L'impact des manifestations culturelles sur l'espace urbain de Montréal

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MONTRÉAL L’impact des manifestations culturelles sur l’espace urbain et architectural *

Juliette Estiot

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MONTRÉAL L’impact des manifestations culturelles sur l’espace urbain et architectural *

Mémoire de master réalisé par Juliette Estiot sous la direction de Gilles Bienvenu, ENSA Nantes, 2013 -2014.

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TABLE DES MATIÈRES INTRODUCTION

3-

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L’exemple de Montréal

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I - L’EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1967 DE MONTRÉAL

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1-

2-

À l’aube de l’Exposition Universelle : une modernisation du centre-ville.

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a- Un nouvel espace bâti : l’apparition de l’architecture de grande hauteur.

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b- Les réseaux de transports

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L’Exposition Universelle de 1967 : un nouveau territoire insulaire. a- Le plan directeur de l’Expo 67 : la création d’un quartier.

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48 52

b- Les pavillons de l’Expo 67 : la Planète entière représentée.

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c- Habitat 67, une icône architecturale.

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L’Expo 67 aujourd’hui : qu’en reste t-il ? a- Les legs et réhabilitations : un faible héritage matériel.  b- Le leg d’un bagage culturel : au delà de l’île Sainte-Hélène.

76 77 88

II - LES JEUX OLYMPIQUES DE MONTRÉAL 1976 : LA XXIe OLYMPIADE. 97 1-

Le site du Parc Olympique

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a- Implantation du projet : Hochelaga-Maisonneuve, un parc industriel.

106

b - Les aménités du futur site olympique

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2 - Les infrastructures olympiques : Montréal 1967, berceau du sport. a - Les infrastructures annexes : l’utilisation de structures existantes.

116 120

b- Le Parc Olympique, une œuvre de Roger Taillibert.

134

3 - Héritage contemporain des infrastructures olympiques : vers une redéfinition du parc.

146

a- Etat du site olympique et les nouvelles infrastructures

148

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b- Les réhabilitations et les enjeux d’une réinsertion

III - LE FESTIVAL INTERNATIONAL DE JAZZ DE MONTRÉAL

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1- L’émergence du jazz à Montréal : développement d’un quartier identitaire pour le divertissement.

182

a- Le début du XXe : l’installation.

182

b- Vers un remaniement du quartier.

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2- Le Festival International de Jazz de Montréal (FIJM)

193

a- La mise en place du FIJM, un nouveau concept festivalier.

193

b- L’historique du festival : vers une qualification culturelle de l’espace.

197

3- Le Quartier des Spectacles : un espace dédié à la culture et au divertissement.

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161

CONCLUSION

233

BIBLIOGRAPHIE

246

ICONOGRAPHIE

254

209

a- Le site actuel : un espace non relié à la ville.

212

b- Les objectifs et nouvelles infrastructures du Quartier des Spectacles

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INTRODUCTION

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9


Je tiens à remercier Georges Adamczyk, Professeur d’architecture et ancien directeur de l’École d’architecture à l’Université de Montréal, pour m’avoir encadré et transmis son savoir sur la ville de Montréal. Je tiens à remercier mes amis québécois, Martin Tanguay, Audrey Touchette, Kassandra Bonneville, Pierre-Charles Gauthier, Catherine Alexandre Lacombe, Simon Tremblay, J. Jérôme Lemieux-Bouchard et bien d’autres encore pour m’avoir transmis l’amour de leur ville et leurs expériences et leur point de vue ; je souhaite ajouter à cette liste mes colocataires à Montréal pour leur folie et leur culture ainsi que mes compatriotes français au Québec : Ariane Francescato, Claire De Fraguier, Matthieu Cadaert dit « Versailles », Antoine Lafon, Yvanie Wilhelm, Ange Sauvage, Clément Rota pour leur avis précieux et surtout pour avoir parcouru cette ville de Montréal avec moi pendant un an. Je veux enfin souligner le soutien de mes amis de l’ENSA Nantes , de mes amis rochelais et bien entendu celui de ma famille à qui ce mémoire doit beaucoup également. Qu’ils en soient grandement et très sincèrement remerciés. 10

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L’évolution de la cité est depuis toujours aux confins de multiples causes et motifs. Ce « vivre-ensemble » et son organisation se sont imposés à l’homme pour des raisons liées à la nature : le climat ou la géographie contraignant les sociétés à d’indispensables adaptations ; ce sont cependant des motifs de sécurité, de protection et de croyance divine qui ont modelé à jamais et avec force les paysages urbains. Le prétexte religieux a assurément pesé lourdement dans les choix humains marquant l’espace-temps d’ouvrages considérables au regard des moyens techniques de l’époque, du coût de construction dans le temps et en vies humaines. Nos cathédrales européennes en sont d’illustres témoins comme peuvent l’être les mosquées du monde musulman ou les temples asiatiques. D’une religion à l’autre, la Révolution Industrielle et le scientisme qui s’y rapporte très rapidement font basculer l’idée d’une toute-puissance divine vers une idée non moins absolue que l’homme peut tout maitriser et défier les lois naturelles par ses savoir-faires technique ou technologique. La nouvelle croyance en la toute–puissance de l’homme, le développement des moyens de communication encourage les nations industrielles à une course effrénée vers la quête de progrès technologiques et leur démonstration. Naît ainsi l’époque des premières grandes expositions prenant même le qualificatif d’ « universelles ». 12

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Ces occasions rythment désormais le calendrier des sociétés et s’ajoutent aux Fêtes religieuses marquant le temps de la modernité au côté des marqueurs religieux. Cette ponctuation temporelle s’accompagne bien sûr de celle des marqueurs d’espaces que deviennent les ouvrages dédiés aux expositions. La ville-hôte construit les halls d’accueil, les nations invitées rivalisent d’audace et de moyens en démonstration de leur puissance, de leur modernité. La ville dès lors accepte ou subit sa transformation pour intégrer ces nouvelles grands-messes dédiées au génie de l’homme sur la nature. Des quartiers entiers sont crées à l’orée des villes et des « pavillons » imposent leur silhouette nouvelle à la ville entière. L’Exposition Universelle de Paris et la Tour Eiffel nourrissent déjà la polémique d’une œuvre devant être démolie après la manifestation quand les Grand et Petit Palais seront eux conservés à titre utilitaire pour la tenue de grandes expositions dédiées au monde moderne tel le salon de l’Automobile par exemple. La rénovation des Jeux Olympiques participe à cet ode au génie humain et ces rendez-vous païens par la magie de la télévision vont même peu à peu supplanter en notoriété les grandes Expositions. Les stades font dès lors œuvre de « pavillons » et participent grandement à la démonstration politique et sociale du pays-hôte. Ce qui à l’Exposition de St Louis n’était qu’un moment ludique est aujourd’hui un enjeu majeur de communication pour les nations pouvant se payer cette débauche d’énergie et de moyens.

Vue panoramique de l’exposition universelle de 1900, Lucien Baylac 1900. Digitalisé en 2007 Stade olympique de Beijing, Le Nid, architectes Herzog et Demeuron, 2008.

On peut dénombrer aujourd’hui une quarantaine d’Expositions Internationales ou Universelles et Londres a accueilli les Jeux de la Trentième Olympiade ; Montréal quant à elle accueillit les Jeux en 1976 et reçut l’Exposition Universelle de 1967. C’est à l’occasion de notre quatrième année suivie à l’université de Montréal que nous est venue l’idée de travailler sur un sujet toujours 14

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brûlant d’actualité dans la cité. Montréal en effet reste divisée quant au devenir d’une partie de l’héritage laissé par l’Exposition ou les Jeux et nous souhaitons utiliser cet exemple pour développer la problématique suivante : En quoi les manifestations culturelles sont-elles catalyseur d’un développement urbain et architectural : l’exemple de Montréal.

Dans un premier temps, il semble important de venir préciser les termes de notre sujet pour que, par la suite, il n’y ait pas de confusion lorsqu’ils seront employés.

Le terme de manifestation culturelle peut être entendu de plusieurs manières Prenons par exemple la définition basique issue du dictionnaire Larousse 2013 pour définir le premier terme : manifestation : évènement attirant du public relativement large (fête, festival, exposition, salon etc.), organisé dans un but commercial, culturel, publicitaire ou simple réjouissance.

Entendons le terme « manifestation culturelle » d’une manière plus ciblée et probablement moins académique que celle proposée dans le dictionnaire Larousse, voire à tendance philosophique. Ce que représente selon moi une manifestation culturelle est effectivement un regroupement de personnes qui viennent confronter, associer, comparer leurs compétences, leur vision et cela dans une optique de fraternité. Le mot « culturelle » ici ne fait pas forcément référence à l’intellect mais plutôt à une association de cultures, celles-ci à la fois entendue comme « pratiques d’un peuple » mais aussi comme la philosophie d’une activité venant enrichir l’esprit ou la personne. Le terme désigne donc, dans le cadre de ce mémoire, les rassemble16

ments de type artistiques, sportifs, architecturaux ou bien anthropologiques. Nous faisons ici référence à la Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles de 1982 : “dans son sens le plus large, la culture peut aujourd’hui être considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances, - et que la culture donne à l’homme la capacité de réflexion sur lui-même. C’est elle qui fait de nous des êtres spécifiquement humains, rationnels, critiques et éthiquement engagés. C’est par elle que nous discernons des valeurs et effectuons des choix. C’est par elle que l’homme s’exprime, prend conscience de luimême, se reconnaît comme un projet inachevé, remet en question ses propres réalisations, recherche inlassablement de nouvelles significations et crée des œuvres qui le transcendent. […]”

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Pour poursuivre avec la définition des termes de la problématique, le mot « catalyseur » ne renferme aucune subtilité, je me permets donc de citer sans ajout l’extrait du dictionnaire Larousse 2013 : catalyseur : élément qui provoque une réaction par sa seule présence ou par son intervention.

Pour finir, la notion de développement urbain fait référence à la transformation de la ville. L’idée de « développer » évoque deux termes, en premier lieu celui de la croissance, puis celui de l’amélioration. La croissance de l’urbanité peut être compris en tant que hauteur, celle des bâtiments, c’est le registre de la densification, ou en largeur, faisant alors référence à l’étalement urbain. Dans le cas de la ville de Montréal, les deux termes seront appliqués dans des proportions similaires. C’est donc essentiellement vers l’amélioration que la notion du « développement urbain » aura le plus d’impact. Améliorer l’espace urbain signifie à la fois le rendre présentable, soit utiliser l’existant et le transformer, mais également le complexifier en venant y apporter de nouveaux éléments architecturaux ou technologiques.

Après une introduction du contexte historique de la ville de Montréal, de sa création jusqu’aux années 1950, nous développerons le sujet à travers trois manifestations culturelles : La première, l’Exposition Universelle et Internationale de Montréal en 1967, la seconde, les Jeux Olympiques de Montréal de 1976 et enfin la troisième et dernière, le Festival International de Jazz de Montréal. Au moyen de ces trois exemples nous allons tenter de montrer comment ces manifestations culturelles ont été, ou sont encore, catalyseurs d’un développement de la ville de Montréal et ce sur différentes échelles, celle de l’œuvre jusqu’à celle du territoire.

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Pour amorcer le sujet correctement, il est important de résumer de quelle manière la ville de Montréal a émergé, depuis sa création jusqu’à sa notoriété d’aujourd’hui, vers la place qu’elle occupe en Amérique du Nord et l’influence qu’elle exerce sur le Canada en terme de mégalopole cosmopolite.

L’exemple de Montréal

Si Jacques Cartier, navigateur et explorateur français (1491 – 1557), a bien été le premier Européen à explorer l’île de Montréal, terre iroquoienne alors appelée Hochelaga, en 1535, c’est Samuel de Champlain (1567-1635), autre explorateur français et charentais qui s’y établit en 1611 pour amorcer la colonisation française du territoire. Bien que les débuts soient précaires, avec un processus d’évangélisation difficile, la colonie française s’en sort en développant l’agriculture (culture du bois, du « blé d’inde », de la pêche) et l’échange de fourrure avec la métropole française. C’est sous Louis XIV qu’en 1663 la colonie devient une province royale, régit par les Sulpiciens. Ces derniers sont les premiers fondateurs de ce qu’on appelle aujourd’hui le Vieux Montréal et dont les premières rues sont bornées en 1672. Montréal continue alors de s’étendre, avec l’apparition des premiers faubourgs dans les années 1730, soutenue par des activités marchandes et agricoles.1 1    Cours d’Histoire du Québec suivit en 2012 et enseignés par Jacques Lachapelle, historien de l’Université de Montréal.

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En 1763, suite aux invasions, la Nouvelle-France n’est plus et se voit ainsi passée aux mains des Britanniques qui relancent Montréal sur une activité commerciale et de transport d’une grande envergure, devenant alors plaque tournante de l’approvisionnement et du peuplement de la région des Grands Lacs. La ville ne cesse alors de grandir avec en 1824 la construction du canal Lachine et en 1836 les lignes de chemins de fer, deux infrastructures permettant encore d’améliorer le transport de marchandises. La compagnie ferroviaire Canadien Pacifique s’installe à Montréal en 1880, faisant de la ville le nœud ferroviaire de tout le Canada et amenant l’activité industrielle à son apogée, les banques et institutions financières suivent alors le mouvement.

Cependant, après la Seconde Guerre Mondiale, un mouvement d’industrialisation se développe chez son voisin l’Ontario et on voit Montréal décliner peu à peu dans les années 1950 au profit de villes comme Toronto. C’est aussi à cette époque que le projet de la Voie Maritime est voté. L’ouverture de ce cours d’eau profond, long de 3700km, permet de rejoindre depuis le Saint-Laurent la région des Grands Lacs, affaiblissant alors de rôle de la ville de Montréal comme grand port, puisque les ententes se faisaient de plus en plus entre la Grande Bretagne et l’Europe et entre le Canada, les Etats-Unis et l’Asie.

Plan de la ville de Montréal en 1763

Voie maritime, entrée de la première écluse sous le pont Victoria , Juillet 1962.

Les années 1950 ont vu apparaître une vague de rébellion de la part des Québécois, une prise de conscience de leur situation précaire en tant qu’unique province francophone face aux États-Unis mais également au gouvernement du Canada. Le Québec, Montréal mise à part, est une terre rurale et empreinte de vieilles valeurs et fermée à l’immigration.

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René Lévesque, homme politique et fondateur du Parti Québécois, parle de la situation du Québec : « Parce que si on veut avoir les moyens et la volonté de cesser d’être une minorité perpétuellement inquiète de sa survivance, c’est un mot malade, la survivance, on peut devenir un peuple qui est chez lui, puis qui est sûr de vivre, et ça c’est normal ! On peut cesser d’être un peuple caricaturalement pauvre dans une société riche qui est manipulée par les autres. Et devenir un peuple qui se donne les caractéristiques essentielles de sa prospérité et de son développement dont la première est la responsabilité de ses propres instruments. On peut devenir un peuple qui se donne la dignité puis qui a la taille et l’allure de quelqu’un collectivement de normal, par exemple, moi je suis écoeuré de parler de la langue, ça a pas d’bon sens de parler de la langue, de pacotiller autour de la langue, dans une société normale, elle se parle toute seule, la langue ! (…) Oui bah justement, avez vous jamais entendu parler d’un front du Danemark danois ? Avez-vous jamais entendu parler de lutte de fous comme celle la ? Maintenant on peut tous l’appliquer, pas contre personne c’est juste pour nous, c’est pas par hostilité qu’il faut le faire ça et puis on le sait, c’est pas en particulier contre les autres dans le Québec, c’est des québécois comme nous. Et quand on sera sûrs d’être chez nous, comme une majorité qui est chez elle, comme

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un homme est dans sa maison, les autres nous respecterons. Ils respecteront des gens qui se décident et on n’aura pas de misère à les respecter, il faut que ce Québec là soit pour tous les Québécois, on peut devenir une sorte de société modèle si on veut. Puis c’est pas contre ceux qui sont autour de nous non plus, dans le reste du pays, y’en a qui le savent bien mieux que certains de nos propagandistes qui nous humilie par le mépris inconscient qu’ils nous manifestent avec leurs propagandes. Y’a des gens, de plus en plus, qui comprennent qu’ils peuvent avoir des liens amicaux et mêmes fraternels, dans un nouveau monde d’associations, mais qui serait fait d’égal à égal, entre deux pays qui sont chacun chez eux ! (…) Il y a une richesse dans tous les peuples et tous les peuples ont le droit librement de développer d’abord leur propre richesse et leur propre personnalité, et ensuite, comme jamais auparavant, de s’ouvrir aux autres. C’est actuellement qu’on est isolé dans une cage. Quand on sera chez nous on va s’ouvrir comme jamais auparavant, et on va communiquer comme jamais auparavant. (…) »2

2    Discours de René Lévesque, avril 1970 (voir la totalité en annexe) 23


Le gouvernement québécois3 prend de plus en plus d’ampleur dans les années 1960, se séparant d’un même mouvement des pouvoirs de l’Église catholique4. Le Québec refuse alors sa situation de « survivance » et met en marche cette machine de révolte, la Révolution Tranquille. Cette dernière, dont le slogan est « Maîtres chez nous », fait face à l’omniprésence américaine sur le territoire québécois, dans la vie économique et industrielle, imposant l’impérialisme architectural américain à Montréal, dont la réplique locale francophone sera le Complexe Desjardins. Cette Révolution Tranquille est surtout porteuse de modernisation, c’est aussi l’émergence de nouvelles écoles et de l’enseignement obligatoire ou du développement d’universités telles que l’Université du Québec à Montréal (UQAM, 1969). Devant cette « menace » des grandes puissances, le Québec s’affirme à travers sa population, ses entreprises et son architecture. Montréal, elle, « ville exception » dans le Québec de par sa multi culturalité et sa situation de ville d’immigration, présente un espace urbain ressemblant à une mosaïque de communautés. Les anglophones, possédant la quasi totalité du capital, dominent la ville haute, quand en bas, Québécois, Français et immigrés tels que la communauté noire, constituent la masse ouvrière. Montréal se voit alors placée au cœur d’éléments opposés, entre terre et fleuve, ruralité et industrialisation, entre nationalisme et immigration, sa posture « bâtarde » est autant fragile que prometteuse. 5 3    Le Québec est une province du Canada ce qui en fait un Etat fédéré. Au moment de la Révolution Tranquille, le Québec est soumis à deux tendances politiques, le mouvement souverainiste souhaitant l’Indépendance du Québec, et l’idéologie fédéraliste prônant le maintien du Québec en tant que province. 4    L’Église catholique a joué un rôle prépondérant dans le développement d’instituions sociales et culturelles au Québec depuis sa création et particulièrement au 19ème.

Slogan de la Révolution Tranquille, 1962.

5    Kammer (Eva) « Usages et représentations de l’espace public urbain dans le contexte du festival international de jazz de Montréal”, 2006, UQAM.

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I - L’EXPOSITION UNIVERSELLE DE 1967 DE MONTRÉAL

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Exposition Universelle de Bruxelles

1958

Le projet du complexe Ville-Marie Établissement d’un est engagé par plan directeur pour William Zeckendorf, la ville de Montréal promoteur américain.

1944

Inauguration de la tour BCCI boulevard Dorchester

éléction de Jean Drapeau à la Mairie de Montréal Mise en place du Plan Dozois.

Exposition permente de “Terre des Hommes”

1966

1968

1962 Montréal élue comme ville accueil de l’Exposition Universelle de 1967 Inauguration du siège social d’Hydro-Québec

1978

Moshe Safdie, propose le projet Habitat 67 dans sa version réduite.

Jeux Olympiques de Montréal

1967

Les pavillons du Québec et de la France forment le premier Fermeture de Casino du l’exposition Québec “Terre des Hommes”

1996

1981

1976

1964

1959

1954

Ouverture des deux lignes du métro de Montréal

1963

1961

1955

1910 Compagnie des chemins de fer du Canadien du Nord établit un projet d’implantation d’un 3ème terminus dans la ville .

Inauguration de la Inauguration des tour de la Bourse,déHabitations clarée la plus haute Jeanne-Mance, tour en béton armé logements sociaux. du monde.

Aménagement de l’île Sainte-Hélène pour le Grand Prix de Formule

1980 Foralies Internationales de Montréal

1992 350e anniversaire de Montréal Le pavillon des USA est réhabilité en musée de l’environnement

Exposition Universelle de Montréal “Terre des Hommes” qui entraine l’aménagement de plusieurs îles sur le Saint-Laurent

Début des travaux du projet Ville-Marie

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Place des Arts

Place Ville-Marie

Hydro-QuĂŠbec

Tour CIL

Tour de la Bourse Place Bonaventure

Quartier centre-ville / arrondissement Ville-Marie

Tour CIBC

autoroute Bonaventure Place du Canada

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La ville de Montréal se prend alors en main sous la directive d’un nouveau Maire en 1954, Jean Drapeau (qui règnera sur la ville pendant 29ans), exprimant l’envie et la volonté de faire ressortir Montréal comme une grande métropole. Ce désir de mettre la ville sur la carte est donc accompagné de plusieurs démarches pour une modernité et une modernisation de la ville de Montréal1. Drapeau veut effectivement organiser une cohésion visible au centre de Montréal, lui donnant une unité en construisant des lieux utilisés, de certitude, de pouvoir et de prospérité. De ce fait, cette époque est marquée par de nombreuses démolitions dans le centre et la ville se voit purgée de quartiers, certes parfois insalubres ou illicites, comme celui du Red Light2, mais identitaires. Une croissance de l’industrie de la construction est importante à cette période puisque les chantiers de démolition se multiplient dans le centre-ville, faisant place aux constructions de nouveaux bâtiments modernes, de bureaux et d’habitations, comme les Habitations Jeanne Mance. La méthode du maire Drapeau est pourtant très contestée, rasant certains quartiers et délogeant des populations. Montréal subit alors, dans le début des années 60, le même sort que Paris dans les années 30 avec la suppression de quartiers insalubres, ou bien avec la période de la Rénovation Urbaine qui construit les Grands Ensembles dans les années 1950 / 1960. Le Maire de Montréal a, en réalité, une vision très précise de l’avenir de « sa » ville et ne prend en compte qu’une unique manière de faire, la sienne, imposant ses idées et façonnant la cité selon ses rêves.

Assermentation de Jean Drapeau par le greffier C.-O. Longpré, le 4 nomembre 1954

îlots démolis pour le futur site de Radio Canada, 1964.

1   Vanlaethem (France), « Architecture et urbanisme : la contribution d’Expo 67 à la modernisation de Montréal », Bulletin d’histoire politique, vol. 17, o n 1, automne 2008

2    Nous parlerons plus précisément du quartier du centre ville de Montréal dans le chapitre 3 du Festival de Jazz.

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1-

À l’aube de l’Exposition Universelle : une modernisation du centre-ville.

A l’image de ses ambitions, Jean Drapeau met en place une politique de Grands Projets qui servira à faire exister la ville de Montréal à travers de grandes initiatives qui « font » la ville, des évènements médiatisés et internationaux qui rendront Montréal inoubliable. La modernisation qu’il souhaite ne tarde pas à se mettre en place puisqu’en 1958 Montréal, incarnée par le sénateur Mark Drouin et du Maire Sarto Fournier3, porte sa candidature pour la prochaine Exposition Universelle lors de celle de Bruxelles. C’est en 1960 que l’idée est présentée officiellement au BEI (Bureau International des Exposition) et rejetée un mois plus tard en faveur de la ville de Moscou. Le 13 novembre 1962, face à l’abandon de la délégation soviétique, la métropole québécoise se voit attribuer l’accueil de l’Exposition Universelle de 1967, qui marquera alors le bicentenaire de la Confédération du Canada et le 325e anniversaire de la ville. 4 Les projets fleurissent alors de part et d’autre de Montréal et cela depuis quelques années déjà, avant même la nomination officielle de la ville. On voit naitre de grandes interventions urbaines et certains projets, abandonnés ou bien commencés depuis trop longtemps, sont alors redynamisés ou financés. L’envergure de l’événement est telle que cette ville en suspend doit se refaire une image et donc sauver les apparences. Dans ce paragraphe, nous allons, par le biais d’une chronologie his-

Exposition Universelle de 1958, Bruxelles. Construction de la tour CIBC vue depuis le Boulevard Dorchester 1961.

3    Jean Drapeau est Maire de 1954 à 1957 puis de nouveau en 1960. C’est Sarto Fournier qui tient la place de Maire entre 1957 et 1960, il sera celui qui rencontrera le Général de Gaulle lors de sa visite au Québec et de sa célèbre phrase : « vive le Québec Libre » en 1960.

4    Vanlaethem (France), « Architecture et urbanisme : la contribution d’Expo 67 à la modernisation de Montréal », Bulletin d’histoire politique, vol. 17, o n 1, automne 2008 34

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torique, lister les différents édifices et éléments urbains sur lesquels l’Exposition Universelle de 1967 et son contexte politique ont eu un impact. Les impacts dont nous parlons ne sont pas seulement directs, soit ces éléments de la ville n’ont pas forcément été crées pour l’exposition. Certains projets, dans un contexte compétitif entre les différentes institutions (les banques), suivent le mouvement de délocalisation de leur siège social vers un quartier en plein renouvellement urbain. D’autres projets, en latence depuis des décennies, ont alors profité du budget de l’Exposition, alloué à certains départements, pour enfin voir le jour à cette occasion.

Le 8 juin 19625, le nouveau siège social d’Hydro-Québec6, conçu par Gaston Gagnier, est inauguré dans le centre ville de Montréal. Cette nouvelle compagnie est un symbole de modernité de la société québécoise, soutenue par le mouvement de la Révolution Tranquille et du Gouvernement de Jean Lesage dont René Lévesque, cité plus tôt, était premier ministre. Quelques mois plus tard, le 13 septembre, la première phase du projet de la Place Ville-Marie se met en marche, et s’aligne également sur le boulevard Dorchester élargi dans les années 50, il sera renommé en 1987 boulevard René-Lévesque pour en

La Place Ville-Marie est un des projets phare qui ont redynamisé le centre-ville de Montréal dès le milieu des années 50. Celui-ci n’est pas un bâtiment pensé seul, mais comme faisant partie d’une plus grande rénovation urbaine commencée dans les années 1910 par la Compagnie de chemin de fer Canadien du Nord (CNoR) ayant la volonté de construire un 3ème terminus au sein même de la métropole. Si ce terminus a bien été ouvert provisoirement en 1915, la réalisation de l’édifice l’accompagnant se faisait attendre faute de moyens. L’après-guerre n’étant pas plus riche, financièrement comme professionnellement, c’est au promoteur américain William Zeckendorf que fut confié ce projet en 1955.7 Son agence proposa alors un nouveau plan d’ensemble pour les trois quadrilatères appartenant à la Canadian National, et, lorsque ce-dernier fut approuvé en 1957 par le gouvernement, le projet de mise en valeur des terrains longeant le boulevard Dorchester, dont celui de la Place Ville-Marie, est réalisé en collaboration avec des architectes montréalais8. La ville et la société québécoise, récemment empreinte de nouvelles valeurs partagée à travers le mouvement de la Révolution Tranquille, n’accueillent pas la présence de Zeckendorf avec enthousiasme. Celui-ci incarne l’impérialisme américain et la soumission du Québec qui fait appel à leur voisin. Plusieurs entreprises et compagnies, notamment certaines banques et leurs promoteurs, refusent de se lier au projet et vont même jusqu’à lui faire concurrence. On voit donc la

6    Hydro-Québec est une société québécoise fondée en 1944 et chargée du transport de l’électricité au Québec.

8    Affleck, Desbarats, Dimakopoulos, Lebensold, Michaud, Sise qui fonderont plus tard l’agence ARCOP.

a- Un nouvel espace bâti : l’apparition de l’architecture de grande hauteur.

5    Les deux paragraphes qui suivent sont basés sur des données extraites de l’article : Vanlaethem (France), « Architecture et urbanisme : la contribution d’Expo o 67 à la modernisation de Montréal », Bulletin d’histoire politique, vol. 17, n 1, automne 2008

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faire une artère principal du centre-ville.

7    William Zeckendorf conçut pour des villes telles que New-York, Denver ou Washington, dirigeant son agence immobilière constituée avec Ieoh Ming Pei et composée d’architectes formés à Harvard par Walter Gropius et Marcel Breuer. Zeckendorf travaille en collaboration avec la Webb & Knapp, bureau d’étude canadien.

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Banque Royale du Canada quitter son adresse de la rue Saint Jacques pour devenir principale locataire de la Place Ville-Marie, alors que la Banque de Commerce Canadienne Impériale (BCCI) s’installe dans un des nouveaux édifices du carré Dominion, ces institutions menant une guerre aérienne pour savoir lequel des deux bâtiments serait le plus haut du Commonwealth britannique. En 1959, le promoteur montréalais Ionel Rudberg, soutenu par la CIL, réalise un gratte-ciel sur la rue University et l’inaugue alors avant la Place Ville-Marie. Ces trois immeubles, s’implantant dans le centre de Montréal, changent alors la forme même de la ville. Plus hauts, plus proches et bien plus novateurs que ce qui n’avait jamais été dessiné alors à Montréal, ils développent la ville en la densifiant. Bien qu’en cette heure, la course pour l’Exposition Universelle n’est pas encore lancée, celle des Grands Projets fait peu à peu son apparition. La lutte pour la souveraineté québécoise fait alors naître un nouveau point de vue architectural, amenant une relation de proximité entre la rue et le bâtiment et une densification verticale du tissu urbain, un langage alors peu exploité à Montréal.

