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l ’ humeur d ’ antoine : la lanterne magique

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La lanterne

mAgique

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Par antoine bertram

La classification des arts majeurs est la suivante : l’architecture, la sculpture, les arts visuels (peinture et dessin), la musique, la littérature et les arts de la scène. Ils permettent l’expression, parfois ils sont le souvenir fixant la peau d’une époque. Au début du 20ème siècle, ‘‘ les frères Lumière imaginent un procédé qui permet d’enregistrer photographiquement et de projeter des vues animées : le cinéma, nouvel art majeur, lanterne magique.

Georges Méliès est un cinéaste du début du 20ème siècle, cet homme a inventé quasiment tous les effets spéciaux. Il a produit des films fantastiques n’appartenant pas au domaine du conte ou de la représentation d’un réel : il a mis en image ses rêves. Cet homme s’est servit du cinéma avec l’ambition de filmer des rêves poétiques, en y parvenant dès 1900. Aujourd’hui les possibilités du cinéma sont infinies, il peut représenter sous n’importe quel angle absolument tout ce que l’esprit peut imaginer. Le réalisateur n’a qu’une limite : celle de son esprit. Peu importe le sujet de sa chimère, s’il est assez doué et opiniâtre pour traduire sa vision alors nous verrons son fantasme au cinéma.

La salle est plongée dans le noir, un son de cor et de trompettes retentit alors qu’à l’écran apparaît une femme tenant dans sa main un flambeau, puis le plan s’élargit, il laisse place au nom du studio de production dans un éclat de musique céleste et de lumière éclairant le ciel. Un frisson parcourt les allées, dans les fauteuils les muscles se contractent, le silence est immédiat, l’attention est rivée vers cet écran car il promet un monde de désirs, de passions, d’aventures, un monde où par procuration nous allons vivre la destinée des héros et partager leurs émotions. Le cinéma n’est pas seulement le 7ème art, il réunit à lui seul tous les autres, les faisant converger dans un creuset où respectivement ils atteignent une perfection. Ce n’est pas une technique de divertissement, c’est le moyen absolu de propagande pour éclairer ou perturber l’esprit humain. Regardez-les, adultes et enfants mélangés, souffles coupés face à l’écran où est projeté le destin d’un héros, par exemple celui d’une femme. Le mouvement, le son et l’image permettent d’atteindre un paroxysme narratif, un langage universel. Le plan est une sculpture vivante, une peinture féerique, une construction géométrique d’images où chaque son, chaque détail souligne et sert d’écrin au propos : ici le destin de cette héroïne parvenue à son dénouement, attendant l’ultime révélation. Le spectateur et le temps sont suspendus, pure magie, pure manipulation.

Qui n’est jamais sorti transformé par une projection ? Une fois j’ai vu un homme sans morale sortir en pleurant d’une séance, une autre fois j’ai vu la personnalité de mon père changer pour toujours grâce à un film, ceci parce que des réalisateurs ont réussit à capter leur attention et a imprimer dans leur cœur un message, révélant à ces hommes une part d’eux-mêmes qu’ils ignoraient. Car c’est le regard que l’on porte sur les choses qui les fait exister d’une manière ou d’une autre, et ce regard peut changer.

Imaginez. Voyez cette belle femme brune sculpturale dans sa robe rouge, elle est dans le désert, elle a parcouru beaucoup d’épreuves pour en arriver là, elle a souffert jusqu’à ce point précis, elle attend quelque chose, on voit de près son visage, on lit dans ses yeux une fureur contrainte, de la fatigue, on entend une mélodie discrète, un son minéral, un bruissement,

Un frisson parcourt les allées, dans les fauteuils les muscles se contractent, le silence est immédiat, l’attention est rivée vers cet écran car il promet un monde de désirs, de passions, d’aventures (…).

d’ailleurs on voit le désert autour d’elle, sa robe ondulant sous la brise dans une aurore orangée et pâle, elle tient dans sa main ses chaussures, ses chaussures de la veille, elle est à bout, dans l’urgence, isolée et triste, plongée malgré elle dans ce décor de poussière, sur son visage filmé en gros plan coulent des larmes, la musique monte, elle se retourne subitement pour nous faire face… déclic... fin.

Il y a trop de beauté dans le monde et cela nous frustre de ne pas la posséder toute, comme cela nous frustre de ne pas maîtriser nos rêves, alors pour un temps dans cette salle, voici la femme en robe rouge au milieu du désert, elle se retourne pour vous faire face… un sourire plein de joie s’affiche sur son visage, ses yeux s’illuminent, elle se sait sauvée, elle s’exclame, la musique explose… et vous accroché à votre fauteuil, à cet instant vous ne voyez plus un film, vous n’avez plus de vie ni d’identité, votre esprit communie entièrement avec le sien dans ce sentiment de libération et de bonheur, et vous pleurez.

L’un des premiers films des frères Lumière s’appelle « L’Arrivée d’un train en gare de La Ciotat », comme son nom l’indique c’est un plan montrant un train entrant en gare. Lors de ses premières diffusions en 1896, les gens sortaient de la salle en hurlant, persuadés qu’un train leur fonçait dessus. Quelque part en nous vivent ces œuvres cinématographiques, elles orientent notre morale tout comme nos sentiments, créant des idéaux glorieux rachetant notre lâcheté, et ces principes que nous croyons avoir choisis nous-même sont en fait ceux d’un rêve intentionnel créé par un réalisateur et un scénariste, un rêve où la félicité est symbolisée par un sourire baigné de larmes. ‘‘

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