Le poids magazine sur l'obésité

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PHOTOREPORTAGE « JE NE SUIS PAS DANS LA NORME »

Le Poids www.lepoids.fr Numéro Spécial sur l’obésité - Décembre 2010

L’OBÉSITÉ SOUS TOUTES SES FORMES

Marc Roussot

Le Poids

INTERVIEW DU PROFESSEUR TOUNIAN : IDÉES REÇUES SUR L’OBÉSITÉ INFANTILE

LE CARNET TENDANCE DE SARAH DUVERGER


L’éditorial de Grégoire Arnould

Opulence, mère de tous les vices L’obésité n’est pas un terme qui porte, en soi, le germe du malheur. C’est le prisme à travers lequel on perçoit cette caractéristique physique, qui le véhicule ou non. Pour untel, ce sont des goinfres, pour d’autres, des malades qui n’y peuvent rien. À la vue d’un obèse, c’est le regard que l’on porte sur la manière de vivre qui fonde notre jugement. Entre symbole de l’opulence, de la décadence et souffrance, sujet de compassion. En fonction de ses critères de normalité, au moins physique. Le poète Théodore de Banville l’exprimait en ces mots : « c’est la maigreur des uns qui fait un ventre aux autres ». Mais l’on aurait tort de nier un phénomène, qui prend une telle ampleur.

Yves Montuelle

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Si elle n’est pas devenue un sujet de débat majeur de la société, loin s’en faut, l’obésité n’en reste pas moins, l’un des thèmes qui prévaut pour la Santé publique. D’outre-Atlantique jusque dans la plus reculée des provinces françaises, l’obésité est devenue une maladie à combattre. Pire, une épidémie à éradiquer. Car elle a un coût. Et il est colossal. Il constitue l’un des tout premiers postes budgétaires de la Sécurité sociale. Quand impératif économique il y a, c’est le vaisseau-amiral étatique qui prend la tête d’une armée providentielle. Contre les kilos. Sus à la graisse ! Pour autant, nombre d’obèses sont avant tout des victimes, et doublement. Triplement même. Imaginez-vous un profil type de l’obèse ? Pauvre, génétiquement prédestiné à l’obésité, et en proie à des risques médicaux élevés. Quel est votre salut ? Du moins ici, dans notre Occident avec ses normes actuelles, où minceur, jeunesse et réussite sont devenues les axiomes ? Votre avenir, au moins sociétal, est déjà compromis. Et puis, il y a les autres, ces drogués, qui s’alimentent à l’excès. Ceux qui vivent pour manger. Pour qui, se rassasier est une alternative à l’affectif humain. Un gâteau vaut bien un cercle d’amis ! Au vrai, chez eux, le sucre est ce que l’alcool

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est aux ivrognes. Un vice. Et l’un ne chasse pas l’autre. Ils s’additionnent. Ils sont les faibles. Ne soyons pas hypocrites. Nous avons tous eu, au moins une fois, cette réflexion lorsque l’on croise un obèse, un aliment en bouche, ou à la main. « Il n’a peut-être pas besoin de manger ceci, il est déjà assez gros comme cela ». Alors, il apparaît nécessaire, de distinguer des types d’obésité. Les malades, génétiquement, et les autres. Si l’issue est la même, l’amalgame est pernicieux. L’image de notre société s’en trouve faussée.

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Car c’est bien là le paradoxe. Prôner la maigreur dans un Occident où la nourriture semble provenir du tonneau des Danaïdes, est une véritable tartuferie. Et ces hérauts sont à combattre. Voyez ce qu’ils provoquent. Un eugénisme. Voyez les podiums de mannequins où des squelettes, enrobés d’une mince couche de peau, défilent. Hommes ou femmes aux visages cadavériques. Est-cela la beauté ? Celle vers laquelle l’on nous incite à tendre ? Et pour la famille ? Les voyez-vous porter un enfant ? Où le met-on ? Il n’y a pas la place ! Ce sera la fin d’une race ! Empruntons, alors, aux Arméniens cette fulgurance : « Avant que le gros ne soit devenu maigre, le maigre sera mort ». En revanche, tout ne doit pas être pris à rebours. Ce sont les vices qui sont à combattre, ces addictions, d’une société individualiste, matérialiste, de la démesure, en un mot, de l’opulence. Leur mère à tous. Ce n’est pas l’obésité acquise qui est un fléau actuel, comme l’ont été « l’alcool chez les Européens ou l’opium chez les Chinois » pour reprendre Céline. Il s’agit bien de l’abandon de l’animus sane in corpore sano. D’une dépendance engendrée par de nombreux facteurs que sont la solitude, l’impératif de consommation, ou encore la promotion de l’hédonisme. Il faut pour en venir à bout, se référer à nos préjugés fondateurs, et pouvoir se dégager des humeurs du temps et des effets de mode. Du simple bon sens. Est-ce une avancée humaine que les obèses soient devenus les pauvres, et les maigres les riches ? Cela prouve, ici en Occident, que tous sont nourris

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2 ÉDITO 3 SOMMAIRE 4 Témoignage : « J’ai pris un nouveau départ » 5 L’obésité en définitions

SANTÉ

6 Le poids de l’obésité 7 Ces petites pilules qui vous veulent du bien 8 Mieux manger pour lutter contre l’obésité 9 Adapter sa sexualité 10 La chirurgie de l’espoir 11 Patrick Tounian : « On est prédisposé à être obèse ou on ne l’est pas »

12 Obésité : l’histoire d’une discrimination

SOCIÉTÉ

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26 Prévention de l’obésité : « Tout reste à faire »

Pr Tounian : « On est prédisposé à être obèse »

12 Obésité : l’histoire d’une discrimination 16 Association : l’arme anti-kilos 17 Grignotage incontrôlé 18-19 Le Poids du mois 20 Â chaque culture son obésité 21 Mère et fille face à l’obésité 22-23 Photoreportage : «Je suis hors-norme»

ÉCONOMIE

17 Ces écrans qui nous font grignoter

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En route pour Miss Ronde 2010

Manger équilibré : accessible à tous

Directrice de la publication : Isabelle Dumas Directeur de la rédaction : Christian Redon Rédacteur en Chef : Grégoire Arnould Rédacteur en chef adjoint : Marc Roussot Secrétaire de Rédaction : Jean Barrière Maquette inspirée de l’hebdomadaire Le Point

Rédaction web - Keskiscpass : Laurie Madile, Sarah Duverger Rédacteurs : Sarah Duverger, Laurie Madile, Lucas Demangeat, Héloïse Basson, Annick Berger, Yves Montuelle, Anthony Perrel, Marc Roussot, Khalid Al Jumaily, Brice Nativel Magazine réalisé en décembre 2010 par un groupe d’étudiants de : ISCPA - Institut des médias Université professionnel René Cassin 47, rue Sergent Berthet 69009 LYON

24 Manger équilibré : accessible à tous 25 Quand la malbouffe se met à la diète 26 Laurence Boyer : « Tout reste à faire » 27 La prévention de l’obésité en difficulté

CULTURE

28 Les rondeurs dans l’art 29 La corpulence dans le téléviseur

TENDANCES

30 « Sur scène, je me sens comme tout le monde » 31 XXL mais pas sac poubelle

ATTESTATION DE NON PLAGIAT

La rédaction du Poids atteste sur l’honneur que le présent supplément a été écrit de la main des rédacteurs, que ce travail est personnel et que toutes les sources d’informations externes et les citations d’auteurs on été mentionnés conformément aux usages en vigueur. Nous certifions par ailleurs que nos n’avons ni contrefait ni falsifié, ni copié l’oeuvre d’autrui afin de la faire passer pour notre. Nous avons été informé des sanctions prévues au Règlement pédagogique de l’ISCPA en cas de plagiat. Fait à Lyon, le 02/12/2010.

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« J’ai pris un nouveau départ » par Héloïse Basson Zora Charaoui, 43 ans, connaît des problèmes de poids depuis presque quatre ans. Pour combattre cette obésité récente qu’elle ne supporte plus, elle s’est fait enlever les trois quarts de l’estomac. Elle retrace pour nos lecteurs cette période douloureuse de sa vie.

«J

Héloïse Basson

e n’ai pas toujours été obèse. Il y encore six ans, je pesais 60 kg pour 1 m 67, et l’an dernier, j’ai atteint les 109 kg C’est à ce moment que j’ai compris que ce n’était plus possible ; je ne pouvais pas rester comme cela, je devais faire quelque chose. » Zora n’a pas vraiment su comment elle en était arrivée là. Mais depuis cette prise de poids soudaine, sa vie a basculé. Le regard des autres a changé. Elle s’est sentie différente, ne trouvant plus sa place au sein de la société. Hors de question par exemple d’aller à la piscine, ou encore de se faire photographier. Zora ne supportait pas de se voir ainsi. Elle évitait de plus en plus de sortir de chez elle, pour aller en ville, ou voir des amis, et n’avait même plus envie de s’habiller. Au quotidien, des problèmes se faisaient sentir : « J’ai eu de plus en plus de mal à me baisser, ou à monter les escaliers. J’étais très vite essoufflée », confie-telle. « J’évitais le moindre effort, je prenais ma voiture même pour des trajets courts. » Petit à petit, c’est son rythme de vie qu’elle a adapté à ses rondeurs, vivant pratiquement en fonction des autres. S’effaçant de plus en plus. Si ses proches percevaient son mal-être, le sujet n’était pas abordé. C’est donc seule, que Zora a entamé les démarches pour une perte de poids radicale.

« Je ne supporte plus le regard des gens sur moi » La jeune femme était prête à tout pour maigrir. Notamment à subir une intervention chirurgicale : « j’ai d’abord pensé à la pose d’un anneau gastrique. J’ai lu un article sur une association d’aide aux obèses, et j’ai contacté la présidente. Elle m’a pris sous son aile et m’a fait rencontrer chirurgiens, nutritionnistes, infirmières et psychanalystes. » Finalement, au lieu d’un anneau gastrique comme elle l’aurait souhaité, son chirurgien a opté pour une « sleeve »*, qui consistait à lui retirer une partie de l’estomac, de manière irrémédiable. Malgré l’ampleur de l’intervention, Zora est restée déterminée : « cela ne m’effrayait pas. J’avais trop besoin de maigrir

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pour me poser des questions. J’aurai tout accepté, tellement j’étais mal dans ma peau. » Après sept mois de préparation médicale et psychologique, la patiente était prête. La semaine précédant l’intervention, elle a d’abord commencé un régime, afin d’habituer son estomac à se réduire, et a perdu 4 kg. « Je pesais 105 kg lorsque l’on m’a opéré. Les premiers jours suivant la gastrectomie, je n’ai pu manger que du liquide. Je n’avais même pas droit à une soupe ; seulement à son bouillon ou de la compote. Trois mois après, j’avais perdu 16 kg. » Aujourd’hui, Zora pèse 89 kg. Elle a l’estomac d’un enfant de quatre ans. Elle doit donc adapter son alimentation. Le matin, elle se contente désormais d’un café, et prend un repas complet le midi, surtout de la salade et des légumes. Elle a perdu ses mauvaises habitudes alimentaires « avant je ne déjeunais pratiquement pas le midi, et je grignotais pendant tout l’après-midi jusqu’au soir. Maintenant, j’essaie surtout de manger à heures fixes. » Petit à petit, la jeune femme va devoir faire du sport, pour éviter que ses chairs ne s’affaissent. C’est une première pour elle qui n’a jamais été très sportive. Et pour cause, Zora a toujours sciemment évité les salles de gym, abhorrant les jeunes filles minces en tenues moulantes. À présent, elle arrive un peu plus à s’accepter telle qu’elle est. « Je me sens en forme, j’ai perdu plusieurs tailles de vêtements. Je me remets à faire des choses normales : je sors en ville avec mes amies, je vais chez le coiffeur, je fais les magasins. Mes enfants me disent que mon visage a changé, qu’il est plus fin. Maintenant avec mes proches, on en parle. C’est un véritable changement. J’ai pris un nouveau départ, je revis ». Bientôt, ses rondeurs et le calvaire enduré ne seront plus qu’un mauvais souvenir •Pour les patients obèses qui correspondent aux critères définis par le médecin, la sleeve est complètement prise en charge et remboursée par la Sécurité sociale.

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L’obésité en définitions

SANTÉ

Obésité

Excès d’embonpoint, accumulation de graisses dans l’organisme. L’obésité est calculée le plus souvent grâce à l’IMC (indice de masse corporelle), créé par Lambert Adolphe Jacques Quételet, un scientifique belge. Il correspond au rapport du poids d’une personne sur sa taille au carré. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a défini cet Indice de Masse Corporelle comme le standard pour évaluer les risques liés au surpoids. En 2009, d’après une étude Obépi menée par le laboratoire Roche, 31,9 % des français seraient en surpoids et 14,5 % en situation d’obésité. Autrement dit, plus d’une personne sur 10 serait obèse d’après cette enquête faite auprès de 25 286 individus représentatifs de la population française. > si vous souhaitez calculer votre IMC : www.imc.fr

Obésité Modérée

Obésité Sévère

Obésité Morbide

Femme : Taille moyenne 163 cm De 49 à 66 kg Poids normal De 67 à 80 kg Surpoids 80 kg et plus Obésité

Homme : Taille moyenne 175 cm De 57 à 77 kg Poids normal De 78 à 92 kg Surpoids 92 kg et plus Obésité

IMC de 30 à 34,9 (poids > 92 kg pour les hommes et > 80 kg pour les femmes) Le surpoids commence à devenir une menace pour la santé. La personne en situation d’obésité modérée est très sujette à des maladies graves (hypertension, diabète, cancer). Toutefois, le poids n’est pas suffisant pour un recours à la chirurgie de l’obésité.

IMC de 35 à 39,9 ( > 107 kg pour les hommes et > 93 kg pour les femmes) C’est à partir d’une obésité sévère que la chirurgie (voir article page 10) peut être préconisée (gastroplastie, bypass ou sleeve gastrectomie). Il est impératif de perdre plusieurs kilogrammes rapidement. Le risque de contracter certaines maladies est accru.

