BOTTOM UP_Mémoire de Master 2_ENSAB

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«BOTTOM UP»

Février 2015 - Mémoire de Master 2 Jeanne KERMAÏDIC Directeur de mémoire : Ewan SONNIC



ÂŤ Celui qui marche seul, avance plus vite, mais ceux qui marchent ensemble, arrivent plus loin Âť - Proverbe africain -



SOMMAIRE PREFACE–INTRODUCTION I. ASPECT THÉORIQUE ET HISTORIQUE a) Bilan historique et tendances passées .....................................................15 b) Période de Crise, difficultés et questionnement ........................................22

II. ENQUÊTES DE TERRAIN SUR L’ART DE VIVRE ENSEMBLE a) Autopromotion et recherche d’un idéal, La charte comme base de travail 36 b) Autoconstruction et échange de savoirs-faire ..........................................45 c) Autogestion et liens sociaux : du participatif à l’évolutif ............................48

III. LA MARCHE À SUIVRE : DE L’APPRENTISSAGE À LA DIFFUSION a) De l’individu au réseau : sensibilisation et parole, les associations d’aide et de conseil et le financement participatif ....................................................55 b) La presse, frein ou alliée ? .......................................................................65 c) La place de l’architecte au sein du groupe ...............................................67

CONCLUSION REMERCIEMENTS BIBLIOGRAPHIE

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PREFACE–INTRODUCTION Si l’aboutissement me semble évident aujourd’hui, il est clair que retrouver le cheminement de pensée m’ayant poussé à m’intéresser à l’habitat groupé et/ou participatif est bien plus compliqué. Suite à trois années passées à étudier l’architecture au sein d’une école française, j’ai eu la chance de partir un an au Mexique où l’enseignement de la matière est bien différent. Premièrement, j’y ai découvert des cours non pas basés sur la théorie, mais avant tout sur la pratique auprès de populations sur le terrain. J’ai alors compris que mon retour en France serait compliqué. De nature sociable, privilégiant l’étude de terrain et la discussion, je me suis sentie totalement à ma place dans un pays comme le Mexique. Je dirais même plus : j’ai eu l’impression à mon retour que nos sociétés occidentales avaient oublié qu’il pouvait y avoir un monde en dehors des normes et dogmes imposés par l’économie et la croissance à toute épreuve. De nombreux écrits nous montrent que nous sommes arrivés à un point décisif en termes de développement. Dans « Accélération, une critique sociale du temps », Hartmut Rosa nous offre une critique issue de “l’École de Francfort”, proposant que l’Histoire moderne peut être mieux comprise dans le cadre d’une dialectique entre des forces d’accélération et des institutions vouées à dépérir dès qu’elles deviennent un frein aux forces d’accélération. Cette accéléra-

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tion sociale intègre trois dimensions : ––1° L’innovation technique ––2° Le changement social (travail,famille) ––3° Le rythme de vie Cette étude part d’un constat, basé sur le ressenti personnel. On ne parie plus sur le temps, il entre dans un principe économique, il faut minimiser son coût et maximiser son capital, mais nous n’y arrivons pas, car le temps qui occupe la majeure partie de notre vie réside dans le travail, devenu trop impersonnel, éloigné de nos désirs et perspectives. Nous n’avons plus le temps de sublimer nos désirs. L’entreprise prend la relève du déchargement social (ou du moins essaye) tandis que nous prenons conscience de l’absence de prise sur cette accélération de tous les domaines. Nous sommes pourtant tous d’accord là-dessus. En ressort un problème majeur : la désynchronisation. Doit-on laisser le privé l’emporter sur le public ou bien en inverser la tendance ? Hartmut Rosa énumère cinq cas envisageables : ––1° “un équilibre à un niveau de vitesse supérieure” ––2° “un abandon définitif du projet de la modernité” ––3° “un freinage d’urgence” ––4° une course “effrénée à l’abîme” ––5° le recours lucide à des analyses de l’accélération Ce retour à des bases plus saines pousse certaines personnes à reconsidérer leur accession au logement. Les bailleurs sociaux et promoteurs nous ont laissé croire que le « produit » immobilier était à dissocier de son usager, or, l’humain étant l’objet d’étude de cet art qu’est l’Architecture, 8


il est en son droit de se réapproprier sa conception. Le reportage d’Arte « L’urgence de ralentir” » met en avant un fonctionnement basé sur l’apprentissage partagé, du petit comme du grand, car les générations futures peuvent avoir accès à de meilleures conditions de vie tout en apprenant de la nature, de la construction, de la cuisine et de la santé. Pierre Rahbi, «paysan philosophe», comme il se décrit luimême, a créé le Mouvement des Colibris en 2007. Colibris se mobilise pour la construction d’une société écologique et humaine. L’association place le changement personnel au cœur de sa raison d’être, convaincue que la transformation de la société est totalement subordonnée au changement humain. Colibris s’est donnée pour mission d’inspirer, relier et soutenir les citoyens engagés dans une démarche de transition individuelle et collective. Dans une interview réalisée et retranscrite par Claire Eggermont, Pierre Rahbi nous explique sa vision de notre société actuelle. Selon lui, l’autonomie a régi l’organisation et la survie des humains sur la Terre et ce depuis des millénaires. Elle est garante d’équilibre et s’inspire des mécanismes naturels de la planète elle-même où l’autorégulation et la coopération ont toujours été les clés de la pérennité. Au XVIè siècle encore la diversité culturelle reflétait directement la créativité humaine dans son dialogue avec la nature. Chaque communauté savait tirer profit des ressources locales afin d’être autonome sur son territoire. Avec l’avènement de la société industrielle l’humain s’est détaché des éléments naturels pour entrer dans l’ère du progrès technique, prétendument libérateur. Nous avons perdu notre autonomie en nous déconnectant des lois fondamentales de la vie jusqu’à mettre en péril notre propre survie. L’industria-

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lisation s’est bâtie sur l’exhumation des ressources naturelles telles que le pétrole, les minéraux, le gaz naturel ce qui, non seulement a créé une raréfaction des ressources, mais qui en aval a provoqué une pollution croissante de l’atmosphère et des sols de notre planète. Nous avons laissé place à l’accélération, à la frénésie qu’a permis le progrès technique, et ceci nous a finalement conduit à une totale dépendance et à un asservissement au consumérisme. Il est désormais devenu primordial de prendre conscience de la fragilité du système que nous avons créé, car sans le pétrole, les transports et la communication, toute notre civilisation s’écroulerait en quelques semaines. La place laissée au savoir-faire et à l’apprentissage sur le terrain est devenue minime. Pierre Rahbi affirme que la technologie et le virtuel sont un frein à cette autonomie, car plongés dans ce monde depuis leur plus tendre enfance, les plus jeunes se seraient déconnectés du réel et ne sauraient plus user de leur esprit, corps, mains et intelligence déléguant cette tâche aux moyens informatisés. Je ne suis pas totalement d’accord avec ce point. Selon moi, il est important de ne pas renier le progrès technique, mais bien d’apprendre aux générations futures à en faire bon usage. Le problème n’est pas en soit la technologie, mais bien son apparition soudaine dans nos sociétés. Les communications, médias, l’informatique nous ont donné accès trop vite à un ensemble d’informations et de plateformes de partage (réseaux sociaux) telle une corne d’abondance. Cependant, comme tout outil, il est primordial de comprendre avant tout les avantages et inconvénients qui en découlent, et cela ne s’applique souvent, et malheureusement, qu’après plusieurs années d’usage. L’outil informatique ne déroge pas à la règle. On peut rallier retour à la nature et technologie, l’un n’irait plus sans l’autre sous peine

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de faire un énorme pas en arrière. L’Homme s’est félicité d’avoir abrogé l’esclavagisme et s’est vu accepter et assimiler l’idée de l’esclavagisme salarié, où l’individu brade son temps de réflexion et d’action pour un salaire. Il est devenu le rouage d’un système où il perd pied, où il est à la fois producteur et consommateur de richesses elles-mêmes concentrées dans les mains d’un petit nombre d’individu. Le lobbying des industries pharmaceutiques et agroalimentaires tente de nous maintenir dans la peur et la dépendance. Des sanctions se sont vues appliquées pour toute personne n’obéissant pas au système consumériste : médecines alternatives (dites douces) interdites, paysans sanctionnés pour avoir refusé d’épandre des produits chimiques labellisés sur des cultures viticoles, individus tentant de répondre par eux-mêmes à leurs besoin vitaux (énergétiques et alimentaires) expulsés de leur terrain... Autant d’aberrations faisant aujourd’hui partie de notre quotidien sans même que nous nous en alarmions. Les médias et la publicité nous ont fait croire que l’Homme n’avait plus besoin de la nature pour avancer. Non seulement c’est une grande erreur, mais en contre-partie nous pouvons affirmer que la nature n’a pas besoin de l’Homme pour exister, elle a préexisté avant nous, et nous pourrions disparaître à cause de nos propres transgressions. Alors, quelle est la marche à suivre ? Il faut inventorier nos ressources locales, repenser nos besoins à l’échelle d’un foyer ou d’un territoire, car comme le dit Pierre Rahbi «Jardiner est un acte politique». Il est grand temps de remettre la nature et l’humain au centre de nos réflexions. Il est important de ne pas confondre autonomie et autarcie ; il ne s’agit pas de se replier sur soi et de créer des cel-

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lules étanches, mais bien de s’ouvrir au monde et revisiter nos besoins. L’Architecture elle-même est touchée par ces reconsidérations, beaucoup déjà ont fait le travail d’évaluer ce qui était «superflu» et ce qu’ils pouvaient apporter aux générations futures tout en s’épanouissant eux-mêmes par le biais d’une «sobriété heureuse». Les groupes que j’ai pu rencontrer ont tous fait ce travail en quatre étapes : la responsabilisation (se poser les bonnes questions : «Dans quoi est-ce que je mets mon temps, mon énergie, mes compétences ? Comment puis-je apporter aux générations futures un avenir à la fois beau et durable ?»), s’informer, expérimenter (car personne ne détient la vérité absolue) et enfin, se libérer du connu. Ce dernier point nous fait remettre en question tout l’enseignement que nous avons reçu jusque-là, si bien que beaucoup parlent d’une révélation, d’un changement radical de vision du monde et de ses besoins. Cette vision des choses relève en apparence de l’utopie, l’écologie a d’ailleurs souvent été relayé au rang de condiment dans un système global, le terme même «d’écologie» a peu à peu perdu son sens le plus sain et s’est vu apparenté à un type de personnes et de communautés en marge de la société. C’est en tout cas ce que les médias sont parvenus à rentrer dans l’esprit commun, car la morale veut désormais que toute personne ayant recours à des alternatives au capitalisme et à la recherche de la croissance ne soit plus considérée comme œuvrant pour le bien commun. Cependant, cette «utopie» est réalisable et est basée sur des études réelles, sur l’expérience, le savoir, les techniques ancestrales et peut être intégrée dans nos modes de vie. Cette révolution des mœurs qu’est l’autopromotion nous pousse à « Vivre ensemble autrement » (ouvrage de Pascale d’Erm et Patrick Lazic) où les liens de voisinage (« cousinage » au Québec) apparaissent avant même que l’im12


meuble, quartier ou village soit construit. La problématique de ce mémoire est la suivante : Communautés alternatives et habitat participatif ; de l’autopromotion à l’autoconstruction en passant par l’autogestion : quelle place pour l’architecte et l’usager ? A la recherche d’une marche à suivre. Ce mémoire sera divisé en trois parties. La première exposant l’aspect théorique et historique de l’accession à l’habitat, et plus particulièrement à l’habitat dit participatif en France, exposant les tendances pré-années 2000 en premier lieu, puis l’évolution juridique et sociétale de ces projets d’habitat groupé depuis les années 2000, prenant en compte la Crise actuelle, les difficultés et questionnements qui en découlent. La seconde sera dédiée aux enquêtes de terrains auprès de groupes plus ou moins anciens en abordant le sujet de l’autopromotion par la recherche d’un idéal de vie, celui de l’autoconstruction par l’échange d’un savoir-faire et enfin l’autogestion et les liens sociaux dans un sens plus évolutif des projets. La troisième partie fera état de la marche à suivre, de l’individu au réseau (sensibilisation et parole), par le biais d’associations d’aide et de conseil et enfin, déterminera la position des médias, de la presse écrite à l’audiovisuel, pouvant être à la fois frein ou allié dans le bon déroulement des projets. Enfin, une conclusion faisant valeur d’ouverture sera faite sur le rôle de l’architecte dans des projets d’habitat participatif.

