Immobilier commercial volume 7 - numéro 2

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Dominique ANGLADE De l’ambition et de l’audace pour Montréal

Par NATHALIE SAVARIA

marcantoinecharlebois.com

Une poignée de main est souvent un puissant indice de la personnalité d’un individu. Celle de Dominique Anglade, présidente-directrice générale de Montréal International, est franche et directe. D’entrée de jeu, on sait que cette femme au charisme indéniable nous donnera l’heure juste. En entrevue, elle ne taira rien des atouts comme des faiblesses de Montréal, une ville qu’elle entend promouvoir et faire croître avec son équipe et toute la force de ses convictions. Portrait d’une femme pleine d’ambition pour la métropole. >

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Un héritage puissant Mais qu’est-ce qui fait courir Dominique Anglade, une mère de trois jeunes enfants de deux, cinq et sept ans, qui avoue ne dormir souvent que cinq heures par nuit ? Pour comprendre son ambition, il faut remonter aux origines. « J’ai toujours été une personne compétitive, admet Mme Anglade. À l’école, j’aimais avoir les meilleures notes. C’était naturel pour moi. » Il faut dire que son père, Georges

« J’ai toujours été une personne compétitive. À l’école, j’aimais avoir les meilleures notes. C’était naturel pour moi. »

JBC MÉDIA PAR DENIS BERNIER

– Dominique Anglade

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Archives personnelles de Dominique Anglade

Dominique Anglade (à droite) en compagnie de sa sœur, Pascale (à gauche), et de ses parents

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e l’acier trempé. Voilà l’expression qui vient à l’esprit pour parler du caractère de la nouvelle PDG de Montréal International, en poste depuis novembre 2013, une organisation qu’elle ambitionne d’élever à un niveau inégalé. Déjà lauréate de nombreuses distinctions, Dominique Anglade a été nommée récemment parmi les 214 Jeunes Leaders mondiaux du Forum économique mondial. Elle est d’ailleurs la seule Québécoise à avoir reçu cet honneur en 2014. Présent lors de l’entrevue, Elie Farah, vice-président Investissement Grand Montréal, n’a que des éloges à l’égard de sa nouvelle PDG. « La première fois que j’ai rencontré Dominique, j’ai dit à ma femme en rentrant à la maison : “Cette femme est porteuse d’espoir.” Montréal International existe depuis 1996. Le temps est venu de réinventer l’organisation et de l’amener à un niveau plus élevé. Dominique a le profil parfait. C’est une visionnaire. »

Anglade, géographe, politicien et écrivain, et sa mère, Mireille Neptune, économiste et féministe, placent l’éducation au sommet de leurs valeurs et exigent beaucoup de leurs deux filles en ce domaine. Un jour, la jeune Dominique présente à sa mère un bulletin qui porte la mention « Assez bien » en mathématiques. Furieuse, celle-ci juge la situation inacceptable. « Je n’ai plus jamais ramené un tel bulletin à la maison », raconte-t-elle en s’esclaffant. Aujourd’hui, à sa façon, Dominique Anglade prend tout aussi à cœur l’éducation de ses enfants. À la maison, ils s’expriment en trois langues : en allemand avec papa, en anglais avec la nounou et en français avec maman. Et même si sa fonction de PDG l’occupe beaucoup, elle prend le temps d’accompagner son fils de sept ans dans l’apprentissage de la lecture et nous confie lors de l’entrevue qu’elle supervisera l’un de ses devoirs par téléphone en fin d’après-midi. Georges Anglade, l’un des fondateurs de l’UQAM, sensibilise aussi ses filles dès l’enfance aux questions sociales et économiques, en les emmenant sur le terrain, en République dominicaine, pour rencontrer des paysans et voir comment ils vivent. L’emprisonnement et l’exil de son père, un opposant au régime Duvalier en Haïti, suscitent également chez la jeune Dominique « une prise de conscience plus large du monde et un intérêt pour la chose publique ». Un autre legs de ses parents, morts tous les deux lors du tremblement de terre en Haïti en janvier 2010, est « celui de l’importance de s’impliquer dans la société, d’avoir de l’impact et de redonner ce que l’on a reçu ». Cette année-là, Dominique Anglade cofonde KANPE, un organisme qui lutte contre le cycle de la pauvreté en Haïti et dont le nom créole signifie en français « Debout ».


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« J’ai fait beaucoup de choses, dans ma vie, que j’avais dit que je n’allais pas faire. »

Un chemin bien à soi Pétrie d’idéaux et de convictions sociales, Dominique Anglade n’en demeure pas moins foncièrement pragmatique. Dès l’âge de 15 ans, elle décide qu’elle étudiera en génie industriel. Dans son esprit, un tel diplôme lui permettra de satisfaire son goût pour les sciences et l’humain et de trouver rapidement du travail. Elle ne se trompe pas. Car dès la fin de ses

