Souffle, Souffle le loup ! Cédric Guillermo
« CLAIE DES ARTS »
Souffle, Souffle le loup ! Résidence artistique à Saint-Jean Communauté Mars, avril, mai 2012 Cédric Guillermo
Cette résidence, mise en place par la Communauté de Communes de Saint-Jean, s’adresse en priorité à ses habitants. Ainsi, c’est pendant plusieurs jours voire plusieurs semaines qu’ils ont été confrontés à différentes formes, objets ou constructions, au sein de leur quotidien. Imposées dans leurs magasins, éprouvées dans leurs communes ou établies au sein du lycée professionnel horticole et au centre de loisirs de Saint-Jean-Brévelay, diverses créations se sont insérées par touches dans les sept communes concernées, avec plus ou moins de discrétion. Pour susciter, l’espace d’un moment, des interrogations, des réactions amusées et des rencontres, une fois la surprise dépassée. On imagine que le loup, distrait de son objectif gourmand, s’est lui aussi prêté au jeu de la curiosité.
La rencontre
La démarche artistique
Le projet « claie des arts »
Une rencontre en 2007, pendant que Cédric Guillermo, étudiant à l’Ecole supérieure d’art de Lorient, prépare son DNAP. Son projet de diplôme nous paraît alors pertinent et solide. Nous décidons de présenter l’installation « GUILLERMO S.A » pour l’été 2008. Cette exposition, en lien avec l’actualité et l’environnement agro-alimentaire de Locminé, permet à Cédric Guillermo de se confronter pour la première fois au public hors des murs de l’école. L’installation dense, bruyante, attire également un public non initié à l’art contemporain, ouvriers des usines environnantes et paysans locaux ont la curiosité de venir visiter l’exposition, s’identifient, s’en amusent…et reviennent… Une expérience qui nous donne envie de suivre régulièrement son travail.
Une démarche plastique qui a comme objectif avoué d’initier un dialogue entre la ruralité et l’art contemporain, en s’appuyant sur le lien constant et profond qu’il entretient avec le milieu agricole dans lequel il évolue. Le jeune artiste convoque dans son travail, les objets, les comportements, les références de ce milieu, mais aussi les procédés de fabrication. Les processus formels de l’artiste sont associés à son vécu personnel, une approche sensible qui associe sincérité et humour par l’utilisation de différents médiums comme le dessin, la photographie, la vidéo, la sculpture, l’installation. Entraîné par une logique expérimentale de création, son environnement personnel s’impose alors comme une préoccupation majeure, à la fois source de questionnement et lieu de tous les possibles.
L’action culturelle menée depuis 5 ans par l’Atelier de la Gare a attiré l’attention de Saint-Jean Communauté qui a sollicité sa compétence artistique pour le projet « claie des arts », 1% artistique de la Maison des services publics de Saint-Jean Communauté, afin de mener un travail de sensibilisation artistique auprès de la population du territoire. En réponse à cette demande, L’Atelier de la Gare a proposé le plasticien Cédric Guillermo pour une résidence d’artiste de 3 mois pendant laquelle il interroge la vie quotidienne des habitants, explore, développe et interprète divers points de vue. L’Atelier de la Gare Lieu d’expression contemporaine, Locminé, Morbihan, tel un laboratoire expérimental, cette structure propose un échantillon de la création actuelle. Jeunes talents et artistes plus confirmés s’y côtoient.
Outils, frappe de marquage, trophée, marteau cloueur et fontaine Des sculptures sont créées pour être ensuite disposées dans des magasins de bricolage, des coopératives ou encore chez un armurier. Bien que dépassant l’objet usuel, certaines de ces créations poursuivent un dialogue avec les valeurs d’usage. Ainsi, une fois intégrées aux rayons des magasins elles font naître un doute chez le consommateur.
Dépliant/poster mis à disposition du public.
Des spots sont tournés dans les quatre magasins, en présence de clients ordinaires. Ils empruntent les codes particuliers à la vidéo publicitaire d’outils de bricolage pour promouvoir les objets présentés. Matthieu Gourmel, acteur, y tient le rôle du vendeur convaincu par les qualités des produits qu’il défend, souvent jusqu’à l’excès. Comme les prospectus, ces mini-vidéos prolongent l’existence des objets dans une réalité, au delà de leur présence ponctuelle dans les différents points de vente.
