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COUR D’APPEL DU TEXAS OPINION 10 SEPTEMBRE 2003
DEVANT LA COUR D'APPEL DU TEXAS ------------------------------------------------------N° 74,400 ------------------------------------------------------HENRY W . SKINNER, Requérant Contre L'ETAT DU TEXAS --------------------------------------------------------EN APPEL DIRECT DE LA COUR DU COMTE DE GRAY --------------------------------------------------------Juge PRICE a rédigé l'opinion de la Cour,
OPINION Le requérant a été inculpé de meurtre capital et condamné à mort selon l'article 19.03(a)(7)(A) du Code Pénal du Texas et selon l'article 37.071, Section (2)g du Code de Procédure Pénale. Cette Cour a confirmé la sentence du requérant lors de son appel direct, Skinner v Texas, 956 S. W. 2d 532 (Tex. Crim. App. 1997). Le requérant a déposé une requête auprès de la Cour qui l'a condamné afin d'obtenir des tests ADN conformément à l'article 64 du Code de Procédure Pénale du Texas. La dite Cour a rejeté cette requête, mais n'a pas énoncé de principe de détermination selon l'article 64.03 du Code de Procédure Pénale du Texas. Le requérant a ensuite fait appel de cette décision auprès de cette Cour. Le recours a été renvoyé devant la juridiction de jugement afin d'obtenir une ordonnance conforme aux critères de l'article 64.03. Ensuite la juridiction de jugement a publié une ordonnance stipulant que le dossier du requérant n'est pas conforme aux critères de l'article 64.03(a)(2)(A) et 64.03(a)(2)(B). (1). Le requérant a alors fait appel de cette ordonnance. Le requérant estime que la juridiction de jugement 1/ a rejeté sa demande pour l'obtention de tests ADN et que cette décision est erronée et 2/ a violé les principes de droit inhérents à la procédure d'appel du requérant en refusant de lui accorder la procédure liée à l'article 64. Nous confirmons cette décision.
FAITS Aux alentours de minuit le 31 décembre 1993, Twila Busby et ses deux fils, Elwin et Randy Caler, ont été assassinés au domicile qu'ils partageaient avec le requérant. Celui-ci a été retrouvé vers trois heures du matin au domicile d'Andrea Reed, habillé de vêtements couverts du sang des deux victimes. L'Etat a effectué plusieurs prélèvements sur le lieu du crime et sur les effets personnels du requérant. Ceux-ci comprenaient les vêtements portés par le requérant, du sang prélevé sur le lieu du crime, des empreintes digitales, un couteau dont la lame était couverte de sang, un sac en poubelle contenant un couteau et ce qui semblait être un torchon taché d'une substance ressemblant à du sang, un manche de pioche, un kit de viol prélevé sur la victime, des coupures d'ongles de la victime et des cheveux des victimes. L'Etat n'a pas demandé l'analyse scientifique de tous ces éléments. Bien que l'Etat ait fait tester le sang trouvé sur les vêtements du requérant, le sang et les cheveux prélevés sur une couverture qui recouvrait partiellement l'une des victimes, et des cheveux retrouvés sur le dos et les joues d'une des victimes, il n'a pas fait analyser les couteaux, le manche de pioche, le kit de viol, les coupures d'ongles ou les autres cheveux. L'Etat a également demandé l'analyse des empreintes digitales. L'empreinte d'une main ensanglantée retrouvée dans la chambre où l'une des victimes avait été tuée et sur les poignées de porte dans la maison était celles du requérant, mais un jeu d'empreintes sur le sac contenant l'un des couteaux ne correspondait pas à celles du requérant.
