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Janette et Psyché
Claudine Boulanger-Pic, psychologue
MIROIR, APPRENDS-MOI À PRENDRE SOIN DE MOI
Nombreux sont les témoignages de Janette qui, tout en ayant conscience que prendre soin de soi est la base du bien-être physique et émotionnel, oublient, négligent ou malmènent leur corps. Elles affirment que les jeux sont faits dès le départ, on est naturellement doué pour se faire du bien ou on est condamné à lire les conseils sans pouvoir les appliquer! FAUX!
IL Y A DEUX FAÇONS DE VIVRE SON CORPS Soit je me dis “j’ai un corps”, et en pensant à lui je le tiens pour mon bien le plus précieux donc j’en prends soin. J’ai conscience que c’est un «maître souverain», comme le définit la psychanalyse, qui a le pouvoir de prolonger ou d’arrêter notre vie, je peux le traiter avec tous les égards qu’il mérite. Soit je me dis “je suis mon corps” et là je l’identifie à mon être donc je l’oublie; car lorsque nous ne faisons qu’un avec notre corps, nous ne pouvons pas nous dédoubler, et donc le prendre comme objet de soins. L’ÊTRE HUMAIN NE PEUT PAS “SE FAIRE EXISTER” PAR LUI-MÊME C’est pourquoi on prend soin de soi non pour soi, mais en fonction du regard des autres. Pour préserver une image de soi. Si l’on ne se sent pas assez important, si l’on doute de sa valeur, si l’on n’a pas trouvé sa place, prendre soin de soi n’a pas de sens. Si du regard des autres dépend le regard que nous posons sur nous, c’est le regard parental qui, le premier, nous permet de développer une relation bienveillante – ou non – avec notre corps. La perception de soi est façonnée par des mots, des gestes et des regards perçus dans l’enfance. Si cette expérience a été satisfaisante, nous pourrons construire une image saine de notre corps et une bonne estime de soi. Si ce n’est pas le cas, la relation au corps sera plus difficile, et on préférera oublier ce mal-aimé de différentes manières: mauvaise nourriture, surmenage, absence d’hygiène de vie, etc. À ces données de départ viennent s’ajouter les messages positifs ou négatifs transmis par notre éducation. Ce conditionnement détermine nos comportements: ne pas oser prendre du temps pour soi sans culpabilité, considérer que s’occuper de soi est une perte de temps, une preuve d’égoïsme, associer repos et paresse… Toutes ces croyances, plus ou moins conscientes, peuvent nous rendre sourdes à nos besoins et freiner notre aspiration au mieux-être.
Penser qu’on ne le mérite pas: «Je n’ai pas le droit de me faire plaisir», «Je ne mérite pas ces dépenses», «Ce ne sont pas des soins qui me rendront plus heureuse». Et chacune de ces pensées abrite de l’agressivité que l’on retourne contre soi, un état dépressif, ou simplement une reconduction des messages inconscients transmis de génération en génération. Croire que ça peut faire mal: Lorsque l’on s’est construit dans un environnement affectif rigide, la douceur, les attentions, le toucher ne nous sont pas seulement étrangers, ils représentent une menace pour notre équilibre. Prendre soin de soi peut être douloureux ou impossible si c’est vécu comme une transgression. Pour ne pas remettre en question son éducation, donc risquer de faire chuter le parent de son piédestal, pour ne pas ébranler les stratégies de défense qui nous ont aidés à nous construire, nous verrouillons toutes les portes afin de continuer à nous traiter comme nous l’avons été. Heureusement, s’il est plus facile de prendre soin de soi lorsque l’on a appris à s’accepter, à s’aimer, il est aussi vrai qu’apprendre à se prodiguer des soins peut conduire à mieux s’accepter et à mieux se traiter. Cependant attention, la politique des petits pas est la seule qui puisse nous réconcilier en douceur avec notre corps, donc avec nous-mêmes. Plutôt que de vous vanter les mérites – indéniables – des spas, instituts de massages, cours de yoga ou de méditation, je vous suggère une petite ordonnance thérapeutique en 7 pistes pour se faire du bien un peu plus, un peu mieux: 1. Organisez votre agenda. Choisissez deux heures dans la semaine et réservez-les. Activité ou oisiveté, elles vous appartiennent. Avec le temps, vous apprendrez à en faire le meilleur usage pour vous.
2. Choisissez votre rythme. Vous êtes plus jogging que yoga, plus fitness que méditation? Bougez à votre rythme, selon votre personnalité et vos besoins. Il n’y a qu’une seule façon de prendre soin de soi: écouter, accueillir et respecter ses propres ressentis.
3. Apprivoisez le plaisir. Une tasse d’excellent thé, une heure à lire emmitouflée dans une couverture, un plateau-télé spécial régression… Une fois ce plaisir savouré, notez vos sensations et émotions, y compris les moins confortables (gêne, culpabilité, tension, honte etc.). Vous apprendrez à affiner votre sens du plaisir en comprenant ce qui vous empêche de le vivre pleinement.
4. Prenez conscience de vos gestes (la pleine présence). En vous lavant, en vous maquillant, en buvant du café, en vous habillant, en marchant, en mangeant ralentissez votre tempo et prêtez attention aux sensations que ces gestes vous procurent. Plus nous agissons en automates, plus nous oublions notre corps, et plus nous le négligeons.
5. Félicitez-vous. Chaque petit soin, chaque petite attention que vous vous accordez est un grand pas vers la liberté intérieure. Bien se traiter est difficile pour la plupart d’entre nous, ne l’oubliez pas!
6. Ne placez pas la barre trop haut. Notez sur un carnet toutes vos phrases et pensées qui commencent par «Je dois», «Je ne dois pas», «Il faut», «Il ne faut pas», «T’as qu’à». Peut-être prendrez-vous conscience que vos objectifs en matière de nutrition, de forme, de beauté sont trop contraignants, donc difficiles ou impossibles à atteindre. Se montrer trop exigeant avec soi c’est aussi se maltraiter.
7. Faites équipe. À deux ou en groupe, on est plus motivé car plus soutenu. Massages, piscine, cours de musique ou de danse, créez votre réseau «bien-être». Surtout, serrez-vous les coudes; pas de jugements ni de comparaisons… que de la bienveillance entre vous!