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ASPECT THÉORIQUE ET HISTORIQUE Les projets d’habitats ont explosé depuis les années 2000. La loi ALUR de février 2014 a permis la reconnaissance de ces projets à part entière comme “troisième voie”, Cécile Duflot l’a mis en avant : “on sort de la clandestinité” en les rendant légaux et reconnus, et trouve enfin ici une alternative au logement social ou privé.

a) Bilan historique et tendances passées Rappels historiques : Au 19ème siècle : Le parc de logement est entre les mains de propriétaires institutionnels et de gens aisés rentiers. Les ménages sont majoritairement locataires et les loyers assurent des rentes stables aux bailleurs. La construction de logement est financée par les fonds propres sans recours à l’emprunt. Les transactions immobilières sont peu nombreuses. Fin du 19ème siècle jusqu’à la deuxième guerre mondiale : Raréfaction des logements à la campagne, la périphérie des grandes villes est en plein essor industriel. Les loyers sont faibles, la rentabilité médiocre, les investissements rares et le parc de logement se dégrade et se déprécie. La seconde guerre mondiale et l’après-guerre : La guerre provoque la destruction de deux millions de logements. Le parc est vétuste, inconfortable, surpeuplé mais peu coûteux, les loyers représentent 10% des revenus des ménages. L’état et les organismes sociaux organisent la reconstruction et un effort de construction sans précédent dans l’après-guerre 15


est entrepris qui culmine dans les années 1975 avec 500 000 logements construits par an. Les ménages sont toujours majoritairement locataires. Après 1975 et aujourd’hui : A côté du secteur aidé (logement social), montée en puissance de la promotion immobilière privée et constitution d’un véritable marché du logement sur lequel les prix se forment en fonction du coût de la construction neuve mais également de l’offre et la demande du marché de l’ancien. La mobilité des ménages locataires augmente ainsi que les transactions immobilières. Explosion des prix du foncier et de l’immobilier depuis l’an 2000.. - Pour une autopromotion en France, selon l’exemple allemand des Baugemeinschaften, essai de guide pratique par Alain MEYER Avant la seconde Guerre Mondiale l’initiative de construction/production de logement était donc principalement privée. A partir de la seconde guerre mondiale “l’état providence” est progressivement mis en place et le logement devient un domaine d’intervention privilégié de l’état, au côté de la santé et de l’éducation, avec notamment le développement du logement social. En réalité, la construction de ces logements découle d’un motif à la fois urgent et purement pratique: la nécessité de répondre à la catastrophique pénurie de logements dans la France de l’après Seconde Guerre mondiale. Cette pénurie de logements était d’abord le résultat d’une bévue colossale de l’État qui, en gelant les loyers entre les deux guerres, avait découragé la construction privée. En 1950, du fait de l’exode rural et de l’accroissement des familles dans cette période de baby-boom, la plupart des centres urbains se 16


trouvaient confrontés à de graves problèmes de surpopulation. Quand l’État a enfin corrigé ses erreurs entre les années 1950 et 1970, il l’a fait avec tant de précipitation qu’il a construit des milliers de quartiers HLM à la soviétique. Deux cent cinquante mille personnes vivaient dans des bidonvilles dans les années 1950 : ces conditions extrêmes exigeaient des solutions immédiates et toutes aussi extrêmes. Suite à la destruction massive de logements, les Castors se lancent dans tout le pays dans une initiative collective et permettent à certains ménages pauvres de se loger (mouvement syndicalistes ouvriers) ; ces initiatives laissent cependant la place à une autoconstruction individuelle et minoritaire à partir des années 70. De ces communautés, il en ressort une ébauche d’autopromotion alliée à de l’autoconstruction, cependant, la justification n’est pas celle porteuse des projets participatifs actuels. Le désir de construire ensemble et rapidement des logements pour toute une communauté, et ce par souci de précarité, est clairement mis en avant. Il n’y avait pas là de désir prépondérant de recherche d’un idéal de vie, mais bien une notion d’urgence et d’entraide certaine. L’exode rural a lui aussi marqué les changements de mode de vie des français, selon les statistiques de l’INSEE, de l’après-guerre jusque 1975, la population rurale baissa considérablement pour stagner ensuite jusque 1990. Les années qui suivirent, la population des espaces ruraux s’accrut à nouveau, comptant 11,1 millions d’habitants en 2007, retrouvant, en volume, son niveau du début des années 60. Proportionnellement, les ruraux sont toutefois moins nombreux : 18% de la population française en 2007, contre 24% en 1962. Encore aujourd’hui la population rurale reste nettement inférieure à la population urbaine, n’atteignant

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que 21% de la population française totale. Malgré toutes ces campagnes de relogement massif, l’accession au logement est devenue de plus en plus précaire. La réalité statistique selon l’INSEE de la population et du logement en France sur la base du recensement de 2004 est la suivante : « 62 millions de français, 30,3 millions de logements en France métropolitaine. On fait plus de bébés, on vit plus vieux, on vit plus seuls, on est mieux logés et on préfère les régions côtières. En raison de l’augmentation de la population et du nombre de personnes vivant seules, il faut davantage de logements ». Avec le vieillissement de la population et la réduction de la taille des ménages (éclatement des familles, jeunes personnes vivant seules), se pose une vrai question de l’isolement des personnes dans leur logement avec un vrai enjeu du développement de relations sociales de proximité en substitution des relations inter familiales du foyer (solidarité, entraide, compagnie). La taille des foyers diminue donc, pourtant l’espace accordé à chaque personne le constituant grandit. « Entre 2000 et 2010, augmentation des prix de l’immobilier comparée à l’augmentation des revenus : ––+107% sur le prix d’achat d’un logement ; ––+47% sur les loyers de relocation dans le logement locatif privé ; ––+17% pour les revenus. » - Le livre blanc de l’habitat participatif 2011 Malgré la politique volontariste de l’État et les efforts de 18


production du secteur aidé et du secteur privé, la France et les français sont confrontés à une double crise quantitative et qualitative de logement. La rareté de l’offre a fait exploser les prix et beaucoup de ménages ne peuvent plus accéder à la propriété ni payer leur loyer. Beaucoup des ménages qui ont les moyens et ne sont pas éligibles au logement social ne trouvent pas–dans l’offre standardisée de la promotion privée–les logements correspondants à leurs besoins, leurs souhaits ou leurs valeurs. Par ailleurs les problématiques environnementales et les objectifs du développement durable, impliquent de réviser significativement à la hausse la qualité et la performance écologique et énergétique des logements neufs comme du parc existant. La problématique actuelle de l’habitat peut s’esquisser en résumé ainsi : construire en ville et moins à la campagne pour préserver les ressources foncières, construire de manière dense du collectif et de l’intermédiaire plutôt que de l’individuel, assurer une mixité fonctionnelle (logement, travail, service) et sociale, constituer une offre variée de logements, adaptée pour tous les publics, et enfin, construire beaucoup, vite et bon marché pour répondre aux besoins et rendre effectif le “droit au logement”. Cependant, bien des alternatives sont envisageables. En s’inspirant de projets internationaux on peut comprendre que la solution à l’accès au logement n’est pas unique mais bien complexe. Nos voisins d’Europe du Nord ont depuis longtemps pris le train de l’urbanisme durable, avec les écoquartiers comme vitrine. Il s’agit d’appliquer à l’échelle du quartier certains principes environnementaux et sociaux afin de maîtriser les impacts des implantations urbaines : économie de foncier,

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circulations douces, diversité et densité de l’habitat, diversité sociale des occupants, énergies renouvelables, valorisation des déchets, restauration du cycle de l’eau, espaces verts, matériaux respectueux de l’environnement, perméabilité des sols... Les écoquartiers d’Europe du nord n’hésitent pas à aborder de front toutes ces questions, comme à Vesterbro (Copenhague), Baal (Malmô), Kronsberg (Hanovre) ou Bedzed (Beddington). Ces écoquartiers sont arrivés tardivement en France, en effet “II y a en France une culture de l’étalement urbain difficile à contrer. La prolifération des lotissements de maisons individuelles est persistante, sans conscience encore des coûts collectifs et individuels qu’ils induisent, notamment en termes de transports”, explique ainsi Dominique Riquier-Sauvage, architecte, en charge du groupe de travail Aménagement de l’association HQE. L’exemple allemand des « Baugemeinschaften », propose une troisième voie possible mais encore inconnue en 2007 chez nous ; celle du regroupement de particuliers pour réaliser ensemble des immeubles collectifs–en ville et non à l’extérieur–immeubles mixés par les fonctions et la population. La qualité urbaine, architecturale et sociale exceptionnelle des projets construits en autopromotion sur l’initiative de Baugemeinschaften, notamment dans les éco-quartiers de Fribourg et Tübingen, démontre la réussite de l’action collective de maîtres d’ouvrages privés qui construisent naturellement la « ville durable ». De nombreux projets de réhabilitation de village, hameaux, ou bâtiments abandonnés ont vu le jour en Europe. Le village de Torri Superiore en Italie en est un exemple à part entière. Ce village médiéval, solidement arrimé aux falaises des Alpes ligures en Italie, non loin de Nice, abrite six familles et leurs enfants. Abandonné, puis tombé en ruine durant le XXème siècle, il a ressuscité depuis les années 1990 grâce à un groupe d’habitants qui l’a restauré dans 20


le respect du passé architectural et de la nature, avec le profond désir de partager cette expérience. Le projet allie permaculture, entraide, prises de décision en commun par le biais de réunions, espace de jeux pour les enfants, repas communautaires organisés par un foyer différent chaque semaine... Dans le village, le secret du bonheur réside dans l’équilibre entre intimité, partage, ouverture et intériorité. En Belgique, un habitat groupé s’est installé dans un ancien pensionnat à deux pas de Bruxelles. Au total, 300m² par foyers plus un immense jardin commun, au cœur d’un village et ceci accessible même pour des revenus moyens... C’est possible, et c’est à la Tarlatane. Huit familles, principalement des trentenaires avec une ribambelle d’enfants en bas âge, se sont lancées dans l’aventure : restaurer un ancien pensionnat et son parc, tout en y apprenant à vivre ensemble. Un paradis pour les enfants, une utopie réussie pour les parents. À Rennes, un projet d’habitat groupé de quatre maisons a vu le jour en 1987 : La Petite Maison. Les habitants, réunis en Société Civile Coopérative de Construction (S3C) et animés par une volonté de vivre de manière moins individualiste, ont imaginé un lieu de vie alliant parties privatives et parties communes auto gérées. Les logements, d’aspect “habitat intermédiaire” (mi-immeuble mi-maisons) sont accolés les uns aux autres, disposent de terrasses donnant sur un jardin collectif. Le “Café Gilbert” est une ancienne ruine réhabilitée qui fait aujourd’hui office de salle commune. Un studio commun destiné à accueillir les amis de passage a de plus été aménagé. Tel est le panorama offert en Europe jusqu’aux années 2000. Malgré des projets porteurs d’idée dans toute l’Europe, la France reste retardataire en termes de vie en communauté. La législation n’aidant pas, les mœurs des fran21


çais sont bien plus axés sur l’accès au logement individuel que dans le nord et l’est de l’Europe. Il reste difficile de soumettre l’idée de chambre d’amis, local, jardin, salle de repas commune à la majeure partie des français. « Que suis-je prêt à sacrifier pour avoir accès à une meilleure qualité de vie, tout en restant dans mon budget ? Qu’est-ce qui, dans notre mode d’habitat actuel, peut-être considéré comme facultatif ? Qu’aimerais-je partager avec mes voisins ? Pourrais-je faire confiance à quelqu’un n’appartenant pas à ma famille sur des sujets juridiques, financiers, de gérance technique et d’entraide ? Qu’apporte la vie en communauté ? » Autant de questions que certains estiment désormais indispensables à une bonne accession au logement. Les médias nous ont ancré dans nos sociétés la crainte de l’inconnu (la personne comme la notion immatérielle) et ont privilégié une vie coupée des autres. « Peu importe que l’on se trouve sur le même palier mon voisin et moi, je ne le connais pas, il ne me connaît pas, chacun vit sa vie et nous ne nous en portons que mieux. ». Telle est la pensée commune au sein des villes et villages. Ces projets d’habitats groupés sont basés sur l’idée du « bottom up » : les porteurs du projet ne sont plus les professionnels de la construction (promoteurs, bailleurs sociaux) mais bien les futurs habitants avec une idée comme base de travail : « Vivre ensemble, chacun chez soi ».

b) Période de Crise, difficultés et questionnement En 2010, aucun projet d’habitat groupé n’était encore arrivé à son terme en France. L’absence de valeur légale de ces derniers alliée à une intégration difficile des tenants de cette vision de l’habitat aura provoqué un retard du pays