Trois autres projets entrent dans la silhouette de la ville de manière plus intrinsèque à l’Exposition Universelle de Montréal. Le centreville des années 50 est à la mercie des promoteurs immobiliers qui sont les nouveaux acteurs au sein des projets de construction. Le rôle des banques, entendues comme sièges sociaux, est primordial puisque se sont elles qui achètent les terrains. Ce fut le cas pour le projet de la Tour de la Bourse, où la Banque Mercantile du Canada se porte acquéreur de terrains en bordure du carré Victoria. Le projet est trop ambitieux : l’érection de trois tours selon les plans et les études de l’architecte italien Luigi Moretti se vit réduit à une seule tour de 47 étages et de 190mètres de haut. Inaugurée au début des années 1960, elle fut élue la tour en béton armée la plus haute du monde en 1965. 38

Construction des tour Telus et Ville-Marie

Construction de la tour de la Bourse depuis le fleuve Saint-Laurent

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Les années 60 sont bien celles de l’apogée du béton comme matériau de construction, on a pu l’observer avec les tours du quadrilatère9 Dominion, également représentatif pour la tour de la Bourse dont les quatre piliers en béton se détachent clairement de sa façade en métal brun. C’est également le matériau principal dans les projets de la Place du Canada et de la Place Bonaventure. Les deux derniers projets cités sont construits dans le cadre de l’Exposition Universelle de 1967 bien qu’ils ne sont pas tout à fait des projets nouveaux en termes d’innovation urbaine. Effectivement, la Place du Canada, bordée par les rues Peel et le boulevard Dorchester, est une version plus réduite du projet de reconstruction de la gare de Windsor de 1929. Ancien parc urbain appelé Square Dominion et prolongement du parc Dorchester, la Place du Canada se refait donc une beauté avec le projet de la gare auquel on ajoute l’hôtel Château Champlain, réalisé par les architectes montréalais Roger d’Astous et Jean-Paul Pothier et une tour de bureaux dessinée par l’une des plus grandes agences d’architecture au Canada, John B, Parkin Associates de Toronto. Plus tard, en 1992, elle sera le terrain de la plus haute tour de Montréal, le 1000 de la Gauchetière, mesurant 205 mètres de haut. Finalement, la Place Bonaventure est l’ultime projet de l’opération urbaine engagée en 1910 et dont l’objectif principal était d’établir une troisième gare ferroviaire au cœur de la ville de Montréal. Le bâtiment est polyvalent au niveau de ses fonctions, il héberge un complexe hôtelier, une station de métro, et le centre commercial le plus spacieux au monde en 1967. Si l’édifice est financé par Concordia Estates Development10, c’est l’agence ARCOP qui s’occupera de

Plan actuel de la Place du Canada

Constrcution de la Place Bonaventure 1966,

9    Le mot « quadrilatère » signifie la parcelle de terrain comprise entre quatre rues. La plus importantes d’entre-elles donne souvent son nom au quadrilatère, lorsque ce n’est pas l’édifice ou le monument construit dessus. Il s’apparente au mot « îlot » qui est employé dans l’architecture française.

10    Concordia est la seconde université anglophone de Montréal, elle possède de gros capitaux et donc plusieurs branches au sein de sa société. 40

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la conception de la Place Bonaventure. Son architecture fait l’éloge du béton, matériau phare des années 1960 et innove à travers son implantation urbaine à l’angle, mais également par son organisation spatiale renfermant 288 000 mètres carrés, soit plus 80 000 mètres carré de plus que l’Empire State Building à New-York. Le centre-ville de Montréal est donc un véritable champ de construction pendant une quinzaine d’années, changeant la silhouette de la ville grâce aux investisseurs privés qui tiennent à montrer leurs enseignes le plus distinctement possible lors de la manifestation à venir. La course à la hauteur et à l’identité québécoise est l’élément moteur que cette ville en latence attendait pour évoluer. Cette partie architecturale concernant les édifices rythme Montréal à travers plusieurs quadrilatères majeurs, dessinant un quartier des affaires grâce à la concentration d’institutions banquières. Cependant, au delà d’une organisation verticale de la ville, Montréal va voir se transformer son réseau de circulation à travers d’anciens projets, mais aussi avec l’arrivée de l’Exposition Universelle dictant un parcours stratégique dans la ville.

b- Les réseaux de transports

Depuis l’entre-deux-guerres, à Montréal comme dans beaucoup d’autres villes du monde à cette époque-là, les grandes idées en matière d’embellissement urbain ont été abandonnées au profit du fonctionnalisme. L’arrivée de la voiture, avant même son exponentielle utilisation fut très rapidement un sujet de réflexion pour les ingénieurs qui se mirent à penser la ville avec un système de voierie adapté à sa vitesse. En 1944, le Service d’Urbanisme de la Ville de Montréal récemment créé propose un plan directeur qui guidera, à long terme, les priorités à adopter pour le développement urbain. Ce dernier préconise, entre autres, la construction de deux lignes de métro (est-ouest et nord-sud), de voies de circulation rapide entourant le Mont Royal en vue de fluidifier le quartier des affaires et de prolonger les voies de pénétrations du réseau provincial. Une artère rapide est prévue le long du canal Lachine et du Port qui, s’inspirant des grandes villes américaines, se superposerait à la trame traditionnelle des rues. Les années 1946 et 1947 se focalisent alors sur les études de ce projet ce qui amènera en 1948 celui d’une autoroute estouest, projet qui se précisera pendant les dix années qui suivirent. En 1960, un photomontage “futuriste” du projet de l’autoroute est-ouest est joint au dossier de candidature adressé au BEI. Malgré ces études précises, Jean Drapeau, alors tout juste réélu, leur préfère le projet du métro et de l’autoroute Décarie, nord-sud, qui relierait le pont Champlain11 au boulevard Métropolitain, première voie rapide (est-ouest) au sein de la ville et récemment inauguré. L’idée de construire un système de transport souterrain précède 11    Le pont de Champlain, dont les travaux ont commencé en 1965, relie la rive du Saint-Laurent à l’île de Montréal depuis 1962. C’est un ouvrage à 6 voies, en acier et en béton et de plus de 3,4 km.

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de plusieurs décennies ce plan directeur. Déjà en 1910, le nouveau maire de l’époque, James Guérin, veut pacifier sa ville des concurrences qui existent entre les différentes compagnies de transport en commun, en leur promettant une amélioration de l’accessibilité de la ville. 12 Dans l’attente de la réponse du BEI, Jean Drapeau lance les études conduites sous la direction du Service des Travaux publics de la Ville, qui sont suivies, trois ans plus tard, du début des travaux. Le plan du métro était composé de deux lignes: la première suivait l’axe nord-sud, passant sous la rue Berri allait du boulevard Henri-Bourassa jusqu’au bas du carré Dominion. La seconde était perpendiculaire, est-ouest, et passait sous le boulevard de Maisonneuve, allant d’Atwater à Frontenac. Jean Drapeau, fier de voir enfin une des promesses s’approcher de la concrétisation, ouvre même le chantier au public en mars 1963. Si la construction du métro, bien que latente depuis des décennies, se fait sans trop de problèmes, politiquement, le financement de l’autoroute Décarie lui se fait attendre. Ce n’est qu’en 1962, lors de l’annonce du choix de Montréal comme ville hôte de l’Exposition universelle, que le budget alloué par le gouvernement permet de débloquer les fonds nécessaires à la construction. L’accueil de cette Exposition Universelle fut donc une grande opportunité pour le façonnage de la voirie à cette époque. Montréal jusqu’alors dénuée de grandes voies de circulation, se redessine à l’image d’une ville nouvelle, plus moderne et plus intelligente. Si l’Exposition Universelle est opportune à de nombreux financements de projets, ces derniers ne peuvent pas tous être acceptés tels quels et doivent souvent être revus à l’image de l’Expo. C’est le cas pour l’autoroute Décarie, qui est préférée à la Transcana-

Maire Jean Drapeau et le plan du futur métro de Montréal, 1961. Plan du métro de Montréal et son évolution

12    Société de transport de Montréal, «Histoire de la mise en place du métro, 1910-1966» sur http://www.metrodemontreal.com (consulté le 12.10.13) 44

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dienne13 pour rejoindre l’autoroute est-ouest.

La Ville de Montréal doit être montrée sous son plus beau jour en 1967, il est donc primordiale de la mettre en valeur en évitant les espaces “moins bien traités” au sein de la métropole. Le tracé de cette autoroute, dessiné en 1964, évite alors les quartiers populaires de l’ouest de la ville. A la veille de l’Exposition Universelle de 1967, la plupart des infrastructures routières sont inaugurées et son site est relié par l’autoroute Bonaventure, construite dans la continuité de la rue University et passant par le pont Champlain; l’autoroute estouest restait alors au stade de projet. Certes repoussée, la construction de cette autoroute est-ouest finira tout de même par se faire, passant en tunnel sous le centre-ville de Montréal et contribuera à la réputation internationale de la ville. Montréal présente alors une morphologie nouvelle, où les routes ne se côtoient plus mais se superposent, une ville tridimensionnelle. Au niveau de la Place Bonaventure, l’un des plus grand complexes construits pour l’Exposition, se croisent la Transcanadienne, la ligne de métro nord-sud, les lignes de chemin de fer desservant la Gare Centrale et finalement le réseau piétonnier sous-terrain amorcé par la Place Ville-Marie.

Vue-aerienne-de-la-construction-de-l’autoroute-Bonaventure Cheerleaders à l’ouverture d’Expo 67

Montréal est ainsi prête à accueillir les millions de visiteurs venus du monde entier voir cette ville du futur, comme le décrit alors la presse américaine. Bien que l’Exposition Universelle ne soit pas la raison de la majeur partie des projets construits dans le centre ville les quinze années la précédant, il est certain qu’elle a contribué, tant en terme 13    La Transcanadienne est un système de routes traversant le Canada (axe est-ouest). Elle est composé d’un axe plus au sud et d’un axe plus au nord et les deux fusionnent de temps à autres, dont à Montréal. L’utilisation de cette route lors de l’Exposition de 1967 posait des problèmes en terme de réglementations puisqu’elle n’était pas faite pour supporter autant de fréquentation. 46

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financier qu’en terme de pression médiatique, au développement ou à la reprise de chantiers au sein du centre-ville. Les bâtiments et infrastructures cités dans ce paragraphe ne sont que des « satellites » de l’Expo, servant uniquement à embellir la ville et à lui donner une allure de mégalopole.

2-

L’Exposition Universelle de 1967 : un nouveau territoire insulaire.

L’Expo 67, puisque c’est comme ça qu’elle se fait appeler, est portée par le thème « Terre des Hommes » ; elle place l’Homme au centre de la manifestation, faisant à la fois son éloge et son éducation. Ce thème est une référence à Antoine de St Exupéry : « Être homme, c’est sentir, en apportant sa pierre, que l’on contribue à construire le monde. »14

Symbole d’Expo 67 sur la Place des Nations Symbole de l’Homme, 1961.

Le symbole de l’Expo est à l’image de cette philosophie. Inspiré d’un ancien pictogramme représentant l’Homme debout, levant les bras, Julien Hébert, le dessinateur, le jumèle et l’organise en ronde, évoquant l’humanité et l’amitié universelle. Ce thème général est d’ailleurs subdivisé en sous cinq sous thèmes : « l’homme interroge l’Univers » qui est une présentation de la recherche scientifique, « l’homme à l’œuvre » qui traite des plus récentes inventions, « L’homme dans la cité », qui illustre les défis de la concentration urbaine, « L’Agriculture », qui met en évidence les défis alimentaires créés par la surpopulation, et enfin « Le Génie créateur de l’homme » qui rend hommage à la création artistique. 14    Exposition Universelle et Internationale de 1967, Montréal, Les objectifs du plan directeur, Compagnie canadienne de l’exposition universelle de 1967.

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Chacun de ces sous-thèmes est générateur des constructions de pavillons aux thématiques diverses, en parallèle donc aux pavillons « nationaux » construits par chacune des 61 nations représentées à l’Exposition. Le site principal de l’Expo se trouve sur le fleuve du Saint-Laurent, faisant face à la ville. Montréal offre une position stratégique d’accès par rapport à la scène internationale, elle fait à la fois face au bloc Europe et à une extrême proximité avec les États Unis, première puissance mondiale. La fréquentation et l’opinion de ces deux puissances montreront donc l’exemple à suivre. Comme évoqué dans l’introduction, le Saint-Laurent est une voie d’accès maritime du Canada, la position du site de l’Expo au sein même du fleuve est donc un argument d’ouverture à la fois au Canada entier mais aussi au Québec qui, à cette époque est démantelé par les différentes opinions sur l’ouverture au monde. Cette Exposition semble donc être ouverte sur tous les champs possibles et prête s’adresser à l’humanité toute entière.

Site de l’Expo sur le Saint Laurent en 1963.

Site des îles Sainte-Hélène et Nôtre-Dame en construction 1966.

Dans cette partie, l’objectif est de faire une description des constructions, installations et infrastructures majeures mises en œuvre et construites sur le site de l’exposition en 1967. La troisième et dernière partie de ce premier chapitre étant un bilan actuel de l’héritage de l’Expo 67, il est obligatoire de passer par l’inventaire des pavillons, des moyens de transports, voire des œuvres, construits à cette occasion. La construction et le « peuplement » du site de l’exposition contribuent à un développement de l’urbanité, créant un pôle extérieur à la ville, un satellite sur le Saint-Laurent, écartant un peu plus les frontière du Montréal « pratiqué ».

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a- Le plan directeur de l’Expo 67 : la création d’un quartier.

En moins de cinq ans, les îles du Saint-Laurent, site officiel de l’Expo 67 se sont vues aménagées à un coût avoisinant les 400 millions de dollars, adoptées par des centaines d’édifices et plantées massivement. 15 On peut alors distiguer 4 parties :

Premièrement, la jetée McKay Pointe Saint-Charles est celle qui recevra surtout les bâtiments administratifs. On compte trois immeubles construits par la CCEU (Compagnie Canadienne de l’Exposition Universelle) soit : l’accueil, l’administration, la presse et finalement le pavillon thématique « l’Homme dans la cité ». La jetée reçoit également cinq immeubles privés que sont le Palais des Congrès, Habitat 67, un restaurant, l’Autostade et finalement l’arène. Ces constructions, bien qu’issues de financements privés, seront louées par la CCEU.

Plan de la Cité du Havre Plan de l’île Sainte-Hélène

La seconde partie, l’Île Verte, est une extension en aval de l’Île Sainte-Hélène, naturellement présente sur le fleuve du Saint-Laurent. Celle-ci accueillera des pavillons nationaux et privés, un amphithéâtre de plein air et la présentation du thème « l’Homme et la recherche ».

La troisième partie du site est l’Île Notre-Dame, entièrement artificielle, elle fut construite grâce à l’utilisation de plusieurs millions de tonnes de pierres provenant du lit du fleuve16 mais également grâce à la terre excavée des travaux du métro de Montréal. On y trouvera la plupart des pavillons nationaux, des privés ainsi que le thème « l’Homme crée ». Enfin, la dernière partie distinctive de l’Expo 67 est l’Île Ronde, trans-

Plan île Nôtre-Dame

15    Près de 12000 arbres furent plantés sur les différentes îles du site.

16    Le retrait de ces tonnes de pierres a eu une conséquence sur l’affluence du fleuve Saint-Laurent dans cette zone. 52

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formée en parc d’attraction, port de plaisance et terrains de jeux.

Ces sites étant à distance les uns des autres, et qui, regroupés, formaient un total de plus de 400 hectares, la création de moyens de transports dédiés au parcours de l’Expo, était plus que nécessaire. On assiste alors à une démultiplication des infrastructures, telles que le Minirail, la Balade (train sur roues pneumatiques), des vaporettos et des Pedicap (pédalo terrestres) et le plus célèbre de tous, l’Expo-Express. Ce dernier, commandé par la CCEU, était une petite ligne de chemin de fer pouvant emmener plus de 1000 passagers à la fois. L’expo-Express desservait 4 stations sur un parcours de 5,7km, allant de la place d’accueil jusqu’à la pointe sud de l’Île Sainte-Hélène, prenait le Pont des Îles jusqu’au centre de l’île Notre-Dame et rejoignait après la Ronde avec le pont de l’Expo-Express. « C’était un chemin de fer long de 5,75 kilomètres. Il était composé de huit trains de six wagons chacun, à commande entièrement automatique, qui pouvaient transporter un maximum de 25 000 passagers à l’heure dans les deux directions. Il transporta 44millions de voyageurs pendant l’Exposition, parcourant en tout 612 870 kilomètres. Il n’y a eu qu’un seul déraillement, sans causer de blessures, et aucune collision. »17

Plan de l’Exposition Universelle de 1967.

Queen Elizabeth II and Prime Minister Lester B. Pearson sur le Minirail, 1967.

À la fin de l’Exposition, les voitures ont été vendues à la Ville de Montréal et le service a continué de fonctionner durant encore quatre années, suivant un itinéraire raccourcis jusqu’en 1972 où le service a été totalement interrompu.18 17    Jasmin (Yves), La petite histoire d’Expo 67, Montréal, Amérique, 1997. 18    http://expo67.morenciel.com/fr/transports/expo_express.php (consulté le 26.04.13) 54

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La répartition du site de l’Exposition en plusieurs parties permet d’obtenir à la fois la densité recherchée dans la proximité des pavillons, mais également la conservation d’un site naturel (bien que partiellement reconstitué). L’idée d’attribuer à chacune de ces parties des caractéristiques différentes, via les sous-thèmes de l’Expo, implique la dispersion des pavillons phares, polémiques ou bien attendus et donc une répartition homogène dans la fréquentation. Cet « urbanisme » à petite échelle permet une organisation et une structuration des pavillons, sans imposer de règles plus précises quand à l’architecture même des infrastructures. Jacques Folch Ribas, journaliste québécois d’origine barcelonaise dit à la suite de l’Exposition :

« La véritable réussite de cet ensemble [...] est urbanistique. [L’Expo] préfigure vraiment la ville rêvée [...] parce qu’aucune rigidité de principe ne la rend froide et sèche alors que l’intransigeance y règne. Domination sans dictature. »19

L’Expo-Express 1967.

Le pont de l’Expo-Express 1967,

b- Les pavillons de l’Expo 67 : la Planète entière représentée.

Dans cette sous partie, nous allons faire un inventaire des pavillons, nationaux et thématiques, situés dans chacune des parties du site de l’Exposition, en décrivant plus précisément les pavillons ayant un intérêt architectural ou médiatique. Pour mettre le lecteur dans la peau du visiteur, nous avons choisi de faire découvrir le site de l’Expo 67 19   Folch Ribas (Jacques), «Urbanisme et architecture à Expo 67 », Vie des Arts, 48, automne Archives privées,1967. 56

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dans le même ordre que si celui-ci arrivait sur les îles20. L’arrivée à l’Expo 67 s’effectue à la Cité du Havre, en face de l’Autostade21, sur la rive gauche du Saint-Laurent. Mis à part les édifices qui accueillent l’administration de l’exposition et les services de presse (cités précédemment), les principaux édifices sont les suivants: • Le Génie créateur de l’homme; ce pavillon thématique abrite le musée d’art où sont réunis 200 œuvres de 125 musées et collections particulières du monde, assurées pour 35 millions de dollars • Le pavillon de la Photographie où 500 photos de 269 photographes venant de 80 pays sont exposés. • Le pavillon du Design industriel qui définit, justifie et présente le design omniprésent à l’Exposition, mais aussi dans le monde d’aujourd’hui. • Les Industries du Québec • Le Labyrinthe, pavillon créer en collaboration avec des architectes et des cinéastes, voulant recréer une réelle « aventure de cinéma », jouant avec le spectateur. • L’Homme et la santé : moins bien coté, ce pavillon présente l’« état de santé de l’homme contemporain et les espoirs qui lui sont permis »22 • L’Homme dans la cité : ce pavillon présente une vision futuriste de la ville et ses principes sont mis en pratique dans Habitat 67. 20    Cette sous-partie s’inspire grandement du parcours décrit dans le chapitre 4.5.1 de Curien (Pauline) « L’identité nationale exposée. Représentations du Québec à l’Exposition universelle de Montréal 1967 (Expo 67), » Université de Laval au Québec, 2003.

Plan de l’Expo 67

21    Stade réalisé pour l’Expo, accueille des manifestations sportives, des spectacles etc. 22    Guide Officiel, Expo 67, Les Editions Maclean, 1967. 58

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• Habitat 67 : réalisé par un étudiant de l’Université de McGill23, cet ensemble de 12 étages est constitué de logements abritant les visiteurs de l’Expo. Quittons maintenant la Cité du Havre pour dirigeons-nous, à pied ou en Expo-Express, sur le pont de la Concorde qui nous mènera directement à l’Île Sainte-Hélène (il est possible de s’y rendre en métro également) offrant à voir :

• Place des Nations : sorte d’agora où se célèbrent les fêtes de chaque nation au cours de l’Expo, et où le soir sont organisées des soirées dansantes. En face, se trouve le lac des Cygnes et le stabile de Calder symbolisant l’homme ou l’humanité. • Quatre pavillons traitent du thème L’Homme interroge l’univers : L’Homme et la vie, L’Homme, la planète et l’espace, L’Homme et les régions polaires, L’Homme et la mer.

• Plusieurs édifices privés : Le pavillon de l’Industrie canadienne du téléphone; Polymer; la Régie des alcools du Québec; l’auditorium DuPont du Canada, qui reçoit des conférenciers du monde entier, des congrès et symposiums; le pavillon d’Air Canada; celui des Brasseurs du Canada, et celui du scoutisme.

Place des Nations lors d’une cérémonie 1967.

Pavillon Air Canada

• Plusieurs pavillons nationaux : Scandinavie, Belgique, Corée du Sud, Suisse, Chine (Taïwan), Iran, Pays-Bas, Autriche, du Japon, ainsi que les pavillons de New York, du Maine et du Vermont. 23    L’Université de McGill est la première université anglophone de Montréal. 60

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• Le pavillon des États-Unis : formé d’une sphère géodésique, cette structure, conçue par Buckminster Fuller, est l’une des plus célèbre et symbolique de l’Expo 67. Mesurant plus de 200 pieds de haut (presque 61 mètres) et d’un diamètre de 250 pieds (plus de 76 mètres). Elle est construite en acier et possède un revêtement en acrylique ce qui permet, avec un dispositif actionné par les rayons du soleil, un changement de couleur de la bulle. Proche de la station de métro Sainte-Hélène, la Biosphère de Buckminster Fuller est littéralement traversée par le Minirail, permettant aux visiteurs d’avoir un autre point de vue sur ce qui y est exposé. Le thème du dôme est « l’Amérique créatrice », on y relate donc les faits importants historiques des Etats-Unis, mettant l’accent sur différents domaines tels que les beaux-arts, le cinéma ou la science. Un escalier mobile d’environs 40 mètres de long (le plus long du monde à cette époque), permet d’accéder au plus haut niveau de la sphère, y découvrant un univers lunaire ponctué de véritables vaisseaux.24 Près du pavillon des États-Unis, il est possible de quitter l’île, emprunter la passerelle du Cosmos et rejoindre ainsi l’Île Notre-Dame qui accueille le plus grand nombre de pavillons privés et nationaux, dont voici les principaux :

Étage du pavillon des États-Unis par Buckminster Fuller. Sphère de Buckminster Fuller traversée par le Mini-Rail, 1967.

• Le pavillon de l’URSS : cette année-là, les Soviétiques fêtent le 50e anniversaire de la révolution russe; ils présentent leurs performances dans les domaines du spatial et du nucléaire

• À proximité on trouve divers pavillons privés : L’Homme et l’agriculture, où l’on y présente les solutions technologiques, scientifiques

24    Il est important de rappeler que deux ans après, la mission Apollo 11 emmena pour la première fois sur la Lune Neil Armstrong et son équipier Buzz Aldrin, créant une avancée gigantesque pour l’humanité. 62

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et traditionnelles de résoudre la faim dans le monde; le pavillon de l’Acier; celui des Pâtes et papiers du Canada; le pavillon du Judaïsme; la Maison Châtelaine (maison modèle tout confort); le pavillon de la Vie économique (24 entreprises canadiennes expliquent comment elles contribuent à la richesse du pays); • Israël : on peur y voir la métamorphose du territoire depuis 1948, le mode de vie, les souvenirs de Masada et d’Auchwitz.

• Cuba : le pavillon transcende tout embargo; la présentation rappelle explicitement l’esclavage et la violence, sujet considéré comme tabous par d’autres nations, et où les Américains peuvent venir y acheter en toute quiétude des cigares interdits aux États-Unis. Jamaïque : Le pavillon est une reproduction d’un magasin rural de la Jamaïque du 18ème siècle. Un bar se trouve en position d’accueil où des artistes jamaïcains interprètent des airs folkloriques. Également d’époque, une cour attenant au magasin, autour de laquelle sont disposée des huttes, regarde un élégant jardin.

Pavillon de Cuba, Montreal 1967 . Carte postale, collection du Centre d’histoire de Montréal. Pavillon de la France à l’Exposition Universelle 1967

• La Grande-Bretagne : le pavillon décrit avec humour le mode de vie anglais.

• La France : crée par l’architecte Iannis Xenakis, le pavillon compte huit étages si l’on compte le toit (restaurant) et le sous-sol. C’est une puissante structure de béton et d’acier entourée d’un jeu de lames brise-soleil en aluminium, assurant un effet sculptural. Le pavillon, abritant théâtre amovible, restaurant, salle de cinéma et de conférences, affiche plus de 22 450 m2, 132 mètres de hauteur, le tout dominé par des mâts décoratifs et une flèche d’acier. Le thème général de l’exposition interne est « Tradition et Invention ». En descendant, on passe de la littérature à la peinture (XIXe et XXe siècle), puis au ci64

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néma, à la science (un satellite est exposé), à la télévision25 et à Paris et au voyage. 26 • Le Canada : est le plus haut pavillon de l’Expo grâce à sa pyramide renversée, le « Katimavik » (« lieu de réunion » en inuit), qui surplombe les bâtiments du pavillon et le parterre descendant vers un canal. Il présente à l’intérieur, des motifs représentant le Canada et le monde sous le thème « Terre des Hommes ». À l’extérieur, un érable, dont le feuillage est agrémenté de photos de canadiens au travail, peut recevoir plus de 300 personnes sous son envergure. On trouve dans le pavillon des photos, cinq cinémas, un théâtre de 500 places, des expositions d’œuvres d’art représentatifs du Canada, salle de réception, restaurant et café sur plus de 30 000 m2. Expo inside out! écrit en 1967: « Like France and the USSR, the pavilion is big and full of displays; [...] Like the US, [it] is fun. [...] Canada is the best [pavilion]; because it has something of the best of most of the others »27 • Les Provinces atlantiques : les présentations sont axées sur les richesses maritimes, y compris au restaurant.

Pavillon du Canada Pavillon du Canada, Carte postale, collection du Centre d’histoire de Montréal

• Le pavillon de l’Ouest canadien : on y propose des expériences sensorielles, comme un passage dans la forêt de Colombie britannique 25    Le pavillon est équipé de nombreux postes de télévision en couleur équipés du procédé SECAM. Le Panrama12 est également présenté comme curiosité expérimentale. 26    Guide Officiel, Expo 67, Les Editions Maclean, 1967.

27   traduction : Comme celui de la France et de l’URSS, le pavillon est grand et rempli d’espace d’expsition ; (…) Comme celui des États-Unis, il est divertissant (…) Le Canada présente le meilleur pavillon car il possède quelque chose de chacun des meilleurs pavillons. 66

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ou une descente dans une mine.

• Le Québec : Ce cube en verre et en acier, légèrement pyramidal, reflète les alentours de jour et, de nuit, révèle l’intérieur du pavillon. Il présente l’eau, la forêt et l’industrie et des éléments caractéristiques du milieu naturel québécois.

• La Tunisie : Cet édifice rectangulaire repose sur un bassin et est animé par des jeux de lumières diurnes et nocturnes. Des aires d’exposition, à l’intérieur, sont disposées autour d’un patio à colonnades, réplique de ceux d’anciens palais arabes, et le dallage est une mosaïque romaine authentique. Autour de l’artisanat, du tourisme, de l’agriculture et l’industrie, on recréé l’atmosphère des souks de Tunis.
Artisanat, restauration et café sont les activités dont on peut profiter au pavillon de la Tunisie. • Les Indiens du Canada et L’Ontario, Nations Unies • Le pavillon Chrétien : il réunit huit Églises et s’articule autour du huitième jour.

Pavillon du Québec Pavillon de la Tunisie

• La Place d’Afrique : quinze pays d’Afrique noire, indépendants depuis peu, présentent leurs richesses culturelles et économiques : le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo, le Niger, le Nigeria, le Tchad, le Cameroun, le Gabon, la République démocratique du Congo (ex-Congo-Brazzaville), l’Ouganda, le Rwanda, le Kenya, la Tanzanie, Madagascar; dans l’unité de ce lieu, ils tentent d’exprimer leurs différences à travers leur pavillon. Pour finir le tour de l’Expo 67, nous devons maintenant nous rendre à la Ronde, l’Expo-Express nous y amènera, tout comme le Pont Jacques Cartier. 68

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Situé dans la partie est de l’Île Sainte-Hélène, ce parc d’amusement s’inspire des Jardins de Tivoli, à Copenhague, et repose sur des principes architecturaux que le jeune architecte Andrew Hoffman acquiert à cette fin chez Walt Disney. Outre les manèges et les attractions diverses, on trouve à La Ronde un aquarium et un cirque marin, commandités par Alcan, et le pavillon de la Jeunesse, conçu par Pierre Dupuy28 et qui n’était pas prévu dans le plan directeur. La Ronde est l’occasion de se divertir, on y retrouve également des boutiques, des sculptures et des jardins. « Personne ne saura résister au charme de la ronde. Les portes ouvrent tôt dans la matinée ; à 9 heures 30 précises et l’on s’amuse ferme jusqu›à 2h30 du matin. Chaque zone du parc est le développement d’un scénario illustré par des manifestations particulières et caractérisé par le costume du personnel. » 29

c- Habitat 67, une icône architecturale.

L’île ronde dit La Ronde © Archives de la Ville de Montréal.

Jeunes américains à la Ronde 1967, Gordon Beck, Archives de Montréal.

