L'imprimé textile wax comme support de communication graphique en Afrique de l'Ouest

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L'IMPRIMÉ TEXTILE WAX COMME SUPPORT DE COMMUNICATION GRAPHIQUE EN AFRIQUE DE L'OUEST ÉMERGENCE D’UNE IDENTITÉ VISUELLE ET GRAPHIQUE AFRICAINE

GÉRALDINE AHOYO



L'imprimé textile wax comme support de communication graphique en Afrique de l'Ouest. Émergence d'une identité visuelle et graphique africaine

Géraldine Ahoyo Promoteur : Jean Marc Vanoevelen Année 2019 - 2020

Communication Visuelle & Graphique Mémoire de Master 2 Spécialisé École Supérieure des Arts - Arts2



Remerciements Avant tout, je souhaite remercier mon promoteur de mémoire, Jean Marc Vanoevelen, pour le temps qu’il a consacré à corriger mes nombreuses fautes et erreurs, pour m’avoir fait découvrir mon sujet de mémoire, pour sa patience, sa disponibilité et surtout ses judicieux conseils, qui ont contribué à alimenter ma réflexion. Ensuite, un grand merci à Claire Kuneben, Sarah Mouchrif et Aude-Marine Makowski pour leurs conseils et corrections, elles ont grandement facilité mon travail. Puis, je tiens aussi à remercier tout particulièrement notre professeur Alexandre DeCraim, qui était là pour me motiver lors du début de la rédaction de ce mémoire et qui a toujours été très réactif à mes nombreux mails. Ensuite, j’aimerai sincèrement remercier Matteo Helleux de m’avoir constamment motivé lors de la rédaction de ce mémoire. Je voudrais également témoigner toute ma sincère gratitude à Clément Servais, mes frères Bruno et Joël et ma petite soeur Gina ainsi qu’à Gwendoline Rouchy et Laura Lombardo pour m’avoir supportée et encouragée durant toute la rédaction de ce mémoire. Enfin, un grand merci à ma mère, pour son amour, ses conseils ainsi que son soutien inconditionnel, à la fois moral et économique, qui m’a permis de réaliser les études que je voulais et par conséquent ce mémoire.



Table des matières Introduction 11 Partie I : Qu’est-ce que l’imprimé wax ?

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Étymologie 13 Le Fancy wax

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Le blocking wax

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Techniques de production d’un wax

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Partie II : Les premiers wax en Afrique Occidentale

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Ebenezer Brown Fleming

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Première injection : les symboles Adinkra

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S’adapter à sa clientèle

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Partie III : Analyses d’imprimés wax emblématiques

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Le wax comme miroir social

20

Les différentes thématiques

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Les wax d’Ebenezer Brown Fleming

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Les différents aspects de la vie d’une femme

63

Statut social

91

La représentation de la religion

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Vue sur la société africaine

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Le wax comme instrument politique

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Actualité et people

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L’imprimé wax comme support d’expérimentation

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Partie IV : Le wax aujourd’hui 255 Évolution du wax de ses débuts à nos jours

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Lieu d’expérimentation graphique

256

L’imprimé wax dans l’art contemporain

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Barthélémy Toguo

259

Kehinde Wiley

267


Yinka Shonibare

273

Conclusion 279 Annexes 283 Bibliographie 291 Index des noms de tissus

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Introduction L’imprimé textile wax est un tissu connu de tous. Mais, vous êtesvous déjà demandés : « d’où venaient les motifs qu’il arbore ? » et surtout : « est-ce que ces motifs ont un sens ? » Ce mémoire a l’ambition de vous présenter ce magnifique tissu chargé d’histoire qu’est le wax. Le « pagne wax » comme l’appellent les différentes populations africaines est, à ses débuts, un tissu qui a traversé plusieurs continents avant d’arriver en Afrique. Il est, autant un outil de communication qu’un miroir social qui décrit le vécu des différentes populations qui l’ont adopté. C’est un tissu que je vois, depuis mon enfance dans de nombreux cercles sociaux et qui est rythmé par la couleur et les symboles. Sa présence familière dans mon paysage visuel a amené cette question : « Si il est autant présent dans l’iconographie africaine, c’est qu'il doit bien avoir un sens ! ». De cette question découleront des mois de recherche et la naissance de plusieurs sous-questions avec comme point central cette réflexion : « est-ce que ces motifs ne seraient, justement, pas un objet de communication visuelle et graphique à part entière ? » Je vous donne un indice : la réponse est « peut-être » ! Tout au long de ce mémoire, nous allons décortiquer les différents axes de construction visuelle des wax les plus connus et voir si cette hypothèse se vérifie. Mais pour commencer, nous allons tout d'abord baliser l’histoire de l’imprimé wax pour le situer dans un contexte. Puis, nous allons procéder à l’analyse graphique et sémantique des wax les plus populaires. Et enfin, nous allons observer l'impact qu'il a eu dans le milieu artistique contemporain. Nous verrons donc tout au long de ce document, l'impact que ce tissu imprimé a eu sur la construction de l'image graphique de l'Afrique de l'Ouest ainsi que son importance dans l’image globale que l'Occident a du continent africain.

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Partie I QU’EST-CE QUE L'IMPRIMÉ WAX ? L'imprimé wax ou pagne wax est un tissu imprimé, souvent en coton, de forme rectangulaire et mesurant environ 122 cm sur 190 cm. Souvent porté autour de la taille, il est devenu, au cours des siècles, le tissu le plus vendu en Afrique de l’Ouest. Généralement coloré, il existe également en bichromie (indigo et blanc). C’est un tissu orné de motifs colorés faisant référence à des moments de la vie culturelle africaine. Version industrialisée du batik javanais1, il est généralement fabriqué aux Pays-Bas, en Angleterre ou plus récemment en Chine. Il est appelé « wax » car c’est de la cire (wax en anglais) hydrophobe qui est utilisée pour recouvrir les endroits sur lequel la peinture ne doit pas se poser. Les motifs imprimés sont, à l’origine, crées par des Européens se basant sur des récits de missionnaires qui ont voyagé en Afrique. Par la suite, ce sont des artistes locaux qui les conçoivent.

ÉTYMOLOGIE 1. Batik javanais : terme indonésien désignant une étoffe en coton aux motifs tracés en réserve à la cire chaude avant teinture. Contrairement à l'impression wax, l'illustration est réalisée sur les deux faces de l'étoffe. CNRTL,"Pagne", cnrtl, https ://cnrtl.fr/definition/pagne AFRIKHEPRI Fondation, « Origine et histoire du pagne », AFRIKHEPRI, https ://afrikhepri.org/origine - et-histoire - dupagne/ BLÉ Raoul Germain, « Le pagne : Un moyen de communication en Côte d’Ivoire », OpenEditions Journals, https ://doi.org/10.4000/communication.3026

Étymologiquement, le mot « pagne » vient de l'espagnol « pano » qui signifie : pan d’étoffe ou morceau de tissu. Le pagne wax est le plus souvent imprimé sur les deux faces afin de garder l’éclat des teintures. Disponible industriellement et existant dans une grande variété de couleurs et de dessins, il peut, selon son origine, être en coton, en raphia ou encore en matière végétale tressée. Il existe un autre type de wax, communément appelé « fancy » dont l’impression est faite en sérigraphie et sur une des faces du tissu uniquement.

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LE FANCY WAX Le terme « fancy », signifiant « fantaisie », renvoyait autrefois à les étoffes de grande qualité. Cependant avec le temps, son sens a changé et il fait maintenant référence aux imitations, moins onéreuses, qui permet aux classes moins aisées de le porter et d’adhérer au message qu’il véhicule. Les grossistes qui étudient le marché ont demandé à des entreprises locales de réaliser des copies des wax les plus vendus. Celles-ci, imprimées sur une seule face, sont très faciles à distinguer des véritables wax. Avec ces différentes techniques, plusieurs entreprises ont développé diverses gammes textiles dans le but de satisfaire une large clientèle. Les plus connus sont le « print » et le « blocking ». Le « print » est le wax qui n’a connu qu’une seule teinture. Par sa sobriété chromatique, il plait aux élites. En outre, le « print » indigo sur fond blanc est porté dans le peuple Akans du Ghana et de Côte d’Ivoire lors des levées funéraires et des actions de grâce.

LE BLOCKING WAX

GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », éditions La Martinière, Paris, 2017, p.64-65.

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Le « blocking », plus onéreux que le « print », est un  print sur lequel est apposé une couleur supplémentaire à l’aide d’un tampon. On peut utiliser plusieurs tampons, donc ajouter plusieurs couleurs. L’utilisation de tampons apportait une plus-value au produit fini car les ouvriers décalaient légèrement le motif à chaque apposition. Ces petites erreurs, signes d’un travail fait-main, étaient donc plutôt vues comme des gages de qualité.


TECHNIQUES DE PRODUCTION D'UN WAX Tout d’abord, les dessinateurs réalisent leurs motifs puis l’envoient à un bureau qui vérifie le fichier pour traquer les éventuelles erreurs. Le dessin, traité numériquement, est transféré sur un cylindre

GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », éditions La Martinière, Paris, 2017, p.254. BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.32-34. VLISCO, « Procédé d'impression à la cire », Vlisco, https ://www.vlisco.com/fr/lunivers-vlisco/artisanat/procede-dimpression/ LEBRETON Sophie, « La pratique du pagne en Côte d'Ivoire, une expression multiculturelle  », Cairn, https ://www.cairn.info/revue-africultures-2003-3page-155.htm?try_download=1, p.155-160. USEAM, « Épisode 2 de la Saga du Wax : Les secrets de fabrication », Useam https ://useam.blog/2018/08/15/wax-motifs/

d’impression en cuivre. Les cylindres sont plongés dans de la cire puis le motif est apposé à l’endroit et l’envers du tissu en coton. Ensuite, le tissu est plongé dans un bain de teinture indigo où les parties non traitées avec la cire prennent une couleur bleue. Puis, une machine agite le tissu dans des bacs. Le fait de l’agiter permet de retirer les morceaux de cire, révélant le tissu blanc. Il est ensuite séché et la première couleur est appliquée (sans pour autant ôter le reste de la cire). Une deuxième couleur est apposée sur le tissu sec débarrassé de la cire. Finalement, le tissu est lavé totalement pour retirer les excédents de couleur, et enfin séché de nouveau, avant d’être plié et emballé pour être vendu.

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Partie II : Les premiers wax en Afrique Occidentale EBENEZER BROWN FLEMING

VLISCO, « Brief History of wax resist printing- and the rise of african fabric », Vlisco, http ://digitalwaxprint.com/iterations/history-of-wax-resist-printing/ ELANDS Helen, « African Fashion : Dutch wax », International Excellence, https ://internationalexcellence.co.uk/luxury-magazine/travel/cars/lifestyle/africanfashion-dutch-wax GAYIBOR Nicoué, « Histoire des Togolais. Des origines aux années 1960 (Tome 4 : Le refus de l'ordre colonial) », Éditions Karthala, 2011, p.267.

Né en 1858 et mort en 1912, Ebenezer Brown Fleming est un revendeur écossais qui a travaillé pour la société HKM, Haarlemse Katoen Maatschappij ( Compagnie de Coton de Haarlem ), une des plus grandes usines de production textile des Pays-Bas qui confectionnait les meilleures imitations de batiks, aujourd’hui disparues. Il est l’un des premiers revendeurs à avoir eu l’idée d’exporter des cargaisons de batiks industriels hollandais. Il a joué un rôle important la conception des imprimés textiles wax. Après le succès de cette exportation sur le continent africain, la société HKM lui offre des droits commerciaux. Ces droits lui permettent d’explorer le marché du textile sur le continent et d’avoir à son service, un studio d’artistes pour créer ses propres dessins. Il a aussi adopté une approche pratique en visitant la région afin de trouver ce qui intéresserait ses potentiels futurs clients. Il est à l’origine de la création de plusieurs dizaines de motifs à la fin du 19e et durant la première décennie du 20e, beaucoup ont posé les bases de l’iconographie du wax telle nous la connaissons. Plusieurs motifs basés sur des illustrations issues de la culture indonésienne, ont été adoptés par les populations locales et sont devenus des incontournables. Après la première Guerre Mondiale, HKM ferme et ABC Wax, une entreprise textile originellement basée à Manchester, reprend les droits de nombreux designs de l’écossais.

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PREMIÈRE INJECTION DE LA CULTURE D’AFRIQUE OCCIDENTALE DANS LES PREMIERS WAX : LES SYMBOLES ADINKRA. Les designs wax les plus populaires au Ghana, sont ceux arborant des motifs Adinkra4. Ces motifs développés depuis des siècles par la population Akan sont basés sur leur système de croyances.

4. Les symboles Adinkra sont des idéogrammes conçus afin de représenter les différents aspects de leur culture.  5. SMITH Alex et AYAVORO Joseph, « Cross cultural textiles - linking Manchester to West Africa through textiles », Creative Hands Foundations Arts, https ://creativehandsfoundationarts.files. wordpress.com/2015/10/cross-cultural-textiles1.pdf, p.29.

Les Ashanti font partie d’une plus grande population appelée Akan dont la langue « Twi » est largement parlée au Ghana actuellement, ce qui pourrait être la raison de l’ampleur du succès des symboles Adinkra5. Le principe des imprimés Adinkra est de communiquer un message particulier par la répétition en blocs d’un ou deux mots sur le tissu. En portant le tissu orné d’un motif, on affiche publiquement un message sans pour autant le dire. Cela peut être à l’occasion d’évènements comme des funérailles ou d’évènements rituels où la majorité ne s’exprime pas, ce qui permet l’expression des sentiments par le choix de vêtements symboliques. On comprend alors que la transmission des messages au travers des objets ou des vêtements de tous les jours est quelque chose d’inhérent aux cultures africaines.

S’ADAPTER À SA CLIENTÈLE À la fin du XIXe siècle, un designer victorien, Christopher Dresser, a assumé le rôle de conseiller artistique pour de nombreuses entreprises d'impression de textile wax basées à Manchester. Il s'efforçait de comprendre son public et donc, avant de concevoir, il posait des questions, allait recueillir des échantillons de dessins indigènes, se renseigner sur les traditions et parler avec les marchands de tissus.6 6. SMITH Alex et AYAVORO Joseph, « Cross cultural textiles - linking Manchester to West Africa through textiles », Creative Hands Foundations Arts, https ://creativehandsfoundationarts.files. wordpress.com/2015/10/cross-cultural-textiles1. pdf, p.37.

Grâce à ces nombreuses recherches, il a réalisé des dessins à destination des populations locales afin de permettre à l’industrie de la vente de tissu de Manchester de connaître la tendance. Après le succès de l’entreprise de Dresser, de nombreuses entreprises européennes ont suivi le pas afin de trouver des motifs pouvant séduire 17


cette nouvelle clientèle. Beaucoup de motifs, devenus intemporels, sont basés sur la faune et la flore de la région. Parfois certains dessins de feuilles et de plumes pouvaient évoquer ceux que l’on pouvait retrouver dans le batik indonésien.

« KWADUSA », AVOSATO, «Shell, loincloth Ankara Print», Afrikae, https ://www.afrikrea.com/fr/article/1-80-m1-15-m-shell-1-loincloth-ankara-wax-printblue/6UCCEN7

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On peut prendre l’exemple de « Kwadusa », dont on dit qu’il est à l’origine du motif batik de l’oiseau Garuda. En effet, la queue en éventail de Garuda semble avoir été reproduite maintes et maintes fois au point de devenir kwadusa, qui dans en langue Twi veut dire « bouquet de bananes ». Ce motif, issu de la culture indonésienne, a donc, au fil du temps, pris une signification totalement différente et a pris d’autres significations relatives à la nature.


Icons on a pedestal regroupe tous les wax emblématiques de la marque Vlisco. Beaucoup de ces motifs sont d’Ebenezer Brown Fleming. VLISCO STORIES Team, «Icons on a pedestal», Vlisco https://stories.vlisco.com/fr/behind-the-stories/2013/icons-pedestal/

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Partie III : Analyses d'imprimés wax emblématiques LE WAX COMME MIROIR SOCIAL

1. B LÉ Raoul Germain, « Le pagne : Un moyen de communication en Côte d’Ivoire  », Open Editions Journals, https ://doi.org/10.40 0 0/communication.3026.

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Au commencement, le Wax est surtout porté par les personnes aisées pour afficher leur statut social. Devenu symbole d’opulence, la population s'en empare car le porter signifie « avoir les moyens ». Sa popularité grandissant, il est de plus en plus vendu sur les marchés. Les vendeuses, principales distributrices du produit, sont celles qui, avec les acheteuses, créent le sens d’un nouveau tissu. Cependant, comme le motif était redistribué dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, selon le pays et la clientèle, le sens variait et c’est pour cela que l’on peut retrouver des significations différentes pour un même imprimé wax. Porter un wax particulier signifiait alors propager le sens de celui-ci. Il devient, de ce fait, un symbole d’appartenance sociale car un certain groupe de personnes peut se réapproprier un dessin, un motif afin de le faire correspondre à son identité. Sa diversité permet alors d'affirmer implicitement sa personnalité. Dans son article « le pagne, un moyen de communication en Côte d’Ivoire »1, le directeur pédagogique de l’Unité de formation et de recherche en information, communication et arts (Ufrica) de l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan, Blé Raoul Germain affirme que « Le pagne wax est un tissu en coton imprimé de qualité supérieure, que les femmes africaines utilisent pour la confection de leurs vêtements. Son intérêt se trouve dans les messages que le pagne wax, véritable miroir social, véhicule; messages qui se situent entre l’identité culturelle de celle qui porte le pagne et l’affirmation de la « néo-africaine », entre sa position sociale et son milieu. Prenant acte de sa présence au quotidien, le pagne peut être vu comme un véritable média et, pour qui sait « lire » ses


messages, servir de moyen d’information sur les « événements du jour ».3 Avec le temps et la diversification du produit, de plus en plus de personnes ont commencé à créer leur propre motif afin de le faire imprimer afin de célébrer différents évènements de leur vie comme un mariage, un enterrement… Les convives ont alors un souvenir physique lié à l'évènement.

LES DIFFÉRENTES THÉMATIQUES L’imprimé wax expose toutes les thématiques de la vie de tous les jours des populations africaines. Il rythme les différents stades de la vie d’une personne en mettant, sous forme graphique, les évènements qui la traversent. Il est le plus souvent porté par des femmes sous forme de pagne. Que ce soit la vie familiale, sentimentale, conjugale et même économique, tous les champs de la société qui pourraient toucher la vie d’une femme sont alors traduits dans ces imprimés. Beaucoup de pagnes sont aussi créés pour commémorer des évènements marquants de l’actualité comme par exemple, l’élection de Barack Obama à la Présidence des États-Unis ou encore la visite du roi Albert II au Congo. D'autres abordent des problèmes de société plus complexes comme le système de santé, l’analphabétisme, la pénurie d’eau, les famines etc… Par la suite, avec son expansion au-delà du continent africain, il est devenu un lieu d’expérimentation graphique pour bon nombre d’artistes/designeurs et a perdu peu à peu son statut de support de communication non-verbale.

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LES WAX D’EBENEZER BROWN FLEMING


Bassam GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.14.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

1. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.14.

2. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.14.

DOS DE TORTUE/ BASSAM EBENEZER BROWN FLEMING 1895 Ce dessin très ancien, d'inspiration indonésienne, figure par un triangle aigu la croissance d'une pousse de Bambou, ainsi que le motif répété d'un « masque java », selon les dessinateurs d'ABC, d'un « dos de tortue », selon le peuple Akan du Ghana. Il est aussi surnommé « Bassam » en Côte d'Ivoire, en référence à l'ancienne capitale du pays.1

« Cet élément est toujours accompagné de guirlandes de feuilles de laurier stylisées et décorées de petits points. Cette codification sera respectée dans toutes les variations réalisées autour du même motif. »2 Graphiquement, la complexité et l'imbrication du motif ainsi que son fond donnent un côté très oriental à l'ensemble. On voit clairement l'influence indonésienne. Il est visuellement très attrayant et les couleurs choisies évoquent celles utilisés par Brown Fleming. Crée en 1895, ce wax était, peut-être, destinée à La Côte d'Ivoire. En effet, le pays étant l’entrée principale des colons sur le continent, beaucoup de wax étaient destinés à cette contrée. On comprend donc ce choix précis de couleurs qui sont des couleurs chromatiques assez vives : rouge, jaune, noir. Ce wax capte immédiatement l'attention et amène à s’interroger sur la signification du fond, qui cependant ne doit en avoir. Le côté graphique qui « attrape » l’œil, vient aussi du fait que c’est un dessin assez complexe qui demande de s’y attarder pour le comprendre. Que ce soit les rosaces qui partent de la forme principale et toutes les excroissances autour, clairement on est devant un travail d’orfèvre. C’est un motif très complexe pour l’époque et sa reproduction nécessite une précision telle qu’elle a peut-être été réalisée en « blocking ». L'inspiration indonésienne s'explique aussi parce que la plupart de 25


ces wax étaient destinés au marché indonésien. Connaissant l’histoire du wax, on peut facilement comprendre pourquoi au début du XXe siècle, autant de wax portent encore des iconographies javanaises dans leurs motifs. Ces motifs ayant déjà été faits et plaisant aux populations d’Afrique de l’Ouest, ils ont été vendus tels quels. Cependant, pour les populations indonésiennes, la plupart de ces symboles sont des éléments sacrés de leur culture, puisque le batik javanais était réservé à l’élite.

Autre version de « Bassam » Urbanstax, « Mustard and Pink Tortoise African print- 6 Yards », Urbanstax, https://www.urbanstax.com/product/mustardpink-tortoise-african-print-6-yards/

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Réinterprétation de « Bassam » SACOLOR, « Tissus wax », Sacolorcreations, https://www.sacolorcreations.com/tissus-wax/?cn-reloaded=1

Déclinaison du motif « Bassam » Waxprintslacesnmore, « Tortue noire jaune Impression de cire africaine», Waxprintslacesnmore, https://www.waxprintslacesnmore.store/listing/828959487/tb1african-fabric-per-yard-blue-yellow

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Hands and Fingers LAURENAMY9, « Textile Tradition- West African Wax Cloth »,Laurenamy9, https ://laurenamy9.wordpress.com/2015/11/03/textile-tradition-west-african-wax-cloth/.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

3. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.12. 4. Ankersmit : peu d'informations sont disponibles sur cette société mais apparemment, ce fut une entreprise en relation avec Vlisco.Ankersmit a fusionné avec Univeler durant les anneés 50 et a ensuite fermé. WIKIPEDIA, « Vlisco », Wikipedia, https ://nl.wikipedia.org/wiki/Vlisco

HANDS AND FINGERS EBENEZER BROWN FLEMING 1895 Cette main ponctuée de pièces de monnaie et présentée en regard d’une rangée de doigts isolés est couramment associée au dicton « l’union fait la force » : quelle serait l’utilité des seuls doigts si ils n’étaient pas réunis pour parfaire cette main qui permet de subvenir aux besoins par le travail ? On peut aussi y déceler un support pour l’apprentissage de l’ancien système monétaire britannique : la réunion de douze pièces de faible valeur, d’un penny chacune, présente la somme conséquente d’un shilling.3 Selon Ankersmit4, cela voudrait également dire : la paume d’une main est plus douce que son dos (parce que c’est la paume de la main qui tient l’argent alors c’est signe de bonne fortune). En observant la composition générale, on comprend mieux le premier sens qui lui est affublé : « quelle serait l’utilité des seuls doigts si ils n’étaient pas réunions pour parfaire cette main qui permet de subvenir aux besoins par le travail ? » Visuellement, on voit, par le choix des couleurs, que c’est une réalisation de Brown Fleming. L’application du rouge comme couleur de fond ainsi que le jaune qui sert de couleur d’appui pour mettre l’emphase sur les éléments importants est quelque chose que l’on a déjà pu observer chez Ebenezer. La composition, est quelque peu originale, ici l’élément principal, occupe une place beaucoup plus grande que le reste, les doigts servant plus d’indice visuel pour mettre en avant la main. L’agencement respire beaucoup plus, par l’espace mis entre chaque élément. Même si l’espacement entre les doigts rend l’ensemble un peu anxiogène, ils dirigent également le sens de lecture vers le centre de l’image.

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Cependant, visuellement la fig.1 fonctionne un peu mieux pour moi car on comprend mieux la complexité du dessin, la main est détaillée, on y voit les crevasses. Le fond est traité un peu plus différemment aussi, meilleure qualité d’image oblige, et apporte une plus-value à l’ensemble.

FIG.1 : autre modèle de Hands and fingers

Ce sont des couleurs moins chaudes qui sont utilisées mais le choix d’un rouge un peu moins agressif apaise le regard et nous permet de nous concentrer sur les détails apportés à la main. On réalise aussi qu’une ombre noire se dégage derrière la main. Est-ce que les crevasses sont des défauts d’impression ? peut-être mais cela donne à l’ensemble un côté assez authentique qui a son charme. En termes de symbolique, ce n’est pas l’individu seul qui est important mais c’est la collectivité qui prime. On ne peut rien réussir seul d’où « l’union fait la force ». En Afrique, énormément de travaux sont pratiques et l’usage des mains est présent dans presque tous les corps de métiers. Il est donc important d’en prendre soin étant notre gagne-pain. La main porte aussi une très forte symbolique dans la plupart des cultures.

5. INCONNU.E, « la symbolique de la main », 1001 symboles, https ://1001symboles.net/ symbole/sens-de-main.html

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En effet, c’est un des membres les plus sollicités du corps, permettant de saisir et manipuler des objets, c’est aussi un incroyable outil de communication. C’est aussi un membre associée à un travail de qualité, il suffit d’entendre le nombre d’expressions tels que « fait main », « cousu main », qui sont gage d’un travail de qualité.5


Autre modèle de Hands and fingers INCONNU.E, « Hand Motif Ankara Fabric - By the Yard », Urbanstax, https ://www.urbanstax.com/product/hand-motif-ankara-fabricyard/

Autre modèle de Hands and fingers INCONNU.E, « Hand Motif Ankara Fabric - By the Yard », Urbanstax, https ://www.urbanstax.com/product/hand-motif-ankara-

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Good Husband GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.256.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

6. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.41.

GOOD HUSBAND EBENEZER BROWN FLEMING 1895 Pièce indispensable à la liste d'étoffes offerte à la jeune mariée, ce wax est nommé « Good Husband ( bon mari ) ». Très apprécié par la population guinéenne, il est le plus souvent aperçu dans ses tons rouge et jaune. Son dessin peut aussi parfois être revisité dans des coloris moins traditionnels(FIG.2).6 Dans une composition carrée entourée par une large frise d’inspiration indonésienne, il campe une rosace centrale environnée d’éléments géométriques et de calligraphies évoquant des sourates du Coran.6 Ce wax est le premier à utiliser le texte comme élément central de décoration. Comme dans « Alphabet », du même créateur, qui utilisait les caractères latins comme élément afin de faire passer un message d’éducation, le texte embrasse parfaitement la composition et est même un élément central de l’objet.

FIG.2 : autre déclinaison de Good Husband GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.41.

Le choix des couleurs de l'illustration de la page de gauche amène une dimension sacrée à l’ensemble. Grâce à l’utilisation du rouge, de l’or surtout, ainsi que du fond noir, un côté solennel se dégage de l’ensemble. Les triangles qui entourent le texte central attirent notre attention sur le fait qu’il est important de comprendre le choix des couleurs afin de pouvoir interpréter l’ensemble. Les quatre formes, remplies de symboles pouvant faire penser à des croix, structurent bien l’ensemble et guident notre regard dans l’image. Les deux triangles rouges, dans lesquels se situent des fleurs, dirigent également notre regard pour en quelque sorte nous dire : « Voici l’élément à lire en premier, voici le message principal de ce wax ! » Ce wax est d’ailleurs populaire en Guinée parce que la population y est, à 88%, musulmane. Le porter est, dès lors, un hommage fait à cette religion et une manière d’affirmer la fierté de la pratiquer. Derrière le message véhiculé par les porteurs du motif, il y a peut33


être une volonté de communiquer avec les initiés, ceux qui peuvent comprendre. La religion étant très importante dans la région d’exportation des batik originaux, l’intégration de textes religieux dans le wax tombe sous le sens. Le batik est une technique d’impression javanaise présente à toutes les étapes de la vie des Indonésiens, de la naissance (on enveloppe les enfants dans du batik portant des symboles supposés apporter la chance et le bonheur) à la mort (les défunts qui sont enveloppés dans des linceuls en batik). C’est un tissu qui est porté dans toutes les classes de la société. Dans une culture où le textile a une place fondamentale, le fait d’y incorporer des éléments religieux.

7. INCONNU.E, « Le Batik Indonésien »,Unesco, https ://ich.unesco.org/fr/RL/le-batik-indonesien-00170

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Confectionné, en Indonésie, par des grands maîtres, le pagne peut coûter jusqu’à 10 fois le salaire moyen. Voici ce qu’on trouve sur le site de l’Unesco, le batik indonésien étant inscrit au patrimoine immatériel de l’Humanité7 : « La grande diversité des motifs reflète la variété des influences, depuis la calligraphie arabe, l’art floral européen, jusqu’aux phénix chinois en passant par les fleurs de cerisiers japonais et les paons indiens ou persans. Souvent transmis de génération en génération au sein des familles, l’art du batik est intimement mêlé à l’identité culturelle du peuple indonésien et en exprime la créativité et la spiritualité, au travers des significations symboliques de ses couleurs et dessins. » Lorsqu’on remonte aux sources, on comprend aisément la grande diversité des wax africains.


Déclinaison dans un autre coloris de "Good Husband" Lien de l’image supprimée de sa source.

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Coquillage/Régime de bananes GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.17.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION :

NOM :

La divinité Garuda WIKIPEDIA, « Garuda », Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Garuda

8. Garuda : Homme-oiseau issu de la mythologie hindouiste puis bouddhiste, il est la monture de Vishnu. 9. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.16 10. VLISCO, « Casque », Vlisco, ht tp s : // w w w.vlis c o.c om / fr/ fabric_ stor y/ casque/

COQUILLAGE/ RÉGIME DE BANANES EBENEZER BROWN FLEMING 1895 Réprésentant originellement les ailes de Garuda8 issues de la religion hindoue, il a été emprunté à l'Indonésie et déformé pour être réapproprié par les populations d'Afrique Occidentale. Selon la région, il porte différents noms tels que « Abobo To Lé Gomè » : escargot hors de sa coquille" au Togo, signifiant « mêlez vous de vos affaires au lieu de mettre le nez dans celles des autres ». Il veut également dire « coquillage » en Côte d'Ivoire  ou « régime de bananes » au Ghana.9 Au Togo, il existe même un village appelé Abobo, où se tient chaque année, en septembre, le festival Abobozan. Pendant ce festival, les habitants dégustent des plats à base d’escargot et le tissu orné d’escargots est un choix très populaire.3

Ce motif est un classique de l’iconographie des imprimés wax. Repris, modifié, décliné et réinterprété, il est présent sous différentes formes dans ce mémoire. Il est l’un des premiers motifs d'impression à la cire, produit en Côte d'Ivoire, et est encore commercialisé aujourd’hui. A l’origine, il faisait référence aux ailes de Garuda, la monture de la divinité hindoue Vishnu. Un petit rappel des ailes est visible dans les extrémités des longues excroissances sortant de la forme ovale centrale. Cette forme ovale est scindée en trois parties : le centre est en rouge avec des petits arcs de cercle, les deux autres parties sont remplies de différentes formes pouvant faire penser à une coquille d’escargot. On observe d’abord une partie droite (avec des lignes verticales) et une séparation d'un petit aplat noir avec de petits points rouges. 37


Ensuite, quatre demi-ovales. Le même schéma se répète trois fois, puis les lignes horizontales noires reviennent. Dans la partie gauche, des lignes verticales sont séparées par un petit bloc noir, avec des petits points rouges qui se répètent horizontalement. Les contours sont doublés pour les ailes et la forme ovale. Le fond est recouvert d'un motif représentant un carré avec en son centre un rond. Ce rond est traversé par des lignes passant par les sommets du carré et le centre du cercle. FIG 3 : Autre version du wax Coquillage GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.17.