Spots promotionnels, vidéo, 3 min, 2012.
Outils et frappes de marquage (Tout faire matériaux), tirage sur dibond, 67x44 cm, 2012.
Trophée (Jézo Chasse & Pêche), tirage sur dibond, 67x44 cm, 2012.
Marteau cloueur (Mr Bricolage), tirage sur dibond, 67x44 cm, 2012.
Fontaine (Triskalia), tirage sur dibond, 67x44 cm, 2012.
Le Lycée Professionnel Horticole du Sullio Le Lycée Professionnel Horticole du Sullio accueille Cédric Guillermo dans le cadre d’un EIE (Enseignement à l’Initiative de l’Etablissement) sur le thème « Vivre à Saint-Jean ». Les élèves de la classe de seconde produisent un projet artistique, sous la conduite de Cédric Guillermo, sur le thème du « pot », objet qui symbolise leur engagement professionnel et qui les lie avec le territoire de Saint-Jean communauté.
Bernard Molins
Dans un premier temps Cédric Guillermo réalise sur la durée de cinq rendez-vous hebdomadaires une vidéo s’appuyant elle-même sur le pot. Cet exercice a pour but de susciter des interrogations autour de l’objet parmi les élèves, tout en les engageant vers une approche créative et réflexive. Dans cette vidéo on distingue une forme de récit axé autour d’un pot prélevé parmi d’autres. Celui-ci navigue entre les différents usages qui en sont faits et qui mettent en avant les idées de destruction, de construction, de reconstruction. Certains passages interpellent la profession horticole, notamment lorsque qu’un poireau est implanté dans un pot de terre cuite.
Pot, vidéo, 5.40 min, 2012.
Portes ouvertes La première partie de l’exercice a été de confronter les élèves à une création collective répondant à un événement : les portes ouvertes de leur lycée. Ils ont alors dû travailler ensemble, confronter leurs avis et élaborer une pièce avant de la construire. Parmi les différents projets ayant vu le jour à cette occasion figurait un monticule de pots cassés, détruits puis réhabilités dans cette création, ainsi que l’explosion d’un pot de béton faisant référence à l’œuvre de Jean-Pierre Raynaud, présentée non loin de là, au Domaine de Kerguéhennec.
Dessine-moi un pot « Dessine-moi un pot ! » c’est le sujet qui a été donné aux élèves par l’artiste. L’atelier, dans un premier temps centré sur la réalisation d’une création graphique, se prolonge avec le passage de chaque élève devant la caméra et l’argumentation des choix opérés dans leurs créations.
Centre de loisirs L’artiste interroge un groupe d’une dizaine d’enfants âgés de 7 à 10 ans sur l’urbanisme, plus précisément sur l’architecture des lotissements locaux. Il transpose ensuite les problématiques humaines aux oiseaux. Avec l’aide des élèves du lycée professionnel horticole, deux interventions sont réalisées au centre de loisirs de Saint-Jean-Brévelay, résultant dans la construction de petites cabanes, aussi appelées niches à oiseaux. La troisième et dernière rencontre a lieu au lycée professionnel horticole avec l’implantation des cabanes dans l’espace de protection des oiseaux (LPO).
Les Cabanes Un kit (composé d’une bâche, de 3 tôles d’acier et de plastique, de 35m² de voliges, de chevrons, de 3 palettes, de 15 bottes de paille, 7 bidons, 2 portes de placards, 2 fenêtres, 1 tonneau et 2 chaises) est utilisé pour la construction de cabanes dans chacune des sept communes composant Saint-Jean Communauté. La cabane, installée au cœur de la cité (place, étang, terrain de football, lieu de passage...), est après quelques jours démontée. Dans les jours qui suivent, une autre cabane voit le jour dans la commune suivante, composée des matériaux qui avaient préalablement servi à la réalisation de la première, et ainsi de suite... Un « Tract-o-mobile » (atelier mobile) qui sert au transport du kit et d’outils, rend possible cette action itinérante. Ces cabanes, dont les formes varient au gré des reconstructions, trouvent leur inspiration dans les petits hangars, les appentis, les remises et autres poulailler domestiques qui ponctuent les paysages de campagne. Ces bâtiments, souvent bricolés avec des surplus de matériel de construction, des éléments divers qui échappent ainsi au rebus, n’en constituent pas moins une part de l’identité - visuelle - du monde rural, échappant à la rationalisation comme au règles administratives.
