Le pointû

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Une nuit avec le Samu social Le Pointû

Le Pointû www.lepointû.fr Le magazine d’information du logement du jeudi 6 décembre 2007

Droit au logement opposable

Pourquoi

CULTURE L’ESPRIT CANUT

© Fabrice Caterini

rien ne va changer


À quoi va servir la loi DALO ? L’éditorial de Raphaële Djebari Le logement, un droit pour tous. Ce pourrait être le slogan de l’année 2007 en France. Rappel. Tout commence en janvier de cette année, l’association des Enfants de Don Quichotte dresse des tentes le long du Canal Saint-Martin à Paris et dans de nombreuses villes de France. Son objectif est sans ambigüité: assurer une visibilité maximale aux sans-abri en plein coeur des villes. Sous la pression médiatique et campagne électorale oblige, le gouvernement s’incline et il accouche, à peine deux mois plus tard, le 5 mars 2007, d’un bébé “miracle”, la loi DALO (Droit au logement opposable-ndlr). C’est une loi de plus sur le thème du logement social. Une loi de plus qui vient alourdir un vieux dispositif déjà bien poussiéreux. Fondamentalement, être contre le principe d’un logement pour tous paraît fort peu envisageable, mais tenter de résoudre le problème doit-il obligatoirement passer par l’élaboration d’une nouvelle loi ? Christine Boutin, ministre du Logement et de la Ville et rapporteuse de la loi, rabâche à longueur d’interview « il n’y a pas de logements ». Pourquoi alors ne pas les construire ces logements abordables ? Parce que pour cela il faut y mettre le prix. Et que l’Etat n’a pas les moyens. Oui mais voilà, le gouvernement doit bien réagir. Et dans ces cas là, le moins coûteux et le plus pratique reste de créer une nouvelle loi. Dans ce domaine, le législateur nous a habitués ces dernières années à pondre, dans l’urgence et dans l’émotion, des lois de circonstance. Pour le DALO, en tout cas, mieux aurait-il valu prendre son temps. Car la toute jeune loi est bien partie pour rejoindre le cimetière des textes plein de bonnes intentions mais inapplicables. La preuve ? Combien manque-t-il de logements sociaux dans l’agglomération lyonnaise ? Après plus de trois semaines d’enquête, impossible de savoir. Comme si le sujet était tabou ou que, tout simplement, personne n’était en mesure de nous renseigner. Il existe bien une étude réalisée à l’échelle nationale, mais localement, rien. Une loi doit être pérenne et non de circonstance. Elle nécessite du recul et non de la précipitation. Elle demande de l’analyse et non du simplisme. Il manque des logements sociaux en France, certes. Combien ? Et où ?

2 6 décembre 2007 Le Pointû

Autre point, autre paradoxe. En quête d’un logement, un demandeur peut saisir la Commission départementale de médiation. Si l’attente devient vraiment trop longue, il peut alors se tourner vers le tribunal administratif (à partir de décembre 2008-NDLR). Mais si la Commission n’a pas trouvé de logement, où le tribunal administratif va-t-il en dénicher un ? Lutter conte les logements indécents, aider les mal-logés, prendre en considération les revendications des sans-abri, voilà bon nombre de promesses liées à la loi DALO. A leur lecture, on se sent proche des gens, on palpe une certaine proximité, très éloignée du côté administratif dudit tribunal. Dans ce contexte, le tribunal d’instance, celui qui fait les frais de la réforme de la carte judiciaire, n’aurait-il donc pas été plus adapté ? Tribunal de proximité par excellence il était tout désigné pour traiter les demandes de logements sociaux. N’en déplaise à Rachida Dati.


SOMMAIRE 21

ÉCONOMIE

10

SOCIÉTÉ

UNE NUIT AU SAMU SOCIAL

16

LES MAISONS À 100 000 EUROS À LA PEINE

MONDE ÉTUDIANTS EN GALÈRE

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CULTURE LA SQUAT “WAY OF LIFE”

22

DOSSIER

DALO, LA LOI INVISIBLE LE POINTÛ - NUMÉRO SPÉCIAL

MONDE

LASER

ECONOMIE

L’éditorial............................................. par Raphaële Djebari..........................2

Zoom.................................................... le taux de l’immobilier.........................4 Les points du mois...........................6

SOCIETE

Santé publique.................................... Les logements insalubres...................9 Hébergement d’urgence Une nuit au Samu Social..................10 Style de vie.......................................... La collocation inter-âge....................12 Immigration ........................................ Les Roms de Décines......................13 Architecture ........................................ Le quartier Tony Garnier...................14 Bénévolat............................................. La guerre des associations...............15

Logement universitaire...................... Étudiants étrangers en galère..........16

Politique............................................... La loi SRU dans le Grand Lyon........18 Construction ...................................... Les pelleteuses envahissent Lyon....20 Pouvoir d’achat Les maisons à 100.000 euros..........21

EN COUVERTURE

Droit au logement opposable............ Ce qui ne va pas changer à Lyon.....22

Loi DALO............................................. Décryptage.......................................24 Interview............................................. Christine Boutin................................26

CULTURE

Art/Musique Les squats, vivier de....... talents...............................................27 Histoire La Croix-Rousse et les........... Canuts..............................................29

TENDANCES

Construction Les objets...................... écologiques.......................................30 Insolite Des constructions sorties du chapeau............................................31

LE POINTÛ 47, rue Sergent Michel Berthet, 69479 LYON. Directeur de la publication Isabelle Dumas Directeur de la rédaction Alexandre Buisine Rédactrice en chef Raphaële Djebari Rédactrice en chef adjointe Marjorie Modi Chef d’édition / Secrétaire de rédaction Benoit Pavan Secrétaire de rédaction adjoint / Infographie Julien Bauer Rédaction Stéphane Rousset, Aurélie Beau, Bruno Poncet, Amandine Collongette, Adeline Bourg, Émilie Marche Illustration Thomas Dantil Photographie Fabrice Caterini.

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LASERLYON LES CRITÈRES DE CALCUL

IMMOBILIER

C

© Fabrice Caterini

ertains critères, souvent insoupçonnés, ajoutent une plus-value évidente à un appartement. D’autres, au contraire, sont rédhibitoires :

Du juste lieu...

- Vue imprenable - Bonne distribution des pièces - Grandes pièces de réception - Alarme - Appartement donnant sur un espace vert (dans un environnement urbain) Les facteurs très valorisants :

- Étage élevé sans ascenseur - Nuisance de voisinage (bruit de transports ou cour de récréation) - Chauffage au sol (dans des immeubles des années soixante) - Appartement en rez-de-chaussée - Plus de dix minutes à pied d'un transport en commun ou des commerces - Chauffage électrique Les facteurs très dévalorisants :

ET À LA LOCATION ?

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ù trouver un appartement à louer le moins cher possible ? À l’inverse, dans quel arrondissement de Lyon la location devient-elle un privilège ? Nous avons choisi de dresser un classement des arrondissements lyonnais en matière de prix à la location, tous appartements confondus (du T1 au T5). Pour les petits budgets, l’arrondissement le plus intéressant est sans conteste le 9 (Vaise, Gorge-de-Loup, Duchère, IleBarbe), avec un prix moyen du mètre carré à la location de 8,415 euros . Viennent ensuite le 7 (Guillotière, Jean Macé, Gerland), à 9,33 euros , le 8 (EtatsUnis, Bachut, Mermoz, Moulin à Vent, Monplaisir) avec 9,58 euros , le 3 (PartDieu, Montchat, Dauphiné) à 9,59 euros , le 2ème (Cordeliers, Bellecour, Perrache) avec 9,85 euros et le 4 (Croix-Rousse Plateau) à 9,9 euros . Sans surprise le trio de tête est formé du 5 (Vieux Lyon, Fourvière, Point-du-Jour) à 10,1 euros , du 1 (Terreaux, Pentes CxRousse) avec 10,25 euros et du très chic 6 , ou le prix du m2 à la location frôle les 10,72 euros .

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Le Pointû

Comment un bien immobilier peut-il prendre ou perdre de la valeur ?

Propriétaire ou locataire, vendeur ou acquéreur, tous n’ont qu’un mot à la bouche : le prix. Comment est-il défini ? Éléments de réponse.

Q

PAR STÉPHANE ROUSSET

uel est le prix d’un bien ? “Celui qu’un acheteur voudra bien payer pour l’obtenir”, répondent les professionnels. Audelà de la boutade, pourtant vraie, il existe des critères qui font monter ou baisser le prix d’un bien immobilier, à l’achat comme à la location. De l’extérieur vers l’intérieur, vient en premier l’environnement: la proximité des commerces, des services publics, des écoles, des transports, essentiellement. Ensuite viennent la façade considérée comme la “carte de visite” de l’immeuble, et le type de bâtiment en lui-même. Est-il récent ou ancien ? A-t-il été “pensé” ou construit à la hâte, dans l’urgence, le besoin, etc ? Entre ces critères, visibles de la rue, et l’appartement à proprement parler, il y a les parties communes qui sont essentielles dans la valeur d’un bien immobilier. Sont elles en bon état, demandent-elles beaucoup d’entretien ? Le prix augmente aussi avec l’étage où se situe l’appartement. Dans la mesure où l’immeuble est équipé d’un ascenseur. Si ce n’est pas le cas, mieux vaut être au rez-de-chaussée pour vos jambes, mais au dixième étage pour votre porte-monnaie. Sans ascenseur, le prix baisse quand on prend de la hauteur. Tous ces critères sont ceux qui régissent en priorité le prix d’un appartement. Ce sont les éléments qui font la

réputation des immeubles chics dans les “beaux quartiers “.

Une fois arrivé dans l’appartement, le prix dépend essentiellement de la surface, mais pas seulement. L’orientation est sans aucun doute l’autre critère déterminant. Logiquement, un appartement très spacieux (mais sombre) dans un beau quartier, se vendra ou se louera moins cher que le même dans un quartier moins huppé, mais avec un ensoleillement maximal. Idem pour les vis-à-vis qui sont un véritable “couperet” pour les prix. Le nombre de pièces et les aménagements éventuels ne sont pas non plus négligeables. Si le voisinage ou la rue sont très bruyants, un appartement bien isolé avec un double vitrage efficace, prendra logiquement de la valeur. Enfin, un dernier facteur entre en compte: la valeur “d’usage”. Elle est différente pour chacun d’entre nous mais intervient à plus ou moins grande échelle dans la fixation du prix. Pour le sociologue Michel Pinçon (1), spécialiste de la géographie sociale de Paris, “Il y a, par exemple, une identification sociologique au quartier que l'on habite”. Il estime que “l'adresse choisie correspond à la valeur symbolique de l'immobilier. Habiter le coeur de Paris est une façon d'envoyer des messages: cela permet de dire par exemple que l'on appartient à une certaine communauté et cela a un prix”. Quant au prix du loyer, de nombreuses lois existent pour fixer des limites…mais souvent les loueurs n’en font qu’à leur tête Derrière la porte...

1. L’Express du 9 mars 2006 http://www.insee.fr/fr/indicateur/indice_loyer


... au juste prix Genay Prix moyen du m2 dans l’immobilier ancien Neuville St Germain des communes Montanay du Grand Lyon Curis Albigny en 2006 Fleurieu

Non communiqué Moins de 1500 euros De 1500 à 1700 euros De 1700 à 1900 euros De 1900 à 2100 euros De 2100 à 2300 euros De 2300 à 2500 euros De 2500 à 2700 euros Plus de 2700 euros

Cailloux Poleymieux Couzon Font St M Sathonay V Rochetaillé St Romain Fontaines s/S Limonest Sathonay C Collonges St Didier Rillieux Dardilly St Cyr

Source: Notaires de France

La Tour de Salvagny

Champagne

Marcy l’Etoile Ecully Charbonnières St Genis Tassin les Ollières Craponne Francheville

9e

Caluire 4e 1er

5e St Foy

6e

Décines

Meyzieu

3e 2e 8e

7e

Bron

Mulatière Oullins

St Genis

Jonage

Vaulx-en-Velin

Villeurbanne

© Infographie: Julien Bauer

LASERLYON

Irigny

Pierre Bénite

Vénissieux St Fons

Feyzin

Corbas

Chassieu

St Priest

Mions

Vermaison Charly Solaize

Le Pointû

6 décembre 2007 5


LES POINTS DU MOIS

A

DON QUICHOTTE, LE RETOUR ?