L’arrière-plan est assez complexe avec une illustration se répétant de façon assez systématique, laquelle répétition présente une symétrie horizontale. Même si cette répétition est peu originale, la complexité du dessin et de son arrière-plan rend l'illustration du wax graphiquement très intéressante. Les couleurs dans la FIG.3 apportent un côté très frais et plus dynamique que dans les deux autres exemples. Le choix de ces couleurs très vives permet également une visibilité/démarcation plus forte par rapport à d'autres wax. Le fond teinté d'orange avec des petites bulles blanches apporte des pointes de vie dans le wax. Malgré sa complexité, il est très apprécié par les vendeuses et les clientes. Il a fait partie des premiers à être vendus sur le continent et a été une des premières réappropriations d’un motif anciennement indonésien. En effet, il fait, à l’origine, référence à un élément culturel indonésienne, lequel va être adopté à la fois par les vendeuses puis les clientes. Le nouveau sens qu’on lui attribue change alors selon les régions et il perd son côté « sacré » pour devenir un pagne utilisé dans la vie de tous les jours. Sur l’île de Java et en Indonésie, ce type de motif n’était réservé qu’aux familles royales mais avec son arrivée sur l’ouest du continent africain, il s’est démocratisé autant que désacralisé et sa signification première a totalement disparu. C’est le cas de beaucoup de wax de Brown Fleming, qui se sont transformés au cours des années et selon les pays. Comme il a été l’un des premiers revendeurs sur le marché, il a pu instaurer ses propres

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codes et l’utilisation du rouge et du jaune en fait partie. Ces choix de couleurs très populaires en Côte d’Ivoire, peuvent aussi nous aider à comprendre que le marché ivoirien a dû être un des plus importants à l’époque de l’importation des textiles sur le continent. Ces modèles étant devenus des classiques, ils sont désormais très prisés des collectionneuses.

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Coiffe royale GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.29..


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

Exemple de « Tie and dye » CAZILHAC Lynda, « le tie and dye, une technique ancestrale de teinture des tissus », Kalyca, https ://www.kalyca.fr/fr/blog/le-blog-de-lyndacazilhac/le-tie-and-dye-une-technique-ancestrale-de-teinture-des-tissus

11 .GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.28. 12. V LISCO, « Disque dur », Vlisco, ht tps ://w w w.vlisco.com/fr/fabric_ stor y/ disque/

COIFFE ROYALE EBENEZER BROWN FLEMING 1902 Ce dessin trouve ses origines dans les décors des étoffes artisanales Tye & die. Il a de nombreuses appellations selon les régions telles que « Coiffe royale » au Togo, « Ronds dans l'eau d'un puits » au Ghana ou encore « Disque » en Côte d'Ivoire (en référence aux vinyles). Un regain d'intérêt pour ce motif est observé depuis l'émergence du style d’Afro mix.11 Commercialisé pour la première fois dans les années 60, ce dessin porte de nombreux noms tels que PlaquePlaque, Target ou encore Nsu Bura (qui signifie puits d’eau au Ghana). Lorsque l’on jette une pierre dans un puits, la surface de l’eau se couvre d’ondulations. Le sens du message est le suivant : tout ce que vous faites de positif ou de négatif aura des conséquences sur tous ceux qui vous entourent. Ce dessin porte également d’autres noms tels que Consulaire, Gbédjégan (désigne un chapeau royal traditionnel en paille au Togo), et Gbedze, du nom du chapeau porté au quotidien pour se protéger du soleil. Au Nigeria, cet imprimé est appelé Record en raison de la forme circulaire du motif, qui rappelle les vieux disques vinyle à de nombreux clients et revendeurs.12

Coiffe Royale  est un wax très ancien. Ayant été repris et revisité de moult façons, il arrive, comme beaucoup de ces prédécesseurs, qu'il soit répété de différentes manières selon les exigences graphiques du commanditaire.

Déclinaison de Coiffe royale GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.28.

Il est composé de cercles formés de points reliés entre eux, qui s'épaississent à mesure qu'on va vers la circonférence et dessinent un motif régulièrement répété dans la composition. 41


Le fond est opaque et parfois craquelé et dans celui de gauche, il est rouge avec de petites bulles, créeant un effet texturé assez dynamique qui donne une sensation de mouvement. Toujours dans la FIG.2, on peut remarquer aussi que la couleur noire a un peu « dégouliné » et s'est étendue dans le tissu mais pas de façon homogène. Ce motif existant en différents modèles, nous allons surtout parler de celui de la page de gauche, qui est visuellement plus intéressant. Autre version existante du motif Coiffe royale WILLIAMS Zoe, "The story of African Wax Print Fabrics", Gathered, https ://www.gathered.how/sewing-and-quilting/sewing/the-story-of-african-wax-print-fabrics/

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Comme on peut le voir, les couleurs rouge, orange et bleue sont prédominantes car c'était les préférences des client.e.s de l'époque. La couleur a aussi dégouliné à certains endroits. Cette erreur est, en fait, vu par beaucoup d'acheteuses comme une preuve d'authenticité car si c'était une copie chinoise, cette erreur serait sur tous les wax de la série. Il arrive que des erreurs, arrivent lors de l'impression, devenant un « sceau » certifiant de l'authenticité du produit. Une spontanéité visuelle se crée alors et les erreurs deviennent des instruments au service du motif ! La superposition du noir sur le rouge ainsi que les bulles blanches (issue de la couleur du tissu) donnent aussi un bel effet et apporte une touche assez naturelle à l'ensemble. Qui plus est, l'agencement des aplats rouges et jaunes engendre également un effet graphique tout à fait saisissant.


Autre coloris de Coiffe royale VLISCO, "Disque dur", Vlisco, https ://www.vlisco.com/fr/fabric_story/disque/

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"16 Objets" GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.34.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

16 OBJETS EBENEZER BROWN FLEMING 1905 Sur tout le continent africain, la civilisation égyptienne antique renvoie à un passé prestigieux.

La forme ovale, associée à la fécondité ou la fertilité, constitue un élément graphique important. Elle devient souvent un élément central de certaines compositions comme par exemple, le wax : « L’enfant vaut mieux que l’argent ». Par leur ancienneté et rareté, beaucoup de ces wax sont à ce jour impossibles à trouver sur internet (même par morceaux) ! Il était cependant important d’en parler, car quelques-uns des symboles qu’il utilise sont présents dans l’iconographie du pagne wax en général. Premier « objet » : la main, que l’on retrouve sur la première illustration en haut à gauche. C’est le membre que l’on utilise pour travailler, se nourrir. Elle est représentée dans beaucoup de pagnes de façons diverses et variées mais plus spécifiquement dans « Hands and Fingers » (même artiste). Ensuite, l’oiseau, animal fétiche de beaucoup de cultures, parce que symbole de liberté, de fertilité, de pouvoir. Nous verrons tout au long de ce mémoire que beaucoup de wax reprennent cette symbolique de l’oiseau. Comme la civilisation antique égyptienne est l’une des plus connues sur le sol africain, son iconographie a été reprise dans la confection de nombreuses illustrations. Beaucoup d’éléments graphiques ont été reproduits à partir de créations antiques. Les colons ne connaissaient pas beaucoup de choses sur le continent, alors ils ont alors cherché l’inspiration dans d’an45


ciens motifs connus, par facilité sans doute. C’est pour cela que l’on retrouve beaucoup d’éléments faisant référence à d’autres cultures, éléments que les africains subsahariens se sont ultérieurement réappropriés. Comme le fait, par exemple, remarquer Anne Grosfilley dans « Cinq cents tissus » : « Les emprunts iconographiques se retrouvent aussi dans le wax où le dieu faucon semble devenir une éminente source d'inspiration, il peut être figuré sous différentes formes que ce soit en pied ou bien sous celle par son œil « oudjat », puissant symbole protecteur. » Sur ce wax, on retrouve plusieurs dessins déjà décrits dans l’introduction. La manière dont ils sont positionnés sur le tissu est intéressante. Ils sont tous entourés par un cadre dont les contours sont un peu craquelés et arrondis sur les bords. Comme des talismans insérés dans un collier, ils sont censés protéger la personne qui porte le tissu. Le contour est jaune. Les dessins sont oranges et jaunes. Le brun remplit le fond des motifs placés sur le côté droit de l’illustration. Ce qui rend l’image difficile à lire. Peut-être que l’utilisation du brun fait référence au retour à la terre. L’orange est utilisé afin de mettre en exergue les détails auxquels on doit prêter attention. L’ensemble étant graphiquement cohérent, on ne s’interroge donc que peu sur la complexité relative de son dessin. Le style graphique évoque des hiéroglyphes. Nous n’avons pas l’ensemble du tissu, mais ce qui frappe c’est que rien ne dénote réellement mais que l’utilisation du brun rend vraiment illisible une partie du motif.

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Autres objets faisant référence à des royaumes. Quelques exemples d’objets royaux des populations Akan.

Parasol Royal GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017 p.46.

Tabouret Royal, Kings Stag Panels GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.44.

Version Fancy imprimé en Côte d'Ivoire. GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.47.

Jeune femme portant un un corsage avec le motif de tabouret Akan au Mali GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.47.

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Déclinaison du motif "fusée apollo" GROSFILLEY Anne, " Wax, 500 Tissus ", éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.47.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

FUSÉE APOLLO/ TIRE-BOUCHON VLISCO 1906 Répresentant originellement un sceptre royal Akan, il a pris un autre sens inattendu.

La construction de ce wax est assez intéressante. Sur cette partie du tissu, sont placées deux tours identiques, lesquelles doivent se répéter probablement à l’identique partout. La tour représentée est craquelée à sa base, alors que sa partie supérieure est encore intacte. La corniche est représentée dans un style ancien, assez « impérial ». Sur le toit, est accrochée un mat portant un drapeau tendu. En dessous de la corniche, la tour paraît noircie, comme si elle s’effritait. Sur la partie inférieure se craquelant, est apposée une illustration. Selon différences sources, cet objet serait un sceptre royal Akan, impliquant que le reste est donc une tour royale (ou, peut-être, une tour de guet). Le sol s’effrite, comme le haut de la tour. L’utilisation de ce rouge « terre » pourrait rappeler avec le lien à la nature des peuplades Akan. La fissure montrerait alors ce lien est en train de se briser petit à petit. La couleur orange pourrait aussi évoquer celle du feu. Le sceptre royal, connecté au sol, retiendrait la terre et la tour ensemble. La fissure représenterait la perte des traditions : celles-ci disparaissent malgré que les anciens (le sceptre), tentent de transmettre les codes de la culture aux jeunes, sur cette terre vierge où s’inscrira l’avenir. Évidemment l’orange (ici presque de l’ocre) rappellerait aussi l’or et donc la puissance des familles royales Akan. Les Akans sont une peuplade d’Afrique de l’Ouest, installée principalement au Ghana et en Côte d’Ivoire. 49


Ils ont été l’un des premiers peuples avec lequel les colons ont fait affaire. Ils ont échangé de l’or contre les fameux wax imprimés dont nous parlons ici, ils sont également les premiers vrais clients des revendeurs de wax. Les plus anciens de ceux-ci représentent donc beaucoup d’éléments de leur culture. Les rois Akans avaient un fort pouvoir décisionnaire dans l’importation de ces tissus sur le continent : les contenter était donc l’un des premiers objectifs commerciaux des missionnaires. Le changement de nom d’ un tissu après un grand évènement international est également très intéressant. Alors qu’il faisait référence à quelque chose d’inhérent au continent, il change de signification lors d’un grand évènement et perd donc le sens traditionnel originel. L’imaginaire collectif évolue, les traditions disparaissent pour s’adapter à la modernité. Cette transformation de sens est encore plus intéressante quand on observe le troisième titre : « Tire-bouchon », car on part d’un objet clairement sacré pour déboucher sur un objet du quotidien complètement banal. Finalement, ce wax, comme ce qu’il illustre, devient quelque chose d’accessible à tous et n’est plus réservé à une élite.

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Déclinaison du motif "fusée apollo" GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.47.


Alphabet ABC VLISCO, « ABC Alphabet », Vlisco, https ://stories.vlisco.com/fr/fabrics/140017/?story=alphabet-abc


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

13. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.21.

ALPHABET EBENEZER BROWN FLEMING 1920 L'alphabet latin, associé à la scolarisation, incarne un des piliers de la mission civilisatrice de la colonisation. En complément des lettres, des chiffres arabes et des nombres apparaissent sur un tableau noir. Ce dessin est très vite devenu l'apanage des populations lettrées voulant signifier qu'elles ont eu accès à l'école et que savoir lire et compter leur ouvraient des opportunités professionelles. Repris à l'identique par les hollandais dés 1920, il connaîtra de multiples déclinaisons dans les manufactures de wax anglaises.13 Ce wax fait probablement partie des plus importants et des plus connus de l'Écossais Ebenezer Brown Fleming. Il a été un des piliers dans la catégorie des représentations sociales et l'est encore aujourd'hui. Différentes iconographies faisant référence à l'apprentissage sont insérées dans ce wax : le tableau avec les 13 premiers chiffres arabes (référence au savoir, à l'enseignement), une grille avec toutes les lettres de l'alphabet, des règles, des livres, des crayons, des ardoises sur lesquelles sont inscrits des chiffres. L'iconographie de l'alphabet sous-entend que les personnes comprenant le contexte d'utilisation de ces symboles ont la possibilité d'accéder au savoir. L'arrière de ces lettres dans la figure 1 présente des craquelures dues au procédé d'impression. Dans la version la plus connue, les couleurs prédominantes sont le rouge, le bleu et le jaune (virant à l'orange avec la superposition du rouge). Ces couleurs sont d'ailleurs les plus appréciées en Côte d'Ivoire, l'un des plus grands pays consommateurs de waxs. Cela expliquerait la récurrence de ces teintes dans la plupart des wax que nous analysons dans ce mémoire. Créé en 1920, ce dessin d'alphabet était principalement porté par 53


Design original ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », Vlisco, https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-stories-behindtraditional-african-wax-prints

14. ABRAMS Melanie, «  8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », Vogue, https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-stories-behind-traditional-african-wax-prints

Jeune femme portant une autre version de l'imprimé Alphabet GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.55.

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les personnes qui allaient à l'école coloniale et savaient lire, écrire et compter avec les nouvelles mathématiques. Les gens en étaient très fiers et ils portaient cette impression en cire pour dire : « Regardez, je suis alphabétisé et je suis une personne instruite », dit Grosfilley. Aujourd'hui, le dessin conserve encore ce symbolisme, même utilisé par les partis politiques à des fins de propagande, comme pour dire, « regardez, c'est un dessin de haut standing et je serai un. e très bon. ne présidente alors vous devriez me supporter parce que je suis aussi bon. ne que l'éducation. », dit-elle. Les motifs modernes ont permis d'actualiser le design en remplaçant les tableaux noirs par des ordinateurs.14


GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.53.

Autre coloris de Alphabet, VLISCO, "ABC", Vlisco, https ://www.vlisco.com/fabric_story/abc-alphabet/

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Skin GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.33.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

15. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.33.

Snake Skin Purse par Rachel Wood GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.272.

SKIN/ PEAU DE PANTHÈRE EBENEZER BROWN FLEMING 1964

Ce dessin a plusieurs appellations (selon les pays) : « Petits Cailloux » au Ghana, « Peau de Panthère » au Togo, « Bobodouman » en Côte d'Ivoire. Bobodouman évoque une maladie de l'utérus. Dans les années 1990, alors que l'épidémie de Sida se propageait sur le continent africain, une rumeur a associé ce wax à la séropositivité car les petits graphismes qui garnissent les taches étaient assimilés aux lettres V, I et H ! Les dessinateurs d'ABC ont dû modifier l’agencement de manière à ce qu'on ne puisse plus jamais y lire le sigle du virus meurtrier.15 Plus communément connu sous le nom « peau de panthère », ce motif a été décliné dans beaucoup de designs notamment « Snake Skin Purse » de la créatrice Rachel Wood en 2002. Comme l’introduction l’indique, il a eu plusieurs noms selon les pays et a donc des sens différents mais nous allons nous concentrer sur une seule description : petits cailloux. « Peau de panthère » est composé de petits éléments de forme variable mais respectant une cohérence Sur ces petites formes, sont dessinées des sortes d’entailles telles que celles faites sur une pierre. Le fond de ces formes est de couleur noire sur les deux modèles et le trait des entailles est de la couleur du tissu : blanc. Le milieu du tissu est traversé par une multitude de petites formes serrées dont les fonds sont de la même couleur que le pagne : orange ou blanc selon le modèle. Dans la version print, deux couleurs sont utilisées, le blanc et le noir. Depuis la réimpression, on peut trouver une voire plusieurs couleurs supplémentaires. 57


"14/41550" GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.64.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

A14/41550 FONDS ANKERSMIT 1935

Évocation du milieu aquatique par l’utilisation de la couleur bleue comme couleur de trait et de remplissage pour certaines zones. Le jaune sert à colorer les extrémités des animaux représentés afin de pouvoir les détacher du fond. Il est utilisé pour les yeux et les membres extérieurs comme la queue et les nageoires. Cependant, un élément frappant ici : la couleur est présente uniquement par les traits et très peu d’aplats francs sont visibles. Cette manière de représenter les choses évoque le style graphique que peuvent revêtir certaines estampes japonaises. Ce style graphique est frappant par son efficacité et son originalité. Se démarquant de ses prédécesseurs, on peut y voir une inspiration de l’orient et de l’étude des mouvements de l’eau. L’eau ici est admirablement bien représentée ici par des traits francs et pleins. On perçoit le mouvement de l’eau et la mouvance des animaux dans cette dernière. Certaines zones sont remplies pour signifier l’arrêt du mouvement. D’autres, quant à elles, sont là pour permettre une identification des animaux présents dans la scène : comme la raie au centre de l’image, reconnaissable par ses nageoires et sa longue queue, qui ici a été stylisée, pouvant évoquer une algue marine. Les poissons sont, eux, représentés de manière plus succincte, avec uniquement leur tête, les écailles et leurs nageoires. Visuellement, il est très bien maitrisé, le choix de la couleur jaune pour contraster avec le bleu, fonctionne très bien. 59


Le blanc est très intelligemment utilisé comme couleur de fond, il n’alourdit pas l’image et permet une identification claire du sujet. Qui plus est, le choix du bleu apporte une dimension assez calme à l’ensemble, donnant à voir un spectacle aquatique calme et paisible où la vie suit son cours et nous serions de simples spectateurs. La décision d’utiliser le trait comme principal attrait graphique amène un côté très ancien. Évoquant les premiers dessins où la simplification des traits ainsi que la compréhension rapide et claire du message étaient les maitres mots. Très différent des précédents, ce wax intrigue par son graphisme. Le fond, simple, n’est pas rythmé ici par une répétition de motif. Il laisse un champ d’interprétation large et le « chemin » situé au centre de l’image y apporte une touche énigmatique. Ce wax porte divers noms, ce qui est expliqué par son succès. Les illustrateurs, en toute liberté, ont créé des motifs abstraits proposant ainsi un large champ d’interprétation aux acheteuses. Elles ont, elles-mêmes donné des noms aux wax qui ont ainsi connu la popularité, indépendamment de leur valeur artistique. Voici bien la preuve que la lecture personnelle du motif est déterminante pour la vente. La connotation, parfois négative, du motif a pu faire peur et en freiner l’achat. Les fabricants l’ont donc modifié.

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Autre variante de 14/41550 SHOPAFRICAN, «Impression de cire africaine/tissu d’Ankara/ impression de cire en blanc, poisson rouge impression/tissu africain d’impression de cire par cour/ tissu africain par cour», Etsy, https://www.etsy.com/fr/listing/520696015/impression-de-cire-africainetissu

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LES DIFFÉRENTS ASPECTS DE LA VIE D’UNE FEMME Le pagne wax étant principalement acheté par des femmes, il était normal que beaucoup aient un sens lié à différents aspects de leur vie. Le sens d’un wax est souvent insufflé par les acheteuses. Ces dernières insufflaient alors des significations liées à différents moments de leur vie. Des thèmes comme le mariage, l’infidélité, la polygamie, le sexe ou encore la famille sont alors présents dans le wax. Dans les différentes cultures africaines, la féminité et la maternité sont des thèmes très importants, ils sont souvent symbolisés par des fleurs ou encore des animaux ou objets faisant référence à la naissance ou la fécondité.


L'enfant vaut mieux que l'argent Fondation Zinsou, « Wax Stories - Histoires de pagnes », Vlisco https ://issuu.com/fondationzinsou/docs/wax_stories, p.25.

L'enfant vaut mieux que l'argent GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.86.

L'enfant vaut mieux que l'argent VLISCO, « Les Best-Sellers - VL00963.100 », Vlisco https ://shop.vlisco.com/fr/les-best-sellers/vl00963-100#195=23


L'ENFANT VAUT MIEUX QUE L'ARGENT CRÉATEUR : HANS SANDERS ANNÉE DE CRÉATION : 1952

NOM :

1. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.86. 2. L a fondation Zinsou est une organisation béninoise qui a pour but de mettre en valeur le patrimoine artistique touchant à l'Afrique, le développement et la réduction de la pauvreté. FONDATION ZINSOU, «La Fondation», Fondation ZInsou, http://fondationzinsou.org/ la-fondation/

Tirant son nom d’une expression/dicton, ce tissu a une résonance toute particulière; la famille et la fertilité sont des concepts très importants dans la société africaine. Il fait écho à la forte démographie qui regorge dans le continent et au fait qu’avoir beaucoup d’enfants est quelque chose d’assez important. Ensuite, des œufs et des poussins : la poule a une grande force symbolique en Afrique, elle protège les enfants et nourrit les familles. En outre, avoir beaucoup d’argent est inutile s’il n’y a pas de descendance pour en hériter, d’où le nom du wax.1 Selon la revue « Wax Stories » de la fondation Zinsou2, ce nom pourrait être aussi un message destiné aux co-épouses qui ont peu ou pas d’enfants. Ce dessin met en scène un symbole de la fécondité que l’on pourrait interpréter comme un vulve d’où émanent plusieurs éléments faisant écho au premier concept. Tout d’abord, des motifs de graines pouvant rappeler à la fois la fertilité/l’ovule. Le trait est très simple permettant ainsi une reconnaissance rapide et claire du signe. On aperçoit également des seins qui rappellent la mère nourricière et des foetus dans l'utérus. Ensuite, on voit des oeufs et des poussins, nous rappelant encore une fois, la place de l’oiseau, dans ce cas précis, celui de la progénitude de la poule, qui a une force symbolique très importante dans la culture des beaucoup de peuplades africaines étant que protectrice des enfants et pondeuse. Elle apporte également de la nourriture de part ses oeufs. Tout est regroupé au sein du même dessin avec des traits très fins pour ne pas rendre l’illustration illisible. on retrouve encore une fois la dimension narrative. Les éléments sont disposées de sorte 65


qu'on les suive du regard. On le réalise de plusieurs façons : Que ce soit les foetus d'enfant sur la deuxième image qui sont tournés vers l'utérus; Les oeufs qui sont légèrement tournés vers la droite pour qu'on comprenne qu'ils sont produits au même endroit. En effet, si on regarde bien, tout le côté droit de l'illustration s'oriente vers l'utérus alors que les éléments dans la partie gauche, au contraire, s'en dégagent. Comme si l'objet central servait de filtre peut-être ?

Autre coloris de L'enfant vaut mieux que l'argent VLISCO, « Les Best-Sellers - VL00963.100 », Vlisco, https ://shop.vlisco.com/fr/vl00963-125

Autre coloris de L'enfant vaut mieux que l'argent  VLISCO, « Les Best-Sellers - VL00963.100 », Vlisco, https ://shop.vlisco.com/fr/vl00963-125

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Dans tous les cas, on peut clairement voir que le sens de lecture est fortement influencé par la façon dont les éléments sont agencés pour faire passer un message. Peut-être ceci : qui que l'on soit, quelque soit la façon dont nous avons été conçus, où la manière dont on a été accouché, on vient tous de la même matrice ? Plus on s’attarde sur les détails au mieux on comprend l’importance de l’enfant dans la société africaine et la pertinence du nom de ce wax.


L'enfant vaut mieux que l'argent VLISCO, «  Les Best-Sellers - VL00963.100  », Vlisco https ://shop.vlisco.com/fr/les-best-sellers/vl00963-100#195=23

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Ton pied, mon pied/La main du lépreux GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.98.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION :

NOM :

3. Considéré comme un des grands maîtres de la Rumba Congolaise, Sam Mangwana est un musicien d’origine Angolaise

TON PIED MON PIED/ LA MAIN DU LÉPREUX JOOP VAN HOOF 1969 Les noms donnés à ce dessin sur les marchés africains renvoient aux extrémités du corps humain : mains et pieds. En Côte d’Ivoire, il est associé à la chanson « Ton pied, mon pied » rumba congolaise interprétée par Sam Mangwana3, laquelle exprime la volonté d’être toujours aux côtés de l’être aimé. Au Bénin, la désignation «La main du lépreux » rappelle que faire l’aumône aux nécessiteux porte chance.4

4. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.98.

Graphiquement, il est impactant pour plusieurs raisons : Le fait d’ajouter plusieurs trames allant dans deux sens différents brouille l’image mais en même temps apporte une pâte visuelle encore jamais vue jusqu’ici. Plusieurs couleurs vives sont superposées tels que le jaune (au centre) et le rouge qui entoure celui-ci. Les pieds bleus sur les côtés sont cerclés de rouge, lequel fait ressortir la couleur de fond. Les extrémités sont, quant à elles, remplies avec la même illustration, de taille plus petite, et dont le fond est rouge avec un tramage noir, comme tous les autres. Le centre, lui, est traversé par une longue bande rouge dans laquelle se trouvent deux pieds partant dans des directions opposées mais bloqués par un demi arc de cercle, difficilement reconnaissable. Qui plus est, on peut voir qu’à plusieurs endroits, la couleur a dégouliné dans le tissu. Ce qui pourrait être vu comme un défaut devient ici un élément graphique assez percutant. Car, si on s’en réfère au nom béninois « La main du lépreux », la peinture qui pénètre le tissu et « passe » au-dessus d’un autre élément, peut nous faire penser à la lèpre, avec la peau qui se dégrade petit à petit et la maladie qui prend du terrain sur le corps, ici le pied. Ce défaut esthétique devient alors un élément au service du message que veut faire passer le wax. 69


Le deuxième nom « Ton pied, mon pied » évoque aussi l’amour car il symbolise le fait que l’on marche chacun au rythme de l’autre afin d’aller ensemble dans la même direction. La chanson « Ton pied, mon pied » de Sam Mangwana est une rumba, une danse de l’amour, nécessitant que les deux partenaires soient en rythme afin de pouvoir en exécuter les pas. D'ailleurs la définition de la rumba sur le site Wikipédia nous dit ceci : « Dans sa forme actuelle, les figures de base gardent les vieilles images des intentions féminines de dominer les hommes par leurs charmes. Durant une bonne chorégraphie de rumba, on devrait toujours voir les éléments d’attraction et de rejet entre l’homme et la femme. Les mouvements érotiques et sensuels de la femme obtiendront une réponse de désir et de domination masculine ; c’est l’homme qui gagne toujours à la fin. » On comprend donc bien l’agencement des pieds allant dans des directions opposées : la rumba est une danse où l’homme et la femme se « battent » pour dominer la danse. L’homme et la femme doivent affirmer chacun leur position, leurs mouvements afin de guider la danse. Si on part de cette interprétation, on peut découvrir une troisième signification au motif : les pieds sont dans deux directions différentes car chacun se bat pour imposer sa vision des choses dans le couple et le plus souvent, c’est l’homme (le bleu) qui l’emporte !

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Déclinaison de l'imprimé Ton pied, mon pied Aboubacar Broderie, « Nom de Pagnes Africains », Aboubacarbroderie http ://aboubacarbroderie. blogspot. com/2016/10/nom-des-pagnes-africain. html

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

5. G ROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.199.

BUTTERFLY PATCH ABC 1975 Le papillon est l'insecte le plus fréquent dans l'iconographie animalière du wax. Il évoque la beauté de la femme ainsi que l'amour, symbolisé ici par les cœurs dont sont ornées les ailes.5 Cette composition joue sur la technique du batik qui confronte le même motif en positif et en négatif : ainsi d’un papillon à l'autre. Les éléments orangés deviennent alors indigo, et inversement. Ce wax fait partie des premiers qui utilisent les contraintes techniques afin d’amener à un résultat graphique intéressant. De l’utilisation de l’orange et du noir, naît une confrontation visuelle qui apporte un réel attrait. Cette composition représente un papillon, représentation multipliée sur la surface du tissu, comme un patch, d’où le nom « Butterfly Patch ». Le papillon est un animal qui ne vit pas longtemps, pouvant symboliser l’aspect éphémère de la beauté d’une femme. Très présent dans l’iconographie animalière du wax, il se retrouve également de manière beaucoup plus subtile dans d’autres compositions. La façon dont il est représenté ici est assez complexe car le corps de l’insecte est incrusté de petites lignes dans le bas, les ailes sont décorées de cœurs et une ombre est même ajoutée sur les bords de l’aile plus haut. Lorsque l’animal est le sujet principal du wax, il est généralement assez détaillé. Le choix des couleurs fonctionne assez bien, avec l’orange qui fait ressortir les détails du papier sans l’ajout forcément d’une troisième couleur. Les petites tâches blanches présentes dans les ailes apportent une texture qui rend l’ensemble très beau. Erreur d’impression apparente, le fait que cela arrive souvent permet d’avoir des textures uniques à chaque impression et amène une rareté dans le produit. Cette rareté peut alors rentrer en lien avec la beauté des femmes, qui est considérée comme quelque chose de rare dans la plupart des sociétés.

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Butterfly Patch GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.199.


Tu sors, je sors BROWN Susan, « You go, I go, You leave, I leave », https ://www.cooperhewitt.org/2018/09/29/you-go-i-go-you-leave-i-leave/


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

6. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.117.

TU SORS, JE SORS NOUD JEURGENS 1978 Le nom est annonciateur du message véhiculé. Au Togo, la femme l’achète et le porte afin de mettre en garde le mari, l’avertissant que s’il lui est infidèle, elle n’hésitera pas à lui rendre la pareille. Il est généralement porté par la jeune mariée pour garantir les bases de leur situation conjugale. Popularisé en 1983, il a eu un très grand succès, notamment en Côte D’Ivoire, avant de tomber en désuétude. Mais il a connu un regain de popularité en 2007 et a été réintroduit sur le marché.6 La composition du wax « je sors, tu sors  » met en scène deux oiseaux sortant à tour de rôle d’une cage ouverte. L’un d’eux sort de cette dite cage et tourne autour de cette dernière afin d’inciter le deuxième à sortir. Grâce à cet ordre, on comprend rapidement qu’une histoire nous est illustrée. Toutes les étapes sont répétées mais jamais vraiment de la même façon dont différentes histoires peuvent être générés par des mêmes éléments. Plusieurs enchainements sont donc possibles. D’un point de vue graphique, les oiseaux sont illustrés de façon simple mais claire. Les ailes sont des fines lignes posées les unes à côté des autres suggérant alors les plumes. Le corps est, selon les versions, un aplat de couleurs sur lequel est des petites lignes sont dessinés afin de suggérer également les plumes. Les pattes sont représentées de manière quasi caricaturale par de simples lignes. Dans cette disposition, une histoire nous est racontée. En termes d’arrangement visuel, l'histoire n'est pas représentée de façon linéaire. Les illustrations sont posées de manière à ce qu'une boucle soit perceptible pour le spectateur. Chacun des traits est placé de manière à ce qu'on puisse rapidement identifier les étapes de l'his75


toire. Le trait des plumes n'est pas visible en premier lieu, permettant un deuxième niveau de lecture. En se rapprochant, on peut mieux observer ce qui se passe et donc saisir la subtilité de l'histoire. Chacun a sa version de l'histoire mais on ne peut réellement comprendre ce qui se passe qu'en regardant les détails. Le choix des couleurs jaunes, rouges et oranges est simplement dû au fait qu'elles étaient très appréciées en Côte d’Ivoire mais n’apportent, dans ce cas de figure, aucune signification particulière. Se conformant le plus souvent aux goûts des locaux, les créateurs néerlandais adaptaient les couleurs d’impression à la région à laquelle le motif était destiné, expliquant la multitude de déclinaisons pouvant exister d'un même wax. La manière dont est illustrée cette histoire fait référence à l'amour qu'ont les peuplades africaines pour la narration d'histoires, étant souvent de tradition orale. Cet imprimé mettant en scène un évènement auquel beaucoup de gens peuvent s'identifier, cela en explique le succès. Un autre sens pourrait être lié à l'oiseau en lui-même. Symbole de liberté et de fécondité, il suit l'un des sens premiers de cet imprimé : la femme est tout aussi libre que l'homme. Si l'homme veut aller voir ailleurs, il ne faut pas qu'il s'attende à ce que sa compagne l'attende sagement. Elle a droit à sa liberté tout autant que lui. Qui plus est, l'homme pourrait perdre sa chance de devenir père car il a voulu trop jouer. La cage vide peut aussi signifier un retour possible du deuxième oiseau ou alors chacun retrouve sa liberté au détriment d'y laisser des plumes à cause d'une séparation brutale. Cela expliquerait le fond rempli de plumes, on a chacun perdu des plumes à vouloir entretenir cette relation.