IMC supérieur à 40 (> 123 kg pour les hommes et > 106 kg pour les femmes) Ce troisième type d’obésité est le plus dangereux. Il nécessite impérativement l’intervention chirurgicale. Le sujet est en danger de mort, et à la merci de nombreuses maladies (respiratoires, cardiovasculaires…). Ce cas inquiète en France puisque son nombre a doublé en 5 ans. Il représente 0,6 % de la population. Causes et répartition

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Obésités gynoïde et androïde :

Les spécialistes distinguent deux formes d’obésité en fonction de la répartition de la masse graisseuse dans le corps. L’obésité androïde est la plus dangereuse pour la santé. La masse de gras se situe dans le haut du corps. L’obèse est alors plus soumis à des maladies de type cardiovasculaire, de diabète et d’hypertension. Certains spécialistes de la santé préfèrent la mesure du tour de taille à l’IMC comme révélateur de l’obésité. L’obésité gynoïde est appropriée lorsque le gras se trouve dans le bas du corps. Chez les femmes c’est ce que l’on appelle couramment la « culotte de cheval ». Cette forme d’obésité a moins de conséquences néfastes sur la santé.

Deux causes majeures à l’obésité :

L’obésité héréditaire est la première forme. Elle est assez facile à déceler car l’enfant est prédestiné à sa naissance. La pathologie est inscrite dans son patrimoine génétique. Elle a un caractère familial et se reconnaît dès les premiers mois. Le deuxième type d’obésité est consécutif au changement de la société et de notre façon de vivre. Le comportement alimentaire en est la grande cause : petit-déjeuner absent ou bâclé, grignotage devant la télévision entre les repas, heure du déjeuner et du dîner décalée. Le terme de malbouffe est de plus en plus employé dans nos sociétés. Dans l’enfance, les consoles de jeux remplacent peu à peu la pratique sportive. informations recueillies par Anthony Perrel Le Poids | Décembre 2010 | 5


SANTÉ

Psychologie : le poids de l’obésité Prédisposition génétique, ou accumulation des kilogrammes, l’obésité est un état difficile à vivre au quotidien. PAR LAURIE MADILE

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l n’y a pas de médecin sérieux aujourd’hui qui puisse dire que l’obésité ne relève que de la génétique ». C’est en tout cas le parti pris de Gérard Apfeldorfer, psychiatre et co-fondateur du Groupe de Réflexion sur l’Obésité et le Surpoids (Gros), et de son équipe. Pour comprendre l’obésité, il faut avant toute chose, ne pas négliger les facteurs environnementaux. Entendons par là les habitudes alimentaires, et le rapport que nous pouvons entretenir avec la nourriture. Car bien souvent, 6 | Décembre 2010 | Le Poids

manger s’avère être une armure, un refuge, face à certaines émotions telles que la déception, la tristesse, ou l’anxiété. Pourquoi nos émotions nous font-elles grossir ? Ainsi, l’acte de manger revient à étouffer ses émotions. « Avaler » se substitue à « manger », et donc par conséquent à adopter une alimentation saine et digérer en petite quantité. Se nourrir devient un acte compulsif, et non réfléchi. Les émotions nous entraînent bien souvent à consommer des aliments sucrés, ou plus gras que d’autres. Faut-il le considérer comme une injustice, mais ce sont les personnes prédisposées à l’obésité, qui prendront alors des kilogrammes. Si destructeurs. Mais pourquoi ces pulsions alimentaires nous conduisent-elles vers la consommation d’aliments sucrés ? Avant tout parce qu’ils procurent un plaisir immédiat. Le sucre, entre autre, s’assimile rapidement dans le sang. Mais cercle vicieux, ils augmentent l’appétit.

Une campagne de publicité, réalisé par Brandon Knowlden / Struck Creative, pour promouvoir les opérations chirurgicales liées à l’obésite. En légende, sur les photos : « Mais cela ne doit pas se terminer comme cela. Renseignez-vous sur la chirurgie de l’obésité ».

Pour aller plus loin :

Groupe de Réflexion sur l’Obésité et le Surpoids (Gros) www.gros.org « Traiter l’obésité et le surpoids », Gérard Apfeldorfer, JeanPhilippe Zermati, Bernard Waysfeld, Odile Jacob, 2010 Site des thérapies cognitives et comportementales www.aftcc.org

Le poids du regard « Aujourd’hui il existe une stigmatisation de l’obésité considérable. On a une discrimination des obèses dans le monde du travail, dans la vie sentimentale et relationnelle. ». Pour Gérard Apfeldorfer, spécialiste des troubles du comportement alimentaire, le discours ambiant autour des personnes obèses est l’une des raisons pour lesquelles celles-ci ne peuvent s’en sortir. Dans la rues et autres lieux publics, les personnes de forte corpulence sont souvent examinées sous toutes leurs coutures. Les petites phrases naïves des enfants sont assassines. Et plus encore, ce qui fait le plus mal, ce sont les doigts accusateurs pointés vers eux et qui veulent dire « si vous êtes gros, c’est avant tout de votre faute ». Paradoxalement, le discours autour d’un comportement alimentaire sain et diététique entraîne les obèses sur le chemin de la pulsion alimentaire. Le docteur Apfeldorfer nous confie qu’« un régime entraîne une perte de poids, mais plus on essaye de contrôler son comportement, et plus on est amené par la suite à grossir ». Dès lors comment parvenir à s’en sortir ? « J’ai bientôt 30 ans, je suis obèse, et je veux faire des efforts pour changer ce corps dans lequel je ne me suis jamais sentie bien, je dois me faire aider... ». Sur les forums de discussion où se rejoignent chaque jour des personnes souffrant de surpoids, les messages comme celui de Titchat186 sont nombreux. En effet, pour comprendre et soigner son obésité – quand celle-ci n’est pas liée à des facteurs biologiques – le suivi psychologique est important, souvent plus qu’un accompagnement diététique. Car la honte est sans doute l’un des sentiments les plus destructeurs de la personnalité. Si certaines personnes s’en sortent seules, le suivi psychologique est fortement préconisé. Peut-être à juste titre, pour enfin, s’accepter tel que l’on est

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Bradon Knowlden / Struck Creative

Crédits

Le sucre contient de la sérotonine, une molécule connue pour son effet apaisant. Le moelleux par exemple procure une sensation qui comble un besoin d’affection.


SANTÉ

Ces petites pilules qui vous veulent du bien Quelle qu’en soit la méthode, l’issue doit être la même : perdre du poids. Maigrir d’accord, mais à quel prix ?

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Libre de Droits

e bon sens veut qu’un régime soit prescrit par un médecin, ou par un professionnel de la santé. Pour Jean-Michel Cohen, nutritionniste et auteur de l’ouvrage « Savoir manger », « maigrir c’est comme un marathon, il faut s’entraîner, et les résultats se feront sentir ». Cela passe par une rééducation alimentaire, suivie par un psychologue. Il s’agit avant tout de « protéger sa santé par l’alimentation ». Outre cette reconnexion avec le plaisir de manger, la perte de poids chez les personnes obèses, peut aussi passer par la prise de médicaments. En matière de gélules, la liste est longue. La dernière à s’être introduite sur le marché, n’est autre que la douce Alli. En mai 2009, elle devient le premier médicament amaigrissant autorisé en Europe, disponible en vente libre. C’est sur ce terrain-là, que les controverses ont lieu depuis un peu plus d’un an. Le rôle de gardefou revient aux pharmaciens, qui doivent s’assurer que le patient a un IMC supérieur ou égal à 28. Mais ces pilules sont loin d’être sans conséquences. Ces pilules qui font maigrir Si l’efficacité d’Alli n’est pas encore démontrée, de lourds effets secondaires sont pourtant existants. Une absorption des graisses au niveau intestinal entraîne une élimination de celles-ci par les voies naturelles, avec douleurs abdomi-

Le Sibutral mis hors d’état de nuire

Le 20 janvier 2010, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a retiré des marchés français le Sibutral. Elle dénonce les risques de complications cardio-vasculaires engendrés par cette pilule. En vente depuis 2001, elle était prescrite comme traitement contre l’obésité.

nales. Il faut avoir envie de maigrir. Qu’il s’agisse de l’un ou l’autre de ces traitements, les personnes obèses sont soumises à une prise en charge globale. Elles doivent par conséquent s’astreindre à un régime alimentaire. Mais entre le diktat de la minceur qui s’impose dans les magazines et donc dans nos assiettes, les personnes en surcharge pondérale usent à n’en plus finir les solutions miracles pour perdre du poids, en oubliant que leur santé est en jeu. Attention danger Méthodes Dukan, Montignac, ou Weight Watchers, on ne compte plus les régimes qui promettent une perte de poids importante, en un temps record. Mais comment choisir le bon ? Si l’un n’apporte pas satisfaction, pourquoi ne pas tenter l’autre ? L’avis du nutritionniste Jean-Michel Cohen, est clair là-dessus, « les régimes dissociés, ou protéinés, c’est le même principe. Ce qui change, c’est l’emballage marketing ». Après plusieurs semaines de repas aux recettes alléchantes à base de poisson vapeur, brocolis, et yaourt maigre – cela va de soi – la balance affiche, ô miracle, des kilos en moins. Mais en retirant certains aliments, pourtant essentiels, la perte de poids s’effectue d’abord au niveau de la masse musculaire et non au niveau de la masse graisseuse. Jean-Michel Cohen nous rappelle que « rien n’est innocent

Clap de fin pour Mediator Ce médicament coupe-faim au nom de robot de science fiction, a envahi le marché des remèdes amaigrissants dès la fin des années 70. Produit par les laboratoires Servier, il est prescrit dans un premier temps pour les diabétiques, et se destine progressivement aux personnes souffrant de surcharge pondérale. Mais voilà qu’après 30 années d’utilisation par des millions de patients, à la fin de l’année 2009, l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (Afssaps) signe l’arrêt de mort du médicament. La pilule serait l’un des facteurs de décès pour 500 patients due à une valvuopathie (problème de valves cardiaques), et d’hospitalisation chez près de 3 500 patients. Peut-on imaginer de tels résultats avec la pilule Alli ? De l’avis du docteur Cohen, il y a peu de risques, car Alli agit « par mécanisme d’absorption, et non pas par action centrale. En revanche, elle peut créer des carences importantes en vitamines lyposolubles ». Autrement dit, si rien est encore aujourd’hui prouvé, la prise de tels médicaments peut favoriser l’ostéoporose, elle-même responsable de fractures.

en terme d’alimentation. Il y a toujours des effets négatifs sur le corps, mais qui se révèlent à moyen ou long terme. » Le 25 novembre 2010, l’Agence de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) met sur le banc des accusés une quinzaine de régimes dont les méthodes Dukan, Atkins, Cohen...(ndlr : interviewé une semaine auparavant). Le professeur Jean-Michel Lecerf, un des experts du rapport, nous confie que « tous les régimes aboutissent aux mêmes conséquences. Perdre du poids n’a aucun intérêt en soi. Ce qu’il faut, c’est faire attention à son alimentation, sans passer par des régimes stricts, qui engendrent d’une façon ou d’une autre des troubles du comportement alimentaire ». Dans les années 1970, les chercheurs, Peter C. Herman et Janet Polivy, se sont penchés sur l’obsession qui conduit les personnes en surcharge pondérale, à maigrir par n’importe quel moyen. Cet hypercontrôle alimentaire, appelé aussi « restriction cognitive », qu’impose ces régimes, s’avère dangereux dès lors que l’on réintroduit dans son alimentation, un produit jusqu’alors interdit. Autre danger de ces régimes trop sévères, et non des moindres : la mort subite pour les personnes à risques cardiaques, en cas de « déficit de potassium, qui conduit à une inflammation du pérycarde. » Le professeur Lecerf souligne que « l’obésité est une maladie que l’on ne sait pas encore soigner. Le moins que l’on puisse faire, c’est de ne pas l’aggraver ». Irritabilité, carences, pertes de cheveux, ou pire, faut-il vraiment en arriver là, pour avoir l’illusion d’atteindre un poids normal ? Car les restrictions alimentaires engendrent également de la frustration, qui, à trop forte dose, peuvent provoquer d’importants troubles du comportement alimentaire. Une relation à l’alimentation trop stricte, restrictive, ou excessive, sera ainsi le résultat d’un retour au poids de départ

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LAURIE MADILE Le Poids | Décembre 2010 | 7


SANTÉ

Le déséquilibre alimentaire peut provoquer l’obésité chez les enfants selon de nombreux spécialistes.

Depuis 2004, le programme Ensemble Prévenons l’Obésité des Enfants (Epode) met à contribution les acteurs de la vie sociale pour lutter contre l’obésité infantile.

