Immobilier commercial volume 11 - numéro 4 - Perspectives

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QUÉBEC

PERSPECTIVES BRUNO TURCOTTE, B.A.A., É.A.

Vice-président, Immobilier et ressources matérielles La Capitale, Groupe financier

MICHELLE LAURENDEAU

Gestionnaire en immobilier, Coordonnatrice de secteur / Région de Québec Boardwalk REIT

NORMAND HUDON

Architecte associé Coarchitecture

MIGUEL DUARTE E SOUSA, ing. PA LEED

Président directeur-général Ambioner

LA PÉNURIE DE MAIN-D’ŒUVRE DANS LA RÉGION DE QUÉBEC

BIEN PLUS QU’UNE PROBLÉMATIQUE DE RESSOURCES HUMAINES! PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTOPHE LEDUC

JBC MÉDIA PAR ROXANE PAQUET

S’il est une problématique commune à toutes les entreprises de la région de Québec – et de l’ensemble de la province – , c’est bien la pénurie de main-d’œuvre qualifiée. Tous les employeurs semblent éprouver de grandes difficultés à trouver et garder les employés leur permettant de soutenir leur croissance. Nos experts de la capitale nationale ont mis les choses en perspective et ont fait le point sur les solutions possibles pour les entreprises, mais aussi pour la ville, à ce problème qui doit se traiter de manière globale. D’emblée, Bruno Turcotte, vice-président, immobilier et ressources matérielles à La Capitale, résume le constat de nos quatre chroniqueurs : « Au premier trimestre de 2018, le taux de chômage à Québec est à 3,6 %, et la création d’emplois se maintient, ce qui rend le recrutement difficile. » Des propos appuyés par Normand Hudon, associé et architecte chez Coarchitecture : « La majorité des entreprises établies dans la région de Québec sont actuellement ralenties dans leur croissance par la difficulté à pourvoir les postes ouverts ainsi que par des taux de roulement de personnel plus élevés que par le passé. Les employeurs doivent donc faire preuve d’imagination pour se rendre attractifs. »

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UNE APPROCHE GLOBALE REPENSÉE Pour ce faire, les entreprises doivent entreprendre une mutation de fond, sur tous les aspects du travail et pas seulement au sujet du recrutement, selon M. Turcotte : « L’utilisation des services d’affichage des corporations et des associations professionnelles pour joindre directement leurs membres maximise la diffusion des offres auprès de l’expertise visée. La diffusion sur les sites de recherche d’emploi et sur les réseaux sociaux permet de maximiser ses résultats. Certains critères soutiennent l’effort de recrute­ ment, comme la qualité de l’environnement de travail qui est devenu un critère important à ce chapitre. »


Pour lui, même l’organisation et les méthodes de travail doivent évoluer en vue de proposer un environnement idéal. « De plus, l’évolution des processus de travail, qui est de plus en plus poussée vers la collaboration, augmente l’efficacité et l’agilité des équipes. Cette évolution a un impact positif sur le recrutement et particulièrement chez les milléniaux. On ne peut considérer le recrutement comme une tâche isolée. L’image de l’entreprise, l’organisation du travail, le dynamisme des dirigeants, les services offerts aux employés et le sentiment de communauté sont des éléments importants », insiste M. Turcotte.