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sur ses voisins. Le 16 octobre 2008, le journal Le Moniteur amorce la parution d’une soixantaine d’articles sur le sujet sous le titre de « Propriété partagée : un toit pour tous, ensemble ». En voici un extrait : « Le concept : des habitants se regroupent et, avec l’aide d’une structure d’accompagnement, définissent collectivement leur projet d’habitat (caractéristiques des logements et des espaces qu’ils souhaitent partager, valeurs communes, fonctionnement de la coopérative). Par la suite, ils gèrent ensemble leur immeuble, en s’appuyant au besoin sur des professionnels. La société coopérative est propriétaire de l’immeuble et le demeure. Les coopérateurs sont locataires de leur logement et propriétaires de parts de la coopérative. L’objectif : sortir du système spéculatif en offrant un coût de logement toujours identique relativement au coût de la vie. “Ça n’est ni baba, ni boy-scout” se défend Thomas Nesme, président de l’association H Nord, porteuse d’un dossier de ce type à Bordeaux -80 logements sur une friche industrielle de 1 ha-, “il ne s’agit pas d’un projet communautaire mais collectif.” Et dans cette optique, les espaces sont mutualisés : buanderie, salle commune, chambre d’amis, jardin, atelier de bricolage, lieu de stockage : les espaces et services en communs facilitent la convivialité tout en entraînant des économies pour chaque ménage, dans une optique de modération de la consommation. » Ce premier texte d’une longue série aborde les sujets de mixité et de développement durable, mettant en avant l’accession facilitée à un logement pour toutes les bourses, 23


éloignant alors l’idée de « guettos pour bobos » ainsi « la mutualisation des capacités d’endettement et le recours aux financements du logement social doivent permettre l’accès à des ménages modestes. » . Qui plus est, la propriété partagée se base sur des valeurs hautement environnementales : choix de matériaux sains et de provenance locale (énergie grise réduite), définition de contraintes liées au milieu direct (orientation optimisée, matériaux adaptés), une utilisation accrue des énergies renouvelables, une économie d’eau (réutilisation des eaux usées par filtrage phytosanitaire, usage de toilettes sèches...), sobriété énergétique (éviter un usage de l’eau et du chauffage si ce n’est pas indispensable), pollution moindre et faible émissions de gaz à effet de serre (usage des transports en commun ou du vélo, pas de voiture sur le site ou covoiturage entre plusieurs foyers), dispositif de tri, recyclage et compost... La mutualisation de besoins se fait par le partage d’un atelier collectif de bricolage, d’une salle commune, d’une chambre d’amis par la mise en commun d’objets... Et cette liste reste non exhaustive, en effet chaque projet d’habitat groupé, même s’il est inscrit sur les même bases, tente de répondre à sa manière à la question de l’écologie et du partage. Cependant, ce premier article de 2008 met en avant un flou juridique majeur : «Aujourd’hui, les coopératives d’habitants n’existent pas juridiquement en France», regrette Olivier David, président de Habicoop, association de promotion de solutions alternatives de logement qui a tenu ses 3e Rencontres nationales des coopératives d’habitants du 10 au 12 octobre 2008 à Bordeaux. En effet un bilan sommaire des coopératives d’habitants à l’étranger nous montre

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qu’il représente : “En Suisse : ––8 % du parc immobilier ––Jusqu’à 20 % dans les grandes villes (Zurich) ––130 000 logements. ––L’accompagnement et le soutien au financement des coopératives sont assurés par l’ASH (Association Suisse pour l’Habitat). En Norvège : ––15 % du parc immobilier ––40 % des logements à Oslo ––650 000 habitants ––L’accompagnement à la création et au développement de ces coopératives est assuré par des associations de coopératives, financées par l’Etat. Au Québec : ––50 000 habitants ––L’accompagnement des coopératives est assuré par des Groupes de Ressources ––Techniques (GRT) fédérées au sein de l’association des GRT du Québec.” - Le livre blanc de l’habitat participatif “En Suède : 700 000 logements représentent 17% 25


du parc immobilier. Allemagne : plus de 6 millions de logements, dont 2 millions en coopératives. Italie : plus de 300 000 Logements. Autriche : 340 000 Logements.” - voisinsvolontaires.free.fr Initié à l’automne 2005 et créé en décembre 2010, le Village Vertical à Villeurbanne s’est concrétisé en juin 2013 avec l’emménagement de 14 ménages. Quatorze ménages d’horizons divers, qui travaillent ensemble à l’avancée du projet. Tous, sauf un, sont sous les plafonds du logement social. Les villageois verticaux disposent chacun d’un logement dans l’immeuble écologique qu’ils ont conçu, mutualisent certains espaces et moyens, pour créer un voisinage solidaire, dans un projet à taille humaine alliant convivialité, responsabilité, économies, entraide, écologie et démocratie. Ces voisins sont collectivement l’unique propriétaire de leur immeuble, et chaque ménage loue son logement, dans le cadre d’une gestion démocratique interdisant toute spéculation et tout profit. Ce projet a reçu le 17 mai 2010 le premier trophée du développement durable organisé par l’Ordre des Avocats de Lyon et le groupe du Progrès. Ce projet pilote, véritable première coopérative d’habitants de France a inspiré bien des projets d’immeuble et hameaux. Les partenaires du Village vertical sont HABICOOP et la coopérative HLM Rhône-Saône-Habitat. « Les français sont prêts à changer leur mode de vie

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et partager avec leurs voisins : ––un espace vert (58%) ; ––une salle de jeu pour les enfants (55%) ; ––un garage (53%) ou un espace communautaire (52%). Un tiers des Français se déclare potentiellement intéressé par le principe de l’habitat groupé coopératif (32%). Ils sont 44% parmi les jeunes et les cadres. Changer les habitudes, adapter les modes de consommation et les modèles économiques demandera toutefois un fort investissement des citoyens, des professionnels et des institutions. » - Le Livre blanc des habitats participatifs 2011 Un grand changement s’est opéré le 19 février 2014 suite à l’adoption de la Loi ALUR (pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové). L’article 22 de la loi ALUR nous intéresse particulièrement car il offre un cadre légal pour l’habitat participatif, en reconnaissant son existence aux yeux de la loi, des banques, des notaires, et de tous les partenaires. Le chapitre VI, article 22, du projet de loi, crée les « SOCIÉTÉS D’HABITAT PARTICIPATIF » qui pourront prendre deux formes juridiques: Chapitre 1er : « Les coopératives d’habitants » Chapitre 2 : « Les sociétés d’attribution et d’autopromo-

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tion » Extrait du texte de loi : « LES COOPERATIVES D’HABITANTS : L’objet social de ces sociétés est de : fournir à leurs associés, personnes physiques, la jouissance d’un logement à titre de résidence principale (un décret précisera les conditions dérogatoires), entretenir et animer des lieux de vie collective, ouvrir la possibilité d’offrir des services à des tiers, associés ou non associés, dans un cadre défini (par décret en Conseil d’État), prévoir la conclusion d’un contrat coopératif entre la coopérative et chaque associé, ainsi que les modalités de sa cessation. Le contrat coopératif détermine les conditions de jouissance de chaque associé, ainsi que le montant de la redevance mise à la charge de l’associé coopérateur, sa périodicité et, le cas échéant, ses modalités de révision. Le contrat précise à ce titre : - la fraction locative correspondant à la jouissance du logement, - la fraction acquisitive correspondant à l’acquisition de parts sociales. Le mode de répartition des charges, des services collectifs et équipements communs est adopté en assemblée générale. Il donne lieu à un règlement annexé au contrat coopératif. Le prix de cession des parts sociales des sociétés coopératives est limité selon des principes décrits dans les statuts. LES SOCIETES D’ATTRIBUTION ET D’AUTOPRO28


MOTION : L’objet social de ces sociétés est d’attribuer à leurs associés la jouissance ou la propriété d’un logement à titre de résidence principale et d’entretenir et animer les espaces et locaux collectifs partagés qui y sont attachés. Un état descriptif de division décrit les lots qui constituent l’ensemble immobilier : certains lots sont à usage privatif (les logements) et d’autres lots sont à usages partagés (les locaux et espaces communs partagés). Les lots sont affectés aux parts sociales : acte d’« attribution des lots aux parts ». Dès la constitution de la société, les statuts optent soit pour l’attribution en jouissance soit pour l’attribution en propriété : - Dans le cas de l’attribution en jouissance la société est pérenne. Un règlement en jouissance délimite les diverses parties de l’immeuble en distinguant celles qui sont communes de celles qui sont à usage privatif. Il précise la destination des parties destinées à un usage privatif et celle des parties communes affectées à l’usage de tous les associés ou de plusieurs d’entre eux. Ce règlement en jouissance est annexé aux statuts. – Dans le cas d’attribution en propriété un règlement de copropriété précise la destination des parties réservées à l’usage privatif des associés et celle des parties communes affectées à l’usage de tous les associés ou de plusieurs d’entre eux. Ce règlement de copropriété est annexé aux statuts. Dans ce cas d’attribution en propriété, la société d’autopromotion est dissoute (à la fin des travaux 29


par exemple) : elle devient alors une copropriété. Les droits des associés dans le capital social doivent être proportionnels à la valeur des biens attribués (en jouissance ou en propriété) en tenant compte de la consistance, de la superficie et de la situation des lots. Les associés participent aux charges des espaces communs et locaux partagés proportionnellement aux valeurs des parties privatives comprises dans leurs lots, selon la quote-part reprise dans le règlement de jouissance ou le règlement de copropriété Lors des décisions concernant la gestion ou l’entretien de l’immeuble, chaque associé vote selon un mode déterminé dans les statuts : - soit chaque associé dispose d’un nombre de voix proportionnel au nombre de parts qu’il détient dans le capital social. - soit chaque associé dispose d’une voix : il s’agit alors d’une gérance coopérative, dans laquelle « un homme = une femme = une voix », indépendamment de la taille du logement qu’il occupe. Ce chapitre de loi a été élaboré à partir d’ateliers ministériels réunissant pendant plusieurs mois de nombreux représentants institutionnels ainsi que des délégués des associations d’habitants composantes de la Coordin’action. » Quelle est donc la différence entre habitat groupé et coopérative d’habitants ? Le concept d’habitat groupé est un terme générique, qui 30


recouvre différents types de projets collectifs d’habitat : sous la forme de copropriétés, de SCI (sociétés civiles immobilières), de collocations, etc. La coopérative d’habitants s’inscrit dans ce concept général d’habitat groupé. Elle fait également partie de la grande famille des coopératives, encadrée par la loi de 1947 sur la coopération. La coopérative d’habitants est donc une forme d’habitat groupé qui implique un montage juridique et financier très spécifique, qui garanti les principes suivants : une personne = une voix, quel que soit le nombre de parts sociales détenues. double qualité du coopérateur : propriétaire de parts sociales et locataire de son appartement. propriété collective du bien immobilier : le coopérateur ne paie pas au-delà du coût du projet. déconnexion entre la valeur du bien et la valeur des parts, non spéculation. Les SCI sont des sociétés de personnes (SCI, SCIL, SCIA, SCCC, SCI APP…), les associés sont titulaires de parts sociales et la SCI détient le titre de propriété : • Responsabilité illimitée des associés : en cas de dette, chaque sociétaire est responsable sur ses biens propres de façon illimitée (peut être dangereux en cas d’emprunt collectif) • Transparence fiscale (imposition sur les revenus de chacun, pas d’impôt sur la société). • Possibilité d’occuper son logement en jouissance (à 31


titre gratuit) ou en location. • Possibilité d’emprunts individuels ou collectifs (les emprunts individuels sont plus faciles à obtenir, et moins risqués) • Dans le cas général, les parts sociales ne correspondent pas à des mètres carrés identifiés. Exemples (liste non exhaustive) de montage juridique en Sociétés Civiles ––SHP : Société d’Habitat Participatif ––SCI : Société Civile Immobilière ––SCCC ou S3C : Société Civile Coopérative de Construction ––SCOP : Société Coopérative et Participative ––SCIA : Société Civile Immobilière d’Attribution ––SCAA : Société Civile d’Attribution à l’Autopromotion ––SCOP : Société Coopérative et Participative ––SAA : Société d’Attribution et d’Autopromotion... Nous avons abordé dans cette partie les tenants et aboutissant théoriques de l’habitat participatif en France et à l’étranger. Le bilan du siècle passé nous a donné des exemples concrets de rassemblement de personnes porteuses d’une envie commune de construire ensemble, et pour des décennies durant, un lieu de vie et de partage. Cependant, avant l’affirmation d’un statut à part entière pour l’habitat « participatif », un statut intermédiaire entre location simple et pleine propriété fut créé en 1947 : la 32


location-coopérative. Le locataire achetait sous forme de parts sociales de la coopérative un droit à bail cessible et transmissible en contrepartie d’une contribution au financement de la construction. Ensuite le locataire-coopérateur versait un loyer correspondant aux charges d’exploitation et au remboursement des emprunts contractés. L’accès à ce type de logement était soumis à la législation HLM. 36 802 logements ont été construits sur ce modèle. Cette formule a été supprimée par la loi Chalandon en 1971 pour protéger les acquéreurs particuliers car les locataires-coopérateurs d’un programme étaient solidaires de l’ensemble des coopérateurs de la même société, ce qui leur faisait courir le risque d’avoir à supporter les déficits d’un ou plusieurs autres programmes.