études à l’École Polytechnique, elle est recrutée par Procter & Gamble, où elle se distingue par ses qualités de meneuse. Alors qu’elle n’a que 24 ans, on lui propose la direction du département de logistique, qui comptait une centaine de personnes. Elle entre ensuite au service de Nortel Networks. Elle y restera de 2000 à 2005, multipliant les postes de direction avant de se joindre à la prestigieuse firme McKinsey à titre de consultante auprès de dirigeants de grandes entreprises. Un poste dont elle n’avait même pas rêvé et qui ne l’intéressait pas, a priori. « J’ai fait beaucoup de choses, dans ma vie, que j’avais dit que je n’allais pas faire. » C’est ce qui se produit d’ailleurs lorsque François Legault, le chef de la Coalition Avenir Québec (CAQ), entre en contact avec elle en 2011. Alors en congé de maternité, elle n’avait aucunement envisagé de se joindre à un parti politique. Elle se laisse pourtant convaincre : « Quand on regarde mon parcours, on constate que j’ai toujours été impliquée dans la communauté. Cependant, j’avais fait peu de politique active. À l’époque, je n’avais pas encore réussi à concilier mon engagement social et ma carrière. » En devenant présidente du comité exécutif national de la CAQ, en janvier 2012, elle réalise un idéal.

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Elle est encore présidente de la CAQ – qu’elle quitte à la fin de son mandat, en novembre 2013 – lorsqu’un chasseur de têtes la repère pour le poste de PDG de Montréal International. Si elle décide de relever le défi qu’on lui propose, c’est parce qu’elle sait qu’elle peut avoir de l’impact. Ce qui la séduit aussi, c’est que ce poste combine son intérêt pour les affaires et son souci pour le bien public.

« L’ambition, parce qu’on a besoin de voir plus grand et plus haut pour l’organisation et pour Montréal ; l’audace, la prise de risques, parce qu’il y a un coût à ne rien faire. Et l’ardeur, parce qu’il faut travailler ; il n’y a pas de miracles, dans la vie. » – Dominique Anglade

De l’ambition, de l’audace et de l’ardeur pour Montréal Fruit d’un partenariat public-privé, Montréal International (MI), une organisation à but non lucratif dont le conseil d’administration est présidé par Normand Legault, a pour mandat d’attirer des entreprises étrangères, des organisations internationales et des talents stratégiques dans la métropole. Le programme de la nouvelle PDG repose sur trois éléments clés : ambition, audace et ardeur. « L’ambition, parce qu’on a besoin de voir plus grand et plus haut pour l’organisation et pour Montréal ; l’audace, la prise de risques, parce qu’il y a un coût à ne rien faire. Et l’ardeur, parce qu’il faut travailler ; il n’y a pas de miracles, dans la vie », déclare la pragmatique PDG. Avec un positionnement fort, MI, sous la gouverne de Dominique Anglade, qui détient aussi un MBA de HEC Montréal, ambitionne de créer davantage de richesse dans la métropole par l’entremise de l’international. Une richesse qui se décline, selon la PDG, par la présence de filiales étrangères, dont MI veut accroître le nombre, mais aussi par celle d’organisations internationales (OI). La PDG ne manque d’ailleurs pas de souligner qu’avec 62 OI, Montréal se classe première au Canada, et que la métropole est l’une des huit villes onusiennes du monde.

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Avec un discours axé sur l’éducation, l’excellence et la création de richesse, la CAQ rejoint les aspirations profondes de Dominique Anglade, qui s’est inclinée devant le libéral Gilles Ouimet, dans la circonscription de Fabre, lors des élections d’août 2012.

Concrètement, pour atteindre ses objectifs, MI travaille en partenariat avec les différents représentants de l’écosystème socioéconomique montréalais afin de cibler les entreprises à solliciter à l’étranger. MI accueille ensuite les sociétés prêtes à investir et à s’implanter dans la métropole, négocie avec elles leur installation et les accompagne dans la venue de talents stratégiques. Bref, MI est présent à toutes les étapes du processus. Et les résultats sont probants : l’année dernière, Montréal a remporté la première place, parmi toutes les villes américaines du continent, quant à sa stratégie de prospection des investissements étrangers. MI a d’ailleurs connu une année exceptionnelle en 2013, avec 39 projets d’investissements étrangers directs totalisant 1,28 G $ et qui entraîneront la création ou le maintien de plus de 2 700 emplois dans le Grand Montréal. « Une performance attribuable à la concrétisation de projets majeurs tels que ceux d’Ericsson et d’Ubisoft, à des réinvestissements dans les jeux vidéo, mais aussi à la croissance marquée des investissements européens, qui ont compté pour plus de 80 %, l’année dernière, et sont principalement venus de la France et de la Scandinavie », commente Elie Farah.

