Jouets : Méfiez vous des contrefaçons
Activiste et lesbienne Kyoto : À un Doha de l’échec
© APA IMAGES/SIPA/MOMEN FAIZA
Hamas : 25 ans
2 L’Aberration
Edito
Sommaire
J
-11 avant la fin du monde. Pas pour tout de suite affirment les catholiques, pas tellement convaincus par la légitimité d’un vulgaire mandala de pierre. Seul Dieu décidera, donc. La version de René Girard, anthropologue du 20ème siècle , est toute autre : « L’Apocalypse n’est pas du tout divine. Ce sont les hommes qui font l’Apocalypse ». Et d’ajouter : « S’il existe une consonance entre l’évolution du monde et les textes de la Bible, (…) ils nous avertissent contre notre violence ». Pas de chance pour les fidèles de Jésus qui ont prouvé ces dernières semaines qu’ils n’étaient pas des modèles de douceur, en tout cas pas envers les homos. Dieu n’est pas toujours amour. En terme de foi virulente, le Hamas n’est pas en reste non plus. 25 ans de lutte religieuse (« Hamas voyage »). Au programme, détruire un état tout entier. Il y a plus soft. Mais la religion n’est pas la seule voie vers la violence. Admettons. Le sens des mots fait effectivement enrager les féministes (« Le français, ce phallocrate »), et l’éviction fait lever les poings de supporters (« Ici c’est toujours Paris ? »). D’autres préfèrent se faire violence : les athlètes du biathlon, fusil en main, pour grimper au sommet du podium (« Messieurs les Français, tirez et skiez les premiers »), une activiste pour défendre les droits de la communauté LGBT (« Combattante de droit humain »), des hommes d’églises pour offrir un toit aux plus démunis (« L’Eglise ouvre ses portes aux sans-abris »). « C’est une sorte d’ivresse, la violence »* paraît-il. Le tout est de ne pas finir la tête au-dessus de la cuvette.
L’actualité p. 4 à 11
- La supervision bancaire de la zone euro. - Augmentation des factures de gaz en France. - Élections en Corée du Sud. - Le nucléaire iranien en marche.
International p. 12 à 17
- Ukraine : Lesya Pagulich contre la propagande homophobe - Le Hamas fête ses 25 ans. - La convention de Montego Bay à 30 ans.
Politique p. 18 à 21
- La langue française est misogyne. - Et si l’UMP était un film.
Economie p. 22 et 23
- Jouets de Noël : Enjeux dangereux.
Société p. 24 à 27
- Le méga-monday c’est cette semaine. - Les églises accueillent les sans-abris. - Les nouveaux projets d’envergure de Marseille.
Sport p. 28 à 30
- L’ambiance a-t-elle changé au Parc des Princes ? - Les Français brillent sur le biathlon.
Culture p. 31 à 33
- Sortie du film Le Hobbit, adapté de Tolkien. - Le Soft Power américain passe par la culture.
Ecologie p. 34 et 35
- Protocole de Kyoto : Fin de la lutte écologique ?
Média p. 36
- Six nouvelles chaînes apparaissent sur la TNT.
Justine Knapp * Claire de Lamirande, romancière canadienne
Directeur de la publication Michel Baldi
Rédactrice en chef Justine Knapp
Chef des infos Raphael Dor
Secrétaires de rédaction Arthur Scherer
Rédacteurs graphiques Jérémy Blais Thomas Ciret
Rédaction :
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Raphael Homassel Thomas Inglot-Fantuzzi Charles Jégou Elyes Khouaja Delphine Proust
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Actualité
La supervision bancaire de nouveau sur la table Les ministres européens des Finances se rencontrent mercredi pour trouver un accord sur la supervision bancaire de la zone euro. De nombreux points de discorde subsistent.
4 L’Aberration
Pierre Moscovici et Wolfgang Schaüble, ministres des Finances français et allemand, lors du dernier G20.
projet d’une supervision par la BCE de toutes les banques de la zone euro – elles sont au nombre de 6000 – M. Schaüble souhaiterait que l’organisme basé à Francfort se concentre essentiellement sur les grandes banques et celles qui présentent un risque majeur pour l’économie. « Aucune institution européenne ne peut superviser 6000 banques, en tous cas, pas pour l’instant », a déclaré, pessimiste, le ministre des Finances de la première puissance européenne.
« Egalité de traitement »
Un autre problème à régler est celui de l’im-
portance nouvelle que cette supervision accorderait à la BCE au sein de l’Autorité bancaire européenne (EBA), l’organisme qui s’occupe de la régulation bancaire au sein de l’UE. Les pays non-membres de la zone euro, RoyaumeUni en tête, craignent ainsi d’être mis en minorité si la BCE vote au nom des 17. La France a fait savoir qu’elle ne souhaitait pas un système de vote qui permettrait au RoyaumeUni d’user d’un droit de veto. Parmi les pays hors zone euro, certains espèrent cependant prendre une part active dans ce nouveau mécanisme. C’est le cas de la Suède, qui redoute
néanmoins que sa voix ne soit pas entendue au Conseil des gouverneurs, principal organe de décision de la BCE, dans lequel ne sont représentés que les pays de l’euro. « Nous pensons qu’il devrait y avoir une égalité de traitement entre tous les pays de l’Union européenne qui veulent rejoindre le conseil de supervision », a réclamé Anders Borg, le ministre des Finances suédois. Ces questions devront impérativement être réglées mercredi si la zone euro veut se doter d’un mécanisme de supervision bancaire dans le plus courts délais. Arthur Bernard
© Consilium
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lors que la zone euro est fragilisée par une crise financière de grande ampleur, la mise en place d’un mécanisme unique de supervision bancaire avant la fin de l’année apparaît comme une nécessité pour les ministres des Finances européens. Après s’être longuement entretenus mardi 4 décembre, ces derniers se sont donnés rendez-vous mercredi, veille du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement, pour trouver un accord satisfaisant sur les modalités de fonctionnement de ce nouveau mécanisme. Confiée à la BCE (Banque centrale européenne), la supervision bancaire sera suivie de très près par les 17 pays membres de la zone euro. Des superviseurs nationaux seront ainsi dépêchés auprès de la BCE afin d’épauler cette dernière dans sa tâche. Si l’idée même d’une supervision bancaire fait consensus, de nombreuses divergences et inquiétudes persistent, notamment au sein du couple franco-allemand. Wolfgang Schäuble, ministre des Finances outre-Rhin, a alerté ses partenaires européens sur la charge de travail conséquente confiée à la BCE. Si certains pays, dont la France, soutiennent le
La Grèce rachète sa dette : pari réussi ? Le rachat par la Grèce de sa propre dette est une opération délicate. Les premières conclusions devraient êtres connues cette semaine. était dus, ils risquent fort d’adopter cette nouvelle proposition. Pour financer l’opération, la Grèce pourra compter sur le Fonds européen de stabilité financière (FESF) auprès duquel elle s’endettera à des taux très bas. Ses créanciers seront donc uniquement publics, ce qui permettrait une résolution politique
de la crise : l’Allemagne pourrait assouplir sa position quant à un effacement partiel de sa dette. Le 26 novembre dernier, un accord à Bruxelles de l’Eurogroupe avait fixé pour objectif de ramener la dette grecque à 124 % de son PIB en 2020. Celle-ci devrait atteindre 190 % du PIB en 2014. Raphael Dor
L’union franco-brésilienne pour le progrès social
Budget
François Hollande et la présidente du Brésil Dilma Roussef ouvriront le Forum du progrès social à Paris, le 11 décembre 2012.
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vec pour intitulé « Choisir la croissance, sortir de la crise », le Forum du progrès social aura pour but de « replacer la croissance au cœur du débat public mondial », comme l’a déclaré un organisateur au Point. L’évènement est organisé par la fondation Jean Jaurès et l’institut Lula,
deux entités publiques dont le but est la coopération mondiale et la résolution de questions sociales. Gilles Finchelstein, président de la fondation Jean Jaurès, entend trouver une solution à « l’inquiétude que nous éprouvons face au ralentissement de la croissance mondiale depuis 2008 », a-t-il indiqué à l’AFP, mais
Le premier ministre luxembourgeois JeanClaude Juncker a annoncé son départ à la tête de l’Eurogroupe au plus tard le 31 janvier 2013. Il préside la réunion des Ministres des Finances de la Zone Euro depuis 2005. Restent six semaines pour trouver un successeur. Le ministre de l’Economie, Pierre Moscovici figure parmi les candidats potentiels.
Le budget 2013 pour la Sécurité Sociale va être adopté par l’Assemblée Nationale. Il prévoit 5 milliards d’euros de recettes, permettant au déficit de l’assurance maladie d’être ramené à 11,4 milliards, notamment grâce à une nouvelle taxe sur le tabac, qui devrait rapporter 250 millions d’euros à l’Etat, ainsi que sur la bière et les boissons énergisantes.
© Christelle Alix
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our soulager son économie, la Grèce a commencé lundi 3 décembre à racheter une partie de sa dette privée. L’Etat propose ainsi à ses créanciers privés de racheter ses obligations au tiers de leur prix. La plupart des créanciers ayant déjà accepté en mars dernier d’effacer 107 milliards d’euros de dette qui leur
Eurogroupe
aussi de « voir comment les fondations politiques socialistes peuvent peser ensemble dans l’avenir sur le G20. » L’ancien président brésilien Lula et l’ancien Premier ministre français Lionel Jospin seront aussi présents, preuve d’une réelle volonté de cohésion mondiale du socialisme. Erwan Carfantan
Égypte
Le projet de constitution égyptien fera l’objet d’un référendum samedi 15 décembre. Mohamed Morsi a ratifié le texte quinze jours plus tôt malgré le désaccord d’une partie de la population. La constitution prévoit qu’un président ne peut effectuer plus de deux mandats de quatre ans et maintient la charia, loi islamique, comme source principale du droit.
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Actualité
Mariage pour tous : la mobilisation continue Notre-Damedes-Landes
Les cabanes des opposants au projet d’aéroport à Notre-Damedes-Landes serontelles détruites ? C’est ce que doit décider le juge des référés de Saint-Nazaire ce mardi 11 décembre, une semaine après la tenue du procès. Si la destruction est ordonnée, le groupe Vinci devrait la prendre en charge avec le concours des forces de l’ordre.
Santé
La ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, dévoilera son plan de lutte contre les déserts médicaux ce jeudi 13 décembre. Cette mesure proposera à 200 jeunes généralistes de s’installer dans un désert médical en 2013. En contrepartie, ces médecins auraient la garantie d’un revenu de 4.600 euros brut par mois, pendant deux ans.
Arche de Zoé
Le procès de L’Arche de Zoé doit prendre fin mercredi 12 décembre, sans la présence du fondateur de l’association ni de sa compagne. Les deux principaux prévenus sont poursuivis notamment pour escroquerie et exercice illicite de l’activité d’intermédiaire pour l’adoption. Ils encourent une peine de dix ans de prison.
6 L’Aberration
Les associations pro-mariage gay organisent des manifestations du 14 au 16 décembre prochains.
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ui, oui, oui à l’égalité ! C’est le slogan que scanderont les militants de l’Inter-LGBT durant les manifestations du 14 au 16 décembre partout en France. A Paris, l’organisation invite homos et hétéros à se rassembler samedi prochain, place de la Bastille. Après la « manif pour tous » de la benoite Frigide Barjot et celui, plus musclé, de Civitas, les associations
LGBT (Lesbiennes, gays, bi, trans) sont remontées. « Il y a tant de personnes, de couples, d’enfants et de familles qui se font insulter, injurier, caricaturer presque quotidiennement dans le débat public », déplore Nicolas Gougain, porteparole de l’inter-LGBT. Le projet discuté en conseil des ministres déçoit aussi. Nicolas Gougain dénonce une loi « à minima » qui
exclut notamment les questions de la PMA (procréation médicalement assistée) et de la gestation pour autrui. L’Inter-LGBT et ses associations membres ont d’ailleurs engagé une large campagne publique d’interpellation des élus en ce sens. Pour les activistes, l’engagement en faveur de l’égalité, c’est maintenant ! Mathieu Brancourt
L’homoparentalité en attente à Genève Le dossier de l’homoparentalité avance en Suisse. Le 13 décembre, la Chambre du peuple devra se prononcer sur la question.