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ENQUÊTES DE TERRAIN SUR L’ART DE VIVRE ENSEMBLE Avant d’aborder les enquêtes sur le terrain, il est important de définir les trois types d’habitats groupés. Ces derniers peuvent selon les cas être dit en promotion classique : un bailleur ou promoteur privé ou public s’occupe de lancer le projet, réunir les fonds publics (les dispositifs qui financent le logement social ne font pas confiance à la coopérative en elle-même). Le bailleur permet de créer de la confiance et proposer une approche professionnelle. Selon l’association Habicoop, les avantages se résument en trois points : - aide à la maîtrise d’ouvrage (AMO [Aide à la Maîtrise d’Ouvrage], MOD [Maîtrise d’Ouvrage Déléguée], CPI [Contrat de Promotion Immobilière], VEFA [Vente en l’État Future d’Achèvement]), - viabilité financière : portage et mutualisation des coûts de chantier, - garantie de réalisation vis-à-vis de l’aménageur et de la collectivité. La deuxième catégorie est celle des habitats groupés par délégation de maîtrise d’ouvrage : les citoyens sont à l’origine du projet et en définissent les contours. Une fois le projet cerné, il est confié dans sa réalisation à un délégataire qui en assure la maîtrise technique. Les risques sont alors supportés majoritairement par un professionnel. Le dernier type est celui de l’habitat groupé en autopromotion : le groupe de futurs habitants joue ici le rôle traditionnellement dévolu au promoteur immobilier et fait donc le choix de se passer intégralement de cet intermédiaire. Le groupe est le maître d’ouvrage collectif de son habitat, 35


c’est-à-dire qu’il est le seul commanditaire du projet, donc il défini le cahier des charges, notamment par des chartes et contrats d’objectifs. Il pilote la mise en œuvre par le choix des prestataires, la supervision des travaux. Il décide enfin de mener le projet avec ou sans l’assistance de professionnels, avec ou sans délégation partielle de la maîtrise d’ouvrage, en fonction des compétences propres de ses membres.

a) Autopromotion et recherche d’un idéal, la charte comme base de travail J’ai pu, lors de mes recherches, entrer en contact avec plusieurs groupes d’habitat participatif. Dans cette partie je vais aborder plusieurs projets pouvant paraître similaires, mais donc les variantes résident à la fois dans l’esprit du groupe et l’avancée de chaque projet. Les voici : Les Voisins Volontaires à Saint-Nolff (56) : Un habitat groupé qui sera situé dans l’éco-quartier du Pré-Vert, où déjà 130 logements sont prévus, et intégrera parfaitement les valeurs de l’habitat durable respectueux de l’environnement. « L’éco-cité se situe dans le secteur nord du bourg de Saint-Nolff, desservi par la RD 182. L’allée du Château offre un raccourci piétonnier pratique et agréable pour rejoindre le centre bourg. Le centre bourg regroupe les équipements publics (écoles, mairie, poste, équipements sportifs, culturels…), les commerces et services de proximité. Cet éco-quartier, actuellement en construction, est un des plus écologiques de France : ––C’est un quartier sans voitures. ––De faibles surfaces de terrains permettent un accès à

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la propriété à des familles plus modestes. ––Les maisons sont construites aux normes BBC (Bâtiment à Basse Consommation) ––Le cahier des charges incite très fortement aux économies d’énergie, à l’utilisation de matériaux locaux pour la construction. ––Les haies seront composées d’espèces variées et locales, les arbres plantés dans les allées seront principalement des fruitiers. ––Une parcelle de 3000 m2 est réservée pour des jardins partagés… » - voisinsvolontaires.free.fr Le projet d’habitat groupé des Voisins Volontaires sera intégré dans cet éco-quartier et réunis 11 foyers, familles, couples avec ou sans enfants, personnes seules... De quoi représenter une large mixité sociale et intergénérationnelle. Le projet est accompagné par Olivier Cencetti, assurant l’aide à la maîtrise d’ouvrage et faisant partie de l’Echo-habitants, association d’aide et de conseil dans les démarches juridiques et l’organisation du projet. Les Voisins Terre Pelle à La-Roche-sur-Yon : C’est un habitat groupé composé de 8 à 10 foyers en autopromotion. Les futurs voisins recherchaient un terrain d’environ 3000 à 4000m² dans un rayon de 1km autour de La-Roche-SurYon. Le désir d’être proche d’un bourg actif permettant de minimiser l’usage de la voiture pour favoriser les déplacements à vélo ou à pied, ou les transports en commun. Ils ont donc trouvé leur bonheur au sein de la ZAC de la Marronière ou un terrain leur a été attribué par la SEM (Société d’Économie Mixte) d’ORYON situé en Vendée. Le projet 37


se veut bioclimatique et adapté aux futurs habitants, une première esquisse de projet a été réalisée le 19 octobre 2014 par les architectes de la SCOP SoléCité dirigée par Laurent Raimbault et basée à Nantes. Ce projet est lui aussi accompagné par l’association l’Echo-habitants. Annexe 1 : Plan de masse esquissé par SoléCité + perspectives de projets

Ecocum à Loperhet (29) : Un projet, quant à lui, déjà sorti de terre composé de 8 maisons en tout dont 6 en éco-construction, le projet a été suivi par l’architecte Tristan La Prairie. Un emprunt à la NEF (Société Coopérative des Finances Solidaires) a été effectué, ainsi qu’un prêt auprès de la Fondation de France, qui, même s’il est arrivé en fin de travaux, a pu, en partie, soulager financièrement les habitants. Toutes les trois semaines les acteurs du projet se réunissaient afin de discuter de l’avancement global, avec en plus des réunions de commissions portant sur les sujet des « Statuts et Finances », de la « Construction » et de la « Communication ». C’est une réalisation rurale en partenariat avec la mairie de Loperhet où des rencontres avec les habitants de la ville ont permis un partage du savoir et une ouverture du projet à l’échelle de la région. Le projet se veut bioclimatique (construction saine, minimisation des déchets), autonome (usage de toilettes sèches et traitement des eaux usées par phytoépuration). De nombreuses recherches menées par les habitants ont été nécessaires pour comprendre les enjeux de l’éco-construction et de la communication au sein d’un groupe. Céline, l’une des fondatrices du projet, en couple avec Benoît et étudiante, a fait commander de nombreux ouvrages portants sur l’habitat groupé dans les bibliothèques environnantes... De quoi inspirer bien des désirs d’autonomie dans la région ! Allant de 2 à 66 ans, le projet est à l’image d’une mixité intergénérationnelle réussie, cependant des changements (séparations,

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désistements, décès...) ont modifié la composition initiale du groupe. Initié en 2005, les maisons sont sorties de terre en 2012, il reste encore quelques ajustements à faire (local commun de bricolage, désir de créer un potager ou de se pencher sur le sujet de la permaculture) et une maison est actuellement en attente d’habitants afin que le groupe soit au complet. Une maison commune a été désignée en SCI an parallèle d’une copropriété horizontale pour le reste du projet, une association syndicale a de plus été créée afin de faciliter les démarches futures. La charte a elle été rédigée en 2005 pour éviter aux habitants de « se perdre en chemin », comme ils le disent si bien. Annexe 2 : Photos de projet et de maison et panneau d’entrée sur le site

La Petite Maison à Rennes (35) : Petit habitat groupé « intermédiaire » (mi-immeuble, mi-maison) créé en 1987, ce projet fait partie des précurseurs de l’habitat participatif. Implanté 41 rue de la carrière à Rennes, cette S3C est composé de quatre maisons (foyers) accolées les unes aux autres et disposant de terrasses donnant sur un jardin collectif. Un studio commun est mis à disposition afin d’accueillir les amis de passage et l’ancien « Café Gilbert » en ruine joue désormais le rôle de salle commune. «Notre première motivation était d’offrir un cadre de vie favorable à nos enfants : c’était un projet convivial et parental» a souligné Pierre-Yves Jan, co-président de l’association Éco Habitat Groupé, lors de sa rencontre avec Henri Leborgne, ancien Castor ayant travaillé avec 170 personnes dans les années 50 : « des non-qualifiés ouvriers, employés, policiers, gendarmes..., et des pros qui donnent le «la»: maçons, couvreurs, menuisiers, charpentiers, plombiers, électriciens... » à l’origine de ce grand mouvement de reconstruction lancé

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par les habitants eux-mêmes.

Ainsi, on constate auprès de ces groupes que plusieurs documents peuvent voir le jour : ––une charte réalisée par le groupe qui définit en amont les contours de son projet ; ––une charte ou convention de partenariat qui stipule le rôle et l’engagement de chacune des parties ; ––un règlement de copropriété le cas échéant ; ––un règlement de « vie commune » qui précise l’organisation de la vie collective et la gestion des espaces communs. Si l’initiative vient principalement d’un ou deux foyers par communauté, l’idée que se fait chacun du « vivre ensemble, chacun chez soi » peut varier. Encore en 2011, sur 250 projets d’habitats groupés en France, 206 avaient pour origine l’initiative des habitants même du futur projet. 40


La recherche d’un idéal de vie passe par beaucoup de discussion. La philosophie d’un groupe est établie dès les premières réunions afin de constituer une charte ou dans un document dont l’objet est une présentation globale du projet. Tout ménage désireux de participer au projet doit accepter les termes de la charte adoptée le cas échéant. Elle réunit plusieurs notions fondatrices du groupe de travail : La recherche d’un projet social et coopératif La première notion retenue par les futurs habitants est celle de la participation. Tous souhaitent requestionner la notion de « l’habitat » et disposer d’un logement en adéquation avec leurs besoins. Ensemble, ils ont la volonté de définir une grande partie, voir la totalité, du programme architectural, du logement privatif aux parties communes. Les habitants deviennent acteurs sur le long terme et au quotidien de leur lieu d’habitat, en prenant part à l’ensemble des décisions, selon les principes coopératifs ou « une personne = une voix ». Cette gestion démocratique distingue donc les projets d’habitat participatif des copropriétés classiques où le nombre de voix est proportionnel à la valeur du bien. Les futurs habitants souhaitent aussi mettre en œuvre une mixité sociale, qu’elle soit de revenus, de générations et de statuts d’occupation afin de représenter une certaine diversité. Ainsi, les initiatives contemporaines prennent, en théorie du moins, le contre-pied de celles qui ont été avancées dans les années 1970 à 1980 , caractérisées par une grande homogénéité. Les porteurs de projet aspirent à créer un lien social fort afin de se sentir moins isolés et sortir de l’anonymat propre selon eux à la plupart des immeubles collectifs (particulièrement valable pour les personnes âgées ou personnes seules). Certains services mutuels comme la garde d’enfants peuvent être assurés directement par les occupants de l’im41


meuble ou du hameau. Annexe 3 : Prêter sa chambre d’amis ou son toboggan : la nouvelle tendance de l’habitat groupé – Nord Eclair

La qualité environnementale est elle-même rattachée à la qualité de vie, ici l’habitant dispose d’un logement le plus sain possible, conçu si possible avec des matériaux naturels et locaux, et visent à réduire au maximum leurs déchets. Dans l’idéal, certains définissent la construction de bâtiments à énergie positive, mais cela dépend du niveau d’ambition de chacun des groupes.

La recherche d’un projet économique Les futurs habitants ont aussi des attentes économiques, justifiées par les difficultés d’accès au logement que rencontrent plusieurs ménages (« trop petit, trop cher, trop éloigné des services…»). Un habitat participatif et coopératif est selon eux un moyen d’accéder à un logement de plus grande qualité et

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à moindre coût de par : ––la suppression des intermédiaires – les futurs habitants étant leur propre promoteur – de leur rémunération et l’absence de frais de commercialisation ; ––le partage d’espaces qui est un moyen de réduire les surfaces individuelles des logements. Certains projets comportent plusieurs chambres d’amis partagées permettant à chaque ménage de soustraire une pièce à son logement ; ––la mutualisation de certains équipements et ressources (voiture, lave-linge, outils…) qui entraîne des économies d’échelle ; ––une qualité environnementale poussée des constructions qui diminue les charges sur le long terme ; ––les échanges de services entre habitants limitant le recours aux services marchands ; ––l’absence de dégradation du fait de la responsabilisation de chacun des habitants vis-à-vis du lieu d’habitat ; ––dans certains cas, la prise en charge et la réalisation directement par les futurs habitants d’une partie de la construction, comme par exemple dans le projet Ecocum à Loperhet où 6 sur 8 des maisons construites le furent en autoconstruction partielle ou totale. ––l’encadrement de la spéculation. En évitant que les logements soient revendus selon une logique spéculative et donc à des prix élevés, leur acquisition peut se faire à coûts plus réduits. De plus, dans le cadre de baux emphytéotiques, les futurs habitants espèrent pouvoir ré-

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duire notablement leur budget logement.

