... È vedere le case. Anche quando vado nelle altre città, l’unica cosa che mi piace fare è guardare le case. Che bello sarebbe un film fatto solo di case, panoramiche su case. Garbatella, 1927. Villaggio Olimpico, 1960. Tufello, 1960. Vigne Nuove, 1987. Monteverde, 1939. »

Nanni Moretti, In vespa in Caro Diario, 1993


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Immersion

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« orsque j’arrive dans une ville pour laquelle on m’a demandé d’expertiser des situations compliquées, je récolte tout ce qui existe sur elle: de la littérature à la photographie en passant par la peinture, la musique, l’histoire, etc. Et je commence: marcher, marcher et après, encore marcher. L’urbanisme est quelque chose que l’on fait avec les pieds. Il faut observer les détails minimaux, les noter, redessiner continuellement ce qu’on a vu, écouter les gens, leur imaginaire, les images de la ville qu’ils ont, les confronter à nos propres images, à nos propres projets, en évitant les grands gestes. C’est assez banal à dire, c’est nettement plus difficile à faire. Alors seulement, on peut commencer à travailler à un niveau conceptuel adéquat, pas encore sur un projet qui soit défini d’un point de vue de sa physionomie visuelle, de son architecture, mais qui commence à mettre au clair la structure de cette architecture. » Bernardo Secchi

Déambuler c’est prendre conscience du paysage qui nous entoure, l’apprivoiser, l’imaginer, n’en retenir qu’une image. Nos pas tournent et tournent dans la ville, ils dessinent des lignes, histoire de notre découverte. Une découverte urbanistique par les pieds et par le ressenti…


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«

Notre exploration de Séville est une ballade en quatre temps. Quatre temps comme quatre instants représentant quatre ambiances, quatre visions de Séville.

Du ciel au sol, notre vision explore les taches et distingue les formes de la ville. Le Guadalquivir, grande ficelle vue du ciel, est notre point de repère. En le longeant, nous découvrons, places, rues, unités d’ambiances qui se détachent et nous intriguent. Ce chemin nous mène dans la Macarena, où nous logeons. Dans les rues peu fréquentées, les maisons colorées semblent endormies, leurs petites portes en bois invitent à venir voir ce qui se cache derrière. 27 Calle Parras, la porte s’ouvre, une petite pièce très sombre mais couverte d’azulejos bleus nous accueille. Le couloir nous amène à un grand puits de lumière. Les maisons tournent le dos à la rue, et s’ouvrent à cet espace, ouvert, où chacun semble avoir partagé un bout de son quotidien. Des fauteuils, une orangeade, nous nous asseyons et levons les yeux au ciel. Notre vision se perd ensuite dans les rues, les ruelles et les places de la ville ; en suivant tout du long de notre chemin, les lignes du sol. Il est 19h, les gens sont attablés dans les cafés qui peuplent la ruelle. Le tumulte nous amène à une petite place triangulaire. Les gens discutent, rient, les lumières du soir se reflétant sur les façades nous invitent à s’arrêter. Notre déambulation reprend… nos pas nous emmènent, comme dans un labyrinthe, à ce que nous pensons être le cœur de Séville. Soudain, au détour d’une petite ruelle, une grande structure aux formes organiques vient nous envelopper. Cette place, où les murs pignons sont encore apparents, est la finalité de notre parcours. Le soleil se couche sur Séville, sur ces murs peints que les derniers rayons de soleil viennent transpercer. De ligne en ligne, nos corps se fondent dans les rues, les places. Déambuler sans carte est l’une de nos activités préférées. Nous décidons à l’improviste de quitter une rue pour en parcourir une autre, pour une lumière sur une façade, un détail, les bruits s’échappant d’une fenêtre… Le bruit rythmé de nos pas sur les pavés à travers les ruelles sombres s’évapore quand, au coin d’une rue, nos corps se retrouvent parachutés sur des places. Petits bouts d’espace public ancrés, entre deux ilots constitués, ces lieux nous étonnent. Ils semblent naître de rien : un banc, un arbre, un calepinage au sol qui les différencie de la voirie. Ces espaces témoignent d’une appropriation, ils parlent d’un quotidien, d’une façon de vivre l’espace, de l’habiter. Petit à petit, nous semblons appartenir au décor simple et banal de situations quotidiennes. La ville apparaît comme une forme compacte, dans laquelle les ruelles sont labyrinthiques. La nuit se couche sur Séville et nous décidons de monter sur le toit du Metroparasol. La promenade aérienne nous offre un panorama à 360° d’une ville parcourue et observée uniquement à travers les perspectives des murs des ruelles. Séville se dessine alors par la constellation de lumières, de fenêtres éclairées et de places illuminées. Nous semblons nager sur les toits, une étendue infinie de petits bâtiments creusés en leur centre. Notre regard change, nous prenons de la hauteur, et nous comprenons comment de petits points, en ruelles puis en places, la ville s’articule. La promenade vole au-dessus de la ville, et emporte avec elle, les bruits des scooters, la musique cubaine s’échappant d’une fenêtre Calle Cuadrado, l’odeur des fleurs d’orangers qui enivrait les rues, la fraicheur sous les palmiers du Parque de Maria Luisa… Seule reste, de ces quatre instants, la sensation d’avoir appartenu à la ville et en quelque sorte, qu’elle nous appartient un peu, désormais.


