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ADSUM, 12 NOVEMBRE 2014
Entrevue avec le commandant du 5 GBMC PAR SIMON LEBLANC Journal Adsum
Le journal Adsum s’est entretenu avec le commandant du 5e Groupe-brigade mécanisé du Canada (5 GBMC), le colonel Dany Fortin, sur différents sujets d’intérêt pour la communauté militaire. Voici ce qui est ressorti de l’entrevue. ADSUM : QUELS SONT LES PROCHAINS GROS EXERCICES ET LONGUES PÉRIODES D’ABSENCE QUI SONT PRÉVUS POUR LES MILITAIRES DU 5 GBMC? Col Fortin : Présentement, nous avons
à peu près 1000 personnes à Gagetown. On a un plan d’entraînement rigoureux, et beaucoup d’entraînements sont également en cours à Valcartier. Un exercice hivernal se tiendra du 19 au 27 janvier, ici et dans la grande région de Québec. En février, du 10 au 25, il y aura un exercice de poste de commandement (PC) à Valcartier. Beaucoup de gens vont s’affairer, de jour, à simuler l’environnement d’une division audessus de nous, la brigade sur les flancs. Le quartier général sera déployé sur la base d’où il effectuera ses procédures de planification et de contrôle comme si nos soldats étaient sur le terrain. Il y aura ensuite une période où nous préparerons notre équipement et nos véhicules pour les envoyer à Wainwright, où nous serons en avril. Les deux premières de mai, on s’exercera dans un contexte de force contre force avec des simulations d’effets des armes. On va vraiment gagner notre paie. Par la suite, il va y avoir une brève transition avec un entraînement de tir réel pour la dernière fois avec toutes les armes, les avions, les hélicoptères, les chars, l’artillerie, etc.
– PHOTO : CPL JORDAN LEGREE, AP 5 GBMC
Le colonel Dany Fortin, commandant du 5e Groupe-brigade mécanisé du Canada, a tenu un café du commandant au mois d’octobre. C’était l’occasion pour lui d’échanger avec les membres de la brigade.
Au mois de juin, la montée en puissance sera terminée. On procèdera aux vérifications administratives pour s’assurer que tout le monde est prêt à être déployé.
ADSUM : IL Y A DIFFÉRENTS TYPES D’ENNEMIS AVEC DIFFÉRENTES MENTALITÉS, COMMENT SE PRÉPARET-ON À CELA? Col Fortin : Je dirais premièrement
qu’on doit ancrer notre entraînement sur la doctrine. Les expériences du passé constituent de bons points de référence pour contrer un ennemi qui risque d’agir d’une certaine façon avec les systèmes d’armes qu’il possède. Par exemple, nous avons appris qu’une armée dotée d’un certain système l’utilisera d’une certaine façon. Ça nous permet d’adopter une disposition sur le terrain pour faire face à cette menace et de déployer cer-
tains systèmes d’armes et de déployer juste au bon moment des forces pour exécuter une action x, y ou z. Notre travail est de regarder quelles sortes d’armes utilise l’ennemi potentiel et comment on disposera de nos troupes et de notre système d’armes pour affronter cette menace. On doit dresser une liste des endroits chauds et de ce qu’on doit faire contre les différents types d’ennemis.