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a bataille pour le droit à l’adoption par les couples homosexuels s’annonce difficile. L’an dernier, au test Smartvote, 100 élus se prononçaient contre, 78 y étaient favorables. Depuis 2007, les couples de même sexe peuvent officialiser leur union grâce à l’entrée en vigueur du Partenariat enre-
gistré fédéral (PACS). Néanmoins, du PACS à l’adoption, la route est longue. En septembre 2011, la Chambre basse du Parlement avait refusé de justesse le droit des familles homoparentales à adopter.La commission du Conseil des états avait alors renversé la situation en émettant un avis favorable sur la question.
Cette décision a marqué un tournant dans les débats tenus jusqu’alors sur les droits des couples homosexuels. L’arrivée des Vert’Libéraux pourrait avoir une incidence sur la question de l’homoparentalité. Mais quand bien même le projet serait voté, il faudrait encore 2 à 3 ans pour qu’il entre en vigueur. Kahina Boudarène
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Actualité
La Corée du Nord inquiète Pyongyang prévoit d’envoyer un missile en orbite, ce que redoutent ses voisins.
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a Corée du Nord s’est attirée les foudres de la communauté internationale en annonçant l’envoi dans l’espace d’un satellite d’observation terrestre. Le lancement aurait lieu entre aujourd’hui et le 22 décembre. La déclaration de Pyongyang a été
condamnée par la Corée du Sud, les membres des Nations Unies ainsi que par la Russie. Ils lui reprochent de faire passer un lancement de missile balistique militaire pour un tir à vocation civile. Le régime communiste est toujours menacé par de multiples sanctions in-
ternationales après deux essais nucléaires en 2006 et 2009. Lim Sung-Nam, représentant de la Corée du Sud aux négociations à six sur le programme nucléaire nord-coréen s’est dit « préoccupé » par la situation et a ajouté que « Séoul et Washington épuiseraient toutes les
voies diplomatiques pour empêcher le tir nord-coréen. » Cho Tai-Young, porte parole du ministère des Affaires étrangères de Corée du Sud, a également exhorté la Chine, son unique allié de poids, à user de son influence pour faire renoncer Pyongyang. Charles Jegou
A gauche, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un. A droite, la candidate sud-coréenne Park Guen-hye
Election imminente en Corée du Sud La Corée du Sud attend avec impatience le second tour des élections présidentielles qui départagera Park Geun-hye et Moon Jae-in.
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es élections présidentielles secouent actuellement l’échiquier politique sudcoréen. La course à la présidence se termine le 19 décembre, date du deuxième tour qui marque la fin de l’opposition entre les deux candidats : Park Geun-hye et Moon Jae-in. Le scru-
8 L’Aberration
tin s’avère serré et met en opposition les deux grands courants politiques traditionnels qui se disputent le pouvoir depuis la fin de la dictature dans les années 80. Park Geun-hye représente le Parti de la nouvelle frontière (conservateur). Elle est fragilisée par certaines polémiques
concernant son père Park Chung-hee, ancien dictateur de la Corée du Sud. Son concurrent est le candidat progressiste du Parti démocrate unifié. Il bénéficie du retrait et du soutien de Ahn Cheol-soo. Ce dernier, autre opposant de Mme Park, a décidé de se retirer le 23 novembre pour
permettre à Moon Jae-in de remporter l’élection. Malgré sa défection, il aura durablement marqué la campagne et permis un recentrement des deux camps sur des thèmes primordiaux : la justice sociale et la réorientation de la politique envers la Corée du Nord. Hugo Derriennic
Chavez et Capriles, la deuxième rencontre Réélu Président une quatrième fois, Hugo Chavez compte désormais sur les élections régionales du 6 décembre pour poursuivre son projet gouvernemental.
L
a campagne pour les élections régionales au Venezuela a officiellement commencé. L’opposition, incarnée par Capriles Radonski, l’adversaire principal
de Chavez lors de la dernière élection présidentielle, est aux aguets. Le parti social-libéral d’opposition « Unidad Nacional » veut préserver son leadership
dans 7 des 23 Etats du pays. Le Venezuela étant constitué d’Etats fédéraux, les gouverneurs élus le 6 décembre auront un rôle politique et économique essentiel. En préservant ses positions dans les grands Etats, le parti de Capriles pourrait continuer à incar-
ner une alternative au pouvoir en place. Hugo Chavez, président du Venezuela depuis 1998, paraît indétrônable mais l’apparition d’une opposition structurée pourrait réduire ses marges de manœuvre au niveau local et national. K.B
Les négociations sur le nucléaire en Iran reprennent L’AIEA espère obtenir un accès plus large aux informations sur la production nucléaire iranienne.
L
e dialogue repart entre l’Iran et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Jeudi, les représentants des deux parties doivent se rencontrer. Le but de la discussion sera de trouver un accord afin que les
inspecteurs de l’AIEA obtiennent le droit d’accéder aux informations relatives au programme nucléaire iranien. L’agence souhaite notamment pouvoir se rendre sur le site militaire de Parchin, près de Téhéran. Au terme de
l’enquête, l’AIEA devra confirmer ou non les points soulevés dans le rapport de novembre 2011, accusant le pays de vouloir « développer un engin explosif nucléaire ». De son côté, l’Iran n’entend pas suspendre ses activités d’enrichisse-
ment d’uranium et soutient que son programme nucléaire est purement pacifique. L’ambassadeur de l’Iran auprès de l’AIEA, Ali Asghar Soltanieh, a d’ailleurs demandé, il y a deux semaines, la fin de l’enquête de l’AIEA. Delphine Proust
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Actualité DSK/Diallo
Dernier épisode du feuilleton DSK aujourd’hui. Après 1 an et demi de polémique, l’affaire semble s’étouffer. L’ancien directeur du FMI et Nafissatou Diallo ont finalement trouvé un accord. Quelques millions de dollars pourraient être en jeu, une audience est prévue le lundi décembre pour clore le dossier.
The Daily
La New Corp, détenteur de plusieurs titres de presse aux USA, annonce que son application The Daily fermera samedi 15 décembre. Il s’agit du premier quotidien diffusé exclusivement sur iPad. Ce media payant n’a pas rassemblé assez d’abonnés pour couvrir ses frais de production. L’activité numérique de la firme se limitera aux versions en ligne de ses éditions papier.
Qualité de vie
Vienne, ville où il fait le mieux vivre au monde. Le cabinet Mercer a publié son classement 2012 des villes offrant la meilleure qualité de vie. Zurich et Auckland ferment le podium, alors que Paris avance d’une place, se retrouvant en 29ème position, et Lyon reste 39ème. Ce classement est établi sur des critères tels que l’environnement politique, économique et socioculturel, les services publics ou les transports.
10 L’Aberration
Le prix du gaz continue son envolée Les Français sauront ce lundi de combien augmenteront leurs factures de gaz.
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elphine Batho avait annoncé un gel de l’augmentation des tarifs réglementés du gaz à 2% pour le quatrième trimestre. Mais le Conseil d’Etat a ensuite invalidé cette décision le 29 novembre dernier. Saisi par l’Anode, association qui regroupe quatre concurrents de GDF Suez, le Conseil d’Etat a indiqué que le
gouvernement n’avait pas pris en compte la hausse des coûts de distribution des fournisseurs, empêchant ainsi toute stabilité des prix. Une formule légale contournée par le ministère de l’Energie, qui aurait dû atteindre 6,1% d’augmentation. Pour éviter une hausse trop forte, le gouvernement a demandé à GDF Suez de « renégocier ses
contrats d’approvisionnement afin de diminuer leur exposition aux prix du pétrole ». Si les fournisseurs de gaz suivent cette voie, les utilisateurs de gaz peuvent se rassurer : les cours du pétrole, qui servent de référence pour établir chaque année le prix du gaz, est resté stable ces 6 derniers mois. E.C
Un plan quinquennal pour la pauvreté
Un plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et l’exclusion. C’est le nouvel objectif du gouvernement, qui a annoncé la tenue d’une conférence nationale sur le sujet, les 12 et 13 décembre.
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ept groupes de travail ont été amendés d’une mission : celle de passer au crible plus de 250 solutions possibles pour aider les plus démunis. Si tous les champs d’actions ne sont pas financièrement possibles à mettre en œuvre, Jean-Marc Ayrault se contentera de donner les grands
axes d’un plan d’action à suivre à l’issue de la conférence présidée par Marie-Arlette Carlotti. Une possibilité de gérer le Revenu de Solidarité Active (RSA) de façon annuelle et non trimestrielle sera aussi abordée, encourageant ainsi les bénéficiaires à devenir prestataires sans craindre de se lancer
dans un dédale administratif. Autre axe qui attise l’intérêt du gouvernement : indexer le RSA ainsi que la Couverture Maladie Universelle (CMU) sur l’évolution du revenu national médian, pour permettre à ces revenus d’augmenter proportionnellement à l’enrichissement national. E.C
Internet sera gouverné ou ne sera pas La liberté sur Internet pourrait être conditionnée par l’UIT d’ici le 14 décembre.
S
erait-ce la fin de l’Internet libre ? L’Union Internationale des Télécommunications, qui regroupe les 193 pays membres de l’ONU, s’est réunie depuis le 3 décembre, et ce jusqu’au 14 décembre, à Dubaï pour décider de la gouvernance du Net. Seront aussi présents de grands groupes comme Google oudes lobbys d’opérateurs de télécommunication.
Le principal enjeu de cette réunion : donner aux nations le droit souverain de gérer le Webau sein de leur territoire. Un véritable risque pour les internautes, qui pourraient voir le droit de censure simplifiée pour les Etats. Près de 20% des pays membres de l’UIT ne défendent pas un Internet ouvert et libre. Autre point crucial, notammentmis en avant par l’European
Te l e c o m m u n i c a t i o n s Network Operators, le paiement de taxes pour les fournisseurs de contenus (YouTube, Facebook, Amazon, etc)
pour utiliser les réseaux, ce qui pourrait mettre un frein à la création, l’innovation, et la concurrence sur Internet. E.C
Le pape aussi est sur Twitter
Benoit XVI sur Twitter ; c’est ce qu’ont annoncé le 3 décembre les communicants du Vatican lors du lancement officiel de @pontifex.
L
e 12 décembre, quand les cloches de l’église sonneront les coups de midi, le premier tweet de Benoit XVI sera lancé. A 85 ans, le pape sera bien l’auteur de ses tweets. Cependant, peu accoutumé aux smartphones, il comptera, non pas sur des disciples comme Jésus, mais sur les secrétaires d’Etat du Vatican, pour formuler ses messages. Disponible en huit langues – allemand, anglais, arabe, espagnol, français, polonais et portugais -, le compte Twitter ne traitera que des questions de
foi. « Le pape sèmera ainsi sur le chemin de l’homme des étincelles de vérité », a affirmé Mgr Claudio Maria Celli, président du Conseil pontifical pour les communications sociales. Après l’ouverture d’un compte Facebook, d’une chaine sur Youtube et en attendant l’arrivée d’une application pour iPhone baptisée The Pope Act – en français « l’application du pape » -, le Vatican franchit une nouvelle étape dans l’art de prêcher la bonne parole, ou autrement dit, dans la communication. K.B
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International
Combattante de droit humain Lesya Pagulich est militante à plein temps. Engagée sur le front des droits des femmes, des homosexuels et des personnes séropositives en Ukraine, elle revient sur le contexte homophobe de son pays, son parcours mais aussi sur sa vision panoramique de la défense des minorités.
Devenir activiste pour les droits de la communauté LGBT fut un long processus pour Lesya. Dans un premier temps, il a fallu comprendre,
12 L’Aberration
saisir sa propre orientation sexuelle. « En réalisant que j’étais lesbienne, j’ai immédia-
minorités et des droits. » C’est le point de départ d’un engagement dans de multiples causes,
assume au quotidien à Kiev. Pourtant, le silence reste de rigueur dans sa famille : « Je fais face à un déni complet. Mes sœurs ont été choquées quand elles ont appris que j’étais homosexuelle. Aujourd’hui elles sont les seules à savoir dans mon entourage. C’est un autre combat, étape par étape. », admet-elle.