L’Exposition Universelle de 1967 présente une multitude de pavillons, tous architecturalement différents des uns des autres et certains, comme il est souvent coutume, se distinguent plus que les autres. Plus médiatisés, plus attractifs, plus ludiques ou bien plus impressionnants, quelle qu’en soit la véritable raison, l’Expo 67, elle aussi, a élu son emblème : Habitat 67. 28    Pierre Dupuy est le commissaire Général de l’Expo 67. 29   Guide Officiel, Expo 67, Les Editions Maclean, 1967. 70

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Le choix de dédier à Habitat 67 une partie plus importante est bien évidemment liée à sa notoriété puisqu’elle est intrinsèque à son génie architectural. Cet édifice, à travers son innovation et sa « révolution » de la vision du logement collectif, permet donc de montrer aux visiteurs, au monde, l’avancée de la pensée moderne. Or l’avancée de l’architecture, autant théorique que concrète, n’est-elle pas considérée comme développement ? Lors de notre introduction, nous avons précisé que le développement pouvait s’entendre de plusieurs manières : étalement urbain, densification urbaine, ou amélioration. Il est certain que malgré son imposante implantation, bien que réduite de moitié, Habitat 67 ne représente pas à lui seul un étalement urbain. Il pourrait cependant rentrer dans la catégorie de densité urbaine, et plus certainement encore celui de l’amélioration. L’architecte israélien Moshe Safdie, étudiant à McGill University, conçoit en 1963 ce qui deviendra, quelques années plus tard, Habitat 67, avec l’idée de rendre plus pratique et moins coûteux l’habitat en ville en le mixant aux avantages et à l’intimité des maisons privées de la banlieue. « I felt we had to find new forms of housing that would recreate, in a high density environment, the relationship and the amenities of the house and the village… »

Beyond Habitat, Safdie.30

Le projet initial de 22 étages, comprenant des boutiques, une école et 30    Reyner (Banham), Megastructure, urban futures of the recent past, Icon Edition Haper & Row 1976 traduction : « Je sentais que je devais trouver de nouvelles formes d’habiter qui recréeraient, dans un environnement de grande densité, les relations et les avantages d’une maison et d’un village. » 72

Vue intérieure d’Habitat 67.

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des ascenseurs obliques à la manière d’Archigram, a finalement été redessiné durant les année 1964 et 1965. La version de 11 étages, née de cette réduction budgétaire, s’est vu financée par la SCHL (Société Canadienne d’Hypothèque et de Logement) et construite pour l’Exposition de 196731. Habitat 67 a donc d’abord accueilli les visiteurs de l’Expo, puis les logements ont été mis à la location par le gouvernement fédéral et finalement, ces locataires ont fini par se regrouper en copropriété et ont acheté leur logement au mois de décembre de l’année 1985. On compte 158 logements et pas moins de 20 typologies différentes, allant du studio au domicile de 500m2. Le concept architectural est ambitieux, employant 354 modules de ciment pré-moulés et armés, empilés les uns sur les autres de sorte que le toit du module inférieur soit la terrasse du module supérieur. Les modules mesurent 5 mètres de large, 12 mètres de long et 3 mètre de hauteur et sont assemblés les uns aux autres pour créer la mixité de typologie. Un ensemble de rues et de passages dessert les domiciles à tous les paliers et mène également aux espaces communs tels que les parcs pour enfants, trois colonnes d’ascenseurs permettent une circulation verticale, desservant les appartements et les passerelles protégées en plexiglas situées au 6ème et 11ème étages.

Habitat 67.

Coupe d’Habitat 67

Habitat 67 était la structure la plus connue et l’une des plus visitées, bien qu’elle soit assez à l’écart des autres pavillons de la Cité du Havre. Une construction peu connectée donc mais qui, au sein des logements, offrait trois orientations grâce à un système de fenêtres en angle, permettant au locataire/ visiteur d’avoir la vue sur le fleuve du Saint-Laurent, la Cité du Havre et, pour les mieux situés, vue sur le reste de l’Expo 67.

31    Les travaux d ‘Habitat 67 commencent en 1965 et dureront 30 mois. 74

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« Habitat 67 donne une juste et grande idée de l’ingéniosité avec laquelle l’homme a su se construire un abri pourvu de tous les attributs du modernisme, dans un cadre urbain où l’espace est précieux comme l’or »32 Moshe Safdie, considère lui-même son travail comme un prototype et non comme une finalité. Il voyait là s’ouvrir une nouvelle manière construire et une nouvelle manière d’habiter en utilisant l’assemblage géométrique. En réalité, Moshe n’a pas inventé cette technique, puisqu’il est dit qu’il se serait inspiré du système de construction méditerranéen, mais le succès est tel que l’on fait rapidement abstraction des problèmes constructifs et des questions d’intimité. Cette nouvelle forme urbaine était vue comme celle qui devait nous mener vers le meilleur mode de vie possible, bien qu’en réalité, ce que propose Safdie ici était une des structures les moins radicales et complexes en terme de constructivité. 33

3-

L’Expo 67 aujourd’hui : qu’en reste t-il ?

À l’époque, un journaliste du Figaro qualifie Expo 67 de « plus gigantesque exposition de tous les temps.”34 Bien que cette opinion soit ici exprimée de manière subjective, les chiffres de la fréquenta32    Guide Officiel, Expo 67, Les Editions Maclean, 1967.

33    Reyner (Banham), Megastructure, urban futures of the recent past, Icon Edition Haper & Row 1976

34    Mesli (Samy), « L’Expo 67 dans la presse française: la vision du Québec o dans l’Hexagone », Bulletin d’histoire politique, vol. 17, n 1, automne 2008, p. 67 76

tion, battant alors les records atteints à l’Exposition Universelle de Paris de 1889, montrent qu’Expo 67 a intrigué la foule. Si le monde entier s’est déplacé pendant les six mois que dure cette manifestation culturelle, que reste t-il de cette effervescence passée et comment ce legs culturel, urbanistique, architectural, artistique ou bien « spirituel » survit dans une ville contemporaine ? Ces « rescapés » de l’Expo 67 sont-ils laissés tels-quels, en état original ? Cherche t-on a les « recyclés » ou bien à les réintégrer dans un parcours urbain de la ville d’aujourd’hui ? Ces différents questionnements vont nous aider à répondre à la problématique générale de ce mémoire, cherchant à comprendre dans quelles mesures, les legs et produits de l’Exposition Universelle jouent un rôle dans le développement de Montréal. a- Les legs et réhabilitations : un faible héritage matériel.

Une fois une Exposition Universelle terminée et l’euphorie retombée, la question du devenir des constructions doit se poser assez rapidement. La philosophie d’une exposition universelle, ne l’oublions pas, est dirigée par la pensée de l’éphémère et donc souvent du « carton-pâte ». La plupart des constructions ne sont pas faites pour durer, elles sont à peine déposées sur le sol, comme un cirque poserait son chapiteau et repartirait sans laisser de traces. Le succès de ces manifestations est tel que le désir de voir ces installations, cette nouvelle « ville » récemment jaillie du sol, rester de manière permanente est souvent exprimé. Malheureusement, les coûts que représenterait la conservation de ces édifices éphémères, seraient trop élevés pour les administrations publiques. Les investissements n’étant donc plus ou pas assez rentables, le choix de la démolition est souvent pris. 77


En octobre 1967, encore dans l’effervescence des évènements récents, le Maire Jean Drapeau, ravi du succès du projet décide, avec l’aide et l’appui du gouvernement fédéral, de garder une exposition permanente de « Terre des Hommes » sur l’île Sainte-Hélène. Le projet n’est viable qu’un temps et ferme ses portes en 1981. Ce n’est donc pas dans l’idée du prolongement de la manifestation culturelle que l’Héritage de l’Expo 67 peut avoir un impact notable sur la ville.

Dans le cas du parc des îles du site de l’exposition, renommé Parc Jean Drapeau en 2000, il est nécessaire de venir le réinventer. Il est évident que cette fonction de parc à déjà une place importante dans une ville qui oriente beaucoup son urbanisme et ses tracés sur le modèle anglophone. En effet, Montréal est ponctué d’espaces verts, de petits « squares » végétalisés en plein centre-ville, comme de véritable parcs tels que le Parc La Fontaine, le Parc Laurier, Maisonneuve ou bien entendu le Parc du Mont-Royal. Le parc des îles est donc un « poumon vert » de la ville, isolé sur le Saint-Laurent, déserté par son parcours ludique et culturel. L’objectif se définit alors dans l’accueil de nouveaux événements qui viendraient redynamiser le site.

Vue du site d’Expo 67

Concert d’Osheaga au Parc Jean Drapeau

En 1976, lors de la tenue des Jeux Olympiques de Montréal, le Grand Bassin de l’île Notre-Dame est réaménagé pour les compétitions d’aviron et de kayak. En 1978, une piste de course automobile est construite pour recevoir le Grand Prix de Formule 1 du Canada. En 1980, l’île reçoit les Floralies internationales de Montréal. Aujourd’hui le Parc reçoit deux festivals annuels que sont les Picknic Electroniks et le Festival d’Osheaga, festivals de musique électronique. Au sein du Parc des îles de l’Expo 67, la présence de la Place des Na78

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tions (aussi appelée Place des Peuples), espace plus dessiné, a pu servir à la réception de nouvelles manifestations telles que le Festivals de Jazz de Montréal au début des années 1980. La Place des Nations servait à l’accueil des cérémonies d’ouverture et de clôture de l’Exposition Universelle mais également à la célébration de chacune des Nations. Elle a subit des travaux de rénovation en 1991 pour préparer le 350ème anniversaire de la ville puis a fermé partiellement en 2007 et totalement en 2010 suite à un rapport concluant à la dangerosité du site.

Ces îles, construites, aménagée ou reconverties pour l’Expo 67, subsistent encore, y compris l’île Ronde et son parc d’attraction qui continue à avoir, chaque année, autant de succès35. Ces interventions dans le fleuve du Saint-Laurent ont été réalisées en « dur », elle sont donc pérennes et appartiennent irrémédiablement aujourd’hui au paysage montréalais. Ce n’est pas le cas des pavillons, puisque comme nous le savons déjà, beaucoup d’entre eux n’étaient pas construits pour durer. Cependant, sept des pavillons nationaux de l’Exposition Universelle tiennent encore debout aujourd’hui dans le Parc Jean Drapeau.

Plan de La Ronde en 1967 et aujourd’hui

Cinq se situent sur l’île Notre-Dame36 : Le Pavillon de la France a fait partie de la prolongation de « Terre

35    On y trouve les quais, les escaliers et l’espace réservé aux rails, derniers vestiges, avec le pont abandonné situé à l’est de l’entrée de La Ronde, des stations de l’Expo Express, le premier train entièrement automatisé en Amérique du Nord. 36    http://www.expo67.org/pat_bati (consulté le 23.09.13) 80

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des Hommes » dès 1968 et cela jusqu’en 1981. Après la fermeture de « Terre des Hommes », le bâtiment devient un temps le Palais de la Civilisation, hôte de grandes expositions telles Ramsès II et son temps, Chine, trésors et splendeurs, L’or des cavaliers thraces, puis enfin Cité-Ciné (1989-1990), avant d’être occupé par Loto-Québec qui y a installé le tout premier casino au Québec en 1993. Le Pavillon du Québec
, lui aussi actif durant les années de « Terre des Hommes », a aussi accueilli quelques expositions dans les années suivant la fermeture de Terre des Hommes. Devant le succès du Casino de Montréal, la ville de Montréal cède en 1996 le pavillon du Québec à Loto-Québec. Un passage intérieur en fait l’annexe du Casino dans le cadre de travaux d’agrandissement. C’est à ce moment que des transformations majeures auront lieu, dont la plus visible pour l’ensemble du public concerne le remplacement des fenêtres bleutées translucides la nuit pour un revêtement opaque au fini doré. Du Pavillon du Canada ne persiste que l’édifice en lui même et s’est donc vu amputé de sa pyramide inversée, le Katimavik, et de l’arbre des Canadiens. Utilisé pendant « Terre des Hommes », le pavillon, dont la toiture est toujours ornée du symbole de l’Expo 67, accueille aujourd’hui les bureaux de la Société du parc Jean-Drapeau. Sa salle de réception, récemment restaurée, présente le même aménagement qu’en 1967 et peut être louée pour des activités.

Pavillon du Québec et de la France, complexe du Casino de Montréal aujourd’hui Entrée du Casino de Montréal, architectes Provencher Roy et architectes associés

Le Pavillon de la Jamaïque
privé de ses huttes construites autour du pavillon après l’Expo 67, il continue de faire partie de « Terre des Hommes ». En 1976, le pavillon sert d’entrepôt pour les Jeux olympiques de Montréal, puis fait l’objet d’un réaménagement en 1979 dans le cadre des Floralies internationales de 1980 sur l’île NotreDame. De 1993 à 1997, le pavillon est renommé «la fleur de l’île» et se transforme en restaurant durant la saison estivale. En 2000, la Société du Parc Jean-Drapeau restaure les canaux aquatiques au-

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tour du pavillon et l’édifice revit à nouveau en 2002-2003 alors qu’il sert de lieu de tournage à une émission télévisuelle estivale de Radio-Canada. En 2005, on y aménage une salle de cours pour l’École des métiers de l’horticulture. Finalement, en 2009-2010 le pavillon de la Jamaïque bénéficie de travaux de rénovation et de réaménagement entrepris par Réal Paul architecte qui lui valent le prix d’excellence cecobois 2010 37catégorie revêtements intérieurs ainsi qu’une mention honorifique en accessibilité universelle lors des 26es Prix d’excellence en architecture de l’Ordre des architectes du Québec en 2011. Le pavillon peut aujourd’hui être loué pour des événements.

Enfin, le (petit) Pavillon de la Tunisie,
 à l’origine tout blanc a aussi fait partie de « Terre des Hommes » jusqu’en 1974 où le pavillon est réaménagé afin d’accueillir les personnalités importantes souhaitant assister aux épreuves sur le bassin olympique lors des Jeux olympiques d’été de Montréal 1976. Quelques années plus tard, en 1979, le pavillon est rénové dans le cadre des Floralies internationales comme l’a été celui de la Jamaïque. En 1995, des travaux d’aménagement en vue d’accueillir la section d’horticulture du Jardin botanique de Montréal entraînent la disparition des portes monumentales, des moucharabiehs ainsi que de la mosaïque extérieure et des bassins d’eau. En 2005, la Société du parc Jean-Drapeau procède à la réfection des façades, à l’installation de nouvelles portes, de nouvelles ouvertures et au réaménagement du pavillon. Par l’entrée sud du bâtiment, on peut admirer une grande fresque contemporaine réalisée par un artiste tunisien, Zoubeir Turki. Celle-ci ornait un des murs du restaurant et illustrait le thème d’Expo 67, «L’Homme et son monde».

Pavillon de la Jamaïque, rénové par cecobois Pavillon de la Tunisie, 2006

37    cecobois est une entreprise de réalisation et construction bois au Québec. 84

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Deux autres pavillons nationaux sont situés sur l’île Sainte-Hélène :

Le Pavillon des Etats-Unis, qualifié de chef-d’œuvre de l’architecture moderne,
subit un grave incendie et ravage le pavillon le 20 mai 1976, détruisant la totalité de la couverture en acrylique et toutes les constructions que renfermait « le Buckminster Fuller », laissant à nu sa structure géodésique en acier. 38 . L’endroit est alors laissé abandonné, servant à une occasion de décor pour le vidéoclip d’un groupe rock des années 1980.

Le bâtiment reprend vie en 1995, répercussion du 350ème anniversaire de la Ville, alors que Environnement Canada en fait un musée de l’environnement et de l’écosystème fluvial du Saint-Laurent, l’édifice est maintenant ouvert au public sous le nom de Biosphère. Cependant, les autorités fédérales ont annoncé de qu’ici la fin de l’année 2013, l’activité muséale cesserait pour devenir un centre météorologique fermé au public. Enfin, l’ultime pavillon est celui de la Corée dont il ne reste que les colonnes et la toiture. Son imposante tour de bois symbolisant les aspirations éternelles de la Corée a été abattue durant l’hiver 2012.

La Biosphère, ancien pavillon des États-Unis, hiver 2013. «L’Homme», stabile de Calder.

Si l’héritage architectural immédiat39 s’arrête là sur les îles, l’héritage artistique persiste lui aussi avec quelques œuvres telles que le « Signe solaire » de Jean leFébure, le « Totem Kwakiutl » des artistes aborigènes Tony et Henry Hunt, réalisé pour le pavillon des Premières Nations. L’œuvre la plus symbolique de l’Expo 67 est « L’Homme », d’Alexander Calder

est un stabile créer pour l’Expo 67. Il fut déplacé à l’Ouest de sa position originale et mis en valeur en 1991 dans le cadre des travaux pour le 350e anniversaire de Montréal en 1992. 38    Guide Officiel, Expo 67, Les Editions Maclean, 1967.

39    Nous faisons ici référence à l’architecture des pavillons de l’Expo 67. 86

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La capsule historique datant de 1967 enfouie sous la sculpture a, elle aussi, été déménagée au nouvel emplacement de l’Homme. Cette œuvre en acier inoxydable est la plus cotée au Canada. Elle est aujourd’hui située sur l’un des sites du Piknik Électronik. b- Le leg d’un bagage culturel : au delà de l’île Sainte-Hélène.

La philosophie de cette manifestation culturelle rentre dans une tradition de plus d’un siècle, où les hommes se réunissent, échangent, partagent et comparent leurs cultures et leurs avancées. L’effet de masse de ces avancées ne permet-elle as de voir au delà ? Habitat 67 n’est-il pas autre chose qu’un bâtiment réalisant une prouesse ? La création inconsciente d’icône ne joue t –elle pas un rôle dans le développement de la ville en elle même ?

Habitat-67 de Moshe Safdie, 2007. La Géode, La Villette, Paris.

Le dôme de Buckminster Fuller a été a structure reproduite le plus de fois au monde, elle est donc une source d’inspiration à ce moment là mais encore aujourd’hui. Elle est devenue un patrimoine moderne de l’architecture du Québec, mais aussi une icône architecturale dans le monde entier. Si la Biosphère était déplacée autre part dans la ville de Montréal, aurait-elle moins d’impact ? Serait-elle moins « le Buckminster Fuller » ? La réflexion est la même pour Habitat 67, celui-ci serait-il moins reconnaissable ou reconnu si déplacé ? Ces icônes sont rentrées dans l’imaginaire des gens, dans leur bagage culturel de référence, elles sont ancrées en eux. Si leur nom n’est pas forcément retenu, leurs formes marquent à jamais l’esprit de la population, intégrant le concept formel à leur bagage visue, impliauqnt donc la possibilité de reproduction, en tant que source de référence. 88

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Ces formes et leur concept peuvent alors être reproduits plus tard, ailleurs, et devenir « vulgarisés », sous entendu, ne plus être conçus comme de l’architecture spectaculaire ou de mégastructure, mais comme de l’architecture quotidienne. Elles contribuent alors au développement non seulement de la ville dont elles sont issues, en tant qu’icônes « touristiques », mais aussi au développement d’autres villes du monde en tant que référence architecturale. On peut par exemple retrouver un peu du concept d’Habitat 67 dans « Montain Dwellings » réalisé en 2009 par l’agence d’architecture BIG, où chaque logement devient la terrasse de celui du dessus. L’héritage de telles manifestations ne peut donc être mesuré, allant bien au-delà du simple leg matériel, c’est aussi un leg historique et culturel, un patrimoine existant mais également « spirituel ».

Tout au long de ce premier chapitre, nous avons mis en valeur le fait que l’Exposition Universelle de 1967 a été un accélérateur de la modernisation de la ville, permettant la réalisation, et parfois l’achèvement, de projets déjà esquissés depuis plusieurs décennies. Nous avons mis en évidence cet impact dans notre première partie avec la modernisation du réseau de circulation, la relance des projets des compagnies ferroviaires, ceux de la Canadian Pacific au pied du quadrilatère Dominion à coté de la gare Windsor et ceux de la Canadian National sur les voies de chemin de fer traversant la ville du nord au

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sud. 40On peut également citer le projet de l’autoroute Décarie et le tunnel Louis-Hyppolite LaFontaine. Il est d’ailleurs évident, bien que cela soit également un choix politique, que l’Expo a été un élément déclencheur à la construction du métro de Montréal. Si ces projets n’ont pas été dessinés pour l’Exposition Universelle en tant que tels, leur réalisation a pu être complète grâce aux financements que le gouvernement accorda à la ville de Montréal dans les différents départements (rénovations, constructions de centres commerciaux, accessibilité, réseaux etc.). Ces routes et moyens de transport en commun sont encore, et plus que jamais, utilisés aujourd’hui presque 50 ans plus tard. Il est donc évident que le soutien budgétaire de l’Expo 67 a permis la modernisation et donc le développement de la ville en terme de réseaux de circulation.

L’Exposition Universelle de 1967 motiva également la construction de complexes, ensembles multifonctionnels tels que la Place Bonaventure et la Place du Canada, comprenant chacun un hôtel. Ces projets ont été dessinés pour la manifestation culturelle de 1967 et la Place Bonaventure est encore aujourd’hui le plus grand complexe de la ville de Montréal. En ce qui concerne la construction des gratte-ciels développée dans les années 1950 au centre ville de Montréal, il est bon d’admettre que le lien avec l’Expo 67 n’est pas direct. Ce que nous pouvons en dire c’est qu’à cette époque, une compétition interne des institutions banquières faisait rage, engendrant le déplacement et la construction de plusieurs sièges sociaux. Si l’implantation sur le boulevard Dorchester était une stratégie indépendante, leur regroupement 40    Vanlaethem (France), « Architecture et urbanisme : la contribution d’Expo o 67 à la modernisation de Montréal », Bulletin d’histoire politique, vol. 17, n 1, automne 2008.

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n’est pas un hasard et se développe alors dans un quartier qui sera bientôt en plein renouveau urbain. Bien que les financements soient privés, l’annonce officielle d’Expo 67 en 1962, ne peut qu’être source de motivation pour représenter à la fois la modernité de la ville de Montréal, mais aussi le mieux possible la « marque » de son entreprise à une époque où le monde entier va venir fouler le sol de la ville. Si l’Exposition Universelle n’a, concrètement, rien à voir avec l’initiative de la création de ce centre financier, ce sont les banques qui ont profité, en finissant leur construction respective, de l’Expo 67 pour se faire une publicité et un nom, au moment où la ville état à l’apogée de sa fréquentation. Il est par ailleurs certain que l’implantation de l’Exposition Universelle sur les îles, au milieu du fleuve Saint-Laurent et loin du cœur de la ville, contribua a réorienter le développement immobilier que cette « course au ciel » avait engendré le long du boulevard Dorchester. Il se déplaça donc plus au sud, vers les rives du fleuve , le long de la rue Gauchetière, au dessus de la ligne de métro,41 et de l’autoroute Bonaventure qui donnait accès à la jetée Mackay, soit la porte d’entrée de l’Expo.

Ce déplacement vers le sud créer aussi un retour de la ville vers son fleuve, développant de nouvelles infrastructures routières périphériques, mais également les îles du Saint-Laurent, le site de l’Expo.

Boulevard Dorchester, 1964. Site de l’Expo 67en contruction, 1966.

« Ce que j’admire le plus, c’est qu’après tant d’années, le Montréalais puisse retrouver le Saint-Laurent dont il était séparé par les installations du port et qu’en même temps, il redécouvre sa ville dans son élan prodigieux de puissance ordonnée».42

41    À l’époque la station Bonaventure était la tête de la ligne orange. 42    Pierre Dupuy, commissaire général de l’Expo 67. 92

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À l’image de Paris avec sa Tour Eiffel, son Trocadéro, son Grand et Petit Palais, à celle de Bruxelles avec son Atomium, Montréal revendique trois monuments, héritage d’Expo 67, que sont le globe géodésique de Buckminster Fuller, Habitat 67 de Moshe Safdie, classé monument historique depuis 2009, et le complexe du Casino de Montréal, formé des pavillons de la France et du Québec. 43 La sauvegarde du patrimoine moderne, entre autres, se fait beaucoup grâce à l’implication de la population et d’association telles qu’Héritage Montréal, qui se battent pour garder l’accès de ces structures public. Expo 67, manifestation culturelle par excellence, a bel et bien été catalyseur d’un développement urbain et ce dans les différent sens du terme évoqué en introduction. Il est certain que la ville de Montréal vit encore aujourd’hui avec et à travers cet évènement, car s’il y a bien un développement qui ne peut être mis de côté, c’est celui de la notoriété de la ville à l’échelle internationale. Cette notoriété est aujourd’hui source d’un tourisme important et donc de revenu faisant vivre la cité.

L’Exposition Universelle et Internationale de 1967 a donné à la ville de Montréal l’élan qui lui manquait et, bien que dénuée de planification d’ensemble, les structures urbaines et legs architecturaux sont suffisamment nombreux pour témoigner de l’avancée de la ville vers une métropole de grande envergure internationale. Sérigraphie de Montréal, Raymond Biesinger, 1967.

43    Van Troi Tran, “ Expo 67, un évènement marquant”, http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-548/, 2010. 94

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II - LES JEUX OLYMPIQUES DE MONTRÉAL : LA XXIe OLYMPIADE.

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1976

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Ouverture du Jardin Botanique de Montréal

Jeux Olympiques de Munich

1931

1972

Construction du Parc Maisonneuve

Inauguration des salles sportives Pierre-Charbonneau et Maurice-Richard

1909

1961

1883

1918

Fondation de la ville Annexion de de Maisonneuve Maisonneuve par la ville de Montréal

Montréal élue ville hôte des Jeux Olympiques de 1976

350e anniversaire de Montréal Réhabilitation du Vélodrome en musée du vivant

Crise d’Octobre

Début de la construction du Parc Olympique de Taillibert

Création de la Régie des Installations Olympiques (RIO)

Installation d’un funiculaire sur la tour du Stade Olympique

1970

1974

1975

1987

1965

1973

Candidature de Montréal pour les Jeux Olympiques de 1972

Choc pétrolier

Remboursement de la dette olympique

2006

1991

1999

Mise en place d’un Plan Installation d’un d’Urbanisme pour le toit fixe sur le quartier Hochelaga toit du Stade Maisonneuve Olympique

1971 Extension de la ligne de métro vers l’est

1992

2008 Construcion du stade football Saputo sur le Parc Olympique

1976 Jeux Olympiques de Montréal dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve

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Village Olympique

Parc Maisonneuve Station de Métro Viau

Jardin Botanique

Arrondissement Mercier-Hochelaga-Maisonneuve

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Vélodrome Stade Olympique

Station de métro PieIX

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Suite à l’Exposition Universelle de 1967, la ville de Montréal conquiert un statut de capitale culturelle et économique (malgré un dépassement de budget de 167 à 430 millions de dollars CAD) et cherche à s’affirmer comme métropole. Dans cette optique, la ville sous l’impulsion de sa municipalité, continue de s’engager dans des évènements majeurs internationaux et accueille les Jeux Olympiques en 1976. 44 Jean Drapeau, toujours à la tête de la municipalité de Montréal, impose encore sa politique des Grands Projets pour faire progresser la ville et malgré l’opposition de mouvements communautaires dans les quartiers populaires, ce dernier va porter la candidature de la ville pour les Jeux Olympiques de 1972. Battue par la ville de Munich, ce n’est que le 12 mai 1970 que le CIO (Comité International Olympique) accorde à la ville de Montréal l’accueil de la XXIème Olympiade, face aux villes de Moscou et de Los Angeles45. Si le choix du CIO s’est dirigé vers la ville de Montréal, c’est à la fois grâce au succès de la récente Exposition Universelle, élément que le maire Drapeau a lourdement mis en évidence, mais aussi et surtout parce que ce dernier clama la volonté d’avoir des Jeux Olympiques modestes, à échelle humaine et donc, « petits » budgets46. « À Montréal, les Jeux Olympiques sont assurés de conserver une grandeur humaine empreinte de noblesse et marquée de simplicité. » Jean Drapeau, 1969.

44 Augustin (Jean-Pierre), « Installations olympiques, régénération urbaine et tourisme », Téoros, 27-2 | 2008.

45 Les deux villes se représenteront et accueilleront les Jeux Olympiques en 1980 pour Moscou et en 1984 pour Los Angeles. 46 Jean Drapeau annonce un budget prévisionnel de 124 millions de dollars CAD, soit moins que le budget prévisionnel d’Expo 67. 102

Cette XXIème Olympiade, avait-il prédit, devait être autofinancée par la CMM (Communauté Métropolitaine de Montréal) et devait présenter une implantation moins décentralisée que celle présentée par la ville de Los Angeles, et moins centralisée que présentée par celle de Moscou dans leur dossier de candidature. Jean Drapeau gère alors le dossier olympique selon ses directives, comme il l’avait déjà fait pour l’exposition universelle, et de manière très dirigiste. Il prend alors seul la décision de l’emplacement du site olympique, de la construction de nouveaux équipements, du village olympique et surtout de l’architecte du stade. Il reçoit à cette époque très peu de soutien au delà de celui du COJO (Comité d’Organisation des Jeux Olympiques) notamment en raison des conflits politiques et linguistiques entre les instances fédérales (anglophones) et provinciales (francophones). Car rappelons-le, le Québec dans les années 1960 et 1970 est dans la Révolution Tranquille, une révolte de la population face à la soumission du peuple québécois aux anglophones du Canada, et une volonté de modernisation de la province du Québec, affirmation d’une région francophone. La situation politique se tend avec la Crise d’Octobre de 197047 au Québec et les attentats nationalistes des Jeux Olympiques de Munich en 197248 . La période est troublée, le climat international s’alourdit et le doute s’installe quant à la capacité pour Montréal d’organiser sereinement les Jeux Olympiques. En plus des situations politiques compliquées, le Québec et le monde entier se retrouvent dans les années 1970 dans un contexte économique morose, assistant à une inflation boursière suite à la crise pé-

47 A la suite d’un changement de gouvernement, dirigé dorénavant par R. Bourassa, prédécesseur de René Lévesque, une série d’évènements sociaux et politiques souverainistes se passe au Québec en octobre 1970 48 Des membres de l’équipe olympique israélienne ont été pris en otage et tués par une organisation terroriste palestinienne.

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trolière qui vient augmenter le prix des matériaux et donc le budget du projet olympique.

Quelques jours avant l’ouverture officielle des Jeux, Corridart, l’exposition culturelle organisée par le COJO, a été démantelée par des employés de la Ville de Montréal sous les ordres du maire Jean Drapeau, sans préavis ni justification. Cette exposition extérieure temporaire installée sur près de neuf kilomètres de la rue Sherbrooke, eût offert pourtant une occasion de reconnaissance des artistes en arts visuels et arts de la scène, et eût été une vitrine historique des luttes et de l’identité québécoise par le biais de photos et installées sur des échafaudages jaunes commandés par le COJO. Le concept de scénographie, mis en place par l’artiste et l’architecte Melvin Charney, était également ponctué d’œuvres individuelles. Celles-ci, détenues par la fourrière, seront rendues à la fin des Jeux olympiques. 49 Suite à cette censure historique, treize des artistes représentés portèrent plainte contre la municipalité et le COJO.