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Calle Peris Mencheta

Real Alcรกzar

Calle Enladrillada

Plaza de la Encarnaciรณn


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Calle Peris Mencheta

Calle Divina Enfermera

Calle San Blas

Calle Muro de los Navarros


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Incipit

incipit - du latin, incipio, is, ere - «commencer»

Séville, ville kaléidoscope

Séville, capitale de l’Andalousie, a par sa position stratégique été l’entrée sud-est du conti-

nent européen. Établie le long du fleuve Guadalquivir, Séville fut d’abord une importante cité de la Bétique, qui s’est enrichie des échanges portuaires. Hispalis, cité romaine, exportait et vivait d’un commerce florissant. Cette position a offert à la ville cette situation au croisement de différentes cultures, le point de rapprochement des deux rives de la Méditerranée. Orient et Occident se rencontrent à Séville, formant ainsi son caractère complexe tant en forme urbaine qu’en langage architectural. La ville, son tissu et sa stratification complexe témoignent de ces croisements et des différentes empreintes, romaines, almohades, castillanes puis andalouses, qui n’ont cessé d’argumenter sa richesse culturelle et architecturale. Aujourd’hui, Séville est la quatrième ville d’Espagne et compte plus de 700 000 habitants. Les expositions universelles de 1928 et 1992 témoignent du renouveau économique et industriel de la ville. Les installations construites sur la rive de Triana pour l’exposition universelle de 1992 ont apporté un nouveau dimensionnement à la ville : l’expansion au-dehors des murs « antiques » de la cité, la multiplication des couronnes de banlieue et le dessin d’un réseau dense de mobilité.

Séville, lignes tracées

Pensées pour Exposition 92’ puis abandonnées faute de moyens, quatre lignes de métro de-

vaient innerver du nord au sud et d’est en ouest la ville, permettant ainsi une meilleure perméabilité des zones fragmentées vers le centre historique. Aujourd’hui, ces lignes sont remises à l’ordre du jour en tant que possible voie de tramway qui deviendrait tram-train en dehors de la ville afin de se connecter au réseau de trains régionaux. Ce réseau à l’échelle de la métropole qu’est devenue Séville témoigne de cette volonté d’aller rechercher des connexions entre centre et périphérie, afin de donner une identité à l’expansion urbaine.


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Le fil d’Ariane des situations à projet

La mise en place d’un moyen de transports

collectifs pose la question de sa capacité à produire un renouveau et une densification le long des axes. Agissant comme catalyseur de situations variées, d’échelles diverses et témoignant de la complexité urbaine, des ruptures présentes, la ligne de transport lie les différentes parties d’une ville, un trait d’union sur lequel se lit une même figure métropolitaine. Le tracé des lignes, arpenté et observé, permet de révéler une série de situations en devenir : poches, fonciers disponibles ou à disposition, pouvant être l’objet d’une situation à projet. Reliées les unes aux autres, ces poches peuvent accueillir des fragments de projet urbain, en fonction de leur taille et de leur contexte, afin de se répondre mutuellement et ainsi de venir, de manière ponctuelle, reconstituer un tissu, proposer une nouvelle polarité. Ce premier travail (parcourir les lignes, identifier les poches et les caractériser) a permis de révéler une manière générique de projet urbain. Séville, par la reconstitution de son tissu en mutation, notamment dans le centre historique est un très bon terrain de jeux. Les parcelles identifiées se répètent, présentent des caractéristiques communes : ce sont pour la plupart des îlots déconstruits, où il faut penser le projet par la densité, tout en alliant logement et mixité. La poche à projet choisie combine ces questionnements et allie deux autres problématiques majeures aujourd’hui à Séville : lier tissu historique et tissu moderne et vivre à proximité d’un patrimoine riche. carte des axes de transports en commun imaginés


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inventaire des situations le long de la ligne de tram plaza nueva

-

puente de la barqueta


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la leçon de Kairouan

« Pompéi et l’idée de ville romaine, Cordoue, Séville, Grenade, Fez ou Kairouan et la densité

des villes arabes, ne doivent pas être considérées seulement pour leurs valeurs historiques, mais comme le matériau vivant sur lequel nous devons prendre appui pour construire les densités futures. » Cet apprentissage de l’existant, autant dans la matrice d’implantation et de réemploi de l’ilot dense que dans la complexité architecturale de la typologie d’habitat à patio est l’enjeu de ce projet. La poche à projet choisie est un terrain d’expérimentation, un tableau vide sur lequel la réponse se dresse par des dessins sucessifs d’analogie du système existant. L’appui sur les éléments fondamentaux de constitution du tissu sévillan : le parcellaire, le dessin de l’espace public, permet d’appréhender une position dans l’implantation en analogie de l’existant. La proposition est continuité de l’existant, continuité de l’histoire du site et en réponse à ses atouts et contraintes.