« Eduquer et informer »
La société ukrainienne reste extrêmement fermée à la question des droits des gays et lesbiennes. En 2011, près de 75 % de la population déclarait trouver normal que la communauté LGBT n’ait pas les mêmes droits. Pour Lesya, l’ignorance de ce que vivent les homos au quotidien participe à ce climat anti-égalité. « Devant le manque de compréhension sur l’orientation sexuelle, nous avons besoin d’éduquer, d’informer et de réveiller les consciences. Montrer que nous ne sommes pas des monstres ni des menaces pour la sécurité. L’orientation sexuelle
© AP/Efrem Lukastky
E
lle est en retard. Lesya Pagulich s’assied discrètement au bout du cercle formé par les activistes LGBT ukrainien, réunis au siège de l’organisation Gay Alliance, à Kiev. Seule femme présente, elle prend vite la parole et, avec aisance, fait converger ses combats féministes et pro-homosexuels. A 34 ans, cette militante lesbienne se bat aujourd’hui contre le projet de loi anti-gay discuté au parlement. Son engagement n’est rien d’autre que ce qu’elle est : une femme debout contre l’homophobie et l’hétérosexisme ambiant. Révoltée, la jeune femme aux cheveux courts l’est. Pudique aussi. Si ses mots sont tranchants, sa voix elle demeure douce et posée. Bien campé derrière ses lunettes, son regard ne laisse rien transparaître de l’âpreté du combat qu’elle mène.
Lesya Pagulich au siège de l’association Gay Alliance.
tement perçu l’image négative que cela portait et toute l’homophobie qui existait autour de moi. » Un rejet qu’elle intériorise, face à un entourage qui ne réalise pas la violence subie par Lesya. « Très vite, tu veux te battre contre ça, tu veux une justice sociale pour les
dont celles des homosexuels ukrainiens. Elle prend ainsi part à un groupe d’action féministe et devient travailleuse sociale au sein de All-Ukrainian Network, réseau de soutien et d’accès aux traitements pour les personnes vivant avec le VIH. Un large plaidoyer qu’elle
Travaillant directement auprès de personnes séropositives, l’activiste mesure le danger que représente ce projet de loi pour la santé des homosexuels, particulièrement vulnérables à l’épidémie de sida. Ce dernier n’interdira certes pas l’accès aux traitements pour les personnes concernées, mais Lesya dénonce, limpide, l’impact social sur une communauté montrée du doigt : « C’est une influence indirecte. Quand vous poussez dans l’ombre un groupe précis de personnes, que vous l’invisibilisez en prétendant qu’il n’existe pas, en découle toujours une stigmatisation. Un rejet qui vous main-
© Mathieu Brancourt
n’est pas un choix, ni une perversion sexuelle », insiste-t-elle. C’est dans ce « fossé de silence » que s’engouffrent les initiatives homophobes, telles que la loi contre la «propagande homosexuelle.» Dans le cadre d’une modification législative générale, pour le droit de l’enfant à une information saine, cette disposition interdirait toute diffusion d’information ou de prévention sur la question de l’homosexualité. « Pour ses partisans, cette législation vient rappeler ce que disent les conservateurs des siècles. A savoir qu’il n’est pas normal d’être homosexuel, que l’on ne peut pas dire à ses enfants que quelqu’un est homosexuel et que cette déviance est un mal qui peut être guéri et qui doit donc être soigné », dénonce fatalement Lesya.
Le raimbow flag, drapeau emblématique pour la lutte de l’égalité des droits.
tient dans la honte et dans le secret, mettant davantage d’obstacles aux services de santé. Dès lors, cela impacte directement la lutte contre le VIH/sida. »
« Cette bataille, est celle des droits humains » Lucide sur la menace qui pèse sur les homos ukrainiens, Leysa Pagulich l’est également sur les communautés auxquelles elle appartient. Trop peu de groupes féministes accueuillent en leur sein des lesbiennes, pour porter leurs revendications. Moins nombreuses que les gays, les lesbiennes sont pour-
tant aux avant-postes du plaidoyer public contre la loi. Parmi les organisations LGBT, « il existe une certaine séparation entre les gays et les lesbiennes. Sur les quarante organisations LGBT enregistrées, la plupart s’engagent sur la prévention du VIH ou des IST, et moins sur la lutte politique. Lors des manifestations de rue pour demander l’annulation de cette loi homophobe, la majorité des associations étaient féministes et ou lesbiennes, avec très peu de gays présents », explique l’activiste. Elle souhaite ainsi une plus grande solidarité intercommunautaire, pour briser les barrières à l’émergence d’une communauté unie dans toute sa diversité. Le
féminisme et activisme pour les droits des homos vont de paire. « Je lie ces deux combats et je pense que cela devrait toujours être ainsi : parmi la communauté LGBT, il y a évidemment les lesbiennes. Elles subissent la double discrimination, en tant que femme et sur leur orientation sexuelle. Les deux doivent être associées, combinées. Cela permettrait une plus grande mobilisation et plus de résonance au sein de la société », résume-t-elle, comme pour couper la chique à une vision partisane de sa lutte. « Cette bataille, c’est celle des droits humains », conclut Lesya. Elle doit y aller, elle est en retard. Mathieu Brancourt
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International Ces derniers mois, de nombreux observateurs témoignaient du manque d’intérêt que suscitait le conflit israélo-palestinien. Mais après l’opération Pilier de Défense menée par l’armée israélienne et l’adhésion de la Palestine à l’ONU, l’attention mondiale s’est à nouveau focalisée sur le Proche-Orient. De plus, le Hamas célébrera ses 25 ans d’existence ce vendredi 14 décembre. Une bonne raison pour revenir sur la Genèse d’un des protagonistes majeurs des événements dans la région.
A
près 25 ans de ponsable de l’Associalutte contre « l’en- tion France Palestine tité sioniste », le Solidarité. Le Hamas Hamas est aujourd’hui est une organisation à une organisation qua- plusieurs variables, elle lifiée de terroriste par n’est pas une. Elle disles Etats-Unis ou l’Union pose d’une faction miliEuropéenne. Maitre de taire mais aussi d’une la bande de Gaza depuis branche plus politique. » 2007, il suit une charte stricte éditée en 1987. C’est la première Son programme est Intifada qui a servi de simple : détruire l’état détonateur à la fondad’Israël, qu’il tion de ce « Le Hamas m o u v e m e n t ne reconnaît s’est orienté issu des Frères pas, et rendre à la Palestine vers la politique M u s u l m a n s ses frontières pour trouver des d ’ E g y p t e . de 1920, c’estsolutions », A la fin des à-dire celle de années 80, la Palestine la première mandataire incluant « guerre des pierres Gaza, la Cisjordanie et » enflamme alors un aussi Israël. « Mais atten- peuple palestinien extion à ne pas tomber dans cédé par l’occupation le manichéisme, prévient israélienne qui dure Taoufik Tahani, un res- depuis 1967. Cette ran-
14 L’Aberration
Population palestinienne de la bande de Gaza pendant les bombardements israéliens.
cœur, les institutions financées et mises en place par les Frères dans le bande de Gaza servent de terreau à la création véritable du Hamas le 14 décembre 1987.
« Les Incorruptibles »
Comme l’atteste la signification de son nom, « Mouvement de résistance islamique », il se démarque du Fatah en faisant prévaloir la portée religieuse de sa lutte. Les membres du Hamas bénéficient notamment d’un statut d’incorruptibles à Gaza, par opposition à leurs homologues du Fatah. Et lors des accords d’Oslo de 1993, il s’oppose frontalement à son allié intérieur. Le
Hamas n’accepte pas ces accords et refuse de reconnaître l’état Israélien. Cette annéelà débutent les attentats suicides visant les citoyens Israéliens et les Palestiniens soupçonnés de collaborer avec l’état hébreux. En un peu plus de 10 ans, ces attentats ont tué plusieurs centaines de personnes. En 2004, Ahmed Yassine, le chef historique du Hamas, est tué lors d’une attaque israélienne. Quelques jours après, son successeur subit le même sort. C ‘est le début d’une remise en cause dans les rangs du Hamas. « Certains responsables du mouvement ont réalisé que leur action n’avait aucune chance
© AP
Hamas voyage
Le discours de Khaled Meshaal, qui prend les rênes de la branche politique du Hamas en 2006, va encore plus loin : « nous sommes prêts à conclure une trêve sur le long terme avec Israël. En acceptant son statut sans pour autant le reconnaître. » Parallèlement au relatif apaisement des tensions avec Israël, le Hamas présente deux candidats aux élections municipales de 2005. Mais ce sont les élections législatives de 2006 qui marquent véritablement une étape importante pour le Hamas, qui avait boycotté celles de 1996. Pour les deuxièmes élections législatives de l’histoire de la Palestine, la population vote massivement pour le parti de Meshaal. Le Hamas gagne 74 des 132 sièges du Conseil législatif palestinien. « Cela s’explique par l’exaspération de la population. Son vote punitif sanctionne l’inefficacité de Mahmoud Abbas à trouver une solution convenable pour les palestiniens » témoigne Taoufik Tahani. Ces élections ont été imposées par la communauté internationale et aucune fraude n’a été constatée. La mission d’observation française a d’ailleurs salué « le déroulement libre et sincère de cette élection et le caractère significatif des résultats proclamés. »
Un Etat en ruine Mais ces louanges sont l’arbre qui cache la fo-
rêt. Devant les résultats qu’ils sauront faire fi des de l’élection, Mahmoud pressions extérieures ». Abbas propose de créer un gouverneMais l’Etat ment de coa« un Etat hébreux s’est lition. Mais binational est impliqué dans cette tenta- en train de se le dossier affirtive se solde mettre en place mant par la voix par un échec, en Palestine » de son président le Hamas Shimon Peres : p r e n a n t « L’accord entre le contrôle de Gaza le Fatah et l’organisation après une « guerre ci- terroriste du Hamas est vile » contre le Fatah. une grave erreur qui em-
le même temps, Israël a accentué sa pression sur la bande de Gaza, comme l’attestent les opérations « Plomb Durci » en 2008 et « Pilier de Défense » en novembre dernier. Plus grave, les Etats ont considérablement diminué voire arrêté leurs subventions à destination de la Palestine. Les Etats-Unis versaient 150
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d’aboutir, ajoute Taoufik Tahani. Ils se sont donc logiquement orientés vers la politique pour trouver des solutions au conflit. »
Poignée de main entre Yitzhak Rabin et Yasser Arafat sous le regard bienveillant de Bill Clinton lors des accords d’Oslo en 1993.
Aujourd’hui, ce conflit n’est toujours pas résolu en dépit des tentatives de réconciliations depuis 2011. De nouvelles élections législatives devaient se tenir dans le courant de l’année 2012 mais il y a peu de chances qu’elles voient le jour. Cette situation n’érode pas l’optimisme de Taoufik Tahani, de l’Association France Palestine Solidarité « une nouvelle réunion est prévue au Caire la semaine prochaine. Ces derniers temps, la convergence des deux partis fait que cette réunion a de fortes chances d’aboutir, tant
pêchera l’établissement d’un Etat palestinien et va saborder les chances de paix et de stabilité dans la région. » Ce qui amène le journaliste Charles Enderlin à penser « qu’un Etat binational est en train de se mettre en place en Palestine. » En plus de ses problèmes internes, la Palestine doit gérer une image extérieure qui s’est fortement dégradée. Car malgré sa victoire « propre » aux élections, le Hamas est toujours considéré comme organisation terroriste par nombre de pays occidentaux. Dans
millions de dollars par an en 2010, aujourd’hui. Même les Etats arabes ont réduit leurs donations. En conséquence, cela fait plusieurs mois que l’Autorité palestinienne ne paie plus ses fonctionnaires, ce qui a contraint le Hamas à prendre le relai dans la bande de Gaza en payant de sa poche les salaires de 30 000 fonctionnaires. Et malgré cela, certains économistes envisagent la faillite financière de la Palestine dès mars 2013. Jean-Romain Blanc
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16 L’Aberration
International
Droit maritime : trentenaire de la convention de Montego Bay
C
ela fait maintenant trois décénnies que la convention internationale du droit de la mer a vu le jour. Il s’agit d’un texte de lois signé à Montego Bay (Jamaïque) au cours de la troisième conférence des Nations Unies sur le droit de la mer en 1982. « Cette convention regroupe un ensemble de décrets qui tendent à régler les différends entre les pays à propos d’espace, de fonds maritimes, de piraterie ou encore de pollution », explique Maître Jean-Leopold Renard, avocat de la famille Cousteau et spécialiste du droit maritime. Ces accords ajoutent par ailleurs quatre nouvelles zones maritimes à celles déjà définies par le droit international : les eaux archipélagiques, la zone économique exclusive, les détroits navigables
© Atlas Caraïbe
La convention internationale du droit de la mer fête ses trente ans aujourd’hui. L’occasion de revenir sur le fonctionnement et l’utilité de cette phalange méconnue du droit maritime.
et le fond des mers. Un paragraphe de la convention stipule qu’en cas de litiges concernant l’application des règles, le tribunal international du droit des mers doit être invoqué. Celuici a été créé en même temps que les accords de Montego Bay, pour trancher et donner raison à l’un des protagonistes d’un conflit. Ce tribunal, situé à Hambourg, se compose de 21 juges élus au scrutin secret par les Etats parties à la convention. Chacun est assisté dans ses tâches par 38 employés.
