Article Jura - Journal à Part 9

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TOUR DES RÉGIONS

Le Jura

© PHB.cz (Richard Semik)

La noblesse en toute modestie


© Office de tourisme Coteaux Jura - Christelle Cretin

TOUR DES RÉGIONS

À cause de sa grande discrétion, on pourrait croire que la production viticole du Jura n’est qu’anecdotique. Il n’en est rien ! Les vins jurassiens bénéficient d’une excellente réputation dans le monde entier, et ce malgré leur faible quantité. Le vignoble du Jura ne brille peutêtre pas par son étendue, mais bonne nouvelle : tous les vins - ou presque - y sont bons.

L’évolution d’un grand vignoble Comme tous les terroirs français, c’est à l’Antiquité que remonte le vin jurassien, même si celui-ci n’avait probablement pas grand-chose à voir avec les vins d’exception qu’on lui connaît aujourd’hui. Pline le Jeune mentionne le breuvage en 80 après J-C, en évoquant un cépage qui semble bien être le Savagnin, aujourd’hui emblématique dans la région. On trouve également des échos du vin jurassien au Moyen Âge, alors que le vin d’Arbois est cité comme breuvage de prestige offert aux invités. La guerre de dix ans sévissant en Franche-Comté de 1634 à 1644 ne laissera personne indemne, et la région

y perdra les deux tiers de ses habitants. En conséquence, la vigne souffrira énormément, et il faudra plusieurs décennies pour remettre à flot sa production. Presque un siècle plus tard, en 1732, on assiste pour la première fois à un édit réglementant le vin et sa production, qu’on peut vaguement apparenter aux cahiers des charges de nos actuelles appellations. Ainsi, certains cépages sont prohibés, d’autres recommandés. En conséquence, la qualité monte, mais la quantité baisse. Les vignes se développeront continuellement, tout en préservant le prestige si cher au Jura. Ce siècle verra donc la notoriété du vin jurassien augmenter considérablement. Il est de notoriété publique que le phylloxéra n’épargna personne en France. Mais avouons tout de même que le Jura eu sa part de maux : des 20 000 hectares de l’époque il ne reste aujourd’hui que 2 000, après de beaux efforts faits par les vignerons pour préserver leur savoir-faire. C’est d’ailleurs le jurassien Alexis Millardet qui trouvera la solution aux ravages de l’insecte, en créant des vignes hybrides. Le XXe siècle s’échinera à lutter contre les fraudes. Le vin jurassien étant réputé, de nombreux marchands peu scrupuleux s’enrichiront en vendant de faux vins du Jura, spoliant ainsi les producteurs. En 1906, Alexis Arpin permet aux vignerons d’Arbois d’obtenir un certificat d’origine, prémices de l’A.O.C. obtenu en 1936.

Terroir et climat

© Jérome Genet

Qui a dit qu’un grand terroir se mesurait à sa superficie ? Avec ses 2 000 hectares de vigne à peine, le Jura fait partie des plus petits vignobles de France. Cela n’empêche pas son terroir comme ses vins d’être dotés d’un caractère bien trempé. Ses sols marnocalcaires et argilo-siliceux conviennent particulièrement aux cépages jurassiens. Le climat est quant à lui tempéré, avec une influence montagnarde. #9 - LE JOURNAL À PART

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Les vins

Le Vin de Paille Le Jura produit également un vin liquoreux célèbre appelé « Vin de Paille », réalisé à partir des quatre cépages autorisés : Chardonnay, Savagnin, Poulsard et Trousseau. L’une des étapes fondamentales de sa fabrication est le passerillage des raisins : après récolte, les grains sont partiellement séchés sur des lits de paille pendant plusieurs mois, ce qui a pour effet de concentrer le sucre et les arômes. Il développe ainsi des saveurs de fruits confits et de miel. Le Poulsard (ou Ploussard) Issu du cépage éponyme, le Poulsard revêt naturellement une robe claire le faisant parfois passer pour un rosé. Il n’en est rien, et le Poulsard a tout d’un rouge des plus respectables : bonne garde, rondeur, grande finesse, richesse des arômes, tanins présents sans être oppressants. Un vin typique oscillant entre douceur et caractère, qui se boit aussi bien frais que chambré. Crémant du Jura Au royaume des pétillants, le Champagne se taille la part du lion. Le Crémant du Jura, moins connu, n’a pourtant pas à rougir. Toujours issu de vendanges manuelles, il bénéficie d’ailleurs d’une vinification similaire, à la méthode dite champenoise. Élaboré selon un cahier des charges proche de ceux du Crémant d’Alsace ou de Bourgogne, il accompagne à la perfection les apéritifs des petites ou grandes occasions.