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Lors du procès, l'avocat de la défense a présenté une théorie selon laquelle le requérant était inconscient au moment des faits à cause d'une intoxication. L'avocat de la défense a ensuite plaidé que le procureur n'avait pas rempli sa mission puisqu'il n'avait pas fourni de preuves car il n'avait pas demandé l'analyse ADN de l'ensemble des éléments, y compris les armes du crime. L'avocat de la défense a également présenté une série de thèses à décharge - preuve de degré d'intoxication du requérant à l'heure des crimes, la blessure d'une main du requérant, et un suspect potentiel, Robert Donnell, un membre de la famille des victimes. Le jury a écouté le témoignage d'un expert toxicologue concernant la capacité physique du requérant cette nuit-là ainsi que le témoignage d'un kinésithérapeute spécialisé dans les blessures de la main. De plus, le jury a entendu un témoignage indiquant que Donnell avait harcelé Mlle Busby quelques heures avec le crime, il était connu que cette personne possédait un couteau et qu'il avait un historique de violence avec les femmes. Finalement le jury a entendu les témoignages concernant le manque d'analyse demandée par l'Etat, analyses que demande le requérant aujourd'hui. Suite à la condamnation du requérant, le Professeur David Protess de l'Ecole de Journalisme de Medill à l'Université de Northwestern de Chicago a imploré l'Etat de faire analyser tous les éléments. L'Etat a alors envoyé la plupart de ces éléments au laboratoire GeneScreen, un laboratoire scientifique privé de Dallas, en vue d'effectuer ces analyses. Ces tests ont été ordonnés conformément à la mise en application de l'article 64. (2) GeneScreen a testé des cheveux et des échantillons de fibres prélevés sur Mlle Busby, un cheveu prélevé sur le manche de la pioche ainsi que plusieurs tâches de sang prélevées sur le lieu du crime. Toutefois certains éléments n'ont pas encore été analysés. GeneScreen n'a pas donné de rapport sur l'analyse des coupures d'ongles et du kit de viol alors que ces échantillons faisaient partie de ce que l'Etat leur avait transmis. De plus, l'Etat n'a pas non plus envoyé les deux couteaux et la veste avec du sang et des cheveux, éléments récupérés sur le lieu du crime. C'est pourquoi le requérant a déposé une requête afin d'obtenir l'analyse des deux couteaux, des coupures d'ongles de Mlle Busby, les cheveux prélevés sur la veste et les empreintes digitales prélevées sur le sac en plastique qui contenait l'un des couteaux.
Analyse Le requérant déclare que la juridiction de jugement a fait une erreur en estimant que son dossier n'était pas conforme à l'article 64.03(a)(2)(A) et 64.03(a)(2)(B). L'article 64.03(a)(2)(B) stipule que le requérant doit prouver clairement que la demande de tests ADN n'a pas été déposée dans le but de retarder l'exécution de sa sentence ou l'administration de la justice. Le requérant n'a pas de date d'exécution fixée et son appel devant la Cour Fédérale est actuellement en cours. Les tests pourraient être demandés avant que la date d'exécution du requérant ne soit fixée ou qu'une opinion ne soit rendue sur son pourvoi devant la Cour Fédérale. Dans ce cas, nous estimons que la décision de juridiction de jugement est un abus de discrétion qui n'est pas justifié par les faits du dossier. C'est pourquoi nous renversons la décision de la juridiction de jugement quant à la conformité de l'article 64.03(a)(2)(B).
L'article 64.03(a)(2)(A) stipule que le condamné doit établir concrètement qu'une probabilité raisonnable existe que lui/elle n'aurait pas été inculpé(e) et/ou condamné(e) si des résultats d'analyse à décharge avaient été obtenus par le biais des tests ADN. Cette Cour accorde l'interprétation suivante qu'une probabilité raisonnable existe que des résultats de tests ADN à décharge puissent prouver l'innocence de la personne. Kutzner v State, 75 S. W. 3d 427, 438 (Tex. Crim. App. 2002). Nous avons réaffirmé l'utilisation de ce standard dans d'autres cas. Voir Bell v State, 90 S. W. 3d 301 (Tex. Crim. App. 2002); Rivera v State, 89 S. W. 3d 55 (Tex. Crim. App. 2002). Après avoir revu les éléments, nous estimons que la juridiction de jugement démontre que le dossier du requérant n'est pas conforme à ce standard. Le requérant souhaite l'obtention de tests ADN sur les deux couteaux trouvés sur le lieu du crime, le kit de viol prélevé sur Mlle Busby, la tâche ressemblant à du sang sur un torchon retrouvé sur le lieu du crime, le sang sous les coupures d'ongles de Mlle Busby ainsi que le cheveu et le sang prélevé sur une veste trouvée dans la maison. En admettant que chaque élément fournisse un résultat