Une convention qui ne fait pas l’unanimité
Une fois son aval donné à la convention, n’importe quel Etat peut faire appel au tribunal d’Hambourg, et ainsi
remporter un bras de fer en cassation. Mais ratifier le traité, c’est aussi prendre le risque de se faire attaquer en justice à Hambourg. Ce fut le cas du Ghana, accusé la semaine passée d’avoir bloqué un navire militaire argentin au large de ses côtes en octobre dernier. Le juge du tribunal a laissé entendre que l’urgence de la libération du bateau serait examinée. Reste que si cette convention a été adoptée par les Nations Unies, elle n’a pas été ratifiée par bon nombre d’Etats. Les plus industrialisés l’ont majoritairement fini par s’y résoudre, comme la France en 1994 sous François Mitterrand. Les Etats-Unis restent la seule exception parmi les pays industrialisés. Un phénomène qu’explique aisément Maître Geneviève Maillet, avo-
cate au barreau de Marseille : « les Etats-Unis ne veulent pas perdre leur souveraineté, et encore moins dépendre d’une législation extérieure quelle qu’elle soit. Il ne signeront pas de sitôt ». Des éléments de réponses corroborés par Maître Renard : « En cas de pollution causée par un cargo étranger dans le golfe du Mexique, ils sont suffisamment puissants et persuasifs pour appliquer le droit américain. Le Sénégal ne peut clairement pas en dire autant, et a donc ratifié la convention ». Toutefois, les USA ont envisagé une ratification au cours de l’été dernier. Un tel geste leur permettrait de mieux défendre leurs intérêts, notamment dans le Pacifique ou la zone Arctique. Raphael Homassel
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Politique
Subtilité ou misogynie, la langue de Molière est le seul idiome roman à élever le genre masculin au détriment du féminin. Et l’exemple le plus éloquent en est celui des droits du seul homme, célébré ce lundi.
L
es droits de l’Homme, un concept aussi élémentaire qu’ancestral où toute misérable existence est élevée au-dessus de toute caste, ethnie, nation ou dogme, et au delà du Droit même. Un axiome qui octroie à l’homme des droits « inhérents à sa personne, inaliénables et sacrés » - pour reprendre la Déclaration de 1789 - et donc opposables en toutes circonstances au pouvoir. Une belle idée universaliste et égalitaire, mais entachée d’une faille : sa formulation. Depuis la fin du XXe siècle, les chantres du vagina power, et autres progressismes paritaires et féministes s’accommodent plus du
18 L’Aberration
Le féminisme, un autre néologisme de la langue vivante.
terme « droits humains », qu’ils trouvent moins « macho », moins sexiste, plus cohérent, bref, plus exhaustif. Une reformulation qui se trouve par ailleurs être la traduction littérale de l’équivalent dans les autres langues romanes ou en anglais : diritti umani (italien), derechos humanos (espagnol), direitos humanos (portugais), human rights (anglais). La dénomination française héritée du XVIIIe siècle est la seule parmi les langues romanes à véhiculer l’ambiguïté entre l’homme « mâle » et l’homme « être humain ». Paradoxalement, le mot latin homo dont elle découle étymologiquement désigne plutôt l’être humain, l’homme mâle étant traduit par le mot vir. Les plus conci-
liateurs introduiront bien le « H » majuscule à « homme » pour désigner le genre humain. Et même s’il n’est guère attesté dans les dictionnaires de langue française, son usage demeure constant chez les juristes ainsi que dans l’ensemble des textes normatifs français. Insuffisant toutefois pour la Commission française consultative des droits de l’homme qui, dans un avis daté du 19 décembre 1998, a confirmé la dénomination traditionnelle, celle avec un « h » minuscule.
Bouhours et le genre noble
Le français est-il donc fatalement misogyne ? La réponse est oui et l’amalgame homme-Homme n’en est pas le seul paran-
© natashalcd
Le français, ce phallocrate
gon. Dans l’introduction du Deuxième Sexe, Simone de Beauvoir décrivait la femme en tant qu’« Autre », face à un homme qui est « le Sujet », « l’Absolu ». Cette observation se traduit parfaitement dans la grammaire française, où il n’existe pas de genre neutre. C’est donc, par défaut, le masculin, considéré comme « non marqué » par la grammaire française, qui fait office de neutralité. « Par exemple, le titre d’un emploi ne devrait pas, selon l’Académie française, préciser le féminin (docteur, professeur, facteur, etc., ndlr) mais seulement le masculin, ce dernier devant être alors compris comme neutre ne renvoyant nullement à un individu de sexe masculin mais plutôt à une personne générique »,
versité de Paris VII. « La société est depuis longtemps sexiste et patriar-
à toutes les époques les pensées dominantes’ est vrai aussi des rapports de
Et l’Histoire donne plutôt raison au Professeur Yaguello. En 1675, l’abbé Bouhours expliquait la suprématie du genre masculin dans la langue française par un mythe sur la noblesse : « Lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte ». Un siècle plus tard, c’est le grammairien Nicolas Beauzée qui confortait la théorie du mâle dominant : « Le genre masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle». Heureusement pour le salut du beau sexe, la langue française n’est guère immunisée contre le progressisme. Ainsi un décret de « tolérances orthographiques » a été publié en 1977 autorisant la reprise d’un nom masculin par un pronom féminin (exemple : les néologisme de députée, professeure, etc.). Plus tard, en 1984, une Commission de féminisation des noms de métiers et de fonctions est érigée sous le gouvernement Fabius et sous l’impulsion de la députée Yvette Roudy. Elle se voit chargée d’étudier l’emploi du féminin pour les noms de métiers, les fonctions, les grades et les titres. Une démarche qui a suscité une levée de bouclier à droite, le Figaro parlant d’ « enjuponnement du vocabulaire » et France Soir de « clitocratie ». Idem pour l’Académie française, qui dénonçait alors un « contresens sur la notion de genre grammatical ». Comme on dit : Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis.
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explique Pierre Lecoeur, docteur en lettres et chercheur en littérature française. Autre particularité « machiste » du français : la conventionnelle règle du « masculin qui l’emporte toujours sur le féminin ». En d’autres termes, « si l’on désire exprimer qu’un groupe est composé de personnes de sexe tant masculin que féminin, on utilise traditionnellement ce genre non marqué, qu’il faudrait toujours comprendre comme une expression de la nature asexuée du groupe. Pour la même raison, les expressions comme « celles et ceux », « certain et certaines » sont incorrectes grammaticalement», poursuit Dr. Lecoeur. Et si le langage est phallocrate, « ce n’est pas un hasard », confie Marina Yaguello linguiste et –c’est un comble - professEUR émérite à l’Uni-
Marina Yaguello, linguiste et professeur émérite à l’Université de Paris VII.
cale. Ce que disait Marx de l’idéologie dominante : ‘les pensées de la classe dominante sont aussi,
domination du sexe masculin. Et le language est une expression concrète de la pensée dominante ».
Elyes Khouaja
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Politique
L’UMP fait son cinéma La crise du premier parti d’opposition est tellement rocambolesque que nul ne peut prédire son dénouement. Entre les coups bas et les rebondissements inattendus, on pourrait croire à Un Mauvais Polar. Tellement que le cinéma pourrait bien nous aiguiller sur les issues possibles. Tour d’horizon en cinq pistes plus ou moins probables. Par Charles «Late» Lafon Le Prestige, la rivalité au long cours qui tourne mal
Dans ce film de Christopher Nolan adapté d’un roman à succès, deux magiciens, incarnés par Hugh Jackman et Christian Bale, se vouent une haine mortelle. Mais au début, ils sont copains, tous deux apprentis d’un grand maître (tiens, tiens). Sauf qu’un jour, la femme du premier meurt lors d’un tour. Ligotée par le second, elle n’a pas pu s’extraire comme d’habitude de la cuve dans laquelle elle était immergée. Les deux deviennent ensuite célèbres chacun de leurs côtés, mais n’arrêtent pas de se tirer dans les pattes pour faire échouer l’autre.
Taux de ressemblance : 80%
Copé et Fillon ont tous deux été élevés dans l’ombre du grand Nicolas S, mais l’origine de leur querelle est un poil moins romantique. Il faut dire que la présidence de l’UMP fait moins envie que Piber Perabo, la sublime blonde qui incarne la noyée du Prestige. Par contre, côté coups fourrés, les deux politiques n’ont rien à envier à leurs homologues prestidigitateurs. De l’annonce anticipée de la victoire à la création d’un groupe dissident à l’Assemblée, en passant par les accusations de triche, tous les moyens sont bons pour faire tomber l’autre. Espérons juste que la fin soit un peu tragique : Bale finit par tuer Jackman.
Warrior, les frères ennemis réconciliés
Le MMA, littéralement arts martiaux mixtes, appelé aussi combat libre en bon franchouillard, est un sport de combat mêlant pugilat et lutte au corps à corps. En somme, le parfait moyen pour régler ses comptes. Celui choisi en tout cas par Tom Hardy et Joel Edgerton, deux frères séparés à l’adolescence. Hardy en veut à Edgerton, l’ainé, d’être resté avec leur père alcoolique au lieu de partir avec leur mère malade. L’explication aura lieu en finale du plus grand tournoi de MMA au monde. Le moins fort mais le plus sympathique finit par gagner et le favori lui pardonne.
Taux de ressemblance : 72%
Pour s’entraîner, Hardy fait appel à son père, malgré leurs différends. Comme Fillon faisant appel à Sarkozy en dépit de leurs divergences du temps du quinquennat. Copé a aussi triomphé contre toute attente, lui qu’on donnait perdant dans tous les sondages. On a par contre du mal à imaginer une happy end aussi mielleuse, tant la fracture entre les deux semble profonde. On n’efface pas tant de battage médiatique en une accolade au milieu de la foule, sauf dans un film américain dopé aux bons sentiments.
20 L’Aberration
Moi, député, du rire et des magouilles
Lorsque la comédie s’empare de la politique, on peut s’attendre au pire comme au meilleur. En l’occurrence, la réunion des deux monstres que sont Will Ferrel et Zach Galifianakis (le joyeux barbu de Very Bad Trip) se pose un peu là. Ils incarnent deux candidats en course pour le Congrès usant de toutes les sournoiseries pour décrédibiliser l’autre. Sex-tape, passé de terroriste, décrédibilisation télévisuelle, vidéo virale, machine à voter truquée, tout y passe.
Taux de ressemblance : 43%
Copé et Fillon sont issus du même camp, alors que Ferrel et Galifianakis sont respectivement démocrate et républicain. Impossible aussi d’aboutir au même dénouement, soit l’un nommant l’autre chef de son cabinet. L’ancien Premier Ministre a déjà refusé la proposition du Maire de Meaux de devenir le vice-président de l’UMP. Néanmoins, la réalité est au moins aussi drôle que la fiction, grâce notamment au sens de la formule de Nadine Morano, aux expressions faciales de Valérie Pécresse ou aux tweets de David Douillet. Et puis le comique de situation frise le génie.
Fight Club, c’est du pareil au même
Un livre écrit par un mécanicien de moteurs diesels est potentiellement un peu barré. Lorsqu’un réalisateur comme David Fincher en fait un film, le résultat laisse rêveur. Au cours d’un voyage en avion, Edward Norton, jeune cadre bien comme il faut, rencontre Brad Pitt campant un marginal qui gagne sa vie en fabriquant et vendant du savon. Ensemble, ils vont monter un Fight Club, dont on ne doit pas parler, qui aboutira au bien-nommé Projet Chaos.