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Déclinaison de Je sors, tu sors GAYE Aissatou, « lire le wax »,Awalebiz, https ://www.awalebiz.com/fr/afrique-et-mode/lire-le-wax/

Déclinaison de Tu sors, je sors BROWN Susan, « You go, I go, You leave, I leave », Cooper Hewitt https ://www.cooperhewitt.org/2018/09/29/you-go-i-go-you-leave-i-leave/

Déclinaison de Tu sors, je sors INCONNU.E, « VL03610.049 », Vlisco https ://www.africabaie.com/en/produit/vl03610-049/

Déclinaison de Tu sors, je sors GAYE Aissatou, « lire le wax », Vlisco https ://www.awalebiz.com/fr/afrique-et-mode/lire-le-wax/

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Fleur de mariage Lien de l’image supprimÊe de sa source.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

FLEUR DE MARIAGE TON VAN DE MANAKKER 1979 Dénommé « fleur de mariage » en Côte d'Ivoire, ce dessin est l'un des plus populaires sur le marché occidental. L'agencement des motif tête-bêche permet de couper le tissu à son gré, dans le sens de la chaîne, de la trame ou de biais.7

7. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.119.

Rien que par la description, on comprend que le motif a été créé afin d’être placé de n’importe quelle façon sur le wax.

FIG 1 : Déclinaison de fleur de mariage MEB, « Z'yeux voient, bouche ne parle pas », Musée d’ethnographie de l’université de Bordeaux, https ://meb.u-bordeaux.fr/Agenda/Z-yeux-voientbouche-ne-parle-pas-La-parole-indirecte-des-pagnes

Visuellement, il fonctionne très bien car la répétition est harmonieuse, la simplification des traits de la fleur est claire et trois couleurs utilisées sont rouge, orange/jaune et le fond du tissu. Le trait est, sur tous les modèles, noir et son épaisseur est la même partout. Sur la FIG.1, le fond est de couleur jaune avec des bulles blanches. Il est beaucoup plus atypique dans le choix des couleurs et apporte un nouveau champ colorimétrique pour ce wax. Par son nom « fleur de mariage », ce wax peut aussi être un des nombreux wax offert lors du mariage à la fiancée, comme dot. Car beaucoup de wax arborant des motifs floraux sont des cadeaux de mariage/ ou des dots offertes aux jeunes mariés par la famille du mari afin de « sceller » le mariage. De ce fait, beaucoup de jeunes mariés se retrouvent donc avec des wax floraux et en portent dans la vie de tous les jours. C’est également un moyen de montrer aux hommes et à l’entourage que l’on est une jeune mariée.

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Chéri, ne me tourne pas le dos GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.129.


CHÉRI, NE ME TOURNE PAS LE DOS CRÉATEUR : VLISCO ANNÉE DE CRÉATION : 1980

NOM :

8. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.129.

Le créateur du motif a eu pour inspiration, le papier d’emballage que son boucher utilisait pour emballer sa viande. Pour les femmes togolaises, il est connu sous le nom « chéri, ne me tourne pas le dos ». Il est porté par les femmes qui ont peur que leur mari ne les regarde plus et soit intéressé par une autre femme. Dans la vraie vie, peu d'hommes se soucient de la signification du wax donc le message est souvent à l'intention des autres femmes.8 Utilisant la technique du blocking, le wax a été pensée pour que les formes s’imbriquent les unes dans les autres. Graphiquement, il fonctionne bien grâce à la répétition des torsions des lignes. Les couleurs rouge et orange se superposant légèrement à cause du décalage, apporte une touche « pop ». Qui plus est, le décalage n’étant jamais le même, ça apporte une sorte de chaos maitrisé. Un effet de mouvement peut aussi être observé par la manière dont les lignes sont légèrement décalées diagonalement. On ne comprend pas trop dans quel sens le pagne doit être lu ou observé. En bas à droite, le rouge est d’ailleurs fortement décalé, ce qui renforce la perception d’un mouvement un peu saccadé. L’ajout du rouge et de jaune perturbe aussi la façon de voir l’image. Les lignes des espaces blancs séparant les blocs de couleurs perturbent la vision. Les outils technologiques n’étaient pas tout-à-fait au point mais on peut constater que c’est une des premières vraies expérimentations dans les tissus wax. On essaie de créer du mouvement dans un tissu. Le mouvement est d’ailleurs renforcé quand le wax est porté autour de la taille sous forme de pagne, épousant les formes féminines.

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Porté sous forme de pagne autour de la taille, épousant les formes de la personne qui s’en vêtit. L’orange et le jaune ne sont pas sans rappeler les couleurs que l’on retrouvait dans les premiers wax. Le choix de couleurs peut aussi s’expliquer par l’envie d’une vraie démarcation avec le blanc des autres lignes. Le choix de placer ces couleurs vives près du blanc, permet aussi au spectateur de ne pas réaliser que les espaces blancs sont souvent dans le même sens. On se perd rapidement dans l’espace, on ne sait pas où se trouve le début, ni la fin mais on sait qu’il est là. Les légers décalages de couleurs apportent un effet un peu de 3D et de « bug », ce qui est très intéressant pour l’époque. En termes symboliques, le changement de direction des lignes peut accentuer le sens que les vendeuses ont insufflé au tissu. L’oranges et le rouge sont plus attrayants que le reste, comme les différentes femmes qui peuvent attirer un homme marié. L’épouse aurait donc peur que son mari cède à la tentation et aille voir d’autres femmes et lui tourne donc le dos, comme les espaces de couleur le font à l’espace blanc.

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Déclinaison de l'imprimé « Chéri, ne me tourne pas le dos » VLISCO, «Vlisco Chéri, ne me tourne pas le dos - wax hollandais », Vlisco, https ://www.vlisco.com/fr/fabric/cherie-ne-me-tourne-pas-le-dos/

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Falling Comb GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.244.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

FALLING COMB CRAIG MCCANN 1999 Utilisé dans presque tous les foyers, il est l'objet représentatif de la capillarité africaine.

Cet objet étant assez emblématique, il était tout à fait normal de le retrouver sur un wax. Ce wax met en place des peignes qui se superposent, rangés sur des diagonales. Sur la figure de la page de gauche, une rangée sur deux est composée de peignes de couleur verte et jaune. Les couleurs utilisées ici sont le jaune, le vert, le rouge et le bleu foncé. Trois de ces teintes étant des couleurs primaires.

9. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.224.

On pourrait presque y voir les couleurs d'un drapeau. Le peigne est représenté en quelques traits pour permettre une reconnaissance rapide et le fond a probablement été recouvert de noir avant de placer les autres couleurs. Les soins capillaires sont extrêmement importante chez les femmes africaines car dans la plupart des sociétés, les cheveux sont signe de féminité.9 Cependant avec la colonisation, les cheveux de ces femmes ont été « ridiculisés » et rejetés car ne correspondent pas aux standards de beauté européens. Le cheveu africain étant crépu, il est difficile à coiffer et nécessite un entretien rigoureux pour qu’il reste en bonne santé. Avec l’arrivée de la globalisation et la glorification du cheveu lisse, certaines femmes noires, complexées par leurs cheveux, ont commencé à s’appliquer des produits tels que des défrisants, ayant pour base énormément de produits toxiques, pour se lisser les cheveux pour atteindre la lisseur des cheveux « blancs ». Le cheveu crépu étant un cheveu difficile à entretenir, il est une dépense assez 85


importante dans le budget « beauté » des femmes noires. Qui plus est, pour les femmes immigrées ou afro-descendantes, le problème est beaucoup plus présent étant donné que peu de magasins vendent les produits nécessaires à l’entretien de leurs cheveux. Les cheveux occupent une grande place dans la vie d’une femme africaine et c’est pour cela qu’il existe une pléthore de techniques de tressage afin de protéger le cheveu : que ce soit des cornrows, des locks, les tresses, les perruques, les nattes collées etc…

10. Le mouvement Nappy est un mouvement qui encourage les femmes et les hommes d'origine africaine à conserver leurs cheveux naturels à la texture afro. Il est né aux États-Unis dans les années 1960 et connait une recrudescence depuis le début des années 2000. Il désigne les Noirs qui portent leurs cheveux afro- dans leur état naturel, enroulés, crépus ou bouclés. Le mot « nappy » a été dénigré depuis la traite des esclaves dans l'Atlantique. Par la suite, certains Afrodescendants se sont réappropriés le mot afin d'y donner une connotation positive. Dans les pays francophones, il est souvent interprété comme un mot-valise composé du mot « natural » et du mot « happy » en anglais WIKIPEDIA, « Natural hair movement »,Wikipedia https ://en.wikipedia.org/wiki/Natural_hair_ movement

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Pendant une longue période, avoir ce type de coupe de cheveux était d’ailleurs assez mal vu car vu par beaucoup comme « pas professionnel », « trop négligé » mais avec l’émergence des figures prônant l’amour de soi et du mouvement « nappy10 », beaucoup de femmes noires commencent à s’émanciper de ces discriminations et à être fières de leurs cheveux crépus.


Autre imprimé utilisant le peigne comme principal motif. Ici, c'est un symbole Adinkra signifiant « beauté naturelle » GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.43.

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

11. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.295.

12108 NICHEMTEX 2005 La jupe appartient au vestiaire occidental. Vêtement cousu, elle concurrence le pagne drapé qui demeure l'habit féminin traditionnel sur le continent africain. Cependant, les créateurs ont réussi à réconcilier les deux options en développant la mode des jupes en wax.11 Dans l’inconscient collectif européen, la jupe est l’un des vêtements les plus représentatifs de la féminité. De la Renaissance jusqu’au vingtième siècle et l’arrivée du pantalon, elle était généralement portée uniquement par les femmes. La démocratisation du wax, a permis que celui-ci ne soit plus utilisé seulement dans sa forme rectangulaire de pagne, mais qu’il soit aussi cousu sous plusieurs formes : pantalon, jupe, robe, t-shirt et même sac à main ! Il est devenu tellement répandu chez les Africains que c’est dorénavant un tissu de tous les jours. La composition de ce wax est assez classique : le motif répété est une jupe plissée avec des petits pois noirs dont les traits sont assez simples. Le contour est noir et la répétition en diagonale. L’utilisation du vert et du jaune reste classique car ce sont des couleurs proches sur le cercle chromatique ce qui est source d’homogénéité. Le fond est tramé avec du vert mais quelques taches de jaune apparaissent malgré tout. Ce wax est très classique dans sa composition et dans sa façon d’agencer son motif, il fonctionne car les couleurs sont proches ce qui, singulièrement, ne choque pas. Certaines jupes sont tramées de vert, avec fond jaune sur petits points noirs, ce qui amène un côté exotique, plutôt plaisant.

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12108 GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.295.



STATUT SOCIAL À ses débuts, le wax a souvent été un support de communication permettant aux gens d’afficher un certain statut social. Étant un tissu assez coûteux, il n’était réservé qu’aux élites. Certains en portaient pour afficher leur niveau d’éducation ou encore pour mettre en avant, soit leur propre fortune ou celle de leur époux. se. Cependant, avec la démocratisation du tissu à l’arrivée des imitations chinoises, il est peu à peu devenu un habit de la vie de tous les jours.


L'argent s'envole GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.70.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION :

NOM :

1. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.70.

HIRONDELLE/ L'ARGENT S'ENVOLE TONNIE WOUDA 1949 Ce dessin a connu un énorme regain de popularité au millieu des années 90 à travers toute l'Afrique de l'Ouest. Appelé « Hirondelle » ou « Fokker » dans les régions francophones, il exprime un avertisssement au Ghana où il illustre l'expression « même l'argent s'envole ». Il est décliné en différentes palettes chromatiques, mais c'est sa version avec une médaillon blanc sur fond bleu roi qui reste la plus vendue.1

Ces hirondelles, placées toutes dans la même direction, évoquent une nuée en route vers le Sud. La répétition de l'oiseau crée un motif uniforme avec, comme fond, une autre répétition de lignes horizontales, lesquelles apportent du mouvement à l'ensemble. L'oiseau est entouré d'un cercle de couleur complémentaire afin de le faire ressortir. L'illustration de l'oiseau est simplifiée afin de permettre une identification rapide. Les lignes de fond suggèrent un courant qui peut s’apparenter au vent. La signification de ce wax (voir son titre) pourrait être que l'argent disparaît aussi vite que l'envol d'un oiseau mais finit, parfois, par revenir comme l'hirondelle qui revient après l'hiver. Ce wax rappelle aussi le logo de la Poste française, bien connu dans l'univers visuel européen. Graphiquement, il est efficace. L’œil reconnaît rapidement l’oiseau et le mouvement qu’on essaie d’insuffler dans l’ensemble. Le choix du jaune et du bleu émeraude attire le regard Une démarcation rapide se fait également et aucune incohérence visuelle ne dénote. Les petites tâches aèrent la composition et rajoutent ce sentiment d’envol et de déplacement. Sur l’illustration en pleine page, les épaisseurs de traits ne sont pas les mêmes selon les endroits. Cela rajoute un effet supplémentaire, 93


faisant penser aux variations du vent dans le ciel. Ces lignes guident aussi le regard de l’observateur, car elles nous amènent à suivre le sens de lecture instauré par le créateur. Ces choix graphiques judicieux sont la cause probable du regain de popularité de ce motif.

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Adaptation du motif en Bomber Harris M, « Bomber Hirondelles Bleu », Harris M, https ://www.harris-m.com/products/bomber-hirondelles-bleu

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Queue de cheval/ Chasse-mouche GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.46


QUEUE DE CHEVAL/CHASSE- MOUCHE CRÉATEUR : PIET SNEL ANNÉE DE CRÉATION : 1950

NOM :

2. WIKIPEDIA, « Chefferie Akan », Wikipedia https ://fr.qaz.wiki/wiki/Akan_chieftaincy 3. GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », éditions La Martinière, 2017, p.46

Ce motif représente un attribut des chefferies akan2, un chasse-mouche en crin de cheval. Son agencement en quatre cases correspond à une codification très appréciée.3 Le fond tramé est assez simple, un effet de lumière est créé sur le chasse-mouche. Il y a une utilisation des couleurs verte, orange, bleue pour les ombres et le blanc du tissu réservé pour créer un petit halo de lumière. La complexité de réalisation de ce motif réside surtout dans les espaces de couleur qui ont dû être réservés à chaque étape afin d’obtenir cet aspect. Garder les traits, sans pour autant abimer le fond ni faire baver les couleurs, est un vrai défi technique. Cela pourrait expliquer aussi la popularité du motif.

4. WIKIPEDIA, « Akan (peuple) », Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Akan_(peuple) 5. Siège ou litière porté à bras d'hommes, parfois à dos de chameau ou d'éléphant, en usage dans les pays orientaux. CNRTL, « Palaquin », cnrtl https ://www.cnrtl.fr/definition/palanquin

Qui plus est, le choix des couleurs est aussi motivé par le choix géographique. En effet, ces couleurs sont très populaires en Côte d’Ivoire, pays où l’on peut trouver quelques branches de la famille Akan (les lagunaires et Baoulé-Agni).4 Le chasse-mouche, souvent fait de poils d’animaux, était un insigne royal que les chefs Akans utilisaient lorsqu’ils montaient dans leurs « palanquins5 ». Avec le chasse-mouche dans une main et l’épée de cérémonie dans l’autre. La peuplade Akan a été l’une des premières à être confrontée aux wax. Il est donc normal que les premiers éléments représentés soient des objets faisant référence à leur culture afin de les motiver à acheter les tissus. Beaucoup d’insignes royaux de cette population sont ainsi retrouvables dans plusieurs wax de l’époque et même d’aujourd’hui. Cependant, beaucoup de wax illustrant des chefferies de ce peuple ont maintenant perdu leur sens originel et se sont adaptés aux envies et besoins des nouvelles clientes. 97


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

6. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.159.

BEST SELLERS ABC 1988 Certaines femmes d'Abidjan ou encore de Lomé ont l'habitude de prélever des bandes de chacun de leurs wax afin de les assembler en "n'zassa" (mélange, brassage). Arborer ce patchwork est une façon de faire étalage de toute sa richesse en une fois. Ce dessin en est l'illustration parfaite. Dans cette composition, sont combinées plusieurs créations de la marque ABC tels que Dice (non visible sur l'image ici), New Fine Trail et Le chasse-mouche des rois Akans.6

Le mélange de différents styles graphiques par l’utilisation du patchwork est astucieux et apporte une originalité graphique très prononcée. Le choix de chaque tissu assemblé ici est réalisé méticuleusement. De ce fait, une pléthore de symboles peuvent y cohabiter.

Dice VLISCO, « Mkupulu Oka (corn seed) », https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/140575/?story=mkpulu-oka-corn-seed

La cohérence graphique qui en naît est d’autant plus surprenante car il s’agit de tout un univers (si on ne connaissait pas le passif de ce pagne). Le choix des wax pour constituer l’ensemble fonctionne graphiquement bien et est agréable à l’œil. L’assemblage des couleurs (rouge, jaune et noir ainsi qu’un peu de blanc) n’est pas choquant et rend tout homogène car celles-ci se marient bien ensemble. Malgré tout, la totalité parait un peu brouillon (surtout la juxtaposition de certains détails) et on réalise vite, si on s’y connaît en pagne, qu’aucun des éléments n’est censé se trouver là où il est.

New Fine Trail VLISCO STORIES Team, « Fleur de piment », https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/140690/?story=aso-bayere

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En revanche, ce qui crée l’homogénéité, c’est que les traits sont d’épaisseur assez semblables pour que, visuellement, cela ne dénote pas. Le choix des endroits de découpe est plutôt ingénieux et l’effet qui en naît est très beau. La technique de réalisation engendre un sentiment d’authenticité et de rareté à l’objet, lequel est unique !


CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Best Sellers GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.159.


Snake Skin Purse GROSFILLEY Anne, " Wax, 500 Tissus ", éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.272.


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

7. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.272

SNAKE SKIN PURSE RACHEL WOOD 2002 Ce dessin se prête à trois niveaux de lecture. Tout d'abord, il fait écho au grand classique Skin A10789 crée par Ebenezer Brown Fleming. Ensuite, il évoque le porte-monnaie et la richesse à laquelle aspirent les femmes qui le revêtent. Enfin, on peut y voir une allusion au braconnage qui a longtemps approvisionné la maroquinerie occidentale en peaux de reptiles, avant la mise en oeuvre de mesures de protection des espèces.7 Faisant référence à un autre wax déjà très connu d'Ebenezer Brown Fleming, celui-ci a été revisité et placé dans un tout autre contexte. Représentant la richesse, le motif Skin de Brown Fleming a été appliqué en tant que motif sur un portefeuille. Les objets de maroquinerie revêtant une peau d’animal exotique sont souvent achetés par les femmes riches. C’est pourquoi ce wax est porté généralement par deux catégories de femmes : celles qui veulent montrer aux gens qu’elles ont les moyens de s’acheter ce qui est illustré et celles qui ont véritablement l’objet et qui veulent afficher leur richesse. Généralement, lorsque l'on retrouve des objets de luxe sur des waxs, c'est le tyupe de message que l'on veut faire passer. L’illustration de ce wax est un portefeuille, avec des écailles de serpent. Certaines sont des formes pleines, d'autres pas. Le fond, quant-à lui, est rythmé par de petits cercles liés les uns aux autres par un trait, qui se répètent jusqu'à occuper l'entièreté du wax. On voit aussi que le contour des portefeuilles crée un léger vide permettant de voir le fond. Celui-ci est rempli avec une couleur jaune ocre surplombée de petites bulles blanches. Les trois couleurs présentes sont : le jaune ocre, le violet et le noir pour les traits. Les formes circulaires rondes ont été placés après les portefeuilles car on peut observer un espace vide nous permettant de voir le fond. 101


Graphiquement, ce wax fonctionne assez bien car cette réinterprétation a ses propres codes identifiables pour éviter la perte de repères. Le fond étant uniforme, l’accent est mis sur les portefeuilles. Lorsque le tissu est porté en vêtement, cet arrière-plan disparait pour mettre en avant le portefeuille. Le choix du mauve avec, en couche supérieure les illustrations dans un même ton, rend la composition homogène car avec du noir, on aurait perdu en lisibilité. Cependant le choix du jaune ocre (légèrement estompé par des bulles de blanc) comme couleur d’arrière-plan enlève peut-être cet aspect de « richesse » que le wax est censé amener. Après, cet ocre peut aussi évoquer la couleur de l’or. Les deux sens s’entrechoquent dans l’interprétation. La personne qui porte le tissu influence aussi la manière dont sera perçu le message de cet imprimé.

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Par ailleurs, avec la démocratisation du wax, l’imprimé peut se retrouver sur tout type de support, y compris les portefeuilles. OTAKE Valou Elo, « Sac Wax Pochette », https://www.etsy.com/fr/listing/726699384/sac-wax-pochette-sac-bandouliere-tissu

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Millionnaire GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.202


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

8 .GROSFILLEY Anne, »Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.202.

MILLIONNAIRE BRENDA COCKS 2002 Le nom millionnaire vient de Madame Lawson, une Nana Benz togolaise fondatrice de la société Manatex. Ce dessin est associé à un dessin de la marque ABC figurant une main saissisant un amas de livres sterling. De nombreuses devises tels que le dollar ou encore l’euro inspireront d’autres illustrations de wax hollandais et anglais.8 Une main au centre de l’image tient une liasse de livres sterling et, sur les côtés, se trouvent deux grands blocs orangés dans lesquels on peut voir des lignes horizontales et verticales ondulées qui se croisent perpendiculairement. La main est tramée, pour permettre la distinction avec le fond habillé de lignes verticales et horizontales dont le point de croisement est précisé par un carré. La façon dont les lignes du fond sont représentées peut évoquer des barreaux de prison. Trois couleurs sont utilisées dans ce wax : le blanc du tissu, l’orange (prédominant) et le noir pour les traits. Une juxtaposition des traits noirs et du contour blanc de la main est aussi faite pour tenter un effet d’ombrage et souligne l’élément principal. Le choix de la main tenant une liasse de billets fait référence à l’argent que les Nana Benz se faisaient dans la vente des waxs. Les billets à l’intérieur de la main sont des livres sterling, car l’Angleterre avait et a toujours d’une certaine manière, une main mise sur la production de wax vendus sur le continent. La « poigne » qu’a la main sur l’illustration peut faire également référence à la rigueur et la force avec lesquelles les Nana Benz tenaient leurs business. Les lignes du fond peuvent évoquer, dans l’imaginaire collectif, une prison. Peut-être que ces femmes devenaient, en quelque sorte, prisonnières de leur argent ?

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A10170 GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.320.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

A1070 JOS REINERS 2008 La montre est un signe extérieur de richesse, le fait de l'intégrer dans un wax est tout à fait dans l'air du temps. Pour ceux ne pouvant se payer une vraie montre, c'est un moyen de montrer son appartenance à une certaine classe sociale. Et pour ceux ayant les moyens de se la payer, c'est un signe de distinction sociale.

Dans cet imprimé de Jos Reiners, le motif de la montre est répété sur le tissu en respectant une implantation au sein de plusieurs rectangles dans lesquels se trouvent diverses trames. Le premier présente des lignes qui se croisent, un autre est rempli de petits points noirs. Un troisième possède un fond tapissé de chiffres. Ces trois se répètent de façon aléatoire mais ont systématiquement deux à trois illustrations de montre en leur centre. Parfois, certaines montres débordent d'un rectangle sur un autre. La couleur prédominante est le bleu (foncé, tendant vers le noir ou, au contraire, très clair). Certaines formes ont des fonds tachés par les craquelures. La montre est, ici, représentée en quelques traits afin d'être facilement reproductible sous forme de trame. Comme en occident où certaines catégories sociales aiment afficher leur position avec des montres luxueuses, ce wax envoie, juste en image ici, un message semblable. Ainsi, ceux ne pouvant pas se payer l’objet représenté, peuvent le porter pour faire croire aux gens qu’ils croisent qu’ils sont riches et qu’ils sont des personnes socialement bien placées. Comme l’illustration est simplifiée, on peut y « projeter » n’importe quel modèle. Ce qui est intéressant dans ces wax, c’est que ce n’est pas souvent une marque ou un visuel précis qui est illustré mais c’est l’idée même de l’objet! On ne veut pas forcément posséder l’objet, on veut afficher la position sociale qu’il apporte. Il s’agit de montrer son statut ou même 107


un statut supérieur à sa position sociale réelle. L’ingéniosité de l’impression est à remarquer : plusieurs couches et donc étapes ont dû être ajoutés afin d’obtenir un tel résultat. Plusieurs couleurs ont été utilisées et apposées minutieusement. Les montres ont été imprimées en premier, puis les différentes couches de couleurs et ensuite les trames. Même si il y a certains « ratés » visibles, une tentative technique et créative de la part de Jos Reiners peut être ici signalée.

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Collaboration entre la marque Vlisco et Komono. MSK NY, « Tik-Tak: Vlisco and Komono present the African Print watch », https://www.africanprintinfashion.com/2015/03/tik-tak-vlisco-and-komono-present-the-african-print-watch.html

Avec la popularisation du wax en Europe, de nombreuses collections célébrant le tissu ont émergées. Cette collaboration entre la marque Vlisco et Komono en est le parfait exemple. 109



LA REPRÉSENTATION DE LA RELIGION La religion a toujours occupé une place importante dans la vie des multiples populations africaines. Elle a toujours exercé une influence sur la vie quotidienne des nombreux pratiquants. Il ne s’agissait pas de grandes religions monothéistes, comme on les retrouve en Europe, c’étaient plutôt des cultes qui variaient selon les régions et les peuples mais avec, cependant, quelques bases communes. Ainsi, la plupart des cultes étaient empreints d’animisme. Dans les religions animistes, on considère que tout être (animé ou même inanimé) a une âme. L’homme y fait corps avec la nature et se sent en communion avec les êtres divins. Le concept de dieu créateur (en plus d’autres divinités) était cependant déjà présent dans la plupart de ces religions traditionnelles d’Afrique Noire. Ainsi que le culte des ancêtres : ceux-ci, vus comme des intermédiaires entre le monde des morts et celui des vivants, étaient honorés à de nombreuses occasions. Si il est bien traité, l’ancêtre défunt protège alors ses descendants, d’où tous les hommages et célébrations... Enfin, on y retrouvait des superstitions (prescrits, interdits, rituels) : interdiction de siffler la nuit pour ne pas attirer les mauvais esprits, il faut cracher devant sa porte avant de boire un verre d’eau, etc. De nombreux rituels, presque tous destinés à chasser les malheurs et les mauvais esprits, émaillaient la vie des croyants. Autre coutume majeure : des rites de passage étaient organisés pour le passage de l’enfance à l’âge adulte. 1. INCONNU.E, «  Les religions traditionnelles d'Afrique Noire » https ://www.museedesconfluences.fr/sites/default/files/Medias/PDF/les_religions_traditionnelles_dafrique_noire.pdf

À l’issue de ces derniers, une grande fête était célébrée, où l’on s’efforçait de communiquer avec les ancêtres représentés par des statues ou des masques.1


La religion occupe encore aujourd’hui, une place importante dans la vie de nombreux habitants du continent. Au quotidien, lors des célébrations funestes ou joyeuses, lors des repas et même dans la sexualité, elle régit des pans entiers de l’existence des habitants. Il est donc normal de trouver des wax affichant des figures religieuses, la plupart trouvant leur origine dans la christianisation de l’Afrique subsaharienne ayant réellement commencé fin du 18e.

2. ZORN Jean-François, « Le temps long de la christinisation en Afrique », Cairn, https ://www.cairn.info/revue-afriquecontemporaine-2014-4-page-132.htm 3. B OUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.89.

Ce sont tout d’abord les protestants britanniques qui, portés par la vague anti-esclavagiste, ont été les premiers missionnaires occidentaux. Ils fondèrent, la ville de Freetown, en Afrique de l’ouest, afin de recevoir les esclaves d’Europe libérés et de les réimplanter sur le continent.2 Après ces premiers arrivages, de nombreux autres suivirent, engendrant la création d’autres villes, lesquelles deviendront les berceaux de la première vague d’évangélisation protestante de l’époque. Ces évangélisations se sont faites principalement en Afrique subsaharienne, où, à l’origine, les religions traditionnelles africaines étaient bien présentes. Ces dernières n’ayant pas de liens solides entre elles, ni d’écrits (car transmission orale) et encore moins d’institutions ou d’encadrements, n’ont pas pu faire front commun contre la percée du christianisme dans la région.3 Parfois il y a eu des tentatives de résistance, par la violence, tentatives menées par les peuplades plus réticentes. On sait, par ailleurs, que les colons diabolisaient les anciennes traditions, car les jugeant archaïques et barbares. Il reste cependant encore de nos jours des groupes de personnes pratiquant ces religions traditionnelles africaines. Et on peut aussi en relever des traces dans de nouvelles églises créées par des pasteurs locaux. Les nouvelles religions permettant une plus grande liberté d’expression, il arrive que certains éléments de religions traditionnelles soient incorporés dans les rites chrétiens (par exemple, les rituels de

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guérison), entraînant ainsi une combinaison de courants religieux. Les pasteurs de ces nouvelles religions « mixtes » deviennent parfois ainsi des chefs de culte et abusent quelquefois de ce statut particulier pour amasser de l’argent. Devenus alors des figures de richesse et d’influence dans leur communauté, ils y symbolisent le succès et la prospérité aux yeux de leurs fidèles, qui imaginent qu’eux aussi peuvent « réussir  » s’ils suivent les préceptes du chef de culte. Les adeptes du culte aspirant à une élévation sociale, essaient, par leurs propres moyens (peut-être plus modestes) d’arriver à ce stade et l’imprimé textile wax peut être le support de leurs aspirations. « Pagne d'uniforme de l'église catholique de Côte d'Ivoire dans la ville de Dabou » GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.58.

Le wax est en effet parfois utilisé, comme déjà cité auparavant, comme l’emblème d'une situation sociale. Les gens pauvres n’ont souvent pas les moyens de se payer des parures chères, mais certains font l’effort, quand même, d’acheter des wax de qualité afin d’afficher un certain standing. Le jour de la messe, beaucoup de fidèles revêtent leurs plus beaux wax afin de faire preuve de respect envers le culte, mais pour aussi montrer qu’ils sont des personnes soignées.

Exemple de fancy wax représentant la VIerge Marie GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.59.

En termes de conception et de graphisme, ces textiles sont semblables aux autres wax, avec cependant quelques nuances. On y retrouve ainsi la même technique que pour le wax politique, c.-à-d impression du motif puis surimpression de photographies pour certains wax. Celles-ci sont bien souvent inspirées de l’iconographie de la religion chrétienne (la vierge Marie, la nativité, la crucifixion, l’agneau pascal etc…) Beaucoup de ces imprimés sont issus de productions locales et sont souvent des textiles de type « fancy ».

Exemple de fancy wax représentant Jésus GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.57.

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

Symbole Dwennimmen INCONNU.E, « Dwennimmen », Adinkra Symbols, https  ://www.adinkrasymbols.org/symbols/dwennimmen/

THREE THREE PIET SEGERS 1958 Ce dessin est tapissé du motif Akan « Dwennimmen », représentant l'affrontement de deux béliers, dont les courbes recourbées sont moins dangereuses que leur détermination à gagner le combat, ce motif renvoie à la force, l'humilité et à l'expérience. Il fait parti du glossaire graphique de l'Adinkra, étoffe artisanale revêtue lors des funérailles en Côte d'Ivoire et au Ghana. Dans le wax, il est associé simplement au chiffre 3 en miroir et nommé « three three ».4

4. G ROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.71.

Par la superposition de couleurs chromatiques assez proches, la FIG 1 est quasi illisible donc ne fonctionne pas. Un rouge moins clair voire un brun plus clair aurait probablement permis de mieux identifier le motif. Malgré ça, il y a quelque chose de graphiquement intéressant. L'illustration de la page droite, par contre, marche assez bien : le choix du vert, du brun et le blanc du fond, permettent d’identifier le symbole. Le fait que de petites lignes noires émanent des idéogrammes rythme le fond, même si cela aurait tout aussi bien fonctionné sans.

FIG 1 : Autre version de Three three GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.71.

Les bulles de blanc favorisent la compréhension d’ensemble et nous aident à mieux visualiser les autres éléments. Le choix du vert et du brun, qui sont presque complémentaires, aident à détacher le symbole du fond et le fait qu’une touche de vert soit posée sur certains idéogrammes et pas d’autres intrigue. Ceux en vert sont-ils les gagnants ? Est-ce une espèce de tournoi ? L’introduction répond à cette question. Le brun et le vert peuvent aussi évoquer le retour à la terre, ces couleurs étant associés à la terre.

Déclinaison de Three three AVOSATO, « Three three », Afrikea, https ://www.afrikrea.com/en/article/threethree-1-35m-1-15m-ankara-wax-print-beige/ PSF75S9

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Three three GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.71.


Turtle GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.128.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

5. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.128.