La recherche d’un projet politique Le terme politique est ici envisagé dans son sens large, l’initiative ne se limite pas à la conception et à la gestion de l’habitat, mais a bien une valeur militante, que ce soit par le réseau des associations comme par l’action politique de ces projets à l’échelle de la ville, de la région, voir même du pays. Le questionnement de ces habitants s’étend au rapport à la ville et à la décision publique, la place du citoyen (réinterprétation de la démocratie en son sens propre), de la propriété... Toute forme de spéculation est proscrite et l’habitat n’est plus vu sous une logique de « rentabilité ». Ce sont des laboratoires à ciel ouvert. Ecocum, un des premiers projets lancés en 2005 a inspiré bien d’autres habitats groupés en terme d’écologie, de communication entre acteurs (a obtenu un prêt de la Fondation de France par son usage précurseur de la Communication NonViolente ou CNV) et par son partenariat avec la Mairie de Loperhet qui leur a facilité l’accession aux deux terrains mutualisés, en les achetant et les revendant au collectif en une seule et même parcelle sans plus-value. La grande majorité des projets souhaite soutenir des associations de consommation biologique ou de maintien de l’agriculture paysanne (AMAP), et mettre en commun les ouvrages et références de chaque foyer dans une salle commune ou développent des café associatif (La Petite Maison à Rennes utilise le vieux « Café Gilbert » comme salle commune). Chacune des valeurs soutenues par un habitat participatif lui sont propres, elles dépendent à la fois du parcours de ses futurs habitants, de leurs valeurs, budgets, et surtout, du partage en groupe. 44


En effet, les discussions amènent à prendre des décisions et faire des concessions afin de d’instaurer des valeurs qu’un seul n’aurait pu envisager sans l’aide du groupe. Comme le disent les Voisins Terre Pelle de La RocheSur-Yon : « Nous sommes des voisins qui nous engueulons avant même de vivre ensemble, comme ça au moins c’est réglé, et on passe à autre chose ! Ça rend la vie plus facile par la suite.». Annexe 4 : Charte des Voisins Volontaires à Saint-Nolff Annexe 5 : Charte des Voisins Terre Pelle à LaRoche-Sur-Yon

b) Autoconstruction et échange de savoirs-faire Définition : L’autoconstruction est le nom donné à l’action, pour un particulier, de réaliser sa propre maison sans, ou pratiquement sans, l’aide de professionnel du bâtiment. - Encyclopédie en ligne Ekopédia Quelques précisions doivent être apportées sur ce que l’on nomme « autoconstruction ». L’amalgame peut en effet être rapidement fait avec les projets décrits dans ce guide. Or, des différences sont à noter. Il est tout d’abord nécessaire de préciser que l’autoconstruction ne relève pas systématiquement d’une démarche collective. Nombreux sont les particuliers qui se lancent individuellement dans la construction de leur maison. Pour certains, c’est un rêve de longue date, pour d’autres,

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un moyen de diminuer leur budget logement. La solidarité exprimé dans les projets autoconstructifs est quant à elle bien mise en avant, comme dans nombre de projets d’habitats dits participatifs ou coopératifs. Mais cette dernière est un objectif exprimé d’abord par l’association, et si des solidarités entre les futurs habitants peuvent s’exprimer, elles ne constituent pas le cœur du projet, qui doit avant tout permettre l’accès à un logement à moindre coût ; cette diminution étant permise par la participation des futurs habitants au chantier durant 60 jours. Ensuite, la conception des logements se veut moins participative que dans les projets d’habitats coopératifs, et d’une certaine manière moins personnalisée. La conception en collectif quant à elle concerne principalement la définition de l’avant-projet sommaire et ne se base pas sur le partage d’espaces, telle que buanderie, salle commune, comme dans les projets d’habitat dits participatif. Il existe des associations d’aide à l’autoconstruction (l’association Villages et Quartiers Solidaires en région grenobloise par exemple), ou un groupe de futurs habitants est constitué par cette dernière et où chacun participe à l’ensemble du chantier, selon ses compétences. Ainsi, un autoconstructeur est amené à intervenir dans la construction du logement de son futur voisin. Ces derniers deviennent alors des Autopromoteurs Autoconstructeurs (APAC). À Saint-Nolff, quelques foyers plus modestes ont décidé de faire appel à l’autopromotion afin de rentrer dans leurs budgets et économiser pour vivre (ne pas avoir à rembourser un prêt sur plusieurs décennies), c’est le cas de Dominique, une des voisines habitant actuellement à Radon, vivant seule et désireuse de partage et de mixité au sein de

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son futur hameau. À Ecocum, Janet, anglaise de soixantesix ans n’a pu faire appel à l’autoconstruction, son âge ne le lui permettant pas, elle a décidé comme le reste du groupe de faire appel à un architecte, Tristan La Prairie, mais d’avoir recours, contrairement aux autres, à des entreprises pour construire sa maison. Le coût au mètre carré fût donc d’environ 1000€/m² pour les autoconstructeurs, et le double pour les deux maisons sur huit n’ayant fait appel à des professionnels. L’autoconstruction peut être partielle ou totale, chez les voisins Terre Pelle, la question de savoir jusqu’où les habitants peuvent pousser l’autoconstruction se pose actuellement. Des économies, oui, mais à quel prix ? Certains, n’arrivant plus à gérer les déplacements, rendez-vous avec les élus, les banques, réunions de commission, se sont vus obligés de quitter leurs emplois afin de se consacrer entièrement au montage du projets. La précarité des salaires de certains foyers limite donc de plus en plus le budget des voisins : plus le projets stagne plus il est difficile de garder le moral. C’est actuellement le cas pour les Voisins Volontaires à Saint-Nolff où les financements peinent à venir et où la municipalité fait avancer le dossier à vitesse réduite. Sans financement, pas de soutien des banques, sans banque, pas de prêt pour le lancement des travaux. Si le permis de construire est affiché depuis avril 2014, les démarches restent en suspens. L’autoconstruction était pour certains une belle manière de s’investir dans la construction de leurs maisons, mais le manque d’argent risque de compliquer celle-ci : comment consacrer des mois de travail à son futur logement sans avoir de revenus à coté ? L’autoconstruction est un échange de temps contre de l’argent, certes, avec parfois quelques complications par la suite, lorsque des défauts de fabrication pointent le bout de leur nez quelques mois plus tard... Et ou les frais et délais s’amoncellent alors

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que l’on pensait en avoir terminé pour de bon. Le recours à un architecte n’est pas garanti, mais dans la majeure partie des habitats dits participatifs, une cohérence architecturale est désirée par les voisins, un architecte s’occupe donc de la conception du projet, puis certains décident d’en assumer la construction avec le plus souvent, une assistance à la maîtrise d’ouvrage. Annexe 6 : Eco-habitats : un chantier participatif à Ecocum – Ouest France

c) Autogestion et liens sociaux : du participatif à l’évolutif L’idée de monter un projet d’habitat groupé vient majoritairement des habitants eux-mêmes, nous l’avons mentionné précédemment. Chez les Voisins Terre Pelle par exemple, l’idée est venue de deux jeunes couples avec enfants : Jean-Marie et Myriam avec leurs deux filles et Amélie et Philippe ayant une fille unique, le projet a été lancé en Novembre 2012. Venant d’horizons bien différents, il est parfois difficile de se réunir autour d’une table et parler calmement lorsqu’on est une vingtaine... Il a fallu apprendre à vivre ensemble, et ce avant même d’être voisins. Suite au recrutement, ou chaque nouveau venu doit accepter la charte établie dès le début du projet, il faut se faire à certaine règle. La CNV, ou Communication NonViolente a permis aux voisins d’Ecocum de s’affirmer comme précurseurs. Suite à mon entretien avec Janet, la plus âgée du groupe, j’ai compris quels en étaient les points fondamentaux : - le respect du temps de parole : chacun sa méthode, bâton de parole, une minute pour chacun, temps égal de

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parole pour tous et consultation de chacun lors d’une prise de décision importante... Une règle parfois difficile à faire respecter, mais qui dans l’ensemble fonctionne, même si certains se font remettre à leur place de temps en temps. Rien de grave donc. - le choix à chaque séance d’un animateur dont le rôle est d’ouvrir la réunion et veiller au bon déroulement de celle-ci en déterminant un temps pour chaque sujet à traiter : les acteurs ne peuvent se réunir chaque semaine pour la plupart (vivant tous plus ou moins loin les uns des autres) il faut donc être efficace, réagir en fonction des questions laissées en suspens, des rendez-vous opérés durant les semaines passées, des tâches à effectuer lors des suivantes... Une organisation nécessaire au bon déroulement du projet afin que des digressions ne conduisent pas à un manque de temps et donc à un retard dans les prises de décisions. Un script s’occupera lui de reporter par écrit tout ce qui a été dit afin non seulement d’en garder une trace, mais aussi de pouvoir retransmettre l’ensemble de la réunion aux présents comme aux absents. - la procédure : elle peut être difficile à assimiler pour certain, c’est le « process » par lequel passera chaque réunion des acteurs. Elle a pour but d’éviter non-dits, chacun pouvant accumuler quelques rancœurs au fil des séances, les désaccords peuvent être, à la longue, source de discorde et de dissolution d’un groupe, l’un des couples à l’origine des Voisins Terre Pelle en a déjà fait les frais lors d’une tentative ratée auprès d’un précédent groupe de travail. Des formations sont disponibles pour l’ensemble des voisins afin de comprendre les règles de base de la Communication NonViolente, à Vern-sur-Seiche en Ille-et-Vilaine par exemple auprès d’Alter Ego, un centre de coopération pourvu d’une agence conseil en démarches participatives et gouvernance coopérative. Les réunions commencent gé49


néralement par l’ordre du jour, afin d’établir le but de la séance et rappeler à l’ensemble de l’auditoire les points à aborder. Ensuite, un tour de table est fait afin de faire état du ressenti de chacun, de ses attentes et frustrations, cette étape sert à relâcher la pression et oblige (dans la mesure du possible) chacun à exprimer ce qu’il a sur le cœur. Ce tour de table sera de nouveau effectué à la fin des différentes réunions pour voir si l’état d’esprit de l’un ou de l’autre a changé, s’il sent que le projet avance ou stagne et s’il s’estime optimiste ou non pour la suite. Modalités concrètes : Le groupe a la volonté de rechercher un consensus, de prime abord, pour toute prise de décision. Le groupe met tout en œuvre afin que, même s’il reste des frustrations, les aspirations et souhaits personnels soient entendus et que les décisions prises soient réellement acceptables par tous, même si ce n’est pas la solution préférée de certains. Ceci afin de ne pas créer de frustrations qui pourraient, à terme, entacher le climat du groupe. Ceci étant donné que tous désirent que chacun se sente bien dans l’habitat groupé. Afin que chacun puisse s’exprimer, le groupe favorise l’usage de moyens de communication diversifiés. Dans les réunions, chaque personne sera sollicitée pour être animateur(-trice) ou secrétaire de réunion à tour de rôle afin de développer ses compétences en ce domaine et de donner à chacun l’occasion de participer régulièrement aux échanges. Pour un problème collectif, la discussion et la résolution du problème sont alors collectives, et font ap-

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pel, ou non, à un médiateur extérieur. En cas de désaccords et de conflits interpersonnels, les habitants concernés tentent de résoudre le problème entre eux, en faisant ou non appel à un médiateur interne au groupe ou externe, qui les aidera à s’écouter mutuellement et à trouver une solution acceptable pour les deux parties. Si la situation ne peut être résolue à la pleine satisfaction de chacun, il sera fait appel à un médiateur extérieur et professionnel neutre. - Extrait de la charte des Voisins Volontaires Plusieurs autres « règlements » peuvent être nécessaires en fonction du montage juridique de l’habitat groupé et des besoins du groupe. Plusieurs assurent le bon déroulement juridique du projet alors que d’autres font plus ordre de règle morale ou marche à suivre pour le bon déroulement de la vie en communauté. En voici quelques-uns : - Règlement de copropriété : Il a une valeur juridique. Bien souvent, les futurs habitants revendiquent leur souhait de « vivre-ensemble autrement ». Toutefois, ces derniers n’anticipent que rarement la gestion de leur futur lieu de vie, et notamment les espaces communs. Avant leur entrée dans les lieux, ils seront pourtant amenés à rédiger un document stipulant l’organisation générale des espaces. A cet effet, si l’organisation juridique mise en place est une copropriété, un règlement dans les termes de la loi de 1965, est rédigé, qui précise notamment les modalités de répartition des droits de vote. Les habitants peuvent rédiger, en complément de ce document, une charte. Mais les dispositions de cette dernière ne peuvent entrer en contradiction avec celles du règlement de copropriété et modifier par exemple la répartition des droits de vote lors de la prise d’engagements 51


financiers (décision de travaux par exemple). L’organisme de HLM peut, s’il le souhaite, veiller à ce que les deux documents soient compatibles. - Règlement intérieur : Il n’a pas de valeur juridique, mais prévaut comme « Loi dans ce système » ou encore « Conseil de Maison ». Lorsqu’il n’y a pas constitution d’une copropriété, aucun règlement n’est nécessaire puisqu’il n’y a qu’un seul propriétaire. Les futurs habitants peuvent donc formaliser la gestion de leur lieu de vie dans une simple charte ou règlement intérieur, avec, de fait, une attention particulière portée à l’utilisation et à la gestion des parties communes. Les futurs habitants se constituent généralement en société civile immobilière d’attribution ou en société coopérative de construction. A terme, une copropriété peut être constituée, avec éventuellement un règlement intérieur précisant que les logements sont gérés selon des principes coopératifs. Cela étant, la gestion démocratique des logements n’est pas nécessairement une valeur centrale des projets. Annexe 7 : Exemple de règlement intérieur d’un habitat participatif (Habitat Différent, opération en partenariat avec le Toit Angevin)

