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QUÉBEC
Jérôme Lampron
Caroline Berthiaume
Experts invités
Œuvrant dans le milieu de l’évaluation depuis 2006 et engagé comme évaluateur agréé chez Groupe Altus depuis 2009, Jérôme Lampron se spécialise dans l’évaluation de propriétés résidentielles, commerciales et industrielles. Il a agi à titre de témoin expert devant plusieurs tribunaux et a collaboré à de nombreux projets de développement actifs dans la grande région de Québec.
Caroline Berthiaume détient un baccalauréat en administration des affaires avec un cheminement spécialisé en gestion urbaine et immobilière à l’Université Laval. Elle œuvre en évaluation immobilière au sein du Groupe Altus depuis 2016 et se spécialise dans l’évaluation de la valeur marchande de terrains, d’immeubles multirésidentiels et commerciaux ainsi que dans la réalisation de diverses études de marché. Élue au comité du Réseau des Jeunes Ambassadeurs, elle agit à titre de représentante dans la région de Québec.
MARCHÉ MULTIFAMILIAL DE QUÉBEC LA SURCHAUFFE DU MARCHÉ IMMOBILIER RÉSIDENTIEL UNIFAMILIAL
Depuis plusieurs mois, il est régulièrement question de la flambée des prix du marché immobilier dans la grande région de Québec. Les maisons unifamiliales mises en vente trouvent preneurs à des rythmes effarants, et la hausse des coûts de construction ne semble pas ralentir le développement des nouveaux quartiers.
La pandémie et la série de programmes gouvernementaux qui ont suivi font partie du portrait actuel, mais bien futée est la personne qui saura mesurer avec précision leurs impacts sur le marché immobilier une fois qu’ils auront disparu. En outre, la tendance à déserter les centres-villes que l’on voit poindre dans les autres grandes villes canadiennes semble moins affecter le marché de Québec. À juste titre, le Baromètre du marché immobilier résidentiel publié par l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ) au 1er trimestre 2021 fait état d’une hausse de transactions dans tous les secteurs, bien qu’une propension plus importante ait été constatée pour la périphérie nord, signe que Québec ne fait pas exception.
Cet engouement du marché de la résidence unifamiliale combiné avec la flambée des prix aura nécessairement un effet à moyen terme. Mais qu’en est-il du marché locatif et des nombreux projets de développements multifamiliaux qui poussent sur le territoire?
DE NOUVELLES DYNAMIQUES POUR LES SECTEURS CENTRAUX ET LES BANLIEUES
Le taux d’inoccupation de la région métropolitaine de recensement (RMR) de Québec s’est établi à 2,7% en 2020, soit légèrement plus élevé qu’en 2019 (2,4%). Néanmoins, ce n’est pas parce que le taux d’inoccupation demeure relativement stable sur le marché que cette dynamique s’observe pour tous les secteurs de la région. Effectivement, le marché s’est détendu dans certains secteurs centraux alors qu’il s’est resserré dans plusieurs secteurs de banlieue et sur la rive sud. La Haute-Ville, la Basse-Ville et Sainte-Foy–Sillery sont des secteurs habituellement prisés par les étudiants, les migrants et les résidents non permanents, qui sont principalement composés de ménages locataires. La fermeture des frontières canadiennes pendant la pandémie de COVID-19 a indubitablement fait diminuer la demande de logements provenant de cette clientèle. De plus, la suspension du présentiel par les établissements d’enseignement a contraint les étudiants à suivre leurs cours à distance. Cette baisse de la migration, jumelée à l’éducation à distance, a affaibli la demande locative pour ces secteurs. La chute de l’activité touristique en temps de pandémie a également libéré des logements qui auraient autrement été offerts en location à court terme. Avec la progression de l’offre et une demande affaiblie, le taux d’inoccupation a subséquemment augmenté dans ces secteurs centraux.
Parmi les impacts positifs du télétravail lié à la COVID-19 figure la popularité accrue des banlieues où l’inoccupation a continué de se resserrer. Une diminution importante de l’inoccupation a d’ailleurs été observée sur le territoire de Saint-Augustin-de-Desmaures–Cap-Rouge (-6,8%), Lévis (-1,2%), Beauport (-0,7%) et La Haute-Saint-Charles (-0,7%). De son côté, le secteur Les Rivières fait état d’un relâchement (+0,7%), mais cela s’explique par la forte activité de construction de logements locatifs. Le taux d’inoccupation des autres secteurs, soit Charlesbourg (-0,4%) et Val-Bélair–L’Ancienne-Lorette (-0,4%), a quant à lui connu une diminution plus modérée, mais il poursuit sa baisse pour une troisième année consécutive.