Penser par analogie d’un contexte historique, sociétal, culturel ou politique est l’enjeu du mouvement régionaliste critique. Ce courant architectural voit le jour dans les années 1980 en oppostion à la dérive du monde vers une globalisation imminente et une généralisation des systèmes, comme l’explique Kenneth Frampton dans son ouvrage « Histoire et critique de l’Architecture moderne ». Son invitation à faire revivre l’identité locale, le retour aux sources permettant de « raviver une civilisation latente et faire partie d’une civilisation universelle » a ensuite été suivie par de nombreux architectes. Leurs projets, notamment au Portugal, par Alvaro Siza ou par l’agence Aires Mateus, en Suisse, par les architectes Mario Botta, Peter Zumthor et Luigi Snozzi m’ont invitée à m’interroger sur le « genius loci » de ce site et percevoir la culture sévillane qui pourrait ressortir des lignes du site. Les travaux de la Tendenza menés par Aldo Rossi, ainsi que ceux de l’école tessinoise, notamment dans le projet de constitution du village de Monte Carasso par l’architecte Luigi Snozzi ont influencé ma perception et la conception des lignes matrices d’implantation du site de projet. La leçon de Kairouan, c’est ce nom que l’on pourrait donner à cette prise de conscience que les villes, ici le cas de Séville, portent des valeurs, une multitude de choix, de positions, d’intentions et que l’apprentissage d’un regard conscient et responsable est clé d’entrée pour retisser la ville de demain. C’est alors que se pose la question, sur ce site, proposé comme terrain d’expérimentation : comment reconstituons-nous l’ilot à densité horizontale, en apprenant de la complexité sévillane existante ?


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T

« he fundamental strategy of Critical Regionalism is to mediate the impact of universal civilization with elements derived indirectly from the peculiarities of a particular place. It is clear from above that Critical Regionalism depends upon maintaining a high level of critical self-consciouness. It may find its governing inspiration in such things as the range and quality of the local tight, or in a tectonic derived from a peculiar structural mode, or in the topography of a given site. » Kenneth Frampton



El Valle, Calle Sol ĂŠcrire sur la ville


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L’îlot à densité horizontale

L

’îlot à densité horizontale, développé depuis les années 60-70 dans différents projets urbains de

référence et implanté sous différentes latitudes, ont tous en commun ces 5 caractéristiques. La notion de faible hauteur: l’ilot à densité horizontale conserve une hauteur plus basse que l’immeuble urbain du XIXe siècle, notamment dans la région où il s’implante. Les traditions urbaines hispaniques, maghrébines, moyen-orientale mais aussi anglo-saxonnes et flamandes perpétuent des formes urbaines de faible hauteur (R+2, R+3). La notion de compacité: la forme urbaine compacte est un dispositif qui réduit les vides à la fois dans l’espace public et dans les propriétés privées. La qualification de ces vides et leur investissement en est d’autant plus valorisé. La notion de maillage viaire : la capillarité d’espaces publics résultant des formes pleines amène à hiérarchiser les dessertes, notamment en limitant le maillage des dessertes secondaires dans le but de ne pas faire perdre de la densité, mais aussi de hiérarchiser les espaces publics. La notion de parcellaire : le dispositif parcellaire imposé par l’ordonnancement du dispositif d’espace public et de la compacité de la forme urbaine est celui d’une faible emprise sur la rue pour un maximum de desserte en profondeur de parcelle. La notion de nappe à patio: le dispositif parcellaire imposé ainsi que la densité recherchée amènent à proposer une typologie de bâtiment particulier, qui oriente ses ouvertures sur un vide central, souvent en milieu de parcelle.l’apprentissage d’un regard conscient et responsable est clé d’entrée pour retisser la ville de demain. C’est alors que se pose la question, sur ce site, proposé comme terrain d’expérimentation : comment reconstituons-nous l’ilot à densité horizontale, en apprenant de la complexité sévillane existante ?


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L

« es formes urbaines à densité horizontale sont des tissus urbains composés de maisons et de petits immeubles collectifs en rangées serrées, construits entre mitoyens, organisés autour de cours ou de patios. Elles s’apparentent toutes à un même mode de conception, dont la principale caractéristique est la faible hauteur des constructions associée à une densité relativement importante et à une forte occupation au sol. Il s’agit à peu de chose près et suivant ce que l’on en sait, du réemploi de la matrice de l’îlot romain, avec la domus et l’insulae, voire à l’environnement préhistorique de la formation des villes. C’est l’archétype de la médina méditerranéenne et le modèle des villes nouvelles hispaniques issu des Lois des Indes. » Gilles Sensini






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Figure simple

et tracés palimpsestes

L

« a città è un continuo divenire. Una città è per definizione « lenta », cresce omeopaticamente non chirurgicamente, ha dei tempi fisiologici ineliminabili. Una città non è disegnata, semplicemente si fa da sola. Basta ascoltarla, perché la città è il riflesso di tante storie. La città è fatta di case, di strade, di piazze, di giardini che sono lo specchio della realtà, ed ognuno di essi racconta una storia. » Renzo Piano

Générer une complexité Le site de projet se situe dans le quartier de Santa Catalina à Séville, à la limite du centre historique, délimité par le passage de l’Avenida Maria Auxiliadora, boulevard périphérique contournant tout le centre du nord au sud. Le site se situe en prolongement d’un jardin, los Jardines del Valle, jardin public important dans le centre historique nord de la ville. Il est séparé de ce-dernier par les vestiges de la muraille antique datant de l’époque romaine. Cette muraille, dont plusieurs portes permettent de passer du jardin à la zone de projet, est un élément aujourd’hui peu valorisé. Sa position stratégique en lisière de centre historique lui confère également un rôle de transition entre le tissu traditionnel sévillan, en limite nord et ouest du site, et un tissu plus moderne, de l’autre côté de l’avenue, au sud. Les parties limitrophes nord et est sont constituées de tissu, décomposé, abandonné. Aujourd’hui, seule résulte la trace de quelques parcellaires, abandonnés. Le site est également bordé, au sud, par l’église de l’Antiguo Convento del Valle, église symbolique dans la vie religieuse sévillane car elle fait partie des rares églises de la ville a pouvoir accueillir l’autel de la procession lors de la Semana Santa. D’une surface de plus de 9000 mètres carrés, le site pourrait être schématisé comme une figure simple : un rectangle bordé d’une part d’un tissu urbain traditionnel déchiré, et de l’autre de monuments remarquables : la muraille, l’église de l’Antiguo Convento del Valle.