à décharge pour le requérant, celui-ci ne se conformerait pas plus au standard établi par Kutzner car les preuves ADN fournies précédemment par GeneScreen se sont avérées à charge. L'analyse des paillettes de sang prélevées sur un cheveu trouvé dans la main droite de Mlle Busby lors de l'autopsie a donné un résultat positif par rapport à l'ADN du requérant et de Mlle Busby. Cette analyse prouve que le mélange du profil génétique de la victime et du requérant a bien eu lieu lors d'une lutte entre les deux individus lorsque la victime tentait de sauver sa vie. Parce que le profil génétique du requérant mélangé avec celui de la victime a été retrouvé lors de l'autopsie, il n'y a rien qu'un autre
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élément trouvé sur le lieu du crime, même s'il révélait la présence d'une tierce personne, ou qui puisse nourrir le moindre doute sur la présence du requérant sur le lieu du crime ou sur sa participation aux crimes. Ceci étant établi, la présence d'ADN d'une tierce personne sur le lieu du crime ne constituerait pas une preuve concluante d'innocence. Voir Bell, 90 S. W. 3d à 306. Le standard requis par cette Cour pour accorder des analyses génétiques selon l'article 64 est "une preuve concluante d'innocence". Kutzner, 75. S. W. 3d à 438-439. C'est pourquoi la juridiction de jugement a correctement conclu que le requérant ne se conformait pas aux critères établis par l'article 64.03(a)(2)(A). Dans la partie de sa requête relevant de l'article 64.03(a)(2)(A), le requérant explique que la juridiction de jugement a fait erreur en ne se conformant pas à 1/ la mise à disposition des notes d'expertise (3) du laboratoire GeneScreen et 2/ la demande d'analyse comparative des empreintes digitales relevées sur le sac poubelle contenant l'arme du crime potentiel avec les empreintes digitales de Donnell, un autre meurtrier potentiel. Dans ce cas, le personnel du bureau de la police scientifique du Comté de Tarrant, les laboratoires Roche et GeneScreen ont dû regrouper des notes. Le requérant ne sait pas si ces notes existent, d'ailleurs il ne se réfère à aucune jurisprudence lui permettant d'exiger ces notes d'expertise. Au contraire, le requérant prétend que les rapports d'expertise de GeneScreen sont ambigus. Il demande expressément à la Cour d'exiger la mise à disposition de ces notes pour plus de clarification. Les quatre rapports de GeneScreen présents dans le dossier établissent clairement les résultats des tests dans le paragraphe de conclusion. Bien que les rapports ne citent pas l'analyse de chacun des éléments, le rapport du 2 octobre 2002 déclare que "Twila Busy et Henry Watkins Skinner sont deux donateurs potentiels du profil génétique mixte identifié sur le cheveu retrouvé dans la main droite de Twila Busby." Nous pensons que ce rapport n'est pas ambigu, et que nous ne sommes pas obligés d'exiger la mise à disposition des notes d'expertise par le laboratoire. De plus, le requérant déclare que la juridiction de jugement a fait en erreur en ne soumettant pas une analyse comparative des empreintes digitales (4) trouvées sur le sac poubelle noir qui seraient potentiellement celles d'un autre meurtrier possible, Donnell, comme il l'avait été évoqué lors du procès. (5) Dans Kutzner, l'interprétation que cette Cour a faite du texte et de l'historique juridique de l'article 64.03(a)(2)(A) ne laisse aucune place à la considération de la juridiction de jugement quant à des éléments découverts après le procès. Kutzner, 75 S. W. 3d à 439. Dans Kutzner, nous partons du principe, sans prendre de décision, que l'article 64.03(a)(2)(A) permettrait à la juridiction de jugement de prendre en compte de nouvelles informations. Nous concluons que la nouvelle information que Kutzner avait avancée dans sa requête pour obtenir des tests ADN n'avait pas pour autant amoindri les conclusions de la juridiction de jugement basée sur l'article 64.03(a)(2)(A) car des nombreux éléments inclus dans le dossier initialement établissaient clairement que Kutzner n'aurait probablement pas été inculpé et/ou condamné si les résultats de ses tests ADN s'étaient avérés à décharge. De la même façon, la demande du requérant de faire comparer les empreintes digitales ne prouverait que la présence d'une tierce personne. En tant que telle, cette nouvelle information ne remettrait pas en cause les conclusions de la juridiction de jugement basées sur l'article 64.03(a)(2)(A). Par conséquent, la juridiction de jugement a eu raison de rejeter la demande du requérant pour obtenir une analyse comparative d'empreintes digitales. En conclusion, le requérant estime que l'erreur de la juridiction de jugement