Pour info...

veaux campements "avant le 15 décembre". L'objectif de l'association est de "mettre à l'abri des gens qui sont à la rue cet hiver". Première destination, les abords de la Seine à Paris. Mais d'autres lieux sont envisagés comme "les églises, les temples, les lieux de culte"

Votre logement ne doit pas faire moins de 9m². Un décret national fixe les caractéristiques d'un logement décent. La surface minimum en fait partie

LE CHIFFRE DU MOIS

17%

C'est le pourcentage moyen d'augmentation des loyers entre 2001 et 2006. Selon un rapport de l'Union Nationale de la Propriété Immobilière (UNPI), la taxe d'habitation aurait, elle, subit une hausse moyenne de 33% pour la même période. Conséquence, 37% de profits réalisés par les villes, les départements et les régions 6 6 décembre 2007

Le Pointû

© Fabrice Caterini

ujourd'hui, même s'il y a des avancées, nous jugeons le verre plutôt vide que plein". Dans un entretien accordé le 2 décembre au Journal Du Dimanche, Augustin Legrand, porte-parole de l'association Les Enfants de Don Quichotte assure qu'il compte établir de nou-

À venir

Le projet de loi sur l'indexation des loyers sur les prix sera présenté le 12 décembre en Conseil des ministres. La loi devrait entrer en application le 1er janvier prochain

Boutin reçue par le Sénat

Augmenter de 10 millions d'euros le budget destiné à la lutte contre l'habitat indigne et à la réhabilitation des logements insalubres. Voilà l'objectif de la Commission des Affaires sociales du Sénat pour aider à l'application de la loi DALO. Le 28 novembre dernier, dans le cadre du projet de loi des finances 2008, les sénateurs ont reçu, entre autres, Christine Boutin ministre du Logement et de la Ville. Au centre des débats, la loi DALO. La ministre a reconnu l'existence des difficultés d'application de la loi, mais s'est dite prête à tenir les échéances du calendrier. La commission exige qu'un rapport évaluant l'efficacité des dépenses fiscales en faveur du développement et de l'amélioration de l'offre de logements soit remis chaque année au Sarkozy sur le logement opposable Parlement


PAR LA RÉDACTION

Entre voisins

Les coopératives d'habitants : une alternative intéressante pour Habicoop. L'association lyonnaise souhaite faire connaître ce nouveau mode de logement. Un seul mot d'ordre : la collectivité. Les locataires gèrent et améliorent ensemble la propriété qu'ils occupent. Ce système accessible aux personnes exclues du marché immobilier offre de nouveaux rapports de voisinage. Une solidarité qui a déjà fait ses preuves au Québec et en Suisse. Habicoop veut lancer l'idée à Lyon. Son but : aider à la création de projets collectifs et promouvoir ce nouveau service. L'association organise des colloques et conférences pour faire connaître les coopératives. Des manifestations à retrouver sur www.habicoop.fr

La structure d'hébergement temporaire Alias, située à Villeurbanne et Vaulx-enVelin, risque de fermer ses portes le 31 décembre. Cette association essaye de réinsérer les 18-25 ans. Mais la société Adoma, gérant d'Alias, a refusé l'an passé de renouveler le bail des vingt-sept studios du dispositif. Au motif que ceux-ci ne faisaient plus partie de la nouvelle mission d'accueil d'Adoma. Les jeunes accueillis jusqu'ici dans les locaux pourraient se retrouver à la rue

Une journée pour les mal logés

Comme chaque année, l'ALPIL organise le 14 décembre le Marathon Taudis. Pendant une journée, place Croix-Paquet, dans les locaux de l'association, des avocats, des juristes, des travailleurs sociaux et des professionnels de l'immobilier seront présents pour répondre aux questions de chacun sur le logement. Cette journée est organisée en partenariat avec la Fondation Abbé Pierre

TEXTO François Fillon a annoncé qu'à partir du 1er janvier les choses allaient changer. Au programme : la réduction du dépôt de garantie à un mois et l'indexation des loyers sur l'inflation. Fadela Amara, secrétaire d'Etat chargée de la Politique de Ville, a dévoilé le 30 novembre, lors d'une interview sur Canal+, quelques points de son Plan Banlieues. Un programme destiné à améliorer la vie dans les cités qui sera mis en place le 22 janvier. “Je vais être très exigeante avec les bailleurs, a-t-elle déclaré, et je vais faire en sorte qu'on permette aux gens de vivre correctement”

© Fabrice Caterini

© Fabrice Caterini

Fin de série pour Alias ?

UN TOIT POUR TOUS

Lutter contre la discrimination au logement, voilà la caractéristique principale de l'année européenne de l'égalité des chances en RhôneAlpes. Un sujet sensible sur lequel plusieurs acteurs régionaux se sont penchés. L'objectif: promouvoir la non-discrimination dans les procédures d'accès à un appartement. Le projet prévoit une enquête auprès du parc immobilier privé et public. Un certain nombre de tests seront proposés afin de mesurer les pratiques susceptibles d'engendrer des discriminations. Ces dernières sont très souvent liées à l'origine ethnique ou au sexe. On assiste à des phénomènes de ségrégation urbaine ou de repli communautaire. La Région Rhône-Alpes est une zone test. Elle met en place un observatoire local qui pourrait être repris dans d'autres régions si l'expérience s'avère concluante

Le Vieux Lyon exporté à Dubaï

Un homme d'affaire de Dubaï, Buti Saeed Al Ghandi a décidé de recopier le quartier du Vieux Lyon dans sa ville. Le milliardaire est tombé amoureux de ce quartier lyonnais. Les appartements typiques du Vieux Lyon en plein désert des Émirats Arabes Unis seront revendus à des particuliers. Une aubaine pour l'adjoint au rayonnement international Jean-Michel Daclin qui en profite pour signer des partenariats. Une ligne aérienne Lyon-Dubaï est en discussion

Des murs (en)fumés

L'aérogel, ou “fumée glacée”, est le composant miracle du XXIe siècle, selon le quotidien Britannique The Times. De quoi s'agit-il ? D'un des solides les plus légers au monde (99% de gaz), capable de résister à des températures de 1300°C ou à une explosion d'un kilo de dynamite. Si l'on y ajoute des propriétés d'isolation thermique et la capacité de piéger la pollution urbaine, vous avez là le matériau idéal pour les murs du futur. Cela a d'ailleurs déjà commencé : Bob Stoker, 66 ans, est devenu cette année le premier Britannique à posséder une maison entièrement isolée par de l'aérogel. C'est pour quand sur Lyon ?

Le Pointû 6 décembre 2007 7


LES POINTS DU MOIS

© Fabrice Caterini

La Région expérimente l'habitat passif. Cette alternative écologique remplace le chauffage traditionnel. Grâce à une isolation extrêmement performante, l'air ne passe pas dans le bâtiment. Des systèmes de

L'hébergement d'urgence rendu difficile

Le Plan d'Action Renforcé en faveur des Sans-Abri (Parsa) permet la mise à disposition de places dans les centres d'accueil pas seulement en hiver mais toute l'année. Ce plan n'a pourtant pas que des effets bénéfiques. “On a moins de places disponibles avec ce plan, explique Sébastien Guth du foyer Notre-Damedes-Sans-Abri”. Ainsi, par puits canadiens et de réserves rapport à l'an dernier, trois de soleil fournissent l'énergie fois plus de personnes n'ont nécessaire pour chauffer l'im- pas trouvé pas de solutions meuble. Les premiers essais d'hébergement. “Cela ne veut pas dire que les perdevraient être effectués à Firminy. Seul obstacle au pro- sonnes à la rue sont sans jet : les standards officiels de solution, temporise Christophe Bay, secrétaire calcul thermique. Ils ne pergénéral de la préfecture du mettent pas de recenser les Rhône. Souvent, les gens bâtiments sans système de ne rappellent pas” chauffage “habituel”

8 6 décembre 2007 Le Pointû

© Fabrice Caterini

Se chauffer au soleil

L'un part, l'autre reste

Le 31 décembre prochain, les Plans Départementaux d'Actions pour le Logement des Personnes Défavorisées (PDALPD) arrivent à échéance. De nouveaux plans, dont on ne connaît pas encore la teneur, devraient être mis en place. Un indice : ils doivent tenir compte de la loi ENL (Engagement National pour le Logement) qui a pour objectif prioritaire de développer l'offre de logements pour les plus démunis, prévenir les expulsions locatives ou encore lutter contre l'habitat indigne. Ces nouveaux PDALPD seront arrêtés au plus tard au terme des plans en cours


SOCIÉTÉ SANTÉ

Allô maison, bobo © Fabrice Caterini

On estime à 8500 le nombre de logements insalubres dans le Grand Lyon. Chaque année, la Préfecture ne délivre pourtant qu’une quinzaine d’arrêtés d’expulsion (1). Les procédures sont complexes et les locataires ont peur.

E

PAR AURÉLIE BEAU

lla vit avec ses quatre enfants dans un immeuble à Oullins. Carreaux cassés, peintures écaillées, présence importante de plomb, fenêtres ouvertes jour et nuit pour combattre l’humidité. Depuis sept ans, elle n’a pas le choix. Une situation également difficile à supporter pour sa fille Rhianna : “l’été, ça va encore, on peut jouer dans la cour, mais l’hiver, on est obligé de rester là. C’est triste et on n’arrive pas à dormir avec la route juste à côté”. La famille attend des solutions de relogement. L’immeuble pourrait être évacué. Sylvie Marak, de l’ALPIL (Action Pour L'Insertion Sociale par le Logement), connaît bien le dossier. Des appartements ont bien été rénovés mais la structure reste limite : “fissures, écoulement d’eau, l’extérieur compte aussi en insalubrité mais les propriétaires font juste le minimum pour ne pas être signalés aux services de l’habitat”. Les cas d’insalubrité sont détectés par plaintes des associations ou des locataires aux services spécialisés des communes. À Lyon, c’est la Direction de l’Ecologie Urbaine qui évalue les critères : gros oeuvre, éclairage, surface habitable, dangerosité… et transmet son rapport au Préfet. À lui de déterminer alors s’il délivre un arrêté. En cas de gros risques, le propriétaire se doit de reloger tous les habitants dans un délai de six mois. Des démarches longues qui n’abou-

tissent pas toujours : “les proriétaires ne sont pas souvent de bonne foi. Le relogement est obligatoire mais certains préfèrent compenser avec des indemnités”. Sylvie Marak avoue même en avoir déjà vu “remettre” les locataires dans le même immeuble. Les habitants de logements insalubres sont, le plus souvent, des personnes fragiles : familles démunies, étudiants étrangers, retraités malades. Ils subissent des pressions de la part de leur propriétaire. Si certains répondent en refusant de payer leur loyer, la plupart restent silencieux. Ils ne veulent pas démarcher auprès de la justice de peur d’être mis dehors. “Récemment, on a trouvé 40 personnes qui

vivaient dans un F2 depuis des mois. Ça n’a jamais été signalé. À Lyon, il y a beaucoup de “mouchoirs de poche”, des familles qui s’installent durablement dans des greniers de 9m²”. À peine 10 m² pour vivre dans des logements vieux et vétustes, les risques sont importants. Depuis le 20 mars 2002, la Ville met en place un programme de réhabilitation de 800 logements jusqu’à la fin de l’année. Les secteurs intramuros les plus concernés restent le quartier de la Croix Rousse ainsi que celui de la Guillotière. Deux anciens secteurs lyonnais n’ayant connu aucune rénovation depuis les années 50 1. Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales

INSALUBRITÉ: DANGER POUR LA SANTÉ

H

ormis les risques d’éboulement ou de chutes, les logements insalubres représentent un vrai danger pour la santé. En particulier dans les appartements anciens, construits dans les années 30-40. À cette époque, le plomb était un outil indispensable dans le milieu du bâtiment. Ce n’est qu’en 1948 qu’une loi interdit l’usage de ce matériau et de produits dérivés dans l’habitat. Soixante ans plus tard, les matériaux anciens sont encore source d’intoxication. La maladie la plus répandue reste le saturnisme. Le Docteur Anne-Marie Mckenzie, inspecteur de la santé à Lyon, s’est souvent retrouvée désarmée face à cette pathologie : “il n’y a pas de signes cliniques pour détecter le saturnisme. Les séquelles apparaissent principalement chez l’enfant, quand il grandit. Il a des problèmes de croissance, et son QI se dégrade. Nous ne pouvons faire que de la prévention”. Il en est de même pour les intoxications au

monoxyde de carbone. Ce gaz asphyxiant est inodore. “Les cas sont souvent recensés dans des logements vétustes où les appareils de chauffage sont en mauvais état. Il faut faire très attention, l’année dernière, vingt-sept personnes ont dû être hospitalisées”. Aujourd’hui, on limite les risques. Tout vendeur de logement dans un immeuble datant d’avant 1948 doit faire un constat d’exposition au plomb et un contrôle technique des installations de chauffage. L’insalubrité provoque également des risques insoupçonnés pour la santé. L’humidité entraîne des problèmes de ventilation et la moisissure favorise les infections. Il n’est pas rare que l’asthme se développe dans des conditions de vie précaires. De même, la cohabitation avec des insectes ou des rongeurs est très mauvaise. Aussi incroyable que cela puisse paraître, le docteur Mckenzie en atteste: “On a déjà vu des enfants se faire manger par des rats!” Le Pointû

6 décembre 2007

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© Fabrice Caterini

SOCIÉTÉ

Après quelques minutes de discussion, c'est une victoire pour l'équipe. Non seulement M. Piacontinot accepte de les suivre mais il admet que son état nécessite des soins. Si besoin, il se fera hospitaliser. L'équipe comprendra par la suite que c'est la honte qui a contraint Mr Piacontinot à l'immobilisme depuis un mois. Son ami explique qu'il souffre de diarrhée. Dans l'immédiat, une infirmière peut l'examiner, mais Espéranza sait que la solution proposée n'est que provisoire. Malgré son état, le lendemain, il sera à nouveau en détresse. 22 heures.

“On ne peut pas faire des miracles, mais on essaie de leur réchauffer le cœur "

REPORTAGE

Travailleurs de l’urgence Même si la rue ne connaît pas de saison, l'hiver est une période difficile pour les sans domicile. Seuls les plus faibles peuvent être logés, pour une nuit seulement.

C'

PAR MARJORIE MODI ET FABRICE CATERINI est assez frustrant car on voudrait pouvoir secourir tout le monde, mais malheureusement les places sont rares et seuls les cas urgents peuvent être traités". Esperanza a intégré l'équipe du Samu Social 69 depuis à peine trois semaines. Bien qu'elle se consacre à fond à sa mission, un sentiment d'impuissance prédomine. Et pour cause. Lyon dispose de 16 structures d'accueil hivernales, avec une moyenne de 54 places par structure. Pour la DDASS (Direction Départementale des Affaires Sanitaires et Sociales), qui coordonne les dispositifs d'urgence, l'occupation à 100% de ces structures atteste de leur utilité. Ce pourcentage montre surtout que la ville manque cruellement de structures d'accueil. Juste une nuit Si certains SDF préfèrent volontairement rester dehors, leur choix est souvent réfléchi: " la plupart du temps, ils doivent faire d'énormes concessions pour une nuit en foyer. Certains doivent se séparer de leur chien. Ils savent aussi que l'alcool y est interdit. Enfin, ils ont peur de se faire voler le peu qu'ils ont". 10 6 décembre 2007

Le Pointû

Elodie, membre de l'équipe “rive droite” du Samu social 69, tente de convaincre les SDF de dormir à l'abri. Généralement, s'ils acceptent, ils restent réticents sur certains foyers: “C'est surtout le “Père Chevrier” qu'ils veulent éviter, le foyer Notre Dame des Sans Abri. Ce foyer est connu pour être relativement sale. Ce qu'ils redoutent c'est ce qu'ils appellent “la cave”. Ils dorment sur des lits de camps, tous dans la même pièce, n'ont aucune intimité. Dans ces conditions, les vols sont très redoutés, alors la plupart ne dorment pas”. “Le plus dur, c'est eux qui le vivent” Chaque soir, la veille sociale dispose en moyenne d'une dizaine de places. Or, 90% des 500 appels quotidiens concernent les demandes de logements. Le travail des équipes de veille ne se résume donc pas uniquement au rôle de taxi social. Ces seize travailleurs de l'urgence participent quotidiennement à construire une relation de confiance avec les plus désocialisés: “On ne peut pas faire des miracles, mais on essaie de leur réchauffer le cœur”, explique Yafit, membre de l'équipe de la “rive droite”. “Ils nous font confiance car on n'est pas là pour les juger et ils le savent. Mais ce lien est très fragile. C'est pour ça que c'est important qu'ils nous voient tous les jours, même si c'est juste pour parler". La mission de ces travailleurs sociaux n'est pas évidente. Il faut faire des choix, très souvent dans l'urgence, mais comme le dit avec tristesse Esperanza: “c'est dur, oui, mais le plus dur, c'est eux qui le vivent”

Arrivé au centre d'hébergement, Daniel récupère des draps propres et découvre son “box”. Il est tard et le foyer semble endormi lorsqu'une vielle dame, d'origine roumaine, déboule du fond du couloir. C'est Anna, l'équipe la connaît bien. Elle se jette sur Anne, lui baise la main et se met à pleurer. Anna ne parle pas français, mais Anne comprend vite qu'elle souffre du dos. Elle devait se faire opérer la semaine précédente, mais une fois au bloc, elle s'est enfuie. Face aux hurlements de la vielle dame, l'équipe, impuissante, assure qu'elle repassera le lendemain.