En 1976, avec un stade inachevé ayant coûté quasiment dix fois le prix annoncé 50en 1970, après avoir essuyé des situations de grèves ouvrières, entrainant un retard supplémentaire du chantier puis le départ de 32 délégations51 avant la compétition, les Jeux Olympiques de Montréal sont finalement déclarés ouverts le 17 juillet.

Exposition Corridart imaginée par Melvin Charney, 1976.

Ouverture des Jeux Olympiques de Montréal 1976 par Jean Drapeau, Archives de Montréal.

49 Gloyette (Renée)« 35 ans après le démantèlement de Corridart - En souvenir d’un grave cas de censure”, Le Devoir, juillet 2011

50 Suite à l’inflation, aux mauvaises décisions financières et à la corruption, le budget de 126 millions est passé à 400 millions de dollars CAD. Le complexe olympique coutera à la fin de la totalité des travaux, 1,2 milliard de dollar

51 Trente-deux pays, majoritairement des nations africaines, boycottèrent les Jeux afin de protester contre l’inaction du C.I.O., qui refusait d’expulser la Nouvelle-Zélande parce qu’elle entretenait des relations sportives avec l’Afrique du Sud. Ce départ subit affecta principalement deux disciplines, soit la boxe et l’athlétisme.

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1-

Le site du Parc Olympique

Dans cette première partie, nous allons faire une brève description du contexte dans lequel le site Olympique vient s’implanter. L’objectif ici est de comprendre comment le projet de l’olympiade s’insère dans un quartier existant au passé industriel (a)et situé au milieu d’infrastructures ou d’éléments urbains remarquables (b). Cette première phase se présente plutôt comme descriptive en ce qui concerne l’impact sur le quartier existant et nous viendrons l’analyser dans le troisième sous-chapitre. Cette remise en contexte permettra plus tard de comprendre les enjeux de l’implantation du Parc Olympique et la grande nécessité d’une réinsertion accompagnée avec son milieu.

Le parc Olympique de Montréal s’implante dans deux arrondissements52 que sont Rosemont – Petite Patrie et Mercier-Hochelaga-Maisonneuve. Le premier arrondissement est un quartier historiquement industriel et populaire. Ces dernières années, un phénomène de désindustrialisation progressive à l’échelle de la ville se met en place et amorce la transformation du quartier Rosemont Petite Patrie qui vient s’embourgeoiser progressivement.53 L’arrondissement Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, dans lequel se trouve le site Olympique, se trouve dans une situation un peu simi-

Hochelaga est, à l’origine, une ville indépendante de la cité de Montréal, également sous la tutelle des Sulpiciens. À la fin du 19ème siècle, un groupe de propriétaires fonciers dont Joseph Barsalou, Alphonse Desjardins et Oscar et Marius Dufresne, veut constituer une cité industrielle modèle. Pour ce faire, ces derniers s’inspirent d’un mouvement américain, importé tout droit de Chicago et nommé « City Beautiful ». Ce mouvement est basé sur l’association de jardins à l’anglaise, plus pittoresque, et d’urbanisme nord américain. L’association des deux permettant alors d’alterner entre ville dense et nature, créant, soit disant, la recette magique de la ville moderne54 C’est ainsi que la ville de Maisonneuve voit le jour, organisée en quartiers et en lots rectangulaires. Il est prévu d’y construire des manufactures et des bâtiments institutionnels de grande envergure. La ville nouvelle, que l’on surnomme la « Pittsburgh du Canada » subit alors une croissance phénoménale entre 1896 et 1915, avec l’arrivée d’entreprises et usines, essentiellement de chaussures qui s’installent près du ports ou de la voie ferrée, embauchant de nombreux ouvriers, immigrés ou ruraux. En 1903, la fabrication et la réparation du matériel ferroviaire entraînèrent la construction de l’usine Angus du Canadien Pacifique. On voit apparaître les premiers tramways sur les rues Sainte-Catherine et Ontario devenant de véritables axes de développement urbain55 pour les villes d’Hochelaga et de Maisonneuve. La croissance de l’activité ouvrière entraine donc la construction d’immeubles résidentiels locatifs, d’églises, d’écoles, de banques et de couvents. Après la

53 On observe une augmentation des revenus moyens et une hausse des loyers mensuels.

55 Les rues Sainte-Catherine et Ontario sont toujours de grands axes majeurs commerciaux dans la ville de Montréal.

a- Implantation du projet : Hochelaga-Maisonneuve, un parc industriel.

52 La ville de Montréal se partage en 19 quartiers appelés des « arrondissements »

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laire, bien que le phénomène soit moins avancé. Pour comprendre l’enjeu de ce quartier, il est intéressant de s’intéresser à son processus de création et donc à son histoire.

54 Desjardins (Maude), «Sous le ciel de la métropole : les parcs de Montréal» , Musée McCord, 2009.

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Première Guerre Mondiale, la ville, endettée de toutes ces nouvelles installations, se voit annexée à celle de Montréal.

Plus tard, la construction de grands axes routiers tels que l’autoroute 2556 en 1967 ou l’autoroute est-ouest, entraine la démolition de plus de 2000 logements et bâtiments institutionnels dont le couvent d’Hochelaga. Ces transformations, auxquelles viennent s’ajouter le déplacement des capitaux et de la production vers la ville de Toronto, entrainent le départ de plusieurs manufactures et donc de résidents, heurtant alors l’économie du quartier. De nouveaux groupes de population apparaissent dans le quartier d’Hochelaga Maisonneuve, en faisant un arrondissement de classe populaire.57 Le choix de cet arrondissement ne tient pas uniquement à des préoccupations urbanistiques. C’est une logique électoraliste qui pousse Jean Drapeau à choisir sa propre circonscription pour accueillir le site olympique. Il voit ici une opportunité unique de venir appliquer la stratégie de renforcement économique non seulement de son arrondissement mais de tout l’Est de Montréal. Rappelons en effet que lors de l’Exposition Universelle et surtout au cours des années qui la précèdèrent, les efforts financiers et immobiliers furent consacrés à l’ouest et au sud de l’île de Montréal. L’implantation du Parc Olympique et du Village Olympique sur le pôle Maisonneuve viendrait alors régénérer un territoire en déclin depuis les années 1920 et redynamiser le site en terme d’offre de transports, de services et l’attractivité touristique. Le développement du site Olympique fut calqué sur celui des Jeux Olympiques de Munich, regroupant la plu-

56 L’autoroute 25 est un tronçon de la Transcanadienne mais aussi le prolongement du tunnel Louis-Hyppolite-La Fontaine, le tunnel passant sous le Mont-Royal.

57 Roult (Romain) « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement”, 2011 UQAM 108

part des infrastructures sportives sur un seul et même site, le tout connecté au Village Olympique. 58

Ce site, de manière plus concrète, est une parcelle de 60 hectares longée par la rue Sherbrooke, le Boulevard Pierre de Coubertin, le Boulevard Pie-IX et la rue Viau. Cette parcelle ne fonctionne pourtant pas de manière indépendante puisqu’elle semble faire partie d’un quadrilatère plus important dont la fin est marquée au nord par le Boulevard Rosemont. b - Les aménités du futur site olympique

Cette parcelle, futur site olympique donc, s’ancre dans un quartier avec son histoire, sa dynamique et ayant subit des transformations et des modernisations antérieures. Il s’agit ici de faire un bilan des avantages, des aménités, que le site a à offrir et dont il serait possible de se servir pour le rendre d’autant plus attractif. Le premier aménagement urbain que nous allons mentionner est le plus important en terme de superficie : le Parc Maisonneuve. Cette grande étendue végétale de plus de 60 hectares est, après le Parc du Mont-Royal, le plus grand parc de la ville. Il reçoit, depuis plus d’un siècle, les festivités de grande envergure comme celles de la SaintJean Baptiste59. Le Parc, aménagé de pistes cyclables et sentiers de courses en fait un repère pour les sportifs. Comme nous l’avons dit 58 Citation de Howell, 2009 dans Roult (Romain) « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement”, 2011 UQAM 59

La Saint Jean-Baptiste est célébrée le 24 juin, c’est la fête du Québec.

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précédemment dans la mise en contexte des secteurs Rosemont Petite-Patrie et Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, le Parc de Maisonneuve a été développé à travers le mouvement de City Beautiful importé de Chicago à la fin du XIXème siècle.

“Dès 1909, le Parc de Maisonneuve avait été envisagé suivant en cela les idées hygiéniques et esthétiques nécessaires à la réhabilitation d’un paysage urbain fortement malmené par l’industrialisation galopante de ces années de prospérité économique.60”

Son ingénieur Marius Dufresne soumet dès l’origine un vaste plan d’aménagement comprenant une piste de course, un amphithéâtre en pierre pour les jeux de hockey ou de cross. Faute de moyens, cette idée est abandonnée en 1918. Ce n’est qu’en 1945 que le secteur admet l’organisation d’ activités physiques telles que le ski alpin et le tennis, prémices d’une plus grande vocation sportive la décennie suivante, avec l’arrivée de deux infrastructures sportives proches : le complexe Pierre-Charbonneau et l’aréna Maurice-Richard en 196161. La construction de ces installations, empreintes d’une architecture moderne, redonne au Parc Maisonneuve sa vocation d’origine d’autant qu’elles sont suivies dix ans plus tard, par l’annonce des Jeux Olympiques à l’orée du parc. L’organisation de l’olympiade semble alors redonner son sens d’origine au Parc et donc venir « corriger » les détours faits par le passé. Le développement, dans un premier temps, n’est donc pas d’avoir une action directe sur l’architecture paysagère du parc mais de venir lui jouxter des infrastructures prévues des années auparavant et lui permettant

Vue aérienne du Jardin botanique et du Parc Maisonneuve, Montréal, 1938.

Circuit skiable dans le Parc Maisonneuve.

60 Géronimi Martine, « Identité urbaine, reconversion industrielle et dynamique territoriale à Montréal : le cas d’Hochelaga-Maisonneuve », Norois, 199 | 2006, p45-60 61

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Ces deux infrastructures sont décrites plus tard dans le chapitre.

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de retrouver son unité et entité architecturales d’origine. Le deuxième élément urbain est le Jardin Botanique de Montréal, développé dans les années 1920 par le Frère Marie-Victorin et officiellement ouvert en 1931, agrémenté plus tard de bâtiments administratifs, de jardins d’accueil, de serres d’exposition. C’est essentiellement au cours des années 1970 que, grâce à un intérêt naissant pour l’environnement au sein de la population et de l’éducation l’Université de Montréal se met en collaboration avec le Jardin Botanique et on assiste à la rénovation des serres, l’apparition de nouvelles installations. On voit donc se construire l’Arboreum (1970), la Roseraie (1976), et plus tard, à la suite du succès des Floralies internationale de Montréal en 1980, le Jardin Japonais (1988) et le Jardin de la Chine (1991). La dernière infrastructure urbaine présente sur le futur site olympique est le Métro de Montréal. Précédemment, nous avons expliqué sa mise en place et sa construction en 1966, motivée par l’Exposition Universelle de 1967. Le métro de Montréal, comportant alors deux lignes, une nord-sud et une est-ouest, acheminait les visiteurs d’Expo 67 sur le site des pavillons. Plus tard, lorsque les festivités furent terminées, les habitants de Montréal viennent utiliser quotidiennement ces lignes. Cette installation est donc un franc succès au sein de la métropole et se ramifie vers d’autres quartiers dont les banlieues de l’île de Montréal. À l’annonce des Jeux Olympiques à Montréal , le prolongement de la ligne verte (est-ouest) vers l’est débute en 1971 et sera étendue plus tard, en 1978, vers le sud-ouest, pour rejoindre les banlieues telles que Verdun. 112

Deux stations seront construites à l’occasion de l’arrivée des Jeux Olympiques et prennent part dans la conception du Parc, la station Pie-IX et la station Viau. La première des neuf stations de l’extension est la station Préfontaine,62 dessinée par l’architecte Henri Brillon ; elle donne accès à un axe commercial majeur, la Promenade Ontario. On peut noter ici une relation stratégique de la position des stations, débarquant sur des sites d’intérêts pour la population, dépassant donc la simple équidistance entre les arrêts. Bien que cela puisse sembler logique, il est important de le rappeler, particulièrement dans le cas des stations du Parc Olympique, car la présence de voyageurs sur le site implique donc son « utilisation ». Le traitement de la station Préfontaine est à l’image de son époque, et donne le ton pour celles à venir : l’architecture moderne et le béton sont toujours à leur apogée et servent l’architecture fonctionnaliste. Cependant, le métro de Montréal a une singularité puisqu’il présente des stations uniques, soit aucune d’entre elles n’est construite sur le même modèle qu’une autre. Si l’architecture diffère, c’est aussi, et surtout, le traitement artistique apposé à chacune des stations qui rend le Métro de Montréal aussi célèbre. L’aspect artistique n’est pas toujours pris en compte à l’heure de la conception ou de la construction de la station, parfois, a posteriori, artistes et architectes sont démarchés ou se proposent pour faire une intervention sous-terraine. Cette particularité a fait du métro de Montréal un des plus originaux de son époque, supportant ainsi l’art au sein de la ville.

La première station présente sur le site olympique est la station PieIX, construite pour desservir des installations recevant beaucoup de fréquentation, elle présente des accès vastes, facilitant la circulation. Comme prévu, elle est construite essentiellement en béton, 62 Raymond Préfontaine (1850-1905) était avocat et maire d’Hochelaga et de Montréal.

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de ses poutrelles au plafond, lui donnant l’illusion d’être suspendue jusqu’aux murs « cannelés » évoquant un rideau. Pour le sol et les escaliers des édicules, on retrouve du granit contrairement au autres recouverts de tuiles de carrières. La station Pie-IX est accessible par deux édicules, aux croisements nord-ouest et nord-est du boulevard Pie-XI et l’avenue Pierre de Coubertin, l’architecture de ce dernier édicule est en continuité avec le style architectural des installations olympiques. Sur ce thème, les œuvres d’arts présentes dans la station sont conçues par l’architecte Marcel Raby et l’artiste Jordi Bonet63 et la station est inaugurée quelques semaines avant l’ouverture des Jeux Olympiques, le 6 juin 1976.

La seconde station porte le nom de Viau et a été construite pour desservir tout particulièrement la Tour du Stade olympique et le Vélodrome et possède un seul édicule de 60 mètres de long par 27 mètre de large. Les quais sont éclairés de manière naturelle puisque la station n’est profonde que d’un seul escalier. Les parois de la station sont en béton cannelé, de la même manière que pour la station Pie-IX. Le sol est recouvert d’un parement de briques couleurs terre cuite. En ce qui concerne l’œuvre présente, c’est une œuvre murale et carreaux jaunes et turquoises réalisée par Jean-Jacques Mousseau et nommée Opus 74. La réalisation, de manière plus abstraite que ce que l’on trouve au métro Pie-IX, évoque les Jeux Olympiques, et plus particulièrement le Stade et la flamme Olympique. Ces trois différentes infrastructures, constituent les principaux attraits du site n’étant pas dédiés à l’activité sportive. Le Jardin Botanique et le Parc Maisonneuve représentant un pôle scientifique et naturel, ils viendront équilibrer le site lorsque les installations olympiques, symbole d’une architecture moderne en béton brut, seront construites. Le métro, lui, augmente l’accessibilité du site puisqu’il est

63 http://www.mémorablemontreal.com (consulté le 18.04.13) 114

Station de Métro Pie IX

Opus 74, J.J Mousseau, Station de métro Viau

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possible de s’y rendre en 15 minutes depuis le centre-ville ouest de Montréal. Utiliser cette échelle de temps, par le biais d’une infrastructure ayant déjà eu un grand succès lors d’Expo 67, peut augmenter la fréquentation du Parc Olympique car considéré comme faisant partie de ce centre-ville, alors qu’en réalité, Hochelaga-Maisonneuve est vu comme un quartier délaissé à cette époque. Les Jeux Olympiques ont donc un impact sur le développement de ces trois éléments urbains, venant soit les améliorer pour les rendre plus crédibles, les embellir, ou bien, dans le cadre du métro de Montréal, prolonger une infrastructure déjà bien ancrée dans la ville.

2 - Les infrastructures olympiques : Montréal 1967, berceau du sport.

Montréal, future cité olympique, se positionne donc dans une logique d’implantation centrale par rapport au centre-ville. Effectivement, le site d’Hochelaga-Maisonneuve, comme évoqué précédemment, n’est pas si loin du centre financier de Montréal, quartier majeur de la ville et utilisé comme point de référence. Sa nouvelle définition liée à la construction du site olympique et au prolongement du métro va le conjuguer définitivement au nouveaux quartiers d’affaires de Montréal. Cette relative compacité et véritable connexion avec le centre-ville offre la possibilité de renforcer l’image festive de la ville grâce au tourisme engendré par la manifestation culturelle, tout en développant les aménités déjà existantes. Les années 1970 reflètent également une grande période de mondialisation, d’ouverture sur le monde à travers la Révolution Tranquille, mais aussi de délocalisation et de crise économique, augmentant 116

Extensions du réseau du métro de Montréal au fil des années

Centre-ville

Parc Olympique

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alors le coût des matériaux et donc des installations. Suite à cela, le MO (Mouvement Olympique) se voit contraint de limiter la participation des athlètes à 10 000, permettant alors à plus de villes de poser leur candidature pour l’accueil des Jeux. Dans un même esprit, le CIO limite le nombre des installations olympiques à vingt prenant conscience de la hausse de leur coûts et de leur niveau technique et architectural. Montréal consacrant une certaine démesure pour la construction du Parc olympique et le stade en particulier tente de réinvestir certains équipements existant pour la cause olympique.

La construction du complexe du stade olympique commença tardivement en 1974, suite à des difficultés de la part de la municipalité et le COJO de garantir la viabilité du projet et surtout de défendre la technologie avancée du stade auprès des instances provinciales. Ce n’est donc que 23 mois avant l’ouverture que la construction commence, en essuyant grèves ouvrières et pression du COJO64, en marche vers une architecture « mégastructurelle ». L’architecture des années 1960 et 1970 est toujours dans l’époque moderniste, avec l’apogée du béton par excellence que la ville de Montréal porte encore fièrement aujourd’hui65. Cependant, ces Grands Projets que développe le Maire Jean Drapeau sont toujours en contradiction avec la Révolution Tranquille, cette idée d’un état québécois émergent, plus social, qui se concentre sur les sujets locaux et immédiats, tel que le logement, plutôt que sur l’impact de la ville de Montréal à l’international. La manière de « faire la ville » n’est pas partagée par tous, entre les

w

Évolution des impacts sur les infrastructures olympiques

Établissement des deux phases olympiques.

64 le COJO réfléchit à deux solutions de rechange plus rapides dans le cas où le stade prenait trop de retard. L’une des deux était de venir démonter l’Autostade de l’île Sainte Hélène, construit pour Expo 67, et de le reconstruire sur le site.

65 Lortie (André), Montréal 1960, les ressorts d’une réidentification, 2007 118

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politiques qui font une « ville ouverte » et les habitants qui souhaitent une recentralisation sur l’existant.66

Dans ce chapitre, comme nous l’avons fait dans le premier, nous allons faire un inventaire des infrastructures olympiques, existantes (a) ou nouvelles (b). L’objectif est de mettre en évidence à la fois la politique de réhabilitation ou de rénovation qui se met en place, soit une ouverture vers un développement durable et un recyclage de la ville, comme l’avancée de la pensée architecturale dans la ville, indice d’une modernisation et d’une ouverture vers le monde.

a - Les infrastructures annexes : l’utilisation de structures existantes.

Pour la tenue des Jeux, le COJO (Comité d’Organisation des Jeux Olympiques) choisit plusieurs infrastructures dans l’agglomération montréalaise tels que des centres sportifs, piscines, stade, terrains de jeu, gymnases et autre édifices qui serviront à l’accueil de compétitions, d’entrainements ou bien d’administration. La plupart de ces lieux sont situés à moins de 10 kilomètres du Parc Olympique et le COJO se charge de les rénover, les transformer si c’est nécessaire selon les exigences des fédérations, ou y ajouter de l’équipement.67 Dans un

Modèles de l’intégration des infrastructures dans les villes olympiques, Études 2004.

66 C’est dans ce contexte que l’incident de Corridart arrive, une incompréhension et une divergence de la vision de faire la ville, quand certains souhaitent montrer au monde les luttes populaires alors que d’autres misent sur l’image impeccable d’une ville sans problèmes. 67 http://parcolympique.qc.ca/le-parc-olympique/montreal-ville-olympique/jeux-olympiques-de-1976/ (consulté le 10.10.13)

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premier temps nous décrirons les installations déjà existantes dans la ville de Montréal et extérieures au Parc Olympique, puis dans un second temps nous décrirons les infrastructures extérieures au parc mais nouvellement construites et enfin, les infrastructures existantes sur le Parc Olympique. Les infrastructures réinvesties à l’extérieur du Parc Olympique : Le Stade d’hiver de l’Université de Montréal, situé dans le quartier Côte Sainte-Catherine, sur le flanc nord-ouest du Mont-Royal, a été inauguré en 1965. Il est composé de deux éléments, une patinoire de presque 2500 places et un stade de football synthétique d’une capacité de 5400 spectateurs. Réservé habituellement aux étudiants de l’UdeM, la patinoire est exceptionnellement utilisée pendant les Jeux Olympiques de 1976, non pas pour des sports sur glace mais pour la compétition d’escrime. Sa glace est donc remplacée par des praticables d’escrimes. Il est intéressant de préciser également que le CEPSUM (Centre d’Éducation Physique et des Sports de l’Université de Montréal), qui renferme de nombreux équipements sportifs, a été construit pour les Jeux de 1976, servant alors de centre d’entrainement aux athlètes olympiques.

Patinoire du Stade d’Hiver de l’Université de Montréal Compétition d’escrime au Stade d’hiver de Montréal 1976.

L’aréna Paul-Sauvé, située dans le quartier de Rosemont à l’angle de la rue Beaubien et du Boulevard Pie-IX, est dans le prolongement nord du Parc Olympique. Construit en 1960, elle proposait une capacité de 4000 personnes. Plus réputée pour l’accueil d’évènements politiques majeurs du Québec, pendant la crise d’Octobre mais aussi lors des victoires du Parti Québécois dès les années 76, elle accueille 122

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dans les années 1960 des compétitions et galas de lutte et matchs de hockey junior. Certains grands artistes et groupes de musiques tels que Jimi Hendrix (1968), et ABBA (1971). Cependant, malgré sa vocation d’Aréna de hockey et de sports de combat, l’aréna Paul-Sauvé accueille les matches préliminaires de volleyball. Dédiée a des activités de moins grandes envergures par la suite, telles que les quilles, le curling ou le bingo, elle se voit détruite en 1996 pour cause de non rentabilité face au budget investi dans l’infrastructure. Le Forum de Montréal, dont la fonction principale est une patinoire, a été construite en 1924, propose un amphithéâtre de 9 300 sièges et accueille jusqu’en 1996 des matchs de hockey professionnels, tels que ceux du Canadien de Montréal. La fréquentation se diversifie puisqu’il accueille également spectacles humoristiques et concerts, recevant lui aussi des artistes tels que ABBA, Queen, The Beatles, Pink Floyd, Metallica, AC/DC, les Beach Boys, Bob Dylan… En 1976, les Jeux Olympiques de Montréal le transforme en centre dédié aux compétitions de gymnastique où l’athlète roumaine Nadia Comaneci, âgée de 14ans, réussi pour la première fois de l’histoire des Jeux Olympiques, l’exploit sportif de recevoir la note de 10 / 10 de la part des quatre jurys et cela sept fois lors de la compétition. Outre la gymnastique, le Forum de Montréal reçoit également la compétition de handball, de basketball et de boxe. Le Forum fut désigné lieu historique national du Canada le 1er juin 1997.

Forum de Montréal 1966. Archives de la Ville de Montréal. Nadia Comaneci, héroïne des Jeux 1976 au Forum de Montréal.

Le Stade Percival-Molson de l’université de McGill est inauguré en 1915 et est utilisé pour la pratique amateur du football américain. Voyant sa capacité devenir insuffisante dans les années 30, une expan124

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sion graduelle s’est amorcée, reconstruisant les sièges et intégrant le premier système d’éclairage extérieur et de son au Canada. Une tribune a été ajoutée dans les années 1960, portant alors le nombre de sièges à 19 500 sièges. Le public de l’Université de McGill désertant, le gouvernement finance en 1975, l’installation d’une pelouse artificielle dans le but d’être utilisé comme terrain de hockey sur gazon à l’occasion des Jeux Olympiques de Montréal, pour la première fois de l’histoire sur terrain artificiel. Lors de la manifestation culturelle et sportive de 1976, la capacité du stade a été augmentée encore de 20 000 sièges pouvant profiter de la vue imprenable sur le centre-ville de Montréal. Depuis l’année 1998, les Alouettes de Montréal (équipe professionnelle de football américain de Montréal) joue la presque totalité de leurs match au stade Percival-Molson, reconfigurant la capacité du stade jusqu’à 25 012 places en 2010. Les nouvelles infrastructures à l’extérieur du Parc Olympique :

Stade Percival Molson Bassin olympique de sport nautiques sur l’île Nôtre-Dame

Le Bassin olympique est l’un des rares lieux d’entraînement et de compétition des sports d’aviron, de canoë-kayak et de bateaux-dragons. Il est situé au parc Jean-Drapeau sur l’île Notre-Dame, ancien “temple”de l’Expo 67 et est construit en 1975 à l’occasion des Jeux de Montréal. Sa construction engendra la première modification majeure de l’île dont toute une partie fut réaménagée pour construire des bâtiments et des équipements tels que : le quartier des athlètes, un pavillon d’administration, des gradins, des hangars, une tour de départ, une tour d’arrivée ainsi que des postes de contrôle le long du Bassin. Ce dernier s’étend sur 2,2 kilomètres de longueur, 110 mètres

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de largeur et 2,5 mètres de profondeur. 68

Le complexe sportif Claude-Robillard comporte deux édifices, l’aréna Michel-Normandin et le Complexe principal, celui-ci comprenant un bassin de natation aux dimensions internationales et un bassin de plongeon, une piste d’athlétisme intérieure, une salle de combats, une salle omnisport, des gymnases etc. À l’extérieur se trouvent une piste d’athlétisme extérieure et un terrain naturel, encerclée par un stade de 9 500 sièges, mais aussi un terrain synthétique de football, des terrains de tennis, de baseball etc. Lors des Jeux de Montréal de 1976, le Complexe Claude-Robillard recevait les compétitions de handball et de water polo, ainsi que les séance d’entrainement d’athlétisme, de natation et de hockey sur gazon. Le Centre Étienne-Desmatreau est situé dans l’arrondissement Rosemont-Petite-Patrie et est construit en 1975 à l’occasion des Jeux Olympiques de Montréal. Le complexe comporte deux patinoires, la première de 2 200 sièges nommée l’aréna Caroline Ouellette, et la seconde, la patinoire Jean Trottier qui comporte 600 places et deux gymnases olympiques, vestiaires, salle d’haltérophilie, et une salle d’entrainement. Durant les Jeux de 1976, le Centre Étienne-Desmarteau accueille les compétitions préliminaires du basketball. Après la manifestation culturelle, le complexe se consacre essentiellement au hockey sur glace féminin.

Complexe sportif Claude Robillard

Centre Etienne Desmarteau, 1976.

Les infrastructures antérieures sur le Parc Olympique :

68 http://www.parcjeandrapeau.com/attractions/bassin-olympique/ (consulté le 05.10.13) 128

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Le complexe Pierre-Charbonneau voit le jour au début de l’année 1960, dans une dynamique de dote la ville de Montréal d’un complexe sportif d’envergure. À cette époque Montréal rêve et postule déjà à la candidature de ville accueil, la construction de ce site est donc une réponse anticipée à la création de complexes sportifs importants. Celui-ci est doté de deux bâtiments relié par un vaste hall principal, le premier est ovale et abrite une piscine de 25 mètres aux dimensions internationales en petit bassin et le second est d’un gymnase de 2500 mètres carrés. Le centre permet la tenue d’activités aquatiques et des sports variés tels: le volleyball, le tennis et le badminton. En 1966, le Centre Maisonneuve est devenu un des grands centres de la vie culturelle montréalaise où évènements artistiques, expositions se succèdent dans le hall. En 1974, le COJO souhaite démolir le Centre Maisonneuve pour établir ses bureaux à proximité du Parc Olympique, mais une vague de révolte de la population s’y oppose et le COJO finit par s’établir au sein du Complexe sportif jusqu’à la fin de la manifestation où il est renommé Complexe sportif Pierre-Charbonneau. Au delà de changer de nom, il change aussi de fonction, orientant sa vocation vers les besoins de la population et réhabilite son espace de piscine en centre omnisports, et le gymnase est rénové. Plus tard dans les années 1980, le complexe et son association mettront l’accent sur l’implantation d’une vie communautaire.69

Centre Pierre-Charbonneau Aréna Maurice Richard, Alain Quevillon.

La dernière infrastructure est l’Aréna Maurice-Richard, construite en 1961. C’est un bâtiment rond de 93 mètres de diamètre et surmonté

69 Propos inspirés de la catégorie historique du site http://www.centrepierrecharbonneau.com (consulté le 26.12.13) 130

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d’un dôme de béton recouvert d’acier, amenant la hauteur de l’édifice à 31 mètres. Elle est consacrée aux activités sportives telles que le hockey sur glace, mais aussi, de la même manière que les autres arénas cites dans cet inventaire, a l’accueil de concerts, de réunions syndicales et de matchs de tennis. Lors des Jeux de Montréal, l’Aréna recouvra sa glace d’une plaque de métal et accueilli les compétitions de boxe et de lutte, proposant une capacité de 6 000 places en 1976 mais amputée de plusieurs sièges lors des rénovations majeures de 1994 pour en faire une patinoire aux dimensions olympiques de 30 mètres par 60 mètres. Les deux dernières infrastructures, toutes les deux inaugurées en 1961, donnent déjà un caractère architectural moderne au site du Parc Olympique70. La présence de complexes sportifs extérieurs et antérieurs au site olympique démontre d’une volonté de la part du COJO et de la Ville de Montréal, de réinvestir le potentiel de cette manifestation dans la cité entière. Dans le cadre des Jeux Olympiques, il est difficile de parler de “réhabilitation” puisque les infrastructures réutilisées avaient déjà une vocation sportive à la base. À la suite de cet inventaire, nous remarquons que les modifications portées aux bâtiments sont surtout de l’ordre de la “ré-investigation”, changeant temporairement la pratique sportive essentiellement représenté à l’origine, passant par exemple d’une patinoire de hockey à des praticables de gymnastique. Ce type de changements implique des modifications mineures, soit non-portées sur la structure du bâtiment. L’autre type de modification est essentiellement l’augmentation de la capacité de fréquentation de l’infrastructure sportive en ajoutant sièges et gradins. Ici encore, sauf dans le cas du Stade Percival-Mol70 Augustin (Jean-Pierre), « Installations olympiques, régénération urbaine et tourisme », Téoros, 27-2 | 2008.