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pprivoiser Billy le Brocoli ». Ces mots pourraient ressembler à ceux d’une comptine pour enfants. Que nenni ! Il s’agit d’un subterfuge, beaucoup plus ludique, pour faire découvrir aux enfants de l’école de Meyzieu (Rhône) le goût des légumes, et d’une alimentation saine et équilibrée. La ville fait partie des 9 communes pilotes, qui ont intégré en 2004 le programme Epode. En poste depuis 1999, Stéphanie Bazin, la diététicienne qui s’occupe des petits Majolans, redouble d’efforts pour prendre en charge les enfants dès leur plus jeune âge. Et c’est dans le milieu scolaire, au moment du déjeuner 8 | Décembre 2010 | Le Poids

à la cantine, que tout commence. « Nous avons décidé avec les enfants d’établir un contrat : goûter à tout ! » Les enfants se prennent au jeu du goût et des couleurs, et « apprennent à aimer des aliments qu’ils n’ont pas forcément l’habitude de manger ». Des animateurs périscolaires sont mobilisés lors du déjeuner, pour en faire « un moment festif. Les enfants peuvent s’assoir avec leurs copains, ils ont un rôle à jouer. Ils sont responsables du pain, de l’eau... ». Les enfants se réapproprient l’heure du repas. L’école élémentaire de Meyzieu a d’ailleurs décidé d’impliquer de plus en plus les élèves dans le choix de l’alimentation. D’ici quelques mois, ils devront composer eux-mêmes, leur menu pour la semaine. Un moyen de voir si les règles de base ont été assimilées. Du côté des familles, Stéphanie Bazin explique que l’expérience a suscité de prime abord, bon nombre de réticences. « Ce que les parents ne comprenaient pas c’est pourquoi il fallait peser et mesurer leurs enfants. Les mesures obtenues et que l’on reporte sur les courbes de croissance sont justes indicatives pour nous, et restent anonymes. » Ainsi, si un IMC démontre un surpoids avéré

Pour approfondir : Epode www.epode.org Ecole de Meyzieu www.mairie-meyzieu.fr

Continuer la prévention Aujourd’hui 226 villes ont rejoint le projet. Si chaque année, elles sont un peu plus nombreuses, ce chiffre reste assez peu significatif. À l’origine gratuit pour les villes pilotes, intégrer le programme Epode a désormais un coût conséquent dû, notamment, à l’embauche de diététiciens. Les animateurs périscolaires doivent en plus bénéficier d’une formation supplémentaire, des dépenses que toutes les municipalités ne sont pas prêtes à supporter. Les pouvoirs publics ont eux aussi décidé de s’investir en matière de prévention. Mais attention. Agir ne signifie pas mettre l’enfant au régime. Loin de là, comme le souligne Florence Arnold Richez dans son ouvrage « Enfants en surpoids ». D’une part cela perturberait sa croissance et d’autre part, il s’agit davantage de l’éduquer à une alimentation saine, tout en lui faisant découvrir le plaisir de manger. Du côté des métiers de la santé, l’assurance maladie et les représentants des médecins généralistes ont décidé de mettre en place des dépistages le plus tôt possible chez les jeunes enfants. Certaines actions, plus spécifiques, seront orientées vers les familles défavorisées. Comme par exemple rendre les fruits et les légumes plus accessibles, pour que tout le monde puisse en consommer. Autant d’actions qui visent à améliorer le bien-être des enfants, et éviter, qu’ils ne subissent, adulte, les conséquences physiologiques et psychologiques d’une mauvaise alimentation

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LAURIE MADILE

Libre de Droits

Mieux manger pour lutter contre l’obésité infantile

chez l’enfant, le médecin scolaire entre en contact avec la famille afin de définir, si celle-ci le souhaite, un suivi régulier de l’enfant. Ce dernier sera accompagné, chaque mois, par un diététicien(ne). Depuis le lancement du programme Epode il y a cinq ans, si la baisse de l’obésité chez les jeunes enfants n’est pas probante, on se félicite d’un véritable changement dans les comportements alimentaires. Mais Stéphanie Bazin, indique que « cinq ans est un temps trop court pour se rendre compte, il faut une bonne dizaine d’années pour arriver à établir de vraies conclusions ».


SANTÉ

« On est prédisposé à être obèse ou on ne l’est pas » Et si l’obésité n’était que génétique ? Si finalement pizzas, plats préparés, et sodas n’altéraient en rien le poids des enfants ? Dans son ouvrage « L’Alimentation de vos enfants. Enquête sur le marketing et les idées reçues », Patrick Tounian, pédiatre et nutritionniste à l’hôpital Armand-Trousseau à Paris, livre une vision polémique autour de l’obésité infantile.

Éditions Denoël

Le Poids : Comment se définit l'obésité chez l'enfant ? Patrick Tounian : Il faut se référer aux courbes de poids qu’il y a dans les carnets de santé. Celles-ci varient avec l’âge et le sexe. Chez l’enfant, et dans le suivi de l’IMC on a une croissance normale de 0 à 1 an, cette courbe de corpulence diminue ensuite de 1 an à 6 ans pour redescendre puis remonter. Chez l’enfant obèse, on observe un rebond précoce vers l’âge de 3 ans. Mais l’obésité c’est aussi une question de représentation. Je reçois certains enfants qui se trouvent obèses, alors qu’ils n’ont que 500 g de trop. Et d'autres qui sont obèses, mais qui se trouvent « normaux ». En revanche, ces courbes n’ont pas un intérêt médical majeur. Au-delà de 25, ou 30, les risques de mortalité étaient plus importants, on a donc définit des normes. Vous citez de nombreuses marques, n'avez – vous pas l'impression de faire la part belle aux industries agro-alimentaires ? À longueur de pages, je critique les groupes industriels. Quand on critique certaines attitudes, au travers des portraits, on se moque, mais on défend quand il le faut. L’objectif de ce livre n’est ni de défendre, ni d’agresser l’in-

dustrie agro-alimentaire. Je veux rétablir une vérité scientifique. C’est mon métier. Les produits industriels que l’on donne aux enfants par exemple sont absolument inutiles. Et ils sont plus chers. Inversement, lorsque les parents n'aiment pas faire à manger, ou n’ont pas le temps de passer derrière les fourneaux, ils peuvent choisir ces produits pour leurs enfants. Le message qu’on veut leur faire passer, c’est qu’ils n’empoisonnent pas leurs enfants en choisissant ce type de produits. Vous dites vouloir déculpabiliser les parents qui achètent des produits dits gras, sucrés... mais vous dites aussi que cuisiner soi-même revient parfois plus cher, et qu'il y a tout autant de matières grasses. Ce sont les parents derrière les fourneaux qui vont culpabiliser désormais ? Non. On insiste bien sur le fait que ça n’a strictement aucune importance. Que ce soit un peu trop de sel dans le plat tout prêt, ou dans celui fait maison peu importe. Quand il n’est pas gros, ça ne sert rien de réfléchir à la quantité de sel, ou de beurre. Arrêtons de psychoter : si on a mis trop de beurre, de sel, ça n’est pas grave !

Manger n'importe comment apporte forcément un excès d'apports en calories, et un déficit nutritionnel qui entraîne une prise de poids... Les enfants jamais ! En particulier les garçons, car les filles sont en restriction dès le plus jeune âge. Les garçons en général sont toujours à leur poids maximal, alors que les filles sont environ toujours 3 kg en dessous, donc très rapidement elles reprennent. Les enfants ne prendront pas de poids, c’est une certitude ils savent s’autoréguler, chez les jeunes adultes, c’est plus aléatoire. De moins en moins de repas sont pris en famille, est-ce un tort qui favorise le grignotage, et donc d'une certaine manière le surpoids, et l'obésité ? L’alimentation aujourd'hui, est de plus en plus déstructurée, c’est vrai. Il y a moins de repas pris à table, mais ça ne favorise en rien l’obésité, qui est une maladie préexistante. On est prédisposé à être obèse ou on ne l’est pas. L’aliment n’est qu’un moyen pour grossir, il n’en est pas la cause. C'est l’abondance. On met des

limites, mais elles sont arbitraires. Un enfant peut manger du Nutella matin, midi et soir à volonté, s’il n’est pas prédisposé à être obèse, il ne grossira pas. Si ça ne se joue pas dans l'alimentation, que préconisez-vous alors pour mieux prévenir l'obésité ? Pour 80 % des enfants, vous êtes tranquilles. Rien ne sert de prévenir une maladie qui n’existe pas. Quant aux 20 % qui restent, il faut les repérer, essayer de restreindre leurs apports énergétiques. Quand on est enfant, ce qu’il faut c’est être cadré. Laissez-les manger ce qu’ils veulent, mais pas uniquement ce qu’ils veulent. Si l’enfant a des problèmes de poids alors c’est différent, il ne peut pas tout manger. Le problème avec la nutrition actuelle c’est qu’elle est collective. On considère que tout le monde mange de la même façon. Or c’est un problème purement individuel. Certaines personnes pourront manger 500 g de beurre sans que ça ne leur fasse rien. Mais rien ne sert de mettre des interdits. Tout se mange. Il n’y a pas de poison, le poison est interdit par la loi L.M

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Le professeur Patrick Tounian, pédiatre et nutritionniste

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SANTÉ

La chirurgie de l’espoir De nombreuses méthodes chirurgicales sont destinées aux obèses. Des opérations non-bénignes, avant une tout aussi redoutable : l’acceptation de son nouveau corps. PAR ANTHONY PERREL

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Différentes méthodes Malgré son efficacité reconnue, la gastroplastie perd du terrain dans l’Hexagone. Alors que le nombre d’obèses augmente, la pose d’anneau gastrique, elle, stagne autour de 10 000 par an pour 22 000 opérations de chirurgie bariatrique (ndlr : consiste à restreindre l’absorption des aliments). « Un recul progressif au profit de mé10 | Décembre 2010 | Le Poids

thodes nouvelles qui ont la préférence de certains chirurgiens » soutient le Dr Dargent. La sleeve gastrectomie fait partie de ces nouvelles méthodes qui gagnent en notoriété. Elle fait sa première apparition, en France, en 2001. L’opération consiste en une ablation verticale des deux tiers de l’estomac, de façon à former un tube continu entre l’œsophage et l’intestin grêle. En conséquence, les aliments sont évacués beaucoup plus rapidement. De plus, cette ablation d’une grande partie de l’estomac permet l’élimination d’une quantité importante de cellules gastriques qui sécrètent une hormone stimulant l’appétit. Le patient ressent alors moins la sensation de faim. Enfin, le « bypass » est la troisième méthode de chirurgie de l’obésité. L’opération consiste à réduire le volume de l’estomac et à modifier la circulation alimentaire. Les éléments ingurgités évitent l’estomac ainsi que la partie supérieure du tube digestif et arrivent directement dans la partie moyenne de l’intestin grêle. Cette intervention devient, progressivement, la référence de la chirurgie de l’obésité. Elle est plus technique, avec des résultats spectaculaires à la clef (perte jusqu’à 80 % de son poids en un an). « Auparavant utilisé en priorité pour les patients atteints d’obésité morbide, le bypass ne leur est plus réservé aujourd’hui. ». « Actuellement aucune des trois méthodes de chirurgie de l’obésité

Ci-dessus, le résultat d’une opération, avant (photo de gauche), et après (photo de droite).

La région lyonnaise est

pionnière en terme de chirurgie de l’obésité en France. La clinique Lyon-Nord de Rillieuxla-Pape a été le théâtre de la première pose d’un anneau modulable en France en 1995.

n’est prédominante. Peut être même qu’elles seront amenées à disparaître un jour au profit de méthodes moins agressives » estime le Dr Dargent. « Redonner une vie sociale au patient » Après une opération, le corps des patients est méconnaissable : la peau, dépourvue de graisse, est distendue. Certains patients font alors appel à des chirurgiens plasticiens-esthéticiens-réparateurs (ndlr : PER) comme Baptiste Pinatel qui exerce cette spécialité à l’hôpital Saint Joseph Saint Luc de Lyon. Il intervient après la pose d’un anneau ou d’une sleeve. « Nous sommes là pour traiter les excès de peaux et de gras qui proviennent de la gastroplastie ou d’une autre méthode. (cf l’image d’illustration). » Les chirurgiens « PER » s’occupent alors de couper la peau, de remonter les seins d’une femme par exemple. « Nous faisons les cicatrices aux niveaux de la culotte et de la poitrine de façon à pouvoir les masquer avec les sous-vêtements». Cette redéfinition de la silhouette permet au patient de pouvoir s’habiller et de mieux s’accepter dans ce nouveau corps. « Nous essayons de les aider à se réintégrer dans la société » résume Baptiste Pinatel. Si la chirurgie de l’obésité permet de délester les patients de dizaines de kilogrammes, ce n’est là qu’un pas sur la voie de la guérison. Accepter son corps est bien le véritable défi

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Libre de Droits

près qu’ils aient essayé toutes sortes de régimes amaigrissants, sans succès, la chirurgie de l’obésité est souvent salvatrice pour les patients en surcharge pondérale. Plusieurs méthodes existent avec chacune des caractéristiques différentes. Aujourd’hui, la gastroplastie est l’intervention la plus courante et la plus ancienne. Elle consiste à mettre un anneau en silicone modulable autour de la partie supérieure de l’estomac. L’organe est alors divisé en deux, à la manière d’un sablier, ce qui atténue la sensation de faim. Pour Jerôme Dargent, chirurgien spécialiste de l’obésité à la clinique Lyon Nord de Rillieux-la-Pape et auteur d’une étude « l’anneau gastrique a t’il un futur ? », « cette méthode reste le meilleur compromis bénéfice/risque en matière de chirurgie de l’obésité. Il est très rare que se produise une hémorragie après la pose d’un anneau. Pour la sleeve gastrectomie ou le bypass, ce risque est multiplié par 10. En revanche, sur le long terme, les dangers sont supérieurs pour l’anneau car il arrive que le patient ne supporte pas la prothèse et qu’il doive revenir à plusieurs reprises après l’opération ».


SANTÉ

« Adapter sa sexualité à son corps » Si pour une personne, sans problème de poids, faire l’amour est un acte anodin, pour un obèse, avoir des relations sexuelles est un défi.

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Libre de Droits - SXC

uand un jeune homme obèse essuie des réflexions tout au long de sa jeunesse, il est normal qu’il n’ait pas confiance pour séduire une fille. Et lorsqu’il entamera une relation, il trouvera sa compagne si belle qu’il n’arrivera pas à avoir d’érection. Il aura la trouille ! » explique Cécile Planche, psychologue sexologue lyonnaise. Les femmes plus touchées Les personnes obèses connaissent en effet plus de dysfonctionnements sexuels que les personnes dites « normales ». Des problèmes d’érection, de congruence (ndlr : impossibilité physique d’avoir un rapport sexuel), qui entraînent des blocages psychologiques ou physiques. Pour les femmes, l’obésité induit d’autres types de difficultés dont elles souffrent beaucoup plus que les hommes. « La gente féminine est en général plus soucieuse de son apparence. Du fait de leur obésité, ces problèmes d’image y sont démultipliés. Si elles ne sont pas satisfaites de leur corps, si elles ont des complexes, elles avanceront cette raison pour refouler leurs désirs et se priver du plaisir qu’elles s’interdisent ». Et ces problèmes psychologiques empiètent aussi sur le quotidien. Elles n’osent pas se rendre chez le médecin généraliste ou le gynécologue. Une réticence à l’idée de se mettre nue devant un inconnu qui examine un corps qu’elles n’assument pas. De cette absence de suivi, résulte plus d’infections sexuellement

transmissibles que chez les autres femmes. Elles ont également moins recours à la pilule. Les médecins peuvent d’ailleurs la leur refuser, la prescription de celle-ci risquant d’engendrer des problèmes cardiovasculaires. De ce fait les grossesses non désirées et les avortements sont quatre fois plus importants chez les femmes obèses de moins de trente ans. Contourner les difficultés Pour ne pas avoir à subir le regard des autres, les obèses se replient sur leur communauté. Selon une étude de l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (Inserm) datant de 2006, 67 % des femmes obèses ont des rapports sexuels avec un partenaire lui aussi en surcharge pondérale. Ce chiffre est de 39 % pour les hommes. Certains obèses n’ont d’autre choix que l’abstinence, ce qui n’est pas forcément problématique selon Cécile Planche. « On pense souvent que la sexualité est indispensable pour l’équilibre d’une personne. Et pourtant nous rencontrons des hommes tout à fait bien dans leur peau, qui, par choix, n’ont pas de vie sexuelle manifeste.