TURTLE ABC 1982 Dans la culture populaire, la tortue terrestre, à la fois très ancienne – elle a précédé l’apparition de l’homme – et d’une longévité exceptionnelle, renvoie à la nuit des temps. Les contes lui prêtent des qualités positives : bien que lente, elle se révèle avisée et clairvoyante, douée d’une forte capacité d’anticipation; de plus, elle porte sa maison sur le dos, marque de son indépendance.5 Sur ce wax est représenté une tortue multipliée de façon à ce que chaque exemplaire soit relié aux autres. Le graphisme est simple, avec des contours noirs très marqués afin de se détacher du fond. Ce dernier est recouvert de sortes de vaguelettes aux contours noirs pouvant rappeler la peau écaillée ou très rugueuse de la tortue. La carapace de la tortue est généralement recouverte de formes rectangulaires, qui sont ici remplacées par des motifs pouvant faire référence à des pierres précieuses ou à des formes de vie primitives. Ces petits symboles présents sur la carapace de la tortue peuvent évoquer certains idéogrammes que l’on peut retrouver sur certaines poteries ou éléments ornementaux anciens. Peut-être que ce sont des signes anciens évoquant des traditions oubliées ? Ces formes, si l’on suit la symbolique de la tortue, peuvent nous faire penser également à tous les éléments précieux qu’une personne possède et qu’elle a dans sa « maison ». es motifs sur la carapace de la tortue se confondent tous très bien ensemble, ce qui ne crée pas d’incohérence esthétique. Une homogénéité se crée alors dans le visuel, qui souligne l’importance dans la tortue dans la composition graphique. Les couleurs ajoutent également une dimension d’authenticité à l’animal, car ce sont des couleurs assez ocres pouvant faire penser à de l’or et à la terre rougeâtre. Cette couleur rouge évoquerait alors le retour à la terre 117


6. S MITH Alex et AYAVOR O J os eph , « C ro s s c ultural tex tile s - link in g Manchester to West Africa through textiles », Creative Hands Foundation, https ://creativehandsfoundationarts.files. wordpress.com/2015/10/cross-cultural-textiles1.pdf, p.37.

nourricière, celle dont tout vient. On retrouve encore ici les taches de blanc, résultant du procédé d’impression. Une deuxième signification est apportée par Alex Smith et Joseph Ayavoro dans « Cross Cultural Textiles » sur la signification de cet imprimé textile : Dans ce cas de figure, il signifie « Akiykyidea Kyi, Akan ».Le nom de ce tissu est universel au Ghana et est associé à de nombreux proverbes comme « Wafa, me nwa » signifiant : Tu m'as pris pour un escargot.Ce motif peut être aussi porté par une femme mariée afin de signifier à son mari qu'il ne la traite pas bien. Il est aussi associé à un python disant « tu penses que je suis un escargot mais je suis un python mortel ».6

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Le motif imprimé sur textile Lien de l’image supprimée de sa source.

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Jinamin Square GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.216


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

7. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.216

JINAMIN SQUARE MARGARET HICKSON 1999 Exprimant courage et humilité, le symbole au centre du cercle appelé " Gye Nyame " signifie que la personne qui l'arbore ne craint personne "à l'exception de Dieu ". Au Ghana, il est représenté sur une multitude de supports, depuis les sièges en bois sculpté jusqu'au portail des maisons.7 Ce pagne est l’exemple parfait du wax arborant des signes religieux de la peuplade Akan de l'ancien royaume Ashanti au Ghana. Cette région a été une des portes d’entrée de l’importation du wax sur le continent africain. Beaucoup de pagnes ont été créés dans le but de séduire cette peuplade. Religieusement connoté, ce wax peut fonctionner comme talisman pour la personne qui le porte. Il fait permet également d’afficher son appartenance religieuse dans la vie de tous les jours. Cette composition très codifiée reprend deux éléments emblématiques des textiles Ashantis du Ghana : les bandes structurant le dessin sont inspirées des tissages kente en soie des dignitaires avec au centre le motif Gye Nyame, idéogramme qui trouve son origine dans l'étoffe funéraire Adinkra.8

8. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.216 9. Le kenté est un tissu africain originaire du Ghana et tissé par le peuple Akan-Ashanti depuis le 12e siècle. C’est un tissu royal au caractère sacré, et les notables le revêtent pour les cérémonies drapé à la manière de toges romaines. Un kenté est composé de bandelettes multicolores tissées à partir de fils de coton ou de soie sur un métier à tisser traditionnel. Les bandelettes sont ensuite cousues côte à côte. INCONNU.E, « les kentés ashanti du Ghana », Africouleur, https ://w w w.africouleur.com/boutique/tissus-africains/kentes-africains/

Cet idéogramme centré attire l'attention, car là est le message à saisir. Cet ensemble cerclé est placé dans un carré dont les contours sont stylisés, en une forme rectangulaire dans laquelle se trouvent quatre lignes d’épaisseur similaire. À chaque extrémité du rectangle se trouve un carré dans lequel est inséré un motif évoquant le kente9, tissu traditionnel ghanéen. Ces rectangles sont ensuite placés en diagonale et posés les uns à la suite des autres pour former le contour carré dans lequel est contenu la forme ronde « gye nyame ». Le fond est rythmé par des lignes ondulées s’entrecroisant. Trois couleurs sont utilisées ici : le rouge, le jaune et le noir. La superposition du jaune et rouge crée de l’orange. 121


Le jaune ressort bien car il remplit la forme ronde qui occupe le centre du motif. Dans l’élaboration du kente, tissu dont ce wax est inspiré, le choix des couleurs est très important, car il est porteur de sens. 10. WIKIPEDIA, « Kente cloth », Wikipedia, https ://en.wikipedia.org/wiki/Kente_ cloth

Issu du wikipédia10 expliquant ce qu’est le kente, on peut retrouver le sens des couleurs dans l’élaboration du kente : Le jaune représente la royauté, la richesse, la fertilité, la beauté ; le rouge symbolise les rites sacrificiels, les humeurs politiques et spirituelles ainsi que la mort ; enfin, le noir représente les rites de passage, le deuil et les funérailles ainsi que l’esprit des ancêtres et la maturité. En analysant le choix de ces trois couleurs ainsi que le sens de l’idéogramme « Gye Name », on constate des thématiques similaires comme celle de la mort ou celle du passage d’un stade de la vie à un autre. En effet, on comprend alors ceci : celui qui porte ce wax veut affirmer qu’il se trouve grandi, après avoir affronté diverses épreuves dans sa vie et qu’il est maintenant pourvu d’une humilité, d’une maturité et d’un courage qui font qu’il ne craint plus personne, à part Dieu ! Les Akans ont été l’une des premières peuplades dont les symboles ont été représentés dans les tissus wax. Échangeant ces derniers contre de l’or, les colons profitèrent de cette « union » pour s’attirer les faveurs d’une clientèle nouvelle : les Africains. Cela explique pourquoi beaucoup de motifs Akans sont représentés dans l’univers textile du wax. Pour en revenir au graphisme de ce wax, il fonctionne assez bien. L’utilisation du rouge et du jaune rend visuellement très bien. Le noir, quant-à lui, ressort assez bien sur le jaune, ce qui fait que l’on reconnaît rapidement l’élément mis en avant. Qui plus est, l’utilisation de ces couleurs spécifiques apporte une seconde lecture (symbolique) à ce wax, ce qui le rend doublement intéressant. La façon de positionner l’idéogramme au centre du cadre est ingénieuse car elle met l’emphase sur la symbolique du « Gye Nyame ». Par ailleurs, le contour noir du cercle amène un côté graphique également intéressant.

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Les vaguelettes du fond apportent une impression de mouvement à l’ensemble en minimisant la cassure apportée par le contour du cercle. Les bulles du fond, même si accidentelles, rythment l’ensemble et produisent un effet de matière encore plus fort.

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Cauris GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.247.


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

11. G ROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.247.

CAURIS RACHEL WOOD 2000 Les cauris sont des petits coquillages blancs qui viennent des Iles Soulou et Maldives. Ils ont souvent servi de monnaie d'échange en Afrique Subsharienne. Associés à la richesse économique, ils portent aussi une valeur spirituelle, sacrée. Dans l'art divinatoire, le voyant jette un certain nombre de cauris et fait son interprétation selon les positions qu'ils prennent. Ceux qui leur confèrent un pouvoir magique.11 Cette illustration représente des cauris tous ornés du même motif : de petits points, pouvant faire penser à des tentacules lumineux. Ceux-ci disparaissent en rejoignant l'extrémité de l'objet. Trois modèles de cauris sont représentés : un de couleur bleu foncé avec ces points blancs, un deuxième de couleur vert très foncé avec des points noirs et un dernier cauris vert clair avec des points vert très foncé. Ils sont alignés l'un à côté de l'autre et répétés sur plusieurs lignes. Le fond, quant-à lui, est brun, avec énormément de petites tâches jaunes. Des lignes noires qui se croisent forment ce qui peut évoquer un grillage. La couleur de fond est tachetée, à cause de la technique d'impression. Les couleurs : vert, bleu et ocre sont omniprésentes. Les couleurs choisies vont assez bien ensemble et les dégradés créés par les points noirs sur chaque cauris apportent une touche graphique. Graphiquement le choix du vert comme couleur apporte un côté naturel à l'ensemble. L'utilisation du dégradé et d'une couleur qui se rapproche visuellement de ce vert apaise le regard et nous amène à nous attarder sur ce qui se passe dans le dessin. Des petits défauts dûs à l'application de la couleur donne une touche graphique à l'ensemble et un côté vieux et ancien. Il y a aussi le fait que certains cauris soient un transparents qui donne le ton au reste. Il y a une plus-value qui nait de cette transparence 125


et qui « anime » le dessin. Les cauris sont des coquillages très importants dans la culture africaine, c'est un cadeau que l'on peut offrir aux enfants dés leur plus jeune âge comme porte bonheur. Ils sont également utilisés dans des cérémonies vaudous et accrochés parfois à certaines entités spirituelles que l'on peut voir dans les villages. C'est un objet qui a un pouvoir spirituel assez fort, surtout dans la religion animiste, qui fut l'une des plus importantes en Afrique de l'Ouest.

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Autre motif évoquant le thème du « Cauris » Lien de l’image supprimée de sa source.

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VUE SUR LA SOCIÉTÉ AFRICAINE Le wax a également été un support pour aborder des problèmes de société sous forme figurative ou abstraite. Que ce soit la santé, l’éducation, la sexualité, la maladie… Beaucoup de thématiques ont pu être abordées sous couvert du wax. Par ailleurs, il a aussi été utilisé comme support publicitaire pour évoquer des questions comme les gestes à avoir afin d’empêcher la propagation du VIH. En effet, un certain pourcentage de la population étant illettré, Le côté figuratif du wax permettait une propagation rapide de l’information chez les milieux plus défavorisés. Il suffisait alors d’imprimer les illustrations choisies sur un wax et le distribuer à la population locale.


Mama Benz VLISCO, « Mama Benz », https ://www.vlisco.com/fr/fabric_story/mama-benz/


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

1. VLISCO, « Mama Benz », Vlisco https ://www.vlisco.com/fr/fabric_story/mama-benz/

MAMA BENZ VLISCO INCONNUE Ce tissu est un clin d’œil aux Mama Benz, les revendeuses de produits Vlisco ( aussi appelées Nana Benz ). Grâce à leur réussite professionnelle, ces femmes ont pu acheter des Mercedes-Benz auxquelles elles doivent leur surnom.1 Sur ce wax, beaucoup d’éléments font référence aux Nanas : Le logo de Mercedes fait, lui, référence au fait qu’elles se baladaient souvent en Mercedes Benz dans la capitale togolaise. Les petites fleurs évoquent la féminité, les Nana Benz étant, évidemment, toutes des femmes ! On voit aussi des racines qui émergent du mot : « mama » au centre de la composition. Ces racines font référence à l’enracinement dans la culture populaire du wax. Grâce à la revente des wax, ces femmes ont réussi à s’émanciper économiquement de leurs maris et à bâtir, chacune de leur côté, leurs fortunes. Ces bandeaux sur lesquelles se répète le logo Mercedes, stylisé, entourent toute la composition du tissu.

2. VLISCO, « Mama Benz », Vlisco https ://www.vlisco.com/fr/fabric_story/mama-benz/

Pour la plupart, c’était des femmes, parfois mères, qui ont réussi à créer un véritable empire grâce au monopole de la vente des wax sur le continent africain. En ce qui concerne les couleurs, le blanc, le bleu et l’orange sont prédominants. L’orange clair fait référence à la féminité. Au niveau des traits, ce wax est plus élaboré que la plupart. L’intérieur des traits des fleurs et des racines est en quelque sorte, « griffé », tel une gravure. Entre les racines se trouvent également des petites fleurs blanches et oranges qui remplissent le fond. Autour du nom « mama » se trouvent des petits cercles pouvant faire penser à de la dentelle : évocation de la délicatesse, de la femme ? Autour du logo : « Mercedes », se trouve une couronne qui glorifie l’objet, devenu l’emblème de ces femmes. Les Nana Benz étaient des business-woman issues de différents 131


GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.109-110. 3. GROSFILLEY Anne, « Récit de vie, tissu d'ailleurs, des enjeux du wax et des populations noires en France », OpenEditions Journals, https ://journals.openedition.org/hommesmigrations/3148, p.35-43.

pays d’Afrique de l’Ouest, mais plus principalement du Togo : elles vendaient les wax importés par les Européens. Elles se sont fait connaître grâce à la grande mode des wax européens, dans les années 1950 à 1990. Elles étaient les revendeuses officielles et, de ce fait, détenaient le monopole de la distribution et de la commercialisation des wax sur le continent, grâce à un partenariat avec les pays fabricants. Elles ont aussi favorisé l’indépendance financière de nombreuses femmes et permis à l’économie locale de prospérer. A cette époque, le commerce de tissus représentait pas moins de 40% de l’économie ! Elles furent soutenues d’ailleurs par le président togolais Gnassingbé Eyadema avec la création de l’Association Professionnelle des Revendeuses de Tissu (APRT) qui avait pour objectif de pérenniser leur monopole de vente et de commercialisation du tissu wax dans la région ouest-africaine.3 Grâce aux alliances qu’elles avaient avec certains cercles politiques, elles eurent également une place importante sur la scène politique et une forte influence grâce à leur pouvoir économique. Elles sont appelées « Nana Benz » car avec l’argent qu’elles se faisaient, elles ont amassé une somme tellement colossale qu’elles en sont devenues millionnaires et qu’elles ont pu, ainsi, se payer des Mercedes Benz.

4. USEAM, «  Épisode 3 de la Saga du Wax : La signification des motifs », https ://useam.blog/2018/08/15/wax-motifs/ 5. W IKIPEDIA, « Nana Benz », https ://fr.wikipedia.org/wiki/Nana_Benz 6. USEAM, «  Épisode 3 de la Saga du Wax : La signification des motifs », https ://useam.blog/2018/08/15/wax-motifs/

Le mot « nana » vient de la langue minan (ou Gen), au Sud-Togo, dont la plupart des revendeuses de tissus sont originaires. « Nana » est un terme affectueux et familier, venant de na (ou ena), qui signifient « mère » ou « grand-mère ».4 Il a ensuite perdu la dimension parentale originelle pour marquer plutôt la politesse et le respect due à une position sociale.5 Beaucoup de ces femmes ont, grâce à ce marché, réussi à en émanciper d’autres, devenues leurs revendeuses. Par les petits circuits commerciaux que certaines Nana géraient, plusieurs femmes ont ainsi réussi à nourrir leur foyer et sont devenues les cheffes de famille à la place des hommes.6 Grâce à ce commerce, beaucoup d’entre elles ont également pu quitter le rôle de femme au foyer. Beaucoup de ces Nana ont

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engendré des filles qui ont repris leur business et qui ont été surnommées les « Nanettes ». Ce réseau de femmes commerçantes de wax de fabrications locales ou extérieures a continué à se développer et constitue encore aujourd’hui un véritable pan de l’économie des pays Ouest-Africains en général, pour le Togo, le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigéria en particulier.

Déclinaison de « Mama Benz » shopafrican, « tissu d'impression africain », etsy, https ://www.etsy.com/fr/listing/645276779/tissu-dimpression-africain-unique-par

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Déclinaison du motif "fusée apollo" GROSFILLEY Anne, " Wax, 500 Tissus ", éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.47.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

7. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.90.

DÉVALUATION ANTOON VAN DUPPEN 1957 Ce dessin trouvera une résonnance particulière à partir de 1994, près de quatre décennies après sa création, quand il sera surnommé « Dévaluation ». L’appellation évoque la décision de la Banque de France de diviser par deux la valeur du franc CFA, monnaie d’échange en vigueur dans quatorze pays d’Afrique, et exprime par voie de conséquence le sentiment chez les Africains d’être méprisés, dévalués en tant que personnes.7 Composition peu classique, avec plusieurs éléments différents : des billets sur lesquels sont représentés des paysages, sûrement africains. Les valeurs sont notées aux quatre coins des billets. (10, 20 ). Une forme ronde dans laquelle se trouve un symbole ainsi que deux ailes qui y sont accrochées est aussi visible sur une certaine partie du tissu. Cette illustration d’ailes (fig1) est-elle un symbole religieux ? Nous n'en saurons pas plus, mes recherches n'ayant pas été concluantes.

FIG.1 : Cercle dans lequel est inscrit une étoile avec un rond en son centre

Si on se base sur la symbolique de certaines couleurs : le vert évoque vraisemblablement l’argent ; le rouge, la violence de la colonisation, les exactions que les colons ont commis durant l’occupation; et le bleu peut symboliser la vérité, la lumière faite sur les conséquences de la dévaluation du franc cfa sur l’économie des pays d’Afrique de l’Ouest. Sur les billets, on voit énormément d’éléments faisant référence à l’Afrique. L’homme noir en bas à droite, les palmiers et cocotiers sur le billet central… Malgré l’indépendance obtenue par les pays d’Afrique de l’Ouest, ils sont toujours contrôlés économiquement par des puissances étrangères, ici la France. Le franc cfa est une monnaie qui n’est valable que par sa conversion en euro. De ce fait, il n’a de valeur que parce que la France la considère comme une monnaie. Ce wax veut dénoncer cette réalité. Les Africains se sentent dépos135


sédés de leur économie et ont l’impression d’être toujours dominés par la France. Se sentant méprisés par les anciens colons, plusieurs puissances essaient de créer leur propre monnaie afin de pouvoir générer leurs propres économies, sans dépendance extérieure. Vers la fin de 2019, Emmanuel Macron, le Premier Ministre français, avait d’ailleurs négocié avec plusieurs chefs d’états de l’alliance CEDEAO2 dont Alassane Ouattara, son homologue ivoirien, afin d’essayer de remplacer le franc CFA par l’ECO, une monnaie ayant une parité fixe et égale avec l’euro.8 Jusqu’ici, les négociations n’ont pas abouti mais restent d’actualité afin de permettre l’incorporation d’une monnaie africaine et unique dans l’univers économique mondial.

8. M AILLARD Matteo, « France/ Afrique : « C’est en entendant votre jeunesse que j’ai voulu engager cette réforme »», Le soir, h t t p s   : // p l u s . l e s o i r. b e / 2 6 8 6 0 7/ a r ticle/2019-12-22/france-afrique-cest-enentendant-votre-jeunesse-que-jai-vouluengager-cette 9. INCONNU.E, «  Gbékoun/écriture africaine, Ecriture, Aire(s) culturelle(s)Adja-Tado », Patrimoine Benin, http ://www.patrimoinebenin.org/index. php/recherche-images/1169-gbekounecriture-africaine-ecriture-aire-s-culturelle-s-adja-tado

Malgré cela, encore énormément d’Africains veulent totalement couper les ponts avec les ex puissances coloniales. L’hégémonie exercée (de manière implicite ou pas) par les ex pays colonialistes sur les systèmes démocratiques africains est de plus en plus contestée par les populations locales, qui ne veulent plus que ces puissances se mêlent de la vie de leurs pays. Se sentant méprisés par les puissances européennes, certains pays d’Afrique commencent à mettre des moyens en place afin de retourner au patrimoine originel du continent. Par exemple, une initiative est née vers la fin des années 2010 afin de réunir tous les dialectes présents dans le bassin du Bénin sous le nom du Gbékoun9, afin de créer une langue commune, laquelle serait enseignée à l’école. Cette langue posséderait son propre alphabet et remplacerait le français, considéré comme une langue coloniale, ayant encore une trop grande importance à l’heure actuelle, dans la vie culturelle du pays.

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wax imprimé Dévaluation en entier, autre version INCONNU.E, « Nounous ivoiriennes et port du pagne en région parisienne », Africameditteraneo, http ://www.africaemediterraneo.it/public/newsite/2015/09/photo-3.jpg

wax imprimé Dévaluation en entier, INCONNU.E, « Nounous ivoiriennes et port du pagne en région parisienne », Africameditteraneo, http ://www.africaemediterraneo.it/public/newsite/2015/09/photo-3.jpg

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Canne à sucre GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.72.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

CANNE À SUCRE PIET SEGERS 1959

Tout respire bien même si une meilleure incorporation des messages sous la forme ronde aurait été préférable. La culture de la canne à sucre est très répandue sur le continent africain. il était donc normal d’en faire un motif. Devant cette illustration cependant, on pense plus à des bambous qu’à des cannes à sucre. Comme tout, le contexte reste donc important pour comprendre le motif. La multitude de troncs peut nous faire penser à une forêt de bambous, comme celles qu’on peut retrouver au Japon. Visuellement, il est très intéressant. Le fond rempli de lignes horizontales coïncide avec l’irrégularité des contours de cannes à sucre. Ces dernières ayant des contours, pour certains, assez épais, cela donne des tentatives d’ombres. Ces tentatives donnent alors un effet « rough » à l’ensemble de la composition qui se marie bien avec le côté très « brut » des écorces de ces plantes. L’utilisation de rouge pour le fond et du orange apporte une touche graphique super intéressante et attirante pour l’œil. Les différentes épaisseurs de traits jouent sur le style « rough » également. Le détail sur les cannes à sucre amène une texture, rapprochant encore plus l’illustration à un côté sauvage. Le choix du rouge et du orange, couleurs très proches, n’est pas gênant dans ce cas de figure et met en avant même le noir des différents éléments de l’illustration.

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Comme d’autres wax, « canne à sucre » aborde lui aussi la culture d’une ressource exportée afin de faire vivre certaines régions du continent. Les plantations de canne à sucre bénéficiant d’un climat idéal, 10. FAGES Claire, «  l'Afrique devient un acteur majeur du marché du sucre », https ://www.rfi.fr/fr/emission/20110628afrique-devient-acteur-majeur-marchesucre

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elles ont donc de forts rendements à l’hectare. Les pays d’Afrique exportant le plus cette denrée sont l’Afrique du Sud, avec plus de 2 millions de tonnes, avec le Kenya (2e producteur africain), la Zambie et Maurice.10


Autre version existante de Canne à sucre VLISCO, « Canne à sucre », https ://www.vlisco.com/fr/fabric_story/sugar-cane-plant/

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Addis-Abeba/Dashiki GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.99.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

11. BASHI Wendy, « Mode : l’épopée du « dashiki » – « Ya Mado », de Beyonce à Fabregas et de Kinshasa à New York », jeuneafrique.com/257702/culture/mode-lepopee-dashiki-ya-mado-de-beyonce-a-fabregasde-kinshasa-a-new-york/ 12. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.99. 13. INCONNU.E, « Les dashiki : l'histoire d'un vêtement radical », https ://robe-africaine.com/blogs/tissu-africain/les-dashiki-lhistoire-dun-vetement-radical 14. WIKIPEDIA, « Dashiki », https ://fr.wikipedia.org/wiki/Dashiki 15. GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.210.

La chanteuse Beyoncé en Dashiki styledbynanayaa, « Dashikis, Beyonce and Cultural : Appropriation ! », https ://styledbynanayaa.wordpress. com/2015/09/30/dashiki/

DASHIKI TON VAN DE MANAKKER 1963 Cet imprimé wax reprend le design de la chemise à manches courtes appelé « Dashiki ». Très populaire en Afrique de l’Ouest, son apparition coïncide avec l’apparition de l’Organisation de l’unité africaine dans la capitale éthiopienne, Addis-Abeba. Il a aussi été appelé Miriam Makeba suite au décès de la chanteuse et activiste sud-africaine du même nom. En effet, elle s’affichait régulièrement en public avec ce motif. Ce motif est aussi devenu un élément d’appartenance culturelle auprès d’énormément de communautés noires, que ce soit du continent africain ou encore des différentes diasporas. En effet, popularisé dans le monde de la mode et de la musique grâce à des artistes comme Chris Brown ou Beyoncé, il est aussi appelé « Ya Mado » par la jeunesse congolaise. « Ya Mado » du nom de la danse qui accompagnait la chanson « Mascara » du chanteur Fabregas. Aussi appelé Addis-Abeba, cet imprimé est devenu un symbole de l’unité panafricaine. Cependant, il reste principalement connu sous le nom de « Dashiki ».11 12 13 14 15

Cet imprimé n’est pas en motif, contrairement à la plupart des imprimés que nous voyons dans ce mémoire. Comme la FIG 2 le montre, il est imprimé en une fois, comme un poster et est placé sur le tissu de façon à tomber juste au milieu du tissu afin d’être porté en chemise ou robe. Il porte différents noms, la plupart liés à des personnes ou chansons des cultures populaires d’Afrique de l’Ouest et du centre. FIG.2 : Visuel du motif en entier sur tissu VLISCO, « Angelina », https ://shop.vlisco.com/en/fabrics/angelina

Il est devenu un vêtement porté, à la fois, pour montrer la fierté d’être africain et comme symbole identitaire d’une diaspora éparpillée sur le globe. 143


Ce motif a d’ailleurs surfé sur l’image de la chemise Dashiki. Cette chemise tire ses origines de la langue et de la culture Yoruba. Dérivée du mot « Danshiki » en langue yoruba signifiant « chemise de travail à manches courtes », les chemises que l’on connait tirent leur design de tuniques similaires trouvées au Mali dans une tombe entre le 12e et 13e siècle. 16. INCONNU.E, «  Dashiki pour homme  », vetements wax, https ://vetements-wax.com/dashikihomme/

17. WIKIPEDIA, « Dashiki », Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Dashiki

18. Habesha est un terme utilisé par les éthiopiens et érythréens pour se désigner. Terme de fierté, il est utilisé pour éliminer les distinctions entre les différentes tribus et célébrer l’unité des populations d’une même région. Urban Dictionary, « Habesha », Urban Dictionary, https ://www.urbandictionary.com/define. php?term=habesha

Toujours dans la culture yoruba, certaines couleurs présentes sur les Dashikis servent à exprimer différentes émotions et évènements. Par exemple, ceux imprimés en blancs étaient originellement portés par les mariés le jour de leur mariage. Ceux de couleur violette correspondaient, eux, à la royauté africaine. Quant à la couleur bleue, elle faisait référence à l’amour, la paix et l’harmonie.16 Existant sous différentes formes, la disposition du col, elle, n’a pas changé. À ses débuts, cette illustration était imprimée en brocart de soie avec une broderie délicate autour de l’encolure ou des poignets.17 Maintenant, elle est imprimée selon la technique du batik industriel. La forme du col de ce dessin pourrait prendre ses origines dans les vêtements portés par les jeunes femmes Habesha17. Appelé Habesha Kemis, ce vêtement était un habit traditionnel, que l’on pouvait retrouver sous forme de robe, lors de cérémonies officielles, mariages, etc. Les ornements floraux autour du col m’évoquent certaines compositions florales que l’on peut retrouver sur certaines tapisseries orientales. De plus, la forme originale inspirée d’un vêtement pour femme pourrait, selon moi, appuyer cette hypothèse. Comme nous l’avons vu dans les précédentes analyses, l’utilisation de fleurs pour évoquer la féminité est récurrente. Cette composition florale ainsi que les différents éléments entourant le centre de l’arc renvoient à une aura très princière.

Jeune femme portant une robe d'inspiration Habesha Kemis Mukashfashion, « Multicolored dress », Mukashfashion, https ://mukashfashion.com/products/ wide-telf-multicolored-dress

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Les africains ne se réapproprient donc pas seulement des codes visuels occidentaux. En effet, l’Afrique est un continent regroupant pas moins de 2000 groupes ethniques différents. On peut donc aisément supposer que certaines tribus reprennent des éléments culturels existants afin de se les réapproprier et d’en transformer le sens.


Cette tendance à reprendre des éléments d’autres cultures pour les incorporer dans leur quotidien n’est pas inhérente à l’imprimé wax. Le continent ayant subi de nombreuses influences externes, de gré ou de force, beaucoup d’ éléments étrangers ont intégré dans ses différentes cultures.

Musiciens ghanéens portant des dashikis INCONNU.E, « Dashiki », Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Dashiki#/media/Fichier :Dashiki_and_kufi.jpg

Malheureusement, cela a amené une certaine partie des populations à adopter des coutumes qui n’étaient pas forcément adaptées aux régions dans lesquelles elles vivaient. On pourrait effectivement parler du phénomène de blanchissement de peau, apporté par les standards de beauté occidentaux. La peau blanche étant vue comme norme de beauté, beaucoup de femmes africaines en arrivent à s’éclaircir la peau. Ce qui engendre son lot de problèmes comme des cancers de la peau, de l’hyperpigmentation, des brûlures chimiques. Souvent, ces produits leur « décapent » la peau. Puis, sur un continent au climat chaud avec du soleil toute l’année, ce n’est pas la meilleure des combinaisons. Le dashiki, produit du continent africain, s’est vu réapproprié par les afro-descendant.e.s, pour devenir un symbole de leur africanité. Aussi transformé en accessoire de mode grâce à de nombreuses célébrités afro-descendant.e.s, il est devenu un canal de diffusion d’une africanité revendiquée. En effet, si nous faisons un peu d’histoire : « Le dashiki devient populaire en occident grâce à l’Oba (roi en yoruba) Ofuntola Oseijeman Adelabu Adefunmi États-Unis en 1928. Les mouvements des droits civiques aux États-Unis et surtout du Black Power s’approprient le dashiki, ainsi que la coiffure afro, le couvre-chef et les perles africaines dans les pays occidentaux. En plus d’un symbole d’affirmation de la lutte des Afro-Américains aux États-Unis, le dashiki est considéré aussi comme un symbole de fierté noire et de récupération des racines et de l’identité africaines. Il prend une signification métaphorique dans la rhétorique du militant noir. En 2003, la signification du dashiki s’élargit, exploité par les marchands de vêtements qui proposent à leurs clients le style « garçon dashiki » une chemise dashiki, des lunettes noires, une perruque afro, et un collier avec un pendentif de la paix. Depuis 2012, le dashiki, symbole de la nouvelle identité africaine et de sa jeunesse, devient ainsi 145


19. WIKIPEDIA, « Dashiki », Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Dashiki

une tenue de rue décontractée à la mode. Aujourd’hui, le dashiki sert non seulement de vêtement, mais également de communication culturelle dans le monde entier. Les gens peuvent le porter pour une cérémonie de danse, de mariage ou de remise des diplômes ; le dashiki peut également être utilisé comme un symbole pour montrer leur fierté et leurs racines africaines au Mois de l’histoire des Noirs, aux célébrations du Kwanzaa. »19 Imprimé pour faire des chemises, c’est l’un des premiers motifs qui reste proche de son utilisation d’origine et qui n’a pas vraiment changé de forme à proprement parler. Il n’est pas réutilisé en tant que motif sur d’autres vêtements. Pour revenir au style graphique, c’est un motif, qui par sa diversité, est cohérent. Le choix des couleurs prédominantes qui sont le rouge et le vert donne une touche assez « naturelle » à l’ensemble. Le bleu assombrit un peu la composition sans pour autant lui nuire. L’espacement entre les différents ornements aurait pu être plus important, car cela rend la lecture de l’illustration un peu difficile. La stylisation des traits donne un effet assez « rough » qui amène un côté naturel à la composition. L’espace central est séparé en petits blocs, avec des blocs dans lesquels sont illustrés des flèches tournées vers le haut et d’autres blocs avec des petits motifs ressemblant à des fleurs. La jonction des rectangles se trouve au centre avec des arabesques aux influences probablement orientales. Cette variété de motifs apporte un détail intéressant à la composition et le complexifie.

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L'imprimé Dashiki porté GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.210.