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Intersection du Boulevard Pie IX avec l’Avenue Sherbrooke Est, futur site olympique , 1970.

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son de McGill qui est extérieur, ces modifications n’influencent pas la structure du bâtiment. Le développement de ces infrastructures est dons ici de l’ordre d’une amélioration de l’existant. De plus, il est important de noter que dans le cas du stade de l’université de McGill, l’arrivée d’un nouvel équipement, le terrain synthétique, démontre d’une avancée technologique mise en place pour la manifestation. Le réel impact qu’a eu les Jeux Olympiques sur ces structures est donc dans leur place au sein de la ville dans une phase post-olympique. Quand certaines sont détruites, d’autres perdurent encore et donc semblent répondre à un besoin local.

Les Jeux olympiques permettent donc ici la modernisation de structures existantes, allongeant leur durée de vie les ajustant et en les rénovant. D’autres infrastructures sont, elles, construites à l’occasion des Jeux, permettant alors de répondre à un besoin immédiat en terme de structure d’accueil, mais développant donc la présence d’installations sportives proposant un service à la population réparti dans la ville. L’arrivée ou la rénovation de ces centres peuvent donc engendrer une fréquentation plus importante au moment de l’évènement sportif, développant alors les activités qui l’entourent. b- Le Parc Olympique, une œuvre de Roger Taillibert.

Parmi les infrastructures construites à l’occasion des Jeux Olympiques de Montréal de 1976, surgit un complexe sportif unique, le Parc Olympique. Il est le lieu de compétitions par excellence, tant par son envergure et son échelle que par l’importance des manifestations qui s’y déroulent. Son architecture remarquable abrite un agencement savant d’édi134

fices, tels que stades, piscines et terrains de jeux, mais également des infrastructures de transports telles que le métro et les promenades, le tout lié aux bâtiments présents sur le site d’origine que sont le Centre Pierre-Charbonneau et l’aréna Maurice-Richard. Ce complexe est l’illustration de ce que souhaitait le maire Jean Drapeau : la réunion de plusieurs disciplines sur un seul et même site, dans l’optique de limiter les déplacement et d’avoir un ensemble unifié en terme d’architecture. Le Maire de Montréal, presque seul responsable du dossier olympique, se charge de trouver un architecte pour le Parc Olympique et c’est vers Roger Taillibert, architecte français, que son choix s’arrête. Ce dernier est reconnu pour son expression architecturale originale qu’il emploie par exemple au Parc des Princes de Paris, le Maire compte donc sur lui pour faire une véritable œuvre sur le site olympique. L’exercice n’est pas des plus simples car la Mairie de Montréal vient préciser des caractéristiques fondamentales quant à la conception du parc. Tout d’abord, comme dit précédemment, l’œuvre architecturale se doit de regrouper plusieurs disciplines sportives (natation, athlétisme, vélo), le tout en pensant bien l’espace avec une fluidité de circulation pour la masse des spectateurs venant assister aux compétitions.71 La deuxième exigence est portée sur le toit du stade, les épreuve des Jeux Olympiques doivent se dérouler à l’extérieur et nécessitent un stade ouvert. Or, le projet de la Ville de Montréal est de réutiliser le stade pour l’équipe de baseball de Montréal, appelée les Expos, et récemment entrés dans la MLB (Major League of Baseball). Les matches ayant lieu à l’année et au vu de la situation climatique de

71 Bassil (Soraya) et Dion (Amélie) « Stade olympique de Montréal et ses installations connexes. », UQAM, 2006 sur http://www.ameriquefrancaise.org/fr/article-502/ (consulté le 01/12/13)

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Jean Drapeau acclamé, 1976, Archives de Montréal. Jean Drapeau et la maquette du stade olympique.

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Montréal, il est impératif que le toit puisse être couvert. La situation étant impérative dans les deux cas, la réponse se trouve donc dans l’architecture, par conséquent dans les mains de Roger Taillibert. Ce dernier intervient dans le projet comme un designer et non sur la compétence technique qui est attribuée aux équipes ingénieures. Issue d’un processus de création organique, oubliant les règles traditionnelles, la structure de Taillibert utilise le béton pour traduire à la fois la tension de l’effort mais aussi l’équilibre. Il cherche, dans son dessin, des évocations thématiques au sport, un stade en forme de disque elliptique, un vélodrome en forme de casque de cycliste et une tour jaillissante, oblique, traduisant les muscles en tension. Le projet dépasse donc l’architecture, c’est une œuvre d’art, une sculpture qui atteint alors une échelle encore inconnue. Dans ce projet, la forme commande la technologie et non le contraire. Il impose donc la figure de l’architecte aux ingénieurs à travers la maitrise conceptuelle de la forme, devant un manifeste de la création architecturale. Il importe donc la manière française de construire, en privilégiant l’utilisation de la pierre et du béton au mode de construction nord-américaine,utilisatrice de la structure en acier.72 Le projet du Parc Olympique est le reflet de l’œuvre de Taillibert : on retrouve dans ses projets antérieurs des principes qu’il applique au stade olympique, tel que la forme elliptique issue du Parc des Princes à Paris, ou le toit amovible qu’il dessina pour la Piscine boulevard Carnot à Paris. Pour la membrane du toit, il vient s’inspirer de Frei Otto et de son théâtre de Bad Harsefeld. Il vient donc sculpter la forme en la mixtant avec la technologie, exprimant alors une poésie architecturale, une exception au Canada ou en Amérique du Nord où l’on trouve plutôt de l’architecture fonctionnaliste avec l’utilisation efficace d’une technologie (ex : Skydôme de

Parc des Princes de Taillibert, Paris 1972, Pascal Cornier.

Toiture amovible du Théâtre de Bad Hersfeld par Frei Otto.

72 L’amérique du Nord suit le mouvement de la construction acier développée par l’école de Chicago à la fin du 19e siècle. 138

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Toronto, possède un toit ouvrant sur rail) 73.

Taillibert propose donc un complexe de trois composantes principales, à la fois imbriquées et distinctes que sont le stade, le mât et le vélodrome. Le Stade Olympique est traité lors des Jeux Olympiques de Montréal tel un écrin certes mais selon un principe simple. Il mesure 490 mètres dans sa longueur et 180 mètre dans sa largeur, formant donc une ellipse allongée, ce qui permettrait de mieux voir le centre depuis n’importe quel point de vue. Il accueillera d’ailleurs 198 cérémonies de remises de médailles durant la manifestation. Cette forme particulière implique cependant la singularisation des éléments de la structure portante. Le bâtiment est composé d’un anneau de gradins, répartis sur plusieurs niveaux et offrant 56 000 sièges fixes et 20 000 sièges temporaires. Ces gradins sont répartis sur 34 consoles autostables préfabriquées, recouvertes d’une peau de béton et contenant l’anneau technique de 480 mètres qui soutient 20 % du poids total de la toiture amovible, les 80% restants étant soutenus par le mât.

Construction du Stade Olympique 1975. Stade olympique, vue sur le mât

Le mât, ou la tour mesure 175 mètres de haut ce qui en fait l’architecture oblique la plus haute du monde, alors que la plus connue, la Tour de Pise, ne mesure que 60 mètres. Les 90 premiers mètres de la tour sont construits en béton, comme le voulait l’architecte et contiennent 18 étages de terrains sportifs, alors que les ingénieurs décident de construire la partie supérieure en caissons d’acier préfabriqués. Cette partie haute est destinée, elle, à recevoir le toit amovible dans

73 Noppen (Luc) « Le Stade Olympique », Continuité n ° 53, 1992, p31-34 http://id.erudit.org/iderudit/17637ac (consulté le 11.11.13)

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sa position rétractée. . Ses angles d’inclinaison atteignant les 45 degrés, la tour repose sur trois « pattes » de 183 000 tonnes, qui, grâce à un rapport de masse et d’ancrage, la maintiennent debout. Ce mât triangulaire abrite sous ses voutes de béton, le centre de natation et les plateaux sportifs intérieurs. Il devait également soutenir la toiture amovible mais sa réalisation n’a pas pu être complétée à l’heure des Jeux Olympiques, ce n’est que plus tard, à l’aide de 26 câbles de suspension, que la tour retiendra ce toit mobile de 18 600 m2 en textile Kevlar pouvant se déployer comme un parachute au dessus du stade. Le Vélodrome est la dernière des trois infrastructures du Parc Olympique, mais pas des moindres. Moins médiatisée que le Stade Olympique, le Vélodrome va pourtant plus loin dans la prouesse technique architecturale. Ce dernier, une coque de 172 mètres sans support intermédiaire, est dessiné pour rappeler la forme d’un casque de cycliste et sert de contrepoids à la Tour du stade. Lors de la conception, Taillibert décide de travailler sur l’équilibre et s’appuie uniquement sur trois points (culées) et jette six « nervures », formant un réseau d’arcs, que comporte la couverture sur le dernier point. La voute autoportante s’évase donc en trois lobes qui viennent se rejoindre en un unique point. Avec une hauteur maximale de 32 mètres, la couverture du Vélodrome pousse à sa limite la résistance des matériaux et la capacité portative de l’édifice qui peut accueillir jusqu’à 12 000 personnes74.

Toiture du Stade Olympique posé en 1987.

le Vélodrome

À proximité de ce Parc Olympique se construisit alors le Village Olympique, surnommé « Pyramides Olympiques », constitué par deux édi-

74 Noppen (Luc) « Le Stade Olympique », Continuité n ° 53, 1992, p31-34 http://id.erudit.org/iderudit/17637ac (consulté le 11.11.13) 142

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fices jumeaux de 20 étages destinés à loger les athlètes. Chaque édifice se compose de deux tours, le tout formant une sorte de pyramide, on compte donc en tout quatre tours. Le Village fait approximativement 600 mètres de long et accueille dans les étages du bas les administrations du Village olympique. Une des quatres tour est réservée aux femmes, les trois autres aux hommes. Les commerces, les bars, les discothèques, les bibliothèques etc., se situent dans la structure temporaire du Village olympique. Les pyramides ont été construites en un temps record, traitant en huit mois plus de 77 000 mètres-cube de béton. 75

Le complexe Olympique, à travers l’architecture singulière que lui donne Roger Taillibert, offre à la ville de Montréal un nouveau symbole de modernité. Au delà d’Habitat 67, construit pour l’Exposition Universelle de Montréal 9 ans auparavant, le complexe Olympique est un symbole visuel de la cité mais également une architecture nouvelle dans une ville et un quartier empreint d’une architecture industrielle. Les aspects techniques de ces infrastructures s’offrent à la ville, au pays et au monde entier, traduisant l’entrée dans une ère d’architecture pointue et de la transgression des conventions. Tous les bâtiments construits à l’occasion des Jeux Olympiques entrainent une avancée de celle-ci. En ce qui concerne le complexe olympique nous avons exprimés et décrits les avancées technologiques qui font donc de la ville de Montréal une ville d’innovations et tournée vers l’international. Les infrastructures connexes au Parc Olympique, elles, permettent de redynamiser les environs dans lesquels elles se trouvent, se voyant rénovées ou agrandies, et permettent donc un dé-

Village olympique de Montréal.

75 Montréal 1976, Official Report of the Games of the XXIst Olympiad Montréal 1976, Volume II, Facilities, 239p. 144

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veloppement de la ville en terme d’amélioration du tissu urbain déjà existant. Cependant, si en théorie, les fonctionnements de ces Jeux semble pensé pour réussir, l’enquête sur la XXIe olympiade, le rapport Malouf rédigé en 1980, lui ,dénonce un mode d’organisation défectueux, un coût bien trop élevé des installations olympiques, une irresponsabilité administrative avec l’abandon des « Jeux modestes » énoncés par Jean Drapeau et une absence de budget total dès le début menant à des installations superflues et luxueuses menées dans un concept architectural inédit.

3 - Héritage contemporain des infrastructures olympiques : vers une redéfinition du parc.

Au lendemain des Jeux Olympiques, la presse annonce le grand succès des Jeux auprès des Québécois, alors que rien ne semblait présager un tel succès. Malgré la période politique tendue de la phase préolympique, la XXIe olympiade remplie sa « mission » de manifestation culturelle et sportive auprès de la population, redynamisant le secteur sportif et l’attractivité des clubs tels que ceux de gymnastique, d’haltérophilie etc. Les Jeux ont également impacté les courbes du tourisme et de l’industrie et de l’emploi au Québec. 76 En 1976, le Parti Québécois est élu au gouvernement et s’installe donc 76 http://parcolympique.qc.ca/le-parc-olympique/montreal-ville-olympique/jeux-olympiques-de-1976/ (consulté le 26.12.13)

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un climat de tension entre la municipalité conduite par Jean Drapeau et le gouvernement provincial, tout particulièrement au sujet de l’avenir des installations olympiques.

En effet, la problématique de reconversion du stade est récurrente lors des Jeux Olympiques, particulièrement depuis leur professionnalisation puisqu’on assiste à l’augmentation de l’impact de l’évènement sur la ville et certaines études, montrent que la tenue des Jeux Olympiques est utilisée entre autres pour générer et reconvertir des quartiers entiers.77Le CIO et les fédérations internationales établissent un cahier des charges afin que le dossier de candidature entrevoit au-delà des constructions sportives un ré-emploi ou une reconversion de leur utilisation. Un délai évalué entre dix et trente ans est avancé pour cela.

Effectivement ces stades offrent tout un ensemble d’aménités d’accueil telles que des commerces, des restaurants, des bars, des espaces ludiques, traduisant l’ampleur de la manifestation, considérée alors comme un véritable spectacle urbain. Mais comment planifier l’aménagement et la réutilisation d’un complexe olympique et pourquoi certains ensemble réussissent-ils là où d’autres, dont Montréal, échouent ? Selon Coaffe78, ces dernières années, les relations entre le sport et les stratégies urbaines au sein des politiques locales et nationales, se sont multipliées. Ceci est évidemment lié aux avantages économiques perçus et associés à l’organisation des ces manifestations culturelles sportives.

77 études menées par Liao et Pitts en 2009, Gold et Gold en 2007 et Horne et Manzenreiter en 2006 et sont citées dans : Roult (Romain) « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement”, 2011 UQAM 78

études menée par Coaffe en 2007

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Les impacts de ces manifestations culturelles, ici sportive dans le cadre des Jeux Olympiques, sur le territoire se reflète à différentes échelles : L’échelle urbaine : on assiste donc à la restructuration de la forme urbaine, une amélioration des systèmes de transport, et une réorganisation des quartiers, centraux ou périphériques, en terme d’urbanisme mais aussi de densité de population.

L’échelle locale : la manifestation culturelle peut transformer la forme physique d’un quartier, de son ambiance et de sa logique de développement. 79 Dans le cadre de ce mémoire et de notre questionnement d’origine, « En quoi les manifestations culturelles sont-elles catalyseur d’un développement urbain ? », nous développerons deux parties afin de mettre en évidence l’impact des Jeux à l’échelle de la cité (a) puis évoquerons les enjeux engagés à l’échelle du ou des quartiers concernés (b). a- Etat du site olympique et les nouvelles infrastructures

Au lendemain des Jeux Olympiques, une fois l‘effervescence de la manifestation retombée, la ville de Montréal doit se repencher sur les problèmes laissés de côté. Le mât du stade n’est pas terminé, le toit amovible n’est pas posé, mais au delà encore, la ville se retrouve avec

79 Roult (Romain), « Le stade olympique comme vecteur du développement urbain » ESG UQAM, 2012. 148

des installations sportives sans aucun plan de reconversion. Malgré le succès de l’évènement, le stade, son architecte et le milliard de dollar qui lui est associé, sont très mal vus auprès de la population. Le statut « d’étranger » endossé par Taillibert n’est toujours pas bien accepté par les architectes locaux, l’accusant donc de la responsabilité des malfaçons et des retards du chantier, en oubliant très vite les architectes étrangers du passé tel que Mies van der Rohe et son Westmount Square et I.M. Pei avec sa collaboration sur le projet Ville-Marie, ayant donc participé à la géométrie de Montréal. Il est donc dit que, faite par un étranger, cette installation ne peut qu’être étrangère à son contexte et bien trop sophistiquée pour les besoins de la ville. Bien que l’architecte ne peut pas être responsable de tout ce dont on l’accuse, il est certain que la conception d’un complexe aussi original et unique, entraine une grande improvisation sur le chantier puisqu’aucun ouvrier n’avait travaillé sur une structure et des éléments de constructions aussi différents. À cela, il faut ajouter la grève de ces ouvriers et les retards causés par le COJO entrainant donc des retards de base et par conséquence, un temps de construction très court (23 mois). Le toit amovible, qui avait était lors de sa conception un élément de controverse, l’est toujours après sa réalisation. En terme de bilan, le monument complexe olympique est peu compris et relativement mal aimé, bien qu’il fait contrepoids dans la partie est de la ville, au paysage des gratte-ciels de l’ouest, ou ni la Place Ville Marie, ni aucune tour n’arrive à se démarquer de manière aussi significative. 80

Dans cette première partie nous allons donc faire un état du site olympique jusqu’à aujourd’hui citant les différents changements notables, et les nouvelles infrastructures qui s’y sont ajoutées. A travers 80 Noppen (Luc) « Le Stade Olympique », Continuité n ° 53, 1992, p31-34 http://id.erudit.org/iderudit/17637ac (consulté le 11.11.13)

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cela, nous essayerons de mettre en valeur les tentatives de la ville pour maintenir le Parc en vie par des opérations de reconversion de certaines infrastructures ou de rénovations pour d’autres. En 1975, la RIO (Régie des Installations Olympiques) est créee et annonce que le parachèvement du stade doit être un préambule à toute reconversion. Effectivement, le mât du stade n’ayant pas été terminé à temps pour les Jeux, la RIO entreprit dès la fin de la compétition, des travaux pour parachever le mât et construire un toit rétractable au stade pour que celui-ci puisse être utilisé à l’année pour l’équipe de baseball de Montréal appelée les Expos. Cependant, et malgré des travaux faits sans échéances, plusieurs fissures et chutes de la structure ont été recensées dans les années 1980, particulièrement des déchirures dans le textile Kevlar du toit, amenant alors la décision de la RIO d’installer un toit fixe sur le stade. Un toit fixe n’est pourtant pas la solution puisqu’en 1999, un des panneaux de téflon tombe sous le poids de la neige et laisse le stade sans couverture, ce qui conduit donc à la fermeture de la surface de jeu de novembre à mars chaque année et ce jusqu’à aujourd’hui. Si le Stade est source de plusieurs problèmes et ne semble pas attirer la population, la décision, en 1987, de placer un funiculaire sur le mât est un véritable succès, offrant alors une vue panoramique unique sur la ville de Montréal, il devient alors un attrait touristique majeur. Bien que le tourisme soit une source de revenus, elle est très loin d’être suffisante pour recouvrir la dette du complexe olympique, qui augmente à chaque réparation du toit. Le départ des Expos de Montréal suite aux problèmes techniques et la non attractivité du territoire, à l’origine dépourvus de services, ne sont pas d’une grande aide non plus et obligent le stade à accueillir entre 1995 et 1998, 22 évènements à l’année. De plus, de nouveaux centres récréatifs sont venus concurrencer le complexe olympique, tels que le Centre Bell, le Palais des Congrès, la salle de la Place Bonaventure et le quartier des Spectacles, les organisateurs des évènements préférant des lieux 150

Installation de la toile du Stade Olympique, 1987. Vue Panoramique sur la ville depuis la Tour du Stade.

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plus centraux, moins dispendieux et dotés de logistiques d’accueil. Ce stade, construit comme une cathédrale sportive, ne semble pas adapté à la métropole de taille moyenne qui nécessite davantage d’éléments récréotouristiques 81qu’une installation sportive à l’architecture audacieuse mais induisant des côuts très élevés de maintenance ; cela mène à penser que Montréal est dans un échec post-olympique. Ces dernières années, le complexe olympique arbore un état de vétusté, entrainant des problèmes de sécurité, et un traitement architectural très démodé n’incitent pas les visiteurs à s’approprier le site. De plus, la fermeture du stade pendant l’hiver entraine donc une diminution de huit mois la possibilité d’accueil et d’utilisation. C’est en 2008 que la RIO annonce que le Stade Olympique allait être coiffé d’un nouveau toit, de près de 100 millions de dollars et qui permettrait donc une utilisation à l’année de la surface de jeu. Cependant cette déclaration n’a toujours pas été suivie d’action, laissant le stade avec le toit posé en 1999, qui aujourd’hui arrive à sa fin de vie avec 3429 micro déchirures en 2013 contre 1240 en 2012, 400 en 2011 et une vingtaine en 2010, coutant près de 800 000 dollars CAD par an d’entretien.

Complexe olympique et le nouveau toit, 1999. Esplanade du Stade Olympique, juin 2013.

Le reste du Parc lui ne semble pas affecté par des problèmes structurels de cet ordre, mais n’affiche pas non plus un franc succès auprès de la population locale. Pourtant, chacune des infrastructures possède un potentiel à exploiter à plus grande échelle. Cette année, un remaniement total de la surface du parc olympique est en route et des travaux de réfection sur une grande partie des infrastructure olympiques sont lancés.

81 « récréotouristique » est un terme utilisé par Chalkey en 1999 et Gold et Gold en 2007 cité dans : Roult (Romain) « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement”, 2011 UQAM 152

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Le Centre Sportif par exemple, constitue un élément original et exclusif puisqu’il possède 7 bassins dont deux de dimensions olympiques et internationales et possède le seul bassin intérieur de plongée en Amérique du Nord. Cette année, les travaux de rénovation sont programmés annonçant alors la fermeture du centre sportif pour les deux années à venir. Parmi les travaux de mise à niveau des bassins selon les normes FINA+, on peut citer : La réfection des plongeoirs, du bassin d’assouplissement, des planchers et plages d’accès aux bassins, l‘aménagement du bassin de 25 mètres pour les compétitions, l’augmentation de la superficie des salles d’entrainement, la modernisation de l’aire d’accueil et l’ajout d’un espace boutiques et de restauration. 82 Le Vélodrome, en raison du peu d’intérêt du public pour le cyclisme, s’est vu « annexé » par le Jardin Botanique de Montréal et a été reconverti en musée du vivant, de l’environnement et des sciences naturelles. Il fait donc partie d’un ensemble plus grand, le liant avec une autre infrastructure que celle du Stade, et nommé Un Espace pour la Vie. C’est en 1992 et lors du 350e anniversaire de la ville de Montréal que le Vélodrome devient le Biodôme (à ne pas confondre avec la Biosphère de Buckminster Fuller) et qui reproduit à travers 4 écosystèmes, les milieux de la jungle amazonienne, du Saint-Laurent, de la forêt laurentienne et du monde polaire.83 Cependant, on peut remarquer qu’en terme architectural, cette reconversion enlève de la valeur à l’ensemble auquel on retire les lanterneaux qui perçaient la coupole et exige de nombreuses excroissances au fil des années.

Centre sportif en rénovation, juin 2013. Intérieur du Biodôme

82 http://parcolympique.qc.ca/le-parc-olympique/montreal-ville-olympique/jeux-olympiques-de-1976/ (consulté le 10.10.13)

83 Augustin (Jean-Pierre), « Installations olympiques, régénération urbaine et tourisme », Téoros, 27-2 | 2008. 154

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L’aréna Maurice-Richard est la seule patinoire aux dimensions internationales (30 mètres par 60 mètres) qui existe au Québec. Avec sa capacité de 4 500 places, elle peut accueillir des compétitions internationales. Elle subit des opérations de réfection en 1994 et en 2012, particulièrement au niveau de son toit. Au loin le Village Olympique devient un ensemble résidentiel et commercial, même si les galeries et passages extérieurs sont peu adaptés aux hivers montréalais. On lui offre un voisin depuis cette année, une opération immobilière nommée « Cité Nature ».

Le Stade Saputo est une nouvelle infrastructure sur le Parc Olympique construite en 2008, il accueille le club de football84 : l’Impact de Montréal, lequel vient d’accèder à la MLS (Major League of Soccer) pour la saison régulière. Suite à cette annonce, le stade subit une période d’agrandissement de 7000 sièges supplémentaire en 2012 portant alors la capacité du stade Saputo a 20 801 places. Il est réalisé par le cabinet Provencher Roy et architectes associés.

Stade Saputo en construction, 2012. Planétarium Rio Tinto Alcan, Montréal.

Pour en terminer avec l’évocation des infrastructures notables et rénovées, le déplacement du Planétarium de Montréal, renforce l’offre en terme de musée scientifique, créant ainsi avec le Biodôme et le Jardin Botanique récemment doté d’un centre sur a Biodiversité réalisé en 2012 par les architectes Provencher Roy et Architectes associés (PR + AA), un pôle scientifique et récréatif. Offrant une architecture à la fois écologique et innovatrice à caractère scientifique , délimitant alors une troisième façade qui affirme l’existence de la Place des 84 Les québecois utilise le mot anglais « soccer » pour désigner le football au ballon rond et le mot « football » pour désigner ce que nous appellons le « football américain » au ballon oval. Pour un aspect plus pratique, les mots utilisés dans ce mémoire sont exprimés en français et non en québecois.

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Vainqueurs. En plus de cet aspect écologique, le mettant en compétition pour recevoir une certification LEED (Leadership in Energy and Environmental Design), il propose une architecture très contemporaine, basée sur l’imbrication de formes géométriques aux matériaux astronomiques.85

On remarque également des appropriations “clandestines” sur le Parc Olympique de la part notamment des sports de glisse urbains tels que le skateboard. En effet, au niveau de l’ancienne entrée des athlètes olympiques, une appropriation spontanée est apparue ces dernières années, l’utilisant à la manière d’un tube, elle est associée à l’espace dans lequel elle s’insère. Bien que ce genre d’appropriation dénonce à la base un abandon de l’espace urbain, la structure, “The Big O” est aujourd’hui renommée en terme de site de pratique du skateboard et accueillent des compétitions, redynamisant pour quelques jours la parcelle olympique. Il a été déplacé pour augmenter sa fréquentation et se trouve maintenant à coté du stade Saputo. Il est évident que le Parc Olympique souffre aujourd’hui d’une absence de commerce et de services qui semble empêcher la diversité des fonctions et donc des pratiques urbaines. A l’exception du cinéma multiplex, le parc olympique est un ilot entouré de la fonction résidentielle qui vient renforcer encore davantage son isolement.86

compétition de skateboard au «The Big O»

La nécessité de finir ce complexe olympique est désormais idispensable afin d’optimiser sa valeur monumentale; on peut noter deux 85 Chevassus Hugo, « Planétarium Rio Tinto Alcan à Montréal : une vision juste de l’architecture d’aujourd’hui.” 2013 sur http://bewaremag.com (consulté le 20.12.13)

86 Roult (Romain) « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement”, 2011 UQAM 158

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types d’édifices monumentaux : ceux qui sont construits pour témoigner donc avec une notion de commémoration et ceux qui deviennent des témoins par consécration publique. Cette dernière provient soit de l’histoire ou bien des qualités artistiques de l’objet. Dans le cas du Parc Olympique, nous avons bien compris que celui-ci a été construit avec la volonté d’inscrire les Jeux Olympiques de Montréal dans le paysage urbain à travers une architecture – sculpture illustrant le « réveil » de Montréal et finalisant l’achèvements des projets d’un maire ambitieux. L’hypothèse d’un stade inachevé aurait alors traduit une genèse difficile et, au fil des années, la structure devenant inutile serait devenue une ruine, à l’image du Colisée de Rome, en évoquant la grandeur des Jeux Olympiques et la « décadence d’une société québécoise incapable de réaliser ses rêves. »87 Aujourd’hui, la valeur de remémoration publique ne suffit pas au stade une pérennité intacte, car sa transformation répétée peut modifier le stade pour de bon et ce jour- là, il risquera d’être considéré comme obsolète et surtout inutilement couteux. L’enjeu se situe donc non pas dans une reconversion totale du Parc Olympique mais plutôt dans une réinsertion de celui-là, protégeant sa fonction sportive, mais étoffant son environnement de services multiples. Nous avons, à travers cette partie, énuméré les différentes fonctions des bâtiments rénovés, et analysé le potentiel que chacun détenait pour rendre le Parc plus attractif. Une liaison est donc nécessaire entre la population locale et le site, pour qu’enfin il puisse apporter autre chose que son empreinte dans la skyline de Montréal.

87 Noppen (Luc) « Le Stade Olympique », Continuité n ° 53, 1992, p31-34 http://id.erudit.org/iderudit/17637ac (consulté le 11.11.13) 160

b- Les réhabilitations et les enjeux d’une réinsertion

Comme évoqué précédemment, la ville de Montréal tente de redonner au Parc Olympique de nouvelles fonctions : il se voit aujourd’hui renforcé dans sa vocation sportive par la mise aux normes de ses espaces dédiés aux activités sportives et la construction du stade Saputo. Dans le même temps et sous l’impulsion du collectif Espace pour la Vie , le site abrite désormais le pôle scientifique et de l’écologie ; il regroupe ainsi le Jardin Botanique, le Biodôme et le Planétarium. Cette vocation associée ne permet cependant pas de lisser l’énorme dette que représente l’ensemble primitif : atteignant presque deux milliards de dollars CAD suite aux multiples réparations de la toiture, cette dette n’a jamais pu vraiment être rééquilibrée ou même compensée par l’instauration dès 1976 d’une taxe appliquée sur les ventes de tabac. Il aura fallu trente années de taxes pour ne serait-ce que rembourser l’emprunt premier, très largement alourdi depuis par les mauvais choix ou déboires de la construction. A l’origine du projet, neuf ans de perceptions fiscales devaient rembourser la dette… Au-delà des choix techniques architecturaux et techniques audacieux c’est dans l’absence de perspectives de pérennisation de l’ensemble dans un cadre élargi du développement de la cité qu’il faut rechercher l’échec cuisant financier. Cet effort intellectuel n’aura pas été fait au bon moment, intégré dès les contraintes de construction et ce manque de vision « post-olympique » est payé encore aujourd’hui par les Montréalais , dont la collectivité assure encore 40 millions de dollars CAD de remboursement annuel.