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deux tissus opposés

continuité Jardines del Valle

muraille

éléments remarquables

tissus déconstruits

calle sol

accès


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LIGNES MÉTROPOLITAINES

Parc de Maria Luisa Avenida Maria Auxiliadora Muraille


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entrĂŠe site calle veronica


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Ainsi, la question de reconstitution de l’ilot à densité urbaine horizontale pose la question des éléments qui composent cette densité (espace public, parcellaire, compacité, maillage viaire…) et comment ils génèrent une complexité. La démarche première a été de faire ressortir du site les traces de l’existant : celles oubliées, détruites ou celles qui se lisaient en filigrane, le long des parties de bâti encore existant. Le plan de parcellaire résulte de cette démarche : les lignes sont tracées en continuité des lignes existantes, leur chevauchement et leurs croisements font naitre un nouveau maillage, un maillage à l’échelle du site et de ses contraintes.

existant

traces révélées

tracés parcellaire

constitution des ilôts

Les ouvertures présentes dans la muraille, sont elles aussi des points d’accroche importants pour structurer le site. Trois portes proposent trois manières de traverser le site. La première au sud, en lien avec l’arrière del Antiguo Covento del Valle est appréhendée comme une porte de l’intime, un seuil entre l’espace religieux et une partie de jardin recréé dans los Jardines del Valle. La seconde se situe au droit de l’église : on propose ici une déambulation le long du mur de l’église. La troisième, plus au nord du site est un noeud entre le tissu déconstruit, une petite ruelle qui permet de rejoindre calle Sol, et la muraille. On propose ici d’ouvrir une petite place, qui permette d’apprécier la muraille, et de créer un temps d’arrêt entre le site de projet et l’entrée vers le jardin.

séquences / trois portes

intime

longer

temps d’arrêt


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Le viaire enfin, joue un rôle important dans la constitution de la matrice d’implantation du projet. L’accès au site se fait au nord par la calle Sol, petite rue de desserte d’une largeur de 3 mètres comme on en trouve beaucoup à Séville ; et au sud par la calle Veronica. Ici, l’accès est plus grand et marqué par le parvis de l’Église sur lequel un espace est dégagé afin de laisser entrer, durant la Semana Santa, la procession. On propose de traverser le site, de nord au sud, afin de venir retisser un lien entre deux situations particulières et ainsi jouer sur une fragmentation des parcellaires et des espaces publics. Le viaire proposé est ici une voie piétonne mais qui peut être une petite voie de desserte pour l’accès des riverains aux parkings des logements. Au nord du site, en jonction avec la calle Sol, la rue devient en partie fermée les jours de marché. Cette maille viaire imbriquée à la lisière des lignes de parcellaire proposées, articule au centre du site un retournement avec la place centrale.

traverser

articulation suivant le parcellaire

voies parallèles

Cette démarche en palimpseste de l’existant a permis de créer des interactions avec celui-ci, de mieux le révéler et ainsi de récréer des ambiances qui ont ponctué mon arpentage de Séville.


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Figure simple

et tracés palimpsestes

Générer des ambiances La hiérarchisation des espaces publics témoigne d’une volonté de prendre part à la vie publique de la ville. Les espaces publics sont à Séville, partie intégrante de l’espace domestiqué, on pourrait même dire qu’il est une pièce de la maison. Une pièce de représentation, de vie, de partage. Les quatre espaces publics du projet sont pensés dans ce sens. Le premier est celui existant : le parvis de l’Antiguo Covento del Valle. La volonté était de réduire la partie adjacente à l’entrée quotidienne de l’église, afin de redessiner la maille viaire, et ainsi de donner une plus grande importance au parvis où se situent les cérémonies lors de la Semana Santa. L’espace a aussi été restructuré par un mur séparant la partie publique du jardin à l’arrière de l’église. Le second espace public est la promenade créée par la seconde porte dans la muraille. Une déambulation est alors proposée le long de l’église, ponctuée d’orangers. Elle permet une transition entre le jardin, peuplé de végétation dense à la zone de projet, plus minérale. La promenade légitime le positionnement de l’église, en appuyant ainsi le fait qu’elle n’est pas englobée dans un tissu existant. Le troisième espace public est marqué par la troisième porte de la muraille. Véritable point d’arrêt entre l’espace du jardin et la rue menant à l’espace public principal du projet, cette place joue un rôle de seuil. Elle articule l’école ainsi que les logements dont les rez-de-chaussée sont destinés à des espaces de production culturelle. D’autre part, elle conduit à une venelle débouchant sur la calle Sol au nord du projet. Cette place permet également de prendre de la distance par rapport à la muraille. Le quatrième, et principal espace public du projet est celui situé au noeud du maillage viaire. Résultant du dessin de la recherche parcellaire et des liens avec les portes de la muraille, cette place est la finalité des séquences. Elle positionne le passage est-ouest et nord-est du site. Cette place est également à la jonction entre les deux parties programmatiques du projet : à l’ouest, les logements viennent la border et à de l’autre côté, le mur d’enceinte ouest de l’école la délimite. Elle est la finalité de l’entrée nord du projet qui se fait par la galerie de l’Agora. Ces places se lisent entre les plis successifs du rectangle. Un pliage qui laisse deviner différentes intentions, différentes échelles de lecture et surtout différents paysages aux espaces de déambulation.


