Immobilier commercial volume 11 - numéro 5 - Environnement et urbanisme

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ENVIRONNEMENT ET URBANISME

CHANGEMENTS CLIMATIQUES : L’URBANISME JOUE UN RÔLE PRIMORDIAL Frédéric Dufault

À moins de nous appeler Donald Trump, nous sommes bien conscients que les changements climatiques sont devenus la nouvelle réalité du 21e siècle à laquelle les municipalités, citoyens et propriétaires ainsi que les gestionnaires immobiliers devront s’adapter.

Frédéric Dufault, urbaniste, est évaluateur environ­ nemental de site agréé (EESA) et vérificateur environnemental agréé (VEA), agréments qui sont décernés par l’Association québécoise de vérification environnementale (AQVE). Il cumule plus de 15 années d’expérience dans le domaine de l’urbanisme et de la gestion immobilière et environnementale. Il est président de la firme Enviro 3D Conseils inc.

Jusqu’à récemment, le Québec a été relative­ ment épargné par les foudres de Dame Nature… Cependant, de plus en plus d’incidents clima­ tiques deviennent la réalité : pluies torrentielles, inondations printanières, chaleurs accablantes, feux de forêt, ouragans et, plus récemment, tornades dans la région de l’Outaouais. Tous ces événements sont-ils directement liés aux changements climatiques ? Bien sûr que non ; plusieurs résultent d’incidents ou de situations, lesquels, considérés individuellement, n’auraient pas d’incidence sur notre mode de vie. Toutefois, lorsqu’ils sont combinés, ou lorsqu’ils se produi­ sent parce que les conditions « gagnantes » sont réunies, ces événements ont un impact non négligeable sur notre vie, notre milieu de vie et, surtout, notre sécurité au sens strict et au sens large du terme.

encore faut-il que les élus (tant provinciaux que municipaux) et les fonctionnaires y croient et reconnaissent qu’il y a beaucoup de travail à faire. Comment y arriver ?

Ces événements météorologiques, d’origine naturelle ou anthropique, remettent en question ce pour quoi l’être humain bâtit des maisons, des structures et des environnements – afin de s’assurer d’une qualité de vie et d’une sécurité devant des événements prévisibles et non prévisibles.

Et si un citoyen ou un promoteur souhaite incor­ porer des murs végétalisés dans ses bâtiments, la réglementation et le code du bâtiment sontils adaptés à cette réalité ? Présentement, on approuve les projets à la pièce, avec l’aide de divers professionnels ; mais l’urbaniste n’est-il pas le professionnel qui devra au moins recon­ naître les bonnes pratiques et diriger son client, le citoyen, vers les bonnes ressources, ce qui est rarement le cas actuellement ?

Mais que peut-on concrètement faire pour adapter nos milieux de vie, nos infrastructures et nos habitats à cette nouvelle réalité ? L’urbanisme et l’aménagement du territoire jouent un rôle de premier plan. Les Américains, malgré les croyances de leur président, ont compris depuis une décennie que la planifica­ tion du territoire devait être revue à la suite de nombreux sinistres et qu’au moment de la reconstruction, il ne fallait pas répéter les erreurs du passé. Les nouvelles technologies et tendances vont nous conduire dans la bonne direction, mais

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Pensons par exemple aux toits verts, pour lesquels il faut remettre le Code national du bâtiment à jour, ainsi qu’aux différents règlements municipaux afin de permettre la réalisation de tels projets et de faciliter la vie aux promoteurs qui désirent s’engager dans cette voie. Par ailleurs, on parle beaucoup d’îlots de chaleur et l’on encourage les toitures plates de couleur blanche ou pâle, mais qu’en est-il des bardeaux d’asphalte sur une toiture en pente ? Pourquoi continuer à encourager des toitures foncées ?

Le captage des eaux de ruissellement et des eaux de pluie est également une autre façon de permettre aux infrastructures en place de continuer à pouvoir absorber les grandes quan­ tités d’eau qui peuvent s’accumuler quand surviennent des pluies torrentielles. Mais il faut plus que les petits barils récupérateurs d’eau de pluie – bien que ce soit déjà un commencement. Des ingénieurs et des visionnaires doivent pousser les nouvelles idées, comme les pavés perméables, les réservoirs d’eau grise de grande


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capacité pour les résidences, mais également pour les commerces et les industries et, pourquoi pas, des quartiers complets. Posons-nous aussi cette question : a-t-on toujours besoin d’utiliser de l’eau traitée pour accomplir les activités et générer les produits industrialisés ? Pourrait-on récupérer les eaux de pluie pour en faire usage sans avoir à la forcer dans des canalisations et mettre en péril des quartiers ou des cours d’eau ? Il faut encourager les promoteurs et les développeurs à aménager assez de capacité de rétention pour permettre une accumulation qui perdurerait à moyen terme. Certaines villes forcent maintenant l’aménagement de bassins de rétention de pluie à court terme, mais si l’on obligeait les grands projets à rejeter l’eau dans un milieu humide présent ou en devenir ? La réutilisation des friches industrielles ou la densification des quartiers sont d’autres approches ou solutions à

considérer. Moins l’on encourage l’étalement urbain, la destruction des zones agricoles et des milieux humides, plus on met l’accent sur les structures existantes. Nos professionnels trouvent des façons de répondre aux nouvelles réalités, qu’elles soient économiques, sociales ou environnementales et climatiques. Les gouvernements modifient les lois et les règlements pour protéger les milieux et les espèces vulnérables ; mais le Québec n’a toujours pas de politique ou de lignes directrices pour l’aménagement et l’urbanisation du territoire québécois. Les municipalités régionales et locales doivent, au moyen des schémas d’aménagement, des plans d’urbanisme, mais également des différents règlements d’urbanisme (qui sont opposables aux tiers – zonage, construction, lotissement, nuisance, etc.), prendre en compte cette nouvelle réalité et prévoir les contingences nécessaires en cas de sinistres. Il est encore temps de prendre notre territoire en main et… d’oser  !

1327-1333 SAINTECATHERINE OUEST & 1411 CRESCENT

2250 ALFRED-NOBEL, TECHNOPARC SAINTLAURENT

En cours de modernisation

Paolo Valente

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