1h15.


SOCIÉTÉ 21 heures. Ce soir, le Samu social dispose de 17 places d'urgence dans les différents foyers de la ville. La nuit est froide et l'équipe de la rive droite se rend rapidement compte qu'il n'y aura pas assez de couvertures. Près d'une heure après le début des maraudes, Yafit, le chauffeur, aide Elodie et Espéranza à se réapprovisionner au foyer Notre Dame des Sans Abri, situé rue Père Chevrier. Tout le monde ici les connaît. Certains s'empressent même de leur dire bonjour malgré le match de football, opposant Lyon à Barcelone, qui attire toutes les attentions.

Comme presque chaque jour depuis trois semaines, le Samu social rend visite à M. Bel Jelil et M. Piacontinot. Ils se sont installés, comme une dizaine d'autres sans domicile, sur le parvis de la paroisse Saint Michel près de la Guillotière. Ce campement de fortune abrite ce qu'ils ont de plus cher. Une dizaine de matelas jonchent le sol parsemé de nourriture et d'emballages. Sur place, l'équipe tente à nouveau de convaincre les deux SDF de passer la nuit dans un centre d'hébergement d'urgence. M.Piacontinot est malade, il ne se lève presque plus et doit se faire examiner. La veille, son ami M. Bel Jelil, avait promis qu'ils les suivraient.

21h45

Cela fait maintenant quatre hivers que M. Lagdane dort dans un garage. Il occupe un recoin d'un mètre carré environ où toute sa vie est entassée. Emmitouflé dans plusieurs couvertures, il affirme que "ce soir, il fait bon, il fait même chaud", alors que la température extérieure est négative. C'est très volontiers qu'il accepte une soupe et un café. L'équipe lui rend visite quotidiennement et souvent il les suit, mais pas ce soir. Demain, promis, il viendra.

23 heures.

Les deux équipes, “rive droite” et “rive gauche” se retrouvent au siège de Jean Macé pour une petite pause. Espéranza peut enfin déguster le poulet mexicain qu'elle attend depuis un moment. Cette pause, comme le dit Yafit, "elle est primordiale". C'est le moment où les deux rives font le point sur la soirée. Une fois le débriefing fait, l'ambiance est plus légère. Le temps de décompression est court, il ne leur reste que deux heures pour ramener un maximum de monde en foyer. Nous embarquons cette fois-ci avec l'équipe de la “rive gauche”.

0 heure.

Il n'y a pas eu beaucoup de signalements, ce soir, pour l'équipe de Julien, Anne et Benoît. Tout semble calme dans le centre ville. Benoît décide d'aller chercher Daniel sur les pentes de la Croix-Rousse. Daniel a 30 ans et vit depuis deux ans bien caché au pied d'un immeuble. Il accepte rapidement de suivre le Samu social. Une place est libre salle Kleber, à proximité de Fourvière.

1 heure.

Sur la route du retour, l'ambiance est pesante. La nuit semble finie. Nouveau signalement. La maraude doit se terminer à 2 heures, mais une jeune femme est dans un état critique place Carnot. À son arrivée, l'équipe doit faire face à une situation complexe. Nathalie, 32 ans, est connue du Samu social 69. Ce soir, elle a beaucoup bu, mais pas seulement. Son ami affirme qu'elle a aussi consommé des stupéfiants. Choix difficile. Le foyer ou l'hôpital ? Ce n'est apparemment pas la première fois que cette situation arrive. La jeune femme est conduite à la cour des miracles, la salle Kleber. Cette fois, c'est sûr, l'équipe a fini. La police prend le relais pour le reste de la nuit.

1h45.

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SOCIÉTÉ © Fabrice Caterini

TUZMF!EF!WJF

Colocation

inter génération

Depuis deux ans, Victoria Alvidor, retraitée de 92 ans, héberge Jiamin Lu, 25 ans, étudiante chinoise en droit international. Témoignage d’une colocation originale.

C

PAR AMANDINE COLLONGETTE

inq minutes se sont écoulées depuis que nous sommes dans l’appartement. La porte s’ouvre, Jiamin Lu nous accueille chaleureusement. Une toile de Madame Alvidor orne le mur. La sonnette retentit, c’est l’infirmière. Pause. Le temps de prendre place sur le canapé. Comment l’idée de vivre l’une avec l’autre vous est-elle venue ? Victoria Alvidor : Une dame qui venait bénévolement me tenir compagnie m’a soumis l’idée d’héberger une étudiante gratuitement en contrepartie de petits services. J’ai trouvé cette perspective intéressante. Par exemple, tous les matins, Jiamin Lu me prépare mon petit déjeuner et le soir mon dîner. Dans la journée, elle s’occupe de moi, elle m’ouvre la porte et m’aide à me relever quand je tombe. En résumé, elle me facilite la vie au quotidien. Jiamin Lu : J’ai connu ce concept grâce à une amie qui est venue vivre en France avant moi et qui résidait chez une personne âgée. Via l’association ESDES inter-générations, j‘ai ensuite rencontré Madame Alvidor. Quels sont les avantages et les inconvénients de cette cohabitation ? V.A. : Je n’y vois que des avantages. Je ne suis plus seule la nuit et la présence de Jiamin Lu me rassure. Elle est très cultivée, ce qui rend l’expérience d’autant plus intéressante. J.L. : Pour moi aussi il n’y a que des avantages. En vivant avec Mme Alvidor, j’améliore mon français. Et puis je suis très proche de la faculté, ce qui est très agréable. Mais le plus important, c’est que je me sens ici comme dans ma famille. La différence d’âge est-t-elle un problème ? V.A. : Malgré son âge, j’ai eu confiance en elle

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Jiamin Lu, 25 ans, partage le quotidien de Victoria depuis deux ans

tout de suite. C’est une jeune fille équilibrée. J.L. : Pour moi, la différence d’âge n’est pas un problème. En Chine, on fait beaucoup de choses pour les personnes âgées. Dès leur plus jeune âge, les enfants vont très souvent rendre visite à leurs grands parents. Comment se déroule votre quotidien ? V.A. : Tous se passe très bien. Chacune de nous vaque à ses occupations. Jiamin est libre de sortir quand elle veut. Il n’y a aucune obligation. Nous mangeons séparément. Il faut dire que je n’ai toujours pas réussi à me faire à la cuisine chinoise. J.L. : Mme Alvidor est quelqu’un de très ouvert, ce qui rend notre quotidien très facile à vivre. Je l’aide à s’habiller et à se déshabiller mais cela ne me gêne pas. Et si c’était à refaire ? V.A. : Cela fait deux ans que Jiamin habite ici. J’aimerai qu’elle reste encore pour quelques temps. Elle est sérieuse, fiable, ni menteuse, ni folichonne. Ça me ferait de la peine qu’elle s’en aille car elle fait partie de la famille maintenant. Si elle devait partir, je prendrais très cer-

tainement une autre étudiante. J.L. : Tout dépendra de mes études. L’année prochaine, j’irai peut-être à Paris ou à Toulouse. Je serai assez tentée d’habiter avec des jeunes, pour voir autre chose…

TENTÉ PAR L’EXPÉRIENCE ?

Unique structure basée à Lyon, l’association ESDES Services Inter générations (Tél 04.72.32.50.48)propose de faciliter vos démarches. Si vous êtes étudiants, rendezvous dans les locaux de l’association pour un entretien individuel. Principal critère de sélection: la motivation. Côté personnes âgées, l’association se déplace à domicile. Elle vous proposera une liste d’étudiants susceptibles de vous convenir pour constituer un binôme. Évidemment, cette opération a un coût. Compter 350 euros pour les étudiants et 100 euros pour les personnes âgées. Tarifs obligatoires pour adhérer à l’association pendant une année


SOCIÉTÉ © Bruno Poncet

REPORTAGE

Gipsy sitting

La cité des Marais, au Nord du canal de Jonage, abrite une communauté d’irréductibles gitans, sédentarisés depuis 40 ans.

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PAR BRUNO PONCET enez, n’ayez pas peur du chien !”. Décines, quartier des Marais. Au bord d’un rond–point, s’entassent quelques baraques. Des jeunes jouent au ballon à l’entrée, sur un bitume abîmé. Rien ne laisse présager qu’une communauté de gens du voyage vit ici depuis… 40 ans. Cette cité a pourtant été créée en 1960 pour accueillir les gitans : Tsiganes venus d’Espagne, d’Andalousie et de Catalogne. Pour parler de cette sédentarisation étonnante, la “paille belle” (“vieille femme” en gitan ndlr) de la citée des Marais est l’interlocutrice privilégiée. La route pour atteindre sa maison n’est pas aisée. Les caravanes et mobil-homes en bois d’un côté et maisons en dur d’un étage de l’autre se succèdent dans le grand lotissement. Une dame sans âge apparaît à la fenêtre. Elle a les cheveux blancs, le teint mat et une allure de jeune femme coquette. “Entrez !” . C’est Dolores Cortes, 83 ans, la doyenne du village. Dans son salon, une statuette de la vierge Marie, et un collier de fleurs rouges posés sur le buffet. “Je suis arrivée ici il y a plus de quarante ans, raconte-t-elle. Avant, j’habitais à Lyon dans le quartier de Laennec, puis à Gerland. Jusqu’au jour où on m’a amené ici”.

Ses yeux noirs se tournent vers son petit fils Carlo, grand barbu, qui vient de rentrer dans la salle. Elle continue : “on avait construit des maisons en bois au départ, puis en dur”. Mais pourquoi rester ici toutes ces d’années ? “Ah ! Les commodités, s’exclame-t-elle. Quand je suis arrivée là, c’était l’hiver, le froid, la glace. Maintenant, il y a le confort moderne”. Carlo, dans un coin du salon, acquiesce. “Moi, je suis né ici il y a 31 ans. Je ne partirai pour rien au monde. J’ai de la chance, beaucoup de gitans aimeraient être sédentaires comme nous”. “Nous sommes une grande famille” En sortant, Raoul, 62 ans, à l’entrée de sa maison, apostrophe: “Regardez cette porte, elle ne fonctionne plus ! Et le chauffage, il ne marche plus. L’OPAC avait promis de venir s’en occuper!”. Comme beaucoup d’habitants, il attend avec impatience l’agrandissement du terrain promis par la mairie de Décines (voir encadré). Car avec l’arrivée de nouveaux gitans il y a quelques années, l’emplacement initial des baraquements commence à être étroit. Il y a ceux qui ont la chance d’habiter les maisons en dur et ceux venus plus récemment qui vivent dans des caravanes ou des mobile-homes. Mais chacun mesure sa chance d’être ici. “Nous sommes une grande famille, raconte une jeune fille. D’ailleurs, on a presque tous les mêmes patronymes. Si quelqu’un a un problème, on est là”

DÉCINES-MOI UN AVENIR

A

vec la venue de nouveaux résidents ces dernières années, la cité des Marais avait un sérieux besoin de s’agrandir. C’est ce qui a amené en 2001 la mairie de Décines à lancer son “projet d’amélioration des conditions d’habitat des gens, du voyage sédentarisés”. Angéla Lanteri, chef de projet à la mairie, le détaille: “La ville de Décines a décidé d’améliorer les conditions de vie de ces habitants, qui sont deux fois plus nombreux qu’au départ. Le projet se déroulera sur la cité des Marais et sur un terrain voisin. Nous allons d’abord construire 40 logements: 24 sur le nouveau terrain communal et 16 sur le terrain mis à contribution par la cité. Nous souhaitons aussi réhabiliter les 32 maisons déjà existantes. Un travail d’intégration sur le plan social, scolaire et économique sera parallèlement mis en oeuvre. On réalise ainsi une chaîne éducative avec l’école maternelle, primaire et le collège. Jusqu'à présent, peu d’enfants continuaient à aller à l’école une fois le primaire passé. Aujourd’hui, une dizaine d’enfants sont scolarisés au collège, avec de réelles chances de continuer” Le Pointû

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SOCIÉTÉ ARCHITECTURE

Une cité pas comme les autres

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© Fabrice Caterini

Le quartier des “anciens Etats“ est l’un des plus emblématiques de la vie ouvrière lyonnaise. Jusque dans les années 80, il est un village isolé du reste de la ville, où les habitants se connaissent et partagent une identité commune. La cité Tony Garnier: une utopie qui s’est donnée les moyens d’exister.

PAR STÉPHANE ROUSSET t si l’architecture pouvait rendre les hommes plus heureux ? Ce doux rêve fût le fil conducteur de l’oeuvre de Tony Garnier, et le quartier des Etats-Unis n’échappe pas à la règle. En 1917, Edouard Herriot veut relier la Guillotière à Vénissieux par un boulevard bordé de logements ouvriers et confie naturellement le projet à l’architecte. Ce sera le premier ensemble HBM (Habitations Bon Marché) pensé et conçu comme tel. Et pour Garnier l’utopiste, pas question de tours qui grattent le ciel ni de barres d’immeubles sans fin. Il imagine 1400 logements répartis dans des immeubles ne dépassant pas trois étages et tous espacés comme des îlots entre lesquels les habitants pourront naviguer. Ainsi, il résout, avant même d’y être confronté, la question de l’entassement des personnes. On est loin des ensembles HLM construits plus tard qui ressemblent plus à des clapiers qu’à des nids douillets. Et pour favoriser la mixité sociale, Tony Garnier prévoit dans chaque immeuble des appartements de tailles différentes. De cette façon, les familles côtoient les personnes seules. Une mixité sociale qui permet aussi un mélange des générations.