ADSUM : LE 5 GBMC POSSÈDE-T-IL UNE QUALITÉ EN PARTICULIER DONT VOUS ÊTES FIER ET QU’IL FAUT PRÉSERVER? Col Fortin : La 5e Brigade est une for-
mation de combat numérisée. Ce serait trop facile de retourner en arrière et de laisser tomber les avantages que nous procure la technologie dans notre conduite des opérations. C’est peut-être en raison des priorités de l’entraînement et
L’IMPORTANCE D’UN ENTRAÎNEMENT RIGOUREUX PAR SIMON LEBLANC Journal Adsum
Toujours dans le cadre de l’entretien avec le commandant du 5e Groupe-brigade mécanisé du Canada (5 GBMC), le colonel Dany Fortin, certains sujets ont été abordés plus en profondeur, comme l’importance d’un entraînement rigoureux pour être prêt à toutes éventualités. Au cours de la première année de commandement du col Fortin, le 5 GBMC s’est entraîné avec un objectif de maintien des compétences dans une période d’austérité financière. Cette année, la brigade passe à la vitesse supérieure en raison de la montée en puissance qui atteindra son point culminant avec un exercice à Wainwright. «Nos soldats sortent d’une dizaine d’années d’opérations en Afghanistan. Ils ont servi brillamment. On a des soldats courageux qui ont fait des actions incroyables avec peu de ressources, des gens qui ont montré aux autres armées occidentales que le Canada est parmi les meilleurs», soutient le col Fortin. Ignorant où ses troupes seront déployées la prochaine fois, le commandant de la brigade affirme toutefois que le théâtre d’opération de demain aura des ressemblances avec celui de l’Afghanistan. «Il faut atteindre un équilibre dans notre entraînement pour demeurer prêts à répondre à ce genre d’ennemi qui se cache au sein de la population, un ennemi qui pourrait agir à différents degrés. On doit être prêt pour des opérations un peu plus conventionnelles sans retourner dans le passé, mais en avançant dans un milieu incertain», poursuit-il. Lorsque le col Dany Fortin a rencontré ses officiers et sous-officiers lors de «L’heure du commandant» qu’il a tenue en octobre, il les a incités à se questionner sur la façon d’atteindre un point d’équilibre entre les différents types d’entraînement. «On doit être prêt à opérer dans un milieu beaucoup plus austère, une rotation zéro. Tu ne sais pas où tu dois aller, tu te prépares pour n’importe quoi, donc ton entraînement doit être rigoureux, varié et
complet. Il faut s’adapter aux menaces d’aujourd’hui», insiste-t-il. Au cours de ce même rassemblement, le commandant a communiqué ses attentes sur la discipline et l’importance d’encourager un esprit guerrier. «Le rythme est élevé, l’entraînement de nos soldats est pris au sérieux et il est exigeant. On demande beaucoup à nos soldats et à leur famille, mais puisqu’on doit se préparer à toutes sortes d’éventualités, on doit veiller à ce que l’entraînement fasse en sorte qu’on va survivre», affirme le col Fortin. DE NOUVEAUX ÉQUIPEMENTS Selon le col Fortin, de nouveaux équipements sont sur le point d’être livrés. Le VBL 6.0 est l’un de ceux-ci. Plus gros, plus long, plus puissant et mieux protégé grâce à son système de tir et d’acquisition de cible amélioré, il remplacera le VBL III au cours de l’année 2015. Les véhicules de soutien quant à eux seront complètement remplacés, d’ici quelques années, par un véhicule plus performant et très efficace. La flotte sera réduite, mais les véhicules seront neufs et à la fine pointe de la technologie. UN MOT SUR LA PRÉVENTION DU SUICIDE Le col Fortin n’a pas manqué de rappeler l’importance de parler de la prévention du suicide. «C’est un sujet qui me préoccupe beaucoup. Les soldats sont au cœur de tout ce que nous faisons. J’ai dit à de nombreuses reprises que nous ne sommes pas fondés sur des armes ou des véhicules, mais sur des hommes et des femmes. Notre ressource la plus précieuse, c’est le soldat.» Il encourage la chaîne de commandement et les soldats à bien connaître les gens de leur entourage, afin de pouvoir déceler ceux qui n’ont pas l’air de bien aller et de leur parler. «Je pense qu’il y a des gens qui ont peur et qui pensent qu’on va les mettre à la porte. Nous avons besoin de militaires fiables. Les gens qui ont besoin d’aide, on va les aider. Le soldat devrait être au centre de nos activités. Dès que quelqu’un commence à tirer de la patte, ça devrait être un réflexe de garder un œil sur lui», conclut le col Dany Fortin.