Taux de ressemblance : 97%
Certains puristes pourront arguer que ni Fillon ni Copé ne peuvent être assimilés au sémillant Pitt. Pour le reste, difficile de trouver des différences. Au vu du bordel, on peut d’ores et déjà affirmer que le Projet Chaos a fonctionné. Les deux hommes se cognent dessus à longueur de JTs mais restent bons camarades en privé. Ce n’est qu’une question de temps avant qu’ils ne se rendent compte qu’ils sont la même et unique personne. Que ce soit l’un ou l’autre de toute façon, l’UMP restera l’UMP.
Usual Suspects, celui qui tire les ficelles
En 1995, Bryan Singer écrit une nouvelle page du thriller dès son deuxième film. Usual Suspects commence par la fin, lorsque un homme répondant au nom de Keaton se fait descendre par un homme de dos, Keyser Söze. On suit ensuite les tribulations d’une bande de criminels réunis pour un énorme casse par Söze, mystérieux parrain sanguinaire que personne n’a jamais vu. Au fur et à mesure que l’histoire avance, ils meurent tous les uns après les autres. Le twist final révélera que Söze était juste l’un d’entre eux et qu’il avait tout prévu depuis le début.
Taux de ressemblance : 2017%
Depuis le début de la campagne, une ombre plane sur l’histoire. Les deux hommes ont beau vouloir être calife à la place du calife, celui-ci n’est pas mort. Nicolas Sarkozy, bien qu’ayant annoncé son intention de se retirer de la vie politique, n’en demeure pas moins pour la plupart le sauveur qui mettrait tout le monde d’accord. En reprenant son poste d’avant-présidence, il serait en pôle position pour récupérer en 2017 ce qu’il a perdu en 2012. Et s’il avait monté cette crise de toute pièce, en divisant pour mieux régner ?
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Économie
A l’approche de Noël, les jouets sont revenus en force sur les étagères des magasins. Des jouets dont le prix est souvent préféré à la qualité.
P
oupées, voitures télécommandées, figurines diverses et variées, costumes, l’offre des distractions pour enfants n’a jamais été aussi large. Marché porteur, le monde du jouet est le secteur phare de la fin d’année. En France en 2011, le secteur d’activité
du divertissement enfantin affichait un chiffre d’affaires de 3 milliards d’euros dont 58% était uniquement réalisé lors du dernier trimestre de l’année. Un marché en constante progression, plus de 3% de 2009 à 2010, ainsi qu’une hausse record de plus 5% sur
la période 2010 – 2011. Des chiffres très avantageux qui placent la France en troisième position du classement des plus grands acheteurs de jouets en Europe. Une consommation française principalement composée de produits d’importation. Le marché français importe près de 2/3 de sa consommation annuelle de jouets et jeux vidéos. Un chiffre qui va en augmentant, le secteur industriel français étant particulièrement affecté par la tertiarisation de la société française. 2 milliards d’euros de produits d’importation dont près de 80% arrivent directement de Chine.
Contrôles aux frontières accrus
« Les produits venant de Chine ont la particularité de ne représenter qu’une faible valeur ajoutée, ce
Les douanes françaises avaient saisi près de 829 000 jouets en 2011.
22 L’Aberration
qui les rend facilement vendables sur les marchés européens, à des prix défiant toute concurrence » explique Nicolas Barraud, officier de la Direction Générale des Douanes de Roissy. « Le reste des importations est essentiellement concentré sur l’Asie du Sud-Est et les EtatsUnis, en particulier en ce qui concerne l’électronique élaboré et le marché des répliques d’armes en plastique » renchérit le douanier. Le premier mode de contrôle est une vérification de routine, effectuée sur l’ensemble des marchandises entrant dans le pays. Lors du dernier trimestre de l’année, l’accent est forcément mis sur les importations de jouets destinés aux enfants. « Chaque année, nous effectuons près de 30 millions d’opérations. Le contrôle des produits, issu de la suspicion humaine, se concentre sur la qualité, sur leur respect des normes françaises et européennes, et bien entendu, sur leur conformité administrative » explique Nicolas Barraud. En cas de grosses suspicions sur un produit contrôlé, la marchandise est saisie et analysée par les experts scientifiques de la répression des fraudes. La sensibilité des produits destinés à la jeunesse les installe en première place du hit parade des tests en laboratoire. Poupées possédant des yeux mal fixés pouvant être avalés par les bambins, peinture toxique recouvrant des animaux miniaturisés, une foule de dangers recherchés par les blouses blanches de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la
© TDR
De la douane à la hotte du Père Noël
Répression des fraudes (DGCCRF). « Nous recherchons principalement les fraudes techniques et les entorses au cahier des charges fourni avec les produits » développe Gérard Cambon, ingénieur attaché au centre de test de la Répression des Fraudes. Parmi les 5,1 millions de produits testés chaque année, il est tout à fait possible de dégager de grosses tendances. Les produits manufacturés de faible valeur ajoutée sont les plus représentés sur les établis des laboratoires. La raison ? « Une recherche de l’optimisation maximale des coûts de production, l’utilisation de matériaux interdits, des finitions de qualité très aléatoire » avance le scientifique visiblement amusé par la diversité des entorses aux règlements en vigueur en France. Au-delà des simples non-conformités techniques, des recherches plus poussées sont effec-
tuées sur les jouets portant les sigles NF (Norme française) et NE (Norme Européenne) : « s importateurs pensent tromper les contrôles en affichant des certifications bidons. Ces tentatives, assez grossières, ne sont malheureusement pas toutes détectées » déplore-t-il plus sérieusement. Ainsi, 829 000 jouets saisis et testés sont déclarés non conformes aux normes de qualités européennes, et généralement renvoyés à l’expéditeur. Plus grave, 53 000 d’entre eux sont déclarés dangereux à la consommation et sont directement envoyés à la destruction. Une surveillance douanière accrue est destinée à protéger le consommateur en amont de la mise en rayons.
Rien de tel que l’autocontrôle Passés les contrôles divers et variés, les jouets se retrouvent en rayon. Malgré l’attention des
pouvoirs publics quant aux marchandises distribuées sur le territoire, des produits passent au travers des contrôles de qualité. Vendus par des distributeurs peu scrupuleux, les produits contrevenants sont directement exposés à l’achat. Les vendeurs de marchandises non conformes aux normes européennes en vigueur s’exposent à la saisie desdits produits ainsi qu’à l’interdiction de leur vente. La responsabilité des clients est donc le dernier rempart existant entre les petites têtes blondes et les cadeaux empoisonnés. « Pour parer les éventuelles mauvaises surprises arrivant dans la hotte du père Noël, il reste conseillé d’acheter les jouets destinés aux enfants, directement dans les magasins spécialisés » conseille Nadja de Fares, membre d’une antenne de 60 millions de Consommateurs. Un avis sonnant comme une évidence, mais qu’en est-il des préoccupa-
tions des consommateurs « lambda » ? En temps de crise, ces derniers sont séduits par les économies qui peuvent être réalisées sur l’achat de jouets sans marque, par le biais d’un circuit de distribution secondaire. « J’ai été tentée de faire mes courses de Noël dans les bazars (…) les prix y sont plus qu’avantageux, surtout lorsque l’on a plusieurs petits bouts à contenter » justifie Eugénie, trentenaire mère de trois enfants, sortie d’un magasin Toys’r’us de la banlieue parisienne le caddy plein des offrandes du Père Noël. L’antédiluvien arbitrage entre la qualité et le coût qu’elle est sensée représenter. Un dilemme qui pousse de plus en plus de Français à se tourner vers des produits de moindre qualité, s’exposant ainsi aux dangers de fabrications étrangères passées entre les mailles du filet des normes de sécurité européennes. Thomas Inglot Fantuzzi
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© Huff Post
Arbitrer entre le prix et la qualité, le dilemme d’un Noël de crise.
Société
Mega Monday : l’explosion du e-commerce Le réseau de carte bancaire Visa Europe a annoncé que le « mega Monday », jour record de dépense en ligne, a lieu aujourd’hui. D’après les experts, ce sont les sites de vente et non les boutiques qui vont « truster » les ventes de Noël cette année.
24 L’Aberration
d’euros dans les cinq ans avec une proportion de trois quarts d’internautes qui choisiront l’achat en ligne. « Dans cette même période, l’ecommerce devrait dépasser le chiffre de 26 millions d‘euros en France » précise l’économiste. Le développement du m-commerce (payer avec son smartphone), devrait accroitre cette tendance à l’avenir.
L‘e-commerce booste Noël
Puisque les tendances économiques européennes suivent celles venues d’outre Atlantique, notre « mega-Monday » n’échappe pas à la règle et est comparable au « Cyber Monday » américain. Il a eu lieu au lendemain de Thanksgiving, le 26 novembre dernier et a battu des records historiques. Les consommateurs américains ont dépensé 1 028 milliards de dollars ce jour là, soit 16% de plus qu’en 2010. La France suit la même voie et on constate que les habitudes des consommateurs sont de plus en plus bouleversées par le marketing internet. «53% des
© Logan Rapp
E
n ce mois de décembre dédié aux cadeaux, les consommateurs ne cherchent plus les bonnes affaires dans les magasins mais sur internet. Le « mega Monday » représente plus de 7000 transactions bancaires en ligne à la minute et 10 millions de transactions en 24 heures. Dans cette journée folle, les cyberconsommateurs dépenseront plus de 400 000 euros par minute en moyenne, soit 20% en plus par rapport à 2011. Le nombre de ventes en ligne atteindra 9 milliards d’euros sur la période de Noël. Parmi les sites de vente les plus consultés, on trouve Vente-privée.com, PriceMinister ou Leboncoin. Pour Spencer Wilson, économiste à l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique), « cette prévision illustre plutôt bien la tendance de fond du marché : il n’existe plus une seule façon d’acheter, on évolue vers une commercialisation multi-canal grandissante, avec une progression constante de la vente en ligne ». Les spécialistes estiment que les dépenses des Européens atteindront les 170 milliards
Les sites de ventes sont prêts à affronter le Mega Monday
cyberacheteurs comptent réaliser plus de la moitié de leurs achats de Noël en ligne, alors qu’ils n’étaient encore que 30% en 2009 » explique Nathalie Laîné, responsable communication à la FEVAD (Fédération de E-commerce et de Vente à Distance). « On constate que 70% des internautes comptent acheter en ligne pour Noël, contre 64% l’an dernier », ajoute-t-elle. Avant, les consommateurs repéraient sur le net et se ruaient dans les magasins ensuite.
Maintenant, ils font tout sur internet grâce aux sites de commerce qui proposent de meilleures offres qu’auparavant. En France, les cyberacheteurs suivent et prévoient de dépenser environ 200 euros chacun sur internet, soit 58% de leurs dépenses totales cette année. Bien qu’à terme le e-commerce supplantera tout le reste, les « vrais » magasins ont encore quelques beaux jours devant eux. Charles Jégou
L’Eglise ouvre ses portes aux sans-abris En Seine-SaintDenis, sept paroisses vont accueillir des SDF à partir d’aujourd’hui et jusqu’à la fin du mois de mars.
teront la ou les mêmes personnes pendant plusieurs semaines, voire jusqu’à la fin du mois de mars. « Nous souhaitons accueillir des familles originaires de Bondy ou qui vivaient à proximité afin de les aider à trouver un logement durable », explique dans ce sens Père Bertrand Collignon.
u moins sept églises de SeineSaint-Denis proposeront un toit aux sans-abris cet hiver. Cette opération commence aujourd’hui et se poursuivra jusqu’au 31 mars, dans un département regroupant une forte population de SDF. « Avec plus de 4000 appels par jour, le Samu Social est débordé et ne peut répondre qu’à un quart des demandes qui lui sont soumises, rapporte Pierre-Michel Landry, membre du Secours Catholique. Ainsi, dans le département, des dizaines de familles se retrouvent à la rue toutes les nuits. » Avec une telle situation, l’association a conscience de ne pas pouvoir répondre au déficit d’hébergement d’urgence dans le département.