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Tomate GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.111.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

20. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.111. 21. VLISCO, « Aklepan », Vlisco, https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/143264/?story=aklepan#

TOMATE/AKLEPAN JOHAN SLEEGERS 1977 Consommée cuite ou crue, la tomate entre dans de nombreux plats de la cuisine africaine : pépé soupe pimentée, sauce claire aux aubergines, riz tiep rouge. Elle est aussi l’accompagnement du plat d'attiéké (semoule de manioc) ou du poisson braisé. Sa représentation participe à la popularité d'un wax. Dans ce dessin sont aussi figurées des perles enfilées évoquant ces sortes de colliers que portent les femmes autour de la taille (communément appelés binbin au Sénégal et bayere au Mali).20 Il peut aussi parfois être nommé Aklepan en référence à l’instrument utilisé dans "l’Oracle Fa-", un rituel vaudou.21 La tomate est un fruit omniprésent dans la gastronomie africaine. Sa célébration était donc normale. Sa représentation côtoie ici celle d’un bijou porté par les femmes au Sénégal et au Mali. Très simplement dessinée, la tomate est figurée ici avec des petites lignes qui partent de son sommet vers le centre du fruit. Les tomates sont placées les unes à côté des autres et montent verticalement jusqu’à un certain point puis redescendent. En dessous de celles-ci, se trouvent les colliers perlés. Sur chacune des perles, des illustrations comme des fleurs, petits ronds, lignes horizontales ou encore pétales. Chaque perle porte une illustration propre. Le fond change une fois sur deux : une première fois, ce sont des lignes avec une courbe à la fin et la deuxième fois ce sont des petits cercles pleins avec des pointillés formant une trame diagonale. Ces deux fonds sont des trames répétées entre chaque collier. La répétition suit ce procédé : tout d’abord un collier puis une ligne de tomates puis un collier et entre chaque collier, se trouve une 149


trame et cette trame change tous les deux colliers. Parlons colorimétrie. Les couleurs utilisées sont le noir pour les traits et le jaune pour remplir les vides. De petites taches rouges sont placées aléatoirement sur l’ensemble de la surface du tissu. Une teinte tirant sur le vert se crée grâce à la superposition du noir et du jaune. Nous connaissons déjà le pourquoi de l’utilisation de ces trois couleurs. L’utilisation du vert donne un caractère plutôt ancien au dessin et rappelle la nourriture, la nature. Ce vert rappelle d’autres aliments africains : c’est la couleur que l’on peut retrouver sur les tables des familles africaines durant un repas. Le rythme et le choix des couleurs nous invite à regarder plus en détail. Le choix du vert intrigue et fait ressortir les éléments du premier plan ainsi que le rouge qui rythme certaines parties du tissu. Autre version de l'imprimé "Tomate" VLISCO BOOK, « Aklepan », Vlisco, https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/143264/?story=aklepan.

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Ce wax fonctionne très bien, même si l’abondance de motifs en limite la lisibilité.


Autre version de l'imprimé Tomate VLISCO BOOK, « Aklepan », https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/143264/?story=aklepan.

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

22. G ROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.141.

MILLIARDAIRE/1001 BLOCKS JAN MOLLEMANS 1984 Au Nigéria, ce wax est nommé "1004 Blocks" car il rappelle un complexe d’appartements construit en 1977 sur l’ile Victoria au Lagos pour accueillir des civils. Au Togo et au Bénin, il est nommé « Milliardaire ».22

Des formes rectangulaires de différentes tailles et longueurs sont ici représentées. La plupart ont un fond de couleur bleue qui contraste bien avec l’orange de fond. Celui-ci est rythmé par de fines lignes noires qui s’estompent. Ces lignes ne sont pas de longueurs égales et s’arrêtent et se prolongent de façon aléatoire. Certains des rectangles au centre de l’image sont tramés en diagonale par des lignes épaisses. D’autres sont également tramés diagonalement mais avec des lignes beaucoup plus fines et un espacement beaucoup plus petit. D’autres rectangles semblent « enfoncés » dans le tissu et tramés de fines lignes noires diagonales. Un aplat noir est utilisé pour rendre cette impression d’enfoncement. L’ensemble fait penser à un puzzle géant où chaque pièce s’imbriquerait dans l’autre. Ou aux pièces d’un appartement qui s’imbriquent les unes dans les autres au sein d’un bâtiment. Ce tissu peut aussi faire penser à l’œuvre de Mondrian : « Composition N° 3 1926 ».

Composition N° 3 1926 INCONNU. E, Piet Mondriaan 1921 - Composition en rouge, jaune, bleu et noir, Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier : Piet_Mondriaan,_1921_- _ Composition_ en_ rouge, _ jaune,_bleu_et_noir. jpg

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Milliardaire ou 1004 Blocks GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.141.


Plantation GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.190.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

23. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.190.

PLANTATION ABC 1991 A l’origine, son appellation est une référence explicite aux grandes exploitations agricoles (développées dans les régions subtropicales par les empires coloniaux européens dans le cadre de l'économie de traite). Dans celles-ci, de nombreuses plantes originaires d'autres continents - de la noix de coco du Sri Lanka au cacao d'Amérique latine - ont été introduites pour y être cultivées en vue de l'exportation. Le jardin botanique de Bingerville, en Côte d'Ivoire, propose un inventaire de celles-ci, réunissant ces essences qui ont modifié les paysages africains.23 Au-delà de son côté « carte postale », ce wax regorge de significations cachées et implicites. Dans un but simplement économique le paysage africain a été altéré afin de permettre aux pays occupants d’avoir une « plantation » où se servir ! Beaucoup de ces denrées sont devenues alors représentatives du continent alors qu’elles n’en sont pas originaires. Qui plus est, à cause de ces nouvelles cultures, beaucoup de produits du continent même sont tombés dans l’oubli alors qu’ils étaient initialement les sources de revenus de nombreuses populations. Ici sont représentés des palmiers placés les uns à côté des autres avec un petit tas de terre à leurs pieds. Ce motif, plus complexe que d’autres, nécessite une minutie de conception afin de rester lisible à l’impression. Les couleurs jaune, orange et noire sont classiques dans l’univers du wax. Mais leur superposition est ici ingénieuse : ils ne sont pas « enfermés » dans des traits, ce qui génère une atmosphère de coucher de soleil. Le jaune dépassant des deux derniers palmiers et celui du premier plan (entièrement en aplat de noir) donnent une touche estivale à l’ensemble. L’utilisation des aplats de couleur pour créer un paysage secondaire 155


à celui du premier plan est intéressante. Le choix du jaune et du blanc réchauffe l’ensemble de la composition et fait ressortir le trait noir des végétaux. En revanche, l’ajout des diagonales en fond n’était pas indispensable car elle alourdit le dessin et peut le rendre, à certains endroits, extrêmement dur à lire. La manière dont le coucher de soleil est placé apporte une harmonie au tout.

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Village Molokai VLISCO STORIES Team, « Village Molokai », https://www.vlisco.com/fr/fabric_story/village-molokai/

Village Molokai est un autre wax au paysage paradisiaque, une reproduction du village congolais de Molokai. Il est également connu sous le nom Guerre de Shaba, d’après la guerre d’indépendance qui s’est déclenchée au Shaba, aujourd’hui appelé Katanga, une province située dans le sud de la République démocratique du Congo. 157


La chance GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.199.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

LA CHANCE ABC 1993 Imprimé wax crée afin de soutenir les équipes de football du Nigéria et du Cameroun pour la Coupe du Monde de 1994. On sait que le sport est un moyen pour certains d’échapper à la misère et apporte ainsi un salut à la population locale. Les couleurs jaune, rouge et vert sontévoquent d'ailleurs le Cameroun car durant la coupe du monde de 1990, il est devenu même la première nation africaine à se qualifier pour les quarts de finale. Est-ce que ce wax est un objet commémoratif de cette première victoire ? Le nom « La chance » est également un bon indice nous aiguillant vers ce qui a été dit plus haut : le football devient un moyen pour certains jeunes d’échapper à la misère dans laquelle est leur pays ou famille. Achetés par des clubs étrangers, les joueurs sont nourris, logés et entraînés pour devenir rentables ! Cela devient alors « la chance » (inespérée) pour eux d’aider leur famille et leur terre natale avec les moyens financiers engendrés par leurs activités. Ce qui est intéressant dans ce wax est l’incorporation de différents éléments graphiques tels que le ballon de football que l’on aperçoit en bas à droite, la coupe ou le globe à gauche ainsi que la forme du continent africain dans lequel est inscrit : « Africa ». Le fond est d’ailleurs tapissé d’un treillis évoquant les filets des buts sur un terrain de football. Il relie tous les éléments ensemble aidant, avec le titre, à comprendre le propos véhiculé par le wax. La composition est assez uniforme et permet une compréhension rapide et claire du message. Le choix des couleurs évoque le Cameroun. Mais l’illustration de la coupe pourrait également évoquer le fait que le foot est finalement un sport qui réunit toutes les nationalités autour d’un même évènement. Finalement, il fédère tout le monde et nous unit autour d’une même idée : le partage d’une passion commune. 159


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

24. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.204.

CRAZY TIME MARGARET HICKSON 1996 Avec l'émergence de lieux résidentiels aux bords des grandes villes, le trajet vers les quartiers d'affaires devient encore plus long. De ce fait, les réveille-matin sonnent de plus en plus tôt dans les grandes villes afin d'éviter les embouteillages, qui commencent le plus souvent bien avant sept heures du matin.24

Bichromie utilisant le fond noir comme troisième couleur. Le réveil très naïf avec des traits noirs. L'arrière plan regorge d'une juxtaposition de rouages rappellant l'horloge. Le dessin du réveil se répète plusieurs fois sur le pagne pour évoquer la cacophonie stridente des réveils qui sonnent. Les couleurs utilisées ici sont les classiques jaune, rouge et noir. Durant le passage de la couleur rouge, elle s'est mélangée avec le jaune pour créer une couleur orangée et un dégradé de couleur. Un style graphique dynamique se crée alors par la superposition des différents éléments. Visuellement, l'utilisation du jaune et du rouge est assez bien choisie car l'alliage des deux crées un effet « rouillé » à l'ensemble. Le fait que le fond des horloges soit rouge et jaune à la fois engendre aussi une sensation de « passion », « d'explosion » en référence à la cacophonie que provoque le son d'un réveil-matin.

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Crazy Time GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.204.


Plenty GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.204.


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

25. Adire éleko : L'adire est un tissu teint par résistance produit et porté par le peuple Yoruba du sud-ouest du Nigeria en Afrique de l'Ouest. Le terme adire, qui signifie "noué et teint", a été appliqué pour la première fois à un tissu teint à l'indigo et décoré de motifs de résistance autour du XXe siècle, et à l'époque cette pratique n'était pas ouverte à tous. Fashion stories, « Adire eleko : the procedures in Making Adire Eleko », Adire lounge, https ://adirelounge.com/adire-eleko-the-procedures-in-making-adire-eleko/?v=4874ed2a3309 26. Yorubas : Peuple vivant au sud-ouest du Nigeria (environ 25 millions), au centre du Bénin (environ 1 million) et au Togo (environ 700 000) INCONNU.E, « Yorubas », Larousse, https ://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/ Yorubas/150348 27. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.204.

PLENTY MARGARET HICKSON 1996 Ce dessin s'inspire du style des adire eleko25, une technique de décor des étoffes développée par les femmes yorubas26 de l'ouest du Nigeria. Elle consiste à tracer les motifs en réserve, à main levée, avec un petit bâton ou une plume trempée dans une pâte amidonnée à base de manioc. Ensuite, les zones recouvertes sont préservées par la teinture à l'indigo et les motifs sont révélés en clair. La structure traditionnelle de cases rectangulaires est ici remplacée par un agencement de triangles de différentes tailles.27 Le schéma de composition est beaucoup plus complexe que dans la plupart des wax. On retrouve une répétition de multiples éléments : un escargot, des poissons, des oiseaux, une tortue. Ceux-ci sont agencés afin de bien remplir l'espace sans pour autant le saturer. La complexité de ce motif réside dans la gestion assez stricte des espaces et des formes qui y sont intégrées. Les mêmes illustrations sont réinterprétées dans différentes positions, créant une nouvelle forme. (FIG.3) Le choix des couleurs correspond également aux préférences des wax les plus populaires : l'orange, le vert et le rouge (le noir étant le plus souvent utilisé comme couleur de fond).

FIG.3 : GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.204.

Les contours des illustrations sont créés grâce à l'utilisation d'aplats facilitant la reconnaissance rapide des animaux. Le choix de mettre les éléments dans des espaces géométriques facilement identifiables est assez astucieux, car le fait de les contraindre amène une infinité de combinaisons possibles. Les poissons, alignés dans différentes parties du dessin, renforcent les lignes de force et créent une ligne de base et permettent de délimiter les espaces sans pour autant créer de cassure. Une homo163


généité visuelle apparaît. On remarque aussi que tout est pensé pour tenir à l'intérieur de triangles pour se calquer sur le style de confection des adire eleko. Les plus gros éléments, comme la tortue ou l'escargot, sont apposés

Motif créé avec la technique « Adire Eleko » Adire African Textiles, « Olokun Sea Goddess Adire Eleko », Larousse, https ://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/ Yorubas/150348

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dans différents triangles (noir pour l'escargot et orange pour la tortue). On observe aussi des lignes noires formant des vaguelettes. Les triangles dans les coins sont tramés de lignes oranges créant cet effet de grillage. Cela pourrait nous évoquer les grillages qu'on utilise pour cuire le poisson dans les familles africaines.


Béninoise vendant des imprimés wax BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.121.

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Ventilateur ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », VOGUE, https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-stories-behind-traditional-african-wax-prints?image=5d54b70eb465c00008c4dcd5


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

28. ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », Vogue, https ://www.vogue. co.uk/gallery/eight-stories-behind-traditional-african-wax-prints?image=5d54b70eb465c00008c4dcd5

12033307 MITEX HOLLAND 2000 Quand les ventilateurs électriques sont apparus en Afrique dans les années 80, ils ont été représentés sur les pagnes wax, comme signe de modernité (on le fera aussi, ultérieurement, pour les téléphones portables). Vu que ce motif était imprimé sur du poly coton chinois au lieu du véritable coton, de nouvelles combinaisons colorimétriques ont pu y apparaître.28 Comme sur de nombreux imprimés que nous avons vu dans ce mémoire, on y retrouve la représentation d’un objet du quotidien, banal pour un européen, mais qui peut être un signe de richesse dans les pays d’Afrique. Sur un continent aux températures quotidiennes souvent tropicales posséder un ventilateur est quelque chose de précieux : d’où son apparition sur le pagne pour célébrer son arrivée. Signe de modernité, c’est un objet qui « rapproche » de l’Europe, des blancs. « On est un peuple évolué et on veut le montrer, si pas par la possession de l’objet, au moins par sa représentation dans notre quotidien! » semble être le message du tissu. Le ventilateur est ici représenté de façon assez classique. On reconnait rapidement que l’objet. Les lignes sont nettes et les traits plus épais sont mis en place pour permettre de distinguer les différentes composantes de l’objet. L’aplat de blanc en fond, permet de bien le distinguer de celui-ci. Cependant quelque chose d’intéressant apparaît sur les bords extérieurs des hélices. Le débordement de la couleur est exactement le même sur toutes les instances du ventilateur, c’est la preuve claire de l’utilisation d’une technique d’impression chinoise. En effet, les véritables wax ont des erreurs mais jamais les mêmes et ni au même endroit. Mêmes les bulles d’air sont y semblables mais pas identiques. 167


Le fond bleu turquoise contraste bien avec les ventilateurs. Cet arrière-plan est tramé avec des petites hélices de couleurs rouge bordeaux apportant une répétition du message. Ce petit ajout apporte une plus-value très « mignonne » à l’ensemble au lieu de juste représenter des ventilateurs. L’orange et le bleu se confrontant rendent aussi la composition intéressante et le petit ajout des hélices tramés rend le tout très « électrique ». Les bulles blanches déforment un peu la trame mais cela ne choque pas vu le sujet.

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Autre wax illustrant le thème du ventilateur appelé « Ventilateur de table » VLISCO, « Ventilateur de table », Vlisco https://www.vlisco.com/fr/fabric/ventilateur-de-table/

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Chaussures anglaises GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.232.


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

29. Mouvement culturel et vestimentaire africain (congolais à l’origine) adulant la haute couture ou du moins les vêtements de grandes marques et l’élégance comme signes extérieurs de réussite. WIKIPEDIA, « Sapologie », Wikipedia, https ://fr.wiktionary.org/wiki/sapologie

CHAUSSURES ANGLAISES RACHEL WOOD 2000 Référence à la « sapologie29 », c’est une ode à ce mouvement d’identité vestimentaire qui a détourné et réinventé les codes de la mode.

Ce mouvement est né lors de la colonisation. Afin de pouvoir négocier avec les colons, plusieurs groupes insurrectionnels sont nés. Cependant, les colonisateurs étant ce qu’on sait, le dialogue fut impossible. Par la suite, arriva André Matswa, un homme venu de la métropole parisienne, qui put aider les opposants à négocier avec les colons. À son arrivée, la population réalisa une chose : ce jeune métropolitain était d’une élégance naturelle et avait un style vestimentaire digne d’un dandy. André fit aussi comprendre à la population locale que le vêtement est une arme politique et un moyen subtil de renverser le rapport de force avec l’oppresseur.

30. APHÉLANDRA Siassia, « La S.A.P.E : des joyeux ambianceurs au combat politique », Marie Claire, https ://www.marieclaire.fr/la-sape-sapologie-definition, 1296828.asp

Cependant pour Sylvie Ayimpam et Léon Tsambu, cette chercheuse en sciences politiques et ce sociologue rattaché aux Centre d’étude africaine des Universités de Kinshasa et du Michigan : « On constate dès la fin du XIXe siècle, chez les domestiques servant dans des familles européennes, un attrait particulier pour le vêtement. En adoptant le vestiaire de leurs maîtres, les « boys » des grandes maisons pouvaient étaler leur richesse, se créer une situation, une identité dans cette Afrique dépossédée ».30 Ce fut tout d’abord un mouvement contestataire pour les jeunes soucieux de se réapproprier leur nation. Mais il est aussi vu aujourd’hui, par les autorités congolaises, comme un mouvement de « voyous ». Pour les jeunes de l’époque, le vêtement était un objet de rébellion, oui, mais à caractère pacifique. On peut voir au travers de la sape, une autre forme de communica171


tion non verbale, vestimentaire bien entendu, tout comme le wax. Véhiculant de nombreux messages de façon tacite, le wax a également été un élément de communication pour initier des révoltes, que ce soit dans son propre ménage/sa vie amoureuse ou alors sur la scène politique. Au point de vue graphique, ce wax est remarquable par l’association des couleurs jaunes et oranges. L’utilisation du noir comme couleur de fond est assez ingénieuse. Le noir étant source de contraste, les aplats d’orange (ainsi que les bulles formées dans le fond), créent un rythme dans l’image assez intéressant. Le fond, rythmé par des motifs de trous de lacets (peut-être), apporte une dimension très pop à tout l’espace. La même paire de chaussures est répliquée sur le wax mais légèrement décalée. Qui plus est, l’ombre de celle-ci est projetée au sol, créant un aplat de noir supplémentaire.

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DĂŠclinaison de Chaussures anglaises Lien supprimĂŠe de sa source.

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Happy Shopper GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.253.


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

31. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.253.

HAPPY SHOPPER RACHEL WOOD 2000 Bien que les marchés alimentaires soient le lieu traditionnel d'approvisionnement, une part de plus en plus importante de la population fréquente les supermarchés. On y trouve pratiquement toutes les denrées importées d'Europe, des boîtes de conserve aux biscuits, des pâtes à tartiner à la moutarde, etc. En fin d'année, les fabricants de wax louent même des « corners » dans ces espaces de grande distribution pour y vendre leurs collections de Noël.31

Le fond du « Happy Shopper » est recouvert de dessins de boîtes de conserve répétés horizontalement afin de faire allusion aux rayons des supermarchés. Puis par-dessus ces conserves est également répétée une illustration représentant un caddie. Les contours, de couleur noire, font ressortir tous les éléments de l’illustration. Ce vert contraste avec l’orange recouvrant les canettes et attire notre attention sur l’avant plan de l’illustration. Le contour noir qui délimite la forme du caddie est très marqué, afin de le mettre celui-ci en évidence ; mais autour du guidon le contour n’est pas fermé. Le trait noir du caddie est également plus gras que celui des boîtes. La structure du chariot est teintée d’un bleu qui tend un peu vers le violet bleuté et qui contraste fortement avec l’orange, l’orange et le bleu étant des couleurs complémentaires. Le vert qui vient entre l’orange et le bleu sur le cercle chromatique, permet une transition visuelle… Le choix de ce vert pourrait également signifier que c’est grâce à l’argent que l’on peut s’acheter les denrées alimentaires. Les supermarchés sont des enseignes encore assez récentes en Afrique et il est normal que ceux qui ont les moyens de s’y approvisionner s’en vantent. Ce wax est là pour cela, montrer aux autres qu’on a les moyens de consommer « made in Europe » et qu’on est 175


quelqu’un de socialement bien placé. Encore mieux s’il est estampillé « Dutch wax », car cela prouve qu’il est importé directement d’Europe. Graphiquement, ce wax est assez intéressant. Le choix de deux couleurs complémentaires ainsi qu’une intermédiaire au centre fonctionne bien et apporte une plus-value visuelle. La simplicité des traits permet une reconnaissance rapide des éléments mis en scène ainsi qu’une compréhension efficace du sujet traité. Cependant, les traits du caddie sont vraiment épais, ce qui gâche un peu l’ensemble. La répétition des canettes en fond afin de créer un motif est très astucieuse et nous rappelle immédiatement le supermarché et ses rayons. Par contre, le choix d’un orange aussi foncé donne à l’ensemble un côté un peu terne et fonctionne moins si le but recherché est vraiment la confrontation chromatique des deux couleurs.

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CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

32. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.256

GRADUATION RACHEL SHAW 2001 Dans des pays où les métiers manuels sont incontournables mais peu valorisés, la remise d’un diplôme ( graduation, en anglais ) laisse espérer une situation professionnelle confortable, surtout à l’issue d’un cursus universitaire à l’étranger.1

L’obtention d’un diplôme est quelque chose d’extrêmement important dans la culture africaine. Gage d’un bon avenir familial et financier, celui-ci est devenu un objet de poids dans la vie d’un jeune africain. Beaucoup de parents travaillent énormément afin de pouvoir permettre à leur progéniture d’avoir une bonne éducation. Celle-ci pourra, par la suite, aider sa famille et lui permettre une meilleure vie. Le port de ce genre de wax est destiné à montrer qu’on a une bonne éducation, un bon diplôme, une bonne situation. Les apparences sont essentielles dans la société africaine d’où l’importance de savoir faire passer des messages au travers de nos apparats. L’illustration de ce wax est un diplôme avec un sceau. Ce dernier apporte l’idée d’authenticité. Le fond est rempli de lignes s’entremêlant et créant des vaguelettes croisées. Les couleurs utilisées sont le noir et le vert et le contour de la plupart des éléments est noir, excepté celui du sceau bleu foncé qui, lui, est vide. Graphiquement, le choix du vert et du jaune (couleurs voisines sur le cercle chromatique), est assez intéressant dans le contraste avec le bleu. Le bleu ressort alors et permet de guider la lecture de l’image. Le noir, en revanche, est utilisé sous forme de hachures et de trame pour apporter un relief au sceau du diplôme ainsi qu’aux plis de l’intérieur.

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Graduation GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.256..


Bright Idea GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.252.


CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

33. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.252.

BRIGHT IDEA RACHEL WOOD 2001 Le raccordement au réseau électrique marque un grand progrès social. Par exemple, être en mesure de s’éclairer chez soi permet aux écoliers de faire leurs devoirs et de s’instruire pour préparer leur avenir. Mais l’explosion démographique urbaine s’accompagne de besoins croissants en électricité, bien supérieurs à la capacité de production, et les délestages sont fréquents. Au 21e siècle, l’éclairage électrique n’est donc pas encore garanti pour tous.33 Ici, une composition des plus classiques. L’élément représenté est une lampe stylisée de façon très naïve, répétée jusqu’à remplir l’entièreté du tissu. La lampe est remplie d’un aplat rouge avec en son centre, le filament dessiné très succinctement. Le fond de cette lampe est rythmé par des petites lignes que l’on a déjà observesé dans d’autres wax. Le culot, quant à lui, est teinté d’une couleur orange vif avec des bulles blanches. Ensuite, autour de l’ampoule, se trouve des petites lignes qui se suivent afin de former un arc de cercle, signifiant que la lampe est allumée. Petite référence aux illustrations caricaturales que l’on peut retrouver dans les bandes dessinées pour montrer que le personnage a une « idée » ou « illumination ». Ces petits traits sont par ailleurs remplis du même aplat que le culot. Visuellement, c’est un pagne avec une composition assez classique mais qui fonctionne. Les traits sont simples et le choix des couleurs permet une identification rapide de l’objet. La volonté de représenter une lampe de cette manière est assez intéressante et marque le regard du spectateur. L’orange apporte un côté assez dynamique à l’ensemble et permet une distinction entre le fond et l’objet. Le raccordement électrique est un problème assez important en Afrique.

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Vu la chaleur qu’il fait fréquemment sur le continent et le peu de moyens que la plupart des pays ont pour leurs infrastructures, il y a de nombreuses pannes de courant ou des fusibles qui sautent, empêchant des foyers d’être approvisionnés pendant parfois des jours.

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Wax illustrant aussi le thème de l’ampoule INCONNU.E, « 100% Katoen Gloeilamp Patroon Stof Afrikaanse Echte Wax 6Yard », Aliexpress, https://www.aliexpress.com/i/4000111166289.html

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Africa.com GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.268.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

34. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.268.

AFRICA.COM BEN BURFORD 2002 Les nouvelles technologies ont instauré une véritable révolution parmi les populations qui peuvent se connecter. L'accès à l'information a pris une dimension planétaire et nombre d'Africains communiquent maintenant de façon instantanée avec le monde entier. Dans des régions où les simples particuliers doivent encore retirer leur courrier en poste restante faute de facteur, internet est devenu un moyen très efficace et rapide d'envoyer messages personnels et documents.34

Ici, est représenté un ordinateur portable avec des câbles qui en sortent (côté gauche). Sur l’écran est affiché une icône de fichier avec le symbole @. Le fond est un mélange de jaune et de rouge générant un orange tacheté de jaune. Les contours sont de couleur noire. Une couleur bleue est utilisée pour remplir l’écran et la structure de l’ordinateur. Malgré la présence du réseau là-bas, il y a encore beaucoup de problèmes de maintien de celui-ci, à cause des fortes chaleurs qui font parfois sauter le réseau électrique

Une trame noire se propage le long des câbles en disparaissant à mi-parcours, ils sont reliés à un globe (qui dépasse légèrement en haut). Il peut aussi juste montrer qu’on est en contact avec le monde entier Le fond du wax est rythmé par des petites lignes se rejoignant entre elles. Elles sont pourvues de ronds à leurs extrémités. Ces petites illustrations sont en fait les tracés que l’on retrouve sur les circuits imprimés présents dans la plupart de nos matériaux électroniques. Internet prend de plus en plus de place dans le quotidien des Africains. Ceux qui étudient ou travaillent à l’étranger l’utilisent afin de rester en contact avec leurs proches. L’accès à l’information permet aussi aux africains de rester en contact avec le reste du monde et d’en même temps montrer à celui-ci leur quotidien. Les médias, comme les locaux, proposent donc une nouvelle vision 185


de l’Afrique. Ils exposent la réalité du terrain de ce continent qui, loin d’être pauvre, a énormément de choses à offrir. C’est ainsi qu’énormément de personnes arrivent à partager leurs passions mais aussi à dénoncer des évènements graves méconnus qui se passent sur le continent. Beaucoup de faits d’actualité dramatiques ont été dénoncés grâce à l’utilisation des réseaux sociaux (comme l’esclavage en Libye de nombreux africains, pour ne citer qu’une situation, par ailleurs très grave). On découvre aussi beaucoup d’informations à caractère culturel sur le continent, informations que l’on n’aurait pas connues si les principaux intéressés ne les avaient pas eux-mêmes partagées. Beaucoup de personnes utilisent les blogs pour partager du contenu. Ceux-ci m’ont beaucoup servi dans la rédaction de ce mémoire. Le wax en lui-même est visuellement intéressant et très réussi. Les circuits symbolisent à la fois les liens entre les individus et l’accès à l’information, excellente trouvaille. Ils rythment bien le fond mais le propos reste lisible. L’ordinateur dont jaillissent les câbles reliés à l’internet a un dessin plus complexe que celui des autres wax que l’on a pu analyser. Les différences de trait entre l’intérieur et l’extérieur perturbent l’appréciation de l’ensemble. L’épaisseur des traits des câbles est aussi un problème, même si elle est la même que celle utilisée pour les contours de l’ordinateur. Il faudrait voir le pagne dans son ensemble, mais la répétition de cet épais motif (la machine) sur tout un tissu rend la composition assez lourde, même si, isolément, il est assez bien réalisé (si l’on ne prend pas en compte la lourdeur du trait.

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Utilisation, à nouveau, de l’écran d’ordinateur mais pour faire passer un message similaire. Ici, c’est une réinterprétation d’Alphabet de E. Brown Fleming. GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.55.

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

35. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.246.

A0576 NICO VERBART 2004 La culture de l'arachide a été développée, au départ, en zone sahélienne pour produire de l'huile et des tourteaux destinés au marché européen. Cette denrée, originaire des contrées mexicaines, est devenue au cours du temps une composante fréquente de l'alimentation en Afrique de l'Ouest. Elle est consommée de différentes façons : grillée, enrobée de sucre ou encore écrasée en pâte pour préparer la fameuse sauce « Mafé ».35 Dans cette composition, on voit une tige d’arachide sur laquelle poussent des cacahuètes et tournant sur elle-même en traversant tout le tissu. La racine divise le wax en deux parties : une première partie tramée avec un fond jaune et des points bleus, permettant d’apercevoir les fibres du tissu et une deuxième partie fonctionnant sur le même principe mais avec cette fois un fond blanc. Ensuite, les circonvolutions de la tige créent des espaces vides remplis d'un aplat bleu foncé. Ce bleu doit probablement être, par sa récurrence, la première couleur ayant été appliqué au tissu. Les seuls traits (dans cette illustration) sont ceux de la tige et des arachides et sont d'épaisseurs variables. L'intérieur des tiges et des arachides sont teintés d'un bleu azur émaillé de petites bulles dues à la teinture. La composition évoque le développement de la plante qui pousse dans le sol. Les cacahuètes sont une denrée très présente dans l'alimentation africaine. Malgré leur origine étrangère, elles sont énormément consommées par la plupart des populations et sont devenues un aliment indissociable du continent.

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

A0576 GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.246.


Source of Life GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.270.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

36. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.270.

SOURCE OF LIFE BEN BURFORD 2005 Ce wax illustre d’un grand problème auquel le continent africain est encore confronté : l’accès à l’eau potable pour tous. Que ce soit des problèmes de ravitaillement, des coupures d’approvisionnement et encore la pollution des nappes phréatiques, ce sont des problématiques auquels les habitants sont confrontés quotidiennement. Par ailleurs, le développement industriel et l’exploitation minière aggravent parfois la situation.36 Ce wax est composé de plusieurs éléments évoquant l’eau, dont une bouteille d’eau qui se renverse dans un seau et de l’eau qui tombe d’une partie non visible du wax dans ce même seau. Le fond du wax est rythmé par des petites gouttes d’eau, motifs répétés afin de remplir le fond. En ce qui concerne les couleurs, le jaune, le vert et le noir sont ici les couleurs prédominantes. Le noir est utilisé surtout pour remplir les vides et ainsi, à l’aide de traits, réaliser des ombres. La couleur du fond n’est pas uniforme et est rythmée par des petites taches blanches. Le fond de la bouteille et celui du seau sont d’un jaune tacheté. Les contours de tous les éléments (sauf les gouttes d’eau) sont entourés d’une petite démarcation de vide due à la technique d’impression. Grâce à cette démarcation, on peut mieux observer que le fond a été teint en un jaune ocre en premier lieu, et que le reste a été apposé par la suite. Graphiquement, le wax fonctionne assez bien : l’eau sortant de la bouteille apporte un sens de lecture et guide notre regard. L’eau arrivant du haut du wax, elle, attire le regard vers le seau. « Source of Life » signifiant : « source de vie », on se rappelle que l’eau est une ressource indispensable ! Dans certaines régions d’Afrique, les femmes vont la chercher à plusieurs kilomètres de chez elles. 191


Ensuite, elles transportent l’eau tirée d’un puits dans un seau qu’elles rapportent chez elles, à la seule force de leurs bras. Parfois encore, certaines portent le récipient sur leurs têtes. L’eau devient alors évidemment une ressource précieuse et à économiser ! Elle peut évoquer la pollution des nappes phréatiques par les grands industriels. Cette eau polluée se mélange alors avec l’eau consommée par les populations locales, favorisant des maladies. La bouteille qui se renverse symbole aussi la facilité avec laquelle les européens « gaspillent » l’eau qui, finalement, se retrouve dans celle que les populations autochtones doivent aller chercher à plusieurs heures de chez elle. Le goulot de cette bouteille visiblement en plastique, montre également que nous, européens, participons à cette pollution, à cette contamination de l’eau qui entraîne inévitablement des morts. Ce wax veut nous responsabiliser par rapport à notre utilisation de l’eau, nous faire réaliser que c’est une ressource précieuse, nécessaire à toute vie et que nous devrions la protéger plutôt que nous intéresser aux avantages pécuniaires que sa vente peut engendrer.