Billio Population 351 hab. (1999) Densité 29 hab./km2 Superficie 12,03 km2 Gentilé Billiotais
Guéhenno Population 786 hab. (2006) Densité 34 hab./km2 Superficie 23,33 km2 Gentilé Guéhennotais
Buléon Population 445 hab. (2007) Densité 36 hab./km2 Superficie 12,27 km2 Gentilé Buléonais
Saint Allouestre Population 532 hab. (1999) Densité 32 hab./km2 Superficie 16,48 km2 Gentilé Allouestriens
Plumelec Population 2 337 hab. (1999) Densité 40 hab./km2 Superficie 58,36 km2 Gentilé Méléciens
Bignan Population 2 549 hab. (2006) Densité 56 hab./km2 Superficie 45,84 km2 Gentilé Bignanais
Saint-Jean-Brévelay Population 2 600 hab. (1999) Densité 62 hab./km2 Superficie 41,83 km2 Gentilé Brévelais
J’habite ici. Être au monde, c’est aussi être de quelque part, avec d’autres. Ce principe simple dans nos sociétés soumises aux lois qu’elles s’imposent comme des évidences, qu’elles soient économiques ou sociétales, ne fait plus partie des éléments productifs indispensables. Il serait même un obstacle aux mobilités et servitudes que le monde du travail érige comme règles absolues. Cédric Guillermo pose ici avec énergie et sensibilité cette question essentielle : Qu’est-ce qu’être un habitant ? Sa géographie personnelle s’inscrit depuis plusieurs générations au sein du monde rural. Il sait d’où il vient avec lucidité et exigence. Il sait le poids des choses, la dureté des matières, leurs forces aussi, c’est ce qui a fait de lui fondamentalement un constructeur. Ses gestes et ses projets ne s’unissent plus au temps de la terre et des animaux, mais ils en sont aujourd’hui le miroir. Son regard a décrit parfaitement les mouvements souvent heurtés du secteur agricole. Auprès de ses parents et de ses proches, il a vécu au plus près, dans un monde rural en mouvement constant, soumis aux contingences et aux contradictions des formes de production. Ses analyses ne sont pas celles d’un observateur distant et
désabusé, mais de quelqu’un qui a aussi choisi de ne pas s’éloigner. Sa position d’artiste aurait pu lui faire accepter par facilité toutes les distances, mais Cédric Guillermo se sait profondément de quelque part, que le sens même de ce qu’il a à exprimer se joue en des lieux essentiels. C’est ce qui donne cette densité toute particulière à son travail. Au cours de cette résidence, il a su interroger des expériences premières qui posent clairement tous ces enjeux. Premières dans plusieurs sens du terme. Tout d’abord sans doute, une expérience de l’enfance, personnelle ou en groupe, de se bâtir une cabane, un lieu où se retrouver et se construire. Premières aussi dans ce qu’elles composent l’essentiel de nos besoins en tant qu’être humain, encore si difficilement équitable dans nos sociétés. Avoir un toit, un chez soi ou se poser, pour être, vivre, regarder et comprendre le monde avec les autres. Les magasins de bricolage n’ont jamais autant été pris d’assaut, par nos besoins d’intérieur. Mais nos maisons et appartements deviennent bien trop souvent les symptômes d’un repli sur soi, plus inquiet qu’accueillant,
une enveloppe isolée, isolante, pour le cocon familiale ou communautaire. Tout au contraire les cabanes de Cédric, se refondent en une aventure permanente, ouvrent les horizons, déploient les perspectives, jouent leurs emplacements avec une rigueur plastique affirmant pleinement ses cohérences, surtout sans permis de construire. Tous ces projets sont aussi et sans doute d’abord des moments de partage. Bâtir sans accueillir serait pour lui sans signification. Chaque environnement est conçu pour l’échange et la rencontre. Les lieux qu’il a choisi d’habiter avec son travail, aire de jeux, terrain de football, magasins, rond-point, étang, sont justement des espaces partagés. Il s’y place toujours avec cet humour, comme une politesse pour nous dire des choses plus graves. Machines exposées, objets accrochés parmi les autres, ils n’attendent que l’échos de nos désirs pour libérer leurs « contre sens ». Pour que tous ces outils et ces fenêtres éphémères, le temps d’une cabane, nous redonnent l’envie maintenant et ici, d’être des habitants. Georges Peignard
Cabanes, sÊrie photographique, tirages sur dibond, 67x44 cm, 2012.