Ce système, déjà en place depuis 2007 à Paris, a prouvé qu’il pouvait porter ses fruits. « A la sortie de l’hiver, les paroissiens accompagnent les personnes qui ont été hébergées dans leurs démarches administratives, pour constituer un dossier social par exemple », raconte Bertrand Chevalier, pilote de l’opération « Hiver Solidaire ». Dans le cadre de ce projet, plusieurs paroisses accueillent entre trois et dix personnes, en fonction de la place dont elles disposent. « On a observé qu’environ 10% des personnes hébergées l’hiver, prenaient par la suite le chemin de la resociabilisation », ajoute ce bénévole en précisant que des anciens bénéficiaires du programme ont même retrouvé du travail. Toutefois, les églises continuent d’espérer une action du gouvernement afin de trouver une solution durable pour les 133 000 sans-abris qui survivent en France.
Une organisation en place à Paris
Loger des familles entières
Néanmoins, l’ensemble des paroisses partici-
© Flickr/bilquest
A
Entre 25 et 30 personnes pourront être accueillies dans les sept églises de Seine-Saint-Denis.
pantes proposera entre 25 et 30 places. Certaines églises accueilleront même des familles avec enfants. C’est par exemple le cas à Bondy. L’Eglise du Christ ressuscité pourra loger deux familles avec deux ou trois enfants cet hiver. « Pour les dîners et les petits-déjeuners, Les Restos du Cœur nous fourniront ce qu’ils peuvent », explique Père Bertrand Collignon, qui officie dans cette paroisse. « Pour le reste, une vingtaine de personnes se sont manifestées dans le but d’apporter de l’aide
aux familles hébergées. Certains donneront des lits ou des draps », ajoute-t-il.
D’autres offriront du temps en venant discuter ou jouer aux cartes avec les bénéficiaires. Les églises participant à cette opération mettent un point d’honneur à apporter un contact humain et surtout une aide ancrée dans la durée, ce que ne peuvent accorder les centres d’hébergement d’urgence. C’est pourquoi les paroisses de Seine-Saint-Denis abri-
Delphine Proust
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© Marseille Provence 2013
Société
Le Vieux-Port devrait être pietonnisé à 50%.
Marseille, bals au centre A partir de janvier 2013, Marseille sera, pendant six mois, capitale européenne de la culture. Un événement qui a donné l’impulsion à divers plans d’urbanisation d’envergure qui auront le mérite d’ouvrir la ville au monde.
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J’annonce que la ville capitale européenne de la culture 2013 sera Marseille. » Septembre 2008, ministère de la Culture et de la Communication. Christine Albanel, ministre de l’époque, vient de mettre fin à quinze ans d’attente. Quinze ans pendant lesquels la candidature de la cité phocéenne aura systématiquement été rejetée, faute d’argent et d’infrastructures. La délégation marseillaise est soulagée, en premier lieu Jean-Claude Gaudin, maire de la ville. « C’est une chance à la fois pour Marseille et pour l’Europe », déclare-t-il, des trémolos dans la voix, quelques minutes après le discours
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de Mme Albanel, avant d’annoncer la création de 250 ateliers culturels euro-méditerranéens. Des ateliers qui devraient permettre de mettre en relation des artistes des deux bords de la Méditerranée. Un projet ambitieux même si, concède M. Gaudin du bout des lèvres, « quatre ans, c’est court. »
Une véritable politique d’ouverture sur l’extérieur a été lancée
Décembre 2012. À un mois de l’ouverture des festivités, Marseille est d’ores et déjà sur son 31. L’opération a été sobrement appelée MarseilleProvence 2013 ; elle
commencera officiellement les 12 et 13 janvier prochains, pour se prolonger jusqu’à l’été. Concerts, festivals, spectacles son et lumière, expositions... Les réjouissances auront lieu à l’intérieur de la métropole d’abord, puis dans le reste du département Bouches-du-Rhône : Aixen-Provence, Aubagne, La Ciotat, Martigues... En clair, Marseille compte bien faire profiter du retentissement de l’événement à ses petites sœurs. Un choix qui, selon Alix Perrier, attachée culturelle à l’office du tourisme, s’explique aussi et surtout par la physionomie toute particulière de la ville. « La configuration géographique de
Marseille, très vallonnée, très densément peuplée, nous a imposé quelques limitations de sécurité. C’est pourquoi la majorité des spectacles son et lumière auront lieu dans des villes plus petites, avec plus d’espace. » Des limitations qui n’empêcheront pas la métropole provençale d’organiser 90% de la programmation, selon le site internet de Marseille-Provence 2013. A noter que les fameux ateliers euro-méditerranéens, bien que réduits de moitié, seront bien à l’ordre du jour.
Ouverture sur le monde
A en croire la mairie, les ambitions de la ville ne
Des projets ambitieux, que l’accession de Marseille au rang de capitale européenne 2013 n’a fait qu’accélérer.
Pour l’occasion, Marseille n’aura pas lésiné sur les moyens puisqu’au total le centre-ville new look devrait coûter la bagatelle de 80 millions d’euros. Il faut dire que le responsable du projet n’est autre que Norman Foster, concepteur du viaduc de Millau et lauréat du prix Pritzker 1999, le Nobel de l’architecture. « Il s’agit ici de donner une vie propre à un quartier qui, bien que central, aura toujours eu l’image d’un port de commerce sans âme, peu attractif pour les étrangers, explique Annick Touvier. En plus le VieuxPort est notre ouverture sur la Méditerranée, donc sur le monde. » Et Mme
Le nouveau FRAC verra le jour en 2013.
Touvier de rappeler que jusqu’à aujourd’hui, 80% du plan d’eau n’est pas accessible au public. Autre projet, autre portée : le lancement d’Euromed Center, véritable village en plein cœur du quartier historique de la Joliette. L’ensemble, dont la première pierre a été posée le 19 octobre dernier, devrait abriter, selon le site internet Marseille. fr, 47800m2 de bureaux, 2000m2 de commerces, d’un jardin public de 4000m2, entre autres... Un véritable World Trade Center à la Marseillaise. Là encore, l’importance a été donnée à l’ouverture sur le monde, comme l’explique l’architecte principal, Maximiliano Fuksas : « C’est un projet très organique, basé principalement sur le concept d’entrée, de porte ouverte sur la ville et la façade maritime. »
« La panacée d’une grande métropole » Des projets ambitieux, donc, que l’accession de Marseille au rang de capitale européenne 2013 n’a fait qu’accélérer. Bien avant l’année 2008, la mairie avait multiplié les appels d’offres pour apporter à la ville des centres culturels dignes de ce nom. De là est née l’idée du FRAC, une des plus grosses réserves d’art contemporain de France. Un concept que nous explique Alix Perrier : « Dans les années 80, l’Etat a lancé l’idée d’un lieu où les artistes contemporains pourraient entreposer leurs œuvres, comme une véritable base de données, mais des données véritables. Marseille s’est tout de suite portée candidate. De là est né le
© Marseille Provence 2013
s’arrêtent pas aux bords de la Méditerranée. Audelà de l’aspect artistique, une véritable politique d’ouverture sur l’extérieur a été lancée sous l’impulsion de MarseilleProvence 2013. « Des villes comme Graz, en Autriche, ou Porto, au Portugal, ont profité d’être capitales européennes pour étendre leur notoriété et leur importance sur le continent en multipliant les projets d’urbanisation », raconte Annick Touvier, urbaniste et Marseillaise de naissance. Première preuve d’ouverture : le réaménagement du Vieux-Port. Projet d’envergure, ce plan vise à dynamiser le centre-ville en le piétonnisant de moitié et en le dotant de larges espaces verts à l’horizon 2020.
FRAC PACA. » Malgré des débuts difficiles, le FRAC PACA est aujourd’hui un des lieux culturels incontournables du département Bouches-du-Rhône, grâce notamment à de perpétuelles rénovations et agrandissements. Audelà du FRAC, c’est toute la ville de Marseille qui semble aujourd’hui en constante mutation ; une dynamique qui, selon Alix Perrier, est « la panacée d’une grande métropole ». « A Marseille, on n’a pas les moyens de la capitale, mais on fait avec les moyens du bord, plaisante-t-elle. On fait du neuf avec du vieux. » La preuve s’il en fallait une : le mythique palais du Pharo, vieux de plus d’un-demi siècle, verra l’ouverture d’une nouvelle aile à la fin de l’année. Matthieu Carlier
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Sport
Ici c’est toujours Paris ? Un an et demi après l’application du plan Leproux, le Parc des Princes sonne creux. Les mesures drastiques prises pour lutter contre le hooliganisme ont changé l’ambiance. Pour les ultras renvoyés, l’identité du club est en péril et l’heure est venue de réagir.
© PSG mag
en fin de saison 2010, à mettre fin au climat violent qui entourait le Parc des Princes. Robin Leproux, alors à la tête du club, annonce trois mois après l’incident la suppression des abonnements annuels aux adhérents de Boulogne et d’Auteuil et le placement aléatoire pour les futurs abonnés. Parmi les ultras, tous s’indignent. « Ce n’est pas parce qu’on met un plan en place pour combattre un vrai problème avec de fausses méthodes que ça va avancer. En instituant le placement aléatoire dans les tribunes les moins chères, le PSG présume que les gens qui ont un faible pouvoir d’achat sont dangereux. On essaie de combattre cette discrimination. Si encore l’aléatoire était étendu à tout le stade », se désole Jérémy Laroche ancien président de LPA (Liberté Pour les Abonnés). Autre constat flagrant : l’incroyable montée du prix des billets. En deux ans, l’abonnement sera passé de 186 à 315 euros, soit une augmentation de 70 %. Une méthode qui rappelle celles employées en Angleterre pour lutter contre les hooligans : hausser les tarifs pour empêcher les classes populaires de se déplacer. L’épuration est
Le 15 mai 2010, les ultras vivent leur dernier match avant la mise en vigueur du plan Leproux.
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a remobilisation est en marche, et le retour des groupes de supporteurs au Parc des Princes s’organise pour la rencontre de ce dimanche contre Lyon. Il y a presque un an jours pour jour, les ultras parisiens se réunissaient pour officialiser leur boycott du stade. Chassés après la mise en vigueur du plan Leproux, certains kops* s’exaspèrent de ce qu’est devenue l’ambiance. Effectivement, à l’heure où la crise sportive pointe le bout de son nez au Paris SaintGermain, une autre plus profonde perdure dans
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les tribunes du Parc des Princes. Depuis le 18 mai 2010, et la suppression des abonnements, l’identité du PSG a changé. Plus aucun ultra, qu’il soit de Boulogne ou d’Auteuil, ne dira le contraire : le Parc n’est plus pareil qu’avant. « Quand je venais au stade il y a trois ans, se rappelle Damien ancien membre des Authentiks, j’étais captivé par la ferveur dans les gradins. Désormais les chants ne résonnent plus de la même manière et l’enthousiasme n’est plus aussi fort. Tout ça alors que nous possédons sûrement la plus belle équipe de notre histoire. En dé-
but de saison, j’ai vu sur l’écran géant un karaoké de l’hymne Parisien. J’ai compris qu’on était tombé bien bas. »
« Le plan Leproux a tué l’ambiance » La mort de Yann Lorence en mars 2010, lors d’une bagarre entre supporteurs de la capitale, aura été l’incident de trop poussant les dirigeants à établir dans l’urgence un plan de remaniement des tribunes. C’est également en prévision de la venue d’investisseurs qataris que la présidence du Paris SG s’est décidé,
© PSG mag
Aujourd’hui le Parc affiche un taux de remplissage record sans que l’ambiance ne suive.