PAS DE RALENTISSEMENT DU CÔTÉ DE LA CONSTRUCTION MULTIFAMILIALE
Le nombre de mises en chantier de nouveaux logements locatifs (excluant les résidences pour personnes âgées) est demeuré élevé en 2020 dans la RMR de Québec. La construction de 4684 nouvelles unités a débuté, soit 1000 logements de plus qu’en 2019. On observe désormais que le nombre de mises en chantier a doublé par rapport à ce qu’on observait en 2015, alors qu’à l’époque, ce chiffre était déjà perçu comme une croissance fulgurante par rapport aux années antérieures.
Il est ainsi possible de noter qu’entre 2011 et 2016, le rythme soutenu de mises en chantier avait eu pour effet de faire augmenter le taux d’inoccupation. Les anticipations étaient donc favorables à la poursuite de cette tendance à la hausse, particulièrement après le bond de mises en chantier de 2015. Cependant, force est de constater que la réalité fut différente.
Un facteur important observé depuis les dernières années est le vieillissement de la population qui continue de s’accélérer. Ce phénomène a joué un rôle majeur dans l’accroissement de la demande de logements locatifs, ce qui a favorisé une baisse du taux d’inoccupation malgré la croissance soutenue de l’offre.
Le nombre élevé de mises en chantier a permis non seulement d’augmenter considérablement l’offre, mais aussi de la diversifier. Autrefois inexistants sur le marché, les projets récents offrent des logements locatifs avec une qualité de finition haut de gamme, possédant de bonnes superficies et de nombreux espaces et services communs, ce qui diverge du cadre bâti existant qui est vieillissant. Ces projets semblent particulièrement séduire les ménages propriétaires dont les enfants quittent le nid familial ou ceux qui sont en mode préretraite, si ce n’est déjà fait.
IMPACTS SUR LES LOYERS
Les nombreuses enquêtes et études menées par le Groupe Altus au cours de la dernière année nous font croire en la vigueur du marché, et le rythme d’écoulement observé est favorable à la livraison de ces projets. Or, la hausse fulgurante des coûts de construction entraîne nécessairement son lot de complications dans la planification des projets en cours de développement.
Il est facile de concevoir que le constructeur d’une maison unifamiliale transmette la facture à un acheteur qui consent à payer une résidence à prix plus élevé dans les conditions du marché actuelles. Il est cependant plus difficile de penser qu’un locataire, dans un marché où la hausse des coûts s’avère si forte, accepte une augmentation similaire de son loyer. Cela est sans compter l’impact du contrôle qu’exerce le Tribunal administratif du logement sur le marché locatif. Cette situation va nécessairement accentuer l’écart entre les logements existants et les logements neufs.
La conséquence à moyen terme de cet écart sera un manque à gagner pour ces propriétaires, qui peineront à maintenir la compétitivité de leurs logements, ce qui pourrait conduire à des situations plus critiques comme des entretiens différés sur des éléments structuraux ou mécaniques importants, ou encore à des projets de rénovations en vue de redresser les loyers, un terme malheureusement trop à la mode depuis quelque temps.
MISES EN CHANTIER ANNUELLES DE LOGEMENTS LOCATIFS ET TAUX D’INOCCUPATION, RMR DE QUÉBEC
En nombre d’unité
SOURCE : SCHL
TRANSACTIONS MAJEURES
Le marché transactionnel a été très actif au cours des derniers mois, affichant plusieurs transactions d’importance dans la région, dont trois qui ont particulièrement retenu notre attention. Deux d’entre elles concernent des immeubles de construction récente qui témoignent de l’engouement pour ce type de produit.
Mentionnons d’abord un départ remarqué dans le marché de Québec: celui du bras immobilier de la caisse de retraite des fonctionnaires municipaux de l’Ontario, Oxford Properties Group, qui a vendu ses actifs à S.E.C. Domaricor pour la somme de 118,1 M$, pour 527 logements (224 169$/logement), soit pour la vente des complexes Aristocrate, Domaine des Méandres et Villas Cortina.
Puis, le Groupe Dallaire a vendu des participations dans son projet Faubourg du Moulin à Beauport sur la base d’un prix de 96 M$ pour les immeubles Sirocco et Alizée, lesquels comptent un total de 449 logements (213 808$/logement).