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– Elie Farah

L’attractivité en question Selon la PDG, Montréal a tout pour séduire les investisseurs. Avec son réseau universitaire, sa main-d’œuvre qualifiée, ses infrastructures, ses incitatifs et surtout son accès aux marchés et aux ressources naturelles, Montréal se démarque avantageusement. Mais selon la clientèle ciblée, dans le monde, la métropole est présentée différemment. « En Europe, explique Elie Farah, on vend Montréal comme une porte d’entrée en Amérique du Nord plus amicale et plus sécuritaire que les États-Unis. On ajuste aussi notre message pour l’Asie et les États-Unis. » Par ailleurs, la stabilité de l’économie canadienne est un atout pour positionner Montréal auprès des investisseurs qui veulent diversifier leur portefeuille, d’après M. Farah. Cela dit, Montréal peine encore à attirer des investisseurs étrangers, par rapport aux autres villes canadiennes. Dominique Anglade en est consciente. Selon elle, Montréal n’a pas toujours reçu l’attention qu’elle méritait, par le passé, de la part du gouvernement. Une relance économique s’impose afin de mettre davantage la métropole sur l’écran radar des investisseurs étrangers. « Il faut qu’on soit plus agressif, dit-elle, qu’on décide de nos priorités et qu’on mette l’argent là où il le faut, sur les bons leviers, d’autant plus qu’on n’a pas le poids du nombre. Car si la croissance du PIB tourne autour de 1 %, celle de la population aussi. Il est essentiel qu’on intègre les immigrants en leur fournissant un travail plus rapidement. Tout cela donnera un avantage compétitif à Montréal. »

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« En Europe, on vend Montréal comme une porte d’entrée en Amérique du Nord plus amicale et plus sécuritaire que les États-Unis. On ajuste aussi notre message pour l’Asie et les États-Unis. »

En revanche, « MI a le devoir de faire part au gouvernement des éléments qui peuvent avoir un impact sur l’attractivité de Montréal », estime sa PDG, qui a d’ailleurs l’intention de multiplier ses prestations à cet égard auprès du gouvernement québécois. Se mobiliser pour Montréal Aux yeux de Dominique Anglade, MI, qui est responsable bon an mal an de la croissance de 10 % du PIB, ne peut parvenir seul à réaliser ses objectifs. Tous les acteurs locaux, y compris l’administration et le nouveau maire de Montréal, doivent y participer.

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Toutefois, des éléments peuvent nuire à l’attractivité de Montréal. Au moment de l’entrevue, la campagne électorale battait son plein, au Québec, et la question de la souveraineté a refait surface. Pour Mme Anglade, « une entreprise s’intéresse d’abord aux éléments fondamentaux. À partir du moment où on introduit un élément de perturbation, il faut savoir le gérer ».

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Archives personnelles de Dominique Anglade

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« Le maire a un rôle fondamental pour mettre Montréal sur la carte, et il a déjà envoyé un message clair en ce sens au milieu des affaires », mentionne la PDG. Quand on lui pose la question, Mme Anglade estime que le projet Saint-Laurent de François Legault figure parmi ceux qui pourraient favoriser la relance de Montréal, et ce, dit-elle, au-delà des allégeances

politiques. Par ailleurs, un grand événement se profile à l’horizon, soit le 375e anniversaire de Montréal, en 2017, et la PDG ne veut pas manquer ce rendez-vous. Dans un plan d’affaires récent, elle a proposé la mise sur pied d’un réseau d’ambassadeurs internationaux. Composé de personnalités qui sont nées ou ont vécu à Montréal, le réseau contribuerait au rayonnement de la métropole partout dans le monde. La PDG souhaite que ce projet mobilise toute la communauté montréalaise et trouve son aboutissement dans les célébrations du 375e anniversaire.

Cinq questions éclair sur Montréal à Dominique Anglade

Soucieuse de multiplier les apparitions publiques, Mme Anglade a notamment pris la parole au Sommet immobilier de Montréal, le 1er avril 2014, devant quelque 800 acteurs de l’immobilier commercial, aux côtés du maire de Montréal. Elle les a notamment entretenus d’éducation, une richesse fondamentale pour elle et au centre du travail accompli par MI. « Montréal a des problèmes sur le plan du décrochage scolaire, admet-elle. Il faut régler ce problème, car sur le long terme, cela peut affecter notre croissance. Cependant, Montréal a beaucoup d’éléments sur lesquels miser en ce qui concerne la recherche de talents stratégiques, l’aide aux universités pour améliorer l’offre sur le plan international et les occasions d’emplois intéressants pour garder nos propres diplômés. » Aux gens de la communauté immobilière, elle a rappelé à quel point tous les projets immobiliers en cours, dont les deux nouveaux centres hospitaliers universitaires à Montréal, sont autant d’indices d’une vitalité susceptible d’attirer les investisseurs étrangers. « Comparativement aux autres villes canadiennes, Montréal a l’avantage d’avoir une économie plus diversifiée qui rend le milieu immobilier relativement stable. Ne reste plus maintenant qu’à créer de la richesse. » Avec de l’ambition, de l’audace et de l’ardeur, mais aussi une vision stratégique, on devrait y parvenir !

Votre immeuble préféré ? Le 5225, avenue Notre-Dame-de-Grâce, la maison où j’ai grandi.

Un immeuble emblématique de la métropole ? L’oratoire Saint-Joseph, pour son côté imposant et ostentatoire.

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Votre lieu préféré ? Le mont Royal, car j’aime les grands espaces.

Un édifice patrimonial qu’il faudrait absolument restaurer ? Le Royal Victoria.

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Si Montréal avait un branding, ce serait… La créativité.

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