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Autre wax abordant à la fois le thème de l’eau et de l’électricité, «Rain Drop» SHOPAFRICAN, « issu ampoule électrique ankara, larmes, gouttes de pluie imprimée », etsy, https://www.etsy.com/fr/listing/737371039/tissu-dimpression-africain-dankara-jaune

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LE WAX COMME INSTRUMENT POLITIQUE Le wax, au cours de son histoire, est également devenu un support de communication politique. Étant populaire, beaucoup de politiciens africains ont vu ce support comme un moyen de rassembler les foules ou d’influencer la population. Par contre, il n’utilise pas la même technique de fabrication qu’un wax classique. Les pagnes politiques, affichant le plus souvent la photographie d’une personnalité politique, suivent un procédé d’impression double ( à la fois wax et impression d’une image).


Commémoration Babaal Pinip Kunoye

Abidjanaise avec un wax arborant Georges Pompidou lors de son voyage en Côte d'Ivoire en 1971.

El Hadj Amadou Ahidjo - Président de la République Fédérale du Cameroun.

Henri Konan Bédié, Candidat aux Présidentielles en Côte d'Ivoire en 2010, Reprenant le slogan de B.Obama : « Yes we can »

Oba George babatunde FADUYILE, Roi des Ikales du Nigeria

Toutes ces illustrations sont issues du livre « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique » de Anne Grosfilley.


Le wax a fréquemment été utilisé comme support politique afin de servir les objectifs des dirigeants. Utilisé tantôt comme objet de décoration, comme habit ou encore comme support publicitaire, l’imprimé wax a servi de nombreuses campagnes d’hommes politiques d’Afrique Noire. Les imprimés les plus représentatifs étaient ceux des visages des dirigeants. Ces visages étant souvent des photographies, ils nécessitaient une surimpression sur le tissu et donc une technique double. Contrairement à la production classique, il fallait, dans le cas qui nous occupe, après la reproduction traditionnelle du motif, appliquer par-dessus un procédé d’impression photographique sur le tissu, en veillant aussi à ce que le visage soit bien reconnaissable. USEAM, «  Épisode 3 de la Saga du Wax : La signification des motifs », Useam, https ://useam.blog/2018/08/15/wax-motifs/

Dans la plupart des exemples, c’est surtout le portrait du personnage public qui est imprimé, généralement avec son nom sous la photo. Si ceci se fait sur des motifs originaux, on trouve aussi des exemples de détournement de wax préexistants à des fins de propagande. Ces tissus avaient surtout pour objectif de glorifier « la » figure emblématique d’un parti. De nombreux dictateurs ou présidents à vie imposaient ainsi leur présence dans la vie quotidienne de leurs concitoyens.

1. B OUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.85.

« Le corps de ces derniers devient alors le porte-drapeau de leur suffisance et démesure. Ils sont devenus, de ce fait, un outil permettant de garder une emprise ainsi que des éléments commémoratifs servant à leur ego et soif de pouvoir »1 Les wax portés par la population locale sont alors devenus signes de soumission et moyens de s’approprier, en plus de la liberté et des droits, les corps et les esprits. Et ceci par une présence constante dans la vie quotidienne. L’imprimé wax était également, pour certains, un vêtement délibérément porté afin de montrer sa fidélité au gouvernant en place. Certaines personnes le revêtaient simplement parce qu’il s’agissait d’un cadeau offert par une connaissance (ou même directement par le parti) lors d’une visite d’un élu dans la région. 197


Les wax de ce type pouvaient avoir une valeur plus symbolique. Pour citer un exemple historique, en Côte d’Ivoire, après le coup d’état militaire du général Robert Guei2 en 1999, un pagne a reçu le nom de « balai de Gueï » car certains désiraient y voir le symbole du nettoyage que le putschiste prétendait effectuer.3

Le balai de Guei Fondation Zinsou, « Wax Stories - Histoires de pagnes », Fondation Zinsou, https ://issuu.com/fondationzinsou/docs/wax_ stories, p.194. 2. Général et homme d’état ivoirien ayant pris le pouvoir lors d’un coup d’état le 24/12/1999 en côte d’ivoire et ayant déclaré « nous sommes venus balayer la maison » lors de sa mise en place. WIKIPEDIA, « Robert Guei », Wikipedia https ://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_ Gu%C3%A9%C3%AF 3. BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.85.

Grâce à différentes techniques de distribution et de diffusion, le wax est finalement devenu un véritable outil publicitaire dont les populations locales étaient les diffuseurs. On l’a compris, l’imprimé a progressivement endossé deux rôles : celui de montrer son appartenance à un parti politique (ou à une idéologie) et celui d’y enrôler les personnes plus naïves. Cependant, ces deux rôles n’étaient pas forcément compris par les personnes utilisatrices du tissu, car elles n’étaient pas assez éduquées ou renseignées. Nous formulons l’hypothèse qu’elles pouvaient le revêtir soit simplement parce qu’il était offert, soit par adhésion politique. Certains n’ayant pas les moyens financiers de s’habiller le portaient pour sa qualité textile et non pour le message arboré. Il arrivait également que la population utilise l’imprimé par simple goût pour les couleurs et les motifs.

4. Homme d’état ivoirien, président de la république de côte d’ivoire du 7/12/1993 au 24/12/1999 et destitué par Robert Guei

Certains modèles célèbres préexistants, et qui avaient du succès, ont ainsi été retravaillés ou réadaptés à des fins de commémoration ou encore de propagande politique. Le motif ABC produit par HKM a, par exemple, été repris, fin du 20e siècle, en tant qu’outil de promotion de l’alphabétisation. Il servait aussi, pour l’utilisateur, à afficher un certain niveau d’éducation. Mais il a également été utilisé comme instrument de propagande politique par Henri Konan Bédié4, lequel en a modifié les lettres pour les faire correspondre à celles de son parti politique (PDCI-RDA).

Henri Konan Bédié, parti politique ( PDCI-RDA )

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Ces tissus détournés à des fins de propagande l’étaient parfois afin de célébrer la venue d’un chef d’état étranger, qui elle-même pouvait servir à valoriser le pouvoir en place.


Ainsi, lors des élections présidentielles américaines, des imprimés à l’effigie de Barack Obama avaient été créés pour l’occasion, mais Il arrivait aussi que le tissu représente à la fois le visage de l’invité et celui du chef d’état en place lors de son arrivée, faisant ainsi « d’une pierre deux coups ».

wax représentant l'ex-président français, Jacques Chirac GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.245.

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Flag and crown ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-stories-behind-traditional-african-wax-prints


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION :

NOM :

5. ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », Vogue, https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-storiesbehind-traditional-african-wax-prints

FLAG AND CROWN ELISABETH II ELSON & NEILL 1956 Conçu pour la première visite de la reine Elizabeth II au Nigeria en 1956, Grosfilley pense que cette impression à la cire a été donnée pour s'assurer qu'une foule lui réserve un accueil chaleureux car la visite a eu lieu peu avant l'indépendance du pays.5

Cet imprimé utilise l’iconographie classique de la conception de wax. Le personnage y est mis en place le plus souvent dans une forme ronde afin de pouvoir répéter l’illustration de façon immédiate. Il s’agit ici d’une illustration et non d’une photographie. Détaillée afin de permettre la reconnaissance rapide de la reine, plusieurs éléments iconographiques sont aussi placés pour la mettre en valeur. La couronne et les boucles d’oreilles perlées qui apportent une prestance au personnage. Celui-ci porte en plus une veste en fourrure qui rappelle son rang social élevé. Son magnifique collier a également la même fonction. Le diadème est également est un incontournable. Un sceau entoure toute la forme ronde. Il rappelle le statut de personnage : ce n’est pas n’importe qui c’est la reine d’Angleterre ! Tout cet agencement est placé dans une forme carrée dont le fond est rempli de petits traits sinueux. L’ensemble est, lui-même, placé sur un fond que nous n’arrivons pas à distinguer ici. Mais on observe malgré tout que la technique du blocking y est présente. Les couleurs sont assez classiques. Tout d’abord, de l’ocre : proche de l’or, il peut rappeler la richesse du personnage représenté. Ensuite du noir : utilisé pour définir les différents espaces, il a surtout servi ici à remplir tous les espaces où l’ocre ne s’est pas fixé, car le blanc du tissu est perceptible. Un travail détaillé a été réalisé car le blocking devait être rapidement reproductible mais, en même temps, le portrait d’une reine ne pouvait aucunement être caricatural. 201


En terme de graphisme, l’ensemble fonctionne assez bien. Le personnage qui doit être mis en avant est rapidement reconnaissable, le reste de la composition est bien équilibré, ce qui facilite aussi la compréhension rapide du message : la reine d’Angleterre arrive sur le continent et il faut l’accueillir comme il se doit !

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'Queen Elizabeth" VLISCO BOOK, Queen Elizabeth, Vlisco, https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/h1000/?story=queen-elizabeth

« Elizabeth II and Philip » VLISCO BOOK, Elizabeth II and Philip, Vlisco, https ://stories.vlisco.com/en/fabrics/h950/?story=elizabeth-ii-and-philip

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Imprimé wax représentant Albert Bernard Bongo - Président de la République Gabonaise BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.87.


CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

6. I NCONNU.E, « Omar Bongo », Paris Match https ://w w w.parismatch.com/People -A-Z / Omar-Bongo

UNION, TRAVAIL, JUSTICE INCONNU.E INCONNU.E

Ce tissu est un des nombreux wax mettant en avant un chef d’état africain. Ici est représenté l’ancien Président Gabonais Bernard Bongo alias Omar Bongo. Il est resté à la présidence du pays de 1967 à sa mort en 2009. À son décès, c’est son fils Ali, qui a repris le pouvoir. Il a fondé le Parti Démocratique Gabonais en 1968 et accède au pouvoir un an plus tôt en intérim avant d’être élu président en 1973, étant le seul candidat.6 Le parti politique qu’il a fondé est resté le seul parti du pays jusqu’en 1990. Il a aussi posé énormément d’actes politiques lui permettant de rester au pouvoir, en dépit des demandes de son peuple, comme, par exemple, des alliances avec la France.

« Armoiries du Gabon » Herr Kriss & Szczepan1990, « Armoiries du Gabon », Wikipedia, https ://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1861900

7. INCONNU.E, « Symboles Nationaux », Présidence de la République Gabonaise, https://presidence.ga/symboles-nationaux/

Ce wax a donc pour but de montrer sa puissance. Il place son visage au centre des armoiries gabonaises pour exprimer « JE suis le pays, JE suis le Gabon ». En effet, les armoiries se situant derrière son visage signifient ceci : « L'écu est tenu par deux panthères noires. Elles symbolisent la vigilance et la valeur du président qui protège la nation. Il est posé sur un arbre, l'okoumé symbolisant le commerce du bois. Un listel en pointe porte la devise officielle du pays, en capitales d'or sur champ d'azur « UNION, TRAVAIL, JUSTICE ». Le cri, placé en chef, en capitales de sable, est « UNITI PROGREDIEMUR  » (en latin : « Unis, nous allons de l'avant ») ».7 Gardant le style graphique des armoiries, le créateur de ce wax, a incorporé du rouge et du jaune afin de, peut-être, mettre en avant la vivacité et la passion du chef d’État. C’était également des couleurs 205


très populaires. L’illustration de Bongo a nécessité une double impression car son visage est une photographie. En fond, sont répétés, sous forme de motifs, les blasons des neuf provinces du Gabon. Le fait de les mettre en arrière-plan signifierait qu’ils sont des piliers du pays. Chacune des illustrations présentes sur ces blasons met en avant les différentes richesses de ces régions. Les livres jaunes sont là pour montrer son niveau d’éducation et mettre en avant le fait qu’il « élève » sa population. En même temps, sur le livre de droite, sont inscrits les sigles « P.D.G » : Parti Démocratique Gabonais et sur le livre de gauche, se trouve le mot « Constitution », mettant les préceptes de son parti au même niveau que ceux de la Constitution.

« Les blasons des neuf provinces gabonaises » MBENDJE Brice Emery, « Armoiries du Gabon : les blasons des provinces », Bantoozone, https ://bantoozone.org/armoiries-gabon-blasons-provinces/

Par ces deux livres positionnés des deux côtés du portrait, on peut alors penser que ces deux livres sont les deux bases sur lesquelles Bongo base son pouvoir. Qui plus est, il met son parti au même niveau car pendant son mandat, son parti a été le seul parti du pays. Le fait de mettre son nom sur un bandeau reliant l’ensemble des éléments peut signifier qu’il est le lien entre la constitution et son parti. En termes de colorimétrie, la couleur rouge est légèrement décalée à cause de l’impression. Ce décalage rend illisible certains blasons placés à l’arrière-plan. Le processus d’impression y a bien évidemment participé. On peut voir que la photographie a été apposée à la fin du processus de production. Le décalage peut être un positionnement graphique car il est présent dans toute la composition. Toute cette composition met bien évidemment le chef d’état présenté en position de force et le glorifie comme une figure royale. Pouvant faire penser un peu aux écussons de certaines familles riches avec l’utilisation des différents codes graphiques. La tête au centre de la composition, les deux animaux (lions) représentant la suprématie ( le lion étant le roi de la jungle dans l’imaginaire collectif ).

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Aussi, l’utilisation des armoiries du pays comme base de cette transformation sublime l’ensemble de la composition pour vraiment donner une dimension « divine » à l’homme qu’était Albert Bernard Bongo.

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Obama, we rely on your for change GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », La Martinière, 2017, p.247.


CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

PRÉSIDENT BARACK OBAMA INCONNU.E 2008 Wax réalisant pour célébrer l'élection en 2008, de l'ancien Président américain, Barack Obama.

Voici un autre wax célébrant un chef d’état, ici comme on peut le voir, c’est l’ancien Président des États-Unis d’Amérique, Barack Obama. Ce qui est particulièrement intéressant sur ce motif, c’est le message « nous comptons sur toi pour le changement ». Les États-Unis sont connus pour l’esclavage, la ségrégation et autres exactions perpétrées contre les afro-américains. Au travers de ce message, les africains voulaient dire à l’ancien président : « On compte sur toi pour que grâce à ton nouveau statut, cela soit un renouveau pour les peuples noirs d’Amérique et d’ailleurs, tu as le pouvoir de changer les choses et l’image générale qu’on a de nous ». En effet, beaucoup de peuples africains ou/et noirs ont pris la victoire de l’ancien démocrate comme un pas en avant vers l’arrêt de la discrimination dont souffrent les noirs. Le fait qu’un noir soit devenu président d’une des plus grandes puissances mondiales a aussi donné de l’espoir aux jeunes générations. « nous aussi, on peut devenir des personnes importantes ». Après, tout n’est pas si simple et on peut observer, en 2020, que son impact n’a, certes, pas été aussi important que l’on penserait, mais a amené un petit espoir dans le cœur de tout ce petit monde. En termes graphiques, la technique d’impression est quasi la même que celle utilisée pour le wax Bernard Bongo. Les illustrations (le fond, les textes) ont été posées avant la photographie du visage. Il reste sombre dans le choix des couleurs : le rouge, bleu et blanc ainsi que du gris. Le rouge et le bleu sont des références directes au drapeau américain. Ce dernier tapisse le fond de l’imprimé avec à sa droite le continent 209


africain en aplat de gris. Le texte « nous comptons sur toi pour le changement » est en français sur la partie gauche et en anglais en haut à droite, surement répété sur l’ensemble du tissu pour permettre à tout le monde de comprendre le message. Le visage d’Obama est placé dans une forme ronde dont le contour contient le message « l’Afrique salue la démocratie américaine » en bas à gauche et est répété en anglais la même chose en haut à droite. Ensuite en dessous de ces deux cercles est indiqué « Président Barack Obama », l’insistance montre aussi la fierté du peuple noir. L’ensemble de la composition reste assez classique mais l’agencement des différents éléments apporte une touche très classe. Tout respire bien même si une meilleure incorporation des messages sous la forme ronde aurait été préférable.

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Autre wax célébrant l'ex 44 e Président des États-Unis d'Amérique. BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.111.

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Le sac de Michelle Obama ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories », VOGUE, https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-stories-behind-traditional-african-wax-prints


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

8. ABRAMS Melanie, « 8 Vibrant African Wax Prints And Their Unique Stories » https ://www.vogue.co.uk/gallery/eight-storiesbehind-traditional-african-wax-prints

LE SAC DE MICHELLE OBAMA VLISCO 2008 Le lancement de cet imprimé coïncide avec le voyage de l'ancienne première dame des États-Unis. En descendant de l'avion, elle portait un sac à main, qui a inspiré le nom du tissu. Fabriqué en Super Wax, qui est plus doux, plus fin et a une couleur supplémentaire, le port de ce tissu plus cher symbolise le prestige.8 Le sac de Michelle Obama est, comme de nombreux wax représentant des objets luxueux, un imprimé prisé. En effet, beaucoup des femmes n’ayant pas les moyens de se payer ce coûteux sac tentent se rapprocher de la grande dame en portant un tissu arborant celui-ci.

« Hibiscus » de Dries Van De Ven, 1952. INCONNU.E, « tissu wax à motif fleur rose », https ://afrikacolor.com/fr/boutique/tissu-wax-fleurrose/

Comme c’est souvent le cas, l’artiste n’avait pas créé le motif spécifiquement, au départ, pour célébrer Michelle Obama, cependant les commerçantes locales ont voulu établir un lien être ce wax et l’ancienne première dame afin d’augmenter les ventes… ce qui a vraisemblablement marché. À l’origine, le motif d’hibiscus que l’on retrouve sur le sac vient d’un autre imprimé, plus ancien, portant ce nom. Dans cette version revisitée, la fleur sert d’ornement au lieu d’être le sujet principal. L’illustration du sac est répétée sur l’ensemble du tissu mais les faces de celui-ci varient. Si on y retrouve toujours des entrelacements, ils sont cependant assez différents les uns des autres.

Imprimé en entier, Vlisco.com VLISCO, « le sac de Michelle Obama », http ://www.vlisco.com/vl03432104/nl/product/6360/

Sur le premier sac en bas à gauche, les torsades ressemblent à des lianes tressées entre elles. L’alternance entre le vert et le bleu crée dans l’œil une petite perturbation (on n’arrive pas à focaliser sa vision sur un élément précis) mais la fleur vient apporter une sorte de calme dans ce léger fouillis. On retrouve ici le fond rouge avec les lignes noires (fréquent dans d’autres wax). Il fait ressortir chacun des sacs. En plus, les traits 213


épais autour de ces derniers, soulignent la démarcation entre les deux espaces, en conservant une certaine discrétion. Le sac à droite au milieu possède la même fleur que tous les autres, mais le motif avant y est différent ainsi que les couleurs de la partie supérieure (vert et jaune). Ces deux couleurs donnent l’impression que le tissu a un peu dégorgé alors que sur les deux motifs, la couleur est beaucoup plus vive et « propre ». Autre version du sac de Michelle Obama VLISCO, « Le sac de Michelle Obama », https ://www.vlisco.com/fr/fabric_story/ michelle-obamas-bag/

Sur ce deuxième sac toujours, ce sont des lignes arrondies qui s’entrecroisent, faisant penser à des osselets. Cet effet « délavé » est aussi perceptible sur cette face inférieure. Le blanc est visible, ainsi que l’orange, qui pourrait, à l’origine, être le rouge du fond, délavé. La fleur, contrairement au reste, est restée chromatiquement la même partout. Enfin, le dernier sac placé dans le coin supérieur gauche est identique à celui situé dans le bas, à l’exception du motif de la partie dominante. Ce motif fonctionne sur le même principe, mais il est malaisé de comprendre ce qui est représenté.

L'imprimé porté. YEBBA MONIQUE, « atelier Yebba », https ://yebba.nl/wp-content/uploads/2016/03/ IMG_8475-e1458115347470. jpg

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La diversité des motifs sur les sacs apporte une richesse graphique, une plus-value issue de cette variété. La répartition des sacs dans l’espace est, en revanche, assez dense, avec un risque de lourdeur. Cependant, ce tissu porté en vêtements, se révèle élégant grâce à cet effet de répétition.


Autre version du sac de Michelle Obama OOSTERHOOF Inge, « Made in Holland : The Chanel of Africa », https ://www.messynessychic.com/2015/10/30/made-in-hollandthe-chanel-of-africa/

Autre version du sac de Michelle Obama OOSTERHOOF Inge, « Made in Holland : The Chanel of Africa », https ://www.messynessychic.com/2015/10/30/made-in-hollandthe-chanel-of-africa/

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ACTUALITÉ ET PEOPLE Permettant de célébrer un évènement arrivé dans l’actualité des différents pays africains, le wax est devenu une sorte de support de tabloïd. Dès qu’un évènement intéressant de l’actualité se déroule, on peut être sûr qu’un wax en rapport avec celui-ci existe. Les wax présents dans cette catégorie les plus connus sont liés à des évènements de la vie publique des populations d’Afrique Noire.


Différentes déclinaisons de « Bateau Bus » GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.85.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

1. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.85.

BATEAU BUS PIET SNEL 1950 Les deux réalisateurs, Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack du « King Kong », sorti en 1933, auraient emprunté le terme « Kong « à un des grands royaumes du Nord de la Côte d’Ivoire, où ne vit pourtant aucun gorille, pour sa sonorité exotique. Sur le marché ivoirien, il est simplement appelé « bateau-bus », aucun rapport donc avec « King-Kong ».1 Ce pagne pourrait avoir été pensé comme une affiche. Il est un des nombreux exemples incorporant des bribes de la culture occidentale au sein du motif. Les choix de couleurs sont plus classiques que dans les premiers wax. Le jaune et le rouge ainsi que le bleu forment un ensemble assez homogène et « pop ». Avec le côté américain de l’ensemble, cela ressemble à un clin d’œil.

King Kong de 1933 INCONNU.E, « King Kong », Movie art, https ://www.movieart.com/king-kong-1933-24614argentinean-re-release-poster-1950s-very-fine-condition-on-linen/

La version en bas à gauche est également une revisite mais avec des couleurs plus vives et encore plus pop. Tout cela apporte aussi une dimension plutôt surréaliste à l’ensemble. Ce sont des couleurs totalement opposées et ce choc apporte une impression d’affiche/ poster encore plus forte. Le positionnement des roues et des rétroviseurs permet de structurer l’ensemble et de répéter le bus dans le pagne pour que cela « respire ». À chaque réédition du wax dans d’autres teintes, on voit que le fond n’est jamais le même. Dans l’illustration en bas à droite, le fond est sectionné en quatre parties, où ce sont des traits simples qui sont reproduits. Dans l’imprimé en bas à gauche, on perçoit clairement l’intention d’avoir un côté un peu plus « trash » avec des couleurs inhabituelles. Dans l’illustration du haut, qui est probablement le modèle original, le fond est travaillé avec des sortes de petites étoiles. Un petit décalage est aussi visible sur les fenêtres à droite par rapport au fond. 219


SI on regarde le pare-choc on peut aussi le remarquer. Des couleurs plus traditionnelles sont aussi utilisées (les traditionnels jaune et rouge, plus le noir pour les traits). Mais contrairement, à certains, un véritable effort a été apporté pour représenter l’opacité des vitres avec les traits blancs, réservés à l’impression. Sur le côté gauche de l’illustration du haut, il y a aussi des traits noirs pour nous donner la sensation de mouvement, comme dans les comics. On peut probablement voir là un hommage à l’iconographie des bandes dessinées américaines. Cela justifie aussi l’allusion à King Kong, car les couleurs utilisées rappellent celles de l’affiche du film.

2. Musée de l'Homme, « Car rapide sénégalais »,http ://www.museedelhomme. fr/fr/musee/collections/rapide-senegalais-3851

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La représentation d’un bus fait aussi référence aux très connus cars rapides du Sénégal. Souvent, le propriétaire customise son bus avec des ornements, des écritures et des représentations d’objets à fonction magique et protectrice. Ou encore en y inscrivant des maximes morales, en y illustrant les évènements sportifs ou historiques, le tout recouvrant l’ensemble du véhicule.²



Z'ongles de Madame Thérèse GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.95.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

3. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.95.

Z'ONGLES DE MADAME THÉRÈSE HARRY VAN DALEN 1963 Ce dessin, malgré ses nombreuses appellations, est surtout connu sous sa dénomination « Z’ongles de Madame Thérèse » rendant hommage à Thérèse Houphouët-Boigny et à sa haute idée de l’honneur : l’épouse du premier président de la République de Côte d’Ivoire aurait affirmé que si elle surprenait son mari avec une maitresse, elle la défigurerait en lui griffant le visage.3 Une formation triangulaire se dégage de la composition de ce wax. Tous les éléments convergent vers un même point et sont positionnés afin de former une configuration triangulaire. Sur un étage, on observe neuf éléments de forme ovale (avec à leur extrémité, une petite pointe noire) porteurs en leur centre d’un petit aplat orange. Cette même forme se répète ensuite le même nombre de fois à l’étage supérieur. On y observe, en son centre, des petit points placés verticalement, laissant un petit espace au-dessus et en dessous, toujours à l’intérieur de la forme.

« Marie-Thérèse Houphouët-Boigny » KORKOS Alain, « Les ongles de Marie-Thérèse », arretsurimages.net, https ://www.arretsurimages.net/articles/les-onglesde-marie-therese

Le fond est de couleur rouge foncé, tirant vers le pourpre. Le choix des couleurs peut être fort significatif, si on se réfère au nom. Le rouge évoque la passion, le sang, la colère ! Le jaune : la puissance, le pouvoir et l’ego. Étant une femme de haut rang, elle avait une très grande fierté et ne supporterait peutêtre pas d’être humiliée de la sorte. Le noir, lui, sert de couleur de remplissage pour certaines formes ainsi que pour les traits. Les formes ovales pointues font effectivement penser à des ongles longs, probablement bien entretenus et manucurés. Un peu d’histoire, maintenant. Thérèse Houphouët-Boigny, née Marie Thérèse Brou, a été la femme du chef d’État Félix HouphouëtBoigny, de 1960 jusqu’à la mort de celui-ci, en 1993. Elle fut l’une des premières épouses de présidents Africains et était très fière de ce titre car à l’époque, les chefs d’états africains n’exposaient pas 223


leurs épouses au public. Grande, fine, élancée et bien habillée, elle représentait les aspirations d’un continent qui voulait avoir une image moderne, florissante et dynamique. Elle a séduit, partout que ce soit en Afrique Noire ou en Occident. D’ailleurs, lors de la visite du président ivoirien aux USA en 1963, la presse américaine l’a surnommée : « Africa’s Jackie » (la Jackie Kennedy de l’Afrique) ! Considérée comme la toute première Dame d’Afrique Noire, elle occupe une place toute particulière dans le cœur des Ivoiriens. Elle a notamment utilisé son statut afin de fonder plusieurs associations au service de sa nation telle : l’Association des femmes Ivoiriennes4, pour ne citer que la plus importante.

4. Ce mouvement national inauguré par Marie-Thérèse Houphouët-Boigny se voulait civique, social, économique et culturel, mais surtout apolitique. On avait envisagé, à l’époque, la création d’un mouvement national de femmes qui se préoccuperait du rôle et de la place de la femme dans la société. WIKIPEDIA, «  Marie-Thérèse Houphouët-Boigny », Wikipedia, https ://fr.wikipedia.org/wiki/Marie-Th%C3%A9r%C3%A8se_ Houphou%C3%Abt-Boigny

Elle dégageait, de son vivant, une aura de femme distinguée, qui savait ce qu’elle faisait et luttait pour l’égalité. Le fait de surprendre la maîtresse de son mari (si toutefois il en avait une), aurait été une honte insoutenable pour une femme de son acabit. Elle proclama alors, en quelque sorte sur la place publique, qu’elle n’hésiterait pas à en venir aux mains afin de maintenir son honneur. Le choix de représenter les ongles pour insuffler ce sens à ce wax est alors parfaitement compréhensible. En outre, dans cette culture, le fait d’avoir une belle manucure, des ongles en bon état, montre que l’on prend soin de soi. Et on voit qu’en cas de problème, ils peuvent devenir des armes de combat. Graphiquement, il y a quelque chose dans sa composition qui capte l’œil. On remarque le rappel de la forme ovale par la position centrale de l’axe vertical ainsi que la répétition des formes qui suivent les lignes puis progressivement se rejoignent au centre du wax. Celui-ci est intéressant par sa construction et aussi par le choix des couleurs qui, si on se réfère au titre, correspondent très bien à l’ambiance recherchée. La juxtaposition du rouge et du jaune avec le noir qui les délimite perturbe le regard et amène à chercher, à comprendre ce qui se passe dans l’image !

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Autre déclinaison du motif les Z'ongles de Madame Thérèse gabywaxshop, « les Z’ongles de Madame Thérèse », https ://www.afrikrea.com/en/article/wax-fabric-6-yards-5m40-les-z-ongles-de-madame-therese-or-suppositories-burgundy-red-ankara-wax-print-burgundy/3IZXIH5

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A17196 GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.166.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

5. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.166.

A17196 ABC 1988 Le succès mondial de l'épopée de science-fiction Star Wars est évoqué ici dans une composition explosive qui renvoie à la fois aux combats au sabre laser et aux plongées dans l'hyperespace à la vitesse de la lumière. En Afrique, où les premières projections de cinéma furent organisées en plein air, il est encore courant d'assister à une séance sous les étoiles. L'émotion est garantie quand l'action du film se situe dans l'espace.5

Ce motif est intéressant par la superposition de l’orange sur le noir qui fait ressortir le côté « explosif ». Les bandes noires qui en sortent (avec leurs bords vides reprenant la couleur de fond) attirent l’œil. L’utilisation de l’orange (uniquement afin de représenter l’explosion qui dépasse) est très intéressante. L’explosion dessinée par le négatif et non par les traits est un parti pris risqué mais qui fonctionne bien car les bandes noires sont en aplat. Les lignes noires qui surgissent sur les côtés rendent la lisibilité difficile mais, dans ce cas, c’est cohérent avec le thème général qui est : l’explosion. Ces lignes donnent la sensation d’avoir été posées aléatoirement sur le tissu, ce qui favorise le côté « chaotique » de l’ensemble. Le motif se répète bien et fonctionne grâce aux bandes noires qui relient les explosions entre elles en créant une cohésion. Au niveau graphique, le parti pris de faire de aplats noirs compacts et des phases de vide participe au chaos ambiant généré par la composition. Le fond dilué avec l’indigo (issu de la technique de production) apporte une impression de douceur à l’ensemble. Ce wax est emblématique de l’importation d’évènements occidentaux dans la culture africaine. Star Wars a été un phénomène mondial 227


qui a, bien entendu, accaparé la scène de la culture populaire durant de nombreuses années et encore aujourd’hui. Il était donc normal qu’on produise un wax sur ce thème. Ceci démontre que toute la culture occidentale s’invite ici, et plus seulement celle des pays colonisés. Ceux qui créent des motifs ont des choses à partager et le wax devient leur vecteur, même si leur interprétation revient, finalement, aux acheteuses africaines !

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CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

8. ABC est une compagnie de vente de textile originairement basée près de Manchester en Angleterre. Leurs tissus sont dorénavant imprimés dans une de leurs sociétés ATl ( Akosombo Textiles Ltd ) qui, elle, est située au Ghana. 9. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.254.

SWISS CHALETS RACHEL SHAW 2001 Cette représentation de chalets suisses prouve à quel point une grande diversité d'éléments culturels insolites peuvent être adaptés en motifs de wax, pour peu qu'ils répondent à une certaine codification graphique. Certes, la dessinatrice n'avait pas pour projet d'en faire la démonstration, mais de rendre hommage à la famille helvétique Bruunschweiler qui donna son nom au fabricant de wax ABC8 (A. Brunnschweiller & Co).9 Exemple de l'incorporation d'un élément totalement étranger à l'Afrique, ici les chalets suisses, dans un wax. C’est une illustration pensée comme un puzzle. On y voit l’incorporation des éléments les uns dans les autres. Ce motif a été pensé, peut-être, pour être aisé à utiliser pour le blocking. Ceci permet une répétition facile et rapide. Il y a des couleurs apposées par la suite, avec de légers décalages sur certaines parties du motif. Les superpositions de couleurs créent un dégradé malgré l’utilisation de couleurs assez peu communes à l’époque de sa création : vert foncé, brun, jaune ocre, blanc. Il y a une application des couleurs sur les fenêtres, pas forcément systématique. Souvent du bleu ou du blanc. On peut observer aussi qu'à certains endroits, la couleur bave. Ceci est dû aux mouvements de déplacement lors de son application. Exemple parfait de l'utilisation du wax par des européens afin de représenter des éléments graphiques leur faisant écho, le wax n'est plus seulement utilisé pour parler de choses en rapport avec l'Afrique mais aussi par des créateurs européens (dans ce cas-ci : suisses), pour évoquer des choses de leur quotidien !

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Swiss Chalets GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.254.