161


« If Barcelona is to be considered as the best example of an Olympie city benefiting from a strong urban planning tradition, Montreal 1976 was city planning’s worst nightmare. Il is not so much that the city planning proeess was ill-adapted (as in the case of Moscow), too centrally-decided (as in Seoul) or purely elite-oriented (Atlanta), rather that it simply did not exist. »88

L’étude du territoire dans une phase préolympique est capitale et l’implantation d’une telle structure ne peut se faire avec le seul argument de régénérer un quartier délaissé, sans tenir compte des besoins du tissu urbain existant. Effectivement, il est primordial que le stade et son complexe doivent correspondre aux attentes et aux besoins locaux, et qu’une évaluation de ces besoins aie été faite au préalable avant de planifier l’arrivée d’une nouvelle infrastructure. De plus, la non prise en compte du Complexe Olympique dans la trame urbaine

88 Cette citation provient de : «Montreal 1976». In Olympic Cities, City Agendas, Planning and the World’s Games, Latouche, Daniel. 2007. /896-2012, p. 170, cite dans : « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement” Romain Roult, 2011 UQAM traduction : « Si Barcelone est considéré comme le meilleur exemple d’une ville Olympique qui a bénéficié d’une planification urbaine réussite, Montréal 1976 en est elle le pire cauchemar. Ce n’est pas tant que la planification urbaine était mal adaptée (comme dans le cas de Moscou), trop concentrée vers le centre (comme à Séoul) ou purement élitiste (Atlanta), c’est tout simplement qu’elle n’existait pas » 162

peut vite mener à la formation d’« éléphants blancs »89 ou plus grave encore, d’enclaves urbaines déconnectée de la ville et donc faiblement attrayante d’un point de vue économique et touristique. C’est le cas par exemple pour la ville d’Athènes, où le complexe olympique, situé à l’extérieur de la ville, est devenu un vestige fantomatique, dénué de toutes activités. C’est donc pour cela que dès la phase préolympique il est important de considérer le stade comme un vecteur du futur développement du quartier dans lequel il s’implante, outils permettant alors d’y renforcer plusieurs activités, mais également son accessibilité. La prévision d’une utilisation quotidienne du stade traduit une insertion et une reconnaissance de la population locale mais aussi aux yeux d’une future clientèle en recherche de structure d’accueil.90 ­La phase post-olympique, elle, se base autant sur l’utilisation du stade comme « landmark » urbain, que maintenir une activité constante et une flexibilité du stade pour varier les propositions d’utilisation. C’est donc d’abord en adaptant ce complexe olympique aux nouvelles normes et aux commodités d’accueil, puis ensuite en utilisant ce Parc Olympique comme catalyseur d’un développement touristique, donc objet international. Cependant, dans le cas de Montréal n’ayant pas eu de phase préolympique, l’aspect de réponse aux besoins de la population local n’a pas du tout était développé. Le Stade et son complexe se retrouve alors en situation insulaire dans un quartier résidentiel, proposant des infrastructures dont la population n’a pas besoin. La phase préolympique doit donc s’établir aujourd’hui, pour tenter de corriger cette « malfaçon urbaine » en analysant le territoire d’inser-

89 l’expression « éléphant blanc » fait reference à une réalisation d’envergure et prestigieuse, souvent d’initiative publique, mais qui s’avère plus coûteuse que bénéfique, et dont l’exploitation ou l’entretien devient un fardeau financier.

90 Roult (Romain), « Le stade olympique comme vecteur du développement urbain » ESG UQAM, 2012.

163


tion du parc olympique, soit les quartiers Rosemont Petite-Patrie et Mercier Hochelaga-Maisonneuve.

Des plans d’urbanisme sont ainsi élaborés à l’échelle de la ville, mais aussi et surtout à l’échelle des quartiers jouxtant le parc Olympique prévoyant alors une revitalisation des rues Hochelaga, Sainte-Catherine, Viau et le métro Préfontaine qui devraient faire l’objet d’interventions en terme de revitalisation et qualité environnementale. L’arrondissement d’Hochelaga-Maisonneuve affiche par ailleurs clairement sa volonté de développer son offre en matière de sport, de loisirs et de culture. Parmi les 6 enjeux fixés par le Comité de l’arrondissement, les parcs et les équipements collectifs sont les plus gros potentiels à développer pour l’adaptation du quartier à sa population.91 En effet, le site Olympique est déjà inscrit dans un contexte possédant toutes ces infrastructures, nous avons cité au tout début du chapitre la présence du Parc de Maisonneuve et celle du Jardin Botanique. Ces deux espaces végétalisés voisins font maintenant partie de deux groupes différents puisque le Jardin Botanique ayant annexé le Biodôme, ancien Vélodrome des Jeux, et associés au Planétarium devient donc le pôle « Espace pour la Vie » et que le Parc de Maisonneuve, lui, s’oriente vers une pratique sportive ludique en aménageant des promenades, des pistes de courses et des pistes cyclables. L’espace du Parc Olympique fonctionne donc par lui même, mais aussi pour lui même.

Il faut donc alors utiliser le complexe comme support de projet urbain et touristique et c’est ce que décide la Ville de Montréal en 1991 en proposant de valoriser le patrimoine architectural existant et de soutenir une activité économique intégrant les quartiers proches dans la dynamique d’attraction du pôle olympique et donc d’en faire

91 Roult (Romain), « Le stade olympique comme vecteur du développement urbain » ESG UQAM, 2012. 164

la cible des retombées économiques et sociales. Le projet, préparé par le Bureau du plan d’urbanisme de la Ville de Montréal en 1991, concentre d’abord son intérêt sur l’axe Morgan, développé lors de la construction de la ville de Maisonneuve, où plusieurs édifices comme le marché ou les bains, l’école de Maisonneuve (1890) ou le théâtre Granada (1928) représentent un intérêt patrimonial. Dans un second temps, le projet propose le soutien d’une fonction industrielle pour certains bâtiments, comme celui de la compagnie Johnson restaurés à l’aide des coopérations de développement économique et communautaire (CDEC) avec l’élaboration de plans d’aménagement. S’ajoute à cela une rénovation des artères et des nœuds de circulation urbains laquelle induit la création de circuits touristiques permettant de naviguer correctement entre les différentes composantes muséologique, culturelle, patrimoniale ou sportive. Ainsi, le Parc Olympique de Montréal se voit compléter par un projet urbain encore d’actualité aujourd’hui, qui tente a posteriori, d’utiliser la dynamique d’attraction du site.92

Ces premiers plans d’action, établis à la fois par la ville de Montréal et par l’arrondissement Hochelaga-Maisonneuve sont une tentative de relancer le quartier autour du Parc Olympique. Cependant une autre action doit être menée dans le sens inverse en venant décloisonner le Stade Olympique et recréer des liens avec la population locale. La situation du Parc parait aujourd’hui être un atout et une opportunité pour le développement récréotouristique urbain, apparaissant alors comme un pôle central dans le tissu urbain, relié par six lignes de bus et une ligne express, et deux stations de métro le plaçant à moins de 15 minutes du centre-ville.

92 Ce passage est inspiré de l’article Augustin (Jean-Pierre), « Installations olympiques, régénération urbaine et tourisme », Téoros, 27-2 | 2008. 165


Il est entouré de plusieurs axes majeurs, la rue Viau, le boulevard Pie-IX et l’avenue de Pierre de Coubertin ; l’accès au site lui-même n’est donc pas un problème. Construit à une échelle qui dépasse celle de l’être humain, le Parc Olympique apparaît comme un objet impénétrable qui ne communique pas avec son contexte. Conçu sur 3 niveaux, il offre des espaces clos ou semi-clos qui en font un véritable dédale pour le piéton. De plus, la parcelle est séparée des espaces résidentiels par l’avenue de Coubertin qui, avec ses sept voies, constitue pour le piéton local, une véritable fracture urbaine ; elle est donc plus difficile d’accès pour la population environnante que pour les visiteurs extérieurs ce qui est en soi un véritable paradoxe. L’enjeu réside donc sur trois échelles différentes dont la première est de rendre plus poreux l’accès au site olympique pour la population locale, d’instaurer une vraie logique d’activité à l’intérieur même du Parc Olympique et de faire profiter aux quartiers environnants l’impact positif que devrait renvoyer les infrastructures.

En 2006, la RIO se lance dans un plan stratégique de 2009 à 2013 pour redynamiser le parc olympique et plusieurs objectifs sont énoncés :

- un remplacement rapide et adapté du toit du Stade olympique de manière à optimiser son utilisation sur l’année.

• - une meilleure insertion physique, urbaine et sociale du stade et de son site d’insertion par rapport aux territoires limitrophes;

• - une utilisation maximale du concept de développement durable dans tous les processus d’exploitation du Stade et du Parc Olympique (gestion des déchets, redistribution des

166

Vue sur le Parc Olympique encadré par les voies de circulations.

167


retombées économiques, accessibilité, etc.);

• - un renversement important de l’image négative qu’induit le Stade olympique auprès de différents publics.93 Ces objectifs sont reconduits dans le bilan de la RIO 2013 et s’élaborent sur un plan de plusieurs années. Les Jeux Olympiques de Montréal ont été qualifiés d’échec olympique, non pas en tant que manifestation culturelle mais dans les répercussions que la manifestation a eu sur la ville, la mettant dans une position plus difficile qu’à l’origine. Il est donc certain que l’endettement de la ville lié au remboursement des installations olympiques crée une situation sinon bloquante au moins limitante . Cependant, et comme nous l’avons vu tout au long de ce chapitre, il est impossible d’ignorer la création architecturale issue de cette période et d’effacer l’œuvre de Taillibert sous prétexte qu’elle continue de coûter cher aux habitants. L’aspect financier ne peut pas réduire à néant cette architecture sculpture, défiant, et même un peu trop au vu des difficultés structurelles, les normes de la technique. Taillibert, à travers le complexe olympique a développé un nouveau concept architectural ; il pense dans la globalité du complexe équilibrant les forces entre les différents bâtiments. Ceci est un développement, cela traduit le désir d’aller plus loin, de révolutionner le champs architectural et donc de faire avancer la théorie. Les nombreux problèmes de structure du toit viennent effectivement ternir le mérite et la reconnaissance que devrait avoir le complexe olympique, cette œuvre « extraterrestre » et imposante. Cependant le progrès ne se fait pas en un jour, et si

93 Régie des Installations Olympiques. 2009. Plan stratégique 2009-2013. Montréal: RIO, 2 p 168

l’on considère le complexe olympique de Taillibert comme un essai d’architecture, comme la consécration d’une recherche qui inspirera d’autres architectes, alors il est plus facile d’envisager la construction du stade olympique comme une avancée.

Quand au reste des bâtiments construits ou rénovés, il est bien certain que la notion de développement peut être employée puisque les Jeux ont permis ici la construction de ces nouvelles infrastructures. La partie développement urbain est effectivement en retard d’une trentaine d’années, mais elle est aujourd’hui d’actualité selon les plans d’urbanisme de la Ville de Montréal et prévoit une harmonisation entre le stade et le milieu ambiant résidentiel en renforçant la trame commerciale et immobilière avec des projet comme « Cité Nature »94, une opération immobilière venant jouxter le Village olympique. À la suite de cet échec olympique, la ville réagit finalement et prévoit donc un plan de revitalisation du parc olympique en venant y insérer des commerces et des activités, tout en veillant particulièrement à ne rien enlever à l’aspect patrimonial des héritages culturels des Jeux de 1976. Au delà d’ajouter de nouvelles fonctions, le Parc Olympique se doit de ne plus être tourné vers lui même et donc de mettre en valeur les quartiers qui l’entoure, c’est ce que nous avons exposé plus tôt avec le plan de la ville de Montréal de 1991 qui exprimait la volonté de faire ressortir le patrimoine existant. La prise en main urgente de l’aspect « catastrophique » qu’inspiraient les Jeux a donc permis la mise en valeur de bâtiments patrimoniaux existant sur les sites. Evidemment, toutes ces directives auraient du être prises dans l’élaboration d’un plan de reconversion des infrastructures olympiques, mais les choses étant ce qu’elles sont, le 94

http://www.montreal2025.com/ (consulté le 25.12.13) 169


développement urbain ne se met en route que maintenant. Aujourd’hui, le Stade Olympique est un véritable repère urbain, pour la population locale et pour le monde entier, c’est une image, positive ou négative, qui symbolise Montréal. L’opinion publique se trouve entre respect et éternel cynisme, mais pour tous ceux qui ne connaissent pas l’histoire politique qui se cache derrière ce grand mât, le Stade Olympique est devenu une icône internationale.

De la même manière qu’avec Habitat 67, l’existence de ces structures hybrides et complexes dans l’esprit et l’imaginaire des gens, permet de faire avancée la vision de l’architecture à l’internationale. La Tour de Gustave Eiffel était décriée lors de sa construction en 1889 à l’occasion de l’Exposition Universelle de Paris, et d’autant plus lorsqu’il a été question de la conserver. Elle n’a certes pas causé autant de problèmes financiers, mais elle était mal-aimée de beaucoup. Heureusement, cette dernière est toujours présente au sein de la ville et dans les esprits, créant une immédiate association avec la métropole de Paris. C’est ici la même chose pour le Stade Olympique qui, de part sa médiatisation, bonne ou mauvaise, est devenu ‘une des cartes postales les plus vendues à Montréal, une icône, un symbole de la ville à l’international. Il est certain que des manifestations culturelles comme Expo 67 et les Jeux Olympiques de Montréal de 1976 ont changé à jamais l’image de Montréal et de son histoire dans le Québec et dans le reste du monde.

Caricature du Stade Olympique, La Presse, 2010.

Tour Olympique vue depuis le quartier du Plateau Mont-Royal, 2008.

Le Maire Jean Drapeau commenta ainsi cette évolution dans la revue Métropolis en 1976 :

170

171


«Elle est devenue une grande métropole internationale. On sait aujourd’hui qu’elle existe. (...) ». Et plus loin encore: «Nous sommes une ville nord-américaine et nous ne pouvons le nier» Le parc olympique de Montréal est aujourd’hui en plein remaniement, mais même en période de travaux, les associations collectives s’efforcent d’y accueillir des manifestations occasionnelles. En effet, l’Esplanade Financière Sun Life du Parc Olympique est devenue un lieu de festivités incontournables en y regroupant le sport, la culture et le développement durable.

Parmi ces festivités nous pouvons citer les devenus très célèbres Premiers Vendredis où une vingtaine de camions de cuisine, dits « Food-trucks », se placent sur les deux niveaux de l’esplanade, attirant la population active par une restauration rapide et les touristes grâce à l’attrait du concept. D’autres évènements sous l’apparence de courts festivals trouvent leur place sur l’esplanade tels que des soirées dansantes (Salsafolie), le Festival de Musique Expérimentale, un cinéma en plein air, le Carnaval de Mercier Hochelaga-Maisonneuve, des tournois sportifs (Tout le monde bouge ! ou City Chase), des courses de plusieurs kilomètres (Course Nocturne et Color Me Rad), des rendez vous plus zen (White Yoga) ou des rencontres de jardinage ( Y’a Quelqu’un l’aut’bord du mur) pendant l’été95. Le Parc organisera même des équipes de Vélopousses Maisonneuve, des navettes touristiques parcourant le quartier. Cela montre bien une volonté de renouer avec le site, de manière affective et ludique, mais démontre également d’une monumentalité de l’édifice dont l’enceinte semble encore impénétrable. 95 http://www.quartierhochelaga.com/lesplanade-vibrante-a-nouveaupour-lete-2013/ (consulté le 28.12.13) 172

«Premiers Vendredis», été 2012.

«WhiteYoga», été 2012.

«Color me RAD» 2012.

173


III - LE FESTIVAL INTERNATIONAL DE JAZZ DE MONTRÉAL

174

175


éléction de Jean Drapeau à la Mairie de Montréal. Mise en place du Plan Dozois.

Implantation École Polytechnique sur la rue Saint-Denis

1954

Fondation de Spectra Scène par André Manard et Alain Simard.

l’ADISQ (Association De l’Industrie du Disque et du Spectacle au Québec) lance le projet du Quartier des Spectacles

1977

2001

1903 Construction du club le Gayety

Implantation de l’Université de Laval À Montréal (ULAM) dans le quartier

construction de la Construction Bibliothèque du Théâtre Saint-Sulpice Saint-Denis

1876

1852

1912

1893

1957

1916

Construction du Cinéma Impérial

1907

Construction du théâtre Princess Ouverure de HEC sur la rue Vigier.

Construction de la Salle du Spectrum Déménagement du Festival de Jazz sur la rue Saint-Denis.

1976 Jeux Olympiques de Montréal

1920 - 1950 Quartier soumis à l’immigration, ouverture de bars, clubs de jazz et de maisons closes, c’est l’émergence du Red Light District.

1963 Inauguration de la Place des Arts, complexe culturel.

2013

Maison Symphonique de Montréal est construite sur la Place des Arts.

1981

1967

1913

Incendie dans construction des le Faubourg Théâtre Français Saint-Laurent et du théâtre Monumental National

176

Phase de nettoyage et travaux dont font partie les Exposition Habitations Universelle de Jeanne-Mance. Montréal

Festival de Jazz de Montréal élu “World's Largest Jazz Festival” par le Guiness Book des records.

2011

1986

2012

Installation du Festival de Jazz autour de la Place des Arts.

Travaux de piétonisation d’un tronçon de la rue Sainte-Catherine.

1980 2e édition du Festival de Jazz à la Place des Nations sur l’île Sainte-Hélène

2009 30e anniversaire du Festival de Jazz Création de la Place des Festivals jouxtant la Place des Arts.

177


Station Berri-UQAM

Gare autoroutière

Métropolis

Place des Arts Quartier centre-ville / arrondissement Ville-Marie

178

Place des Festivals

Hydro-Québec Complexe Desjardins

179


Ce dernier chapitre nous porte maintenant vers la troisième manifestation culturelle qui nous sert d’exemple dans ce mémoire, le Festival International de Jazz à Montréal (FIJM). Il ne paraît peut être pas évident de choisir ce festival comme manifestation culturelle puisqu’il n’a pas une renommée universelle comme l’avaient les deux autres. Cependant, le Festival de Jazz de Montréal étant un évènement contemporain il est logique que celui-ci ne soit pas aussi connu et médiatisé. Or il est, selon nos critères, candidat au terme de manifestations culturelles à l’image de celles dont nous avons parlé précédemment. Effectivement, le festival diffère des autres manifestations sur deux grands points. Tout d’abord c’est une manifestation montréalaise, elle n’est donc pas issue de grandes traditions historiques, internationales et universelles. En effet l’évènement est jeune puisque sa première édition se déroule en 1979, si l’on compare, les premiers Jeux Olympiques antiques ont lieu en 776 avant JC, l’édition moderne apparaît en 1896 et la première Exposition Universelle se passe à Londres en 1851. Le seconde grande différence entre le Festival de Jazz de Montréal et les autres manifestations est qu’il est annuel, les installations qui en découlent ne sont donc jamais désuètes puisqu’il se passe année après année dans la même ville. Nous observons, au niveau de la tendance actuelle, la multiplication de ce système de manifestations culturelles, artistiques ou sportives et donc dans un même temps la disparition de leur sens premier. Si les Jeux Olympiques se déroulent bien, selon les règles, tous les quatre ans, et c’est ce qui leur donne cet aspect tant attendu, les Expositions ont elles, tendances à se multiplier, passant d’Universelle à Internationale à Spécialisée et s’entrecroisent avec les biennales en tout genre comme celle de Venise qui alterne chaque année entre la Biennale d’Architecture et la Biennale d’Art Contemporain. Les ex180

positions se multiplient donc, perdant alors le caractère « sacré » et culturel dont fait référence notre problématique. On assiste à une transformation des évènements, où chaque ville veut, chaque année, communiquer ou développer sa renommée, délaissant les envies de grandeurs face aux résultats rapides. L’ère actuelle est donc sous la tendance des festivals, d’ampleur moins importante mais qui finalement regarde plus la ville- accueil que le monde extérieur et peut permettre de développer des infrastructure à l’échelle de la communauté et adaptées aux besoins locaux. À travers ce chapitre nous allons montrer comment le Festival de Jazz de Montréal permet de mettre en valeur des sites qui ne lui sont pas dédiés à-priori et comment cette inscription grandissante « dans les murs » entraine la crétion et le développement de structures spécialisées aux Arts de spectacle. Cependant, il est important de noter que le Festival International de Jazz de Montréal (FIJM) est en réalité la consécration de plusieurs décennies de pratique de cette musique au sein de la ville, forgeant un quartier à son image, développant de manière inconsciente un véritable pôle artistique au sein de Montréal et cela bien avant la création du FIJM. C’est pourquoi nous allons, dans un premier temps établir un historique du jazz à Montréal, permettant alors une remise en contexte mais aussi d’entrevoir l’ampleur des édifices mis en place. Si le Festival International de Jazz est la manifestation culturelle contemporaine qui a motivé, de part son renom, des installations urbaines d’aujourd’hui, l’émergence du jazz en elle-même est celle qui a amorcé la création de ce quartier des années auparavant.

181


1- L’émergence du jazz à Montréal : développement d’un quartier identitaire pour le divertissement. Aujourd’hui connu officiellement sous le nom de Quartier des Spectacles, ce quartier n’était qu’un simple faubourg au début du XIXe, nommé le faubourg Saint-Laurent, il s’étend des rue Saint-Antoine au sud, Sherbrooke au nord, Bleury à l’ouest et Amherst à l’est. Bien qu’offrant d’abord des fonctions résidentielle et commerciales, une fonction éducative se développe peu à peu avec l’établissement en 1876 du premier pôle de L’Université de Laval à Montréal, entrainant l’arrivée de l’École Polytechnique sur la rue Saint-Denis en 1903 (bâtiment aujourd’hui affilié à l’UQAM), de l’école des Hautes Études Commerciales sur la rue Vigier (HEC, qui deviendra en 2000 les Archives Nationales du Québec). En 1912, la construction de la Bibliothèque Saint-Sulpice finit d’attribuer au faubourg Saint-Laurent, rebaptisé alors le Quartier Latin, sa fonction éducative. 96

HEC, Rue Viger , 1936. Archives de Montréal Théâtre le Princess, 1907.

a- Le début du XXe : l’installation.

Parallèlement à cela, une autre fonction motrice, celle du spectacle, se développe dans le quartier, accueillant les premiers théâtres reconnus tels que le Théâtre Français sur la rue Sainte Catherine (établissement anglophone qui deviendra plus tard le célèbre Métropolis) et le Monumental National boulevard Saint-Laurent en 1893. On peut également citer le Princess construit en 1907 (qui deviendra aujourd’hui le Cinéma Parisien), le Gayety en 1912 (qui deviendra la Comédie Canadienne puis le Théâtre du Nouveau-Monde), le Cinéma Im-

96 PPU Quartier des Spectacle – Secteur Place des Arts et Quartier Latin, Ville de Montréal, 2013. 182

183


périal en 1913 (devenu le Centre Sandra et Leo Kolber) et le Théâtre Saint-Denis en 1916. Le quartier est donc partagé entre deux grandes tendances qui semblent s’opposer : la première liée à l’éducation et la seconde liée au spectacle. 97 C’est en 1919 et seulement quelques mois après l’implantation de l’Université de Montréal dans les locaux de l’Université de Laval, que le faubourg Saint-Laurent se voit ravagé par un grand incendie sur la rue Saint-Denis impliquant son déplacement et celui des autres institutions éducatives sur le flanc du Mont-Royal au début des années 1930. Le Quartier Latin se retrouve alors dénué de sa fonction « scolaire » et exploite d’autant plus la seconde fonction motrice du quadrilatère. C’est à travers ce contexte que le jazz est né dans la métropole, sous le signe de l’interdit puisque la culture québécoise, enracinée dans des valeurs traditionnelles de la religion et de la vie rurale, voit d’un mauvais œil les écarts modernes de la métropole et l’effervescence de sa scène musicale émergente. Comme nous l’avons vu au début du premier chapitre, la ville de Montréal est industrielle et ouvrière dans les années 1920, elle est soumise à une forte immigration et vue comme l’une des villes les plus importantes d’Amérique du Nord. En opposition aux villes américaines puritaines et soumise à la prohibition, Montréal est une ville ouverte aux plaisirs, entre autres celui du jazz, la pègre est présente dans le Quartier Latin qui héberge bars à alcool et des maisons closes tolérées par une police corrompue. La ville voit donc naitre des dizaines de clubs dédiés au jazz dans le centre-ville tels que le El Mocambo, le Faisan Doré, le Bellevue Casino, et accueille des talents venus d’ailleurs, essentiellement des anglo-

L’incendie de l’Université de Montréal, La Patrie, 24 novembre 1919.

97 Partie basée sur les propos d’ Eva Kammer « Usages et représentations de l’espace public urbain dans le contexte du festival international de jazz de montréal” ,2006, UQAM 184

185


phones noirs d’Ontario (province voisine du Québec) qui excellent dans cette musique avant-gardiste et étrangère aux Québécois.

Le jazz et ses associations98 se retrouvent alors concentrés dans trois pôles montréalais dont le plus connu et aujourd’hui défunt « Red Light District » compris entre les rues Jeanne-Mance, Sherbrooke, Sainte-Catherine et Saint-Denis. Le jazz incarne alors une musique en marge de la bonne société et se produisant essentiellement la nuit, dans les clubs essentiellement illicites et imperméables au reste du monde. Dans les années 1940, l’effervescence est à son comble et il est alors possible de voir dans une même journée Charlie Parker et Frank Sinatra Chez Parée, ou Ella Fitzgerald et Louis Armstrong dans l’un des plus célèbres bars de la ville. Cette dernière, après la Seconde Guerre Mondiale est prospère pour le show-business et les jazzmen montréalais peuvent alors vivre complétement de leur musique. À partir des années 1950, le faubourg mais essentiellement le « Red Light District » est soumis à l’influence de la pègre et regorge d’activités illicites ce qui vaut à la ville de Montréal la réputation d’une ville sulfureuse. C’est également à cette époque que se développe encore un secteur de théâtres professionnels avec la fondation du Théâtre du Nouveau Monde en 1951 et le secteur viendra peu à peu s’épanouir la décennie suivante avec l’arrivée de la Place des Arts qui offrira aux ballets, musiciens et troupes de théâtre un lieu de diffusion reconnu.

Rue Sainte-Catherine, 1939.

Théâtre le Gayety 1912, Bibliothèques et Archives nationales du Québec,

98 Plusieurs associations de jazzmen se développent telles que la « Canadian Clef Club » en 1928 tenue par des musiciens noirs, « Hot Club of Montréal », « Hot Club Society » et « Jazz Appreciation Society » issues de la communauté blanche anglophone. 186

187


b- Vers un remaniement du quartier.

Les années 1950 annoncent également l’arrivée d’instances politiques qui aspirent à mettre de l’ordre dans la ville, à faire de Montréal une ville nettoyée de la pègre et ouverte au monde. Le Maire Jean Drapeau, personne récurrente tout au long de ce mémoire est également celui qui, au prix du déclin du show-business, va mettre des formes à l’informe du Quartier Latin. Cette décennie est donc caractérisée par les nombreux chantiers dont nous avons parlé dans le premier chapitre, venant accroitre la dégradation et l’insalubrité des quartiers à cause de la multiplication des chantiers de démolition et de construction. À partir de 1957, la construction des Habitations Jeanne-Mance, logements dits sociaux et dans le cadre du plan Dozois est une réponse à la Révolution Tranquille émergente au Québec. Cette prise de conscience des Québécois de leurs conditions de repli dans la religion et en opposition complète à la situation ouverte de la ville de Montréal99, mène donc à un retour et une réflexion sur leur population. La Révolution Tranquille prône donc un retour sur la ville et sur le peuple de la part des institutions politiques, un arrêt des Grands Projets qui sont des architectures décadentes et allant au détriment de l’investissement de capitaux dans de l’architecture sociale. Jean Drapeau, qui veut donc donner une cohésion visible au centre de Montréal pour l’arrivée de l’Exposition Universelle veut donc construire des lieux de certitude et d’affirmation du peuple tels que la Place des Arts en 1962 et sa salle Wilfried Pelletier, mais aussi une réapparition de la fonction éducative avec en 1968 l’implantation du Cégep au Vieux-Montréal et le retour d’une activité universitaire avec l’UQAM (Université du Québec À Montréal) en 1969 qui prend place au sein du Quartier-Latin. 99 188

Secteur du Red Light District, entre 1959 et 1961. Archives de Montréal. Construction de la Station Berri-UQAM, Archives de Montréal.

Référence au discours de René Lesvéque cité précédemment. 189


Bien que le quartier subisse un nettoyage et un remaniement après les années de décadences du show-business, le jazz, lui, survit tout de même et sert de support à cette Révolution Tranquille qui est dans l’ère d’indépendance des années 1970.100 La musique aussi subit alors une grande liberté d’improvisation et est utilisée pour faire passer des messages de révoltes politiques, prônant la libération culturelle du Québec à travers les chansons du groupe le Quatuor de Jazz Libre du Québec. Cela traduit l’émergence de groupes mais aussi d’un désir de la suprématie francophone face à l’impérialisme anglophone, bien que la Révolution Tranquille aie fait tomber plusieurs frontières le désir d’émancipation est grandissant, on veut une ville francophone possédant ses symboles québécois. Le Complexe Desjardins, construit en 1972 affirme l’implication urbaine du mouvement coopératif et l’implantation d’une nouvelle activité commerciale au sein du quartier. En plus de représenter la prospérité économique québécoise, il crée le second axe nord-sud du « Montréal souterrain » qui est aujourd’hui autant un attrait touristique de la ville mais aussi une réponse aux conditions climatiques nordiques.