Le quartier Tony Garnier, fruit du travail de l’architecte fétiche d’Édouard Herriot

Pourtant, l’architecte doit revoir ses ambitions à la baisse, faute de moyens, et surtout de place, puisqu’il ne disposera finalement que d’un cinquième du terrain prévu au départ. Malgré sa désapprobation, les immeubles auront deux étages de plus, ce qui implique l’installation d’ascenseurs. Au final, l’ensemble est donc composé de 49 immeubles de cinq étages. À l’intérieur de chaque appartement, il prévoit de nombreux aménagements afin d’améliorer le quotidien des ouvriers, parmi lesquels une salle de bains et des toilettes dans chaque logement. À l’époque, ce luxe n’était pas accessible aux travailleurs. Une cité HLM qui se visite comme un musée. Aujourd’hui, la cité HBM des Etats-Unis, renommée Cité Tony Garnier en 1993 à la demande des habitants, se visite comme un musée à ciel ouvert. L’histoire du quartier est retracée sur les fresques qui recouvrent les 24 murs pignons du quartier. Accrochées aux murs, elles sont

DE LA CROIX-ROUSSE AUX ÉTATS-UNIS

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ils de canuts, Tony Garnier naît à la Croix Rousse le 13 août 1869. Marqué dès son enfance par les conditions de vie des ouvriers de la soie, et influencé par les utopies socialistes du XIX e siècle, il va chercher à améliorer le quotidien des classes les plus défavorisées à travers la question du logement. Il remporte en 1899 le Grand Prix de Rome, qui lui vaut d'être pensionnaire à la Villa Médicis pendant quatre ans. Sensé étudier l'architecture de 14 6 décembre 2007

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monuments antiques, l'élève indiscipliné préfère se consacrer à la création d'une ville moderne: la Cité Industrielle. Attaché à ses racines, il revient à Lyon, et le maire Edouard Herriot le nomme architecte en chef de la ville en 1905. Abattoirs de la Mouche (actuelle Halle Tony Garnier) et marché aux bestiaux, Hôpital de Grange Blanche, Stade de Gerland et quartier des Etats-Unis, il est à l'origine du renouveau lyonnais, et marque la ville de son

aujourd’hui le plus bel ensemble de peintures murales de Lyon. La cité Tony Garnier devient ainsi un hommage vivant à son créateur, et reçoit en 1991 le Label de la décennie mondiale du développement culturel de l’UNESCO. Au coeur du quartier, un appartement témoin est ouvert aux visites. Il témoigne des conditions de vie des ouvriers des années 30, mais aussi de la solidarité et de l’identité des habitants de la cité. C’est en sollicitant leur mémoire que ce logement ouvrier a pu être reconstitué dans ses moindres détails: de la couleur des murs à la décoration intérieure, en passant par l’aménagement de l’espace et le choix du mobilier. Tous les meubles et les objets présentés dans l’appartement ont été donnés par les habitants du quartier. Au coeur du 8 e , la Cité Tony Garnier, qui a fêté en 2004 ses 70 ans, s’illustre comme un ensemble de logements sociaux, exemple d’ensemble social dans lequel les gens sont heureux de vivre

empreinte. Il meurt le 19 janvier 1948 et repose aujourd'hui au cimetière de la CroixRousse. Il aura marqué son époque en conceptualisant l'architecture comme capable de changer les conditions de vie des plus démunis. Édouard Herriot dira de lui: “ce bâtisseur, ce réaliste était humain spontanément. Sa sensibilité n'avait d'égale que sa modestie (…) ses qualités morales étaient à la hauteur de son génie”


SOCIÉTÉ ASSOCIATIONS QUAND LES ASSOCIATIONS S’ENTRAIDENT

L

Tous unis malgré tout Selon une enquête de l’association Habitat et humanisme, un Français sur six est mal logé. D’où l’importance des associations, qui sont souvent le dernier recours pour les plus démunis.

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PAR ÉMILIE MARCHE ravail quotidien ou coup médiatique, les moyens mis en oeuvre pour aider les mal logés ne sont pas uniques et peuvent engendrer des frictions entre les associations. Les enfants de Don Quichotte se sont fait connaitre en installant des tentes dans les villes. L’association est présidée localement par Marine Fourié et Daniel Jacquin. Au début du

mouvement, Notre-Dame-des-Sans-Abri et la Fnars (Fédération Nationale des Associations d’Accueil et de Réinsertion Sociale) avaient émis des réserves sur leur action. Toutefois, elles ont aidé à la sortie de crise en relogeant les sans abris: “Nous sommes contre l’instrumentalisation politique. De même, nous pensons qu’il faut respecter le droit. Cependant, nous constatons qu’actuellement, c’est la seule méthode qui marche”, regrette la déléguée régionale de la Fnars, Sandrine Runel. L’association Habitat et humanisme a un autre point de vue. Elle estime qu’ils ont besoin de ces actions: “Les actions très médiatiques comme celles des Don Quichotte ou du DAL, rue de la Banque, sont nécessaires afin de mieux montrer aux gens le problème du logement. Depuis, nous travaillons souvent avec eux”,

“LA DIFFÉRENCE ENTRE EUX ET NOUS”

D

epuis sa fondation en 1950, le Foyer Notre-Dame-des-Sans-Abri détonne dans le paysage associatif lyonnais. Pourquoi ? Seule association catholique, elle prône une politique de l’aide au logement sensiblement différente de celle de ses camarades. “Nous préférons être sur le terrain, avec les nécessiteux, plutôt que dans la revendication, explique Sébastien Guth du service communication de l’association. Notre premier travail est d’accueillir. C’est la différence entre eux et nous“. Eux, ce sont les autres associations, Don Quichotte en tête. “Je ne leur jette pas la pierre, leur action a permis de mettre un coup de projecteur médiatique sur une situation que nous défendons depuis des années. Par contre, installer des tentes sauvagement, et prendre les SDF en otage, ce n’est pas notre manière de procéder, et cela peut s’avérer contreproductif pour notre cause”. Si, tout comme ses consoeurs lyonnaises, Notre-Dame-des-Sans-Abri se consacre au logement, elle n’en reste pas moins à part, et possède sa manière bien à elle de fonctionner. “Notre créneau, c’est de proposer plusieurs services à des personnes en difficultés. Car pour nous, leur trouver un logement n’est pas l’unique réponse à tous leurs soucis. Certaines personnes ont des problèmes trop graves et ne peuvent pas s’intégrer dans la société. Elles ont besoin d’une aide plus spécifique. Une chose que la plupart des associations “coup de poing” ne prennent pas en compte”. À bon entendeur… ADELINE BOURG

a Fnars regroupe une centaine d’associations s’occupant des centres d’urgence, dont Notre-Dame-des-Sans-Abri. Elle s’occupe des personnes seules. “Les centres d’hébergement d’urgence sont des dortoirs. Ils ne sont pas adaptés pour des familles. Si nous en avons une, nous la logeons, puis nous la réorientons vers Habitat et humanisme”, précise Sandrine Runel, la délégué régionale de la Fnars. Habitat et humanisme loge des familles. Pour cela, elle achète et rénove des logements car elle bénéficie de subventions des collectivités territoriales. Elle gère aussi des logements de propriétaires privés qui lui confient leur appartement. En contrepartie Habitat et humanisme s’engage à payer le loyer si le locataire n’est pas en mesure de le faire. L’association travaille avec sept agences immobilières à vocation sociale. Depuis quelques années, elle travaille aussi avec le Secours catholique sur le train de nuit. Un de ses derniers projets est de regrouper dans un immeuble plusieurs générations qui s’aideraient entre elles. Des étudiants dans le social travailleront pour leurs voisins, en contrepartie du logement explique Catherine Kafarski. “Ce mouvement montrait les personnes oubliées de la société”, estime le président de l’Alpil André Gachet. Sur une autre action quelques fois contestée comme le squat, il se réfère au droit suisse. “Les personnes ont le droit d’habiter dans un logement vacant tant que le propriétaire ne l’utilise pas. Cependant, dès qu’il en a besoin, les personnes doivent partir. Personnellement, je trouve que c’est une bonne solution pour lutter contre les logements vacants. Dans notre action, nous nous occupons plus de 40 squats dans Lyon” précise-t-il. La présidente des Don Quichotte Lyon, Marine Fourié, a apprécié l’aide de l’ensemble des associations lyonnaises. Pour elle, le principe des Don Quichotte est un mouvement citoyen qui dénonce la crise du logement. Mais pour cette jeune militante, il faut aussi connaître ses limites, surtout quand on négocie avec le gouvernement. “Nous ne devons pas aller trop loin. Je suis totalement contre le fait qu’on mette des mères et leurs enfants en avant, comme c’est le cas rue de la Banque à Paris. Ce n’est pas leur place. Nous, quand nous avions une famille, nous avons tout fait pour la loger ailleurs. En plus cela ne mène à rien sauf à de la démagogie” Le Pointû

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MONDE PARCOURS

Étudiants en galère À Lyon, difficile de trouver un logement quand on ne parle pas bien français et qu’on ne connaît personne. Rencontre avec trois jeunes étudiants qui ne se sont pas découragés dans ce parcours du combattant.

Samuel, 21 ans, étudiant en ingénierie mécanique

PAR AURÉLIE BEAU ET JULIEN BAUER

LYON LA COSMOPOLITE Chaque année, les universités lyonnaises publient un rapport sur l’accueil des étudiants étrangers. En cinq ans, leur nombre a augmenté de 1,5%.

Le Top 3 des origines géographiques

34% des étudiants étrangers 31% sont Africains 19% sont Asiatiques sont Européens

Le Top 3 des universités tournées vers l’international

30,9% des étudiants 27% étudient à Lyon 1 21% étudient à Lyon 3

étrangers étudient à Lyon 2

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“ Sans garant, c’est très difficile “

I

Nom: MENGESHA Prénom: SAMUEL Nationalité: Éthiopien Âge: 21 ans Filière: ingénierie mécanique

l y a trois ans, j’ai eu mon bac en Ethiopie avec de très bons résultats. Mon lycée délivrait des bourses aux meilleurs. J’en ai bénéficié, je suis donc parti en France les mains dans les poches. Ils se sont occupés de tout : les inscriptions, la fac et le logement. Ils m’ont trouvé une place en résidence étudiante à Lyon. Heureusement qu’ils étaient là pour m’accompagner. Nous sommes

beaucoup à partir avec ce système, cela nous permet de ne pas trop galérer pour trouver un appartement. Sinon, c’est très dur. Il faut un garant. Impossible quand on débarque et qu’on ne connaît personne. Cette année ma petite soeur est arrivée à Lyon pour ses études. Nous voulions nous mettre en colocation mais nos projets ont vite été stoppés. Nous n’avons pas les moyens de payer un loyer, même à deux. Elle a donc eu du mal à trouver un toit. Elle a habité illégalement dans ma chambre pendant quelques jours jusqu’à ce qu’elle trouve une famille d’accueil. Elle garde leurs enfants en échange d’une chambre. Repas copieux et écran plasma, elle s’en sort beaucoup mieux que moi maintenant !”

“ La liste d’attente est longue “ Nom: WANG J’

ai eu beaucoup de chance pour trouver un appartement sur Lyon. J’avais déjà deux amis chinois sur place. Ils m’ont beaucoup aidé. C’est eux qui m’ont trouvé un studio dans une résidence privée. Il n’était pas de très bonne qualité mais ça m’a dépanné jusqu’à ce que je trouve autre chose. Une fois installée, j’ai attendu d’être plus à l’aise, de découvrir Lyon et de mieux connaître la langue pour trouver une colocation sur Internet. J’ai eu encore beaucoup de chance puisque ma colocataire apprend le chinois. Je lui donne des cours, en échange elle m’aide à perfectionner mon français. Son beau père s’est porté garant pour ma caution. Car c’est bien cela le plus difficile quand on est étudiant étranger. La plupart de mes connaissan-

Prénom: JIA Nationalité: Chinoise Âge: 24 ans Filière: Mode et création

ces qui sont arrivées à Lyon ont du mal à trouver un garant. Ils ne connaissent personne et n’ont pas beaucoup d’argent. Pour les résidences étudiantes au CROUS, c’est encore plus dur puisque la liste d’attente est longue. Moi, j’ai trouvé rapidement grâce à l’aide de mes amis. Quand on débarque tout seul à Lyon, c’est quasiment impossible”


MONDE

Jia, 24 ans, étudiante en mode et Alexandra, 21 ans, étudiante en langues étrangères.

“ Je me suis heurtée aux offres sans réponse “ Nom: TIDSWELL J Prénom: ALEXANDRA ’ai des amis et de la famille en France, ça aide. Je Nationalité: Anglaise connaissais le pays parce qu’avec Âge: 21 ans mes parents nous Filière: Langues étrangères venions souvent. Je parle le français couramment, je suis bilingue et c’est ce qui m’a sauvée ! Quand j’ai décidé de partir à Lyon pour mes études, le logement a été ma principale contrariété. Je ne voulais pas me retrouver seule dans un appartement, autant pour le coût que pour la vie. J’ai donc cherché sur Internet, sur des sites de colocation. Je ne conseille à personne de repas-

ser par ce système. J’ai du envoyer une cinquantaine de demandes. Je me suis heurtée aux fausses annonces et aux offres sans réponse. J’attends toujours que certains me rappellent ! Après des jours et des jours de recherche, j’ai eu en tout et pour tout, douze réponses et neuf propositions de visites. J’ai réussi à les « caler » sur une semaine. C’est comme cela que j’ai trouvé ma colocataire. L’appartement est à son nom, ses parents sont les garants. Je suis quand même inscrite sur le bail pour que je puisse faire une demande d’APL. Pour payer ma part, je fais de l’aide aux devoirs six heures par semaine. Heureusement que je me débrouille bien en français sinon j’aurais eu des gros problèmes pour m’adapter et trouver un logement. En France, c’est très compliqué, il faut des tonnes de papiers. Rien à voir avec l’Angleterre. Ca m’a vraiment choqué !“

À L’ÉTRANGER, LYONNAIS MITIGÉS...