donc passée par une stigmatisation des pauvres, comme si ce type de supporteur est par essence dangereux. Cependant, la situation en 2010 se révélait tellement incontrôlable, que l’Etat s’est vu obligé d’intervenir. Le plan Leproux est ainsi instauré par le Paris Saint-Germain avec l’aide du Ministère de l’Intérieur pour sécuriser l’enceinte et ses abords. Les objectifs de la réforme ont été atteints instantanément. « Il y quelques années les soirées de matches étaient invivables, raconte une riveraine du Parc des Princes. Des jeunes étaient constamment contrôlés voir même embarqués par la police. Des altercations se produisent encore mais les tensions se sont largement apaisées. » Pour Jean-Pierre Menguy, chef de sécurité d’une porte d’Auteuil, les mesures auront quasiment fait disparaître les violences. « Depuis deux ans, les effectifs de surveillance
ont été divisés par trois, explique-t-il. Ceux qui ont connu le Parc avant 2010 peuvent témoigner du calme qui règne aujourd’hui. Les bandes de jeunes ont été remplacées par les familles et il est devenu rare que des vrais incidents se produisent les soirs de matches. »
Une affluence jamais vue au Parc depuis 2001 Pourtant, depuis la mise en application du plan Leproux l’arène de la capitale constate une affluence record. 42 150 spectateurs sont ainsi comptés en moyenne à chaque rencontre, du jamais vu depuis la saison 2000/2001. Il n’aura d’ailleurs fallu qu’un mois au club pour vendre l’intégralité de ses abonnements. « Avec les millions dépensés et l’équipe de stars bâtie par les dirigeants qataris, il y aura toujours des gens pour venir au stade, s’énerve Damien. Mais l’ambiance elle n’existe
plus. Les Lynx (surnom donné par les ultras aux nouveaux supporteurs en référence à la mascotte du PSG) ne viennent pas supporter les joueurs mais simplement les regarder. Il n’y a plus de banderoles, de tifos, de drapeaux conçus par des kops parisiens, plus de rivalité entre virages, plus de chants. » Une position que défend aussi Sébastien abonné pendant quinze ans à Boulogne : « J’ai supporté le PSG pour la dernière fois le samedi 15 mai 2010. Ce soir-là, on se foutait bien du match (perdu 3-1 contre Montpellier, ndlr). On voulait juste montrer notre désaccord sur les mesures à venir. Après avoir gueulé pendant quatre-vingt-dix minutes je me suis dit que c’était la dernière fois que je mettais les pieds au Parc. Quand j’entends à chaque match les sifflets pour un but encaissé ou une mi-temps mauvaise, ça me fait mal. Les gens qui se déplacent au Parc ne viennent
plus pour encourager les joueurs mais pour les juger à leur capacité de faire le spectacle. » Cette situation inquiète QSI (Qatar Sport Investments) et le désir d’un retour des ultras se fait de plus en plus ressentir au sein de l’administration du club. JeanMichel Blanc, , le directeur général délégué au Paris Saint-Germain, confie dans les colonnes du Nouvel Observateur sa volonté de refaire du Parc « un stade imprenable, où les équipes adverses ont peur de venir. » Même s’il conçoit que le plan Leproux était nécessaire, il promet de proposer rapidement un nouveau modèle. Seulement, lutter contre le hooliganisme sans nuire à l’ambiance populaire et festive d’un stade de football est une problématique qu’aucun grand club n’a réussi à résoudre. Grégoire Gantois
* kop : groupe de supporter
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Sport
Messieurs les Français, tirez et skiez les premiers
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e biathlon fran- et ça lui permet de proçais est à la fête. gresser en biathlon ». Les podiums de cette discipline, mêlant Dans son sillage, le ski de fond et le tir à d’autres biathlètes trila carabine, sont désor- colores sont en embusmais trustés par une cade pour contrer l’hécohorte d’athlètes trico- gémonie du nouvel emlores, le couteau entre pereur de la discipline. les dents et Son frère « Il ne faut pas la fleur au aîné, Simon, avoir peur de fusil. Martin cadre de l’avenir . Fourcade l’équipe est le parfait Nous disposons de f r a n ç a i s e r e p r é s e n - jeunes talentueux m a s c u l i n e et d’entraineurs depuis de tant de cette génération exceptionnels.» nombreuses dorée. La années, est Catalan caracole en tête plusieurs fois médaillé du classement général lors des étapes de coupe de la coupe du monde. du monde. Handicapé Vainqueur de deux par une blessure, il n’a étapes sur trois cette pas encore chaussé ses saison, Fourcade est le skis en ce début de saitenant en titre du globe son. Cette fratrie en or de cristal. Le Français est épaulée par Alexis compte bien profiter Bœuf. A 26 ans, il est des prochaines étapes dans la forme de sa vie de coupe du monde, et se place actuellement du 12 au 16 décembre à la troisième place du à Pokljuka (Slovénie), classement général. pour asseoir sa domination mondiale. « Martin Le détonateur reste l’un des leaders de Raphaël Poiré notre sport » s’exclame Nicolas Michaud, direc- Si le biathlon français teur du ski nordique. est auréolé de si bons « Il s’est mis au ski de résultats, c’est en parfond cette saison pour tie grâce au déclic prose donner un nouveau voqué par un homme défi. Il se remet en cause capable de rivaliser sur
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© L’Express.fr
Sport nordique méconnu, le biathlon est dominé par les athlètes tricolores depuis une vingtaine d’années. Une réussite étonnante vu le nombre infime de licenciés en France.
Martin Fourcade embrasse le globe de cristal, synonyme de victoire du classement général de la coupe du monde.
les skis et les stands de tir avec ses homologues norvégiens et russes. La natation française a largement bénéficié de l’émergence de Laure Manaudou, le biathlon a connu le même phénomène grâce à Raphaël Poiré. Un champion hors-norme qui a longtemps tenu à bout de bras la discipline en France avant d’arrêter sa carrière en 2007. Triple médaillé olympique, vainqueur de 44 épreuves de coupe du monde, l’Isérois est considéré comme l’un des meilleurs biathlètes de tous les temps. Un chef de file qui a décomplexé toute une génération, de Sandrine Bailly à Vincent Defrasnes, et dont Martin Fourcade semble l’héritier tout désigné. Mais le biathlon est loin de jouir d’une forte côte de popularité dans l’hexagone. Ce sport marginalisé
n’est pratiqué que par 300 personnes. « Il ne faut pas oublier que nous ne faisons pas partie des grandes équipes. Nous touchons une aide de la Fédération internationale de ski qui n’est attribuée qu’aux petits pays » spécifiait Christophe Dumont, patron du biathlon français, à l’agence Reuters. Grâce à une formation exceptionnelle et malgré le faible nombre de licenciés, la France réussit à faire jeu égal avec les grandes nations que sont la Norvège, l’Allemagne ou la Russie. « Il ne faut pas avoir peur de l’avenir » clame Nicolas Michaud. « Nous disposons de jeunes talentueux et d’entraineurs exceptionnels. C’est grâce à notre encadrement que nous pouvons régler tous les petits détails qui permettent de gagner au très haut niveau. » Hugo Derriennic
Culture
Le Hobbit se fait désirer
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es amateurs de mondes féériques attendent mercredi avec la plus grande impatience. A cette date est prévue la prochaine incursion de Peter Jackson dans la Terre du Milieu, la contrée fictive imaginée par J.R.R. Tolkien, auteur du Seigneur des anneaux. Exit Frodon, Sam et autres Pippin : Le Hobbit met en scène leur illustre aîné, Bilbon Sacquet, et retrace les événements qui le mèneront à la découverte de l’ «anneau unique». Conforté par l’immense succès planétaire de son adaptation du Seigneur des anneaux, qui a engrangé près de trois milliards de dollars de recettes sur trois films, le réalisateur néozélandais a décidé de rempiler. Une aubaine pour les amoureux de la Comté, paysage de collines verdoyantes où vivent les Hobbits, ces petits hommes aux pieds velus et disproportionnés. Alice, 23 ans, en BTS optique, attend de pied ferme cette nouvelle itération filmique, elle qui a pénétré l’univers de Tolkien pour la première fois dans les salles obscures. «Après avoir vu le premier film, j’ai dévoré les bouquins», raconte-telle. Aucun ne lui résiste, si ce n’est le Silmarillon, œuvre narrant la genèse de la Terre du Milieu,
Bilbon, héros du film, entend bien attirer autant de spectateurs que son neveu Frodon lors de la sortie de la trilogie Le Seigneur des anneaux.
qu’elle juge «trop aride et compliqué ». C’est donc en amatrice de l’écrivain britannique qu’elle compte se rendre au cinéma à la mi-décembre. «Pas le soir de la sortie mais quelques jours après, avec des amis, eux aussi fans de Tolkien.» Sage décision au vu du raz-de-marée annoncé.
Dérive mercantile
Fin novembre, les mordus d’elfes, orcs et autres nains avaient déjà eu droit à un avant-goût de ce qui les attendait. C’était à Auber, la station de RER parisienne. Reproduction de «Culde-Sac», la demeure troglodytique de Bilbon,
cartes de la Terre du Milieu, animations diverses : la Warner, productrice du film et organisatrice de l’événement, sort le grand jeu. Les accros de la première heure, comme Didier, adulescent affirmé, émerveillé par le «côté imaginatif et féérique des films de Jackson», répondent à l’appel. Les néophytes, attirés par la campagne de pub tapageuse, s’y arrêtent. Tolkien n’est plus seulement l’écrivain britannique traumatisé par la Première Guerre mondiale et recroquevillé dans ses mondes imaginaires. A l’instar des K. Dick et Asimov pour la science-fiction, son nom est devenu un argu-
ment marketing, dont la portée dépasse largement le cadre des initiés. Chez Tolkiendil, association d’amoureux du romancier, la dérive mercantile, enclenchée par les premiers films il y a dix ans, inquiète autant qu’elle suscite l’espoir. « S’ils entrainent des rééditions et des gadgets inutiles, les films permettent aussi de découvrir et de faire traduire certains ouvrages importants sur la mythologie tolkienienne », reconnaît Audrey Morelle, alias Zelphalya, présidente de l’association basée à Fretin, dans le Nord. Comme tous, elle s’attend à une déferlante «Bilbon» dès mercredi. Arthur Bernard
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© 2012 Warner Bros. Entertainment Inc. and Metro-Goldwyn-Mayer Pictures Inc.
La sortie mercredi du Hobbit, adapté de Tolkien, est attendue aussi bien par les puristes que par les néophytes, convertis au phénomène à grands renforts de promotion.
Culture
La culture, instrument du Soft Power Le programme de « Diplomatie culturelle » apparait en pleine guerre froide, quand les autorités américaines prennent conscience du pouvoir et de la puissance de la culture populaire américaine, partout dans le monde. La musique, le cinéma et les médias servent encore aujourd’hui à améliorer l’image des USA, le département Afrique lance le 7 décembre un programme de concerts dans les pays francophones, d’ancien pré carré français.
L
e processus commence vraiment avec la guerre froide. Il est dirigé par l’OSS, l’ancêtre d’une jeune agence qui s’appellera bientôt la CIA. C’est que les Américains ont conscience que ces salauds de rouges ont des appuis idéologiques partout. Les partis communistes bien sûr, mais aussi les intellectuels, les pacifistes… Tous ces idiots utiles sont persuadés que le salut de l’être humain ne viendra qu’au matin du grand soir, lorsque sera terrassé l’hydre impérialiste.
Il faut donc lutter sur ce terrain. Un certain nombre de projets voient le jour. Ils consistent à développer une subversion culturelle de l’autre côté du rideau de fer. On commence par aider des intellectuels en envoyant discrètement des fonds à des colloques internationaux, on finit par récupérer Raymond Aron ou Heinrich Böll qui évidemment, sont
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rarement au courant. Le cinéma est également mis à contribution pour donner une vision sympa de l’Amérique et de ses valeurs, ce sont les accords Blum-Byrnes sur le cinéma en 1946. Cela donne des films où les indiens sont méchants et les pov’ nègres heureux d’être américains.
Les USA arrosent tous azimuts. François-Bernard Huygue, chercheur à l’IRIS (Institut des Relations Internationales et Stratégiques) s’en amuse : « On favorise aussi bien l’expressionnisme abstrait que la traduction des bons livres dans les pays du tiers monde. L’effort le plus important
est axé sur les médias, en créant Radio Free Europe, Radio Liberty, puis Radio Marti, une radio anticastriste. Ce projet commence dans les années 50 et est finalisé en 1953. Cette grosse opération nécessite des fonds du congrès, ce sont d’ailleurs ces projets de radio qui vont amener la création
jazz, le rock et le cinéma d’Hollywood ne peuvent être que démocrates et pro américains ».