Les prêtres, les moines, des veufs, voire des personnes en couple arrivent à être parfaitement équilibrés avec peu ou pas de vie sexuelle ». À noter que les obèses ont 30 % de chances en moins d’avoir un partenaire sexuel au cours d’une année. Nathalie Bajos, la directrice de recherche de l’Inserm, propose des solutions. Les médecins généralistes doivent faire des efforts lors des consultations en parlant ouvertement des difficultés lors des relations intimes avec les personnes obèses. Ces problèmes de sexualité peuvent être contournés en adaptant ses envies à son corps, en considérant ses atouts et ses défauts. Les femmes obèses ne déclarent-t-elles pas avoir un degré de satisfaction sexuelle équivalent à celui des femmes ? Faire l’amour ne se résume pas à l’acte de pénétration. Pour Cécile Planche, « ce n’est pas le nombre de rapports par jour ou par semaine qui fixe la norme. Avoir un échange sensuel, c’est cela la sexualité. Et pourquoi les obèses seraient-ils moins doués que les autres pour la sensualité ? Chacun a une sexualité propre. Les obèses ont la leur » AP

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Obésité : l’histoire discrimination


DOSSIER

d’une

Dans l’imaginaire collectif, être gros au Moyen-Âge était synonyme de puissance. Mais les obèses eux, ont toujours souffert de discrimination, au XIIe siècle comme aujourd’hui. PAR ANNICK BERGER

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l y a toujours eu une sorte de réticence à l’égard du gros ». Georges Vigarello, directeur d’études à l’EHESS (École des Hautes Études en Sciences Sociales) et auteur du livre Les métamorphoses du gras, histoire de l’obésité veut mettre les choses au point. « Le rejet du gros n’est pas une nouveauté. L’extrême grosseur a toujours été stigmatisée ». Simplement, au fil du temps, les critères de grosseur se sont modifiés. L’écrivain précise, « Un homme de 160 centimètres et 60 kg n’apparaissait pas comme une personne en surpoids en 1880, un siècle plus tard il l’était. On a

Crédits

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DOSSIER

changé le seuil de tolérance de ce que l’on juge être très gros ». Ces modifications se sont faites au début du XXe siècle. Georges Vigarello en précise la raison : « l’imaginaire de la santé a fixé la minceur comme référence avec une exigence de fluidité du corps. Ensuite il y a eu une mutation pour le physique des femmes. Avant, être ronde c’était

L’obésité peut devenir

être femme, aujourd’hui avec une source d’exclusion l’évolution de leur condition et pour les plus jeunes. l’égalité qu’elles demandent, on ne leur pardonne plus de rondeurs ». Le regard que l’on pose sur l’obèse a changé lui aussi. Au Moyen-Âge, il a une image de glouton qui ne contrôle pas son appétit. La reine de France, Berthe de Frise, épouse de Philippe Ier, sera d’ailleurs

répudiée en 1092, à cause de sa gourmandise et de son poids. C’est à partir de la Renaissance qu’une discrimination plus grande de l’obèse apparaît. Le gros est vu comme un fainéant, une personne improductive. « Même quelqu’un comme Vauban, constructeur des grandes citadelles du XVIIe siècle, disait ne pas prendre de gros, car ils ne travaillaient pas. Il y a une stigmatisation qui passe par une image d’inefficacité » raconte Georges Vigarello. Aujourd’hui l’obèse représente celui qui est incapable de maîtriser son corps et donc de se maîtriser. C’est une image culpabilisante qui s’installe. Pour Catherine Grangeard, psychologue et auteur du livre « Le poids des mots, les maux du poids », la personne obèse « se sent visée par l’idée qu’aujourd’hui on doit être capable de modeler son corps. Et si on n’en est pas capable, c’est que l’on est faible ». Elle poursuit, « tout cela découle d’un vrai problème de société. On nous dit qu’il faut être mince et en même temps on nous dit qu’il faut consommer. Mais qui va pouvoir et manger tout le temps et rester mince. On nous donne

Evolution de l'obésité en France 16% 14,50% 14%

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Illustration Annick Berger / Licence GNU

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de fausses images d’un idéal qui au fond n’existe pas ». Alors, un nouveau phénomène apparaît, « il y a danger dans la nouvelle vision que l’on a de l’obésité s’inquiète M. Vigarello. On la qualifie d’épidémie qui touche tout le monde. Ce changement risque de stigmatiser encore plus l’obèse comme malade social, être couteux ou individu sans volonté ». La dérive de la nourriture L’idée de grosseur extrême renferme également des enjeux culturels. « La religion a joué un grand rôle dans l’image que nous avons aujourd’hui des obèses, explique Georges Vigarello, au XIVe siècle, elle a été l’une des premières à dénoncer l’extrêmement gros comme une dérive psycho-morale. Pour les croyants de l’époque, les gros succombaient à la gourmandise, l’un des sept péchés capitaux ». Une critique morale qui est encore présente aujourd’hui. Alors que l’obésité a été reconnue comme une maladie, elle souffre d’une image de laisser-aller et d’abandon de soi. Georges Vigarello explique « quelqu’un de gros apparaît comme balourd et n’est donc pas quelqu’un susceptible de s’inscrire de façon efficace dans le social ». Une dérive qui s’explique également par l’évolution de la société et son rapport changeant à la nourriture. Au Moyen-Âge, on mange pour lutter contre la famine et la maladie, pour montrer que l’on est riche. Les rondeurs deviennent signe de puissance. Deux grosseurs s’affrontent alors : l’une, maîtrisée, synonyme de force et de richesse ; l’autre, extrême, synonyme d’inutilité et de débilité. C’est au XVe siècle que la limite entre gros et très gros change car les famines s’éloignent, le pays s’enrichit, et la nourriture n’est plus signe de bonne santé financière. La critique des grosseurs banales s’amplifie. Le très gros devient symbole des excès des puissants, « au XVIIIe siècle, la personne obèse est inutile. Elle cristallise tous les reproches fait aux plus riches : il est celui qui profite mais qui n’agit pas », rappelle Georges Vigarello. Enfin, dans les années 1920, la limite entre gros et

Gargantua, un personnage créé par François Rabelais au XVIe siècle.

très gros diminue encore. La nourriture n’est plus un moyen de survie, mais un synonyme de plaisir et de vice. L’obèse en est l’image. Il devient l’exclu, celui qui ne correspond pas aux codes de santé et de minceur de la société et qui pousse le besoin de manger à l’extrême. Les rondeurs en réponse au mince Grosseur et minceur. Bien entendu, l’histoire de l’obésité ne peut pas se considérer sans cette idée des formes. L’éloge de la minceur n’est pas nouveau et s’est très vite imposé comme modèle de beauté. Georges Vigarello détaille, « il faut arrêter de se fier à ces tableaux de femmes rondes du XVe siècle. Elles ne représentent pas la réalité. Déjà à l’époque la femme devait être fragile. Et la fragilité est associée à la minceur ». Au siècle des Lumières, l’esprit doit dominer le corps. La finesse est signe de vivacité et de contrôle, l’obésité d’affaissement et d’abandon. Pour l’historien, « les métiers du tertiaire, après la Seconde Guerre mondiale, ont accentué le règne de la minceur parce que ce sont des métiers de l’apparence, du social. Il faut se montrer

réactif et alerte. Ce sont des qualités qui favorisent un certain élancement du corps ». Aujourd’hui la minceur est devenue facteur d’intégration dans une société où l’image et le corps n’ont jamais été si fortement liés. L’auteur du livre Le poids des mots, les maux du poids, Catherine Grangeard précise : « Il y a des normes ambiantes très fortes et on nous les renvoie sans cesse à la figure. Il n’y a qu’à se promener dans les rues pour les voir. Chaque abribus comporte une affiche de femme, plus maigre que grosse, en sous-vêtements. On nous répète que ça c’est la norme. Comment voulez-vous ensuite que les obèses soient acceptés ? » Pourtant, Georges Vigarello ne désespère pas : « on assiste à une montée des revendications individuelles, à un besoin général d’accepter son corps tel qu’il est. Même si l’histoire va dans le sens de la minceur, il faut espérer qu’un jour chacun puisse dire : Je suis comme je suis, et cela me plaît »

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« Les métamorphoses du gras, histoire de l’Obésité »,Georges Vigarello « Le poids des mots, les maux du poids », Catherine Grangeard Le Poids | Décembre 2010 | 15


SOCIÉTÉ

Associations : l’arme anti-kilos

PAR SARAH DUVERGER

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près lui avoir posé son anneau gastrique, le chirurgien de Chantal BouvierNachury lui a soufflé l’idée : créer un groupe d’aide et de soutien aux personnes souffrant d’obésité. La jeune retraitée, 63 ans, sait écouter mais surtout connaît le problème. En avril 2009, avec sa secrétaire Marguerite Gauthier, Chantal fonde l’Adora avec pour but de lutter contre l’isolement des obèses. Durant les réunions qu’elles organisent, une dizaine d’adhérents discutent de leurs problèmes au quotidien mais aussi des différentes techniques chirurgicales ou plus traditionnelles pour maigrir. Dans ce combat contre les kilos qui leurs gâchent la vie, être accompagné est essentiel. « Si un patient décide de se faire poser un anneau, nous le suivons de son premier rendez-vous chez le chirurgien jusqu’à l’anesthésie » fait observer la présidente de l’association. Ensuite, libre à lui de venir aux réunions de soutien. Et l’Adora ne laisse personne sur le bord de la route. L’association s’occupe aussi des personnes obèses qui n’en sont pas encore au stade critique qui les autoriserait à se faire opérer, tout en étant remboursées par la Sécurité sociale (Le poids doit excéder de 35 kg la taille en cm. Ex : Pour quelqu’un mesurant 160 cm, le patient doit peser 95 kg pour être remboursé). Ce sont parfois 5 ou 10 kg qui empêchent la personne d’avoir le droit à une intervention même si son mal-être est aussi important. Les deux femmes orientent

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alors les patients vers trois chirurgiens, proches de leur lieu d’habitation, qui posent des anneaux gastriques, sur des personnes avec une obésité moindre. À eux ensuite de faire un choix. Même combat contre les kilos pour le RéPPOP (Réseau pour la Prise en charge et la Prévention de l’Obésité en Pédiatrie) du Rhône. Dans cette structure, financée par l’agence régionale de santé, ce sont les enfants souffrant d’obésité ou de surpoids ainsi que leurs familles qui sont pris en charge. « Nous partons du principe qu’il faut du temps. Il n’y a pas d’objectifs chiffrés pour l’enfant. Le suivi s’échelonne sur au moins deux ans, parfois trois » explique Régine Cavelier, coordinatrice du réseau. Les enfants s’engagent à consul-

Le développement de l’activité physique chez les enfants obèses est aussi important qu’une bonne hygiène alimentaire pour le RéPPOP.

ter, une fois par mois, l’un des 130 médecins généralistes formés par le RéPPOP. Ici, pas question de parler de régime mais plutôt de rééquilibrage alimentaire. Comme toute la famille suit le même programme, l’enfant ne se retrouve pas isolé à devoir manger des haricots verts tandis que ses frères et sœurs prennent des frites. La famille peut bénéficier de quatre rendez-vous gratuits avec un diététicien mais aussi de cinq rendez-vous avec un psychologue : « Pour le suivi, nous essayons de développer l’éducation thérapeutique. Nous partons du principe que chaque personne est différente. Nous réfléchissons ensemble aux efforts qui peuvent être consentis. À partir de là, nous leur fixons des micro-objectifs comme par exemple, réduire les boissons sucrées à table ou encore emmener son enfant, deux fois par semaine, au jardin public » raconte Régine Cavelier. L’association s’appuie sur les recommandations du PNNS (Programme National Nutrition Santé). Tant sur le plan nutritionnel que sportif : karaté, natation ou judo sont proposés aux enfants de l’association à l’année ou pendant les vacances. Aujourd’hui, 600 familles dans le Rhône bénéficient de l’aide apportée par le RéPPOP. L’année dernière, 44 % des enfants obèses suivis par le réseau ont maigri. 47 % se sont stabilisés. « En grandissant ils finiront par sortir de cette obésité » explique Régine Cavelier Mais ils auront surtout appris les bases d’une bonne hygiène de vie

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-http://www.adora-association-desobeses.com/ -http://www.repopgl.org/ Cinq régions en France bénéficient du travail des RéPPOP : l’Île de France, la FrancheComté, l’Aquitaine, le MidiPyrénées et la région RhôneAlpes.

Adora

Dans la région lyonnaise, deux associations viennent en aide aux personnes obèses ou en surpoids, souvent isolées à cause de leur maladie.


SOCIÉTÉ

Ces écrans qui nous font grignoter la diététicienne. Sauf que le grignotage n’est pas toujours justifié par un besoin de manger, mais plutôt par une envie. L’ennui, le manque affectif, le stress, peuvent entraîner ce désir de grignoter gâteaux, bonbons, pâtisseries.