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Le village d'Arbois

© Office de tourisme Coteaux de la Haute Seille

Le Vin Jaune La première dégustation est souvent éprouvante : plusieurs tentatives sont généralement nécessaires pour apprécier ce vin de caractère, qui se distingue de tous les autres. Un nez puissant, des arômes francs de noix et des notes oxydatives qui ne constituent nullement un défaut pour les amateurs. Particulièrement sec, attention à ne pas le confondre avec le Vin de Paille, totalement différent ! Même sa bouteille n’a rien à voir avec le classique 75 cl. En effet, le Clavelin, comme on l’appelle, propose une contenance de 62 cl. Pourquoi ? Tout simplement parce que c’est la quantité qu’on obtient à partir d’un litre de vin une fois la part des anges* déduite. En effet, le Vin Jaune fait partie des rares à ne pas subir d’ouillage : cette technique consiste à compenser l’évaporation d’alcool en remplaçant la perte par un vin similaire. Bien des crus ne supporteraient pas une telle omission, car le contact avec l’oxygène provoque bien souvent une oxydation fatale. Le Vin Jaune ne craint pas ce désagrément. Grâce à ses levures indigènes uniques, il bénéficie d’une fine couche protectrice lui évitant de tourner au vinaigre. Il est ensuite élevé au minimum six ans et trois mois en cave, avant d’être rendu accessible aux amateurs. Taillé pour la garde, il peut sans problème se conserver un siècle et bien plus. Pas mal pour un vin sans ajout de sulfites !

© Shutterstock - Lens-68

Le vin du Jura ne mise pas sur la quantité mais sur la qualité et la typicité de son vin. Le fameux Vin Jaune est emblématique de la région. Pourtant, le Jura a bien d’autres cordes à son arc !

Coteaux de la Haute Seille

Le Macvin Produit depuis le XIVe siècle, ce vin de liqueur est obtenu à l’aide du moût de raisin non fermenté. On y ajoute un tiers de Marc du Jura. Le liquide est ensuite vieilli en fût de chêne pour une durée minimum de douze mois. Aussi bien vinifié en rouge qu’en blanc et rosé en petite quantité, il développe des arômes de fruits secs et confits. Il atteint 16 à 18° d’alcool, selon les cuvées.

Les cépages Le Jura fait partie de ces régions ayant su conserver jalousement leurs traditions. Les cépages en sont témoins. Les blancs sont très présents. L’incontournable Savagnin est l’un des cépages à l’origine des étonnants Vins Jaunes et Vins de Paille, ainsi que de certains assemblages. Le Chardonnay est également très présent. Les rouges sont composés essentiellement de Poulsard, qui représente 80% des cépages rouges. Le Trousseau, enfant du pays, est également très usité. Très exigeant, il n’est pas produit en grande quantité. Cela ne l’empêche pas d’être fondamental pour le vignoble. Le Pinot Noir, lui aussi, trouve belle place sur le vignoble.

Appellations On dénombre 4 appellations d’origine contrôlées géographiques sur le territoire du Jura : Regroupant les productions viticoles autour du village éponyme, l’A.O.C. Arbois est la plus ancienne de France. C’est aussi la plus connue et la plus productive, avec 40 000 hectolitres par an à son actif. Une douzaine

* Quantité de liquide s’évaporant naturellement du fût pendant l’élevage d’un alcool.