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PLIER

Le mur oubliĂŠ Abbaye du Thoronet Luigi Snozzi




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Figure simple

et tracés palimpsestes

L’Agora et le pli symbolique L’Agora, passage symbolique entre le tissu existant et le coeur du projet est une séquence de transition, un espace résultant du pliage de l’espace public. Articulant le passage, cet espace est rythmé par une trame pouvant accueillir les jours de marché des box flexibles. Cet entre-deux entre la Calle Sol et la place centrale est piéton. En référence à l’agora grecque, lieu de rassemblement politique et mercantile de la cité, élément clé dans la conception de la polis grecque, l’Agora proposée ici se nourrit de certaines références, autant symboliques que de dispositifs architecturaux. L’Agora est un dispositif permettant de montrer la manière dont l’espace public est ici pensé en séquences, génératrices de différentes situations habitées.

agora

Ainsi, l’enjeu de ce projet a été de proposer, dans cette figure simple, une promenade. Une promenade qui plie l’espace pour le rendre varié, rendant compte des ambiances ressenties, des échelles traversées et de la complexité de la stratification sévillane.


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perméabilité / le macellum macellum, Pompei, II siècle avant J-C

flexibilité / la place du marché Piazza delle erbe, Padoue, Xe siècle

rythme / la loggia loggia dei mercanti, Milano, XIII siècle

porosité / le marché couvert mercato de San Lorenzo, Firenze, 1874


Vue perspective sur l’Agora



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Fabrique d’un système : dualité et porosité

U

« ne morale de l’échange. L’espace public est un espace de partage, il est le signe qu’un échange a eu lieu, qu’ont été pensées conjointement vie de quartier et domesticité. » Alexandre Chemetoff

Accroche et porosité La stratification entre espace publics, séquence des entrées vers le jardin et parcellaire retracé amène à s’interroger sur le positionnement des équipements aux points de croisements stratégiques du projet. L’église de l’Antiguo Covento del Valle, déjà située dans la partie sud du site est ouverte sur la ville. Elle est le lien le plus évident pour marquer son entrée vers l’avenue Maria Auxiliadora, car son parvis est grand et souligné par la présence d’orangers. Son ouverture sur la ville est renforcée par la symbolique du parvis, utilisé lors des processions de la Semana Santa. C’est un espace de représentation. L’école, positionnée entre les deux portes du jardin, est marquée par ses trois espaces publics. Le premier, en partant du sud, est la promenade bordée d’orangers qui distance l’école de l’église. Le second, est la place de transition entre le jardin et le site. Cette place prend son importance dans le fonctionnement de la vie de l’école, car c’est par celle-ci que se fait l’entrée principale. Le troisième espace est la cour intérieure de l’école, la stoa. Cet espace est marqué par l’ambivalence du fonctionnement de l’école : il ne devient public que lorsque l’école est fermée. Ces places sont le théâtre des activités quotidiennes du quartier. L’Agora par sa position stratégique permet de faire le lien avec la Calle Sol, voie de desserte importante. Derrière elle, se situe une petite venelle, la calle Espada, qui permet d’accéder à El Huerto del Rey Moro, « patio botanique » du quartier de Santa Catalina. On peut ainsi imaginer un lien entre cet espace de production maraîchère et l’Agora, espace à la fois de rencontre et de la vie mercantile du projet. L’Agora joue ainsi le rôle d’interface entre la vie sévillane présente aux alentours du site, et les espaces de vie proposés dans le projet.


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Agora/accroche au quartier

Ecole/le lien du site

Eglise/l’ouverture sur la ville


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Fabrique d’un système : dualité et porosité

Dualité et ambivalescence Les trois équipements entretiennent une dualité de fonctionnement et de perception, en fonction des périodes où ils sont pratiqués. L’Eglise comporte deux entrées: la principale, qui se situe sur la voie recréée est à échelle humaine (3m de haut). Elle est utilisée quotidiennement par les pratiquants. Les jours de la Semaine Sainte et lors des processions, l’autre porte, celle donnant sur la place de la calle Veronica est ouverte. Cette porte, haute de 6 mètres pour laisser entrer le cortège, affirme le caractère spectaculaire et exceptionnel de son utilisation. L’église devient alors un lieu de spectacle.

L’entrée principale de l’école, par la place en lien avec le jardin, est utilisée pour les jours de cours. Un système permet aux élèves de bénéficier du patio, intérieur, pour la récréation. Tous les espaces convergent sur ce patio, mais les accès se font à l’intérieur du bâtiment. Quand l’école est fermée, une seconde entrée se situe sur la voie de desserte. Elle permet d’accéder au patio central qui devient alors la stoa. Celle-ci dessert les ateliers où se déroulent des activités en dehors du temps scolaire.