- Règlement de jouissance : il doit également être rédigé par les fondateurs de la SCCC (ou S3C). Ce dernier détermine la destination des parties réservées à l’usage exclusif de chaque associé et, s’il y a lieu celles des parties communes affectées à l’usage de tous les associés ou de plusieurs d’entre eux. Il ne peut imposer de restriction aux droits des associés sur les parties réservées à leur jouissance exclusive en dehors de celles qui sont justifiées par la destination de l’immeuble, par ses caractères ou par sa situation. Il a une valeur juridique. - L’écrit : Dans le cas de la nouvelle Société d’Autopromotion et d’Attribution, le choix doit être fait entre la pleine 52


propriété ou la jouissance du lot. Dans une société d’attribution, on est obligé de passer par un contrat de promotion immobilière ou un « écrit équivalent » (un professionnel s’engage vis-à-vis du groupe ou on nomme quelqu’un du groupe pour assumer les responsabilités). Ce contrat préliminaire doit comporter toutes les indications relatives à la société et aux conditions techniques et financières d’exécution des travaux et préciser les conditions de la vente (date, prix de cession, coût de construction et appels de fonds prévisionnels…) Il doit être établi par écrit et comporter en annexe une note technique relative à la nature et à la qualité des matériaux et équipements de construction. Avant la conclusion du contrat de promotion immobilière ou l’approbation par l’assemblée générale de l’écrit équivalent, aucun versement ne peut être demandé aux associés ni accepté d’eux. Aucun paiement ne peut être exigé avant que la créance ne soit exigible. Ces dispositions ne font toutefois pas obstacle aux versements nécessaires au paiement des études techniques et financières du programme et à l’achat du terrain. Cet écrit est donc un engagement à la réalisation du programme et a une valeur juridique. Dans le cas d’une S3C (Société Civile Coopérative de Construction) la gérance (donc les habitants) porte l’écrit si il n’y a pas de promoteur. Dès le début des démarches, j’ai remarqué que les groupes que j’avais rencontré, déjà formé depuis plusieurs années mais n’ayant pas encore abouti le projet, s’échangeaient déjà des services et organisaient des événements ensembles. La garde des enfants d’un des plus jeunes couples assuré par les plus âgés n’ayant plus d’impératifs professionnels, des week-ends dans un gîte permettant aux voisins de se voir en dehors des séances officielles de réflexions, tant de petites attentions faisant soupape et permettant aux acteurs de ne pas assimiler leurs futurs voisins uniquement aux démarches lourdes et lentes de l’accession 53


au logement.

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LA MARCHE À SUIVRE : DE L’APPRENTISSAGE À LA DIFFUSION a) De l’individu au réseau : sensibilisation et parole, les associations d’aide et de conseil et le financement participatif Si les dispositifs participatifs sont en pleine émergence, il faut chercher au sein de nos sociétés la raison de ce besoin de consultation et de concertation auprès des collectivités et professionnels. L’échelle spatiale est devenue de plus en plus importante dans la réussite d’une démarche participative, l’individu a plus de facilité à s’impliquer dans les décisions à l’échelle de son quartier, de sa commune, de son agglomération ou de sa région qu’à l’échelle de son pays ou de l’Europe. Dans cela, il faut comprendre que l’implication d’un dépend de son sentiment d’appartenance à une communauté donnée. Qu’est-ce qu’un groupe ? Selon Turner (1981) le groupe n’existe que si au moins deux individus se définissent eux-mêmes comme faisant partie de ce groupe et qu’un troisième individu reconnaît cette existence. Le groupe se reconnaît par un ensemble de relations directes et privilégiées. De plus d’autres aspects interviennent dans la notion de groupe comme la taille [on peut considérer l’existence d’un groupe à partir d’un nombre entre 3 et 12 individus (pour Rebelson et Steiner, un groupe de plus de 12 personnes perd de son efficacité ], le statut, le rôle et les normes. Ces groupes peuvent être de tailles diverses : - le groupe primaire est un groupe de petite taille (de trois à une douzaine d’individus) dominé par les relations directes comme la division des tâches, l’adhésion à des buts communs, les affinités, l’indifférence, etc. Ce groupe possède ses croyances, son langage, ses normes et ses 55


traditions (exemple : famille, voisins, amis). - Le groupe secondaire est un groupe de taille plus grande caractérisé par des relations plus superficielles ou les relations sont déterminées et imposées pendant une certaine période (ex. école, entreprise, équipe sportive...) Dans le cas de l’habitat groupé, les groupes les plus effectifs restent ceux composés d’un nombre limité de foyers. Selon l’ouvrage de Bruno Parasote, «Autopromotion, Habitat groupé, Écologie et Liens sociaux», on peut distinguer cinq tailles critiques : - De 2 à 5 logements : le projet est souple en gestion, il demande une organisation assez simple et peut se réaliser sous les formes juridiques les plus basiques. - De 6 à 10 logements : le projet devient plus complexe à gérer, il exige une coordination des membres et l’usage de formes juridiques éprouvées, telle la copropriété. - De 11 à 25 logements : des sociétés ou coopératives de construction sont impératives pour assurer le fonctionnement du groupe et les relations entre membres. La prise de décision en peut plus uniquement se fonder sur l’unanimité. Il est impératif qu’un seul individu ne puisse bloquer tous les autres. - De 25 à 50 logements : divers exemples européens propose un découpage au sein du projet pour constituer une entité maîtresse, puis des sous-entités. Ceci permet de gérer en grand nombre ce qui sera commun à tous et de redécouper l’opération en petits groupes de 10 à 20 logements, généralement à l’échelle des immeubles – ou hameaux – à 56


construire, pour permettre un meilleur avancement (les grandes réunions plénières sont toujours plus difficiles à organiser). - Au-delà de 50 logements : cela peut se dérouler comme le montage précédent, ou s’appuyer sur une société coordinatrice, qui assure la gestion des relations entre membres et éventuellement reprend à ses frais les risques en cas d’abandon d’une partie de l’opération (ce fut le cas du projet De Kersentuin aux Pays-Bas). Les opérations à cette échelle permettent de mettre en commun des moyens qui ne peuvent se retrouver à l’échelle d’un immeuble avec l’implantation de cantines autogérées, de crèches, de stations d’autopartage ou de bien d’autres services. - Autopromotion, Habitat groupé, Écologie et Liens sociaux, Bruno Parasote La notion de démocratie participative fait actuellement l’objet de plusieurs expériences, faisant plus ou moins polémique : Etienne Chouard, par exemple insiste sur l’importance de ne plus élire des représentants votant nos lois, mais bien de reprendre possession de notre capacité décisionnelle et remettre la « démocratie » (le pouvoir au peuple) d’actualité. Car plusieurs raisons justifient une émergence des démarches participatives : - La difficulté croissante des institutions à faire passer ou appliquer leurs décisions, - L’émergence d’une base théorique pour penser et légitimer la démocratie « délibérative », il est de plus en plus admis, reconnu et défendu que des délibérations éclairées se traduisent par de bonnes décisions, traduisant la volonté

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générale, - La prise de conscience croissante des risques scientifiques, technologiques et environnementaux de la part de la société, donc l’envie croissante des citoyens d’en débattre collectivement aux côtés des experts et des décideurs. - L’évolution du cadre légal des mesures incitant ou rendant obligatoire la participation des citoyens [développement du phénomène « Nimby » (contraction de « not in my backyard » : « pas dans mon arrière-cour », « pas dans mon jardin »).] Internet et le réseau : Si le mouvement d’habitat participatif est en plein essor depuis les années 2000, c’est principalement grâce à l’outil Internet et au réseau de plates-formes d’échanges utilisées par les associations et groupes-projets. Des listes de discussions offrent un suivi des groupes-projets et une aide dans les démarches est assurée par des nombreuses associations de par la France. Elles constituent une « mémoire » des projets, considérant que désormais, la majorité des groupes-projets ont une page internet exposant leur parcours, les étapes clés, les coordinateurs, et la charte de ces derniers. Parmi ces associations et rassemblements portant sur l’habitat participatif on peut citer (liste non-exhaustive, le mouvement étant en plein essor, les associations d’aide et de conseil sont en plein essor) : • Eco Habitat Groupé : Créée par Pierre-Yves JAN, c’est l’héritière du mouvement de l’habitat autogéré dans le but de « sensibiliser, favoriser de l’échange et de l’hospitalité entre les groupes (élus, architectes, habitants, banques). » • PARASOL : association à l’origine de nombreux ras58


semblements et regroupant en Ille-et-Vilaine : ––des groupes d’habitants (en phase d’élaboration d’un projet, ou vivant dans des projets réalisés) ––des habitants, en recherche de solutions d’habitat groupé, ––des professionnels, à même d’orienter, de former, d’accompagner et de réaliser des prestations auprès des groupes d’habitants, afin que les projets aboutissent ––des partenaires relais, institutions ou agences au contact des habitants, en particulier des relais aux échelles des territoires, ainsi que les Pôles d’Économie Sociale et Solidaire actifs dans les différents Pays du département • Habicoop (Lyon): Créée en décembre 2005, elle met en avant le principe de coopérative d’habitants avec pour objectifs : • aider à la création et au développement de projets immobiliers collectifs à vocation de logement, appelés coopératives d’habitants favorisant le logement social et l’accession à la propriété collective de familles à faible revenu et de personnes en difficulté ainsi que la promotion de modes d’accession à la propriété coopérative de tout public, en mixité sociale. • permettre qu’existe un réseau des coopératives d’habitants, à même d’assurer leur représentation et défense, de promouvoir ce nouveau mode d’habiter et de leur apporter conseil et service. • L’Echo-habitants : Créée par Olivier Cencetti (Aide 59


à la Maîtrise d’Ouvrage auprès des groupes-projets des Voisins Volontaires et des Voisins Terre Pelle) elle est basée à Nantes et a pour objet de permettre à ses adhérents de développer des projets d’habitats sociaux et écologiques dans le cadre de coopératives d’habitants et dans le respect des principes énoncés par la charte de l’association. Constituer un cadre de référence facilitant le montage et l’essaimage de ce mode d’habiter est au cœur des préoccupations de l’association. • Eco-Quartier Strasbourg : association créée en 2001 et dirigée par Bertrand Barrère et Bruno Parasote (à l’origine de l’ouvrage Autopromotion, Habitat groupé, Écologie et Liens sociaux cité plus haut). • HESP’ère21 : une association qui œuvre pour la création d’habitats participatifs accessibles à tous en région parisienne. • Habiter Autrement à Besançon • Les HabILeS à Grenoble • L’EPOK (accompagnement de démarches participatives), Coopérative d’Ecologie Populaire basée à Rennes : tout commence en 2008... Alors co-fondateurs/salariés de l’association Parasol, ils appuient des groupes de futurs voisins et des collectivités engagés dans des projets d’aménagements participatifs. En juin 2010, l’association Parasol choisit d’externaliser ses activités professionnelles. L’Epok est créée. Quittant le seul champ de l’Habitat Solidaire, l’Epok se mobilise aujourd’hui sur l’ensemble des initiatives citoyennes participatives et/ou alternatives en lien