815-825
boulevard Lebourgneuf
Québec
Informations pour la location
Claude Pellicelli 418 683-0188 cpellicelli@btbreit.com www.btbreit.com
ISTOCK PAR EYECRAVE
De son côté, Immeubles Rainier Speth a vendu les Jardins de Coulonge à Logisbourg pour la somme de 44 M$ pour 228 logements (192 982$/logement), lesquels ont choisi de rebaptiser le complexe Le Bourg de Coulonge dans le secteur Sillery.
Ces transactions illustrent bien l’appétit des investisseurs, et il est intéressant de noter que dans les trois cas, les acquéreurs sont des propriétaires locaux avec des capitaux privés. Il y a fort à parier qu’avec la flambée des prix dans les grandes villes canadiennes comme Montréal et Toronto, d’autres joueurs pourraient se manifester dans la région de Québec, et ce, dans un proche avenir.
ET POUR LES PROCHAINS MOIS …
Le retour en présentiel des étudiants locaux et internationaux dans les établissements d’enseignement et l’afflux des travailleurs étrangers devraient permettre au marché locatif de se rétablir graduellement. Les secteurs qui ont souffert pendant la pandémie connaîtront probablement un regain d’intérêt lorsque les effets de celle-ci se dissiperont. Également, le repositionnement des ménages qui se sont éloignés des grands centres pendant la crise sanitaire pourrait se faire avec le retour sur les lieux de travail. Cependant, le rattrapage en matière d’immigration internationale pourrait s’étaler sur plusieurs années, et le retour éventuel de la population qui s’est déplacée en périphérie des grands centres n’est pas acquis.
La question se pose alors. Retrouverons-nous le marché d’autrefois au moment du retour à la normalité ou sera-t-il différent de ce que nous avons connu dans les dernières années? Jusqu’à maintenant, la présence de nombreuses grues un peu partout sur le territoire de la RMR de Québec nous démontre bien que le segment locatif est en pleine effervescence et qu’il ne semble pas y avoir de ralentissement prévu de l’offre. Cependant, qu’en sera-t-il de la demande? Étant donné qu’un des moteurs importants de la demande est le vieillissement de la population, tout porte à croire, si le rattrapage se fait comme prévu au centre-ville, qu’elle devrait aussi être au rendez-vous.
LAVAL EN VOIE D’ADOPTER UN NOUVEAU CODE DE L’URBANISME
PAR SYLVIE LEMIEUX, JOURNALISTE
VILLE DE LAVAL
La Ville de Laval poursuit ses démarches vers l’adoption de son nouveau Code de l’urbanisme (CDU). En avril, elle a adopté le projet de règlement qui a marqué le coup d’envoi d’une dernière étape de consultation publique comme le prévoit la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme, qui se poursuit jusqu’à la mi-juin.
L
e nouveau CDU s’inspire des meilleures pratiques en matière d’urbanisme, Laval voulant offrir à tous ses citoyens des milieux de vie diversifiés, sains, conviviaux et à échelle humaine. Il s’inscrit également dans une approche réglementaire novatrice, développée aux États-Unis, qui met l’accent sur la forme urbaine (Form-Based Code), l’architecture et les espaces publics plutôt que sur les usages.
C’est en 2018 que la Ville a lancé ce chantier qui a débuté à la suite de l’entrée en vigueur du Schéma d’aménagement et de développement révisé (SADR).
Le CDU regroupe l’ensemble de la réglementation d’urbanisme (zonage, lotissement, construction, etc.) en un seul règlement beaucoup plus facile à comprendre et à interpréter. Entre autres, l’ajout de plus de 500 illustrations et l’explication des intentions derrière chacune des normes réglementaires faciliteront la vie aux Lavallois et aux professionnels pour la réalisation de leur projet d’aménagement, de construction ou de rénovation.
CONSULTATION PUBLIQUE
En mai, Laval a mené des séances publiques virtuelles d’information pour faire connaître les grandes lignes de sa future réglementation. Dans la semaine du 14 juin, elle tiendra aussi des audiences publiques où les citoyens et les groupes seront invités à présenter leur mémoire ou leurs avis et commentaires. La date limite pour le dépôt des mémoires est le 14 juin 2021. Pour consulter le projet de règlement et connaître les modalités de participation à la consultation publique, il suffit d’accéder à la plateforme Web des Portes ouvertes virtuelles à revisionurbanisme.laval.ca.
À la suite de la consultation publique, la Ville procédera à l’analyse des contributions citoyennes et décidera si elles seront intégrées ou non dans la version définitive du règlement. L’entrée en vigueur du CDU se fera au cours des mois qui suivront son adoption par le conseil municipal.