“J’ai trouvé mon appartement en épluchant des annonces sur internet. Le problème à Lausanne, c’est qu’il y a peu de logements disponibles comparé à la demande, donc beaucoup de gens sont candidats pour le même appartement. Ensuite, ils choisissent sur dossier. Pour certains appartements, il faut aussi avoir une adresse en Suisse, voire même avoir un garant en Suisse, capable de payer et responsable en cas de problème. Cela pose un problème pour de nombreux étranger. Sinon, pour les prix, c'est encore plus cher qu’à Lyon, c’est de la folie. Pour mon appartement de 55m 2 , je paie 1300 francs suisse par mois soit près de 800 euros” Jean-Baptiste BOSSON, 21 ans, étudiant à Lausanne, Suisse “En Suède, il est vraiment facile pour un étudiant étranger de trouver un toît. Il n’est même pas nécessaire de chercher. Quelques mois avant le départ, il faut simplement remplir un formulaire de demande de logement auquel tu joins tes voeux de résidence ou si tu veux être avec quelqu'un. Il y a aussi à renvoyer plusieurs pièces justificatives pour obtenir un permis de résidence. Sans cela, ils peuvent te renvoyer chez

toi au bout de deux mois. Il y a différents types de colocations: de 5, de 6 ou de 12 personnes, de 2140 SEK par mois (env. 230 euros) à 2670 (env. 290 euros). Pour ce qui est des appartements en eux même, ils sont vraiment bien agencés : une cuisine et un salon commun, une chambre individuelle meublée avec salle de bain et connexion internet” Adrien DUMAS, 21 ans, étudiant à Luleä, Suède Le Pointû 6 décembre 2007 17


ÉCONOMIE DÉCRYPTAGE

La loi SRU, mode d’emploi

L’article 55 est certainement le volet le plus médiatisé de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) de 2001. Pour ceux qui l’auraient raté, petite séance de ratrappage.

P

PAR BRUNO PONCET

our favoriser la mixité sociale, l’article 55 de la loi solidarité et renouvellement urbain oblige certaines communes à atteindre 20% de logements sociaux. Sont concernées celles d’au moins 1500 habitants en Ile de France et 3500 habitants en province. Chacune doit être comprise dans une agglomération de plus de 50 000 habitants devant elle-même contenir une commune de plus de 15 000 habitants. Ainsi, Sathonay-village, dans l’agglomération lyonnaise, ne

compte que 6% de logements sociaux mais seulement 1700 habitants, et n’est pas concernée par cette loi. Les communes n’ayant pas 20 % de logements sociaux ont une obligation de rattrapage. Depuis 2002, la Direction départementale de l’équipement (DDE) leur fixe tous les trois ans une progression afin d’atteindre l’objectif des 20% sur une période de 20 ans. La ville de Lyon doit ainsi construire 666 logements sociaux pour la phase 2005-2007. Si le chiffre est atteint, il n’y a pas de sanction. Sinon, une partie du budget de la commune est prélevée tous les ans par l’État. Ce prélèvement prend en compte le déficit de logements sociaux et le potentiel fiscal de la commune. Plus ce dernier est élevé, plus le prélèvement augmente, et vice-versa. Le mode de calcul favorise les communes rési-

dentielles au pouvoir fiscal faible. Ainsi, Charbonnières ne paie que 50 000 euros d’amendes en 2007 car son potentiel fiscal est mince. Le total de ces prélèvements ne doit pas dépasser 5% du potentiel fiscal de la commune. “Les communes prennent conscience que le logement social ne correspond pas seulement à un empilement de barres et de tours pour des cas sociaux”, explique Maxime Duplain, de la DDE. “On constate partout une réflexion des collectivités pour une production relativement forte de logements sociaux”. Mais certains maires continuent d’être à l’amende car ils refusent d’appliquer la loi. Ainsi en 2005, sur 720 communes françaises soumises à la loi, un tiers avait réalisé moins de 50% des objectifs de 20 % fixés. Dans les 50 communes du Grand Lyon, la même année, 21 ne respectaient pas le quota

Vaulx-en-Velin, laboratoire d’urbanisme © Fabrice Caterini

Suite aux émeutes de 90, la municipalité a été contrainte de métamorphoser la commune. Un pari osé pour améliorer le cadre de vie des habitants. Le moyen d’y parvenir: réduire la part de logements sociaux en favorisant l’accession à la propriété.

A ments sociaux dépassait 65%. L’objectif est vant le début des travaux, le taux de loge-

d’atteindre la barre symbolique des 50% d’ici 2012”. Bernard Genin, adjoint PC au logement de la ville est de ceux qui, dès le début, ont cru a l’insertion par le logement. Un seul mot d’ordre: “favoriser la mixité sociale”. L’enjeu de cette métamorphose fut à la fois de stopper la ghettoïsation, responsable du malaise social mais aussi de rendre la ville plus attractive aux promoteurs immobiliers. Pari gagné ? Cette volonté d’attractivité a un prix. Comment baisser le taux de logements sociaux dans une ville où le revenu annuel moyen par habitant est d’environ 6000 euros ? Bernard Gaudin, responsable du pôle urbanisme de la ville explique que la loi impose aux communes de plus de 40% de logements sociaux, de reconstruire la moitié des logements détruits. Cependant, 30% de ces nouvelles constructions seront gérés par l’office HLM. Il y aura donc moins de logements 18

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sociaux. Même son de cloche du coté de la responsable du service logement, Michèle Bel Hedi, avant de préciser que pour le maire, Maurice Charrier, ex PC: “le but est de conserver le même nombre de logements sociaux”. Bernard Genin va encore plus loin en déclarant qu’il y aura même 100 logements sociaux de plus. Pas d’inquiétude donc. Sauf que depuis quelques temps des collectifs de locataires se sont mobilisés. Les Vaudais n’envisagent pas sereinement ces changements, et le relogement pose de sérieux problèmes. Une cinquantaine de familles du secteur du Mas du Taureau et du Pré de l’Herpe serait encore dans l’attente d’une solution. Pour calmer les tensions et rassurer les familles, Bernard Genin annonce une

nouvelle phase, qu’il appelle “constructiondémolition-reconstruction”. Chacun serait relogé à Vaulx-en-Velin, avant même la phase de démolition. Pour Hélène Geoffroy, candidate PS aux municipales, “le projet est assez opaque. Cependant, il ne faut pas y voir une manière de chasser les pauvres, c’est plus un moyen d’éviter que ceux qui s’en sortent et qui accèdent aux classes moyennes, n’aient qu’un objectif, quitter la ville”. Pour qu’ils restent et afin de favoriser la mixité sociale, une augmentation des accessions à la propriété avec 2500 constructions est prévue. Avec un bémol peut être, le prix de l’immobilier grimpe aussi à Vaulx en Velin, c’est le tarif pour redorer son image MARJORIE MODI


ÉCONOMIE

Charbonnières se défend La commune ne compte que 6% de logements sociaux. Elle est donc pénalisée de 150 euros par logement manquant. Catherine Clerc-Reybier, adjointe au développement économique et à la vie sociale, revient sur cette situation délicate.

0% à 10%

10% à 20% 20% à 40% > 40 %

Irigny 650

Feyzin 920

Vernaison Charly 372 Solaize 22 24

Corbas 346

Mions 429 5009

12860

Le Pointû

© Infographie: Julien Bauer

voulons pas construire une barre HLM pour rentrer dans les quotas. Nous incitons les promoteurs à mettre des logements sociaux dans leurs immeubles. Ainsi, dans un immeuble en construction situé route de Paris, 28 logements sociaux sont prévus. Nous insistons également auprès des propriétaires afin qu’ils mettent leur appartement en logement social. Mais ils ont souvent peur de ne pas être payés. Enfin, la Que pensez-vous de la loi SRU ? Catherine Clerc-Reybier : C’est une loi juste, seulement il faudrait voir mairie dispose de certains logements communaux qu’elle entend faire au cas par cas. Charbonnières est une commune résidentielle, nous passer en logements sociaux. Cependant tout ceci a un coût et notre budget est restreint, sans aucune aides de l’Etat ou des collectivités n’avons pas beaucoup de terrain. Sans parler locales. du prix du mètre carré qui s’élève Genay La population de Charbonnières-Les-Bains ne craint-elle pas la à 6000 euros. 318 construction de logements sociaux ? Quels efforts faites-vous en ce Si, elle émet une certaine réserve. La population a peur que qui concerne la construction Charbonnières ne soit plus aussi paisible qu’avant. Elle a besoin St Germain Neuville de logements sociaux ? d’être rassurée. N.C. Montanay 954 Pendant cinq ans l’ancienne Curis Payez-vous l’amende cette année ? 26 équipe municipale n’a rien 21 Cailloux Oui nous la payons et je pense que nous la payerons l’année fait. Nous sommes en place Fleurieu 20 Albigny prochaine. D’ici deux ans, grâce à nos différents projets, depuis un an et demi. Les 20 253 Charbonnières-Les-Bains ne devrait plus être sanctionnée projets commencent à Poleymieux Fontaines s/S aboutir. Nous ne PROPOS RECUEILLIS PAR ÉMILIE MARCHE N.C. Couzon Rochetaillé 793 111 105 Sathonay V St Romain Font St M Limonest 18 19 94 Sathonay C 148 2343 2346 Collonges St Didier 631 5 La Tour de 54 St Cyr Dardilly Rillieux Salvagny 95 389 Jonage 6304 54 Champagne N.C. 334 Caluire Vaulx-en-Velin Meyzieu 3091 Ecully 8893 1886 Marcy l’Etoile 1312 9e 4e 161 Charbonnières Décines 2227 6e 1997 Villeurbanne 117 1er 15987 St Genis Tassin 3e 5e les Ollières 741 2e Craponne Chassieu Répartition des 7e 392 St Foy 471 8e Bron 8121 Francheville 949 logements sociaux 4822 479 La Mulatière dans le Grand Lyon 661 St Fons Oullins en 2006 3769 1990 Source: DDE du Rhône St Priest Pierre-Bénite Vénissieux 5375 2442 1261 St-Genis1000 11548 Laval 7189 1288

6 décembre 2007 19


© Fabrice Caterini

ÉCONOMIE

Les pelleteuses ont envahi Lyon, comme ici, place Bellecour

Quand Lyon fait “boom” DPOTUSVDUJPOT

À Lyon, les chantiers truffés de pelleteuses côtoient des immeubles flambant neufs. Depuis quelques années, la ville connaît un “boom” spectaculaire des constructions.

U

PAR ADELINE BOURG

n seul être vous manque et tout est bloqué. Car avant le boom actuel des constructions, les promoteurs ont connu un coup d’arrêt en 2001. Cette année là, un particulier attaque en justice le plan d’occupation des sols (POS), voté par le Grand Lyon. Ce propriétaire foncier de Craponne s'est en effet trouvé d’un seul coup en zone dite inconstructible, la communauté urbaine de Lyon ayant modifié les permis de construire sans en informer le public au préalable. Finalement, le tribunal administratif de Lyon donne raison au plaignant. Résultat, le POS est

annulé, et les chantiers sont bloqués pendant plusieurs mois. Aujourd’hui cette affaire semble loin, mais ses stigmates sont eux, bien présents. Les promoteurs de Lyon veulent absolument rattraper leur retard. Bilan des courses, ils lancent de nombreux chantiers : un “boom” des constructions en plein coeur de Lyon. D’autres facteurs expliquent ce phénomène. La loi de l’offre et de la demande marche à plein régime. Le principe est simple : un manque de logements grandissant, donc une nécessité accrue de construire. Mais sans trop en faire non plus. Un excédent de logements ferait baisser les prix de l’immobilier, un scénario à éviter pour les promoteurs. Pour l’heure, la demande est en pleine expansion, conséquence du rayonnement nouveau de Lyon sur la scène internationale, mais aussi de la réduction de la taille des ménages ou encore du rallongement de la durée de vie. Autant

QUARTIERS: VAISE ET LA DUCHÈRE EXPLOSENT

C’

est dans le 9 e arrondissement que le terme "boom immobilier" prend tout son sens. Récemment, près de 400 logements sont sortis de terre et de nouveaux projets sont également en cours. À Gorge-de-Loup, le long de la rue Sergent Michel Berthet, 198 logements, allant du T2 à la maison de ville sont déjà habités. Des chantiers sont encore en cours, comme la construction d'une résidence étudiante de 164 appartements, faisant face à 20 6 décembre 2007

Le Pointû

l'Université Professionnelle Internationale René Cassin. En plein coeur de Vaise, à l'angle des rues Claire et Transversale, une résidence pour personnes âgées de 112 logements a été inaugurée début novembre. Les autres quartiers du 9 e ne sont pas en reste. Dans le quartier de la Duchère, une nouvelle résidence, la Villa des Sources propose 69 logements, dont 21 pour la location sociale. De plus, deux nouveaux programmes de logements ont démarré

d’éléments synonymes de l’accroissement du besoin en logements. Enfin, le “boom des constructions” ne concerne pas tous les quartiers lyonnais. Certaines zones n’ont plus de terrains disponibles. C’est le cas de la presqu’île. D’autres sont en pleine mutation. Le quartier de La Duchère par exemple, attire de nombreux promoteurs locaux et nationaux. “Avant, La Duchère n’était pas un quartier très attractif pour nous, explique Evelyne Bouisset de la société Edifice à Lyon. Mais depuis la mise en place de la TVA à 5,5 %, c’est devenu très intéressant. Maintenant, les promoteurs ont la possibilité d’acquérir des terrains moins chers. Et c’est cela qui fait la différence”. Reste que la construction se fait là où il y a de la place, comme dans le 8 e arrondissement, le 9 e (voir encadré ci-dessous) ou encore dans le quartier de Gerland. Des zones déjà investies par les chantiers

le mois dernier, sur le Plateau de la Duchère et sur les Balmes. Enfin, le quartier de l'Industrie accueille 76 nouveaux logements rue de la Sparterie, tout près de la Saône. D'autres projets sont en cours: d'ici trois ans, 500 nouveaux logements dont 20% de logements sociaux seront construits dans le quartier. Comptant déjà 50 000 habitants, le 9 e n'est donc pas près de freiner sa spectaculaire évolution urbaine et économique, entamée depuis maintenant une dizaine d'années THOMAS DANTIL


ÉCONOMIE

PROJET

L’utopie des maisons à petit prix

En janvier 2005, Jean-Louis Borloo, alors ministre de l’Emploi, de la cohésion sociale et du logement, propose les “maisons à 100 000 euros”. Une offre alléchante qui, à première vue, séduit. Pourtant, trois ans plus tard, on est très loin des objectifs fixés.