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de communes peuvent revendiquer l’A.O.C. Les rouges dominent, représentant 70% de la production. Cela n’enlève rien à la renommée des blancs, et des jaunes. L’A.O.C. Côtes du Jura est la plus étendue du département, ce qui lui permet de donner des vins assez divers, bénéficiant de sols variés. Elle s’étend sur une centaine de communes. Cette appellation regroupe surtout des blancs et Crémants du Jura. © Château de Germigney

L’A.O.C. Château Châlon a la particularité de ne produire que du Vin Jaune. Un territoire d’à peine cinquante hectares et dont l’excellence ne souffre aucune

Le Château de Germigney

© Office du Tourisme Coteaux du jura

papilles. De nombreux producteurs proposent également des chambres ainsi que des dégustations. À Montigny-lesArsures, retrouvez le domaine de Stéphane et Bénédicte Tissot, unanimement plébiscité pour ses vins d’Arbois.

Château Châlon

© Michel Joly

objection. L’A.O.C. Étoile porte son nom en raison de la commune de même nom, mais aussi des nombreuses petites pentacrines** présentes dans le sol. Répartie sur soixante hectares, cette appellation ne vinifie qu’en blanc, malgré la faible proportion de Poulsard cultivée.

© Office du Tourisme Coteaux du jura

Stéphane et Bénédicte Tissot

Le village Étoile

Escapade dans le Jura Les amateurs de vin du Jura peuvent se réjouir : depuis quelques années, l’œnotourisme se développe, et les visiteurs sont nombreux à se laisser tenter. Non loin d’Arbois, à Port-Lesney, le Château de Germigney est une valeur sûre pour qui veut profiter d’un confort sans faille et d’un service irréprochable. S’ajoutant à un cadre plein de charme, le restaurant gastronomique ravira vos ** Petits fossiles d’animaux marins en forme d’étoile.

De nombreuses autres réjouissances sont à savourer : fromages et charcuteries se marieront à merveille aux vins jurassiens que vous dénicherez auprès de producteurs passionnés. Cancoillotte, Morbier, Mont d’Or, Comté, ou encore Bleu de Gex ne demandent qu’à vous faire découvrir les saveurs du Jura. À ne pas manquer, le fameux accord Comté/Vin jaune : un délice, une superbe façon de s’initier au breuvage parfois difficile à boire les premières fois. Excellence et générosité caractérisent donc le Jura, un terroir où les vignerons mettent un point d’honneur à satisfaire les amateurs de vin de tous les horizons. Laurence Delacroix

Remerciements à l’Office du Tourisme Coteaux du Jura et au Comité Interprofessionnel des Vins du Jura. #9 - LE JOURNAL À PART

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© Shutterstock - Welcomia

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La sélection de nos cavistes Wine experience, Charlotte Humez-Cendra Frédéric Lorgnet à Arbois Frédéric Lorgnet est un producteur basé à Montigny-lès-Arsures, considéré comme la capitale du Trousseau, un cépage rouge typiquement jurassien. C’est sur cette commune également que Louis Pasteur possédait une parcelle de vignes et a découvert les secrets des levures et de la fermentation alcoolique. Ce viticulteur produit la délicieuse cuvée Trousseau des Dames. Ce vin aux tanins soyeux développe des arômes de fruits rouges et offre une grande longueur en bouche. Un vin concentré qui permet d’être gardé. Personnellement, j’ai succombé à la dégustation du millésime 2013 sans pouvoir en conserver quelques bouteilles pour plus tard… À marier avec un lapin chasseur ou une volaille braisée avec des champignons d’automne par exemple. Wine experience, Charlotte Humez-Cendra 83 rue de Lille - 59420 Mouvaux - 06 64 88 21 88 www.wineexperience.fr – www.facebook.com/wine-experience