L’évolution technologique favorise la sédentarité, surtout chez les enfants. PAR HÉLOISE BASSON

Héloïse Basson

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l est bien loin le temps où les enfants s’égaillaient au parc le mercredi après-midi, jouaient au football, et mangeaient une tartine de pain avec une barre de chocolat. Aujourd’hui, au sein d’une société où tout est finalement plus « fast » que « food », les jeunes restent majoritairement enfermés chez eux à jouer avec les nouvelles technologies, au détriment des activités en plein-air. Jeux vidéo, télévision, ordinateurs, et téléphones mobiles sont les nouveaux leaders des occupations chez les collégiens et lycéens. Ils se placent même en pôle position dans la liste de ceux qui « isolent du reste du monde » puisqu’ils peuvent se pratiquer seul. Les écrans obnubilent, fascinent…l’évolution d’une société qui tend à les perfectionner toujours plus n’arrange rien. Ces accessoires sont conçus pour ne pas lasser. En France, un garçon de 13 ans passerait en moyenne 7 h 11 par jour devant un écran, soit plus

Un jeune passe 102 jours par an en moyenne devant un écran !

de 102 jours sur 365 (3 h 34 devant la télévision et 1 h 57 devant l’ordinateur). À cette absence d’effort physique, s’ajoute une hausse sans équivoque de la sédentarité chez les ados. Sans parler d’une alimentation démesurée. Car ces passetemps sont régulièrement accompagnés de grignotages incontrôlés. L’influence du petit écran Devant la télévision par exemple, il est aisé d’avaler bon nombre de biscuits sucrés, barres chocolatées ou encore confiseries, sans vraiment en contrôler la quantité. Il s’agit là, selon le terme médical, « d’ingestion passive ». Pour Valérie Legrand, diététicienne à Lyon, « il est nécessaire de conserver le goûter quotidien de 4 heures, au moins jusqu’à 18 ans. Mais la télévision donne de mauvaises habitudes alimentaires car on a les mains libres. C’est dommage, car la société actuelle incite à consommer la malbouffe, surtout chez les jeunes. » Et justement, cette nourriture accumulée par une personne plus ou moins avachie sur un canapé, ou devant un ordinateur, n’implique généralement pas une alimentation saine. « L’idéal pour un goûter, c’est un fruit, un laitage, et une barre céréalière. À l’inverse, les biscuits ne rassasient pas » souligne

Quand la publicité s’en mêle Alors, cet attirail « d’activitésmaison » incite les humains à rester chez eux, et à se dépenser le moins possible. Tout est désormais à portée d’un clic de souris ou d’un coup de téléphone. Le tout, appuyé par de fréquentes publicités alimentaires bombardées entre chaque programme télévisé, prônant ici ou là, les effets de la dernière pizza au fromage, ou du nouvel hamburger à double ration de pain. De fait, une étude américaine publiée en 2008 dans le « Journal of laws and economics » a expliqué que l’interdiction de publicités pour fast-foods à la télévision, pourraient diminuer le nombre d’enfants obèses aux USA de 18 %, et de 14 % chez les adolescents. Car ces publicités, plus influentes que l’on ne croit, s’avèrent surtout tentantes pour les jeunes. Si les adultes savent distinguer malbouffe et quatre-heures, il n’est pas simple pour un enfant de résister à l’appel du sucre. Et pour les parents qui rentrent tard du travail, de contrôler leur alimentation. « L’important consiste à mettre des limites aux ados, renchérit Valérie Legrand, et de préserver les vertus du repas familial. Au moins une fois par jour, le soir par exemple, il est important de dîner en famille, au calme, pas devant la télé, ni en mangeant sur le canapé. Il faut prendre son temps et apprécier une nourriture saine, dans un moment de tranquillité, si possible à heures fixes. » Un repas quotidien, comme une sorte de tradition sacrée, qui permet aux membres d’une famille d’apprécier la nourriture, et de se retrouver ensemble. Au moins le temps d’un dîner

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Le Poids du mois

Peut-on parler de discriminations liées à l’obésité ? En matière d’adoption, d’assurance ou d’emprunt bancaire, le critère médical l’emporte sur le critère physique. Comme nous le confirme Anne Montel, présidente du comité d’adoption de Lyon : « Toute personne en bonne santé peut adopter. Mais si l’obésité entraîne des problèmes médicaux, le dossier peut-être refusé ». En matière d’emprunt et d’assurance, on se réfugie derrière la convention Aeras (s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé). Depuis 2007, ce dispositif propose des solutions pour élargir l’accès à l’assurance, et donc à l’emprunt bancaire. D’après le dernier rapport de novembre 2009, 95,5 %* des personnes l’ayant utilisé ont reçu une proposition d’assurance. Mais sans préciser la nature de l’offre. S’il est impossible de déterminer le montant, dans le cas où l’obésité est reconnu comme pathologie, les surprimes sont inévitables. Un surcoût justifié par le risque que l’assureur prend, en assurant une personne avec une santé fragile Plus d’infos sur www.aeras-infos.fr *Bilan de l’application de la Convvention Aeras, « s’assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé »

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Trois questions à Marisa Lai-Puiatti

Déléguée Rhône-Alpes de la Halde

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Y a-t-il un obèse dans l’avion ? Aujourd’hui, un passager peut se voir signifier son débarquement même si sa réservation est en règle. En cause : sa corpulence. Les sièges et les ceintures n’étant pas adaptés aux passagers « trop corpulent ». Ce cas extrême met en évidence un vide juridique flagrant. « C’est au commandant de bord de décider si une personne peut voyager ou non dans l’avion. Il est le seul maître à bord » précise Patrick Lansman, chef de mission droit des passagers de la Direction Générale de l’Aviation Civile, citant le code de l’aviation civile qui s’applique dès l’embarquement. Mais cette décision ne prend pas en compte la réservation, régie par le droit commercial. Certaines compagnies aériennes proposent alors aux personnes de forte corpulence de réserver deux sièges, et remboursent 25 % du prix de la deuxième place si la cabine n’est pas pleine. « Il faut être réaliste, un avion n’est pas extensible, les normes de sécurité sont très importantes » déclare Gabriel Exbrayat, représentant de la Fédération nationale des associations d’usagers des transports en RhôneAlpes

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YVES MONTUELLE

Libre de DRoits - SXC / Marc Roussot

Estimez-vous tolérable la discrimination des personnes qui postulent pour un emploi en relation avec le public, du fait de leur apparence physique ? Je le dis très fermement, aucun argument de type commercial ne peut prévaloir que l’on décide de refuser de recruter quelqu’un en raison de son apparence physique. Il n’y a qu’un médecin qui peut déterminer si quelqu’un est apte ou inapte à occuper un poste, et ce, uniquement du point de vue de la santé. La discrimination concernant l’apparence physique est-elle une « sous discrimination » ? Discriminations mineures et majeures sont des concepts que l’on ne connaît pas à la Halde. Il existe 18 critères de discriminations prohibés par la loi. L’apparence physique est l’un d’eux et il a toute sa place. En revanche, il y a peu de plaintes sur cette question-là. Alors qu’il y a 3 009 plaintes sur les discriminations concernant les origines en 2009, il n’y en a que 150 pour l’apparence physique. Il ne faut pas ignorer que la Halde doit être saisie pour qu’elle puisse agir. Pourquoi la Halde ne fait-elle pas une campagne ciblée sur la discrimination liée à l’apparence physique ? Nous ne faisons que rarement des campagnes ciblées. Néanmoins, il n’est pas du tout à exclure que la Halde engage un jour une campagne sur la question des apparences physiques et particulièrement de l’obésité. Nous sommes persuadés, que malgré le peu de saisines, ces critères de discriminations sont largement développés. Vous savez par ailleurs que la Halde est une institution récente, nous n’avons donc pas pu, sur les six années d’existence qui sont les nôtres, traiter l’ensemble des questions liées aux discriminations MARC ROUSSOT


Libre de Droits - SXC / Licence GNU / © Obesity Day / Illustration Lucas Demangeat

Cherche IRM... Le centre hospitalier de Lens a inauguré en mars 2007, la première IRM dites « haut champs ouvert » en France. Accessible pour personnes obèses et claustrophobes, pouvant supporter jusqu’à 250 kg. Chaque région s’est engagée à se doter d’IRM XXL depuis. Avant cette date, pour procéder à cet examen, il était nécessaire de se rendre dans une école vétérinaire, et d’utiliser un appareil réservé au bétail.

...et crématorium La société peine à s’adapter aux personnes obèses et pour cause. En septembre dernier, une femme de 63 ans décèdait dans la région

bordelaise. Sa dernière volonté : être incinérée. Impossible selon la commune de Mérignac, pour cause de surpoids. La retraitée pesait entre 120 et 140 kg et ne pouvait donc franchir les portes du crématorium. Après plus de 15 jours de combat, sa famille réussira finalement à la faire incinérer… à 250 km de son lieu de vie. Du yoga pour soldats obèses L’idée vient des EtatsUnis. L’armée américaine a fait appel à Tony Horton, gourou du fitness pour mettre au point des exercices destinés à lutter contre l’obésité. Depuis 2003, le nombre de personnes en surpoids a doublé dans l’armée américaine, en 2008, 4.4 % du personnel était considéré comme obèse. Le commandement a donc décidé de réagir avec ces cours de Yoga. L’idéal pour permettre aux soldats de faire du sport sans équipement et avec peu d’espace.

*Statistique effectuée sur la période 2000-2002 **Apports caloriques journaliers recom(par pays, par personne et par jour)** mandés : 2000 kcal/jour pour les femmes, 2500 kcal/jour pour les hommes

La consommation quotidienne de calories*

E ‌ tats-Unis: Portugal : Autriche : Italie : France :

3790 kcal/jour 3750 kcal/jour 3740 kcal/jour 3690 kcal/jour 3660 kcal/jour

L’homme le plus gros du sodium (sel). Le hamburger pèse seulement monde 1,8 kg à la pesée...

Manuel Uribe Garza est un Mexicain réputé pour être l’homme le plus gros du monde, avec un poids de 590 kg en 2006. Il a subi depuis un traitement médical qui lui a fait perdre plus d’un tiers de son poids, -230 kg. Il détient le record de la perte de poids la plus importante. Big Big Mac Le hamburger le plus calorique du monde est américain ; il contient 4 800 calories. Composé de cinq steaks hachés, cinq tranches de fromage, des frites, une tasse de chili, une tasse de sauce salsa, des croustilles de maïs de crème aigre (cela ressemble à la crème fraîche), des chips et des fromages nacho (un fromage apprécié aux Etats-Unis), de la laitue, des tomates, 450 grammes de pain à la graine de sésame (les deux morceaux de pain dans les deux extrêmes du hamburger mesurent chacun 20 centimètres de diamètre) : 300 grammes de matières grasses, 744 milligrammes de cholestérol, 10 000 milligrammes de

Journée de l’obésité « Une Europe plus saine » est le but que se sont fixé les organisateurs de la Journée européenne contre l’obésité qui s’est déroulée pour la première fois le 22 mai dernier. Deux objectifs sont fixés : encourager les personnes obèses à retrouver un poids sain et « fournir la toute première pétition d’initiative citoyenne européenne » afin que la Commission européenne se saisisse du problème. D’après nos dernières informations, la JEO 2011aura lieu le 21 mai.

* Journée européenne de l’obésité Écouter la parole des obèses et des personnes en surpoids Le Poids | Décembre 2010 | 19


SOCIÉTÉ

À chaque culture son obésité

E

n Mauritanie, un vieux dicton dit que « la femme vaut la place qu’elle occupe dans le lit ». Une phrase qui définit les critères de beauté dans ce pays d’Afrique. Plus une femme est grosse, plus elle est belle et jugée d’un rang social élevé. Celles qui sont minces sont considérées comme inférieures et attirent la honte sur leur famille. Tous les moyens sont bons pour faire prendre du poids aux jeunes filles. En moyenne les Mauritaniennes atteignent leur poids maximal à l’âge de 10 ans. Elles sont « engraissées » avec du lait de vache, du lait de chamelle. Certaines familles n’hésitent pas à leur administrer des produits chimiques destinés à engraisser les animaux. Ainsi, en 2008, 38 % des femmes entre 15 et 49 ans étaient gavées de force. Le gouvernement a donc décidé de réagir face à cette coutume ancienne. Aujourd’hui, grâce à de nombreuses campagnes de sensibilisation, les Mauritaniennes se mobilisent pour rejeter ce canon traditionnel de la beauté et tentent d’adopter un mode de vie plus sain. Difficile pour les autorités de toucher toute la population. Si cette pratique a presque disparu dans les villes, seules 7 % des filles y seraient nourries de force, elle reste encore largement répandue en campagne où elles sont 75 % à être gavées pour être mariées. Le cliché du Sumo Depuis quelques années l’obésité devient un enjeu fondamental au Japon. Et pourtant, le pays a sou-

20 | Décembre 2010 | Le Poids

vent l’image d’un endroit où les personnes rondes sont reines. Notamment grâce aux Sumos, véritables dieux vivants. Mais au Japon, le culte qui leur est voué n’a rien à voir avec leur poids. S’ils sont adorés et acclamés par la foule, c’est avant tout pour leur ressemblance à Takemikazuchi, le dieu du courage, considéré comme le fondateur du peuple Japonais. À l’inverse des Sumos, les personnes obèses, elles, sont montrées du doigt dans le pays. L’Empire du Soleil levant a d’ailleurs mis en place, en 2008, le plus ambitieux programme de lutte contre l’obésité au monde. Le gouvernement demande aux entreprises du pays de tout faire pour réduire le pourcentage d’obèses de 10 % d’ici quatre ans et de 25 % sur sept ans. Et si l’objectif n’est pas atteint les entreprises fautives devront payer une amende. Le montant pourrait s’élever à 19 millions de dollars. Le gouvernement japonais, lui, explique cette politique drastique par l’état de son système de santé. Aujourd’hui, au Japon, les programmes de lutte contre l’obésité sont même comparés à des campagnes anti-tabac.

Au Japon, les sumotoris consomment 10 000 calories par jour, soit quatre fois plus qu’une personne normale.