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L’Agora, elle aussi, propose un double système d’utilisation. Pratiquée comme une galerie de passage, les jours de marché, la rue adjacente est fermée à l’accès des riverains et ouverte uniquement au dépôt des marchandises. Ainsi, le seul passage se fait par la halle, entre les étals. Le reste du temps, la rue est ouverte, le système de box de la halle se referme, et l’Agora reste uniquement une galerie.




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Fabrique d’un système : dualité et porosité

L’école et la trace de l’Antiguo Covento del Valle L’école prend place entre les deux portes de la muraille, à l’emplacement de l’ancien Covento del Valle, aujourd’hui détruit. Reprenant la forme, l’école s’organise autour de la stoa. Elle constitue un entre-deux entre le portique déambulatoire public et le patio sévillan intime. Cette organisation propose aussi, suivant le principe de dualité exposé précédemment, une organisation dissociée du fonctionnement du bâtiment. Les salles de classes et la vie de l’école s’organisent autour de cette cour, les salles de vie étant concentrées sur le rez-de-chaussée pour favoriser une interaction des élèves avec l’espace extérieur. Les salles de cours et de repos se situent à l’étage. L’aile située au sud du bâtiment est destiné aux activités. Cette série de petits ateliers, dont l’utilisation peut se faire de manière indépendante de l’école, est formée sur le rythme imposé par la trame de l’église. Ces ateliers, ouverts sur la promenade longeant l’église accompagnent la promenade menant au jardin.

vue aérienne en

1944


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9 cases

interstices

demi-trame

réponse à la trame de l’église


Plan de l’école del Valle Rez-de-chaussée


Plan de l’école del Valle 1er étage


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Tisser avec l’existant

C

« on la tarde se cansaron los dos o tres colores del patio. Esta noche, la luna, el claro círculo, no domina su espacio. Patio, cielo encauzado. El patio es el declive por el cual se derrama el cielo en la casa. Serena, la eternidad espera en la encrucij ada de estrellas. Grato es vivir en la amistad oscura de un zaguán, de un parra y de un aljibe. » Jorge Luis Borges, El patio

Parcellaire palimpseste et formation des volumes La démarche palimpseste qui a révélé les lignes fortes du site, à partir des parcellaires existants puis prolongés, permet de dessiner six nouvelles parcelles. Cette démarche conduit à proposer une continuité du découpage existant, comme une reconstitution de ce qu’était l’îlot d’origine sur les parties déconstruites. Ces parcelles résultent ainsi du tracé de l’espace public et du maillage viaire et appuie la complexité de la géométrie de la parcelle, en analogie aux parcelles sévillanes. Les volumes résultant de ce découpage s’organisent en mitoyenneté les uns des autres, et se retournent sur une ouverture, située généralement en centre de parcelle. De temps à autre, et en correspondance avec les vides voisins (appartenant aux autres parcelles), les volumes se décalent de la limite parcellaire pour jouer sur un effet de répétition, de mise à distance. Les vides occupent en moyenne 15% du plein de la parcelle, ce qui est conforme au ratio de densité à Séville (65% de plein pour 35% de vide, dont 5 à 20% de vide pour les cours intérieures de bâtiment).


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Tissu restant

Parcellaire rĂŠinventĂŠ

Volumes

Vides


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Tisser avec l’existant

Habiter autour d’un vide Le modèle d’habitation à patio est l’un des deux grands modèles d’habitation connus dans l’histoire. Le patio, que l’on pourrait définir comme une cour intérieure d’une maison à ciel ouvert, souvent entouré d’arcades est un modèle récurrent des dispositifs de logement, qui ont par le biais des modulations et du brassage des cultures, évolué, transformé, façonné le modèle. Orient et Occident se rencontrent en Andalousie dès le XII siècle à travers l’architecture mérinide, dont le modèle à patio sévillan tire toutes ses caractéristiques. Véritable empreinte du brassage culturel qui l’a façonné, le patio sévillan est un espace de vie, pièce maîtresse de l’habitation. L’entrée de la rue se fait généralement par une antichambre, l’ancienne « squifa » de la maison arabe. Un porche dessert généralement une première circulation verticale et l’entrée du patio. Autour de lui s’ouvrent les pièces à vivre et certaines fois, les pièces de service, pour la ventilation. Il peut également y avoir la présence de petits patios de services, qui ont cet usage. Le patio dessert également les circulations verticales des logements. Ce type d’organisation est celui proposé dans les logements du projet. Les typologies de logement s’organisent autour de ce vide central, dès le R+1, et ce jusqu’en R+2. Chaque logement, dont les modulations s’étendent du T2 au T5 reprend par analogie les principes de progression vers l’intime du patio dans son organisation. Les pièces à vivre convergent autour d’une loggia, souvent d’angle, et de ce point névralgique s’organisent à l’arrière les pièces intimes et celles de services. L’ouverture se fait de manière générale sur la façade côté rue, laissant ainsi l’ouverture sur le patio aux pièces de services (espace cuisine). Ce dispositif permet ainsi de préserver une intimité, ce qui est renforcé par le jeu de composition des façades : chaque logement tournant autour du patio, les ouvertures s’organisent en quinconce.


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Le patio c’est d o n n er u n e fo r m e à l a lu m i è re

Le patio c’est u n to it

Le patio c’est to u r n er e n ro n d

Le patio c’est u n e i nv it at i o n à l ’ i nt ro s p e ct i o n d e s o i - m êm e

Le patio c’est une nappe

Le patio c’est...


