Ruines 2011

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Concept Ruines



Ruines sacrées où règne le mystère des Dieux et des Rois Introduction Photographe, je suis passionné par le voyage et particulièrement par la rencontre humaine, depuis plus d’une vingtaine d’années, l’essentiel de mon écriture photographique se passe autour du thème des religions. Bouddha et le bouddhisme sont devenus mon sujet de prédilection pour mon expression visuelle, alors que j’ai aussi traité du vaudou en Haïti, de ses cérémonies, comme de Baron Samedi à la fête des morts. De plus, je me suis intéressé de prêt à l’islam pendant mes voyages en Iran, Afghanistan et Pakistan, ainsi que d’autres réalisés au Liban, Jordanie, Syrie et Soudan. J’ai également parcouru le monde chrétien par plusieurs voyages en Amérique latine. La plupart du temps, les photographes et écrivains nous nous magnifient, de leur découverte du monde, faisant référence à leur petite enfance. Ils nous énumèrent les vieux atlas trouvés dans les bibliothèques familiales, les longues heures à éplucher, souvent en cachette, ces beaux livres pour se préparer, le moment venu, à partir explorer le vaste monde en connaisseur. Pour ma part, je ne me qualifierais pas d’«Indiana Jones», et je n’ai pas de honte à citer mes références, celles qui m’ont donné envie d’aller à la recherche de ces cités et de ces temples enfuis dans la jungle. C’est à la lecture des aventures de Bob Morane et de son compagnon Bill Balantine que je me suis nourri, et fortement identifié à ces personnages. J’ai eu moi aussi l’envie d’aller à la recherche du secret des Mayas, du masque de jade ou de l’idole verte. Aujourd’hui, je peux remercier Henri Vernes pour m’avoir aidé à développer mon imaginaire avec ces petits fascicules Marabout Junior, achetés en deuxième main pour un franc à la sortie de l’école. Bien sûr, pour être honnête, je me rappelle aussi des cartes contenues, dans la belle édition cartonnée et toilée, du Manuel Atlas de 1927, qui traînait dans la maison. Un ouvrage destiné au degré supérieur des écoles primaires pour les cantons de Vaud, Neuchâtel et Genève. Si mon intérêt pour visiter et photographier les ruines ont toujours été vif en moi, la naissance de ce projet est un peu due au hasard du temps. C’est grâce à une accumulation d’images, qui, mis bout à bout au fil de mes voyages, et en particulier, celles que j’ai réalisées sur le continent Asiatique, que j’ai donné naissance à cette collection. Il est vrai, que je me suis pris de passion pour ces lieux chargés d’Histoire, et j’aime aussi situer mes différents déplacements dans leur contexte géopolitique.



Tout a vraiment débuté en 1988 et 1989, avec mon premier grand et long voyage, qui m’a permis de découvrir la Thaïlande, le Cambodge, le Laos, le Vietnam et la Birmanie.