L’IMPRIMÉ WAX COMME SUPPORT D’EXPÉRIMENTATION Avec l’émergence de l’outil informatique, le wax est devenu un lieu d’expérimentation graphique pour bon nombre de dessinateurs. La technique d’impression du textile nécessitant une certaine rigueur, l’imprimé devient un parfait terrain de jeu pour de jeunes créateurs en recherche de défis. Beaucoup de wax naissent alors de cette envie d’expérimentation visuelle.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

DIAMANT FONDS ANKERSMIT 1935

Cette composition marche, graphiquement, très bien. On sent une graduation décroissante. Ayant trois tailles différentes, cela ne choque pas de voir cette graduation. Le choix des couleurs rappelle aussi les premiers wax créés par Brown Fleming. L'utilisation du rouge et du jaune sur fond noir, est magnifique, permettrait qu'on se perd dans l'imprimé. Tous les contours sont faits avec le même jaune, ce qui fait que quand on regarde l’ensemble, on ne sent pas de démarcation forte, la graduation ne se sent pas. L'usage de ce jaune contenant des nuances de rouge, virant donc vers l’orange, permet aussi une cohérence graphique. Les deux seules couleurs sont appliqués en aplat sur la partie supérieure alors que dans la partie inférieure, elles sont mises sur le bout du diamant. La façon dont ils sont disposés fait penser aussi à une « pluie » de diamants. Ressemblant à des petites gouttes, plus elles se rapprochent plus on les distingue. Le blocking de cet imprimé est particulièrement bien fait et un côté aléatoire a l’air d’avoir été mis en place aussi si on regarde le haut de l’illustration. On voit des petites erreurs de « dégoulinage » sur le tissu mais ça ajoute une touche assez « rough » qui apporte du caractère à la proposition graphique. On distingue la forme au fur et à mesure où notre regard navigue dans le wax. En fait, le rendu fonctionne tellement bien que des décennies plus tard, il est toujours plus populaire auprès des clientes que des modèles postérieurs représentant le même objet. 234


CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Diamant GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.61.


Scie circulaire GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.162.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

SCIE CIRCULAIRE ABC 1988

Ce wax est appelé « scie circulaire » à cause des formes circulaires qui le composent. Celles-ci s’entrecroisent ou/et s’unissent afin de former des demi-cercles évoquant la forme d’une scie ronde. Il fait également penser à certaines œuvres cubistes où l’on tente de représenter le mouvement sur une surface plane à partir de plusieurs points de vue. Les demi-cercles qui sont placés les uns à côté des autres, décalés, évoquent aussi les hélices d’un avion en mouvement et le vent qui s’en dégage. Ce wax est composé de trois couleurs : le blanc, le bleu et le noir. Le noir sert de couleur de contour ainsi que de remplissage pour le centre de l’illustration. Le bleu est présent mais dilué avec le blanc dans l’entièreté du tissu. Les parties segmentées de l’arc de cercle qui forment l’hélice/la scie sont terminées par de petites lignes tracées diagonalement, suivies d’une bande noire aux extrémités décorées d’une ligne striée. De la forme centrale, partent des lignes en arabesque rappelant le mouvement du vent. Elles se répètent sur tous les côtés de la forme centrale, dans des directions différentes. Elles peuvent suggérer un mouvement d’envol, comme s’il y avait de petites ailes côte à côte. Cette idée s’impose davantage encore si on regarde l’illustration en bas à gauche. On y voit de petits triangles avec des plumes sur une aile d’oiseau. Tous ces petits indices nous permettent d’accéder à une tentative de représenter le mouvement au travers du support du wax. Beaucoup de ceux-ci s’inspirent de divers courants artistiques euro237


péens, ici : le cubisme. Comme la plupart des wax sont créés par des européens, il est normal d’y trouver des signatures visuelles faisant référence à des courants artistiques européens comme le futurisme, fauvisme ou encore l'impressionnisme. Ce wax en est l’exemple. Graphiquement, la référence au mouvement du vent est assez originale. Plusieurs autres messages présents appartiennent au même champ : celui du mouvement. Les lignes partant dans toutes les directions apportent un charme captivant. Les espacer différemment à chaque fois produit un style dynamique et pourtant pas du tout chaotique. L’ajout d’aplats noirs permet une lisibilité de l’ensemble et amène des pauses dans le visuel. Ce procédé fonctionne bien mais qui devient vite redondant et confus.

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CRÉATRICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

6. Le raphia est un type de palmier que l'on peut retrouver dans les marécages et le long des cours d'eau. 7. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.209.

IMPACTOR MARGARET HICKSON 1998 Ces hexagones font référence aux motifs des étoffes de velours de raphia6 réalisées en République démocratique du Congo.7

Motif réalisé en partant des formes géométriques naissant du tissage du raphia(fig.1), trois couleurs dominantes reviennent dans l’agencement colorimétrique : le bleu, le rouge, le jaune plus l’orange (produit de la superposition du rouge et jaune). La technique de confection des motifs, dans ce cas de figure, est celle du bloc.

FIG.1 : étoffes de raphia CMO Paris, « Raphia Losange Fabric », Etoffe, https ://www.etoffe.com/inter/furnishing-fabrics/19485-raphia-losange-fabric-cmo-paris. html

Le motif est taillé dans un bloc de bois, enduit d’une cire hydrophobe, puis appliqué sur le tissu qui sera ensuite plongé dans le bain de couleur; celle-ci se déposera aux endroits où la cire n’a pas été appliquée. Voilà pourquoi le fond n’est pas uniforme partout. Parce que la peinture déborde, des « bulles » se créent sur le tissu amenant des petites tâches blanches (ou autres, selon la couleur du tissu) qui apparaissent en arrière-plan. Dans ce cas précis, les formes hexagonales ont été taillées dans le bloc de bois et répétées sur le tissu, permettant la création d’une uniformité. Par la juxtaposition des formes, les unes à côté des autres, des espaces de vide se créent, dessinant un motif floral. Certaines formes hexagonales sont, cependant, très peu détaillées et se vident progressivement, engendrant ainsi un dégradé de formes. Un dégradé de couleurs naît également du passage de plusieurs couches de couleurs. Celles-ci se mélangent pour créer leurs couleurs secondaires.

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Impactor GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.209.


FIG.2 : Feather Cog - Déclinaison verte et orange GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.285

FIG.3 : Feather Cog - Déclinaison orange et mauve GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.285


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

FEATHER COG CRAIG MCCANN 2004 Réinterprétation d'un wax d'Ebenezer Brown Fleming, « Coquillage/Régime de bananes »

Feather cog est une revisite du motif Coquillage ou Régime de Bananes d’Ebenezer Brown Fleming. Ici les traits sont beaucoup plus simples. Les lignes sont de taille variable et rendent l’ensemble assez homogène. On remarque une simplification des traits par rapport au dessin original, des couleurs plus osées et aussi des pastels sont utilisés. On sort donc du choix classique qu’est le rouge et le jaune sur fond noir. On peut avoir sur la FIG.2 que le bubbling (le fait d’avoir des bulles qui se forment lors de l’impression) est aussi présent que les traits remplissant le fond. Celui-ci est rythmé par des lignes verticales qui se croisent comme si un bataillon d’ailes y bougeait. Les plumes des ailes sont représentées sous forme de traits de graisses différentes, comme de vraies plumes en somme. Ces dernières sont de longueurs et épaisseurs variables : une liberté graphique a donc été prise par rapport au dessin original. L’espèce d’aura qui entourait la forme générale dans « Coquillage » de Brown Fleming est ici montrée sous forme d’aplats de couleurs complémentaires ce qui crée une fausse impression de mouvement dans la FIG.2. En plus, on peut constater que l’impression de « blocking » est vraiment visible car un léger décalage est perceptible en bas à gauche. Dans la FIG.3, cette envie de trois dimensions est moins mise en avant et c’est surtout le choix de couleurs qui est percutant. 243


On peut déjà constater ici que les déclinaisons d’un même wax peuvent réellement varier selon le même modèle : on peut avoir une base commune mais un résultat totalement différent à la fin. Le fond de la FIG.3 est, lui, d’une couleur moins vive mais contrastant avec les traits des plumes de couleur. La simplification des traits dans la FIG.3 est plus marquante visuellement et donne un sentiment de surcharge, alors qu’une homogénéité est plus visible dans la FIG.2. Dans cette réinterprétation, les ailes sont également plus déployées que dans l’ancienne version où elles étaient cloisonnées dans une forme. De grandes séparations sont aussi observables par les sortes de zig-zag qui séparent brusquement les espaces entre eux (en bas à droite sur les deux illustrations). Les couleurs bleu et orange étant complémentaires, cela apporte du rythme à l’ensemble. La superposition des deux couleurs donne, à nouveau, une impression de mouvement tout en apportant un aspect quelque peu floue (on n’arrive pas trop à savoir ce qui est devant ou ce qui est derrière). Le nom du wax nous aide à aussi comprendre le sens de son motif. « Feather » (qui signifie : plume) se réfère sans doute au motif originel, représentant des plumes et des ailes. La deuxième partie du nom (« Cog » voulant dire : rouage ) apporte un autre sens à l'illustration. On constate que le motif est placé de façon à évoquer un rouage, les formes s'emboîtant les unes dans les autres.

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

1. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.348.

FROZEN DREAMS HENK SCHELLEKENS 2009 L’'exigence du graphisme textile impose dorénavant de maitriser les outils informatiques et d'explorer la photographie. Ces techniques ont été particulièrement valorisées par Henk Schellekens, qui a composé ce dessin représentant d'énormes pierres précieuses.1

Composition assez chaotique ayant des inspirations cubistes. Grâce à l’introduction, on comprend que l’intention de l’artiste est de représenter des pierres précieuses. Avec cette information, on réalise alors que les éclats parsemés dans l’image et le petit scintillement en bas à droite sont des références à des pierres. Ce scintillement est le résulat de la réflexion de la lumière sur les pierres.

2. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.348.

Les deux couleurs utilisées sont des nuances de vert et le noir ainsi que la couleur blanche du tissu. Toute la composition de l’image est tramée, sauf le blanc. Une démarcation très nette est observable entre les différents éléments. La dimension cubiste est visible car mettant les outils informatiques au service de son art, il crée une fragmentation de plusieurs éclats qui s’apparentent à des pierres précieuses et qui malgré tout, nous évoque une multitude d’autres éléments.2 Notre interprétation serait que tout objet du quotidien peut se retrouver dans un wax, que ce soit un quotidien européen, africain, asiatique etc. Il est possible, grâce à notre passif, de trouver différents sens selon le moment, le contexte ou l’époque. Ce wax nous évoque un miroir brisé dont on peut voir les différentes faces, une œuvre abstraite évoquant le subconscient ou une fresque contemporaine. La série, par son nom Frozen Dreams, nous montre que les rêves sont finalement plusieurs éléments de notre quotidien qui s’entrechoquent afin de créer un ensemble parfois vraisemblable. Ici, c’est le moment-clé d’un rêve qui a été capturé et qui n’a de sens que lorsqu’on voit l’ensemble du tableau.

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CRÉATEUR.RICE : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

MAMA BENZ INCONNU.E INCONNUE

Frozen Dreams GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.349.


Frozen Dreams GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.350.


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

3. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.350.

FROZEN DREAMS NICO VERBART 2009 Frozen dreams est une série conçue à l'aide des outils informatiques afin d’utiliser le wax comme support d’expérimentations graphiques. Plusieurs designers tels que Nico Verbart et Henk Schellekens ont alors utilisé les contraintes de fabrication qu’exigent le wax afin de générer des pièces de wax graphiques et « actuelles ». Le wax, ici, n’a plus pour mission de communiquer un message mais de devenir un support graphique où tout est possible.3 Une composition des plus classiques : une sphère blanche au centre avec des traits bleu clair qui se croisent. Ces traits bleu circulent tout autour de la sphère. Autour de la sphère, se trouve trois cercles qui l’entourent. De ces trois cercles s’échappent deux fils partant dans des directions opposées. Ces traits circulaires entourant la sphère sont surplombés d’une trame au fond jaune avec des points bleus. Cette trame jaune entoure toutes les formes rondes du wax. Sur toutes les extrémités du wax, se trouvent plusieurs cercles. Ces cercles, quant à eux, sont de couleur noire avec un dégradé rouge en leur centre qui donne la sensation de s’évaporer telles des molécules. Le dégradé du fond des cercles noirs est teinté de bulles jaunes. Ensuite, le côté droit du wax est séparé en deux parties : Une première partie avec un trame de points noirs avec un fond rouge tacheté et une deuxième partie bleu opaque. La partie gauche a également été élaborée de cette façon, par contre, l’emplacement des couleurs et de la trame est inversée. Le contour des cercles sert de démarcation pour mettre en avant la séparation qui s’opère entre les espaces. Les couleurs utilisées sont le rouge, le jaune, le blanc et le noir. 249


Le noir servant surtout pour la création de trames. Le bleu est utilisé surtout dans la forme centrale pour amener notre regard vers cette sphère. Celle-ci occupe tout l’espace car l'effet de volume appliqué à la sphère est accentué par le travail de recherche mené par la technique du batik.

4. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.350.

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Le décor de la grosse boule blanche n'est pas identique sur l'endroit et sur l'envers du tissu. L'effet de superposition conjugué avec les nuances apportées à l'intensité du trait révèle toute son efficacité visuelle. La parfaite synchronisation des autres éléments du tissu fait ressortir encore davantage ce motif « lumineux ».4



CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

EXTRAVAGANCE UNIWAX 2017

Ce wax s’orne de cercles pleins oranges et verts, et de cercles vides au contour rouge. Ces cercles s’entrecroisent mais beaucoup ont des fonds qui débordent en dehors de leurs espaces propres. Des lignes et des points sont placés sur le fond du tissu comme une trame parfois délimitée par un cercle. De cette méthode, est issu un effet de type « psychédélique ». Grâce à la superposition de différents cercles et au positionnement des couleurs, se crée une illusion d’optique. Par le choix des couleurs, cela peut évoquer le mouvement psychédélique (où l’on essayait de recréer, dans les arts plastiques, les effets que l’on pouvait « voir » quand on prenait des psychotropes). Ce wax pourrait être une référence à ce courant artistique. N’ayant pas d’éléments explicatifs de celui-ci, on ne peut faire que des suppositions !

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Extravagance GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019, p.371.



Partie IV : le wax aujourd'hui ÉVOLUTION DU WAX DE SES DÉBUTS À NOS JOURS Le déclin du wax avec le passage à l’an 2000, les changements stratégiques ainsi que l’évolution des modes de consommation amènent à un bouleversement. Les Nana Benz s’essaient à de nouvelles habitudes de vente, mettant les plus grands modèles en réserve afin de ne pas épuiser l’envie des acheteuses.

1. V lisco est la plus grande société de ventes de tissu wax dans le monde. Existant depuis 170 ans, il a la main mise sur le marché du wax de luxe. 2 . GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.201.

Cependant, ce choix n’est pas du goût de Vlisco1, devenu, entretemps, le leader du marché. Craignant que cette stratégie ne conduise à une chute de leur chiffre d’affaires, l'entreprise s'y oppose et arrive presque à la rupture de contrat avec les revendeuses. Elle se ravisera cependant en réalisant l'importance du rôle des Nanas dans leur marketing. Au même moment, Abidjan, la capitale ivoirienne, devient le centre de production, de transmission et de consommation du wax 2 où beaucoup de créateurs viennent injecter leur style dans l’univers de l’imprimé wax. Le wax influence alors les modes de consommation. Les dessins présents, qu’ils soient figuratifs ou abstraits, dépeignent la réalité des sociétés africaines.

3. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de la Martinière, 2019, p.202.

« Toutes les questions de société s’y trouvent posées : la progression de la désertification qui alerte le rôle des arbres dans l’environnement ; l’accès à l’eau et à l’électricité qui devient un thème récurrent, exprimant autant des besoins vitaux que le désir d’un certain standing… Des problématiques d’actualité sont également présentes. L’évocation de la famille se fait plus rare mais celui de l’amour demeure. »2 Après 2004, le marché du wax devient accessible pour la Chine, l’Inde et le Pakistan car l’OMC, l’organisation mondiale du commerce, a retiré les quotas d’importation du textile. Par ce déferlement, la Chine, avec ses wax à moindre coût, prend rapidement jusqu’à 95% 255


The British Museum, "a brief history of wax resist printing", http : //digitalwaxprint.com/iterations/histo ry-of-wax-resist-printing/

des parts du marché, ce qui amène la fermeture de nombreuses usines textile à l’Ouest du continent africain.

BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.44-48.

Avec ces imprimés wax à moindre coût, le tissu devient accessible à tout un pan de la population africaine ainsi qu’à la diaspora, qui est en pleine recherche d’un moyen l’aidant à célébrer son « africanité ». Cependant, l’enrichissement des vendeurs chinois provoque le déclin du monopole des usines africaines sur la vente. Le wax devient pourtant de plus en plus populaire sur la scène internationale malgré une chute certaine de sa qualité. Une petite équipe de dessinateurs basée en Angleterre mais issue de l’entreprise ABC, continue à garder un style graphique proche de ce qui se faisait afin de créer de nouveaux modèles respectant les codes de l’authentique wax. Cette petite équipe est composée d’artistes présents dans ce mémoire, comme Rachel Wood. La société ABC a d’ailleurs délocalisé ses locaux, quittant l’Angleterre afin d’être plus proche du marché africain, en s’installant dans la capitale ghanéenne, Accra. Du côté de la grande Vlisco, la concurrence se ressent. Faisant ses plus grosses ventes sur les modèles copiés par les chinois, la société doit changer son fusil d’épaule. Roger Gerards, nouveau Directeur artistique de Vlisco veut valoriser le talent des dessinateurs, il met en avant l’utilisation de l’outil informatique afin de permettre de jouer sur le volume, la perspective ainsi que la texture sur ce support qu’est le wax. Une refonte de certains classiques est faite, que ce soit sur le plan graphique ou conceptuel. Vlisco commence peu à peu à se rediriger vers le marché du luxe et leurs produits séduisent de plus en plus de grands couturiers.

LIEU D'EXPÉRIMENTATION GRAPHIQUE Avec le changement de directeur artistique de Vlisco, devenue leader sur le marché du wax de qualité, l'outil informatique participe à la créativité et à l'innovation. Des collections comme « Frozen Dreams » jouant sur le volume, la superposition des couleurs et la perspective, naissent alors apportant un nouveau niveau de lecture. 256


Avec ce changement de direction, les créateurs mettent alors à profit ce nouveau médium, créant parfois des œuvres d’art en utilisant la contrainte de la technique d’impression textile qu’est celle du batik. Avec son changement de statut, le wax perd peu à peu son rôle de miroir social, de vecteur de sens grâce aux avancées technologiques mais revêt celui d’objet identitaire et de mode pour les afro-descendants. Il ne sert plus vraiment de support de communication mais devient un support d’expression graphique et culturel pour les uns et un signe d’exotisme et de représentation pour les autres.

L'IMPRIMÉ WAX DANS L’ART CONTEMPORAIN Plusieurs artistes ont utilisé l’image « d'africanité » qu’incarne le wax afin de servir leur message.

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Barthélémy Toguo «Se considérant comme appartenant à une diaspora privilégiée, il se sent responsable et engagé vis-à-vis de son pays d’origine»

1. BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.161.

Né en 1967, Barthélémy Toguo est un artiste plasticien camerounais. Il vit à Paris mais navigue entre la capitale française et Bandjoun au Cameroun. Se considérant comme appartenant à une diaspora privilégiée, il se sent responsable et engagé vis-à-vis de son pays d’origine, dont il veut encourager le développement. Son travail artistique touche de nombreux sujets comme les difficultés économiques, la sexualité, le terrorisme et toutes les formes d’oppression.1 On peut aussi y retrouver une certaine forme de provocation. Par exemple, dans une performance, il s’est habillé comme un éboueur et s’est installé dans un train Cologne-Paris en première classe. Son accoutrement inhabituel a mis mal à l’aise les autres passagers, ce qui a failli amener le conducteur à l’expulser du train. Cette provocation peut aussi être visible dans une autre performance, Pure and Clean. Dans cette dernière, il a lavé deux drapeaux américains à la main avant de les suspendre sur une corde.

2. J OUBERT Daria, «Biography – Barthelemy TOGUO», https ://www.barthelemytoguo.com/biography/ 3. J OUBERT Daria, «Biography – Barthelemy TOGUO», https ://www.barthelemytoguo.com/biography/

« Son acte est ancré dans la place qu’occupent les États-Unis sur la scène internationale, que l’artiste juge arrogante : la peine de mort, le refus de ratifier le protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, etc. »2 « Avec l’installation Mamadou Airlines, l’artiste présente une piste de décollage encombrée sur laquelle les avions s’engluent. Il s’agit ici de montrer que l’Occident reçoit volontiers les ressources naturelles du tiersmonde, mais beaucoup moins les hommes qui en viennent.»3 Son installation Urban Requiem part de la même thématique. En observant son passeport, il remarque qu’il est bien plus « tamponné » que ceux de ses collègues artistes natifs des pays d’Europe ou d’Amérique du Nord.

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4. INCONNU.E, « Barthélémy Toguo – artiste », Galerie Lelong & Co, https ://www.galerie-lelong.com/fr/artiste/25/ barthelemy-toguo/

« Il sculpte alors un lot de tampons surdimensionnés, portant un nom de pays, un mot ou une expression évoquant visas et permis de séjour (« No entry », « Périmé », « Transit sans arrêt »), alors que des slogans placardés sur le mur expriment les espoirs et revendications de mouvements populaires à travers le monde. » 4 Pour rester dans l’objet de notre étude, nous allons parler de son installation utilisant le wax de façon significative : « Road to Exile »

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Barthélémy Toguo The New World Climax, 2000-14 Installation with wooden stamps, tables, ink prints on paper Gallery Stevenson, « The New World Climax, 2014 », artbasel.com, https://www.artbasel.com/catalog/artwork/14046/Barth%C3%A9l%C3%A9my-Toguo-The-New-World-Climax

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Barthélémy Toguo, Road to exile, 2007. Technique mixte, 220 x 260 x 135 cm. Paris, Collection du Musée national de l’histoire de l’immigration © Adagp, Paris, 2019 ; photo Courtoisie Galerie Lelong Paris


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

ROAD TO EXILE BARTHÉLÉMY TOGUO 2007 Beaucoup de ses installations explorent les difficultés qu’endurent les personnes qui se retrouvent en situation d’exil à cause de situations politiques ou économiques invivables. À la recherche d’un lieu pour vivre en paix, beaucoup prennent des embarcations et c’est ce sujet que l’artiste aborde dans « Road to Exile ». Afin de traverser les mers, les passeurs (pour qui c’est une question de rentabilité) remplissent leurs embarcations à ras bord. Remplies et n’offrant même pas un confort élémentaire, beaucoup chavirent et entraînent avec cela, leur lot de morts. Les conditions de traversée sont déshumanisantes pour ceux qui empruntent cette voie et c’est ce que Toguo a voulu montrer dans cette installation. L’utilisation des imprimés wax, ici, nous permet de voir aussi qu’une diversité de personnes traversent ces eaux. Que nous soyons ghanéens, rwandais, béninois, zimbabwéens, nous sommes tous vus de la même façon et la mort nous touchera de la même manière. Pour ceux qui nous accueilleront, nous sommes des étrangers. Nos ethnies, nos nationalités sont les mêmes à leurs yeux, nous sommes tous des « noirs ». Le tissu wax a cette ambivalence. Il nous aide à montrer cette «  africanité » mais il masque aussi cette diversité justement présente sur le continent. Nous ne sommes plus vus comme des groupes ethniques à part entière mais comme représentant de toute une partie du continent africain. L’individualité « s’efface » au profit de l’image fantasmée de ce tissu. Partant d’un vécu personnel, ce sentiment d’être « représentant » de tous ces groupes ethniques à cause d’une couleur de peau « commune » est parfois pesant pour les afrodescendant.e.s. Dans mon cas, c’est souvent inconsciemment que j’applique ce biais de vouloir « bien paraître » aux yeux des gens. En effet, aussi loin que je me souvienne, on m’a souvent dit des choses comme « ouais mais VOUS les noirs » ; « VOUS, les noirs vous aimez ... ». 263


Ce genre de phrases, on pourrait en citer à la pelle et je ne pense malheureusement pas que cela soit anecdotique pour beaucoup de personnes originaires d’Afrique Noire. Après, ce n’est pas un phénomène qui s’applique uniquement aux individus originaires d’Afrique subsharienne, ne nous trompons pas là-dessus.

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Barthélémy Toguo, Urban Requiem, 2015, Ladders, wooden stamps, stamp imprints, Variable dimensions Collection du Musée national de l’histoire de l’immigration © Adagp, Paris, 2019 ; photo Courtoisie Galerie Lelong Paris

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Kehinde Wiley « Je peins car je veux voir des gens comme moi »

Kehinde Wiley est un peintre afro-américain, né à Los Angeles et originaire du Nigéria, de descendance Ibo.

5. B OUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.157.

Il a un discours très politique dans sa démarche artistique où il insiste sur les discriminations raciales en imposant les personnes noires comme des héros actuels. Il magnifie les marginalisés, discrédités et les opprimés.5 Son inspiration est en partie influencée par les mugshots pris par la police en cas d’arrestation et les studio photo en Afrique. Dans ces studios, les imprimés textiles sont utilisés comme arrière-plan. En effet, ce qui est important pour Kehinde, c’est le fait que les gens posent volontairement pour ses œuvres. Avec le passé colonial du continent, l’Homme noir a souvent été pris en photo à son insu et exposé comme trophée, objet de raillerie ou bête de foire. Un deuxième phénomène, le white saviorism, pourrait aussi expliquer cette réticence de l’Homme noir à être pris photo.

6. INCONNU.E, « Quelques mots sur le complexe du blanc sauveur ou le « white saviorism », https ://sorbonnehumanrights.wordpress. com/2019/02/14/quelques-mots-sur-lecomplexe-du-sauveur-blanc-ou-le-whitesaviorism/

« Le white saviorism ou le complexe du sauveur blanc désigne l’humanitaire ou encore le touriste qui prend en photo des enfants dans des pays en développement sans s’inquiéter d’avoir leur autorisation ou celle de leurs parents, mais aussi celui ou celle qui organise des « voyages humanitaires » en recrutant sans scrupules des personnes nullement qualifiées pour participer à des « missions » à l’étranger. »6 Ce phénomène est une autre forme de colonialisme et de déshumanisation que connaissent les populations noires sur leur propre continent. Rappelant alors les photographies d’époque où des explorateurs/ missionnaires volaient des clichés sans tenir compte du consentement du modèle.

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Dans ces photographies, les personnes prises en photo étaient toujours représentées sous forme de « victime » du cliché. Alors, au travers de ces studios photo, ils se réapproprient leur image, leur fierté grâce au médium qui, auparavant, les avaient déshumanisés. Par ces deux faits historiques, on peut mieux comprendre l’importance du consentement pour Kehinde.

7. BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.158.

8. K EHINDE Wiley, « FAQ », http ://kehindewiley.com/

Son processus créatif nécessite et repose sur cette notion car il procède comme suit : Il choisit des individus au physique et/ou comportements intéressants. Il les met ensuite en scène dans une position empruntée à d’anciens tableaux puisés dans le répertoire de l’histoire de l’art puis reproduit en grandes dimensions sur canevas, la personne dans des contextes inattendus, historiques ou glorieux. Il remplit enfin l’arrière-plan avec différentes surfaces d’étoffes.7 Ce qu’il est important de noter, c’est que toutes les personnes représentées dans son travail sont des personnes noires car, comme il le dit : « Dans mon travail, j’essaie d’utiliser le corps noir pour précisément contrer l’absence de ce corps des espaces de musées dans le monde «...»  je peins car je veux voir des gens comme moi ».8 Son œuvre la plus représentative, à mon sens, de tous les messages qu’il veut transmettre est « On top of the world ».

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« Obama is seated, the chair resting, one assumes, on a soft, unseen bed of soil. But the bottoms of his shiny black shoes simply float. » © Kehinde Wiley Image tirée d’un article de Cunningham Vinson pour le New Yorker.. CUNNINGHAM Vinson, « The Shifting Perspective in Kehinde Wiley’s Portrait of Barack Obama », Newyorker.com, https://www.newyorker.com/culture/annals-of-appearances/the-shifting-perspective-in-kehinde-wileys-portrait-of-barack-obama


On top of the world WILEY KEHINDE, « On top of the world », https ://www.kehindewiley.com/africa/On_Top_of_The_World.html


CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

ON THE TOP OF THE WORLD KEHINDE WILEY 2008

Ce tableau représente un homme noir le poing levé avec, en arrièreplan, une réinterprétation du wax « Hirondelle ». L’homme regarde fièrement devant lui, avec la main sur le cœur et le poing levé. Plusieurs références sont présentes ici : le fameux poing levé, signe de fierté et symbole du mouvement Black Power luttant contre la ségrégation raciale aux États-unis dans les années 60 et, en arrièreplan, le motif d’un oiseau, symbole de liberté. L’homme porte à son poignet gauche un bracelet, afin de montrer qu’il est fier de son africanité, de ses traits « négroïdes » et de ce qu’il représente. Il veut montrer qu’il n’abandonnera pas la lutte, qu’il ne se laissera pas faire par ce racisme d’État et qu’il continuera à rester fier. L’imprimé en fond est bien évidemment là pour rappeler son héritage culturel. Peut-être que cet homme a vécu toute sa vie sur un autre continent, dans une autre culture mais il ne perd pas ses origines. Il est, comme ce tissu, le fruit d’une diversité culturelle qui a engendré d’autres choses mais qui n’en reste pas moins intéressante. Il est, peut-être, le fruit d’une diaspora influencée qui est fière d’où elle vient et qui veut l’afficher.

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Yinka Shonibare « Par ses créations, Shonibare a consacré sa vie professionnelle à prouver combien le principe est inconsistant et bancal »

Yinka Shonibare est un artiste anglais d’origine nigériane, né en 1962. À l’âge de trois ans, il déménage à Lagos, la plus grande ville du Nigéria, et revient ensuite à Londres pour ses études. 9-10. B OUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.160.

Son travail explore des thématiques comme les problématiques de race et de classe.9 Cela au travers de différents média comme la peinture, la sculpture, la photographie et le film.10 Sa marque de fabrique est de vêtir ses personnages d’imprimés qualifiés d’africains mais produits aux Pays-Bas. Il les place ensuite dans des postures s’inspirant de scènes de l’époque victorienne. L’anecdote suivante est intéressante pour nous permettre de mieux comprendre la démarche de l’artiste :

11. O brist & Shonibare 2013, p.19, Creen, 2014, p.11. 12-13. B OUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.160.

« Quand Shonibare faisait ses études d’art à Londres, il fut interpellé par un de ses professeurs qui lui demanda pourquoi il ne créait pas en utilisant des références africaines, sous-entendant que c’était là que se situait son héritage. Pour le jeune artiste qu’il était, ayant en partie grandi et étudié à Londres et appartenant à plusieurs univers culturels, la question avait quelque chose d’incongru que le wax endossait de la même manière.11 Cette incongruité, il a décidé de l’exploiter dans tous ses ressorts absurdes. Dans les faits, ce professeur lui a donné l’impulsion d’aller explorer du côté d’un « exotisme africain ». L’idée l’a finalement rendu célèbre, mais par ses créations, Shonibare a consacré sa vie professionnelle à prouver combien le principe est inconsistant et bancal ».12 Le travail de Shonibare interroge la violence de l’impérialisme, sa supériorité économique et des pouvoirs sur place.13 L’utilisation du wax dans ses œuvres est aussi là pour montrer que, comme l’imprimé textile wax, Yoshibare n’est pas limité à une seule identité, une seule culture, un seul univers.

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The American Library YINKA SHONIBARE, Detail of “The American Library (Activists),” 2018 (hardback books, Dutch wax printed cotton textile, gold foiled names). Courtesy the artist and James Cohan, New York, Photo by Patrick Sampson

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CRÉATEUR : ANNÉE DE CRÉATION : NOM :

14. The American Library, «The American Library», https://www.theamericanlibraryinstallation.com/about

15. The American Library, «The American Library», https://www.theamericanlibraryinstallation.com/about

THE AMERICAN LIBRARY YINKA SHONIBARE 2018 La Bibliothèque américaine de Yinka Shonibare CBE est une célébration de la diversité de la population américaine. Elle se veut instigratrice de découvertes et de débats. Les milliers de livres de cette installation artistique sont recouverts d’imprimés textiles wax, signature de l’artiste. Depuis les années 1960, ce tissu est célébré comme un symbole de l’identité africaine. Les origines mixtes de ce tissu en font une parfaite métaphore de l’identité multiculturelle ancrée dans l’histoire des États-Unis.14 « Sur la tranche de beaucoup de ces livres figurent, imprimés en or, les noms des personnes qui ont immigré ou dont les ancêtres ont immigré aux États-Unis. Sur d’autres livres figurent les noms d’Afro-Américains qui se sont installés en Amérique ou dont les parents ont quitté le Sud-américain pendant la Grande Migration. Parmi ces noms figurent W.E.B. Du Bois, Maria Goeppert Mayer, Steve Jobs, Bruce Lee, Ana Mendieta, Joni Mitchell, Toni Morrison, Barack Obama, Steven Spielberg, Carl Stokes, Donald Trump et Tiger Woods. Ces personnes ont toutes contribué significativement à la vie et à la culture américaines et représentent tous les domaines, de la science à l’activisme, de la musique à la philosophie et de l’art à la littérature. La plupart de ces personnes ont également été victimes, à des degrés divers, de discrimination et de difficultés pendant et après leur réinstallation ou celle de leur famille. Un autre ensemble de livres de la bibliothèque contient les noms de personnes qui se sont prononcées contre l’immigration, l’égalité ou la diversité en Amérique. »15 Encore une fois, ici, le wax est utilisé comme outil de revendication d’une identité africaine. Comme dans la plupart des oeuvres de Shonibare, le wax est plus qu’un simple tissu, c’est un symbole, un élément de ralliement. Il prend une dimension toute autre dans le contexte dans lequel Yinka le place. 275


L’imprimé wax devient l’étendard permettant à toute personne noire de se retrouver reliée à l’Afrique. On ne parle plus ici d’ethnies, mais d’une communauté entière regroupant une diversité d’individus aux codes culturels et sociaux totalement différents. Parfois antagonistes, dans des rares cas, diamétralement opposés mais réunis par un même tissu. Tissu qui, même s’il n’a pas une origine africaine, devient le représentant d’un continent uni autour d’un même objet. N’appartenant à aucune ethnie ou communauté particulière, il permet à l’artiste qu’est Yinka Shonibare, d’exprimer ces idées et de réunir tout le monde à la même enseigne. Par ailleurs, si on regarde bien l’illustration en pleine page, on remarque que plusieurs wax dont nous avons parlé dans ce mémoire, sont visibles sur les tranches.