Plan d’étage courant





Logement d’angle Calle Sol Plan d’étage courant


Typologie de logement en angle de parcelle

Typologie de logement en profondeur de parcelle

Typologie de logement traversant patio/rue

 


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Tisser avec l’existant

La mixité ou l’expérience du Rompe Moldes Afin de renforcer la suture avec l’existant, les rez-de-chaussée sont investis pour redonner une mixité et ramener des polarités sur le site. Cette volonté, tant programmatique que fonctionnelle, propose une autre conception des espaces de travail dans les tissus traditionnels. L’investissement de ces locaux permet de valoriser les parties du centre ville pour ramener emploi, fabrication et production culturelle au coeur de zones d’habitations. Les parcelles sont découpées de manière à offrir au sein de chacune d’elles des programmes différents : un système de micro-équipements, alliant services et commerces de proximité. un atelier de fabrication avec logements et espaces communs d’artistes des espaces de travail partagés, petite pépinière d’entreprises des équipements de production culturelle et d’expositions. Ainsi, les programmes proposés peuvent changer et être réadaptés tout en conservant l’idée que la mixité, qu’elle soit sociale ou fonctionnelle, est un élément clé permettant de rassembler, personnes, emplois et cultures. Toutes les juxtapositions sont génératrices de synergies. La mixité fonctionnelle permet de répondre aux enjeux environnementaux, en réduisant les déplacements et redonnant une attractivité à ces parcelles en centre, délaissées. Depuis une décennie, de nombreuses opérations de requalification urbaine ont eu lieu dans cette partie du centre historique, marquée par l’accroissement de logements vétustes et d’une désertification des activités. Le Rompe Moldes, situé dans le quartier San Luiz en est l’une des opérations les plus significatives. Proposant des espaces de création artisanale, des logements et un marché, véritable espace de rencontre du quartier, il réintroduit une mixité sociale et programmatique. Réinterprétant l’architecture du traditionnel corral sévillan, il propose ainsi de perpétuer des activités autrefois pratiquées en centre ville, et qui portaient son développement économique.

Ce tissage avec l’existant est le véritable enjeu du projet : comment reconstituer la ville là où, par son évolution, elle a laissé apparaitre des vides. Tisser et suturer des parties de tissu, en analogie avec l’existant: le déjà-là est la clé pour comprendre comment se forme la ville, en lien avec elle et sur elle-même. Cette situation est loin d’être la seule à Séville, et pourrait ainsi être réemployée dans différentes parcelles et îlots du centre ville.


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une parcelle : logement + officinas

officinas

micro-ĂŠquipements

espaces ouverts Ă la ville et aux initiatives citoyennes cohabitation

R ompe M oldes ,

calle san luiz , sevilla /J avier ochoa casteleiro


système de micro-équipements de proximité

officinas de pépinière d’entreprises


officinas de production culturelle

officinas de fabrication partagĂŠe


MAQUETTE D’IMPLANTATION


PLAN DE REZ-DE-CHAUSSÉE



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Demain, ailleurs ?

L

e projet, au-delà de la réponse urbaine et architecturale qu’il apporte au site, laisse envisager une

méthode pour la reconstitution des îlots à densité horizontale. La méthode proposée ici est alors appréhendée comme une sorte de boite à outils transposables dans d’autres contextes et avec d’autres typologies. Son utilisation, rigoureuse, suivant les cinq caractéristiques de modulation des îlots denses permet ainsi de comprendre comment se forme la ville, et comment nous pouvons prendre part à sa constitution, sans la dénaturer mais en la perpétuant. Ainsi, ce système peut évoluer, et en fonction des contextes et des typologies, il pourrait être employé à la réalisation de logements individuels ou intermédiaires en opposition au logement collectif. La forme de densité proposée serait alors utilisée comme une forme compatible avec des tissus pavillonnaires, et proposerait une alternative à l’étalement urbain, notamment dans les villes périphériques de la métropole marseillaise. Comprenant les caractéristiques d’une densité semblable à celle des centre villes, cette forme de développement urbain serait porteuse de nouveaux modes d’habiter, tant en terme de qualités d’habiter que d’accès aux services. Cette constellation de polarités formant le réseau métropolitain appuierait son développement, notamment à une heure où les premiers desseins de vivre ensemble dans Aix-Marseille Provence se dessinent…


T

RADUCTION

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« Caro diario, C’è una cosa che mi piace fare più di tutte ! ... È vedere le case. Anche quando vado nelle altre città, l’unica cosa che mi piace fare è guardare le case. Che bello sarebbe un film fatto solo di case, panoramiche su case. Garbatella, 1927. Villaggio Olimpico, 1960. Tufello, 1960. Vigne Nuove, 1987. Monteverde, 1939. » « Cher Journal, Il y a une chose que j’aime faire plus de tout au monde ! ... C’est voir les maisons. Même quand je vais dans d’autres villes, l’unique chose que j’aime faire c’est voir les maisons. Comme ça serait beau un film qui montrerait uniquement des maisons, panoramiques sur des maisons. Garbatella, 1927. Village Olympique, 1960. Tufello, 1960. Vigne Nuove, 1987. Monteverde, 1939.» Nanni Moretti, In vespa in Caro Diario, 1993