60 % de personnes obèses dans le Golfe Persique Cette région (Qatar, Koweït, Arabie Saoudite, Oman et EmiratsArabes-Unis) n’échappe pas au problème que pose l’obésité. Dans ces pays plus qu’ailleurs il est objet d’inquiétude. Plus de 60 % de la population de la région est obèse. Selon Mohammed Hijazy, doyen de la faculté de médecine de Dammam en Arabie Saoudite, les femmes y sont d’ailleurs majoritaires. Une situation mal vécue par les obèses. Peu osent sortir en public, dans des pays où la vie sociale est très importante. Le plus difficile est pour les femmes, si complexées que souvent, elles en viennent à ne pas assister à un mariage ou à une célébration familiale, par honte. Pourtant, aucune discrimination n’est présente dans ces pays, particulièrement attentifs dans le choix des mots. Ainsi, l’appellation « gros », en arabe, est strictement condamnée. Trop péjorative. Pour les habitants du Golfe Persique, l’obésité est une maladie que l’on ne doit pas stigmatiser

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ANNICK BERGER

Libre de DRoits - Licence GNU

De la Mauritanie au Japon, la vision de l’obésité n’est pas la même. Le surpoids est même, parfois, recherché.


SOCIÉTÉ

« La chirurgie ? Jamais ! » Chantal et Magalie, mère et fille, font face aux « kilos » en trop, chacune à leur manière. PAR HÉLOISE BASSON

Héloïse Basson

Le Poids : Avez- vous toujours eu des problèmes de poids ? Chantal : Surtout après mon divorce. J’étais seule avec mon fils quand mon mari est parti, et c’est devenu compliqué. Magalie : C’est surtout après avoir eu mes filles que j’ai commencé à grossir, parce que j’ai continué à manger pour deux. Comment combattez-vous ces kilos en trop,au quotidien ? Chantal : Il y a 13 ans, en 1998, je me suis fait poser un premier anneau gastrique ; à l’époque, tout était bien plus simple. J’ai consulté un chirurgien, et huit jours après il m’opérait. Pas besoin ni du nutritionniste, ni du psychologue. Pour moi c’était la seule solution. Les régimes naturels ne fonctionnaient pas, quand au « sleeve » et au « bypass », ces techniques n’étaient pas encore employées. Magalie : Déjà, je ne supporte pas le mot « régime ». Je préfère me dire que je fais attention. Mais je ne me formalise pas plus que ça. Toutes les femmes prennent du poids pendant leurs grossesses. Même si j’aimerais perdre environ 20 kg, je suis heureuse comme cela. Mon mari m’aime, je lui plais, c’est tout ce qui compte. Maigrir n’est pas ma priorité. Pour l’instant, je m’occupe de mes filles, je me soucierai de mon poids plus tard. Je suis certaine, que lorsque je serai motivée, quand j’aurai le déclic, je maigrirai.

Vous ne pensez jamais aux méthodes radicales telles que la chirurgie, comme votre mère ? Magalie : Jamais de la vie ! Avec son premier anneau gastrique, j’ai vu ma mère se métamorphoser, perdre tellement de poids qu’elle ne tenait plus sur ses jambes. Elle a failli y rester ! Je n’irais jamais à de tels extrêmes simplement pour perdre des kilos. Je n’en fais pas une obsession. Je préfère manger plus de légumes ou faire attention à mon quatre-heures que de me faire poser un anneau dans l’estomac ! J’ai eu trop peur pour ma mère pour le faire vivre à mes enfants. Que s’est-il passé avec la pose de cet anneau ? Chantal : Au bout du quatrième mois, l’anneau s’est cassé dans mon ventre. Il faut savoir qu’avec un anneau, on vomit pratiquement après chaque bouchée. Les repas deviennent un supplice car on ne peut plus rien avaler. Je ne digère plus la viande, ou la salade. Ils ne passent tout simplement pas. À force, c’est ce qui a abîmé l’anneau. Je ne pouvais même plus avaler d’eau. Le médecin me disait que c’était le but de l’opération, que je mange beaucoup moins. J’ai commencé à vraiment me déshydrater,

À gauche, Chantal, 63 ans, porte un anneau gastrique depuis 13 ans ; sa fille, Magalie, à droite, 32 ans, a surtout pris du poids suite à ses deux grossesses.

et je suis passée de 98 à 56 kg. Mes proches se sont tous inquiétés pour moi alors que j’étais sur une sorte de nuage ; je perdais du poids, et ça me convenait. Je ne me rendais pas compte. Finalement, on m’a admise à l’hôpital car je ne tenais plus debout. Je suis restée sous perfusion pendant un mois. J’étais inopérable, mon estomac était trop abîmé pour m’enlever l’anneau. Un an et demi plus tard, en 2000, j’ai essayé une nouvelle pose. Tout s’est bien passé, mais j’en ai quand même eu un autre en 2003. Avec les avancées techniques, différents anneaux étaient disponibles, le dernier était plus perfectionné. C’est celui-là que j’ai depuis maintenant sept ans. Arrivez à vous accepter comme vous êtes désormais ? Chantal : Non, j’ai beaucoup de mal avec mes 67 kg. Je voudrais continuer à maigrir, je ne suis pas satisfaite comme cela. Vous pesez vous régulièrement ? Chantal : Jamais. Magalie : Tous les jours. Pour savoir… mais je me fixe quand même une limite à ne pas dépasser, et je vérifie régulièrement où j’en suis. Sans trop le prendre à cœur non plus

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Le Poids | Décembre 2010 | 21


WWW

SOCIÉTÉ

« Je ne suis pas dans la norme »

À 23 ans, Julie Candel, 1 m 50 pour 100 kg est la maman d’un nourrisson de 2 mois. En février prochain elle se fera poser un anneau gastrique. Chaque jour son obésité la confronte à des difficultés. Pour Le Poids, elle a accepté de montrer ce qu’est le quotidien d’une personne obèse PAR MARC ROUSSOT

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« Il suffit que je marche vite pour aller au travail, que je monte trois marches d’escalier et c’est fini. Je suis essoufflée, j’ai soif… Si jamais j’ai le choix entre un escalier et un escalator, il est évident que je vais prendre l’escalator. » Physiquement, Julie a aussi des problèmes de circulation du sang qui n’arrangent rien. « Quand je reste immobile j’ai très vite mal aux jambes. Lors de ma grossesse, mes rondeurs plus le poids de mon bébé ont entraîné de très douloureux maux de dos ». 22 | Décembre 2010 | Le Poids


Photos : Marc Roussot / Héloïse Basson / Lucas Demangeat

« Je ne trouve jamais rien au-dessus du 42 voire 44. Même le 44 c’est difficile à trouver. Surtout quand c’est un 44 qui taille petit » explique Julie. Acheter des vêtements est ainsi un véritable calvaire, « là encore il y a un moule à respecter. Il faut être dedans, c’est tout ». Julie a donc essayé de trouver ses vêtements sur Internet mais même les catégories « grandes tailles » étaient trop petites. « Du coup je me suis rabattue sur les friperies où je trouve occasionnellement des vêtements qui me conviennent ».

Certains gestes anodins, comme se chausser, deviennent pénibles : « J’ai une collection de ballerines. J’aime bien ce type de chaussures sans lacets et je contourne ainsi la difficulté. Il faut ruser. » Le Poids | Décembre 2010 | 23


ÉCONOMIE

Manger équilibré, un privilège qui n’est pas réservé qu’aux riches La précarité favoriserait l’obésité car bien manger coûterait trop cher. Faux, répondent les nutritionnistes, il faut s’informer.

Le frais pas plus coûteux Des fruits et des légumes trop chers, c’est l’une des raisons qui poussent les personnes obèses ou en surpoids à les bouder. Une idée fausse, si l’on observe l’évolution des prix de ces denrées sur les dix dernières années. Selon l’Insee (Institut National des Statistiques et des Etudes Economique), les prix des fruits et légumes

nablement parce qu’ils n’ont pas les moyens. Acheter un chou à un euros, coûte moins cher qu’une pizza surgelée. Et avec un seul chou on peut réaliser au moins quatre repas », confie la nutritionniste. À ses patients les plus démunis, elle propose aussi des astuces pour faire des économies. Faire la fin des marchés, éviter les grandes surfaces,

PAR BRICE NATIVEL

C

24 | Décembre 2010 | Le Poids

Le mois dernier, le gouvernement a décidé d’élargir l’utilisation des tickets restaurant à l’achat de fruits et légumes frais et produits laitiers. Depuis mars 2010, seuls les fruits et légumes prêts-àconsommer pouvaient être acheté avec les tickets restaurants.

n’ont pas plus augmenté que ceux des autres produits de consommation courante. Entre 2000 et 2010, les prix des fruits frais ont augmenté de près de 29 %, contre 23 % pour celui des légumes frais. Quant aux prix des produits de consommation courante ils ont augmenté de 29 %. Des idées pour dépenser moins Si tous les tarifs sont en hausses, les produits frais restent encore accessibles à tout le monde. Un sentiment que partage Cécile Lagouche, médecin nutritionniste à Caluire. « On peut manger cinq fruits et légumes par jour. Il faut juste savoir comment s’alimenter correctement ». En majorité, ce ne sont pas les prix des aliments qui rebutent ses patients, mais la façon de les préparer. « On me dit souvent, moi je veux bien manger des légumes, mais je ne sais pas les cuisiner ». Face à leur détresse, elle leur propose des recettes simples à réaliser et peu coûteuses. « Il faut arrêter de dire que les personnes obèses n’arrivent pas à se nourrir conve-

comparer les prix au kilo, acheter des produits de saisons et surtout cuisiner soi-même, des conseils précieux pour économiser quelques dizaines d’euros chaque semaine. Pour la nutritionniste, le principal problème, c’est le manque d’éducation alimentaire, c’est-à-dire apprendre à connaître les fruits et légumes et savoir les préparer. « Il faut que les gens réapprennent à cuisiner. En 1950, une femme passait cinq heures dans sa cuisine. En 2009, une personne quelle qu’elle soit passe à peine 30 minutes à faire les repas. Ce sont nos modes de vie qui nous incitent à manger mal. Cela est mauvais pour notre santé, mais aussi pour notre budget ». Depuis qu’elle cuisine, Alison se sent mieux. « Ça me plaît de cuisiner, je vois que ça me coûte moins cher et en même temps je me fais plaisir. Je vais même chercher des recettes sur Internet ». Un nouvel équilibre pour la jeune femme qui sait que la route vers la guérison est accessible même avec un budget réduit

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Brice Nativel

ent cinquante euros pour vivre, c’est le budget d’Alison, 20 ans, étudiante à Lille. Il y a quatre mois, elle présentait une obésité morbide et faisait 115 kg. Un poids qui mettait sa santé en danger et qui la menaçait de paralysie. Après la pose d’un anneau gastrique, elle pèse désormais 92 kg. Aujourd’hui, elle mène un combat contre son poids mais aussi contre les prix. Pour faire ses courses, Alison fait attention au moindre sou. « J’ai la chance d’habiter à proximité de différents supermarchés, ça me permet de comparer facilement les prix », explique la jeune femme. Elle consacre, en moyenne, 10 euros par semaine pour l’achat de fruits et légumes. Cette semaine, son panier se compose de clémentines, endives, tomates, pommes et betteraves, de quoi faire plusieurs repas en mangeant sainement. « Avec mon budget, c’est impossible pour moi de consommer cinq fruits et légumes par jour, si j’arrive à en manger deux dans la journée c’est déjà bien. Je n’ai ni l’argent, ni le temps nécessaire, même si je cuisine plus qu’avant ». Avant son opération, Alison ne se nourrissait que d’aliments très caloriques. Pizzas, cordons bleus, et plats à réchauffer constituaient son quotidien alimentaire. Pour l’étudiante qui ne prenait pas le temps de cuisiner, c’était des solutions de facilité. Des repas prêts rapidement mais aussi plus chers. « Aujourd’hui je vois qu’acheter des fruits et légumes frais me coûte moins cher que ce que j’achetais avant. J’ai toujours cru qu’ils n’étaient pas dans mes moyens. Maintenant, j’économise près d’une vingtaine d’euros par mois ».


ÉCONOMIE

Quand la malbouffe se met à la diète vont pour les sandwichs. La notion de plaisir est très importante, on ne se nourrit pas seulement pour son corps mais pour sa tête ».

Souvent montrée du doigt dans la lutte contre l’obésité, la malbouffe redore son image depuis quelques années. Son nouveau crédo : la diététique. PAR YVES MONTUELLE

recherche de profit commerciaux. Ces nouveaux menus attirent une clientèle plus large et représentent donc un chiffre d’affaire plus important. « Il ne faut pas s’en cacher, nous répondons avant tout à une demande » nous avoue Cécile Rivoire. Et les résultats ne se sont pas fait attendre : « sur les deux dernières années, malgré la crise, nous sommes la seule enseigne à avoir gagné des parts de marché ».

ast-food et diététique sont souvent considérés comme deux termes antinomiques. Pourtant, certaines enseignes de restauration rapide ont fait de la nutrition la composante centrale de leurs menus. Mac Donald’s propose depuis une dizaine d’années déjà des salades en accompagnement des sandwichs. « Ces menus plaisent, surtout aux parents. Nous restons le restaurant préféré des enfants, mais avec les salades, maintenant, les adultes aussi trouvent des menus qui leurs correspondent » déclare Cécile Rivoire, manager d’exploitation des restaurants Mc Donald’s à Lyon. Cette nouvelle gamme de produits rencontre un franc succès. Et certains diététiciens, comme le Lyonnais Cédric Ben Chemoun, reconnaissent que « ces menus sont très clairement meilleurs pour la santé. Ils contiennent moins de graisses mais plus de fibres et de vitamines ». Tout l’intérêt est là, les enseignes de restauration rapide restent des entreprises à la

L’exemple vient de l’étranger Pour autant, Mc Donald’s n’est pas le précurseur de ces menus dits sains. Maoz a largement inspiré cette tendance avec un autre concept, celui des menus végétariens. Né à Amsterdam en 1991, il s’agit à l’origine d’un fast-food qui propose uniquement des légumes. En vingt ans, la petite entreprise s’est implantée dans les plus grandes villes d’Europe, dont Paris, et a diversifié ses menus. Alors que la restauration rapide était stigmatisée au nom de la lutte contre l’obésité, elle a trouvé dans ce concept, le moyen de riposter. Mais il a fallu l’adapter. Ainsi à Mac Donald’s, les salades sont proposées en menu, accompagnées des inamovibles sandwichs. Pouvoir consommer des produits sains dans un fast-food est important dans un régime diététique selon Maryline Brochard, diététicienne à Lyon. Ceci pour éviter toute frustration : « Je ne pense pas que les gens se rendent dans les fastfood pour manger des salades, ils y

F

Emmanuelle Vieillard

Le marché du snacking (grignotage) est en pleine extension : plus de 3 milliards d’euros de chiffre d’affaire en France pour l’année 2009 (source Sandwich & Snack Show, observatoire européens de la filière du snacking). Et la demande ne cesse de progresser : plus de 90 % des Français reconnaissent grignoter entre les repas.