Cave Monsieur Vin, Mouvaux Domaine Ganevat à Rotalier Jean-François Ganevat, c'est « Fanfan » : un personnage haut en couleurs qui a pris le contre pied de la tradition des vins oxydatifs dans le Jura. Fanfan vinifie tous ses Chardonnay et une partie de ses Savagnin avec ouillage (comme en Bourgogne par exemple où il s'est formé pendant 10 ans) donc, pas d'oxydation et cela change tout. Converti à la biodynamie dès son retour, le domaine produit depuis des vins impressionnants, le terroir du Jura apportant des minéralités sans égales en France. Si l'on doit retenir deux cuvées, il y a évidement les Grands Teppes Vieilles Vignes en Chardonnay ouillé, un vin dense, aiguisé, minéral et tendu, qui se bonifiera sur plusieurs années et Les Chalasses Marnes Bleues, un Savagnin ouillé sur l'opulence, les épices et le coing, une sorte d'OVNI. Cave Monsieur Vin 79 boulevard de la Marne - 59420 Mouvaux - 03 20 24 15 19 - loeilsurlevin.blogspot.com - www.monsieur-vin.fr #9 - LE JOURNAL À PART

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L’accord caviste, Damien Delebarre Domaine Michel Thibaut, Côtes du Jura Tradition à Poligny Au sud d'Arbois sur la route des vins du Jura se situe le village de Poligny en appellation Côtes du Jura. Les vignes de part et d’autre du village sont conduites par Michel Thibaut dans le respect de l’environnement, enherbement, travail du sol et utilisation raisonnée des intrants et du tracteur pour obtenir des raisins de qualité. Il élabore sa gamme de vin du Jura en adoptant les méthodes de vinification traditionnelles alliées aux technologies les plus actuelles. La particularité du vin blanc tradition est d’être élaborée par un assemblage de Savagnin et de Chardonnay. Chaque cépage apporte ses qualités : la minéralité et les arômes de fruits secs pour le premier et la gourmandise pour le second. C’est un excellent compromis pour aborder la complexité des vins de cette région mal connue. Vous l’apprécierez évidemment avec tous les plats traditionnels à base de fromage de la région mais il saura vous surprendre avec des Saint-Jacques snackées relevées au curry ou une truite aux amandes. L’accord caviste, Damien Delebarre Place des commerçants, rue de Seclin - 59710 Avelin - 03 20 32 37 88 90, rue des Fusillés - 59650 Villeneuve d’Ascq - 03 20 41 36 04 www.laccord.fr - www.facebook.com/caviste.laccord

L’enchanteur de papilles Domaine de la Tournelle à Arbois Parce qu’ils aiment leurs vignes et leur terroir, parce que leurs vins reflètent qui ils sont, j’aime le Domaine de la Tournelle à Arbois. Leur philosophie est de produire des raisins naturels et sains, en respectant leur environnement et les sols. C’est avec un bon raisin qu’on fait un bon vin. Leurs blancs (Chardonnay et Savagnin) sont l’énergie, la puissance et la fraîcheur du Jura, tandis que les rouges (Trousseau, Ploussard) expriment la finesse, la douceur et l’élégance de ce magnifique terroir. Mon coup de cœur est la fleur de Savagnin, un Savagnin ouillé (donc non oxydé) qu’on associera naturellement avec une tranche de vieux comté, explosif et jubilatoire ! L'Enchanteur de Papilles 716 avenue de la République - 59800 Lille - 03 20 01 61 05 www.lenchanteurdepapilles.fr

La Part des Anges, Gaëlle Guillou En 1962, Jacques Tissot hérite d'une parcelle de son père, après plus de 30 ans de modernisation, il laisse à son fils le soin de 30 hectares de vignes. Il tire le meilleur du trousseau sur son arbois, un vin tout en fruit. Ses vins blancs de Savagnin et Chardonnay prendront leur temps pour digérer l'élevage oxydatif traditionnel du Jura ; les 2006 sont à gouter dès maintenant. Et le 2 000 pour son vin jaune. La Part des Anges, Gaëlle Guillou Rue de la monnaie - 59000 Lille - 03 20 06 44 01 www.lapartdesangeslille.fr

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LE JOURNAL À PART - #9

© Shutterstock - Dmitry Kalinovsky

Domaine Jacques Tissot


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