Des voyages en Asie Aujourd’hui, j’aimerais présenter ma photographie réalisée dans ces restes d’édifices dégradés par le temps que l’on appelle Ruines. C’est une interprétation et une déclinaison visuelles, souvent à caractère romantique, du déclin, de la destruction et de la décadence de royaumes, d’empires et de dynasties dans une Asie qui m’a attirée au fil de ces dernières décennies. Cette thématique photographique rejoint et complète l’essentiel de mon travail déjà produit à ce jour sur les différentes formes du bouddhisme en Asie. Au Cambodge, dans la réalisation de ces images, j’ai aimé me perdre dans des coursives, m’égarer dans les dédales de temples, m’émerveiller devant une danse d’apsaras gravées dans la pierre et caressées par une lumière filtrée par des éboulis. C’était un véritable régal de pouvoir marier la lumière à la pierre. J’ai été fasciné par ces statues de Bouddhas et les divinités, démembrées ou décapitées, qui contemplent notre Humanité sans sourciller. Alors que ceux-ci côtoient, quotidiennement, des hordes de touristes pressés, qui entre deux étapes d’autocar, caméscopes rivés sur l’œil, ne font que passer furtivement dans ces lieux. Tout cela est bien loin de l’attitude de contemplation nécessaire, à mon avis, pour capter l’émotion et la poésie qui se dégagent de ces endroits magiques. De ces lieux mystérieux, au-delà des siècles, j’ai pris le temps pour saisir cette mémoire de civilisations disparues à jamais. J’ai voulu enregistrer le langage de ces ruines sous forme d’images argentiques. Une ode à la grâce émane de ces édifices abattus, abandonnés à la végétation, où partiellement reconstruits dès la fin du XIXe siècle, avant d’être sauvagement pillés de nos jours. Finalement, rien n’a vraiment changé depuis 1913, avec Un pèlerin d’Angkor de Pierre Loti ou La voie royale, en 1930, d’André Malraux, le chasseur de ruines. C’est la raison pour laquelle, il me paraît très intéressant de présenter ce thème au public.







Présentation de l’exposition Conception muséographique de ce projet Pour donner de la légèreté à toutes ces représentations visuelles de pierres et de sculptures, et afin de reconstituer l’ambiance et l’univers de temple ou de stupa, il serait intéressant de suspendre au centre d’une pièce des photographies en grands formats. Ces suspensions d’images recto-verso, permettraient de multiples cheminements dans une présentation à la façon d’un mandala (par exemple: le temple du Bayon à Angkor Thom ou le temple de Borobudur sur l’île de Java). Dans la tradition bouddhiste, on nomme mandala, une image du monde offert à la méditation, de telle sorte que se dégage d’elle, une vision pure où se manifeste l’essence même du divin. L’intégration dans le dispositif proliférant d’une image supérieure – en enveloppant en son sein des dizaines d’autres – manifeste à son tour qu’une telle image n’est rien en elle-même, indépendamment du grand jeu dépensier où toutes les formes du visible se côtoient, se contredisent, se répondent, se chevauchent, s’oblitèrent afin que leur multiplication même aboutisse à l’expérience d’une annulation extatique de soi. C’est pourquoi, il serait intéressant d’avoir recours à un tel protocole avec la présentation de l’exposition Ruines, disposant certaines photographies selon la répartition nouvelle d’une juxtaposition exprimant la saturation même du visible, confrontant le visiteur à un vrai vertige où se démultiplie – jusqu’à l’étourdissement – le spectacle de ces édifices. Les différents formats photographiques, hauteur, largeur ou panoramique, pourraient êtres regroupés par espace de présentation. J’imagine aussi sur les murs, l’accrochage de détails saisissants, qui pourraient êtres regroupés sous la forme de diptyques et de triptyques d’images. L’intégration de sons (nature, oiseau, grenouille et crapaud, vent, pluie, orage, gong, et autres) pourraient accompagner le regard, enrichissant les sens et l’émotion. Les légendes des photographies, ainsi que les textes d’explication de cette démarche créative, pourraient êtres présentés avec des textes appliqués par transfert sur des murs peints avec différents tons de gris chaud à froid.



Liste des lieux et des sites en Asie où se trouvent les ruines enregistrées entre 1988 et 2010 En Birmanie : Les pagodes sur la Plaine de Pagan. Les ruines de Mrauk-U dans l’Arakan. Les grottes de Po Win Daung.

Au Cambodge : Le temple d’Angkor Wat. Peut-être le plus grand monument religieux jamais construit au monde. La cité d’Angkor Thom où se trouve le temple du Bayon. Le Ta Phrom et sa végétation mariée aux pierres. Le Banteay Chhmar à l’Ouest de Siem Reap. La cité de Koh Ker au Nord de Siem Reap. Le Preah Khan (l’épée sacrée), appelé aussi le Prasat Bakan. Le Boeng Mealea. Le Prasat Preah Vihear, construit sur le bord de la falaise des monts Dangrek.