du cycle de déploiements opérationnels que nous avons, ici, saisi les opportunités qui s’offraient à nous au cours des dernières années pour travailler le plus possible avec les technologies de l’information. Je pense qu’on est reconnu au sein de l’armée pour avoir mis beaucoup d’énergie dans la numérisation. C’est une qualité qu’on préserve au sein des unités et du Quartier général et escadron des transmissions en y consacrant beaucoup d’effort. On doit travailler avec les moyens technologiques d’aujourd’hui. Par exemple, pendant l’exercice LARGE SCALE en Californie, la brigade a été complètement intégrée à une brigade de Marines. Notre système de commandement et contrôle était capable d’échanger l’information avec les Marines, chose qu’on n’était pas capable de faire sans efforts monumentaux à la fin de l’Afghanistan. Cependant, il ne faut pas viser la numérisation à tout prix, car il y a un équilibre à respecter, mais je pense qu’on est sur la bonne voie. Si jamais on perdait en opération la connectivité ou le réseau satellitaire, on doit pouvoir demeurer fonctionnels en retournant s’il le faut à des moyens plus archaïques.
ADSUM : LES MEMBRES DE LA BRIGADE SE DISTINGUENT DANS PLUSIEURS COMPÉTITIONS NATIONALES ET INTERNATIONALES, AUTANT DANS LE DOMAINE DU MÉTIER DE SOLDAT QUE DANS LE DOMAINE SPORTIF. À QUOI ATTRIBUEZ-VOUS CES BONNES PERFORMANCES? Col Fortin : Je suis agréablement sur-
pris de l’engouement, de l’énergie et du courage de certains de nos soldats. C’est un reflet de la société actuelle; beaucoup de gens veulent se dépasser, ils participent à des courses, etc. Ce genre d’activité est beaucoup plus populaire qu’auparavant. Je pense que la mentalité à la 5e Brigade est de participer à une compétition pour gagner, et non pour le simple plaisir d’y participer. Les gens qui prennent part à ce genre d’épreuves y mettent le sérieux et les efforts nécessaires. De notre côté, on alloue des ressources pour s’assurer que nos gens soient bien préparés et se distinguent. On obtient des résultats tels que ceux de notre équipe de tir qui a brillé par ses performances. Les gens ne peuvent pas réussir aussi bien si on ne les aide pas. Même chose pour Worthington Challenge, une compétition de tir de char où nos représentants sont arrivés en deuxième position malgré le fait que la brigade n’ait aucun char... Les pratiques ont été faites sur simulateur et l’équipe a eu peu de temps pour s’entraîner sur le véhicule là-bas, c’est donc assez remarquable.
ADSUM : LE JOUR DU SOUVENIR EST UN MOMENT IMPORTANT CHAQUE ANNÉE POUR LES MILITAIRES. AVEZ-VOUS UN MESSAGE À LIVRER EN MÉMOIRE DE NOS SOLDATS TOMBÉS AU COMBAT? Col Fortin : Le jour du Souvenir est un
moment très solennel, c’est l’occasion pour nous de nous remémorer le sacrifice de nos gens. On doit se rappeler que nos soldats, comme plusieurs jeunes Canadiens et Canadiennes des générations précédentes, sont prêts à faire des sacrifices pour notre sécurité. C’est toujours un moment difficile le 11 novembre, car je me souviens des confrères que j’ai perdus. Je me rappelle ces cérémonies où les cercueils de nos camarades quittaient Kandahar pour rentrer au pays. Je pense que cette journée touche un peu tout le monde d’une façon ou d’une autre. Cette année, on aura également une pensée pour les deux personnes qui ont perdu la vie simplement pour avoir porté l’uniforme, le caporal Nathan Cirillo et l’adjudant Patrice Vincent.