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avec l’habitat. • GRT Ouest (Bretagne et Pays de la Loire) devenu HPO (Habitat Participatif dans l’Ouest) : La plateforme habitatparticipatif-ouest, réseau informel, regroupe des structures engagées dans le développement de l’habitat solidaire dans l’ouest : l’EchoHabitants, Parasol, l’ADESS Pays de Brest et l’EPOK • … Le recrutement des futurs habitants d’un groupe de voisins déjà formé se fait la plupart du temps par le bouche à oreille. Lors de ma visite chez les Voisins Volontaires, plusieurs candidats à l’adhésion étaient présents. Famille d’accueil, couples avec enfants, tous ont entendu parlé du projets de Saint-Nolff de manière différente, que ce soit par prospection sur internet, en assistant à des rassemblements (PARASOL) ou en lisant le journal. Avant tout, il faut que les acteurs du groupe acceptent les nouveaux venus, et ce n’est pas chose facile de tomber d’accord sur un sujet si délicat. Doit-on accepter tout le monde ? Qu’est-ce qui pourrait aller à l’encontre des valeurs du groupe établies dans la charte ? Si certains acceptent que des individus exercent leur profession sur leur lieu d’habitation, la séparation du travail/domicile est primordiale pour d’autres, une assistante sociale pose donc la question de savoir si une famille d’accueil serait une idée raisonnable dans le voisinage. La question est légitime et porte débat, là est le but des réunions de voisins, les arguments de certains peuvent changer la pensée d’autres n’ayant pas envisagé le problème sous cet angle et un compromis peut être trouvé. De l’habitat participatif au financement participatif, il n’y a qu’un pas : Le financement participatif ou Crowdfunding que 61


l’on pourrait traduire par le financement par la foule, est une autre façon pour les entreprises, les particuliers de récolter des fonds pour leur projets. Dans la plupart des cas, c’est l’association d’un grand nombre de personnes investissant un petit montant qui permettent aux porteurs de projets de trouver les fonds demandés. Ce mode de financement est également un moyen de fédérer le plus grand nombre de personnes autour de son projet. Les fonds apportés peuvent être alloués sous 4 formes différentes : - Le don : Une personne physique ou morale (une entreprise) donne une somme sans rien attendre en retour c’est un don, généralement cette catégorie de financement est propre aux actes associatifs ainsi qu’aux projets personnels. - La récompense :Une personne physique ou morale (une entreprise) donne une somme en échange d’une récompense. Le porteur de projet a deux façons de présenter les récompenses, il peut recourir au préachat, c’est à dire qu’il faudra qu’un certain nombre de personnes achète le produit ou le service pour que ces derniers soient créés. - Le prêt : Une personne physique prête une somme afin de financer un projet. La somme prêtée doit être rendue avec ou sans intérêts, c’est au porteur de projet d’en décider. - L’equity : Une personne physique ou morale (une entreprise) accepte d’investir dans un projet à condition d’acquérir des parts dans l’entreprise financée

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directement ou indirectement. - goodmorningcrowdfunding.comL’investissement dans le logement est en déclin, dû notamment à un manque de confiance des investisseurs. Dans le cas du financement participatif, les particuliers donnent leur argent à des « promoteurs » immobiliers qui leur assurent le partage des bénéfices. François Payelle, président de la Fédération des promoteurs immobiliers, se réjouit de cette nouvelle solution : « On entend partout que le marché est inondé de liquidités et pourtant nous avons de plus en plus de mal à trouver des financements. Le crowdfunding est un moyen innovant d’y faire face ». Parmi ces plates-formes de crowdfunding les plus connus restent : Kickstarter, Ulule, KissKissBankBank, MymajorCompany... Les plates-formes de dons sont les plus nombreuses, or le secteur de l’immobilier lui repose plus sur la récompense et permet aux donateurs potentiels d’obtenir des « goodies » ou d’apparaître dans le projet d’habitat en cours d’élaboration. D’autres financements par micro-prêts existent auprès des Banques Éthiques et Alternatives telles que la NEF (la Société financière de la Nef est une coopérative de finances solidaires) faisant partie de la FEBEA (Fédération Européenne de Finances et Banques Éthiques et Alternatives). FEBEA est la Fédération Européenne de Finances et Banques Éthiques et Alternatives, association internationale sans but lucratif de droit belge, créée à Bruxelles en 2001 par le Crédit Coopératif (France), la Caisse Solidaire du Nord Pas-de-Calais (France), Crédal (Belgique), Hefboom (Belgique), 63


la Banca Etica (Italie) et la TISE (Pologne). Développer la finance éthique et solidaire en Europe de manière concrète Au 30 juin 2009, la FEBEA compte 25 membres issus de 11 pays de l’Union Européenne et 2 pays de la zone de libre-échange européen. Ces 11 banques, 6 banques coopératives et coopératives d’épargne et de crédit, 5 sociétés d’investissement et 3 fondations totalisent ensemble 21 milliards d’euros de total de bilan et environ 528 000 clients et sociétaires. Ils sont très diverses par leurs formes juridiques mais partagent tous le même souci de transparence et d’utilité sociale et environnementale. Au-delà d’être un lieu d’échanges et de partage d’expériences, le but de la FEBEA est de créer des instruments financiers capables de soutenir les initiatives existantes en Europe et favoriser le développement de nouvelles initiatives en matière de finance alternative. Créer ensemble des outils financiers solidaires. A ce jour, la FEBEA a créé trois outils gérés par ses membres: ––le Fonds de Garantie Mutuelle “Garantie Solidaire”, géré par le Crédit Coopératif (France) ––“Choix solidaire”, Sicav gérée par la société de gestion du Crédit Coopératif (France) ––la société d’investissement “Sefea” (Société européenne de Finance Éthique et Alternative), gérée par la

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Banca Popolare Etica (Italie) - fineurosol.org La Fondation de France accorde elle-aussi des subventions aux projets les plus novateurs. Le projet Ecocum à Loperhet à lui reçu le mardi 22 mai 2012, le Laurier départemental du Finistère par la Fondation de France. Ce prix récompense leur initiative novatrice et exemplaire initiée 7 ans auparavant. La fondation agit ainsi dans les domaines de l’intérêt général : solidarité, enfance, santé, recherche médicale, culture, environnement. Reconnue d’utilité publique, cette organisation privée et indépendante ne reçoit aucune subvention publique et ne peut distribuer ses prix, bourses et subventions que grâce à la générosité de ses donateurs (128 millions d’euros en 2013).

b) La presse, frein ou alliée ? Dans un contexte économique difficile, il est souvent à prévoir dans le déroulement des projets participatifs un manque de supports financiers de la part des élus et des banques. Plusieurs projets, comme celui des Voisins Volontaires de Saint-Nolff, se retrouvent coincés au moment où ils ont le plus besoin de subventions ou prêts afin de lancer les travaux et obtenir l’aval des banques. Lorsque la municipalité, comme à Loperhet, le permet, l’accession au terrain et la quête de partenaires se voit facilité. Cependant, un dernier recours, et non des moindres, est envisageable : la presse. Profiter du réseau et de l’impact des images et des mots sur les gens par le biais des médias permet, dans une certaine mesure, de désenclaver la situation. Sur l’exemple de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes (ici utilisée comme Zone à Défendre : projet d’occupation du site par des citoyens engagés contre la construction de l’aéroport depuis quelques années déjà) les Voisins Volontaires ont lors de la 65


réunion à laquelle j’ai pu participer, envisagé de faire un PAD (Projet à Défendre) sur le site choisi pour la construction du projet. Afin de faire connaître leur histoire et pousser les élus à ouvrir les yeux sur leurs problèmes, ils ont eu pour idée de contacter la presse et demander le soutien des habitants ou personnes intéressés par le mouvement. En effet, un projet d’habitat participatif peut par sa mobilisation dynamiser la région en faisant parler de lui. Montrer au public un projet novateur dans le milieu de l’immobilier inciterait les personnes en recherche de logement à s’installer et consommer dans la région. Cette perspective de dynamique rurale ou urbaine est, pour certaines municipalités réfractaires au mouvement écologique, parfois difficile à envisager et plus encore à assimiler. La presse représente un moyen direct d’influencer le public, et peut jouer en la faveur de projets novateurs. Cependant, il a été observé que le mouvement d’habitat participatif a peu à peu été stigmatisé. Désormais, dans l’esprit d’une grande partie des gens, l’idée de vivre en communautés autonomes est souvent assimilée à un désir d’autarcie et de rejet de la société. Cette incompréhension provoque parfois moqueries et raccourcis faciles, où les cohabitants sont assimilés à des écologistes endurcis, refusant tout apport technique et technologique et désireux de revenir à un mode de vie ancestral. La presse et les médias en général, peuvent jouer un rôle très important dans l’image donnée d’un groupe-projet. Chez Ecocum par exemple, les habitants ont appris au fil des interviews à prendre le temps de jauger leurs intermédiaires, s’étant rendus compte que leurs entretiens avaient pu parfois être détournés et raillés par recomposition du discours initialement proposé. Ils ont appris, en écoutant des émissions radio auxquelles ils avaient participé, que leur projet était incompris par les présentateurs et donc pris avec dérision. Une stratégie a été mise en place au sein du groupe : les personnes les 66


plus à l’aise face à un auditoire sont désormais regroupées dans la commission « communication » et ont pour rôle de répondre négativement, souvent avec humour et habileté, aux médias indésirables, ou assister aux entretiens lorsque ceux-ci sont jugés aptes à donner une image authentique du projet. Car comme l’a si bien dit Gandhi : « D’abord ils vous ignorent, ensuite ils vous raillent, ensuite ils vous combattent et enfin, vous gagnez. ». - Gandhi -

c) La place de l’architecte au sein du groupe Le recours à un architecte dans l’accompagnement d’un projet d’habitat participatif est bénéfique pour les deux parties. Face à un groupe désireux d’apprendre et de s’investir dans la « confection » de son futur lieu de vie, l’architecte joue le rôle de porteur d’idée et de catalyseur d’envie. S’il est difficile pour bien des gens de sublimer leurs idées par la représentation, l’architecte saura écouter et proposer des solutions et esquisses correspondant aux recherches qu’ont fait les voisins de leur côté. Bibliothèques, médiathèques, chantiers participatifs, rassemblements et conférences... Tant de lieux qu’ont parcourus les futurs cohabitants avant de se lancer dans l’aventure participative. L’architecte, lorsqu’il accepte de s’investir dans un projet tel, le fait en connaissance de cause : il devra gérer un groupe, aux caractères bien trempés et décidé à arriver à ses fins. Et ce n’est pas toujours évident. Voisins comme architecte, l’échange est encore une fois substantiel. Le mélange de catégories sociaux-professionnelles apporte au groupe différentes compétences techniques ou théoriques. Pour cela, l’architecte devra faire preuve d’écoute et d’investissement afin de ne pas diriger le projet comme bon lui semble, car le groupe ne le laissera sûrement pas concevoir leurs 67


logements comme il se l’imagine... Cependant, plusieurs des projets que j’ai pu suivre m’ont appris que ce « ping pong » d’idées (pouvant durer jusqu’à cinq ans!) est bien souvent bénéfique : il en sort de terre un projet digne d’être analysé et décrypté, ou chaque élément est une réponse à une question soulevée durant une réunion, ou par un des voisins dans la sphère privée. L’architecte devra donc faire preuve de souplesse et d’ouverture d’esprit (car ces projets appliquent des notions peu couramment abordées dans une carrière d’architecte) et de rigueur, voir même de fermeté, afin de ne pas se faire écraser par le groupe. Dans tous les cas, il en ressort un projet enrichissant, et il me semble, tout aussi marquant pour les habitants... Que pour l’architecte.

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CONCLUSION L’idée que nous nous faisons principalement des communautés alternatives est basée sur des projets particulièrement utopiques. Bien loin du cadre légal et des montages juridiques complexes des écohameaux que j’ai pu visiter, il existent des projets forts, pouvant à la fois déranger les plus citadins d’entre nous, et faire rêver ceux ayant des envies de retour à des valeurs plus saines. Loin du consumérisme des supermarchés, de la culture de l’hyper-mobilité, certains assument de ralentir le temps et en profiter en construisant leur lieu de vie en toute autonomie. Des projets aux valeurs fondamentalement spirituelles tel que La Borie Noble dans le Larzac (communauté vivant sous les préceptes de Gandhi, entre partage et amour de la nature), à ceux tels que le village de Marinaleda en Espagne revisitant le rôle du citoyen par le biais de la démocratie participative et projets étudiants forts d’un esprit militant et social tels que La Baraque à Louvain-la-Neuve, les idées ne manquent pas... Ce mémoire n’est qu’un aperçu de l’étendue des alternatives possibles. J’ai rencontré bien des gens, de tous les âges, exténués par notre mode de vie, en quête d’un quotidien plus stable, dont ils en retiraient une plus grande satisfaction. Cependant, cette quête et longue, et semée d’embûches. Nous pouvons décider d’adhérer à des mouvement tels que les Colibris, ou le Projet Tera, qui diffusent à l’échelle du pays leurs valeurs et s’enrichissent des rencontres publiques, ou bien encore monter de toute part notre projet d’habitat groupé. Pour les plus aventureux d’entre nous même il est envisageable de sortir du cadre légal et décider de s’enfoncer au fin fond de la nature, cultiver la terre et construire sa maison bioclimatique. Tant d’utopies nourris69


sant mon esprit d’architecte en devenir. Car, si le cadre juridique est souvent omniprésent dans notre métier, rencontrer des groupes motivés et débordants d’idées m’a donné bien des idées. Peut-être devrait-on constituer un « cabinet d’autonomie », où l’architecte et l’usager travailleraient en équipe sur un pied d’égalité et mettraient tout deux la main à la pâte... Car, n’est-ce pas là l’idée première du « Bottom up » ?