B

PAR RAPHAELE DJEBARI ut initial de la “maison à petit prix” : permettre aux ménages les plus modestes de devenir propriétaires de leur pavillon. Et Jean-Louis Borloo croit fermement au projet. En octobre 2005, il annonce vouloir “produire” 20 000 à 30 000 “maisons à 100 000 euros” par an. C’était sans compter avec le prix du foncier. Le coût souvent très élevé des terrains freine en effet considérablement l’adhésion des communes et des différents opérateurs (organismes HLM, SEM, promoteurs, constructeurs. - ndlr) au projet. À ce jour, seule une trentaine de communes ont engagé un programme de “maison à 100 000 euros”. Selon l’Association française d’accession populaire à la propriété (AFAP), anciennement appelée l’Association des “maisons à 100 000 euros”, seulement 800 “maisons Borloo” devraient être livrées en 2008 (1). “Sans le terrain, une maison à 100 000 euros ce n’est pas extraordinaire à réaliser, mais pour construire, il faut un terrain viabilisé et gratuit que les communes ne se bousculent pas pour produire“

QUID DES MAISONS À 100 000 EUROS

Des maisons : -d’une surface d’au moins 85 m 2 , sans aucune finition restant à la charge de l’acquéreur -livrées “clefs en main” et “prêtes à vivre” -devant s’intégrer harmonieusement dans le tissu urbain avoisinant par leur localisation et par leur architecture -présentant des normes strictes en matière de développement durable -dont le prix doit inclure les honoraires du

explique l’un des responsables de l’habitat de la Direction Départementale de l’Equipement du Rhône (DDE). Ce dernier est bien placé pour le savoir, dans le Rhône une seule commune s’est lancée dans l’aventure, Cours-la-Ville. La municipalité a confié la réalisation du projet à la Société d’Economie Mixte (SEM) de la ville. “Nous avons déjà des acheteurs. La construction d’une première tranche de cinq maisons débutera en 2008. Les clefs devraient être remises dans le courant du premier trimestre 2009”, détaille Guy Foropon, président de la SEM. 100 000 euros, “un voeu pieu impossible à réaliser” Le prix du foncier en périphérie des villes est beaucoup trop élevé pour construire des “maisons à 100 000 euros”. Mais alors que faire ? “Les collectivités ou l’opérateur peuvent séparer le foncier du bâti. Dans ce cas là nous aurons toujours une maison dite à 100 000 euros. Et lorsque l’acquéreur aura fini de payer sa maison, il pourra alors racheter son terrain”, explique Guy Foropon. Il s’agirait pour la commune d’appliquer un bail emphytéotique, mais voilà, rien ne l’y oblige et “il est clair que le logement n’est pas la seule mission des municipalités et que ces dernières préfèrent souvent investir dans d’autres choses, des besoins nécessaires à la collectivité comme la création d’une école, d’une crèche, d’un terrain de sport, etc.”, souligne un responsable de la DDE du Rhône. Admettons que l’on sépare le foncier du bâti, construire actuellement une maison à 100 000 euros pile, est-il réellement possible ? Pas forcément. Actuellement, hors terrain et avec des notaire qui passe la vente, le coût de raccordement aux réseaux, le coût d'aménagement de la parcelle, le montant des taxes et des redevances (la TVA, la TLE (taxe locale d'équipement), la TDENS taxe départementale des espaces naturels sensibles), la TDCAUE (taxe départementale des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement), etc...-ndlr) ainsi que les frais d'acquisition et d'hypothèque

Source : extrait de la Charte de la « maison à 100 000 euros » mise en circulation par le ministère de l’Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement le 1 er février 2006.

techniques de construction très économes, le prix des maisons bon marché avoisine plutôt au minimum les 120 000 euros. Surtout depuis le mois d’octobre et l’arrivée d’une nouvelle loi. Cette dernière impose la mise en place d’installations pour handicapés dans les pavillons destinés soit à la location soit à la cession, ce qui est le cas des maisons à 100 000 euros. Une loi nécessaire et louable mais qui engendre des mètres carrés en plus et des détails de construction supplémentaires (rampes d’accès etc.) donc des coûts additionnels. Pour Guy Foropon, la “maison à 100 000 euros” reste donc aujourd’hui “un voeu pieu impossible à réaliser”, en tout cas à Cours-la-Ville “Moi je n’y arriverai pas, je vous le dit tout de suite”

1. “Le Monde” du 16.11.07

COMMENT DEVENIR PROPRIETAIRE

T

out d'abord, se renseigner auprès de sa commune pour savoir si des opérations de maison à 100 000 euros sont prévues. Déposer ensuite sa candidature, sachant que les communes fixent des critères de sélection. Il est possible d’accéder à la propriété d'une maison à 100 000 euros de différentes manières : -Directement . Lorsque par exemple l'immeuble se trouve en zone de rénovation urbaine ouvrant droit à une subvention de l'ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine-ndlr) et à une TVA à 5.5 % qui permettent de diminuer le prix. -Par le biais d'une location-accession . Ce mécanisme permet, dans un premier temps, d’être locataire du logement puis de s’en porter acquéreur. L'opérateur qui construit ou achète auprès d'un promoteur la maison à 100 000 euros bénéficie en effet d'un PSLA (prêt social de location-accession) qui ouvre droit à l'application d'un taux de TVA à 5.5%. -Dans les zones où le marché foncier est tendu . Il est alors possible de se porter acquéreur du bâti dans un premier temps, puis, une fois le prêt du construit remboursé, de devenir propriétaire du terrain mis à disposition par la commune par le biais d'un bail à construction Source: Direction Générale de l'Urbanisme, de l'Habitat et de la Construction

Le Pointû 6 décembre 2007

21


EN COUVERTURE LOI SUR LE LOGEMENT OPPOSABLE

Pourquoi la loi ne

Votée à la hâte en mars dernier sous la pression des associations et du mouvement Don Quichotte, la loi DALO doit entrer en vigueur à compter du 1er janvier 2008. Sur le terrain, rien ne laisse pourtant présager la moindre avancée effective dans la situation des mal-logés. Enquête.

L

PAR BENOIT PAVAN

es mal-logés qui, passé la Saint-Sylvestre, s'imaginaient offrir à leur famille un toit plus digne peuvent remballer leur paquetage. Annoncée par le gouvernement Fillon comme le remède miracle censé régler “d'un claquement de doigts” tous les problèmes qui gangrènent la question du logement, l'entrée en vigueur de la loi DALO ne changera probablement rien aux conditions d'hébergement des personnes en difficulté. Pour bon nombre d'élus de l'agglomération lyonnaise et de responsables de structures liées au logement, la complexité de la nouvelle procédure nécessaire à leur attribution et la pénurie qui touche le secteur de l'offre pourraient même aggraver la situation. “La loi DALO, c'est de la poudre aux yeux pour endormir les gens”, prévient Raphael Mounier, directeur de la communauté Emmaüs de Lyon. “Elle a été élaborée dans la précipitation et personne n'y a vraiment été préparé”, analyse quant à elle Marie-Noëlle Fréry, avocate spécialiste du sujet. Avant d’ajouter: “Dans cinq ans, cette loi n'existera plus”. Le ton est donné. Une loi difficilement applicable En tête des raisons qui semblent pousser la loi 22 6 décembre 2007 Le Pointû

DALO vers un échec notable, la plupart des spécialistes interrogés pointe le manque de terrains vacants, notamment dans les grandes villes et leurs agglomérations. C'est le cas à Caluire, Villeurbanne, et Lyon, où, hormis Vaise (voir p.20), les espaces nécessaires à la construction de logements sociaux se font rares. “Pour loger les familles en difficulté, il est nécessaire de construire des logements dont les loyers sont en rapport avec leurs revenus”, explique Daniel Fayet, chargé de mission pour la mairie de Lyon. “Mais pour construire, il faut avoir de la place”. Même son de cloche à Ecully, où peu d'habitations destinées aux personnes en difficulté restent inhabités. “Dans la mesure où il n'y a pas de logements disponibles, quelles sont les possibilités pour les communes ?”,

s'interroge Martine Balsan, responsable du CCAS (Centre Communal d'Action Sociale) de la ville. “D'un côté il y a la loi, et de l'autre la réalisation. À Ecully, il y a peu de possibilités de loger des gens”. Aux problèmes liés à l'offre, s'ajoute un important manque de moyens qui freine les communes désireuses de financer de nouveaux projets. “À moins que l'État ne débloque de l'argent, cette loi me paraît difficilement applicable”, analyse François Beroud, directeur du développement et du patrimoine de l'OPAC du Grand Lyon (Office public d'aménagement et de construction). “À Lyon, nous sommes déjà au maximum de nos possibilités. Nous ne pourrons pas faire plus à moins qu'il y ait une réforme pour encourager les financements et le recrute-


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© Fabrice Caterini

va rien changer

ment dans le monde du bâtiment". Un avis partagé du côté de l'Hôtel de ville de Lyon, où l'on ne donne pas cher de la peau de la loi DALO sans un coup de pouce de l'État. “Un plan de production de logements sociaux sur cinq ans est nécessaire si l'on souhaite l'appliquer correctement. Et pour cela, il faut que l'État mette la main à la poche", ajoute Daniel Fayet. Si l'application de la loi DALO implique une importante sortie d'argent pour les collectivités, il en sera de même pour les personnes bénéficiaires de cette mesure. Pour un SDF, l'idée de faire appel à la justice paraît inconcevable, notamment en raison du coût engendré par une telle opération. D'autant qu'à l'image des interminables files d'attente où patientent déjà 25 000 demandes de logements sociaux, les

démarches nécessaires pour y accéder s'appa- sions de médiation prônées par la loi, a déjà rentent à un parcours du combattant. “Pour les été anticipée. Compétentes pour désigner les mal-logés, un recours devant le tribunal admi- personnes prioritaires en matière d'accès au nistratif, c'est perdu d'avance”, argumente logement, elles feront office de relais entre les Marine Fourié, coordinatrice des Enfants de Don demandeurs de logements et les organismes Quichotte. “Aujourd'hui, si un SDF se retourne bailleurs. À Rillieux-la-Pape, la municipalité contre le Grand Lyon, il ne pourra fait la course en tête en la "Sur le principe, on matière. Depuis 1995, toutes se voir proposer qu'une place en centre d'hébergement. Alors imales demandes de logement applaudit. ginez s'il se retourne contre l'Etat Mais on craint une font l'objet de réunions !”. L'avocate Marie-Noëlle Fréry avec les promesure appliquée bimensuelles va même plus loin: “l'étape du priétaires. “En 1998, nous tribunal administratif est inutile. de manière brutale, avons également créé une qui rendrait Si la Commission de médiation ne instance plus particulière qui trouve pas de logements pour les la situation pire que répond tous les deux mois demandeurs, le juge ne pourra ce qu'elle est déjà". aux demandes des familles pas le faire non plus. La procéles plus en difficulté”, ajoute dure est complexe et risque de Catherine Ravat, adjointe au Daniel Fayet, décourager de nombreuses perlogement. “Elle regroupe de chargé de misson sonnes”. nombreuses institutions telà la ville de Lyon. Rien de nouveau pour les malsles que la Caf (Caisse d'allologés cations familiales), le Sial (Service Inter Dans ce cas, la loi DALO ne serait-elle qu'une Administratif du Logement), le CCAS, le conseil vulgaire opération de communication destinée général, ou le Grand Lyon”. À la préfecture, le à faire taire le mouvement de l'hiver dernier ? même type de structure existe depuis 2002. “En Probablement, à en juger par les dires de cer- ce qui nous concerne, les délais vont être extrêtains élus et responsables d'associations. “Le mement longs”, explique Myriam Normand. “Je droit opposable, c'est de la communication”, crains des débordements. Aujourd'hui, je traite atteste Gérard Klein, directeur général de la 323 cas par an. Si demain, tout le monde peut SACVL (Société Anonyme de Construction de la nous saisir, il y aura deux fois plus de demanVille de Lyon). “Pour moi, rien ne va changer. des. Pour y arriver, nous ne pourrons que faire Des outils existent déjà pour améliorer la situa- du travail bâclé”. tion”. À Lyon, les efforts pour loger les plus Une pression plus forte sur les communes démunis sont constants. Depuis sept ans, les Reste que la loi semble avant tout être un places en hébergement d'urgence ont considé- moyen de pression pour maintenir un rythme rablement augmenté. Certains centres d'accueil élevé de construction de logements à loyers restent même ouverts toute la journée. “Ce modérés. Une contrainte qui, selon Daniel n'est pas parce qu'on a une loi que les choses Fayet, pourrait être mal perçue par les commuvont changer d'un coup de baguette magique”, nes les plus en difficulté pour appliquer la loi ajoute Daniel Fayet. “Nous n'avons pas attendu SRU. “Toutes les pressions du monde ne changequ'elle arrive pour essayer de loger tout le ront pas la réalité. J'ai peur que la pression monde. Dans l'immédiat, nous allons créer de exercée par l'Etat ne pousse les communes qui nouvelles places d'hébergement. Puis, il faudra faisaient des efforts à jeter l'éponge. Il faut construire des logements sociaux traditionnels que l'application de cette loi soit conduite avec et développer l'accession à la propriété. Faire intelligence et doigté. Sinon ce sera pire qu'avant. C'est la conviction qui est bonne, pas ce que l'on fait déjà, en somme !”. Même la création, sur le terrain, de commis- l'injonction” Le Pointû 6 décembre 2007 23


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L

e droit au logement opposable (dite loi DALO), garantit un logement pour tous. Si une personne de nationalité française ou résidant en France de façon régulière ne vit pas dans un logement décent, elle peut désormais faire valoir son droit. À compter du 1 er janvier, toute personne mal logée devra en premier lieu consulter une commission de médiation. Si celle-ci considère que la demandeuse entre dans les critères, elle remettra sa demande au préfet. Ce dernier doit lui trouver un logement. À défaut, elle pourra alors saisir le tribunal administratif. Dès le 1 er janvier, la loi concernera les personnes dans les situations les plus précaires (SDF, travailleurs pauvres et femmes seules avec enfants). En 2012, toute personne mal logée ou vivant dans des conditions insalubres sera concernée par la loi. Le DALO est le résultat du mouvement des Don Quichotte de l’année dernière. Souvenez-vous, des tentes plantées à côté du canal Saint Martin à Paris puis dans les grandes villes de France dont Lyon, place Bellecour. Le leader du mouvement des enfants de Don Quichotte, Augustin Legrand demandait un logement pour tous. Après de multiples négociations avec le gouvernement, les tentes rouges se retirent des villes en échange de la loi pour le droit au logement opposable. Elle est votée par une large majorité le 5 mars 2007. Dans l’emballement médiatique, tout est allé très vite. L’idée du droit au logement opposable n’est pourtant pas neuve. Dans un rapport de 2002, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées le propose déjà. En 2003, ATD Quart Monde crée une plate forme nationale en faveur de la création de ce droit. Elle rassemble 51 associations dont la fondation Abbé Pierre et le DAL (Droit au logement). Le 5 juin 2004 dans plusieurs villes de France, une manifestation pour le droit au logement opposable est organisée. L’actuelle ministre du Logement, Christine Boutin, avait déposé une proposition de loi sur le droit au logement opposable le 28 septembre 2005. Elle est restée sans suite. En 2006, le gouvernement avait proposé le principe d’expérimentation volontaire de ce droit par les collectivités locales. Cela n’a pas abouti. La même année au mois de mai, la proposition de loi des parlementaires socialistes sur la création de la loi sur le droit au logement opposable est rejetée par le gouvernement. Le ministre de la Cohésion sociale Jean-Louis Borloo considère alors cette loi comme “prématurée et irréaliste”. Un an après, une loi identique est proposée… par le même gouvernement ÉMILIE MARCHE 24 6 décembre 2007 Le Pointû

“Je ne demande Cinq dans un minuscule appartement. Seule, sans eau ni électricité. Ils sont logés dans des conditions indécentes et se battent pour que leur situation s’améliore. Rencontres.