« La città è un continuo divenire. Una città è per definizione « lenta », cresce omeopaticamente non chirurgicamente, ha dei tempi fisiologici ineliminabili. Una città non è disegnata, semplicemente si fa da sola. Basta ascoltarla, perché la città è il riflesso di tante storie. La città è fatta di case, di strade, di piazze, di giardini che sono lo specchio della realtà, ed ognuno di essi racconta una storia. »


« Con la tarde se cansaron los dos o tres colores del patio. Esta noche, la luna, el claro círculo, no domina su espacio. Patio, cielo encauzado. El patio es el declive por el cual se derrama el cielo en la casa. Serena, la eternidad espera en la encrucij ada de estrellas. Grato es vivir en la amistad oscura de un zaguán, de un parra y de un aljibe. » « Avec le soir Se sont lassés, les deux ou trois couleurs du patio. Cette nuit, la lune et son cercle clair, Ne domine pas son espace. Patio, ciel enclavé. Le patio est la pente Par laquelle le ciel entre dans la maison. Sereine, L’éternité attend à la croisée des étoiles. Douce est la vie en l’amitié obscure, D’une voute, d’une citerne et d’une treille. » Jorge Luis Borges, El patio

« La ville est un perpétuel devenir. Une ville est « lente » par définition, elle s’agrandit à doses homéopathiques et non de manière chirurgicale; elle a des temps physiologiques longs. Une ville n’est pas planifiée, elle se fait d’elle-même. Il suffit de l’écouter: la ville est le reflet de bien des histoires. Elle est faite de maisons, de rues, de places, de jardins, qui sont le miroir de la réalité, et chacun d’eux raconte une histoire. » Renzo Piano, in « La responsabilità dell’architetto », 2007


IBLIOGRAPHIE

B

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BONNET Frédéric, « Extension du domaine de l’urbanisme », Parenthèses, 2014 BORGE Jorge Luis, A patio, « Elogio de la Sombra », 1969 BRANDOLINI Sebastiano, « Milano - A piedi nella metropoli », Editrice Compositori, 2013 CHEMETOFF Alexandre, Des paysages in L’architecture d’aujourd’hui, 1996 DÉSVEAUX Delphine, SIRON Véronique, « Avec vue sur la métropole - 50 000 logements autour des axes de transports collectifs de l’agglomération bordelaise », archibooks, 2012 FRAMPTON Kenneth, « Towards a Critical Regionalism: Six Points for an Architecture of Resistance », 1983 MORETTI Nanni, Viaggio in vespa in « Caro Diario », Sacher Film, 1993, 100 minutes PIANO Renzo, « La responsabilità dell’architetto - Conversazione con Renzo Cassigoli »,

Passigli Editori, 2007 PIANO Renzo, « Renzo Piano : Penser la ville heureuse », Parenthèses, 2005 RICOEUR Paul « La civilisation universelle et les cultures nationales », 1962 ROSSI Aldo, « I quaderni azzuri », Getty Publications, 2000 SECCHI Bernardo, Paroles sur la ville, Thierry Paquot, in Urbanisme, 1999 SECCHI Bernardo, VIGANO Paola, « La ville poreuse », MétisPresses, 2011 SECCHI Bernardo, « Première leçon d’urbanisme », Parenthèses, 2011 SIZA Alvaro, « Imaginer l’évidence », Parenthèses, 2012 SIZA Alvaro, « Des mots de rien du tout - Palavras sem importância », Publications de l’université de Saint-Étienne, 2002 SNOZZI Luigi, Le mur oublié in « Leçons du Thoronet », 2009 VIGANO Paola, « Métamorphose de l’ordinaire », Parenthèses, 2013

SENSINI Gilles, in La densité horizontale, livret de projet, « Avenida Cristo de la Expiracion à Séville », 2014 VAZQUEZ CARRETERO Narciso-Jesus, VAZQUEZ CONSUEGRA Guillermo, CRUZ Antonio, ORTIZ Antonio, « Catedra Blanca », Talleres de proyectos de arquitectura - Escuela Técnica Superior de Arquitectura de Sevilla, 2011 AQARIDEN Myriem, mémoire de fin de second cycle, « La boite à outils de la forme urbaine horizontale », 2015 MAIRE Isaline, mémoire de fin de second cycle, « Habiter autour d’un vide - Permanence du modèle à patio », 2015



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Remerciements à...

Gilles Sensini pour avoir été à l’origine de cette rencontre avec l’immense et passionnante complexité sévillane; son engagement, son enseignement et sa disponibilité. Jean-Marc Chancel et Pascal Urbain pour leurs conseils avisés nourrissant le projet. Laurent Hodebert pour son écoute bienveillante Jean-Pierre Vettorello pour sa « première leçon d’urbanisme » Michele Brunello per avermi permesso questa esperienza milanese Marion Estavoyer pour son aide et sa disponibilité dans la réalisation de la maquette et des éléments en bois au Lieu de Fabrication Ouvert de La Friche La Belle de Mai. Mes parents pour m’avoir encouragé et donné l’envie d’aller toujours chercher plus loin… Angela, Angelo, Davide e Fabio per avermi introdotta alle polilinee e molte molte cose ancora… Astrid, Chloé et Gian Luca pour leur amitié constante Un grand «mercyt» à Myriem pour son soutien et son aide « un barba-merci » à Morgane pour cette jolie rencontre, architecturohumaine Malou, pour sa patience Pauline, qu’elle soit ici ou là-bas, qui m’a appris que la beauté de la vie est d’être libre.


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