Montréal vue du ciel, secteur de la Place des Arts, 1963. Archives de Montréal Complexe Desjardins en construction, Montréal, Collection Centre Canadien d’Architecture

Finalement en 1979, la première édition du Festival de Jazz de Montréal voit le jour et se positionne comme précurseur de l’activité qui sera bientôt moteur de tout le quartier. Profitant des espaces vacants que sont les rues, les dents creuses liées au démolitions, ou d’édifices industriels désaffectés tels que le Wilder Blumenthal, les festivals vont alors se développer et se multiplier au cours des années. En parallèle, de nouvelles infrastructures du spectacle et de l’art viennent

100 Cette période de révolte et de volonté d’indépendance est d’ailleurs un phénomème mondial si l’on regarde ce qu’il se passe dans le monde au même moment avec en 1968 la révolte culturelle, sociale et politique des étudiants parisiens (Mai 68) et aux Etats-Unis le festival Woodstock incarnant un symbole de paix et de liberté sexuelle. 190

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fleurirent dans le quartier telles que le Spectrum en 1982, la salle Pierre-Mercure et le Musée d’art Contemporain en 1992, le cinéma du Quartier-Latin en 1998 et le Club Soda en 2000. Au cours du XXe siècle, le faubourg Saint-Laurent, appelé par la suite le Quartier Latin a vu se développer cette activité de divertissement au détriment de la fonction éducative qu’elle avait amorcée. L’arrivée de cette musique noire américaine dans la métropole, îlot d’exception dans un Québec religieux et replié, a peu à peu transformé le quartier, désormais support de bâtiments et pratiques illicites. Si le jazz s’est développé à cet endroit c’est dû à la répartition rigide et bipolaire de la ville, entre les capitaux anglophones s’établissant en haut de la ville et les ouvriers et immigrés en bas, près du port et des activités industrielles. L’immigration massive vers Montréal, ville non soumise à la prohibition, a donc entrainé le développement de cette tendance musicale qui existait déjà à Harlem, à Chicago et à la Nouvelle Orléans aux Etats-Unis. La reconnaissance internationale du quartier du Red Light en tant que scène du jazz a permis le développement d’un quartier, non pas en terme de qualité d’espace de vie, mais en terme de vie tout court. Le Sud de l’ile ayant été détruit en 1882 par un grand incendie, la ville est en recherche d’identification déplorant la perte de plusieurs quadrilatères et entrainant la dépossession de plus de 10 000 personnes. Comme souvent, les catastrophes s’en suivent de criminalité, de dégradations et d’activités illicites, comme c’est le cas dans le faubourg Saint-Laurent. C’est donc grâce à la croissance du jazz et à sa réputation comme musique internationale que le, désormais devenu, Quartier Latin s’est vu de plus en plus fréquenté. Après une période politique de remaniement, le quartier s’oriente vers une officialisation de son secteur d’activité, porté par des organismes, les politiques urbaines publiques et les mécènes privés. 192

2- Le Festival International de Jazz de Montréal (FIJM)

La première partie de ce chapitre consistait à mettre en contexte l’importante de la musique jazz au sein du Quartier Latin et de quelle manière cette dernière à permis la réputation, et donc l’existence, d’un quartier dédié au jazz mais aussi à l’art et au spectacle. Comme nous l’avons dit précédemment, le Festival de Jazz de Montréal est la consécration de la place que prend le jazz dans la ville et bien que la manifestation culturelle en tant que telle ne soit pas à l’origine de la création de ce quartier, elle est de celles qui vont en forger son avenir. À travers cette deuxième partie, nous allons nous intéresser de plus près au sens de la manifestation, à ses valeurs (a) et à sa manière de s’implanter dans la ville en évoquant, par années, les différentes infrastructures exploitées ou créées(b). L’objectif ici étant de démontrer la manière dont le FIJM s’implante à Montréal en tant que manifestation culturelle, générant un capital financier, un attrait touristique mais aussi et surtout des installations, dans un premier temps éphémères, comme nous l’avons déjà vu lors de l’Expo 67, puis, appuyées par les politiques locales urbaines, pérennes et multifonctionnelles.

a- La mise en place du FIJM, un nouveau concept festivalier.

En 1975, l’unique scène de jazz francophone à Montréal est le Rising Sun tenu par un Montréalais d’origine guyanaise, Doudou Boicel, qui décide, en 1978, de créer un festival de Jazz d’été pour répondre aux 193


autres festivals de jazz du monde tels que celui de Berlin ou de Montreux. Cependant, cette édition n’aura pas de franc succès et c’est à l’initiative de la boite de production Spectra101, fondée en 1977 par Alain Simard et André Manard, que le véritable Festival de Jazz va naitre l’année suivante. André Manard cofondateur de Scène Spectra :

[...] à Montréal, l’été, il n’y avait rien. Nous avions tous un peu la nostalgie de gros événements qui avaient quelques années plus tôt occupé l’espace pendant l’été: l’exposition universelle de 1967, les jeux Olympiques de 1976, avec un très important programme culturel d’accompagnement, etc. Au début des années 1980, après la défaite au premier référendum, il y avait une certaine désillusion, une certaine nostalgie de tout ça. Nous, qui organisions des concerts tout le reste de l’année, nous étions quasiment au chômage technique l’été. En 1979, on avait déjà essayé d’organiser une première édition, qui n’a jamais eu lieu: à quelques semaines de l’événement, nous avons vu que nous ne pourrions pas équilibrer les comptes. Nous avons remis ça à l’année suivante, et c’est ainsi qu’a eu lieu la première édition de 1980. Une série de concerts tous les jeudis de l’été, Place des Nations, sur l’une des deux îles où a lieu actuellement le Grand Prix de Montréal, au milieu du fleuve. Deux ans plus tard on s’est installé dans le centre de Montréal, et c’est là que ça a vraiment décollé. Une grande faveur

101 Scène Spectra est également aujourd’hui responsable des Francofolies de Montréal (1989) et du Festival Montréal en Lumière(2000). 194

populaire s’est développée, réunissant dans un même événement, les communautés Anglos et franco, et le festival est devenu un peu le symbole de cette trêve entre nous. C’est allé vite parce que les deux communautéss’impliquaient » 102 Le Festival va peu à peu rassembler les différentes cultures juxtaposées à Montréal : Anglophones et Francophones en particulier vont se reconnaître peu à peu dans cet instant certes éphémère mais les rassemblant autour d’un langage musical porté par l’universalité et le partage. Cet événement se transforme peu à peu en une communion à l’échelle de la cité dont les habitants se rassemblent en masse pour cet instant culturel qui transfigure la ville elle-même. Spectra décide de prolonger sa programmation musicale à l’extérieur des espaces dédiés, à l’offrir ainsi sur l’espace public urbain. Il se crée ainsi un véritable espace de représentation entier et total, une systémie englobant les espaces dédiés, les places les artères. « Les manifestations publiques comme les défiles, les cortèges ou les processions dans les villes étaient autrefois porteuses de sens : elles organisaient la signification de l’espace social à partir de la structuration des lieux où les gens se côtoyaient à un moment spécifique » 103

102 Propos recueillis par Christian Gauffre dans Jazz Magasine et cités dans Kammer (Eva) « Usages et représentations de l’espace public urbain dans le contexte du festival international de jazz de montréal”, 2006, UQAM 103 Marin (Louis), «Une mise en signification de l’espace social: manifestation, cortège, défilé, procession » in De la représentation, Paris, Gallimard, 1994, p.48-61

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Le Festival de Jazz se donne donc comme objectif de redonner la rue aux Montréalais, en y plaçant des installations que chacun peut s’approprier, d’abord dans les rues, puis essentiellement autour du quadrilatère de la Place des Arts. L’idée ici d’un développement de l’urbain se fait plutôt à travers l’investissement de cette urbanité par ses utilisateurs, son appropriation et donc sa densification. Bien qu’à l’occasion des premières éditions, les infrastructures étaient permanentes ou éphémères, on note tout de même une démultiplication de l’espace pratiqué et investi, l’urbain ne faisant donc pas seulement aux constructions mais aussi à l’espace interstitiel. L’objectif, très clair, du FIJM est le même que les deux autres manifestations culturelles, celui d’attirer une foule, d’abord américaine, mais aussi internationale, en exploitant donc cette musique émergente du Quartier Latin :

« Je me souviens d’avoir écrit, pour notre première demande de subvention auprès des gouvernements en 1978, qu’un jour le FIJM attirerait des milliers de festivaliers américains, et qu’il deviendrait le plus important événement de musique jazz au monde. On a ri de nous! « Comment une ville canadienne, de surcroît francophone, pourrait-elle abriter le plus grand festival mondial d’une musique typiquement américaine? »104

À travers cette partie, nos avons évoquer la mise en place du FIJM, ses acteurs principaux que sont Spectra Scène et sa philosophie. Nous 104 entrevue d’Alain Simard par Chantal Neveu, rédactrice en chef de CIBLE et présidente de Multidées relations publiques sur http://www.communicationmarketing.org/ressources/nouvelles/grande-entrevue.html , (consulté le 25.12.2013)

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avons exposé le désir de ces intervenant d’offrir aux spectateurs un festival « sans fin » urbaine, accroissant alors la densité de population à la fois à l’intérieur des scènes mais aussi à l’extérieur, accessible à tous de part sa gratuité, les différents horaires et type de musique jazz qu’il offre. C’est bien à travers son implantation et son concept novateur que le Festival International de Jazz va non seulement voir le jour, mais devenir un festival de renommée mondiale.

b- L’historique du festival : vers une qualification culturelle de l’espace.

Depuis bientôt quarante cinq ans que le Festival de Jazz de Montréal existe, celui-ci a su convaincre, à la fois par la qualité des artistes invités mais aussi par l’ampleur qu’il a pris au cours des années. La proximité des Etats-Unis, ayant entrainé l’import du jazz au Québec, amène également de nombreux visiteurs. Considérés comme la Mère Patrie du Jazz, avec des villes comme Chicago, New York City ou New Orléans, les Etats-Unis sont également les plus importants à convaincre. Le Festival de Jazz émerge donc dans le début des années 1980105, ravissant des foules nostalgiques de grands évènements passés tels que l’Expo 67 ou bien plus récemment les Jeux Olympiques de 1976. Cette période est entamée par une défaite du Parti Québécois au Referendum de 1980 pour la souveraineté du Québec soutenu par René Levesque. Une certaine désillusion s’ empare donc de la population montréalaise et l’apparition d’un Festival crée alors l’engouement et 105 La chronologie qui suit est basée sur l’historique officiel du Festival de Jazz de Montréal sur http://www.montrealjazzfest.com/historique/Default. aspx (consulté le 25.12.2013)

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la curiosité. Dans cette partie, nous allons, de manière chronologique, énumérer les différentes éditions du FIJM dans le but de mettre en évidence la progression du festival, l’importance qu’il prend peu à peu dans la ville mais aussi, en terme de fréquentation, dans le monde. Il est donc ici question d’un développement, à la fois de l’urbain, au regard des infrastructures construites et mises en œuvre dans la ville à cette occasion, mais aussi un développement en terme de capitaux apportés à la ville par un tourisme festivalier. La progression de l’urbain ici, et dans la partie suivante, est liée à la densification et la rénovation de l’urbain, avec l’insertion du Festival de Jazz dans des espaces interstitiels de la ville, mais aussi dans sa complexification et son amélioration avec la création d’infrastructures dures, et pérennes. Si la première tentative du festival a lieu en 1979, elle n’a pu être menée à bien par manque de support financier, ce n’est qu’en 1980 que la véritable « première » voit le jour dans le cadre de Terre des Hommes, l’exposition faisant suite à Expo 67 prolongée par le Maire Jean Drapeau et se déroulant donc sur l’île Sainte-Hélène. On y trouvait alors deux lieux principaux : Le Kiosque international, où se déroulaient des spectacles gratuits avec des enregistrements de groupes connus tels que Vic Vogel, et la Place des Nations, où se donnaient des spectacles avec des invités tels que Ray Charles, les Géants du Blues, les B.B. King, Muddy Waters, John Lee Hooker etc. On trouvait également une fanfare de la Nouvelle-Orléans qui se promenait dans la foule entre les deux espaces de représentation ayant amené plus de 12 000 personnes. L’idée d’étendre la musique et donc l’espace de concert au delà des scènes est déjà de mise lors de la première édition et c’est ce qui fait son succès.

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Logo du Festival International de Jazz de Montréal.

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« Dès la première année, les journalistes américains ont vanté la formule du festival. Leonard Feather, une sommité dans le monde du Jazz, était venu nous visiter et avait même écrit que Montréal offrait l’un des événements jazz les plus prometteurs au monde. Wow! »106 En 1982, le Festival décolle vraiment grâce au déménagement sur la rue Saint-Denis, au Théâtre Saint-Denis entre autres, mais les spectacles gratuits n’envahissent pas la rue car celle-ci était encore ouverte à la circulation automobile. On trouvait cependant une série de spectacles gratuits avec musiciens locaux, servant alors de tremplin, sur le Vieux-Port. Cette année-là est également un succès grâce aux premières subventions qui sont apportées au Festival de Jazz de Montréal, telles que celle de la nouvelle compagnie aérienne Air Canada, et par une programmation digne des plus grands festivals avec Ornette Coleman, Betty Carter et Miles Davis. L’année suivante sera marquée l’autorisation de la clôture de la rue Saint-Denis par la municipalité et donc l’installation de deux scènes extérieures pour les spectacles gratuits, mais aussi la performance d’artistes internationalement connu tels que Sarah Vaughan et Ella Fitzgerald. Pour la cinquième édition, en 1984, plusieurs salles sont mises à la disposition du festival, tels que le Théâtre Saint Denis, le Club Soda mais aussi des bars et les rues sont investis, 14scènes intérieures et extérieures sont installées, le quartier entier vibre alors au rythme

106 entrevue d’Alain Simard par Chantal Neveu, rédactrice en chef de CIBLE et présidente de Multidées relations publiques sur http://www.communicationmarketing.org/ressources/nouvelles/grande-entrevue.html , (consulté le 25.12.2013) 200

Plan du Festival de 1982.

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du jazz. Cette années là plus de 250 000 personnes assistent aux 25 représentations quotidienne du Festival de Jazz de Montréal dont la cérémonie gala de clôture se déroulement au Forum de Montréal, édifice dont nous avons parlé précédemment dans le cadre des Jeux de 1976. En 1986 l’extension urbaine du FIJM continue de plus belle avec la décision de s’installer sur le parvis de la Place des Arts, avec la proximité de plus de dix salles de spectacle entourant le secteur, telle que la salle Wilfried Pelletier n’évince pas pour autant le théâtre Saint-Denis, mais aussi de grands espaces publics. L’envergure urbaine est telle qu’il est installé une navette gratuite parcourant le Boulevard Maisonneuve fermé aux voitures pour l’occasion jusqu’à la place Emilie Gamelin. C’est aussi une année d’endettement qui permettra d ‘officialiser, l’année suivante, la situation du Festival de Jazz de Montréal en tant qu’évènement aux retombées économiques favorables pour le pays, lui permettant alors d’être soutenu par le gouvernement pour l’édition de 1987 sous le thème de Summertime.

Plan du Festival de 1986

Plan du Festival de 1991

La 11e édition du festival se déroule en 1990, et se concentre essentiellement autour du site de la Place des Arts, malgré quelques concerts dans les Club du centre-ville, tel que le Club Soda, avenue du Parc, mais son organisation préfigure alors celle qu’il prend aujourd’hui. Le rue Saint-Denis devenue trop étroite, le nouveau site présente des avantages pour l’organisation et l’aménagement d’un évènement accueillant plus d’un million de personnes. Un grand spectacle prend place alors sur le Boulevard René Levesque et une école du jazz est fondée, dédiée à l’apprentissage du jazz de manière ludique. 202

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En 1994 c’est le 15e anniversaire du Festival de Jazz, plusieurs installations apparaissent, la création du parc pour enfants ou ces derniers peuvent marcher sur un piano géant, la scène Alcan en aluminium, devant et intégrant le Complexe Desjardins, avec la possibilité de marcher en dessous puisque celui-ci rejoint la ville souterraine. Des gradins sont juxtaposés aux scènes extérieures, celles-ci accueillant plus de 400 concerts, on avait atteint 350 pour le 350e anniversaire de la ville de Montréal. Mais c’est aussi une année comptant 100 millions de dollar de retour économique pour la ville de Montréal, ayant attiré 1,5 millions de touristes et créé plus de 1000 emplois. C’est aussi cette année là qu’est fondé le Prix Miles Davis. En 1996, est inaugurée la Galerie d’art du Festival, ou l’on peut voir des œuvres de Miles Davis et d’Yves Archambault, l’affichiste officiel du Festival. La création de cette infrastructure impliquera une nouvelle tradition du Festival où chaque année, un artiste créera une œuvre in situ pour le FIJM.

Scène Rio Tinto Alcan, devant le complexe Desjardin. Edifice du Blumenthal réhabilité pour la Maison du Festival Rio Tinto Alcan

Les années qui suivirent présentent alors essentiellement des innovations en terme de programmation plus qu’en terme d’aménagement urbain, bien ancré autour du secteur de la Place des Arts. En 2001 c’est les grandes prises de décisions de la Ville de Montréal de créer des aménagements dignes de l’envergure de ce festival et surtout officiels, en leur proposant, aux mêmes endroits utilisés autour de la Places de Arts, des infrastructures à l’échelle internationale. Nous parlerons plus précisément de la mise en place de ce Quartier des Spectacles dans la partie suivante.

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En 2009, on célèbre le 30e anniversaire, le Festival de Jazz de Montréal a alors pignon sur rue, il présente la Maison du Festival Rio Tinto Alcan107, un nouveau complexe aménagé sur Sainte-Catherine Ouest dans l’édifice Blumenthal. Il est donc voisin de la nouvelle Place des festivals, lieu de spectacle baptisé par Stevie Wonder. Sous un même toit, on y retrouve une salle de spectacle, un bistrot, des salles d’exposition, un centre de documentation audiovisuelle et certains services liés à la production du FIJM. Cela permet donc d’offrir aux Montréalais une programmation d’activités d’hier, de nouvelles salles de spectacles, mais aussi et surtout un véritable berceau urbain fixe et pérenne pour le Festival de Jazz de Montréal. En 2012, les travaux extérieurs du Quartier des Spectacle sont finis sur la rue Sainte Catherine et les Montréalais peuvent maintenant jouir pleinement de la scène extérieure gratuite construite au coin de la rue Jeanne-Mance. La Maison Symphonique de Montréal inaugurée fin 2011 au coin du boulevard de Maisonneuve et de la rue Saint-Urbain, et hébergeant à l’année l’Orchestre symphonique de Montréal, se joint, comme précédemment le Théâtre Maisonneuve, aux salles intérieures du Festival de Jazz.

Place-des-Festivals, 2009. panoramio.com.jpg Plan du Festival 2013. montrealjazzfest.com.jpg

Nous sommes donc actuellement en 2013, et le FIJM s’ancre de mieux en mieux au sein de son quadrilatère fétiche grâce aux nouvelles infrastructures récemment construites. Au fil des années, Montréal a donc vu évoluer son centre-ville, son ancien Quartier Latin, au gré de cette musique jazz, recadré par des projets urbains à l’échelle de l’île. Le Festival de Jazz de Montréal est aujourd’hui, et ce depuis sa 4e édition, considéré comme le plus grand festival de jazz au monde par des critiques telles que Leonard Feather mais aussi par le Guinness

107 Rio Tinto Alcan est un des principal commenditaire du Festival de Jazz de Montréal. Nous l’avons déjà cité au sujet du Planétarium de Montréal importé sur sur le site olympique et pour le pavillon de la Jeunesse d’Expo 67.

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Book détenant le record du “World’s Largest Jazz Festival”.

Dans la première partie du chapitre, la chronologie explique la manière dont, à travers les usagers, l’espace urbain subit un développement chaotique, sans aucune logique d’implantation, mais animé par la pratique de cet espace. Dans le cas présent, les pratiques essentielles de ce secteur sont la musique jazz, les cabarets et les bars. L’usager est donc en position de production d’espace à son image. Dans la seconde partie, la chronologie tout juste exposée met en valeur l’appropriation de l’espace urbain par un groupe d’usagers et le déplacement de ce groupe en fonction de l’espace qu’il lui est nécessaire. L’usager fait alors subir à l’espace urbain construit ses pratiques. Ici, l’espace urbain s’est vu alors transformé par des producteurs d’espaces, que sont la Ville de Montréal ou les commanditaires, pour mieux correspondre aux besoins des usagers. On peut alors y voir le désir, de la part des producteurs du système urbain et culturel, de rendre cohérent le grouillement qui s’active dans et autour de l’espace bâti et produit par l’usager. 108

Le Festival de Jazz, mais originalement la musique jazz, est bien un vecteur directionnel permettant aux politiques urbaines de venir façonner l’espace bâti, le complexifier, le densifier et l’améliorer donc le développer pour qu’il corresponde mieux à la demande des usagers lors de cette période estivale.

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Michel de Certeau.

3- Le Quartier des Spectacles : un espace dédié à la culture et au divertissement.

Depuis les années 1970, on remarque une tendance dans une centaine de métropoles des Etats-Unis, à créer des Metropolitan Cultural Districts. La dernière partie de notre mémoire s’appuie effectivement sur l’application de cette tendance à la ville de Montréal, QC, Canada. Cette dernière, suite au processus de désindustrialisation et au départ de ses classes moyennes vers la périphérie (Saint-Lambert, Laval, Boucherville…), favorise la rénovation de ses espaces centraux. En effet, avec la rénovation du Vieux-Montréal, la création du Quartier Latin, le développement du Plateau Mont-Royal en quartier huppé et une redéfinition des quartiers de l’est de la Ville (vu à travers le chapitre des Jeux Olympiques), Montréal semble se refaire une image et cherche donc à se valoriser.109 C’est aussi à travers la multiplication de festivités que Montréal se forge la réputation de « ville des festivals », avec le Festival de Jazz, le Festival Juste pour Rire, le Festival Montréal en Lumière, les Francofolies de Montréal… Cependant, malgré les rénovations et l’affirmation d’une vocation festivalière, le centre-ville de Montréal ne possède pas d’espace urbain aménagé pour recevoir ces festivals eux-mêmes contraints de se développer à même les « non lieux urbains ». 110

109 AUGUSTIN (Jean-Pierre) et BLOSSE (Camille), “La culture au service
des villes : le quartier des spectacles de Montréal
un projet urbain en construction” 2007, 25p. 110 PPU Quartier des Spectacle – Secteur Place des Arts et Quartier Latin, Ville de Montréal, 2013.

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« Nous aimons notre quartier, l’est du centre-ville. Mais il y a plusieurs années, on s’est rendu compte que si on laissait les choses aller, on perdrait le contrôle. L’espace pour créer et développer nos événements publics semblait condamné à se rétrécir lentement mais sûrement.

André Ménard avait alors lancé l’idée d’un Quartier des théâtres. Et moi, de mon côté, j’avais conçu un tracé qui ceinturait la Place des Arts. Quelques années plus tard, grâce au soutien du Programme particulier d’urbanisme (PPU), la Ville de Montréal a repris différentes idées émises pour mettre en place le Quartier des spectacles, un projet extraordinaire qui permettra d’assurer l’avenir des festivals dans la métropole. »111 Carte de localisation du secteur du futur Quartier des Spectacles.

Le début des années 2000 est donc placé sous le signe d’un grand remaniement au sein du centre-ville pour venir redéfinir ce territoire, délaissé par l’usage quotidien, à l’image des évènements estivaux annuels. La dernière partie de ce mémoire est donc basée sur la manière dont les politiques urbaines viennent repenser le quartier dans sa globalité et l’intégrant, lui et toutes les infrastructures qui le composent, dans un véritable projet urbain s’étendant sur une quinzaine d’années. La mise en place d’un tel projet justifie la notion de développement de l’urbanité de Montréal pour et au profit de manifestations festivalières culturelles telles que le Festival de Jazz de Montréal.

Usages sur la Place des Festival, juin 2013.

111 entrevue d’Alain Simard par Chantal Neveu, rédactrice en chef de CIBLE et présidente de Multidées relations publiques sur http://www.communicationmarketing.org/ressources/nouvelles/grande-entrevue.html , (consulté le 25.12.2013) 210

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a- Le site actuel : un espace non relié à la ville.

Selon le PPU (Programme Particulier d’Urbanisme) du Quartier Latin, le quartier occupe un plan stratégique dans la ville puisqu’il est à la confluence de plusieurs quartiers d’importance tels que le Quartier Chinois, le Plateau Mont-Royal, le Vieux-Montréal, le Village, le Quartier International et le centre des affaires. Il comprend des axes majeurs tels que la rue Sainte-Catherine, Ontario, Berri, Sherbrooke, l’avenue du Parc et les boulevards SaintLaurent et Maisonneuve,3 lignes de métro (jaune, orange et verte) et la Gare d’autocars de Montréal.

Le site vaste de plus de 1 km2 démontre plusieurs problématiques, entre ses espaces vacants, issus de l’incendie de 1896 mais aussi des nombreuses démolitions de l’époque Jean Drapeau, sa clientèle marginale persistante depuis l’époque du Red Light, mais aussi actuelle avec la prostitution et le trafic de drogue, le conflit régnant entre la fonction récréative du quartier (pôle de théâtres, clubs, cabarets et bars) et la fonction résidentielle (avec entre autres les habitations Jeanne-Mance), le développement universitaire et la fonction résidentielle, etc. Les champs d’action sont donc nombreux au sein de cet espace bien que certaines portions, déjà bien établies, telles que le secteur de l’UQAM, les rues Berri et Sainte-Catherine, ont un besoin de planification moins urgent.

Localisation stratégique du Quartier des Spectacles. Vue aérienne de la ville en 1964

Évoqué en introduction, la ville de Montréal souhaite ancrer de manière officielle son image de « ville des festivals », en lui attribuant un nouveau quartier qui serait complètement dédié à cette vocation. Cependant, comme nous l’avons déjà dit précédemment, ce quartier 212

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existe déjà de manière sous-jacente, non officielle, et s’anime l’été en période de festival. Le Quartier des Spectacles est donc un nouveau projet visant à renforcer ce pôle culturel et artistique existant, et donc fondé sur cette concentration de la création, de la production et la diffusion de cette culture. Il a la volonté de s’adresser à la fois aux montréalais, en venant redynamiser l’offre culturelle, avec de nouvelles infrastructures, mais aussi aux touristes, offrant de nouveaux hôtels dédiés à l’accueil des spectateurs venus assister, entre autres, au Festival de Jazz de Montréal. Sa démarche s’inscrit dans une continuité et une prise en compte du territoire existant (les flux, le bâti, les rapports sociaux…) et propose alors une amélioration de ce territoire en recomposant à partir du quartier plus ancien, dans le but de rendre l’usage à l’espace, soit d’offrir aux usagers une appropriation totale de ce quartier. C’est une démarche de projet urbain qui vient alors s’opposer à la planification urbaine, qui, elle, est créée pour redynamiser des espaces non développés de la ville, et ne se base donc pas sur un existant, qu’il soit bâti, ou social.112 Nous avons vu au travers de la chronologie du Festival International de Jazz de Montréal, que ce dernier s’était établi d’abord seul, puis à l’aide de sponsors et enfin à partir de 1995, avec une aide financière gouvernementale. Dans le cas du projet du Quartier des Spectacles, concrétisation urbaine de l’effervescence culturelle, plusieurs intervenants agissent. Tout d’abord, la Ville de Montréal est maitre d’ouvrage à travers le Bureau de Gestion des Grands Projets (BGGP) et le gouvernement fédéral soutient financièrement le projet à la hauteur

112 AUGUSTIN (Jean-Pierre) et BLOSSE (Camille), “La culture au service
des villes : le quartier des spectacles de Montréal
un projet urbain en construction” 2007, 25p. 214

de 40 millions de dollar CAD tous les ans. Dans le cas de l’Exposition Universelle, la Ville de Montréal était elle aussi Maitre d’ouvrage de certains pavillons, quand d’autre sont d’initiatives privées. Elle s’est vu, soit racheter certains pavillons nationaux, ou vendre certains des siens à des commanditaires privés. Dans le cas des Jeux de 1976, la Ville était Maitre d’ouvrage avec des financements fédéraux. Le Quartier International de Montréal (QIM), organise, lui, le développement de projet urbains, il est mandaté par la Ville de Montréal depuis 2007 pour gérer à la fois la création des PPU mais aussi la coordination des missions et les appels d’offre. La Société d’Habitation de Développement de Montréal (SHDM) est elle propriétaire foncier du site d’implantation du projet. On fait appel à la firme d’architecte Daoust Lestage, sous contrat avec le QIM pour la conception du projet. On veut faire du Quartier des Spectacles, un espace urbain convivial, équilibré, attrayant et donc bien évidemment, un ancrage pour la culture, en favorisant l’équilibre entre les différentes fonctions urbaines et la vocation culturelle113. Ce futur quartier s’insère au centre de 4 ensembles. À l’ouest, on trouve le centre des affaires tertiaires, dont nous avons parlé au début du premier chapitre avec la création de hautes tours, et les commerces de la rue Sainte-Catherine. Au sud, se situe le Quartier Chinois, et le Quartier International datant de 1980 et venant redynamiser les alentours du Palais des Congrès. On trouve aussi le Vieux-Port qui a subi d’importantes rénovations de son espace de promenade et d’accès à l’eau durant la dernière décennie. Au Nord, c’est le Plateau MontRoyal, quartier résidentiel embourgeoisé par l’immigration massive 113 Geradin (Thomas), Viel (Laurent), P.Lafontaine (Sébastien). « Études de cas de montage de gestion de projets d’aménagement : Le quartier des spectacles-secteur places des arts. »2010 215


de Français et enfin, à l’est, le quartier d’Hochelaga-Maisonneuve, un quartier plus populaire qui est soumis lui aussi actuellement à un remaniement dont nous avons parlé dans le chapitre précédant. Les quartiers environnants affichent des couleurs et des identités très marquées, il est donc nécessaire que le Quartier des Spectacles en fasse de même pour émerger de manière officielle.