S

PAR ADELINE BOURG ET RAPHAELE DJEBARI ur la droite, la salle de bain est un champ de ruines: la moitié du mur s’est écroulé dans la douche, le toit, lui se désagrège. Sans parler des fissures et des fils apparents. Comment vivre dans pareil endroit ? La famille Maouni n’a guère le choix. Depuis octobre 2005, ils habitent à cinq dans cet appartement de 21m². Un véritable cauchemar. Quinze jours après leur emménagement dans cet appartement “refait à neuf ” de Villeurbanne, ils constatent que le loge-

ment se dégrade. Les coups de pinceaux ne sont que poudre aux yeux, et ce logis est en réalité insalubre. “Tout de suite, je suis allée voir le propriétaire”, explique Sabrina Maouni, “mais il n’a rien voulu entendre. Il dit que c’est à l’assurance de s’en occuper”. Alors le problème traîne en longueur. Pendant ce temps, le plafond de la chambre se fissure. L’eau s’invite à l’intérieur les jours de pluie et le cumulus dégringole entraînant une partie de la cloison dans sa chute. Sabrina réagit, multiplie les demandes de logement, mais en vain. “J‘ai vu plusieurs organismes de logements sociaux, l’OPAC du grand Lyon, la mairie de Villeurbanne ou encore le CIAL, mais ils m’ont tous dit qu’il n’y a aucun logement disponible et que ma situation n’est pas une urgence”. La loi DALO, promulguée en janvier prochain serait-elle la solution pour cette Depuis cet été, la douche est inutilisable. Toute la famille est contrainte d’aller se laver chez des parents

© Fabrice Caterini

LE LOGEMENT DEVIENT UN DROIT


famille ? Sabrina n’y croit guère. Sceptique, elle ne pense pas que ce soit l’Etat qu’il faille attaquer. “De toute façon, les procédures judiciaires ça prend du temps, et moi je ne peux plus rester ici. D’un autre côté, la loi n’a jamais été pratiquée, il faut voir ce que cela peut donner. Mais je pense qu’il serait préférable d’avoir les moyens d’attaquer le propriétaire. Car c’est lui le fautif. Nous payons 320 euros de loyer pour un appartement délabré. Et si nous ne payons pas, il nous envoie les huissiers ! En revanche, nous n’arrivons pas à le contraindre à payer des réparations. Il connaît très bien la loi, et sait comment la contourner”. Dernier espoir pour les Maouni, le 14 décembre prochain. Ils ont rendez-vous avec l’association AVDL (Association villeurbannaise pour le droit au logement). Ils décideront alors ensemble si oui ou non, ils poursuivent le propriétaire en justice. “Les ne vous inquiétez pas finissent par m’inquiéter” Autre endroit, autre situation, même galère. Chez Amina, c’est simple, que ce soit l’électricité ou le système de canalisations, rien n’est aux normes. Depuis août 2005, date de son installation, cette jeune fille de 23 ans, lutte tant bien que mal contre la moisissure qui grimpe sur les murs et les infiltrations d’eau. Sans par-

Image d’un autre temps. Amina se maquille à la bougie

ler de la peinture qui s’écaille un peu partout, résultat d’une humidité persistante et omniprésente. “Au début j’ai fais des travaux à mes frais mais au bout d’un moment on se rend vite compte que ça ne sert à rien. C’est un réel problème d’isolation et d’humidité. Normalement ces travaux sont à la charge du propriétaire, mais il ne se décide toujours pas”. Un arrêté préfectoral l’y oblige pourtant, mais rien n’y fait et personne ne semble s’en inquiéter. “Mon propriétaire avait cinq jours pour réagir mais il n’a rien fait. Le maire est censé faire exécuter l’arrêté mais il n’intervient pas, idem pour le secrétaire général de la préfecture. Tout ce qu’on me dit pour me rassurer, c’est faîtes un courrier et patientez. Ce sont leurs continuels ne vous inquiétez pas qui m’inquiètent finalement”. Depuis le 17 octobre dernier, la situation s’est dégradée. Plus d’eau ni d’électricité dans l’appartement. Enceinte de quelques mois, Amina résiste deux semaines dans ces conditions, mais le froid et l’humidité la contraignent à partir vivre ailleurs. Elle s’arrange. Tantôt chez des amis, chez la famille, à l’hôtel. Oui mais voilà, Amina est liée à son propriétaire par un bail et donc contrainte de continuer à payer son loyer, 210 euros par mois. “Je suis bloquée, si je ne paye pas, il peut m’attaquer en justice”.

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pas la lune”

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Mais Amina a du caractère et entend bien ne pas se laisser faire. “Je suis la première à mener les démarches jusqu’au bout, les précédents locataires étaient des sans papiers ou des familles nombreuses qui n’avaient pas trop le choix, alors ils ne prenaient pas le risque”. Et la loi DALO ? “Jamais entendu parler. Cela peutêtre intéressant, si derrière il y a du résultat. Avant de parler d’une nouvelle loi et de nouvelles procédures, aujourd’hui je souhaite seulement qu’on oblige mon propriétaire à me rétablir l’eau et l’électricité. Je ne demande quand même pas la lune”

“ÊTRE ASSISTÉ D’UN AVOCAT EST INDISPENSABLE”

Entretien avec Maître Marie-Noëlle Fréry, avocate à Lyon

Quelles sont les conditions juridiques requises pour bénéficier de la loi DALO ? Seules certaines catégories de personnes pourront saisir la commission de médiation à partir du 1 er janvier prochain. En priorité, des familles en hébergement temporaire ou en cours d’expulsion. Des ménages vivant dans des logements insalubres ou des personnes handicapées ou fragilisées. Le texte prévoit cependant que les personnes soient de bonne foi, celles, par exemple, qui ne payent pas leur loyer ne pourront pas en bénéficier. Le 1 er janvier 2012, la loi prend de l’ampleur et concernera l'ensemble des demandeurs de logement social dont la demande dépasse un délai anormalement long. Saisir la Commission et mettre en marche une procédure a un coût. De quelles solutions financières les familles ou les personnes demandeuses disposent-elles ? Les demandeurs n’ont souvent pas les moyens de prendre un avocat pour se tenir au courant des procédures ou pour être aidés dans leurs démarches ou face à la Commission. Il existe pourtant une solution que personne ne connaît : le contrat de protection juridique. Il vous est obli-

gatoirement donné avec votre assurance civile. Si vous le souscrivez vous pouvez ainsi demander à être assisté d’un avocat pour n’importe quelle situation. Un avocat payé, bien sûr, par votre assurance. La présence d’un avocat n’est pas obligatoire lors du passage devant la Commission de médiation. Cependant, les recours administratifs et la procédure judiciaire sont complexes. La rédaction des dossiers nécessite des règles précises à respecter. Etre assisté d’un avocat est donc, à mon sens, indispensable à ce moment là. Justement, comment se passe la procédure administrative ? Après avoir saisi la Commission de médiation et si le demandeur se heurte à un délai d’attente trop important, il peut saisir le tribunal administratif. Il n’y a alors aucune enquête ni audition. Le juge se base uniquement sur les pièces du dossier du demandeur et contraint l’Etat à lui trouver un logement. Seulement, la décision du tribunal n’est pas exécutoire. Le plaignant peut très bien attendre des mois avant d’avoir un appartement. Il n’y a pas de délais. Le juge peut aussi condamner une commune à payer des astreintes mais ce n’est pas une obligation (environ 50 euros par jour de retard-ndlr). Attention, le premier recours juridique devant le tribunal administratif ne pourra s’effectuer qu’à partir de décembre 2008

PROPOS RECUEILLIS PAR AURÉLIE BEAU ET RAPHAELE DJEBARI Le Pointû 6 décembre 2007 25


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COMMISSION DE MEDIATION DEPARTEMENTALE : Myriam Normand: “La loi est compliquée, elle a été faîte dans l'urgence. C'est une bonne chose mais il faudra bien un an pour que les choses se mettent en place”. CHARBONNIÈRES : Catherine Clerc-Reybier: “la loi est une bonne chose en soi par contre je ne vois pas comment on pourra réellement l'appliquer”.

LOI DALO : PLUS OU MOINS FAVORABLE ? Réactions des acteurs du logement sur le Grand Lyon ALPIL : André Gachet: “Cette loi est un bon instrument pour lutter contre les problèmes de logement mais seule, elle est inutile”.

SACVL : Gérard Klein “Pour moi rien ne va changer. La loi risque simplement d'accentuer l'engorgement dans les tribunaux”. CALUIRE : Robert Bouclon : “Elle ne sert absolument à rien, aujourd'hui, elle est difficilement applicable”.

26 6 décembre 2007 Le Pointû

Entretien avec Christine Boutin, actuelle ministre du Logement et de la Ville.

Quel bilan dressez-vous de votre passage à Lyon ? Le choix de Lyon répondait d'abord à une donnée conjoncturelle: la tenue des congrès de l'Union sociale pour l'habitat (USH), des notaires et des promoteurs-constructeurs nous offrait l'occasion inespérée de rassembler l'intégralité du monde du logement pour travailler sur des objectifs communs. Afin de mener à bien l'objectif gouvernemental de construire 500 000 logements dont 120 000 sociaux, ma priorité consistait à créer une synergie. Plus de trente partenaires ont répondu à l'appel: groupes financiers, promoteurs, constructeurs, agents immobiliers, propriétaires et locataires; aucune marge du secteur n'a été négligée. Je leur ai donné l'occasion de s'exprimer et de s'associer librement. Au final, une trentaine d'engagements ont pu être conclus. Sans cette opération lyonnaise, ce sont dix-huit mois qu'il aurait fallu pour parvenir à ce résultat! Il me reste à présent à maintenir le cap, et à préparer, en collaboration active avec mes partenaires, le deuxième acte des "Réunions de chantier ". Très concrètement, qu'est-ce que l'entrée en application de la loi DALO en janvier 2008 va changer pour les gens ? La loi instituant le droit opposable au logement vise à répondre rapidement aux situations humaines les plus délicates. C'est une avancée sociale de grande ampleur, et comme telle, sa mise en œuvre soulève de nombreux défis. D'abord, il y a clairement un défi structurel, puisque le DALO met en place des commissions de médiation dont il va falloir assurer la bonne installation à partir du 1 er janvier prochain. Les élus y participent aux côtés des bailleurs et des associations, et leur rôle est essentiel, car ces instances vont créer de véritables droits pour les personnes. Mais le principal problème réside dans l'écart prévisible entre l'offre et la demande de logements. Ne présumons pas des orientations que prendront les commissions, mais il est bien évident que dans l'état actuel des choses, le volume de certains contingents préfectoraux

© Thierry Vallier

HABITAT ET HUMANISME :”Nous nous impliquons beaucoup dans cette loi et nous ferons tout notre possible pour qu'elle fonctionne correctement”.

“Répondre rapidement aux situations humaines les plus délicates”

risque de ne pas suffire à satisfaire les demandes des ménages prioritaires. D'où un possible recours à des formules d'habitat temporaire, clairement inadaptées. Certains maires de l'agglomération lyonnaise estiment que les effets de cette loi ne se verront pas avant cinq ans. Qu'en pensez-vous ? L'engorgement de la chaîne du logement est un réel obstacle à l'application du DALO. Les objectifs fixés par le Président de la République sont conçus pour répondre à ce défi : construire vite, en nombre, afin de débloquer l'offre de logements, et favoriser ainsi la fluidité de la chaîne. J'ai la charge de mener à bien cette politique, mais je ne pourrai y prétendre sans le soutien des élus locaux. Je n'ignore pas que le DALO leur demande une contribution exceptionnelle, et que certains appréhendent logiquement sa mise en œuvre. Qu'ils sachent qu'on ne peut répondre à une situation critique que par la mise en commun de moyens eux-mêmes exceptionnels; qu'on ne peut entreprendre, sans l'accord des volontés et le renoncement aux intérêts partisans. Le DALO est une bonne loi, humaine et noble. Elle peut devenir un instrument d'équité formidable, si tant est que chacun fasse un effort. Mais la raréfaction du foncier et les délais de construction exigent que l'on s'attelle rapidement à la tâche PROPOS RECUEILLIS PAR RAPHAELE DJEBARI

Entretien réalisé par courrier électronique


CULTURE “être indépendant, s’autogérer en ne dépendant d’aucun pouvoir”

Squat

way of life*

* “Style de vie”

Espaces de création, de rencontres, et pas seulement logements pour activistes en galère, les squats constituent l’un des endroits clés de la scène culturelle alternative de Lyon. Les cerveaux y bouillonnent et les idées s’y développent sans cesse dans le but de proposer une autre vision de la culture.