Une clientèle féminine La tendance à la diététique ne se limite plus aux entreprises de restauration rapide. Beaucoup de filières visées par la lutte contre l’obésité s’orientent dorénavant vers des offres de produits plus sains. Les « gâteaux apéros » traditionnels par exemple n’ont plus la cote, alors certaines entreprises s’orientent vers des encas diététiques : le « snacking sain ». Le marché se développe au niveau national grâce notamment « à des réseaux de distribution performants » selon Christophe Oteniente, responsable du Paradis du fruit à Lyon, une chaîne de bar à fruits. « En proposant des produits sains, nous répondons clairement aux demandes de nos clientes » nous confie-t-il. Même constat pour les cafés-concerts Ninkasi à Lyon dans lesquels les « snacks sains » ont fait leur apparition il y a six mois, comme les tartines ou encore les paniers vapeurs. Proposer ce genre de produits est devenu une nécessité pour l’entreprise souligne Pierre-François Cialdella, responsable marketing du Ninkasi : « ces produits étaient une demande de notre clientèle féminine, c’est évident. Et de notre côté il fallait faire face à la concurrence des bars à salades qui se multiplient ». Meilleur à la santé et bon pour les affaires, le marché de la malbouffe a su s’adapter à sa clientèle. Les anciens cancres de la gastronomie attirent aujourd’hui les clients les plus réticents d’hier. Ces « fastfoods diététiques » et le « grignotage sain » sont aujourd’hui incontournables. Au point que Mac Donald’s, leader du marché de la restauration rapide, va consacrer un de ses restaurant à Paris, dans le quartier de la Défense, exclusivement aux menus salades. Une révolution

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Le Poids | Décembre 2010 | 25


ÉCONOMIE

Rapport sur la prévention de l’obésité Valérie Boyer : « Tout reste à faire »

Auteur du rapport parlementaire sur la prévention de l’obésité présenté en 2008, Valérie Boyer, députée des Bouches-du-Rhône, revient pour Le Poids sur les avancées concrètes de ses travaux. PAR YVES MONTUELLE Le Poids : Quel est votre sentiment sur ces deux ans qui se sont écoulés depuis la rédaction de ce rapport ? Valérie Boyer : Une « mission obésité » à l’Elysée, dirigée par le professeur Basdevant (Chef du service de nutrition de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, ndlr), a été mise en place. C’est un signe très positif d’une prise de conscience. Des amendements ont été votés et sont aujourd’hui appliqués comme la possibilité de payer les fruits et légumes en supermarché avec des tickets restaurants. Ces avancées concrètes ont fait évoluer la situation des obèses aujourd’hui.

Aujourd’hui comment peut-on aller plus loin ? J’attends beaucoup de ce que va faire le professeur Basdevant. Mon rapport de 2008 s’inspirait en 26 | Décembre 2010 | Le Poids

grande partie des auditions que j’avais réalisées avec lui et nous devrions être en phase encore aujourd’hui. Les consultations de diététiciens sont maintenant prises en charge par certaines mutuelles. Peut-on envisager une prise en charge élargie par la Sécurité sociale ? Non, et je pense que ce n’est pas souhaitable. Il faut rappeler que le diplôme de diététicien s’obtient après seulement deux ans d’études post baccalauréat et que la profession n’est pas organisée pour être une profession libérale comme les infirmières par exemple. En revanche l’accès et la prise en charge de ces consultations existe déjà dans les maisons de santé et de territoire, implantées dans les zones rurales. La Sécurité sociale est-elle impuissante face à l’obésité ? Indirectement, la Sécurité sociale prend en charge l’obésité à travers les maladies auxquelles elle est associée. Les personnes obèses souffrent en général d’affections longues durées qui, elles, sont prises en charge, comme l’hypertension ou les problèmes d’articulations… … Mais le problème de fond, celui de l’obésité, n’est pas traité… Je prône une prise en charge plus globale de la personne obèse. Le principal problème auquel il faut s’attaquer est l’errance médicale. Ces personnes ne trouvent pas de réponses à leurs problèmes aujourd’hui. À cela s’ajoute des difficultés, pour ces personnes, à entamer un traitement de longue haleine. Pour cela j’avais proposé une prise en charge psychologique des patients obèses. Faut-il continuer de mettre l’accent sur la prévention ? Il faut tout faire aujourd’hui. La prévention bien sûr mais aussi l’amélioration des soins curatifs et de la prise en charge, permettre aux

personnes opérées d’être mieux réinsérées... Tout reste à faire. Dans quelle mesure les campagnes « manger bouger » sontelles efficaces pour endiguer les problèmes économiques engendrés par le surpoids ? Ces campagnes n’ont pas pour objectif principal d’endiguer les problèmes économiques. Elles ont pour vocation de faire prendre conscience aux gens de leur état. Ces campagnes s’adressaient aux enfants en particulier pour tenter d’endiguer la progression de l’obésité. Les effets des différentes campagnes de prévention justifient-ils les dépenses financières investies ? C’est plus que justifié ! J’avais même demandé d’avantage de moyens pour que l’Inpes puisse davantage communiquer. Le coût de telles orientations ne vient-il pas déstabiliser encore plus notre système de santé ? Cela coûte déjà très cher. Il faut maintenant mieux dépenser notre argent. Ce sera plus utile pour les malades et je suis convaincue qu’à terme cela reviendra moins cher à l’Assurance maladie. Quelle population faut-il alors viser pour une prévention efficace en 2011 ? Il faut continuer bien évidemment à sensibiliser les enfants et leurs parents. Mais maintenant, il faut également accompagner les personnes qui souffrent déjà de l’obésité. Accompagner une personne qui va subir de la chirurgie avant, pendant et après l’intervention c’est une forme de prévention. Pourquoi une telle cible ? De la prévention auprès de ces personnes, découlera une meilleure réussite du traitement et moins de risques de multiplication des traitements

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©UMP

Valérie Boyer à l’Assemblée nationale


ÉCONOMIE

Une campagne qui peine à prouver son efficacité Réduire le nombre d’obèses d’au moins 20 % de 2001 et 2010, était l’un des objectifs du Programme national nutrition santé (PNNS). Ambitieux, par rapport aux moyens mis en œuvre. PAR BRICE NATIVEL

Yves Montuelle

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l est difficile de dire que la prévention de l’obésité n’a pas totalement fonctionné. Nous constatons des avancées, notamment auprès des ménages les plus aisés où l’obésité infantile commence à reculer », confie Serge Hercberg, président du comité de pilotage du PNNS. Pourtant, en 10 ans, sur l’ensemble de la population, l’obésité n’a pas diminué en France. Elle n’a pas augmenté non plus, c’est un point positif estiment les acteurs du PNNS. Chaque année, ce programme représente près de 10 millions d’euros, co-financés par l’Assurance maladie et l’État. Entre 2006 et 2010, 13 millions d’euros ont été dépensés dans le cadre du programme de nutrition, PNNS 2, pour la prévention et la prise en charge de l’obésité. Ce n’est qu’une petite partie du deuxième volet du PNNS, dont le coût total s’élève à 47 millions d’euros. C’est un million de plus que pour le premier PNNS en 2001. Cette somme est principalement dédiée à la communication, soit près de 10 millions d’euros consacrés aux actions de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (Inpes). Spots publicitaires, affiches pour inciter les Français à pratiquer une activité physique ou encore plaquettes d’éducation alimentaire distribuées dans les écoles, ces exemples rendent compte des efforts de l’Inpes pour sensibiliser

la population. L’industrie agroalimentaire dépense, quant à elle, près de 2 milliards d’euros pour promouvoir ses produits. Un combat inégal, dont le PNNS espère tout de même sortir gagnant, malgré le manque de moyens financiers. « C’est certain, il nous faudrait davantage d’argent, mais une des solutions serait de réduire la promotion excessive de ces aliments aux heures où les enfants regardent la télévision », explique le professeur Hercberg, « des négociations doivent d’ailleurs être organisées prochainement pour parvenir à un accord avec ces entreprises ». Faute de faire pression sur l’industrie agroalimentaire, le PNNS pourrait renforcer l’efficacité de la prévention. Selon Carolina Werle, professeur de marketing à l’Ecole de Management de Grenoble, les campagnes contre l’obésité infantile ne sont pas assez fortes. Dans une étude1 sur les messages de prévention, son groupe de recherche remet en cause le travail de l’Inpes. « Les messages de l’Inpes mettent surtout en avant les dangers de l’obésité sur la santé, un aspect qui n’intéresse pas les jeunes. Les adolescents sont généralement en bonne santé. Les moqueries dans la cour de récréation contre un enfant obèse ou en surpoids, et l’exclusion qui en résulte les touchent beaucoup plus », argumente la chercheuse. Faut-il donc que le PNNS investisse dans une communication plus choquante, en utilisant l’exclusion sociale ? « Pas du tout », répond Serge Hercberg, « il ne faut pas considérer le PNNS comme étant uniquement un programme de communication contre l’obésité. Il s’agit d’un cadre de réflexion qui permet de mettre en place des actions, dans les écoles, associations ou entreprises pour sensibiliser la population aux bienfaits d’une alimentation équilibrée. Cela comprend la prévention de l’obésité, mais aussi celle d’autres maladies comme l’ostéoporose ou le cancer ». Le professeur Hercberg reste confiant. « Avec le PNNS 3 qui

Recherche sur les messages de prévention de l’obésité, menée par une équipe de Grenoble, Ecole de Management de l’Université Pierre Mendes France.

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Une affiche de la campagne du PNNS, de novembre 2010, dans la station de métro Gare de Vaise, à Lyon.

s’étendra de 2011 à 2015, nous espérons obtenir le même budget et peutêtre même un peu plus ». Un budget qui, comme les années précédentes, ne comprendra pas les actions individuelles locales mises en place par les collectivités territoriales et les associations. « Quand une association organise des cours de cuisine à Toulouse, ça ne fait pas partie de nos projets initiaux, mais peut rentrer dans le cadre du PNNS. Ces initiatives, il y en a des milliers et nous ne pouvons pas les comptabiliser, ni évaluer leur impact ». De la même manière, mesurer aujourd’hui l’efficacité de l’ensemble du PNNS reste illusoire. « C’est prématuré d’un point de vue scientifique. Dix ans c’est insuffisant pour une évaluation réelle de nos actions », répond Serge Hercberg. « Observer la diminution de l’obésité à si court terme est difficile. Il faut attendre de voir les effets de notre travail sur les générations suivantes ». Le PNNS se laisse donc encore cinq ans avant de pouvoir constater un possible recul de cette maladie

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CULTURE

Les rondeurs dans l’art

La vision contemporaine, qui omet les sujets obèses dans l’art, s’est construite au gré de l’histoire de l’humanité. Nous avons rencontré Pierre Lacôte, médiateur-conférencier au Musée des Beaux Arts de Lyon. Fernando Angulo Botero

est un peintre et sculpteur colombien. Né en 1932, il est réputé pour ses productions aux courbes gourmandes. Ses personnages n'expriment pas de sentiments, sont tapis dans l'impartialité, la sagesse. Une attitude qui malgré leur poids, leur confère une impression de légèreté et de souplesse. Botero dira à propos de ses sujets : « Gros, mes personnages ? Non, ils ont du volume, c'est magique, c'est sensuel. Et c'est ça qui me passionne : retrouver le volume que la peinture contemporaine a complètement oublié. » En haut à droite, la Joconde façon Botero.

PAR LUCAS DEMANGEAT

«I

l faut voir l’art comme un reflet de la société », explique Pierre Lâcote. « Dans l’histoire, les artistes ont joué leur rôle, en s’employant à représenter le corps tel qu’il l’est dans la société ». Aujourd’hui, la production artistique est fascinée par un idéal unique du corps parfait, seule référence : « Le modèle photographique regroupe toutes les représentations du corps qui passent par l’écran. La photo, le cinéma, la télévision, la publicité forment un miroir aux alouettes qui n’est plus un reflet de la société. On vit avec un corps rêvé, idéalisé par tous les écrans que nous connaissons », commente t-il. Dans l’art contemporain, il y a bien Picasso, Magritte, Matisse, Botero, qui déforment le corps humain. Qui lui confèrent des formes généreuses. Mais leurs sculptures, leurs toiles, se fondent dans le modèle photographique. Le paradoxe, c’est que la production artistique ne correspond pas à la société d’aujourd’hui, où la population d’obèses augmente. Pierre Lacôte analyse cette contradiction : « Ce n’est plus une image réelle du corps mais une image qui correspond à un désir. Une société qui a envie d’être est en mal d’être ». Une préhistoire féconde En remontant aux origines, on remarque que la préhistoire a vu naître les premiers sujets obèses, il y a 25 000 ans. Des chercheurs ont déniché dans les Pyrénées, au début du siècle dernier, une statuette préhistorique aux formes extrêmement généreuses. Malgré ses dix-sept centimètres de haut, on lui connaît d’énormes cuisses et seins disproportionnés. Cette Vénus de Lespugue est conservée au musée de l’Homme à Paris. On la considère comme une des premières apparitions de l’obésité dans l’art religieux. Les historiens sont d’accord pour attribuer à ces caractéristiques physiques hors normes un symbole de fécondité. Ainsi, l’obésité devait représenter à l’époque la faculté de reproduction.