Chute du mur et 11 septembre
Le numéro du 1er janvier 1964 de l’USIA Correspondent
de l’USIA (United States Information Agency). Une campagne, « Crusade for freedom » collectera des dons privés pour aider ces radios qui relaient la parole officielle des EtatsUnis. L’idée est énoncée de manière explicite : il y a une fonction vitrine, on montre notre créativité culturelle, notre cinéma est attractif, jouissif et plait aux jeunes. Le jazz, puis le rock, c’est quand même plus groovy que les concerts du Bolchoï et les chœurs de l’armée rouge.» Ce processus commence avec la CIA et s’institutionnalise avec la création de l’USIA par l’administration Eisenhower en 1953. L’effort porte surtout sur les médias mais la culture est un
aspect très important, des concerts sont organisés un peu partout avec des stars de la musique américaine. « Les radios sont collées au rideau de fer, très bien captées et largement écoutées à l’Est, ce qui agace considérablement les services soviétiques. A tel point que l’une des premières opérations menées par le terroriste Carlos, sous traitée par les services de l’Est, vraisemblablement la Stasi, sera un attentat contre radio Free Europe. Officiellement, ces médias ne font pas de propagande, mais proposent de l’info pluraliste et alternative et de l’entertainment cool. Les Américains sont convaincus qu’ils représentent la culture moderne et que les gens qui aiment le
Lorsque le mur de Berlin tombe, l’USIA a subitement moins d’intérêt. Il n’y a plus vraiment d’ennemi et le gouvernement se demande si le secteur privé ne fait finalement pas très bien ce travail à la place d’une agence qui engloutit des budgets colossaux. Al Gore conduit une réforme de l’Etat et entame une réduction drastique des budgets fédéraux. Il adopte un comportement très libéral sur cette affaire et trouve que ces vieilles structures sont dépassées. Pendant la première guerre du Golfe, CNN fait le job, gratuitement en plus. La mondialisation est heureuse et le vent de l’histoire souffle dans le sens des USA. La promotion des nouvelles technologies, les fameuses « autoroutes de l’information », marque le début de la reprise par les dirigeants américains de la théorie du Soft Power de Joseph Nye, une vieille notion géopolitique. Cette évolution aboutit à la dissolution de l’USIA en 1999, considérée comme une survivance du passé. Ses activités sont absorbées par le State Department et progressivement abandonnées.
Lorsque survient le 11 septembre 2001, Georges Bush Jr recrée immédiatement un sous secrétariat d’Etat à la
diplomatie publique, dirigé par la publicitaire Charlotte Beers, qui tente de transformer les USA en une marque. Les Américains se demandent pourquoi ils sont aussi détestés alors que les musulmans sont très bien traités aux Etats-Unis. L’opération « Common Value » aura pour objectif d’insister sur les valeurs communes entre l’Islam et les USA, notamment les valeurs familiales.
Quand Obama est élu, le Soft Power revient à la mode, Hillary Clinton adore ça, le « women’s empowerment » est le truc du moment, la condition féminine, les droits des femmes sont importants, d’autant que c’est un discours qui ne choque pas les conservateurs. Le temps de l’e-diplomacy revient, les USA défendent la liberté d’expression sur Internet, qui revient souvent à faire la promotion du libéralisme. Selon François-Bernard Huygue : « Les industriels de l’informatique sont vivement encouragés à ne pas censurer les contenus et à ne pas collaborer avec des Etats autoritaires qui traquent leurs opposants sur le net. Il est au contraire de bon ton d’aider les cyberdissidents et de contribuer à créer un espace sociétal qui est une condition de développement des sociétés modernes. C’est pourquoi le printemps arabe a apporté beaucoup de satisfaction au State Department, au moins au début, en semblant illustrer ces théories ». Abdelkrim Echatiman
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Écologie
Doha dans la confiture La conférence de l’ONU sur les changements climatiques s’est déroulée au Qatar ces 15 derniers jours. Ces deux semaines annuellement consacrées à l’écologie marquent cette année la fin du protocole de Kyoto. La fin du monde attendra.
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Equitable dans le sens où la répartition des efforts entre les pays laisse encore à désirer. « Si l’Allemagne est prête à investir 1,9 milliards d’euros par an dans les financements climats, la France se contentera de céder 110 millions avec un paiement en trois fois », explique Célia Gautier. La France a annoncé avoir réduit ses émissions de 12 % en 2011 par rapport à 1990 mais cela ne suffit pas.
L’environnement en peau de chagrin
La première période tout reste en encore à du protocole de Kyoto, faire. Ce qui a été tissé entré en vigueur en par les pays engagés a 2008, prend fin le 31 dé- été défait par les grands cembre. Aucune prolon- pollueurs. Le verdict est gation n’est encore fixée. sans appel. Les experts D’où la nécessité de trou- avaient fixé un réchaufver sans plus attendre un fement global à ne pas avenir au prodépasser de tocole. Avec la « Si certains pays l’ordre de politique de font preuve de bonne 2°C. Malgré l’autruche et volonté, beaucoup cet averla mauvaise manquent à l’appel t i s s e m e n t , volonté qui comme le Japon, la « en suivant restent encore Nouvelle-Zélande et le la tendance de mise au Canada. » d’émissions Qatar, la tenactuelles, dance climatique ne peut nous nous plaçons sur une qu’aller de mal en pis. trajectoire de réchauffement de plus de 6°C », exLes objectifs fixés dans plique Marc Mossalgue, le protocole de Kyoto se- chargé de l’informaront loin d’être atteints, tion au Réseau Action
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30 milliards de dollars ont été mobilisés entre 2010 et 2012, grâce à l’engagement pris à Copenhague en 2009. Et après 2012, on fait quoi ? « Sans contributeurs, le Fonds Vert pour aider les pays du Sud dans la lutte contre le réchauffement climatique, à l’étude depuis 2009, risque de rester coquille vide », selon Alix Mazounie responsable des politiques internationales au Réseau Action Climat. Les ONG demandent 10 à 15 milliards de dollars pour rendre ce fonds opérationnel. Les financements précoces devront également être doublés.
© Axelle Bichon
es négociations menées à la 18ème Conférence des Parties à Doha, au Qatar devraient se poursuivre encore cette semaine. Des décisions peinent à être prises pour ne pas déroger aux habitudes prises lors de ces conférences environnementales. Et c’est bien le pays le plus émetteur en gaz à effet de serre par habitant qui s’est chargé de mener à bien les négociations sur les suites du protocole de Kyoto, signé en 1997, pour déterminer la poursuite des engagements pris dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Climat (RAC). « Pour la deuxième période du Protocole, les choses ne doivent plus être faites à moitié », insiste pour sa part Célia Gautier, chargée des politiques européennes au RAC.
Se sortir les « Doha »…
Deux objectifs majeurs doivent être atteints d’ici la fin du protocole de Kyoto dont la mise en place d’une seconde période d’engagement dès maintenant et la signature d’un nouvel accord mondial équitable, ambitieux et juridiquement contraignant pour 2015.
Les acquis doivent être dépassés
« Si certains pays font preuve de bonne volonté,
Les pays en développement ont émis 40% de plus que les pays industrialisés en 2010, selon la méthode officielle de comptabilisation des émissions. « Il est hors de question d’attendre les bras croisés un accord adopté en 2015 et appliqué à partir de 2020. Nous ne voulons pas d’un « Copenhague bis ».
La sourde oreille n’est plus tolérée En attendant, il s’agit de préserver les acquis du Protocole de Kyoto issus de la première période d’engagement, de se servir de ces acquis tout en les renforçant en vue du futur accord mondial. Cela fait 20 ans que la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique
a été signée au Sommet de Rio de Janeiro. Même si certains font preuve de bonne volonté comme l’Australie qui a annoncé à quelques jours de la Conférence de Doha, sa participation à la deuxième période d’engagement sous conditions, celle-ci ne représente finalement qu’une goutte d’eau dans l’océan. De plus, l’Australie demande un objectif chiffré peu ambitieux, une durée de 8 ans, un report de l’excédent de quotas accumulés par les pays et non utilisés pendant la première période d’engagement sous le Protocole. Cette année 2012 a été rythmée par les nombreuses catastrophes climatiques, ce qui a mis en lumière la façon des pays industrialisés de contourner le problème. Les
Etats-Unis ont déboursé 1600 milliards de dollars entre 1980 et 2011 dans les dégâts occasionnés par les crises environnementales. Les pays en développement sont plus particulièrement touchés et sont donc forcés de s’engager dans la lutte contre le réchauffement climatique. Tourner autour du pot ne sert finalement à rien. Le protocole de Kyoto prend l’eau, vite, l’écologie, ce n’est pas waterproof. Même si l’emballement climatique n’épargne personne, il creusera à coup sûr le fossé entre les pays riches et les pays moins aisés menacés par la montée des eaux et la pénurie de l’or bleu qui se profilent. Axelle Bichon
Plus le temps d’attendre, la Conférence de Doha doit faire réagir les nations.
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© Axelle Bichon
beaucoup manquent à l’appel comme le Japon, la Nouvelle-Zélande et le Canada, qui s’est vite éclipsé avant de payer les nombreuses amendes l’avertissant du non respect de ses engagements écologiques », explique Célia Gautier. Même si près de 15 pays sont responsables d’environ 75 % des émissions mondiales, il n’y a pas un seul pays qui représente à lui seul plus d’un quart des émissions totales du globe. « Les efforts visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre ne peuvent qu’être mondiaux », d’après Alix Mazounie. Sans coordination internationale, certains Etats pourraient se contenter d’être des « passagers clandestins » et réduire l’impact des efforts menés par d’autres pays.
Médias
La famille TNT s’agrandit
E
n mars dernier, le Conseil supérieur de l’audiovisuel a sélectionné les petites dernières de la TNT. Les heureuses élues qui seront diffusées dès mercredi sont HD1, RMC découverte, Numéro 23, 6ter, Equipe21 et Chérie25. Ces chaînes, aux offres très éclectiques, ont été retenues selon l’intérêt des téléspectateurs, la pertinence des thématiques et la viabilité économique du projet.
Frédérique Bayre, directrice communication du CSA, se montre d’ores et déjà confiante sur les audiences futures : « les téléspectateurs seront au rendez-vous. Il y en a pour 19 chaines, il y en aura pour 25 ». Pourtant, entre l’érosion de l’audimat des « historiques » et le renouvellement des chaines de la première génération de la TNT, la concurrence sera féroce. Selon Guillaume Blandin, rédac-
Six nouvelles chaînes du réseau numérique terrestre vont faire leur apparition mercredi prochain. Sport, cinéma ou documentaire, il y en aura pour tous les goûts. teur en chef de Telecable Sat Hebdo, les dernières arrivées devront très vite s’imposer, avec des programmes de qualité. Mais elles n’ont pas toutes le même potentiel : « RMC découverte est dans la niche du documentaire, grâce à son partenariat avec National Geographic ou Discovery Channel ». Il a bon espoir également pour l’Equipe21, seule chaîne de sport entièrement gratuite. Au
contraire, le journaliste ne croit pas à Cherie25, « trop proche de TEVA, qui n’a pas trouvé son public ». Mais pour toutes, seul le verdict des audiences comptera. Effectivement, pas de future concurrence à l’horizon. Le CSA l’affirme : « il n’y aura pas de nouvelles chaînes avant longtemps ». À coup sûr, ces six arrivantes auront pour but de faire exploser la TNT. Lucie Alegre
Six chaînes décortiquées HD1, chaîne cinéma. La nouvelle venue fait la part belle au cinéma et à la fiction. A découvrir : Les noces rebelles avec Léonardo Dicaprio et Kate Winslet, ou encore PAN AM, une série avec Christina Ricci.
RMC découverte, chaîne 100 % documentaire Des envies de voyage et d’aventure ? L’évasion sera désormais possible sur la TNT avec des programmes sur les animaux, les sciences ou encore l’histoire. 6ter, chaîne familiale Mac Lesggy reprend du service sur 6Ter (prononcé « Sister ») avec son émission en prime time Xplora, qui sera associé à des programmes pour toute la famille.
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L’Aberration
Numéro 23, chaîne de la diversité L’ouverture sur le monde sera le crédo de cette mini généraliste. Elle propose des programmes basés sur les différences sexuelles, sociales ou physiques, avec entre autres les séries américaines US Shameless et Community.
Chérie 25, chaîne féminine Les hommes ont l’Equipe21. Pas de jaloux, les femmes aussi auront leur chaîne spécialisée avec des programmes comme 10 ans de moins émission quotidienne présenté par Marie Fugain ou encore une série de documentaire Ma vie de femme enceinte. Equipe 21, chaîne sport La chaîne gratuite avec des émissions et reportages à volonté, pour tous les fans de sports.