En Corée : Unjusa, le temple aux mille stèles de Bouddhas.

En Inde : Bodhgayâ, lieu sacré du bouddhisme.

En Indonésie :

Borobudur sur l’île de Java.

Au Laos : Luang Prabang et Pak Ou. La Plaine des Jarres.

En Mongolie : Le monastère d’Erden Dzou.

Au Pakistan : Le grand monastère de Takht-i-Bahi, haut lieu du bouddhisme Gandhara.

En Thaïlande : Les anciennes capitales royales de Sukhothai et d’Ayutthaya.





Une histoire à suivre J’ai gardé en réserve, pour préparer, plus tard, une éventuelle suite, sous forme d’une deuxième exposition. Soit, une continuation logique pour la présentation de ma photographie de Ruines, élargie à d’autres continents et d’autres cultures. De mes voyages en Ethiopie et au Soudan, je pourrais montrer les églises troglodytes de Lalibela et du celles de la région montagneuse du Tigré, ou les nécropoles en région napatéenne de Méroé et de Nuri. L’Amérique latine pourrait être présente avec le sanctuaire du Machu Picchu au Pérou et les ruines de Tiwanaku en Bolivie, située au sud-est du lac Titicaca. Sans oublier les ruines Maya dans la Péninsule du Yucatan au Mexique. En plein Océan Pacifique, sur l’île de Pâques, j’ai enregistré les ensembles de Moaï, de grandes statues de basalte, alignées, le regard tourné vers la mer. Au Moyen-Orient, j’aimerais montrer la nécropole Nabatéenne de Gaïa, à Pétra, en Jordanie; les sites d’Apamée, de Palmyre et de Saint Siméon en Syrie. Baalbek, dans la plaine de la Bekaa au Liban. Les ruines en Egypte, d’Abou Simbel aux pyramides. En Iran, j’ai photographié Persépolis, la citadelle de Bam avant sa complète destruction, tout comme la forteresse d’Alamut, haut lieu de la pensée ismaélienne. En Turquie, les églises des premiers Chrétiens en Cappadoce, et le tombeau d’Antiochos Ier, sur le Nemrut Dag.

Financement, production de l’exposition Ce concept en est à son développement intellectuel. Par contre, toutes les photographies sont déjà réalisées, en noir et blanc, avec le procédé argentique. Aucun tirage d’exposition n’est réalisé à ce jour, seuls existent des tirages de lecture. Le développement et la production de cette exposition pourraient faire l’objet d’une demande de soutien financier auprès de l’UNESCO. Son siège est au 7-9, place de Fontenoy dans le 7e arrondissement de Paris.

Conclusion De mes nombreux voyages en Asie et avec la réalisation de ce travail sur les ruines, que se soit à Mrauk-U en Arakan et sur la plaine de Pagan en Birmanie, dans différents sites Khmers au Cambodge ou à Borobudur en Indonésie, je n’ai pas seulement voulu capter la splendeur mystique de ces temples, mais aussi leur signification profonde. Celle-ci est



magistralement incarnée par Angkor Wat, le temple dédié à Vishnu et ensuite à Bouddha. Davantage qu’un simple édifice de pierre, il est peutêtre le plus grand monument religieux jamais construit au monde. Pour les hindouistes comme pour les bouddhistes, sa tour principale représente le centre de l’univers; pour les premiers le mont Meru et pour les seconds la montagne Sacrée du Kailash. «Un ouvrage des anges, et non des Hommes» pour reprendre les mots des premiers missionnaires français du début du siècle dernier.

Références Araki enfin Essai de Philippe Forest Editions Gallimard, 2008 Le Vagabond des ruines Benjamin Desay Editions Phébus, 2009 Sacred Places Kenro Izu Photographies Arena Editions, 2001

© Janvier 2011, Textes et photographies, Jean-Pierre Grandjean. Projet strictement confidentiel à ce stade de développement.




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