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PAR THOMAS DANTIL

ela ne date pas d’hier, les squats traînent en France une sale réputation. Repaires de punks à chiens, taudis abritant toxicomanes, marginaux et autres gens dépravés, on a tout entendu. Mais la réalité est à des kilomètres de cette “légende urbaine”. Et pour le vérifier, pas besoin d’aller bien loin. À Villeurbanne, rue Paul Verlaine, se trouve Le Boulon. “Le Boulon, c’est un squat installé depuis trois ans, ce qui est plutôt pas mal dans la durée, quand on voit le nombre d’expulsions. C’est un véritable lieu de vie, avec des activités artistiques et culturelles comme des ateliers peinture, bricolage, des concerts, des projections de films tous les jeudis, des soirées et des débats”, explique Mathieu Moulin. À 21 ans, il est président de l’association Future Is Mine, qui participe à l’organisation de concerts et soirées punk/DIY (Do it Yourself) sur Lyon, SaintEtienne et Clermont-Ferrand. “Le squat, c’est une part de la culture punk. Punk, c’est avant tout être engagé, impliqué dans une cause,

© Émilie Marvin

exprimer ses idées politiques à travers l’art et l’engagement personnel, de diverses façons: végétarisme, rencontres et échanges lors de débats, expos ou concerts. Et le squat est le lieu, où, en plus d’abriter tout cela, on peut aussi se loger gratuitement. Squatter, c’est outrepasser une loi liberticide qui est celle de devoir payer pour avoir droit à un toit”. Voilà sans doute ce qui constitue l’un des facteurs de la mauvaise image des squats: c’est illégal. Il se forment dans des locaux à l’abandon ou qui ne répondent plus aux normes de sécurité françaises et européennes, donc voués à être démolis. En attendant, les squatteurs s’y installent après avoir retapé les lieux de fond en comble. “Il est évident qu’en violant une loi qui nous paraît injuste, les institutions ne vont pas aller dans notre sens, reconnaît

Mathieu. Mais c’est aussi ça la culture squat, punk et DIY: être indépendant, s’autogérer en ne dépendant d’aucun pouvoir. On squatte des locaux appartenant à la mairie sans leur autorisation, donc à part une expulsion, c’est sûr que l’on n’a rien à attendre d’elle. Après, ce n’est pas cela qui fait des squats des coupe-gor-

ges et les squatteurs des criminels. On estime juste avoir le droit d’occuper un lieu vide pour en faire un abri, un lieu de vie, d’expression et d’échange. Est-ce que c’est un acte criminel ?“. À Lyon, bien qu’il soit difficile d’avoir un chiffre précis, il y aurait une quarantaine de squats. Tous ne sont pas aussi importants que Le Boulon, mais chacun contribue à la survie de la culture alternative dans la ville, malgré un contexte où les expulsions se multiplient. “Avant, en plus du Boulon il y avait d’autres squats aussi actifs, comme l’Insoleuse, également à Villeurbanne, et la Scierie à Lyon, mais on s’en est fait expulser sans prévenir. Bon, on sait que l’on a toujours le couperet au-dessus de la tête, mais sans savoir vraiment quand il va tomber, dit Mathieu. Après, on n’a plus qu’à trouver un autre endroit et recommencer, avec l’aide des amis, des gens impliqués. On ne se laisse jamais démonter. Quand un squat ferme ou ré-ouvre, les autres lieux autogérés soutiennent aussi”. Effectivement, loin de se faire concurrence, les autres lieux de Lyon, salles, ateliers, squats se serrent les coudes. Car ici, il n’est pas question de défendre son terrain ou son commerce, mais juste d’essayer de faire vivre le plus longtemps possible des endroits où l’on peut trouver une autre forme de culture. “Les groupes et les associations se bougent pour organiser des concerts ou soirées de soutien. Tout le monde apporte sa contribution. Il y a une vraie solidarité dans la scène alternative. Que t’ailles débattre au Boulon ou que tu joues au Grnd Zero à Vaise, tu n’as pas envie que l’alternative meurt. On va tous dans le même sens, en l’occurrence à contresens de la culture de masse”. Bref, à Lyon, la scène alternative affiche une énergie, une volonté et un optimisme qui laissent espérer que le mouvement squat soit encore loin de toucher à sa fin Le Pointû

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CULTURE © Fabrice Caterini

L’esprit canut

Véritable curiosité architecturale, les immeubles canuts font partie intégrante du patrimoine et du paysage lyonnais. Derrière cette particularité enviée de la Capitale des Gaules, se cache bon nombre d’anecdotes issues de faits historiques. 28

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PAR AMANDINE COLLONGETTE

etit retour en arrière. Vers 1820, les tisseurs quittent le Vieux Lyon pour investir le quartier de la Croix-rousse. La raison de ce déménagement : l’invention des métiers à tisser Jacquard. Cette nouvelle mécanique se place sur le métier à tisser, les ouvriers sont alors contraints de travailler dans des pièces à haut plafond, environ quatre mètres de hauteur. A cette époque, l’espace Est du plateau croix roussien est en friche, de nombreux immeubles y sont donc construits. Et en 1850, la colline compte près de 25 000 habitants supplémentaires. À l’époque des canuts, les maîtres à tisser recrutent des compagnons


CULTURE PAROLES, PAROLES...

À

l’époque, les immeubles des canuts sont uniquement destinés au travail, c’est d’ailleurs la principale fonction des appartements qui les composent. Les fenêtres, très hautes, sont recouvertes de papier huilé, ce qui empêche la lumière d’abîmer les fils de soie. Le style architectural est de type industriel, proche de celui des usines. L’intérieur est souvent très vaste, environ 1000 m 2 .

L

es canuts mettaient du sable entre les poutres. Cela permettait, en cas d’incendie, d’éviter que le feu ne prenne trop vite et que les soieries brûlent. Encore aujourd’hui, il arrive aux habitants de ces immeubles, de balayer du sable. La cause ? Les poutres perdent de leur pression et recrachent le sable de l’époque. Comme si l’esprit des canuts retombait un peu chaque jour…

astuce : pour être certain que votre appartement soit de type canut, assurez-vous qu’il n’y a aucun ornement au niveau des ouvertures. De plus, les logements authentiques n’ont ni balcon ni volet Petite

en grand nombre. L’objectif : améliorer leur productivité. Reste un détail à régler, où loger cette nouvelle main d’oeuvre ? Le chef d’atelier met alors en place des soupentes ou suspentes, plus communément appelées aujourd’hui des mezzanines. De leur côté, le chef d’atelier et sa femme disposent d’une alcôve pour leur intimité et d’une cuisine rudimentaire pour leur quotidien. Le strict minimum. À cette époque les loyers sont très chers. Les chefs d’ateliers ne sont que de simples locataires et ne peuvent s’offrir le luxe de devenir propriétaires. Après 1860, Lyon perd son privilège. Les ateliers de tissage sont délocalisés dans les campagnes françaises. La hauteur des appartements croix-roussiens devient accessoire, les habitants

les transforment alors en faux plafonds. Le meilleur moyen pour économiser de la chaleur. “Le quartier bobo de Lyon “ C’est dans les années 1980-1990, qu’une population plus fortunée vient s’installer à la Croix-Rousse. Elle donne un nouveau style aux anciens appartements canuts. Finis les faux plafonds, les poutres sont à nouveau mises en valeur. Le quartier devient plus “fréquentable”. Il n’est plus seulement considéré comme un quartier d’ouvriers. Ses nouveaux habitants viennent chercher une ambiance : l’authenticité, l’esprit de quartier, les marchés... La Croix-Rousse devient le quartier “Bobo” de Lyon

Remerciements à Robert Luc

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TENDANCESÉCO-LOGIS Suivez les panneaux I

ls récupèrent l’énergie du rayonnement solaire dans le but de la transformer en énergie utilisable par l’homme. Cela permet de réutiliser cette chaleur pour des besoins de chauffage et d'eau chaude. En fonction de la situation géographique, l'intensité de l'énergie solaire disponible varie. Le chauffage solaire est néanmoins plus approprié pour les habitations individuelles. Ces systèmes représentent une économie de 30 à 60% des besoins annuels d'énergie pour le chauffage et l'eau chaude sani-

PAR STÉPHANE ROUSSET ET AMANDINE COLLONGETTE

taire. Il faut savoir qu’une famille de quatre personnes en Rhône-Alpes qui utiliserait des panneaux thermiques pourrait réduire d'environ une tonne ses émissions de gaz à effet de serre. Cela lui permettrait aussi d’économiser environ 2 000 kWh/an soit environ 200 euros /an (par rapport à du propane ou de l’électricité). La région Rhône-Alpes fournit une aide financière pour cet investissement qui varie de 300 à 2000 euros selon le type d’installation

La pluie au robinet U

n autre cheval de bataille des écologistes, c’est l’eau…jusque dans votre maison. De plus en plus rare, elle est aussi de plus en plus chère, et c’est surtout au niveau du portefeuille que la récupération de l’eau de pluie devient intéressante. Car l’eau tombe gratuitement sur tout le monde et un investissement raisonnable (une cuve en béton, une pompe et un bon élément de traitement pour filtrer l’eau et la distribuer dans toute la maison) vous permettra rapidement de faire des économies substantielles (200 à 250 euros par an). De plus, en récupé-

rant et en stockant l’eau de pluie dans une cuve en béton, elle s’adoucit naturellement : les substances de l’eau de pluie réagissent avec les composants du béton qui mettent les sels minéraux en solution. Grâce à cette opération l’acidité disparaît. Ne reste plus qu’à la distribuer dans toute la maison… et sa douceur naturelle permet une utilisation plus légère des détergents ! Enfin, l’eau de pluie permet de préserver les nappes phréatiques qui sont déjà à un niveau critique durant les périodes estivales

Cîme-City L

a toiture végétale existe depuis la préhistoire… parce qu’à l’époque, on n’a rien trouvé de mieux question isolation. Aujourd’hui les toits verts sont d’utilité publique. Assez en vogue dans les pays scandinaves et au nord de l’Europe, les toits végétalisés arrivent peu à peu chez nous. Pourquoi ? L’intérêt est multiple. Pour la biodiversité de nos villes, c’est une aubaine, puisque ces îlots de verdure offrent aux animaux et aux plantes un havre de paix dans un environnement urbain qui leur est hostile. Les échanges entre espèces, indispensables à leur survie y sont favorisés, en plus d’offrir à la faune et à la flore plus d’espaces de vie et de déplacements, sans empiéter sur les notres. Les toits végétaux nous offrent un air de meilleure qualité en fixant les poussières et les pollens, en plus de leur intérêt esthétique. Enfin, ils permettent de réduire les coûts d’isolation et les dépenses en matière de santé et de nettoyage, et, si vous êtes propriétaires, offrent une plus-value considérable à votre bien. Enfin, des études montrent qu'un tel environnement augmenterait la productivité de ses occupants de 5 à 15 % 30 6 décembre 2007

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PAR FABRICE CATERINI

INSOLITETENDANCES

C

Petite rose...

e n’est un secret pour personne, se loger à Lyon devient de plus en plus difficile. Entre des loyers qui crèvent le plafond et des surfaces réduites à peau de chagrin, les temps sont durs. Voilà une maison qui devrait alimenter le débat. Située dans le très chic 6 e arrondissement, comme coincée entre deux immeubles, la menue bâtisse du 28, avenue du Maréchal-Foch peut sans conteste, avec ses maigres 35 mètres carrés, revendiquer le titre officiel de “la plus petite maison de Lyon”. Elle fut construite par les Hospices civils de Lyon (alors propriétaires d’une grande partie de la rive gauche) au milieu du XIX e siècle, après la destruction de l’ancienne église de la Rédemption. Église qui sera reconstruite de 1867 à 1877, de l’autre côté de l’avenue. Le loyer y est de 500 euros/mois. Le bail est d’une durée de 3 ans. Aujourd’hui, personne ne vit dans cette maison construite sur deux étages ; mais une agence immobilière haut de gamme vient de s’y installer

En boîte !

L

es Gaulois pensaient que le ciel pouvait leur tomber sur la tête…Et bien une maison, à Lyon, pourrait leur donner des raisons d’y croire un peu plus. À l’origine de cette immense bâtisse bourgeoise enchâssée dans un immeuble moderne, nulle fantaisie d’architecte. Située au 53, boulevard des Brotteaux dans le 6 e arrondissement, cette grande demeure est née du désir d’un industriel (Rolland Valla) de la Belle Epoque d’habiter à proximité de son entreprise, une usine de graisses minérales qui se trouvait à l’angle du cours Lafayette et de la rue Ney. Menacée par le féroce appétit de promoteurs immobiliers à la fin du XX e siècle, elle ne doit sa survie qu’à la ténacité de ses occupants et au coup de foudre de l’architecte des Bâtiments de France. Surtout, elle fut sauvegardée grâce à sa situation géographique et son environnement : le site classé monument historique de la gare des Brotteaux. Les promoteurs ont donc persévéré pour construire, oui, mais autour. Depuis un siècle, son intérieur n’a donc pas bougé utre habitation insolite - donc forcément de plus en plus prisée - la péniche. Habiter au bord de l’eau possède ses charmes, et pourtant c’est loin d’être un long fleuve tranquille. Premièrement, il vous faut trouver un emplacement libre. Or depuis 2006, ce sont les maires qui décident de l’attribution des places de stationnement. Qui plus est, l’emplacement ne vous appartient pas et la place n’est pas transmissible. Compter 150 à 600 euros par mois pour le “loyer”. Pour ceux qui osent amarrer sans autorisation, l’amende est salée : 150 euros par jour. Deuxièmement, il vous faudra avoir un

Pénichement vôtre

A

bon pactole de côté: toute aménagée, une péniche se monnaye dans les 300 000 euros. Et les prix flambent. Tous les dix ans, vous devrez vérifier l’étanchéité de la coque : 5000 euros ; et la repeindre pour éviter la corrosion. Un fond de cale à refaire, et c’est 30 000 euros à débourser. Et ce sans compter les impôts, la taxe d’habitation…Habiter sur une péniche n’est donc pas forcément une si bonne affaire. Mais vous aurez droit à un lot de consolation : en lieu et place des traditionnels “vide greniers”, les propriétaires de péniches organisent des… “vide cales” Le Pointû 6 décembre 2007

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