Ce futur Quartier des spectacle est composé en deux parties bien distinctes dont nous avons parlé précédemment, avec à l’est le Quartier Latin implanté autour de la rue Saint-Denis et de son activité étudiante (UQAM) et à l’ouest le pôle de la Place des Arts possédant des équipements culturels majeurs mais qui affiche une faible fréquentation en dehors des périodes du Festival de Jazz. Ces deux pôles coexistent sans aucun lien ce qui crée une discontinuité de l’espace pratiqué. On y trouve une fonction résidentielle diverse allant des résidences étudiantes de l’UQAM, aux logements sociaux des Habitations Jeanne-Mance pour finir avec des condominiums de luxe sur le boulevard René Levesque, mais aussi une fonction financière et commerciale incarné part le Complexe Desjardins, voisin de la Place des Arts.

Partition du Quartier des Spectacles Stationnement dans le centre-ville, 1971.

Il est important de rappeler encore une fois que cette partie de l’espace urbain a été endommagée pendant les années 1960 et 1970, subissant expropriations, constructions massives de tours et de complexes et l’implantation du métro. Le quartier est donc, au début des années 2000, le reflet de cette période, ponctionné, laissant place à de nombreux vides non définis, ou s’ils le sont, deviennent des parking et faisant perdre à la ville son caractère et son unité. Ces dégradations créent un isolement des deux pôles du Quartier Latin et de la Place des Arts car ils sont séparés par du « néant ». De plus, une très faible mise en valeur du patrimoine et des espaces publics est à noter, particulièrement sur les rues Sainte-Catherine et Saint-Laurent qui 216

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sont devenues essentiellement des axes routiers embouteillés par les voitures et des axes commerciaux par les piéton. La rue doit donc retrouver son sens premier, sa fonction d’échange au delà de celle du passage ce qui confèrera au quartier une unité.

Le projet du Quartier des Spectacle, établit selon le PPU, vise donc une amélioration du quartier existant à plusieurs échelles, partant d’une organisation globale dont le cœur serait la Place des Arts. Le projet traitera différents niveaux, de l’échelle urbaine avec un traitement des voies de circulations et la création de places, architecturale avec l’implantations de plusieurs édifices culturels, résidentiels et commerciaux, un traitement de réhabilitation de constructions délaissées mais aussi un aspect artistique urbain, venant mettre en valeur le patrimoine et le reste de la ville. b- Les objectifs et nouvelles infrastructures du Quartier des Spectacles

Le bilan du quartier met en évidence une inertie urbaine lente et la faible mise en valeur du secteur culturel existant. C’est en 2001 que l’ADISQ (Association De l’Industrie du Disque et du Spectacle au Québec) lance le projet du Quartier des Spectacles, basé sur plusieurs idées dont celles du groupe Spectra Scène, organisateur du Festival International de Jazz de Montréal. Le projet est amené au Sommet de l’organisation de la ville de Montréal est se voit retenu et adopté en tant que proposition structurante et pertinente pour la ville.

218

Plan d’ensemble du Quartier des Spectacles.

219


« Le mandat de l’ADISQ va au-delà de la seule promotion collective sur les marchés domestique et international. L’association effectue des représentations auprès des pouvoirs publics sur les questions concernant les politiques générales de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, le financement de cette industrie, la défense des droits des producteurs et la réglementation de la radiodiffusion. Elle procède également à des négociation et à la gestion d’ententes collectives avec les associations d’artistes reconnues et finalement, la promotion collective du disque, du spectacle et de la vidéo.”114 Elle fonctionne donc comme une sorte de lobby des industries culturelles, capable de faire pression sur les institutions et décisions politiques concernant la culture. C’est ce qu’il s’est passé dans le cas du Quartier des Spectacles de Montréal en pensant l’avenir du quartier, qui inclue par conséquence son bâti, ses espaces publics, à travers un renouvellement et un développement de l’urbain de grande ampleur en utilisant la culture comme élément unificateur. Plusieurs objectifs sont énoncés par le PPU du Quartier des Spectacles et le Partenariat du Quartier des Spectacles (organisme à but non lucratif), tous pensés dans une optique de régénération globale et totale du site. Cela va contribuer à une définition virtuelle du site.

Le premier objectif fixé est celui de « renforcer l’image culturelle du quartier par une opération de marketing territoriale » qui met

114 http://www.adisq.com/assoc-profil.html (consulté le 22.12.13)

220

en place neuf orientations pour les aménagements à venir, ce qui va permettre à la population d’imaginer en quoi vont consister les travaux.115

Un quartier en équilibre.

La rue comme fil conducteur.

Un quartier unifié en lien avec les quartiers voisins.

Le domaine public: lieu public d’expression. Une signature et iconographie distinctives.

Des infrastructures pensées pour les activités culturelles.

Un caractère contemporain vivant

Une plaque tournante de la création, de l’inno vation, de la production et diffusion culturelle.

Un foyer de création international et une desti nation culturelle international. La Ville elle, définit des orientation plutôt liées au plan d’urbanisme avec des préoccupations telles que le développement des fonctions résidentielles, la connexion entre les deux pôles du quartier, les accès des transports en commun mettant donc la culture de côté. Et ce n’est qu’une fois le quartier décrit de manière virtuelle, qu’il est possible de lui faire prendre forme à travers les différents objectifs mis en place. 115 paragraphe basé sur les écrits de AUGUSTIN (Jean-Pierre) et BLOSSE (Camille), “La culture au service
des villes : le quartier des spectacles de Montréal
un projet urbain en construction” 2007, 25p.

221


Toujours dans l’objectif de renforcer l’image culturelle du quartier, un plan d’illumination des 28 salles présentes dans le secteur est mis en place. Avec la volonté de faire référence à Broadway de New-York City, le traitement identique des infrastructures du spectacle permettra également de venir créer une unité dans le secteur. De plus, un parcours lumineux vient compléter ce plan lumière, offrant alors non seulement une harmonie visuelle dans l’ensemble urbain mais aussi un lien entre l’espace bâti, les rues et les espaces publics. Pour permettre une identité forte du quartier, un logo est confectionné à la manière d’une marque culturelle et réalisé par Jean Beaudouin et Rudei Baur qui ont collaboré aux logos du Centre Pompidou et aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008. Pour faire un parallèle avec les chapitres précédents, un logo avait été réalisé pour chacune des manifestations culturelles de Montréal, celui de Terre des Hommes de 1967 réalisé par Julien Hébert et celui des Jeux de 1976 par Georges Huel qui est aussi le graphiste du logo de la Ville de Montréal. La création d’un logo aide à une identification visuelle et donc à une association rapide et une meilleure diffusion de la « marque ». Une signalétique distinctive particulière est donc mise en place à laquelle on vient ajouter l’intégration d’œuvre d’art dans l’environnement urbain. Le second objectif qu’évoque le PPU est le « renouvellement de la trame et du tissu urbain » à travers les deux axes majeurs évoqués à plusieurs reprises. Il s’agit dans un premier temps de valoriser les deux pôles Quartier Latin et Place des Arts en réhabilitant l’existant et valorisant le patrimoine historique et culturel puis de construire de nouveaux équipements. Dans un second temps, il conviendra de 222

Cabaret-Underworld et le tracé lumineux, Vincent-Bautes, 2013.

Logo du Quartier des Spectacles Jean Beaudouin et Rudei Baur

Logo de la Ville de Montréal Georges Huel

Logo Jeux Olympiques de Montréal 1976 par Georges Huel

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renforcer les liens entre ces deux unités par des opérations de revitalisation concernant davantage les espaces de circulation tels que la rue Sainte-Catherine, le Boulevard Saint Laurent, le carrefour des Mains116 et certains espaces publics.

La Place des Arts est sujette à plusieurs interventions pour remédier à la léthargie dans laquelle elle demeure en dehors des périodes de festivals. Une première intervention sur la salle de spectacle le Spectrum est réalisée consistant à l’agrandissement de la salle de spectacle, l’ajout d’un club de jazz, de salles de cinéma, d’un restaurant et d’une billetterie. Cet édifice est une initiative du groupe Spectra Scène, voulant alors créer un complexe culturel capable d’attirer une population non venue du centre-ville . Malheureusement, en 2008 la salle est détruite laissant alors une nouvelle friche dans le centre ville. Aujourd’hui, le terrain fait partie d’une étude de faisabilité du projet Montréal 2025 pour y monter un complexe commercial et tertiaire117.

La Place des Festivals, au croisement des rues Sainte-Catherine et Jeanne-Mance est un espace public capable d’accueillir des spectacles, des festivals, des projections de films l’été et une patinoire l’hiver. C’est le projet le plus couteux de la requalification du secteur de la Place des Arts car il consiste notamment à diminuer de moitié les voies de circulation de la rue Jeanne-Mance. Cette place devient alors le berceau des festival, dont celui du Festival de Jazz qui reçoit, depuis la fin de son chantier en 2009, la plus grande scène. Elle crée également une animation commerciale inédite en réponse au long mur aveugle du Musée d’Art Contemporain construit en 1992 sur la

Salle du Spectrumen démolition, 2008.

Festival de Montréal en Lumière sur la Place des Arts.

116 Le carrefour des Mains fait référence au croisement du boulevard Saint-Laurent avec celui de Maisonneuve. Mains, vient de l’anglais « main » étant la rue principale.

117 PPU Quartier des Spectacle – Secteur Place des Arts et Quartier Latin, Ville de Montréal, 2013. 224

225


Place des Arts, et dont l’agrandissement fait partie du projet de la redéfinition culturelle. 118

Une seconde phase , située au niveau de l’îlot Balmoral consiste à l’apport d’une nouvelle salle pour l’Orchestre Symphonique de Montréal. Dans un premier temps, le projet manquant de fonds, un complexe multifonctionnel et une place publique nommée le Parterre du Quartier des Spectacles est crée en rassemblant deux places en quête de définition, et voit en 2011 la Maison Symphonique de Montréal sortir de terre sur la parcelle d’en face. En parallèle, une action sur la rue Sainte-Catherine est menée pour en faire, entre les rues De Bullion et Saint-Alexandre, un espace piéton et public. On note également une requalification de l’édifice Wilder de la rue Bleury, devenant alors des ateliers et résidences d’artistes et de celui du Bumenthal de la rue Sainte-Catherine qui accueille aujourd’hui la Maison du Festival de Jazz de Montréal comprenant une salle de spectacle, un restaurant et un centre de documentation. Le secteur du Quartier Latin bénéficie lui aussi d’amélioration, se basant sur les qualités qui en ressortent, soit l’activité éducative et donc culturelle, et l’offre de logement présente sur le site. L’activité du quartier est assurée de manière implicite par la présence de l’Université du Québec À Montréal (UQAM), ses nombreux pavillons, reliés à la fois par le système souterrain et les différentes rues qui l’entourent. Certaines institutions profitent alors de cette activité pour venir s’implanter à proximité, telle que l’a fait la BaNQ (Bibliothèque d’archives Nationale du Québec) sur la rue Berri en 2005. Face à elle, la nouvelle gare d’autocars de Montréal se dresse en 2011, reliée au métro Berri-UQAM, une des stations internoeudales du métro. Un dé-

Mise en évidence des espaces de déambulation piétonne crées. Vue sur les pavillons de l’UQAM © Office du film du Québec, Adrien Hubert Archives nationales du Québec, à Montréal

118 http://www.montreal2025.com/projet.php?lang=fr&id=198 (consulté le 26.12.13) 226

227


veloppement de plusieurs anciens faubourg résidentiels se met en place, venant soit densifier le tissu urbain, comme on le voit avec le faubourg Norbert, ou bien impulser un nouveau développement : le faubourg Charlotte, ou bien encore réhabiliter certains secteurs dont l’exemple est les Habitations Jeanne-Mance. Cette création de mixité sociale a pour but de densifier le quartier mais aussi d’éviter la surenchère des loyers du quartier avec les habitations de luxe se trouvant plus au sud.

La connexion de ces deux pôles passent à travers la revitalisation de trois artères principales que sont la rue Sainte-Catherine, dont on a vu une partie dans le Quartier des Spectacles, le boulevard Maisonneuve, et le boulevard Saint-Laurent représentant une véritable fracture dans l’espace urbain du centre-ville. Une action de réhabilitation des rues, par le biais d’un traitement des trottoirs, d’un nouvel asphalte et d’un nouveau système d’éclairage, permet alors de les mettre en valeur en tant que vitrine de la culture où le piéton doit redevenir acteur. L’ajout d’un mobilier urbain intégrant l’art est mis en place. On retrouve par exemple sur le boulevard Saint-Laurent, des bancs affichant une chronologie artistique où est inscrit une citation unique à chacun. Ils deviennent alors objet utilitaire mais également objet d’art et de curiosité animant alors le passage. Les travaux ont évidemment pour but de relier ces deux pôles l’un à l’autre pour venir en créer un quartier avec une unité et une identité forte, mais aussi de créer uen meilleure connexion avec le reste de la ville.

228

Mise en évidence des différents pôles éducatifs dans le centre-ville.

229


Tout au long de ce chapitre, nous avons tenté de démontrer l’impact de la musique Jazz particulièrement mais aussi et surtout de la culture et de l’art sur un secteur de la ville. La présence de la musique jazz dans le faubourg Saint-Laurent et plus précisément dans le Red Light District, bien qu’à l’origine néfaste sur la réputation, a impulsé le quartier vers ce qu’il devient aujourd’hui. C’est au travers des pratiques et des évènements du quartier que ce dernier trouve sa réelle vocation, reconnue aujourd’hui, et ce depuis une quinzaine d’années, par les politiques locales. Le Festival de Jazz, pris ici comme manifestation culturelle, a permis grâce à ses créateurs du groupe Spectra Scène, la construction d’infrastructures adaptées à l’envergure de l’évènement.

mais manquant de services. Le quartier s’adressait surtout aux festivaliers, qui bien qu’étant des millions chaque années, ne constituent pas la population la plus pertinente. Il était nécessaire que les nouvelles infrastructures proposent une programmation à l’année, s’adressant alors aux Montréalais. Les friches urbaines en mal de définition se voient alors conquises par le Quartier des Spectacles, redorant l’image d’un quartier connu pour être autrefois malfamé, et valorisant ses édifices aujourd’hui reconnus comme patrimoine culturel.

Si la chronologie des lieux exploité par le FIJM montre bien la tendance qu’il y avait à vouloir d’abord s’étendre, il réinvestit la ville existante, vivante avant d’aller construire ailleurs. On reconstruit sur l’ancien, dans la continuité de ce qui a été créé, tout en conservant le modèle des squares et des espaces publics. La création de ce quadrilatère du spectacle venant en réponse à une manifestation culturelle est bien l’illustration d’un changement dans la manière de penser la ville. Le Quartier des Spectacles offre dorénavant aux Montréalais et aux visiteurs du monde entier un lieu mixte où il est possible de se promener grâce à la Promenade des Artistes, au Parterre du Quartier et à la rue Sainte-Catherine, mais aussi faire ses courses, se restaurer et bien entendu profiter de la programmation culturelle que propose, à l’année, les places extérieures et salles intérieures. Le Festival de Jazz de Montréal semble donc être un catalyseur au développement de cet espace en perdition, démantelé et en tension avec le reste des quartiers du centre ville. Il permet surtout un développement dans le sens de l’amélioration, puisqu’effectivement, ce n’est pas l’implantation de nouvelles infrastructures qui rend le quartier attractif mais plutôt les infrastructures qui viennent soutenir un pôle déjà réputé 230

231


CONCLUSION

232

233


Création de la commission hydroéléctrique du Québec, futur Hydro-Québec

Jeux Olympiques de Montréal XXIe olympiade

Établissement d’un plan directeur pour la ville de Montréal Création du Parc du Mont-Royal

1876 Suite aux Invasions britanniques, le Canada est cédé à l’Angleterre.

1763

1642

1944

La compagnie Canadien du Nord amène son chemin de fer jusqu’au centre-ville en passant en tunnel sous le Mont-Royal

1912

1825

Inauguration de la Place des Arts, complexe culturel.

1931

éléction de Jean Drapeau à la Mairie de Montréal

Candidature de Montréal pour l’Exposition Universelle de 1967

1959

234

Quartier soumis à l’immigration, ouverture de bars, clubs de jazz et de maisons closes, c’est l’émergence du Red Light District.

375e anniversaire de la ville

2001 le Pavillon de la France est réhabilité pour Floralies Internationales accueillir le Casino de Montréal de Montréal

Montréal élue ville hôte des Jeux Olympiques de 1976

1962

Début des Ouverture de la voie Création du Jardin Création de Ouverture du chantiers des maritime sud du Botanique de Ville-Marie, Canal Lachine grandes tours sur Saint-Laurent, Montréal future Montréal le Boulevard favorisant l’Ouest par les Sulpiciens canadien au profit de Dorchester au suite à la centre-ville. Montréal. découverte 1880 1947 française création du Canadian Premier cabaret du territoire. Pacific, compagnie francophone de chemin de fer « Au Faisan Doré » à Montréal établit dans le pour relier le Québec Red Light District à la Colombie Britannique.

1920 - 1950

1976

1980

1970

1960

1954

Parti Québecois élu au gouvernement

1963

ouverture de Mise en place l’aéroporte Dorval à du Plan Dozois. l’ouest de la ville.

l’ADISQ (Association De l’Industrie du Disque et du Spectacle au Québec) lance le projet du Quartier des Spectacles

1993

1979 Création du Festival International de Jazz de Montréal par Spectra Scène

1975 1967 Construction du Pont Louis Hippolyte-Lafontaine Autoroute Décarie Autoroute Bonaventure Place Bonaventure Exposition Universelle de Montréal

Construction de l’aéroport Mirabel

2017

2009

2000

2012

Création du Festival en Lumière de Montréal par Spectra Scène

Travaux de piétonisation d’un tronçon de la rue Sainte-Catherine.

1974 Construction de l’Autoroute Ville-Marie, axe est-ouest qui déssert le centre-ville

Inauguration de la nouvelle Place des Arts et de ses infrastructures annexes

Plan massif d’urbanisme de réhabilitation et de rénovation

2007 1992

350e anniversaire de la ville de Montréal

Début des travaux du projet du Quartier des Spectacles

Adoption du Plan d’urbanisme réhabilitation et ouverture du Biodôme et de la Biosphère

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La ville de Montréal a connu au cours de ces quarante dernières années trois évènements majeurs appelés dans le cadre de ce mémoire des manifestations culturelles : l’Expo 67, Les Jeux Olympiques de 1976 et finalement le Festival International de Jazz organisé chaque année depuis 1980. À la question en quoi les manifestations culturelles sont-elles catalyseur d’un développement urbain et architectural ? il nous est alors maintenant possible de répondre en deux temps en dégageant deux phases différentes.

La première phase est celle qui intervient avant la manifestation culturelle et qui vient donc préparer la ville à l’accueil de l’événement. Au cours de cette période qui diffère en fonction de la manifestation, nous avons pu voir avec l’exemple de Montréal naitre un développement périphérique , une modernisation du centre- ville avec la naissance d’une architecture de grande hauteur entrainant l’émergence d’un quartier financier. C’est par la modernisation du réseau routier, la création de nouvelles infrastructures de transport comme le métro de Montréal en 1966 pour Expo 67 et son prolongement pour les Jeux de 76 que le développement de la ville s’impose. La construction des autoroutes facilitant l’accès au cœur de ville étaie grandement cette phase de développement. Ce dernier cas est d’ailleurs assez récurent dans le cadre des manifestations culturelles à caractère international voire mondial : on le retrouve par exemple avec les Jeux Olympiques d’hiver d’Albertville en 1992 qui ont été le prétexte à la construction du système autoroutier de la vallée de la Tarentaise et la ligne de TGV entre Paris et Bourg Saint-Maurice. Les JO auront alors favorisé grandement le désenclavement de toute cette région faisant d’elle aujourd’hui le plus grand domaine skiable au monde. Le Festival International de Jazz jouera lui, par contre, en faveur de la création de voies piétonnes telle une partie de la rue Sainte-Cathe236

Domaine dans la région de la Tarentaise. Rue Sainte-Catherine pietonnisée dans le quartier du Village.

237


rine en 2012 et l’affirmation d’un projet piéton pour la totalité de la même rue en 2014 . Cette « pacification », cet « adoucissement » des modes de déplacement liés au Festival se fait plus lentement, moins radicalement avec maturité, le rythme annuel de la manifestation permettant surement cette maitrise.

Lors de cette première phase on construit également les infrastructures liées aux manifestations culturelles, dans le cadre d’Expo 67 se traduisant par l’aménagement des îles Sainte-Hélène et Notre-Dame et la construction de centaines de pavillons éphémères. Dans le cas des Jeux Olympiques de 1976, on assiste à la création d’un réseau de complexes sportifs par la rénovation de plusieurs salles existantes, (politique engagée par la candidature de Paris pour les Jeux de 2012119) mais aussi et bien entendu à la construction du Parc Olympique de Taillibert. Des logements sont également construits au prétexte des manifestations culturelles afin d’ accueillir les nombreux visiteurs et spectateurs : on peut citer le Village Olympique, qui accueillait les athlètes, Habitat 67 les visiteurs, et dans les nombreux complexes hôteliers qui sont en développement depuis une dizaine d’années dans le centre-ville de Montréal pour accueillir les touristes de la saison festivalière. La seconde phase est celle post manifestation, car le développement d’une ville s’établit effectivement à travers la création et la construction d’infrastructures mais aussi et surtout par le biais d’une insertion de ces infrastructures dans le tissu urbain existant. Dans le cas d’Expo 67, lorsque celle-ci toucha à sa fin, les îles qui semblaient alors cristallisées sur le Saint-Laurent, ont fini par trouver leur sens en tant que parc urbain appelé Parc Jean Drapeau, en l’honneur du 119    http://fresques.ina.fr (consulté le 31.12.13) 238

Maire de la modernisation. Agissant comme un poumon vert de la ville, il accueille des événements ponctuels en toute saison. Certains pavillons perdurent encore tels que le pavillon des Etats-Unis, devenu musée de l’environnement, et Habitat 67, complexes résidentiels. Bien que le Parc fonctionne toute l’année, une éventuelle réinsertion dans un parcours urbain serait intéressante avec la possibilité par exemple d’y aller à vélo, moyen de transport ultra développé à Montréal, via le pont Jacques Cartier. Dans le cadre des Jeux de 1976, la réinsertion du Parc Olympique s’est vue très difficile car non planifiée à l’avance. De plus la spécificité et l’échelle des bâtiments construits à cette occasion empêchent une utilisation continue et donc une réinsertion réussie. Le quartier d’Hochelaga-Maisonneuve cherche alors aujourd’hui à rendre perméable ce site olympique en y important des activités commerciales , éléments dynamiques pour l’arrondissement et nouveau prétexte à graviter autour de ce stade encore inutilisable durant l’année entière . Des plans de mise en valeur patrimoniale et de développement se mettent en place pour redonner vie à un quartier isolé, prenant comme exemple réussi le quartier Monjuïc de Barcelone120, intégrant lui-même ses infrastructures olympiques, telles que Sant Jordi Palace , la tour de l’architecte Calatrava et les éléments patrimoniaux. Les infrastructures du Festival de Jazz, construites a posteriori et étant utilisées à longueur d’année grâce à la création d’un quartier dédié au spectacle, n’affichent pas de problème de réinsertion dans le tissu existant, puisqu’elles viennent au contraire y créer des liens. Dans l’histoire de ces événements, il est possible d’y voir deux tendances différentes, la première, particulièrement utilisée dans le 120    Roult (Romain) « Reconversion des héritages olympiques et rénovation de l’espace urbain: le stade olympique comme vecteur de développement”, 2011 UQAM

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cadre des expositions universelles, est celle de la construction éphémère, la seconde, justifiée par l’échelle des infrastructures, est celle de la conservation. Il est bien évident que la phase post ne s’applique que s’il y a conservation des édifices et des infrastructures des manifestations culturelles. La conservation implique alors, comme nous l’avons dit précédemment, une réinsertion dans la ville, qui peut être fait à travers la réhabilitation par exemple, c’est le cas du Vélodrome de Montréal transformé en musée du vivant, ou d’une utilisation constante du bâtiment, conservant alors sa fonction d’origine. Cette conservation implique alors la création d’un patrimoine de ces manifestations culturelles, un héritage, témoin dans la ville de ces manifestations culturelles.

La conservation de ces édifices, ces nouveaux temples et cathédrales, rentre alors dans la notion d’icône de la ville. À la manière de la Tour Eiffel à Paris ou du Nid d’Herzog et Demeuron à Beijing, ces « monstres » d’architecture s’élèvent dans les cités, révolutionnant à la fois leur champ architectural mais aussi la vision de la ville dans le monde entier. Le Stade de Taillibert est aujourd’hui considéré comme le symbole de la ville et ce malgré l’opinion médiocre de la population locale. L’impact de ces structures n’est donc pas quantifiable puisqu’il continue aujourd’hui d’attirer des millions de visiteurs après leur construction. Un développement de la ville est donc toujours en marche à travers un tourisme accru. Plusieurs villes utilisent d’ailleurs ce type de stratégie, dans ou hors cadre des manifestations culturelles, en engageant des architectes connus et très médiatisés pour construire des bâtiments objets, qui deviendront, du moins c’est l’objectif, les nouvelles icônes de la ville. L’exemple le plus connu est bien sûr celui de Frank O. Gehry avec son musée Guggenheim à Bilbao en 1992, ou plus récemment Zaha Hadid pour le futur stade national de la ville de Tokyo dans l’optique des Jeux Olympiques 2020. 240

Parc du Montjuïc, quartier olympique, Barcelone. Muséeum Guggenheim de Bilbao, F.O. Gehry architecte, 1992.

241


Dans le cadre du Festival de Jazz de Montréal, nous nous sommes posés la question de l’évolution de ces manifestations culturelles et de leurs transformations, leur multiplication et parfois leur perte de sens à travers des évènements trop proches qui se ressemblent et qui ne revendiquent plus rien. Le terme de manifestation est donc à ouvrir, et à le prendre au sens large. Au Québec et à Montréal, d’autres manifestations ont eu lieu, plus récemment et d’autant plus politiques. Le Printemps Érable, manifestation étudiante contre la hausse des frais de scolarité universitaires en 2012, s’est aussi approprié leur ville. Workshops, objets, happenings et performance ont alors vu le jour, transformant le centre-ville et les rues, les teintant de rouge. Grâce à ses œuvres, le Printemps Érable a contribué à un développement de l’art au sein de la ville. Aujourd’hui la « banalité »des évènements et la politisation très forte de ce genre de manifestations culturelles viennent ternir la puissance des impacts sur la ville. Les villes en développement, comme Rio qui reçoit les Jeux de 2016, se lancent dans des projets de médiatisation démesurés qui n’aboutiront pas toujours à des succès ; certaines villes s’endettent, c’est le cas à Montréal, et ne s’en relèvent jamais comme c’est le cas d ‘Athènes et des Jeux de 2004. La modestie des manifestations, comme le Festival de Jazz est peut être une solution vers laquelle les villes devraient se lancer, comptant alors sur un développement local, avec des infrastructures à l’échelle de la ville et tourner vers les besoins de la population. Un rayonnement international de la ville, à travers la médiatisation, semble aujourd’hui essentiel pour un développement économique prospère, mais n’engendre pas forcément des architectures adéquates.

Mouvement Archi Contre pour le Printemps Érable. Parc Olympique Barra pour les Jeux de Rio 2016.

Cependant, il est nécessaire aujourd’hui de venir se poser la question de l’avenir de ces manifestations et de leur viabilité au sein des villes. Il est difficile de totalement exclure l’aspect économique de ces mani242

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festations, puisqu’un endettement est nécessaire dans le cas des Jeux Olympiques par exemple, manifestations culturelles qui ne semble pas, au fil des années avoir perdu de sa valeur, malgré la politisation massive qui les entourent. Cependant, le cas de Montréal soulève une interrogation sur la politique future des Jeux Olympiques en particulier et des manifestations culturelles de grandes ampleurs en général. Bien que les Jeux de 1976 aient presque quarante ans de recul, la politique architecturale de la RIO ne semble pas ou peu avoir évolué et ne semble pas s’inquiéter de la construction de stades dont certaines villes n’ont pas besoin ou n’ont pas les moyens. La politique de la « réutilisation » d’un stade existant implique alors que les villes n’en possédant pas soient alors exclues de la compétition à la candidature. Paris lors de son dossier pour les Jeux 2012, présentait un budget bien inférieur121 que celui de Londres122 en réhabilitant des infrastructures existantes ou créer au paravent pour les évènements sportifs. Il est donc admissible que la construction de nouvelles infrastructures donc de nouvelles architectures, soit donc utilisée comme argument médiatique par la RIO. Lors des Jeux Olympiques de Londres, la ville proposait des bâtiments partiellement démontables, ce qui pourrait alors ouvrir sur une nouvelle politique olympique, bien que ni Rio 2016, ni Tokyo 2020 n’aient choisit cette possibilité. Des infrastructures « éphémères » ou démontables pourraient à la fois réduire les couts mais aussi ne pas perturber le tissu urbain existant dans le cas de ville dense. Or, cette dernière théorie viendrait en partie à l’encontre de celle de l’héritage urbain et la conservation de témoins architecturaux. C’est donc dans un mélange de ces différentes politiques que doivent se placer les Jeux Olympiques, à l’image de l’Exposition Universelle qui construit

de l’éphémère tout en s’assurant de la pérennité des architectures symboles.

L’exemple de Montréal montre de quelle manière les manifestations culturelles viennent marquer une ville, de façon positive ou négative, et créant des opportunités pour améliorer et développer le tissu urbain et le panel architectural environnant et existant. Parfois, et c’est le cas du Stade Olympique de Taillibert, certains problèmes non résolus sont vecteurs d’un développement sur plusieurs décennies, agissant alors comme des plans directeurs pour le quartier. Ces manifestations culturelles sont de réels catalyseurs au développement d’une ville bien que chacun de leurs impacts doit être pris en compte lors des éditions suivantes.

121    http://www.lemonde.fr/sport/article/2005/07/05/ (consulté le 31.01.12)

122    http://www.linternaute.com/sport/dossier/jo2012/comparatif/ (consulté le 31.01.12) 244

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BIBLIOGRAPHIE

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Jacques Lachapelle, professeur Université de Montréal, membre du comité de l’avenir du stade olympique de Montréal. Georges Adamczyk, professeur Université de Montréal. VISITES

2013 Chicago 2013 Vancouver 2012 Parc Olympique Montréal 252

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265


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Mémoire de master réalisé par Juliette Estiot sous la direction de Gilles Bienvenu, ENSA Nantes, 2013 -2014.

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