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Un bond dans l’histoire Vingt-mille ans plus tard, la production artistique de l’antiquité mène la vie dure aux sujets obèses. « On peut comprendre les artistes grecs, si on voit l’art comme un miroir de la société », explique Pierre Lacôte. On peut admirer les corps parfaits, statufiés des dieux de l’Olympe, parce que la civilisation grecque cultive son corps. Dans l’antiquité et à Athènes, l’obésité représente le déclin, la fin de carrière : « C’est un modèle qui a traversé les âges, d’une certaine façon, indique-t-il. Napoléon empereur est toujours peint comme un César, omnipotent, fort et capable de mener une armée. Les peintres le représentent bouffi, empâté, une fois vaincu et prisonnier » continue le médiateur-conférencier. Pourtant, la corpulence, les formes et les rondeurs n’ont pas été absentes des chevalets de l’histoire. L’exigence réaliste du baroque impose à Peter Paul Rubens, peintre flamand, de reproduire les courbes des corps qui l’entourent. Pierre Lacôte poursuit : « Rubens vit, mange et festoie dans le milieu bourgeois des Flandres du XVIe siècle. Il côtoie essentiellement des personnages charnus, qui vivent dans l’opulence d’une province prospère, par le commerce et l’agriculture. » Et Peter Paul Rubens ne voit aucun inconvénient à tirer un tel portrait de la société flamande de l’époque. C’est le travail qui lui est demandé. Au même moment, toujours au XVIe siècle, le baroque italien porte un tout autre regard sur le corps. Les toiles montrent des êtres très élancés, maigres, dans la douleur. L’Italie est alors une province plus pauvre, qui connaît par épisodes la famine. En Europe, le schisme entre l’Église catholique, au sud, et l’Église protestante, au nord, scelle les oppositions entre Italiens et Flamands. Il va de soi que l’artiste est au cœur de ce mécanisme, Nietzsche disait que c’est un être compromis. « Parce qu’il se conforme à la demande de l’amateur d’art, aux exigences de la photographie... » conclut Pierre Lacôte. Parce qu’il en a les moyens, l’artiste devrait s’affranchir du standard de la maigreur, de cette lecture unique de la beauté. Une mission herculéenne, dans un contexte actuel qui généralise l’idéal

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La corpulence dans le téléviseur Les médias réservent aux obèses un espace bien maigre. Trop souvent absents, leurs apparitions nous laissent pourtant deviner un gros potentiel. Notre télécommande s’est arrêtée sur le programme Belle Toute Nue, poids lourd des deuxièmes parties de soirée sur M6.

©Adventure Line Production

À

la télévision, il y a bien Guy Carlier, qui a côtoyé Marc-Olivier Fogiel, sur le plateau d’«On ne peut pas plaire à tout le monde». Pierre Ménes, qui donne des leçons de jeu aux téléspectateurs du Canal Football Club. Il y a Magali, Luce, qui ont triomphé respectivement de la Star’Ac et de la Nouvelle Star. Il y a Marianne James, qui a égayé le jury de cette dernière production. Il y a Laurence Boccolini, e x - p r é s e nt at r i c e impitoyable du Maillon Faible de TF1. Et il y a des gros moins hors du commun. Ceux qui n’ont pas cultivé leur aisance en public, ou un don particulier. Ces personnes ordinaires regardent aussi Belle Toute Nue. Un programme incongru, diffusé sur M6 et produit par Adventure Line Production, qui met en scène des personnes enrobées désireuses de mieux accepter leur corps. Ronith Cohen, rédactrice en chef de l’émission, nous fait passer de l’autre côté du petit écran : « En France, 87 % des femmes disent ne pas être à l’aise avec leur corps. Alors que la taille moyenne du pays, 40-42, est basse. Nous avons adapté le programme anglais « How to look good naked » en conscience de ce malaise. Nous voulions rétablir l’image de la femme .» Le principe est simple. L’animateur-styliste de Belle Toute Nue, William Carminolla met en confiance les candidates grâce à une série de mises en scène de leur propre corps. Il les présente au milieu de mannequins taille XL, soumet des photographies des candidates au regard souvent clément des Parisiens. Jusqu’à la dernière séance-photo nue, détaille Ronith Cohen :

« À ce moment là, voir son corps exposé sur un panneau publicitaire ou sur un bus, dans la rue, alors qu’on ne s’aime pas, est un électrochoc. Le but c’est de déculpabiliser les femmes en montrant que la beauté et le charme passent avant tout par la confiance en soi. » Si les obèses ont du mal à s’accepter, c’est aussi parce que la télévision renvoie une image du corps qui n’existe pas, du corps parfait. Et Belle Toute Nue est un programme unique en son genre, contradictoire avec l’image télévisuelle prédominante du corps. Quand on soumet la remarque à la rédactrice en chef d’Adventure Line Production, Ronith Cohen évoque la diversité des programmes : « Il faut de tout. Il y a aussi le fait que les femmes soient des cibles marketing pour les industries cosmétiques, textiles, les régimes... Et la conséquence se ressent forcément à l’écran. » Une jeune lycéenne sur trois en France est au régime. Partant de ce constat, la rédaction de la prochaine saison de Belle Toute Nue se délocalisera, pour une émission, dans un lycée parisien. L’objectif, démystifier les corps irréels de la mode, de la télévision, du cinéma, aux yeux des lycéennes. William Carminolla leur expli quera que les retouches sont omniprésentes, qu’il est facile de rendre plusque-parfait un mannequin déjà proche de la perfection. Il leur permettra même de réaliser l’expérience Photoshop, le temps d’une séance-photo : « Nous avons fait cela parce que nous sentons le danger. L’émission cible particulièrement les femmes de moins de 35 ans. Ces gamines voient des corps maigres dans les clips, se réfèrent aux défilés de mode. Pour les stylistes, et c’est le terme qu’ils utilisent, les mannequins sont des « cintres ». Pour que le vêtement tombe bien. Personne au fond de soi ne veut ressembler à un cintre. » Et ça marche. Plus de trois millions de téléspectateurs ont regardé la première de Belle Toute Nue, fin 2008. Premier programme convoité des ménagères de moins de cinquante ans, les soirs de diffusion. L’émission a résisté aux codes de la maigreur. Le petit Poucet d’Adventure Line Production, est ainsi devenu en une nuit une grosse pointure dans la programmation de la sixième chaîne L.D

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Pour son lancement mardi

9 décembre 2008, Belle Toute Nue a rassemblé 3,3 millions de téléspectateurs sur M6. La part d'audience du programme a atteint 22 % sur les quatre ans et plus et 32,4 % sur les ménagères de moins de cinquante ans. L'émission a pris le relai du show anglais How to look good naked ?, qui s'est achevé sur sa quatrième saison fin 2008. D'autres adaptations du programme british ont vu le jour aux États-Unis, en Belgique, en Italie, en Suède, en Pologne et en Israël.

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Marion fait partie des 22 finalistes du concours Miss Ronde France 2011. Elles étaient 38 candidates à avoir tenté leur chance cette année. 31 autres ont déjà proposé leur candidature pour l’année 2012.

« Sur scène, je me sens comme tout le monde » Le 10 décembre prochain, à Calais, Marion Garcia, 23 ans, sera en lice pour devenir la prochaine Miss Ronde France. PAR SARAH DUVERGER

«J

’aime faire des choses un peu folles. Je me suis lancée en me disant que, quoi qu’il arrive, cela m’apporterait une expérience hors-du-com30 | Décembre 2010 | Le Poids

mun. » Quand Marion a appris qu’il existait une élection de miss pour les filles rondes, elle n’a pas hésité à se présenter. À 23 ans, la jeune femme originaire de Villefontaine, dans l’Isère, s’est battue contre ses rondeurs pendant 17 ans. Elle a commencé à voir une diététicienne, dès l’âge de 6 ans : « Je devais noter tout ce que je mangeais, je ne pensais plus qu’à ca ». Membre d’une grande famille recomposée, Marion a six frères et une sœur. Alors, quand elle voit les garçons prendre une crème au chocolat dans le frigo et qu’elle doit se contenter de son yaourt

2005 : année de création du concours Miss Ronde France par Thierry Frézard. Ce psychothérapeute cherchait une solution pour valoriser les femmes rondes qui défilaient dans son cabinet. www.missronde.fr

allégée, elle fulmine : « c’est injuste ! J’aurais rêvé d’avoir un métabolisme qui me permette de ne pas prendre de poids ». Car Marion est une épicurienne : « Je suis gourmande, je n’y peux rien ! J’aime le pain, le chocolat… Ma mère me dit souvent « Marion, est ce que tu as vraiment besoin de manger ça ? » Non, je le sais très bien mais j’en ai envie et comme dit ma grandmère « Quand on a envie, cela ne fait pas grossir » raconte-elle en riant. Elle ne s’est jamais sentie bien dans sa peau. En classe de troisième, elle pèse déjà 80 kg pour 1 m 55 : « Les années collège ont été difficiles. Il y a toujours un groupe de jolies filles qui plaisent aux garçons et puis un autre mis à l’écart et dont tout le monde se moque. Je faisais partie du second. » Puis, à 17 ans, elle décide de commencer le théâtre à Villefontaine avec la compagnie : « Il était une fois ». Le début de son conte de fée à elle. La timide Marion se transforme en jeune fille sûre d’elle-même. Elle commence à faire plus attention à la manière dont elle s’habille, se maquille. C’est aussi le moment qu’elle choisit pour arrêter son suivi avec sa diététicienne. La scène devient pour elle une évidence : « Paradoxalement, moi qui me suis toujours cachée, j’ai besoin d’être sur les planches, là où l’on me voit. C’est un endroit où je me sens comme tout le monde ». Du haut de ses 1 m 67 pour 82 kg, Marion arrive enfin à accepter son corps tel qu’il est. D’une scène à l’autre, Marion défilera sur un podium le 10 décembre prochain. Si elle gagne, elle ne se voit pas militer pour la cause des rondes : « Nous ne sommes pas une espèce en voie de disparition » ironise-t-elle. Elle avoue tout de même peiner à trouver des vêtements qui lui plaisent. Même dans les catalogues grandes tailles, les mannequins ne lui ressemblent pas. En revanche, l’élection lui permettra de réaliser un de ses rêves de petite fille : être une princesse le temps d’une soirée. Hors-norme peut-être, mais une princesse tout de même

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Sarah Duverger

TENDANCES


TENDANCES

XXL, mais pas sac poubelle ! Pas facile quand on dépasse la taille 44 de trouver des vêtements. Les grandes enseignes de prêt-à-porter excluent ces clientes rondes, d’autres se contentent d’agrandir les modèles existants ce qui ne convient pas forcément au corps des personnes en surpoids. Magasins spécialisés, sites internet, il existe pourtant des bons plans pour trouver des tenues originales, bien coupées et à des prix raisonnables. La vente par correspondance Que ce soit Les 3 suisses ou encore La Redoute, les catalogues de vente par correspondance proposent de vraies collections de vêtements grande taille jusqu’à la taille 60. Mention spéciale à La Redoute qui collabore avec

des personnalités rondes comme Marianne James ou la bloggeuse Big Beauty (voir encadré) pour créer ses collections. L’assurance d’avoir un vêtement qui mettra vos formes en valeur. Les magasins spécialisés Les prix y sont souvent élevés mais vous pouvez y trouver des conseils précieux auprès des vendeurs. À Lyon, coup de cœur pour la boutique Mot de Passe, 138 cours Lafayette dans le 3e arrondissement (jusqu’au 70). D’autres magasins comme Kiabi (photo), Gémo ou encore Vêt Affaires ont aussi des collections grandes tailles (jusqu’au 60). Idéal pour les basiques mais les tenues restent simples sans grande originalité. Les sites internet Si du côté français, on reste encore frileux sur les grandes

tailles, les Anglais ont depuis longtemps développé de vrais collections : Beth Ditto, la chanteuse de Gossip, vient de créer sa deuxième ligne de vêtements pour le site Evans (du 42 au 60). Autres bons plans outre-manche, New Look ou Dorothy Perkins. Pour commander, n’oubliez pas de vous munir d’un tableau de correspondance des tailles : www. labonnetaille. com. Si vous préférez rester en France, rendez-vous sur Castaluna. com. Le site français consacré exclusivement à la mode grande taille vous propose notamment des bottes avec différentes largeurs de mollet

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SARAH DUVERGER

©La Redoute / ©Gossip

Quand les rondes prennent la pose Dans le monde de la mode grande taille, difficile de passer à côté du phénomène « Big Beauty ». Stéphanie Zwicky, 33 ans, a commencé par poster quelques photos de ses tenues de tous les jours sur son blog. L’idée : montrer que la mode ne s’arrête pas à la taille 44. Des photos travaillées, des vêtements originaux et qui mettent en valeur sa taille 50, il n’en fallait pas plus pour que la jeune femme originaire de Suisse devienne la porte-parole de toutes les rondes qui elles aussi veulent pouvoir suivre la mode. Depuis, une collection de prêt-à-porter pour le catalogue de vente par correspondance, La Redoute, un livre « Le it-book de Big Beauty » et une chronique beauté hebdomadaire pour l’émission de M6, « 100% Mag ». Mais surtout, Stéphanie a ouvert la porte à d’autres jeunes femmes comme Audrey Gaillard, créatrice du blog « Big or not to big ». Elle se définit elle-même comme « une grosse qui ose se faire plaisir avec la mode ». Audrey a créé son blog en mai 2009. Même recette avec les prises de vue de ses tenues. Pour cette intérimaire, le temps qu’elle investit n’est pas perdu. Elle reçoit de nombreux messages de ses lectrices : « Que mon petit blog aide certaines filles à s’assumer comme elles sont, je trouve cela extraordinaire et enrichissant ». http://www.leblogdebigbeauty.com http://big-or-not-to-big.over-blog.com

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