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The American Library Yinka Shonibare MBE, The British Library, 2014. Hardback books, Dutch wax printed cotton textile, gold foiled names, five wooden chairs, five iPads, iPad stands, headphones, interactive Application and antique wind-up clock. © Phoebe D’Heurle; Courtesy of James Cohan Gallery, New York.

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Conclusion Le wax a été le support de projection d’une Afrique fantasmée par les impérialistes. Utilisé par les occidentaux pour représenter l’Afrique quand on parle de textile et de design graphique, il a remplacé les autres textiles authentiquement africains. Ce mémoire a été entrepris principalement pour en apprendre davantage sur une Afrique que je ne connaissais pas. J’ai vécu la majorité de ma vie en Belgique donc j’avais, par mon éducation « européo-centrée », une image fantasmée du continent. Vivant toutes les expériences et discriminations que les Africains et afrodescendants subissent, j’ai voulu appréhender et comprendre la place que ce tissu avait dans notre quotidien. Avant de commencer ce mémoire, j’avais une vision assez naïve de ce qu’était un wax. Dans mon enfance, ce tissu se trouvait constamment dans mon paysage visuel, mais je ne m’y intéressais pas réellement. Puis, en apprenant les conséquences de son exportation sur l’économie et les populations locales, j’ai eu l’impression d’avoir été flouée. Parce qu’en fait, le wax est présent dans notre quotidien à tous, se posant comme représentant d’une africanité globale inexistante et j’ai eu la sensation d’avoir participé à cet effacement des cultures constitutives du continent. Cependant, lors de mes analyses, j’ai réalisé que le wax avait servi aux populations avec lesquelles il est rentré en contact. Servant de support de communication, il a aidé à exposer des problèmes de société qui n’auraient peut-être pas été connus des pays voisins ou les pays occidentaux. Il a aussi aidé à propager des codes culturels de différents pays ayant participé à sa dispersion et à retracer l’histoire du continent, ou du moins l’ouest du continent. En exposant des problématiques sociales avec Milliardaire (p.152), économiques avec Source of Life(p.191), Mama Benz (p.131), Venti279


lateur(p.167) ou encore politiques avec Union, travail, liberté(p.203). Au travers de son histoire, on redécouvre toute une culture visuelle, graphique et sociale. Une forte influence de l’Occident est constatable dans l’évolution du wax : dans ce qui nous est montré, on voit que les puissances européennes ont interférées dans les histoires des populations africaines. À l’origine, le dessinateur le plus souvent européen projetait l’image d’une Afrique fantasmée. Encore aujourd’hui, beaucoup de gens imaginent une partie de ce grand continent au travers du wax. Cependant, à partir des années 2000, on peut voir que de plus en plus de motifs sont créés par des natifs du continent et cette mainmise européenne s’est relâchée. Dans l’imaginaire collectif, il est représentant d’une culture globale et non d’une imagerie européenne. Yinka Shonibare, artiste contemporain britannico-nigérian, dont la manière de voir les choses influence inconsciemment mon « art » ou plutôt mon processus créatif. Comme beaucoup d’afro-descendants, je suis souvent rappelée à mes origines, que je le veuille ou non alors que je ne suis pas que d’origine africaine, j’ai grandi dans plusieurs milieux culturels et j’aimerais que l’on arrête de me « catégoriser » juste sur un critère de couleur. Les artistes racisé.es n’ont pas à devoir incorporer leur « héritage » dans leur travail. C’est certes important de se rappeler de ses origines, mais ce critère n’est pas obligatoirement constitutif de notre travail artistique. Et étrangement, ce postulat est surtout applicable aux minorités visibles. Ce mémoire sur l’imprimé wax m’a permis de réaliser aussi que je ne suis pas forcément définie uniquement par mes origines et que le melting-pot culturel dans lequel je vis depuis ma naissance est quelque chose de bénéfique pour mon parcours professionnel et intellectuel. Qui plus est, lors de mes recherches, j’ai réalisé l’ingéniosité avec laquelle les Africains avaient réussi à se réapproprier ce tissu. À partir d’histoires qui n’étaient pas les leurs, ils ont réussi à s’appro280


prier les motifs afin de se créer leurs propres histoires et souvenirs. Ils ont incorporé un élément étranger dans leur quotidien et ont réussi à faire de ce tissu, un support de conservation de leur histoire, que ce soit les moments sombres ou joyeux. On peut retracer aisément, si on cherche bien, l’histoire de l’ouest du continent au travers de tous les tissus produits. On voit aussi que même si de grands groupes comme Vlisco, entreprise de textile hollandaise, ont la main mise sur le marché du wax, les Africains sont les premiers grands revendeurs et garants du succès de la marque. Ce sont eux qui créent l’histoire, qui la modulent, qui la vendent. Finalement, ce tissu, qui n’était pas originairement africain, est devenu indissociable du continent.

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ANNEXES



L'HISTOIRE DÉTAILLÉE DU WAX USEAM, « Épisode 5 de la Saga du Wax : à vos marques, prêts, cousez ! », https ://useam.blog/2018/08/31/coudre-wax/

Le wax tient ses origines techniques du batik javanais dont on retrouve des traces dans l’Égypte pharaonique, la Chine et même de l’Inde. La technique du batik se développe en Indonésie, sur l’île de Java et continue son perfectionnement jusqu’à devenir une technique de confection textile protégée par le Patrimoine Immatériel de l’Unesco en 2009. Pour arriver jusqu’en Afrique, il a d’abord fallu l’arrivée de la compagnie néerlandaise des Indes Orientales en Indonésie.

BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.44-48, p.52-54. USEAM, « Épisode 1 de la Saga du Wax : les origines », Useam, https ://useam.blog/2018/08/01/wax-origines/

En effet, durant le 17e et 18e siècle, une grande partie de l’Indonésie était sous l’emprise néerlandaise. Ensuite en 1799, les territoires deviennent des colonies néerlandaises suite à la dissolution de la Compagnie. Après cette scission, les Pays-Bas et l’Angleterre se réapproprient le batik javanais et l’industrialisent pour réduire les temps et coûts de production. En effet, dû à la difficulté de confection du batik traditionnel, il fallait plusieurs mois pour une pièce de vêtement. Le vêtement étant ensuite porté par l’élite javanaise. Ces habits arboraient d’ailleurs des motifs confectionnés spécialement pour la famille royale javanaise. Une hybridation de culture s’opère alors par l’ajout de figures néerlandaises dans les confections javano-européennes afin de satisfaire à la fois le goûts des occupants occidentaux et celui de la population locale. Cependant, malgré les tentatives anglaises et hollandaises, ils n’arrivent pas à capter l’attention des javanais ainsi que des indonésiens malgré l’insertion de motifs/signes chers à la population locale dans leurs productions. 285


Plusieurs théories sur la manière dont le tissu a été importé sur le continent africain font rage. La première suggérerait ceci : N’arrivant pas à écouler les stocks de tissus qu’ils avaient produits pour l’Indonésie, les Néerlandais se tournèrent alors vers l’Afrique de l’Ouest, plus précisément le Ghana.

BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.44-48, p.52-54.

En effet, en même temps que leur tentative d’insertion commerciale sur le continent, les Néerlandais ramenèrent, par les Indes Orientales, des soldats et travailleurs ghanéens, esclaves dans les plantations. Après les avoir affranchis, ils leur donnèrent alors le choix de soit rester soit rentrer au Ghana. Pour ceux ayant choisis de rentrer, ils emportent dans leurs bagages, des tissus pris sur place, qui ont séduit leurs congénères. Ces tissus ont été ensuite copiés et les colons insérèrent des motifs propres à la culture des populations occupées. La deuxième théorie serait que les Ashantis, puissante peuplade ghanéenne, aient choisi d’échanger le précieux tissu contre de l’or. Cette deuxième théorie pourrait expliquer pourquoi les premiers motifs africains que l’on retrouve sur les pagnes évoquent des éléments propres à cette peuplade. Grâce à l’insertion de ces motifs, les colons trouvent un lieu d’écoulement de leurs stocks de tissus. Depuis le Ghana, cet écoulement se propage alors en Afrique de l’Ouest jusqu’à la République Démocratique du Congo. Dans ces pays, s’ouvrent ensuite différentes usines de production textile sous l’hégémonie d’entreprises/compagnies néerlandaises et anglaises mais dont les travailleurs sont des locaux. Cependant, en opposition, cette invasion du marché textile par les Européens, porte préjudice aux initiatives locales, ces dernières étant plus onéreuses.

USEAM, «  Épisode 3 de la Saga du Wax : La signification des motifs »,Useam https ://useam.blog/2018/08/15/wax-motifs/

Après la 2ème guerre mondiale, l’industrie textile est en plein boum, elle vend ses tissus à l’une des premières multinationales, Unilever, par l’intermédiaire de la United African Company. C’est également l’époque où la colonisation est à son maximum et

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où tous les vices de l’humain sont exacerbés. Par ce fait, seule la bourgeoisie peut s’habiller en wax. Le tissu permettait alors de démontrer son appartenance sociale et de se mettre en avant. Grâce à l’achat de ces produits importés, qui étaient vus comme des biens de luxe, les élites développent un fort pouvoir d’achat qui les place à un certain niveau social.

BLÉ Raoul Germain, « Le pagne : Un moyen de communication en Côte d’Ivoire », OpenEditions Journals, https ://doi.org/10.4000/communication.3026.

Avec son ascension, le wax s’impose dans la culture du continent devenant un élément quasi indissociable de l’identité graphique africaine. Il envahit les zones rurales sous la forme d’un tissu rectangulaire mesurant +/- 182 centimètres. Grâce à sa taille et forme, il peut être porté comme un pagne (tissu qui se porte autour de la taille). Par sa simplicité de port, il ne nécessite pas de dépense supplémentaire pour être porté. On ne doit pas le coudre ou demander à un.e couturier.ère de l’ajuster sur mesure. Qui plus est, le fait qu’il soit fabriqué à l’extérieur du continent, lui apporte une valeur supérieure, d’où l’envie des femmes de se procurer le tissu original estampillé « véritable wax hollandais ». Ensuite, avec les crises économiques touchant les différents pays d’Afrique Occidentale, le secteur du textile n’est bien évidemment pas épargné. En conséquence, plusieurs usines textiles ferment et un incendie détruit d’ailleurs l’une des plus importantes du continent, située dans la capitale togolaise. A cause de la chute de l’empire du wax anglais et hollandais, les chinois saisissent l’opportunité de s’emparer du marché du tissu wax « pas cher » en ouvrant des usines sur le continent et en y vendant des contrefaçons/copies de wax déjà existants à des prix défiants toute concurrence. Grâce à la baisse des prix qu’offre le marché chinois, les classes moyennes et pauvres ont accès au fameux tissu. Mais malheureusement, avec l’arrivée de commerçants chinois sur le marché, la qualité du textile devient médiocre, comparée à celle de ses prédécesseurs.

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Cependant, avec le temps, la qualité des fabrications chinoises évolue et des imitations impeccables du célèbre fabricant Vlisco circulent sur les marchés d’Afrique de l’Ouest, satisfaisant la clientèle locale. Le wax est devenu, avec le temps, un objet identitaire rempli de paradoxes car il prône et met en avant la diversité culturelle qui peut régner sur le continent africain grâce à la mise en avant de plusieurs éléments graphiques et culturels.

BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017, p.44-48, p.52-54.

Mais, en même temps, il est totalement étranger à ce dernier et peut être encore perçu comme un signe de l’emprise colonial sur la population africaine par le fait qu’il est produit exclusivement en dehors des frontières (la Chine et la Hollande pour ne citer que les plus importantes). Qui plus est, l’apparition du wax a fortement affaibli l’expansion et la vente d’autres tissus traditionnels tels que le kenté, le bogolan, etc…

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Bibliographie Ouvrages Longs BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019. GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », éditions La Martinière, Paris, 2017. TOULABOR Comi, « Les Nana Benz de Lomé. Mutations d'une bourgeoisie compradore, entre heur et décadence », Afrique contemporaine, vol. 244, no. 4, 2012, pp.69-80. ZINSOU Fondation, « Wax Stories - Histoires des pagnes », issuu.com, https ://issuu.com/fondationzinsou/docs/wax_stories, consulté le 20 février 2019.

Articles spécialisés BLÉ Raoul Germain, « Le pagne : Un moyen de communication en Côte d’Ivoire », OpenEditions Journals, https ://doi.org/10.4000/communication.3026, consulté le 5 mars 2019. HALLS Julie & MARTINO Allison, « Cloth, Copyright, and Cultural Exchange : Textile Designs for Export to Africa at The National Archives of the UK », Journal of Design History, Volume 31, Issue 3, September 2018, Pages 236–254, https ://doi.org/10.1093/jdh/epy007, consulté le 28 octobre 2019. THE BRITISH MUSEUM, « a brief history of wax resist printing », digitalwaxprint.com, http ://digitalwaxprint.com/iterations/history-ofwax-resist-printing/, consulté le 28 octobre 2019. SMITH Alex & AYAVORO Joseph, « Cross Cultural Textiles - linking Manchester to West Africa through textiles », Creative Hands Foundations Arts, https ://creativehandsfoundationarts.files.wordpress.com/2015/10/ cross-cultural-textiles1.pdf, consulté le 28 novembre 2020. VLISCO, « Histoire des tissus », Vlisco, https ://www.vlisco.com/fr/lunivers-vlisco/design/histoires-des-tissus/, consulté le 5 mars 2019.

Documents moins spécialisés ELANDS Helen, « African Fashion : Dutch wax », International Excellence, https ://internationalexcellence.co.uk/luxury-magazine/travel/cars/ 291


lifestyle/african-fashion-dutch-wax, consulté 1 décembre 2020. b. ELLEN, « Perfect imperfection », Affaso, https ://affaso.com/perfect-imperfection/, consulté le 18 mars 2020. FILIPPI Laurent, « Wax & co : la saga du tissu imprimé qui a conquis l'Afrique », Franceinfotv, https ://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/ societe-africaine/wax-co-la-saga-du-tissu-imprime-qui-a-conquis-lafrique_3059127.html, consulté le 13 mars 2019. PAJON Léo, « Tendance : le langage du Wax décrypté dans deux livres », Jeune Afrique, https ://www.jeuneafrique.com/mag/522270/culture/ tendance-le-langage-wax-decrypte-dans-deux-livres/, consulté 18 mars 2019. USEAM, « Épisode 1 de la Saga du Wax : les origines », Useam https ://useam.blog/2018/08/01/wax-origines/, consulté le 5 mars 2019.

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Commentaires sur les ouvrages longs de la bibliographie BOUTTIAUX Anne-Marie, « Wax », éditions Hoëbeke, Paris, 2017 Comment suis-je entrée en possession du document ? lors de mes premières recherches, j’ai recherché des bibliographies abordant le sujet du wax comme moyen de communication et ce fut un des premiers livres sur lequel je suis tombée. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? La plupart des idées de ce mémoire et idées d’analyse découlent des recherches dans ce livre. En le parcourant j’ai pu rechercher les références bibliographiques cités dedans et m’enrichirent sur les différents sujets. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? On peut émettre quelques réserves parce que parfois, ce sont des avis de l’auteure, elle-même, qui sont présentes. Donc un biais subjectif peut intervenir mais souvent son avis est intéressant et appuyé par les différentes sources qu’elle renseigne. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Par différents articles de presse, de revues sur le sujet, d’autres livres et sources étayent les différentes thématiques abordées dans l’ouvrage. Qui plus est, ce livre est cité par presque toutes les autres sources consultées. GROSFILLEY Anne, « Wax 500 tissus », éditions de La Martinière, Paris, 2019 Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis rentrée en contact avec ce livre en cherchant des ouvrages abordant le thème du wax comme moyen de communication. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? La plupart des visuels et des introductions de texte viennent de ce livre. Chacune des descriptions données corrobore les recherches que j’ai faite sur le sujet et amène à différentes pistes de réflexion. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Comme la première source, parfois certains textes, que je n’ai pas utilisé, pouvaient être teintés d’une pointe de subjectivité. Cependant, après avoir fait des recherches sur l’autrice, c’est son domaine d’études et elle est spécialisée dans la thématique abordée dans le mémoire « le textile en Afrique ». P ar quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Principalement des articles spécialisés dans le domaine. GROSFILLEY Anne, « Wax & Co : Anthologie des tissus imprimés d’Afrique », éditions La Martinière, Paris, 2017 Comment suis-je entrée en possession du document ? je suis rentrée en contact avec ce livre en faisant mes recherches, toutes les informations que je trouvais convergeaient vers ce livre et je l’ai donc acheté. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Ce livre contrairement au livre numéro 2, a un point de vue beaucoup plus technique et sociale sur l’imprimé wax que les autres. Il m’a permis de comprendre les codes culturels liés au tissu et la diversité que l’on peut retrouver dans cet univers graphique. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Comme dit plus haut, une teinte de subjectivité possiblement présente dans certains passages mais appuyé par des recherches et des citations. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? « Wax 500 tissus » de la même autrice et « Wax » de Bouttiaux Anne-Marie. Toulabor Comi, « Les Nana Benz de Lomé. Mutations d’une bourgeoisie compradore, entre heur et décadence », Afrique contemporaine, vol. 244, no. 4, 2012, pp.69-80 Comment suis-je entrée en possession du document ? Au début de mes recherches, j’ai demandé au directeur de la section Arts Visuels de l’école si il ne possédait pas des livres qui pourraient aborder le sujet de l’utilisation du wax comme support de communication. Il m’a alors prêté deux ouvrages dont ce magazine. En le feuilletant, je suis tombée sur l’article « Les Nana Benz de Lomé ». Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Cet article évoque les répercussions sociales et économiques que la vente de wax a eu sur ses revendeuses. Il met en lumière tout un champ économique et social inhérent à l’exportation de ce tissu sur l’ouest du continent. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Peu de réserves peuvent être émises sur ce texte, il est dans une revue spécialisée et les différentes recherches que j’ai effectué sur le sujet, confirment les idées véhiculées dans ce texte. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Beaucoup d’articles économiques, d’ouvrages abordant le sujet des Nana Benz en général.

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ZINSOU Fondation, « Wax Stories - Histoires des pagnes », issuu.com, https  ://issuu.com/fondationzinsou/docs/wax_stories, consulté le 28 octobre 2019 5. Comment suis-je entrée en possession du document ? En cherchant tout simplement sur internet, c’est l’une des premières sources qui m’a été proposé. J’ai ensuite fait des recherches sur la fondation Zinsou et ait pu confirmer que c’était une source fiable. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? L’histoire des pagnes est expliquée, leurs noms selon les pays et la signification aussi. En plus, la plupart de mes sources confirment ce qui est dit dans ce catalogue. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Peu de réserves peuvent être émises par rapport à cet ouvrage, la plupart de mes sources fiables confirment les écrits présents dans ce livre. Le but de la fondation est, en plus, de mettre en valeur le patrimoine artistique de l’Afrique. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Tous les documents bibliographiques rejoignent ce qui est dit dans cet ouvrage.

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Commentaires sur les documents spécialisés de la bibliographie Blé Raoul Germain, « Le pagne : Un moyen de communication en Côte d’Ivoire », OpenEditions Journals, https ://doi.org/10.4000/communication.3026, consulté le 28 novembre 2020 Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis tombée sur cet article lorsque j’ai lu les sources d’un article Wikipédia évoquant le sujet du wax. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Cet article nous explique, comme son nom l’indique, pourquoi le wax pourrait être vu comme un moyen de communication en Côte d’Ivoire. Il a été une base de recherche confirmant mon hypothèse de départ. Il parle aussi d’autres types de tissus traditionnellement africains. Un aspect sociologique est également abordée à partir du 22ème paragraphe. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Peu de réserves peuvent être émises par rapport à ce texte. C’est un article écrit par un professeur et chercheur spécialisé dans la communication et l’information et il est paru sur un site, a priori, très sérieux et dont les sources sont avérées. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? il n’y a pas vraiment d’articles mais plutôt un groupuscule de différents articles peuvent être utilisés pour confirmer ces dires et la partie de ce mémoire peut être un exemple. HALLS Julie & MARTINO Allison, « Cloth, Copyright, and Cultural Exchange : Textile Designs for Export to Africa at The National Archives of the UK », Journal of Design History, Volume 31, Issue 3, September 2018, Pages 236–254, https ://doi.org/10.1093/jdh/epy007, consulté le 28 octobre 2019 Comment suis-je entrée en possession du document ? Lorsque je faisais des recherches sur le net afin de compléter ma partie sur l’histoire du wax, je suis tombée sur cette revue. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Toute la partie économique et sociale de l’impact du wax est expliquée dans cette revue et elle m’a servi à compléter des informations manquantes ou expliciter certaines parties de mon mémoire. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Peu de réserves peuvent être émises sur cet article de revue, il est très complet et les informations recueillies sont cohérentes et justes. Il est, en plus, posté sur un site universitaire. En concordant mes différentes sources, beaucoup de ce qui est dit est d’ailleurs avéré. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Toutes les sources citées sont d’excellents articles et ouvrages qui peuvent corroborer ce qui est dit. Toutes étant officiels ou d’organismes liés de loin ou de près au sujet. The British Museum, « a brief history of wax resist printing », digitalwaxprint.com, http ://digitalwaxprint.com/iterations/history-of-wax-resist-printing , consulté le 28 octobre 2019 Comment suis-je entrée en possession du document ? Lorsque j’ai fait des recherches sur l’histoire du wax afin de vérifier les propos que j’ai trouvé dans les ouvrages longs. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Cet article explique l’histoire de l’imprimé wax en général en mettant en avant les spécificités techniques du tissu. On voit les créateurs au travail et les machines utilisés pour la confection des tissus. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Peu de réserves peuvent être émises car les textes sont appuyés par des sources sûres, que j’ai d’ailleurs vérifié. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Les différents sites dont sont issus les textes présents dans l’article. SMITH Alex & AYAVORO Joseph, « Cross Cultural Textiles - linking Manchester to West Africa through textiles », Creative Hands Foundations Arts, https  ://creativehandsfoundationarts.files.wordpress. com/2015/10/cross-cultural-textiles1.pdf, consulté le 28 novembre 2020 Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis tombée sur ce document très tardivement dans la rédaction de mon mémoire. Je suis entrée en possession de ce document lors que je cherchais des informations sur Ebenezer Brown Fleming. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Toute une partie sur l’iconographie des symboles adinkra ainsi que l’histoire d’Ebenezer Brown Fleming ainsi que de la société qui l’employait. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Des réserves peuvent être émises car ce document n’a pas été trouvé dans des revues spécialisés dans le domaine mais est néanmoins très complet, ce qui pourrait faire « tilté » et vérifier les informations, qui se sont avérées justes. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? la plupart des sources qui ont aidé à la rédaction du document.

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VLISCO, « Histoire des tissus », Vlisco, https ://www.vlisco.com/fr/lunivers-vlisco/design/histoires-des-tissus/, consulté le 5 mars 2019 Comment suis-je entrée en possession du document ? Ce site est l’un des premiers que j’ai consultés car c’est le site du n°1 de la vente du tissu wax. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? L’histoire de différents tissus est expliquée sur ce site. Les illustrations ainsi que les déclinaisons d’imprimés sont également présente. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Beaucoup de réserves peuvent être émises car certaines descriptions d’articles sont écrites par des membres du tissu internet. Les imprimés ayant souvent une histoire donnée par les clientes, c’est intelligent de la part de la firme de laisser le champ aux acheteuses car c’est ce qui fait le succès de la marque après tout. Mais en termes de diversité illustrative, étant donné que c’est la marque n°1 de la vente de wax premium dans le monde, peu de réserves peuvent être émises sur ce point-là. Par ailleurs, j’ai contacté l’équipe communication de la marque qui m’a renvoyé vers ce lien pour toutes les informations que je cherchais à propos des imprimés. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? les ouvrages de Mme Grosfilley complètent assez bien les descriptions données.

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Commentaires sur les documents moins spécialisés de la bibliographie ELANDS Helen, « African Fashion : Dutch wax », International Excellence, https ://internationalexcellence.co.uk/luxury-magazine/travel/cars/lifestyle/african-fashion-dutch-wax Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis entrée en possession de ce document lors de mes recherches sur Internet. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Les idées présentes dans cette source sont utiles pour le mémoire car une partie historique, confirmée différents ouvrages, y est expliquée. Une évocation du personnage qu’était Ebenezer Brown Fleming est également présente. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Quelques réserves peuvent être émises car cela reste un magazine de mode, qui n’est donc pas spécialisé dans le domaine. Mais un autre point de vue sur ce sujet est appréciable. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Les articles spécialisés comme « A brief history of wax resist printing ». Cet article est une version résumée de ce que l’on peut retrouver dans différentes sources que nous avons vues. ELLEN, « Perfect imperfection », Affaso, https ://affaso.com/perfect-imperfection/, consulté le 18 mars 2020 Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis entrée en possession de ce document lorsque je recherchais des informations sur Ebenezer Brown Fleming. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Cet article évoque l’histoire du batik indonésien et comment il a dérivé pour arriver au wax que l’on connait. Il parle aussi de la beauté de l’imparfait dont on parle aussi dans le mémoire. Des informations utiles mais trouvables sur d’autres sites plus fiables y sont également renseignés. Une petite vidéo en fin d’article nous montre aussi l’envers du décor du wax. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? L’article étant sur un site de ventes de wax, on peut y voir un côté biaisé car il ne parle pas des défauts ni même de la provenance de leurs produits mais il met en lumière les origines du tissu afin d’attirer la clientèle, qui recherche du véritable wax. J’ai choisi cet article car le plus souvent ce sont les sites spécialisés qui nous apportent les informations les plus intéressantes sur les habitudes des acheteuses. Par ailleurs, certains de ces sites ont une base de données très intéressante pour comprendre l’histoire des tissus. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? On peut compléter les informations présentées dans cet article avec les deux ouvrages sur le wax de Mme Grosfilley et également sur le site du fabricant Vlisco. Filippi Laurent, « Wax & co : la saga du tissu imprimé qui a conquis l’Afrique », Franceinfotv, https ://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/societe-africaine/wax-co-la-saga-du-tissu-imprime-quia-conquis-l-afrique_3059127.html, consulté le 13 mars 2019 c. Comment suis-je entrée en possession du document ? Lors de mes débuts de recherche, ça a été un des premiers articles qui m’a permis de faire une entrée en matière sur le sujet du wax. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Cet article cite de nombreux ouvrages sur lesquels je me suis appuyée pour rédiger ce mémoire. Les explications des wax illustrant cet article m’ont permis d’avoir plusieurs sources vers lesquelles me tourner pour rechercher de plus amples informations et les informations que j’ai trouvé ici sont d’ailleurs également présentes dans les livres cités dans l’article. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? C’est un article à but informatif et non scientifique. Ce sont parfois des interprétations mais souvent reprises d’autres sources, qui elles, peuvent être fiables. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Les articles de Vlisco sur les histoires des tissus sont des sources assez fiables ainsi que les livres de Mme Grosfilley. PAJON Léo, « Tendance : le langage du Wax décrypté dans deux livres », Jeune Afrique, https ://www.jeuneafrique.com/mag/522270/culture/tendance-le-langage-wax-decrypte-dansdeux-livres/, consulté 18 mars 2019 Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis entrée en possession de cet article lorsque je cherchais d’autres livres évoquant le sujet du wax que les trois cités dans les ouvrages longs sur le net. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? La signification de plusieurs wax emblématiques sont expliquées dans cet article, cela m’a permis de délimiter le champ de mes analyses et de réaliser l’ampleur de la symbolique dans l’usage du « pagne » wax. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Cet article est un article de revue spécialisé sur l’Afrique mais n’est pas écrit par un

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spécialiste du sujet. Des interprétations et des hypothèses non vérifiées peuvent s’y glisser et on pourrait rapidement propager de fausses informations. Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Les deux livres cités dans l’article, qui sont Wax & co de Anne Grosfilley et Wax de Anne-Marie Bouttiaux. USEAM, « épisode 1 de la Saga du Wax : les origines », Useam https ://useam.blog/2018/08/01/wax-origines/, consulté le 5 mars 2019 Comment suis-je entrée en possession du document ? Je suis entrée en possession de cet article, et de tous ceux qui ont découlé, lors que je faisais des recherches iconographiques sur les tissus. Quelles idées peuvent spécifiquement être utiles au mémoire ? Énormément d’idées de cet article et de toute la série ont découlé de ce blog. Ces articles sont extrêmement complets et analysent l’impact du wax et son évolution sous plus angles très intéressants. L’histoire du wax est très bien expliquée et vulgarisée afin qu’un grand nombre de personnes puisse s’y intéresser. C’est d’ailleurs l’un des premiers que j’ai lu pour me familiariser avec la lourde histoire de l’imprimé. J’ai ensuite couplé tou<<<<<<tes ces informations avec des revues beaucoup plus historiques et vérifiées. Quelles sont les réserves pouvons-nous émettre sur ce texte ? Étant donné que ce blog n’est pas rédigé par une spécialiste du tissu, ni même une historienne d’art, on peut le prendre avec des pincettes et vérifier les informations présentes. Surtout qu’on peut trouver beaucoup de fausses informations sur les blogs.Par quels autres ouvrages ou articles puis-je compléter ou recouper les informations présentées ? Beaucoup d’articles historiques, scientifiques et sociologiques confirment les dires de la rédactrice de ce blog et on peut voir que le sujet a été bien réfléchi et compacté.

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Index des noms de tissus 12108

88

12033307

167

16 OBJETS

45

A14/41550

59

A0576

188

A1070

107

A17196

227

ALPHABET

53

AFRICA.COM

185

BATEAU BUS

219

BEST SELLERS BRIGHT IDEA BUTTERFLY PATCH

98 181 72

CANNE À SUCRE

139

CAURIS

125

CHAUSSURES ANGLAISES

171

CHÉRI, NE ME TOURNE PAS LE DOS

79

COQUILLAGE/ RÉGIME DE BANANES

37

COIFFE ROYALE

41

CRAZY TIME

160

DÉVALUATION

135

DASHIKI

143

DIAMANT

234

DOS DE TORTUE/ BASSAM EXTRAVAGANCE

25 252

FALLING COMB

85

FEATHER COG

243

FLAG AND CROWN/ ELISABETH II

201

FLEUR DE MARIAGE

79

FROZEN DREAMS

247

FROZEN DREAMS

249

FUSÉE APOLLO/ TIRE-BOUCHON

49

301


GOOD HUSBAND GRADUATION HANDS AND FINGERS HAPPY SHOPPER HIRONDELLE/ L’ARGENT S’ENVOLE IMPACTOR

178 29 175 93 240

JINAMIN SQUARE

121

LA CHANCE

159

L’ENFANT VAUT MIEUX QUE L’ARGENT LE SAC DE MICHELLE OBAMA

65 213

MAMA BENZ

131

MILLIARDAIRE/1001 BLOCKS

152

MILLIONNAIRE

105

PLANTATION

155

PLENTY

163

PRÉSIDENT BARACK OBAMA

209

QUEUE DE CHEVAL/ CHASSE-MOUCHE SCIE CIRCULAIRE SKIN/ PEAU DE PANTHÈRE

97 237 57

SNAKE SKIN PURSE

101

SOURCE OF LIFE

191

SWISS CHALETS

230

THREE THREE

114

TON PIED MON PIED/ LA MAIN DU LÉPREUX

69

TOMATE/AKLEPAN

149

TURTLE

117

TU SORS, JE SORS

302

33

75

UNION, TRAVAIL, JUSTICE

205

Z’ONGLES DE MADAME THÉRÈSE

223






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