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L’ADOPTION D’UNE STRATÉGIE DU CONFORT Normand Hudon s’inscrit dans la même ligne et pousse encore la logique plus loin. Il voit dans ces mutations d’entreprises la perspective de répercussion jusque dans les rapports des employeurs à l’immobilier. « Une bonne façon de se rendre plus attractif sur le marché de l’emploi est d’offrir un milieu de travail distinctif qui motivera l’employé à y rester ou à venir s’y établir. Bien orchestrée, une telle stratégie peut être rentabilisée rapidement. Certains grands employeurs de type propriétaires occupants comme Desjardins ou des organismes publics optent pour la rénovation de leurs espaces en cours d’occupation de leurs immeubles. C’est habituellement long, pénible et coûteux. Voilà pourquoi les locataires choisissent de plus en plus de profiter d’une fin de bail pour déménager dans un local vacant qui aura été rénové de façon efficiente. Bailleurs et employeurs ont donc intérêt à se démarquer dans le marché des milieux de travail. Pour y arriver, le concept le plus important à retenir est celui du confort, car il permettra de développer des stratégies où l’employé et l’employeur trouveront tous deux leur compte. » Ainsi, le défi déborde le cadre de l’innovation d’une entreprise, puisque le relever requiert une stratégie globale et planifiée : « Pour pouvoir établir un plan d’action sur la base d’un concept aussi vaste que le confort, on doit le décliner en trois branches : le confort physique, le confort fonctionnel et le confort psychologique. Couplé à des défis stimulants pour les employés, à des processus clairs et à une bonne culture d’entreprise, un environnement de travail misant sur le confort atténue la pression à la hausse sur les salaires. C’est un outil essentiel pour permettre aux meilleurs employeurs de garder le cap sur la croissance dans un marché de l’emploi qui avantage les employés », détaille l’architecte.

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PERSPECTIVES

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UNE PROBLÉMATIQUE QUI DÉPASSE L’ENTREPRISE Pour Miguel Duarte e Sousa, ingénieur et PDG d’Ambioner, cette problématique impose d’abord aux entreprises de changer de paradigme : « Chez Ambioner, nous sommes en constante remise en question dans le but de garder le " bonheur " au travail et d’améliorer l’attractivité des talents qui partagent notre vision et notre mission. » Mais il souhaite aussi que la perspective soit élargie, car les entreprises ne peuvent espérer résoudre seules une problématique sociétale, voire mondiale. « La compétition pour la main-d’œuvre qualifiée n’est toutefois pas seulement une affaire qui touche les entreprises, il s’agit maintenant d’une question de premier plan pour les villes, et même les pays. Le vieillissement de la population, les départs à la retraite et la mobilité de la maind’œuvre font en sorte que le recrutement est devenu le principal enjeu des entreprises ! Celles-ci doivent mettre à profit leur imagination pour attirer les talents et les garder, mais il s’agit d’un défi de société qui ne doit absolument pas être négligé par tous les paliers gouvernementaux. Les villes doivent être attirantes et miser sur leurs atouts afin de soutenir la croissance de leurs entreprises », explique l’ingénieur. UNE AFFAIRE DE SÉDUCTION Michelle Laurendeau, gestionnaire en immobilier chez Boardwalk REIT, partage ce point de vue ; elle souhaite voir une gestion plus intégrée du problème de la main-d’œuvre. Mme Laurendeau relève d’ailleurs quelques initiatives locales inspirantes : « Depuis 2011, la municipalité régionale de comté 38

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de Val-d’Or a développé le " fonds de séduction ", une enveloppe de 150 000 $ répartie par tranche de 1 500 $ pour répondre à la pénurie de maind’œuvre. Le fonds vise à aider au recrutement de gens provenant de l’extérieur de la région. Ce montant peut couvrir les frais pour inviter un candidat à une visite exploratoire des lieux afin de découvrir les attraits et de " vendre la ville ". De plus, ces sommes servent aussi à couvrir une partie des frais d’emménagement, et un montant dit de rétention se trouve réservé si le candidat est demeuré dans l’entreprise 90 jours après l’embauche. » « À Beauceville, un montant de 9 000 $ est offert par la communauté en chèques-cadeaux pour chaque nouvelle construction résidentielle sur son territoire. Dans d’autres coins du monde, des programmes d’apprentissage ou de mentorat sont développés dans l’entreprise ; en contrepartie, des incitatifs de taxe sont reçus », expose-t-elle. Pour Mme Laurendeau, les instances municipales et régionales doivent être proactives dans une compétition qui les concerne aussi : « Les villes doivent collaborer avec les recruteurs afin d’attirer une main-d’œuvre qualifiée qui répondra aux demandes du marché. C’est d’ailleurs une colla­ boration avantageuse puisque ces nouveaux citoyens ne vont pas seulement dépenser leur salaire ici, mais ils deviendront eux-mêmes nos ambassadeurs. » Et elle conclut en lançant la question : « Qu’est-ce que la Ville de Québec est prête à faire maintenant afin d’attirer de nouveaux citoyens ? »


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