Cédric Guillermo Expérimentation / Laboratoire 2012-2014 Recherche ayant pour thématique le monde rural : collaboration et échange avec Christophe Hamon, Georges Peignard et Joseph Le Saint. Formation 2010 Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris - section Art et Espace - mention très bien. 2009 Mémoire : Les entreprises critiques - mention bien. 2008 Ecole Supérieure d’Arts de Lorient - Diplôme National d’Arts Plastiques - admis avec félicitations. Atelier 2011 Création de L’Écurie, atelier d’expérimentations plastiques, ouvert et partagé. Expositions collectives 2012 CENTQUATRE ( Paris 75 ) - L’Endroit et L’Envers. 2011 Galerie du Faouëdic ( Lorient - 56 ) - HORS BORDS 2. 2011 Manoir du Grand Lemay ( Guéhenno - 56 ) - Fiat Lux - 6 cm. 2009 Être un lieu de lumière, ( Mairie de Paris 5ième ) et Olla Valotila, à la Teaik ( Helsinski - Finlande ). Exposition personnelle 2011 L’Écurie (Morbihan 56) - Atelier d’expérimentations plastiques - Patates. 2008 L’Atelier de la Gare - Lieu d’expression contemporaine - GUILLERMO SA ( Locminé - 56 ). Catalogues 2011 Catalogue d’exposition: Hors Bords 2. 2010 Catalogue des diplômés ENSAD. 2010 Catalogue d’exposition avec N. Junod Ponsard, intitulé : Relativité de la lumière et des lieux/ Dispositifs visuels. Publications 2011 Insertion et création d’une page dans le Cri de l’Ormeau. 2009 Splash screen initié par Carine Bigot - http://c4rin3.virtuelles.fr/splashscreen/splashscreen.html Bourse 2011 Aide à l’installation - DRAC Bretagne. 2009 Lauréat de la Fondation Odon Vallet.
Ce catalogue a été édité par Saint-Jean communauté à l’occasion de l’exposition « Souffle, souffle le loup ! » du 31 mai au 3 juin 2012 et dans le cadre de la « Claie des Arts ». Exposition présentée à L’Ecurie, atelier d’expérimentations plastiques, au village de la Grée à Saint-Jean-Brévelay. Léon Guyot président de Saint-Jean communauté et les élus de Saint-Jean Communauté. Avec le concours de Mme Rousseau, Proviseur du lycée professionnel horticole de Saint-Jean-Brévelay, et Vincent Guguin directeur du centre de loisirs de Saint-Jean-Brévelay. Coordination du projet « Claie des Arts » Saint-Jean Communauté avec le soutien du projet Culturel du pays de Pontivy « Mil Tamm », sous la conduite de Sylvie Tiger. Direction artistique : L’Atelier de la Gare. Coordination du projet au lycée professionnel horticole de Saint-Jean-Brévelay : Denis Mouren, Jean-Marc Joubert et Bernard Molins. Coordination du projet au centre de loisirs de Saint-Jean-Brévelay : Karine Guillo et l’équipe d’animation. Coordination presse : L’Atelier de la Gare. Assistant régie : Vivien Simon. Acteur : Matthieu Gourmel. Textes : L’Atelier de la Gare, Julien Croyal, Bernard Molins et Georges Peignard. Photographies et dessins : Cédric Guillermo. Mise en page : Julien Croyal.
Avec le soutien des magasins suivants : Tout Faire Matériaux, Triskalia, Jézo Chasse - Pêche et Mr Bricolage. Partenaires : Saint-Jean Communauté, Pays de Pontivy, Mil Tamm, Leader, la région Bretagne, le ministère de la culture et le ministère de l’agriculture.
Cédric Guillermo remercie Saint-Jean communauté, l’Atelier de la Gare, le lycée professionnel horticole, ses parents ainsi que toutes les personnes impliquées de près ou de loin dans ce projet.
Achevé d’imprimer en mai 2012 sur les presses de la Limitrophe (56). Édité à 250 exemplaires, tous droits de reproduction réservés, Cédric Guillermo ©.