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REMERCIEMENTS Avant tout, je tiens à remercier les groupes-projets que j’ai pu rencontrer ce semestre. Ils m’ont ouvert leur porte, laissé prendre des photos, invité à manger, se sont lancés dans des débats passionnants autour d’une table et m’ont intégré très rapidement à leurs discussions. Je comprends bien qu’il est parfois délicat de parler de sa vie privé (car oui, les voisins abordent leurs valeurs de manière subjective) devant une inconnue. De plus, j’aimerais dire un grand merci à Olivier Cencetti de l’association l’Echo-Habitants, m’ayant fourni de nombreuses références, mémoire, thèses, ouvrages, textes de lois commentés... Autant d’ouvrages indispensables et introuvables sur internet ou à la bibliothèque de l’ENSAB ;les écrits de Camille Devaux, une de ses anciennes stagiaires, m’ont d’ailleurs beaucoup inspiré dans mes démarches. Merci à mon directeur de mémoire, Ewan Sonnic, que je n’ai vu que peu, mais qui m’a bien orienté dans mon travail et a su éclaircir ma pensée au moment où j’étais la plus perdue. Entre techniques d’entretiens et recherches concrètes, ses conseils ont su canaliser mes débordements une fois l’ensemble des informations réunies. Bien entendu un mémoire ne serait pas achevé sans ses correcteurs. Merci à Alice, Annabelle et Ronan, qui, parfois exaspérés je pense par mes erreurs d’inattention, on su aller jusqu’au bout de la relecture. Enfin, merci à Maxime, pour le support moral, et la mise en page. Ton perfectionnisme ne fut pas de trop. En espérant enfin que la lecture fut agréable et que son contenu vous a donné envie de vous intéresser à des modes de vie alternatifs. En attendant, je ne vous souhaite que de

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parvenir à un quotidien sain et riche en satisfaction. Allez : action !

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BIBLIOGRAPHIE Ouvrages et articles

––L’Enquête et ses méthodes : le questionnaire, collection 128, éditions Nathan, Édition A. Colin, 2012 (troisième édition refondue), Paris, 1992 ––Bâtiments et aménagement durable : Bien-être, vie urbaine et écoquartier, Jean Heltzel ––Restauration de la ville de Bologne, Huet ––Accélération, une critique sociale du temps, Hartmut Rosa ––Vers la sobriété heureuse, Pierre Rabhi ––(R)Evolution, pour une politique en acte(s), Lionel Astruc ––La prospérité sans croissance, Tim Jackson ––The Transition Handbook : From Oil Dependency to Local Resilience, Rob Hopkins, Chelsea Green Publishing,‎ 2008, 320 p. (ISBN 978-1603583923), ––The Transition Companion : Making Your Community More Resilient in Uncertain Times, Rob Hopkins, Chelsea Green Publishing,‎ 2011, 240 p ––The Power of Just Doing Stuff : How Local Action Can Change the World, Rob Hopkins, Green Books,‎ 2013, 160 p ––Sainte-Marguerite de l’Utopie, Valérie Borde, COUR-

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RIER INTERNATIONAL, (2007, 1er-7 février)n°848 ––Permaculture. Principes et pistes d’action pour un mode de vie soutenable, David Holmgren, éd. Rue de l’Echiquier, ––Vivre ensemble autrement, Pascale d’Erm et Patrick Lazic, éditions ULMER, Paris, 2009 ––Autopromotion, Habitat groupé, écologie et liens sociaux, Bruno Parasote, éditions Yves Michel, Gap, février 2011 ––Architecture sans architectes, Bernard Rudofsky, éditions Du Chêne, octobre 1977 ––Pour une autopromotion en France, selon l’exemple allemand des Baugemeinschaften, essai de guide pratique , Alain Meyer, Mémoire de formation AM, septembre 2007 ––Le livre blanc de l’habitat participatif, Anne-Laure Euvrard, Eco-Quartier Strasbourg, 2011 ––Propriété partagée : un toit pour tous, ensemble, Adrien Pouthier avec AFP, Le Moniteur, 16 octobre 2008 ––L’habitat participatif : conditions pour un développement, Mémoire de Master 2 « Urbanisme et aménagemen », Camille Devaux, Paris, 2010 ––Guide de l’habitat participatif et coopératif, Camille Devaux, www.hlm.coop ––Petit cahier d’exercices de Communication Non Vio-

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lente, Van Stappen, edition jouvence, 2010, 64 p. Reportages/Conférences:

––L’urgence de ralentir, P. Borel, ARTE ––Loperhet , Ecocum ––Projet Tera, Environnement Durable–Construction maisons écologiques, Frédéric Bosqué, ––Pierre-Yves Jan présente l’habitat participatif, Kaizen magazine, 28 janvier 2014 ––L’habitat « ensemble et autrement », Fondation de France, Novembre 2012 ––La Démocratie fatiguée : Quelles solutions ?, Etienne Chouard / David Van Reybrouck, associations constituante.be et Grappe, 18 avril 2014. Sites internet :

––http://www.habitatparticipatif.net ––http://www.voisinsvolontaires.free.fr/ ––http://www.lesvoisinsterrepelle.fr/ ––http://www.habitatparticipatif-ouest.net/ ––http://www.habicoop.fr/ ––http://www.tera.coop ––http://www.hlm.coop/ ––http://www.village-vertical.org/

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Terminologie du vivre ensemble : ––Anticipation ––Architecte ––Architecture ––Autoconstruction ––Autogestion ––Autonomie ––Autonomie ––Autopromotion ––Bonheur ––Cohabitat ––Concessions ––Conjoncture ––Conseil ––Crise ––Démocratie participative ––Dynamique de coopération ––Écoute ––Financement participatif ––Habitat intermédiaire (mi-immeuble, mi-maison) 76


––Habitat autonome ––Habitat groupé ––Habitat mutualisé ––Habitat partagé ––Habitat solidaire ––Écoconstruction ––Écologie ––Économie ––Écovillage ––Éducation ––Liens sociaux ––Lobbying ––Organisation ––Partage ––Participation collective ––Sensibilisation ––Société immobilière ––Solidarité ––Suivi ––Valeurs communes... 77


Annexe 1 : Plan de masse esquissé par SoléCité + perspectives de projets

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Annexe 2 : Photos de projet et de maison et panneau d’entrée sur le site

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Annexe 3 : Prêter sa chambre d’amis ou son toboggan : la nouvelle tendance de l’habitat groupé – Nord Eclair

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Annexe 4 : Charte des Voisins Volontaires à Saint-Nolff

“VALEURS COMMUNES En définissant les valeurs communes dans ce chapitre, nous voulons poser la base sur laquelle l’habitat groupé des Voisins Volontaires est construit, et garantir ainsi la cohésion du groupe et la place de chacun quel que soit son âge et sa condition. L’habitat groupé est une démarche participative. L’habitat groupé s’inscrit sur des valeurs de laïcité, d’écologie, de partage, de vivre ensemble intergénérationnel. Nous croyons au primat de l’humain sur l’économique, à l’effort pour nous développer dans un meilleur rapport à notre environnement, et à la valeur modestement exemplaire de notre entreprise. Nous croyons à la richesse de nos différences, et à la valeur de leur accueil. Nous souhaitons pouvoir effectuer un maximum de choix individuels tout en restant dans une dynamique de mutualisation, de partage, et de projets communs. Chacun reste libre, selon ses goûts et disponibilités, du degré de son implication dans la vie du groupe, tant que son comportement global reste en accord avec les valeurs communes… Ecologie Soucieux de l’environnement , le groupe tend 83


à adopter un mode de vie, de consommation et d’agir de façon écologiquement responsable. La réduction de notre empreinte écologique passe par construction: -bâtiments tendant vers le passif, impliquant donc une très faible consommation d’énergie - utilisation de matériaux les plus sains et locaux possible - utilisation d’énergies renouvelables Notre comportement quotidien : - mise en commun de matériel, d’espaces - réutilisation/récupération de matériel - faible consommation Partage et Entraide Chacun des membres du groupe est responsable du patrimoine commun et des intérêts de la collectivité. Il s’engage à prendre part aux tâches concernant l’organisation, l’entretien et l’aménagement des parties communes. Respect des personnes ––Bienveillance ––Respect de la liberté de chacun ––Respect de l’intimité ––Respect des opinions de chacun 84


––Respect des choix de vie Social Ouverture du groupe au plus grand nombre : tout le monde doit pouvoir être accueilli quel que soit son âge en respectant l’équilibre intergénérationnel, ses revenus, sa situation familiale. Ouverture Ouvrir le groupe sur l’extérieur, accueil Accueillir nos différences comme une richesse Partage de l’information – Mémoire Commune Mise à la disposition de tous pour consultations, les différents compte-rendus et autres faits, sur un espace commun interne et sur support papier. MODALITES DE REVISION En définissant des modalités de révision de la Charte, nous nous autorisons à modifier la Charte sur le constat que le groupe a évolué, que des parties de la Charte sont dépassées au vu de ce qui se vit au présent. Une fois par an, nous relirons la Charte afin de nous la ré-approprier. Nous nous interrogerons pour savoir si nos pratiques sont en cohérence avec la Charte que nous avons définie et à laquelle nous avons adhéré. Un ou plusieurs membres du groupe peuvent pro-

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poser une révision de la Charte. La révision devra porter à discussion. Elle fera l’objet d’une réflexion commune. L’adoption de la version modifiée sera validée par consensus. RESOLUTION DES PROBLEMES ET CONFLITS En définissant les modalités de résolutions des problèmes et conflits, le groupe veut pouvoir garantir sa cohésion. Quand un problème ou un conflit est constaté, le groupe s’engage à le traiter de façon non violente. Pour résoudre au mieux les conflits, chacun s’engage à formuler avec des mots les problèmes rencontrés. De même, lorsque deux ou trois personnes sont en conflit, sans que pour autant cela concerne directement le groupe, il est de leur responsabilité de traiter ce conflit afin de ne pas créer un climat préjudiciable à l’ensemble.”

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Annexe 5 : Charte des Voisins Terre Pelle à LaRoche-Sur-Yon

Charte pour un projet d’habitat groupé écologique : Les Voisins Terre Pelle pour « Une nouvelle manière de vivre ensemble » “Nous sommes réuni­ e­ s par une même envie de créer un type d'habitat plus respectueux de l'environnement et de tendre vers une nouvelle manière de vivre ensemble. Le groupe s'engage dans une démarche d'autopromotion où les futurs habitants sont collectivement décisionnaires de la totalité du processus d'aménagement et de construction. Notre projet, basé sur une citoyenneté plus respectueuse et responsable, aspire à favoriser le partage des richesses humaines et matérielles dans une volonté d'ouverture et d'échange. Une vie sociale conviviale et solidaire Chaque foyer disposera de son habitat privé dans le respect de l’intimité de chacun. Des biens et des espaces définis d’intérêt collectif par le groupe seront mutualisés : verger, potager, salle commune, chambre d’amis, bibliothèque, salle de jeux pour enfants, buanderie, atelier de bricolage … Afin d’avoir un fonctionnement démocratique, nous prenons autant que faire se peut les décisions au consensus. L’écoute mutuelle, la communication bienveillante et des réunions de régulation doivent permettre des relations humaines apaisées nourries

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de confiance, de partage et d’échange. Le groupe aspire à une mixité sociale et générationnelle, ce qui induit un voisinage actif, solidaire etresponsable. Nous souhaitons aussi permettre aux enfants de prendre des initiatives dans la gestion de la vie quotidienne. Notre projet se veut ouvert sur le quartier. Par exemple, l’aménagement paysager peut inclure des zones semi­ publiques. Nous envisageons aussi de créer avec les habitant­ e­ s du quartier et les sympathisant­ e­ s des moments d’échanges et des ateliers divers, et de favoriser l’enrichissement et l’épanouissement personnel. Un projet respectueux de l’environnement Nous souhaitons limiter notre emprise au sol en densifiant les constructions (maisons mitoyennes) et en réduisant la voirie (parking en bordure du hameau) sur notre terrain afin de laisser place au maximum à l'écosystème existant. De plus, notre proximité de la ville et des services doit limiter les déplacements périurbains et favoriser les transports doux et/ou en commun. Notre habitat sera économe en énergie grâce à une conception bioclimatique. Nous donnerons la priorité aux matériaux locaux et aux énergies renouvelables tout en nous attachant à une harmonie entre les bâtis et l’environnement. Enfin, nous cultiverons ensemble un jardin­potager et un verger afin de tendre vers une autonomie alimentaire et de renouer des liens privilégiés avec la

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nature et la terre. Une économie coopérative Construire ensemble nous permettra de réduire les coûts de constructions et d’améliorer les prestations bâties. De plus la mutualisation des biens et des espaces communs offrira davantage de services pour un même budget. Dans un souci de transparence, les budgets personnels (dédiés à l’espace privatif de chaque foyer) et communs (dédiés aux parties et matériels communs) seront dissociés. Enfin, le protocole de sortie devra permettre à chacun­e de retrouver son capital financier tout en évitant la spéculation immobilière.”

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Annexe 6 : Eco-habitats : un chantier participatif à Ecocum – Ouest France

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Annexe 7 : Exemple de règlement intérieur d’un habitat participatif (Habitat Différent, opération en partenariat avec le Toit Angevin)

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