de fournir de telles analyses remet en question la nature de ce statu. Le juge de la juridiction de jugement a rejeté la requête du requérant se référant au Chapitre 64 car celui-ci n'était pas conforme aux articles 64.03(a)(2)(A) et 64.03(a)(2)(B). Bien que la juridiction de jugement doive fournir les critères de détermination comme l'exige ce statu, cette Cour peut utiliser à nouveau une révision de l'application de la loi sur les faits qui ne dépend aucunement de la crédibilité ou du comportement d'un témoin. Rivera v State, 89 S. W. 3d 55, 59 (Tex. Crim. App. 2002). L'article 64.03(a)(2)(A) stipule que le requérant doit démontrer, de façon tangible, qu'une probabilité raisonnable existe qu'il ou elle n'aurait pas été inculpé(e) ou condamné(e) si des résultats disculpatoires avaient été obtenus par le biais de tests ADN. Cette Cour a interprété l'article 64.03(a)(2)(A) et exigé qu'une probabilité raisonnable que des résultats de tests à décharge prouvent l'innocence du requérant. Kutzner, 75 S. W. 3d à 439. Cette Cour a par ailleurs établi que: "la question finale si une probabilité existe que des résultats tests à décharge prouveraient l'innocence basée sur l'application de la loi sur les faits si celle-ci ne remet pas en question la crédibilité ou le comportement d'un témoin, ce qui entraînerait une révision de novo". Rivera, 89 S. W. 3d à 59. De façon similaire, l'article 64.03(a)(2)(B) pose la question de savoir si une telle démarche n'est pas effectuée dans le seul but de retarder l'exécution de la sentence ou l'administration de la justice est également une question d'application de la loi sur les faits, c'est pourquoi une révision de novo est accordée.
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Les conclusions de la juridiction de jugement, lorsqu'on considère le contenu du dossier, sont suffisantes pour nous permettre de décider. (6). La juridiction de jugement a conclu que le requérant n'a pas su prouver que son dossier était conforme aux critères de l'article 64.03(a)(2)(A) et 64.03(a)(2)(B). Ceci ne s'avérera certainement pas adéquat dans tous les cas de figure, mais cette Cour apprécierait que la juridiction de jugement fournisse des conclusions plus détaillées afin de faciliter cette révision. Mais en ce qui concerne le requérant, le dossier correspond aux conclusions de la juridiction de jugement et prouve que le requérant n'a pas démontré de façon tangible la probabilité raisonnable selon laquelle il n'aurait pas été inculpé et/ou condamné si les résultats de tests ADN s'avéraient à décharge.
Parce que nous sommes d'accord sur le fait que le dossier du requérant n'est pas conforme à l'article 64.03(a)(2)(A), nous confirmons la décision de la juridiction de jugement qui a rejeté la requête pour l'obtention de tests complémentaires selon le chapitre 64.
Opinion rédigée et rendue publique le 10 septembre 2003.
(1) Bien que le requérant invoque le statu de l'article 64.01 dans sa requête, la juridiction de jugement n'a pas émis de conclusion au sujet de l'article 64.01. Par conséquent, nous présumons que la juridiction de jugement a décidé que la demande du requérant est conforme à l'article 64.01. (2) Le décret d'application du chapitre 64 a été passé en avril 2001. Le juge d'instruction a envoyé les échantillons au laboratoire GeneScreen en juillet 2000. (3) Les techniciens du laboratoire établissent des notes d'expertise, qui en général retracent les différentes étapes de travail relatives à la récupération des scellés, à l'analyse et à la manipulation de ces échantillons. De plus ces notes peuvent également contenir des conclusions préliminaires et des résultats. La quantité d'information contenue dans de telles notes varie d'un laboratoire à un autre, mais leur contenu est utilisé pour établir le rapport d'expertise final. (4) Le chapitre 64 traite des analyses scientifiques ADN. Les analyses d'empreintes digitales ne sont pas prises en compte par cette loi. (5) Bien que Donnell soit maintenant décédé, ses empreintes digitales existent toujours dans son casier judiciaire. (6) La demande du requérant pour l'obtention de tests ADN dans le cadre du chapitre 64 comporte deux témoignages sous serment de deux témoins ayant déposés à la barre lors du procès, témoignages qui remettent en question la crédibilité et le comportement et qui par conséquent devraient être revus par la juridiction de jugement. Celle-ci n'a pas établi la crédibilité de ces témoignages. Parce que les résultats à charge du laboratoire GeneScreen ne permettent pas au requérant de se conformer au standard de Kutzner, les conclusions de la juridiction de jugement à l'égard de ces témoignages seront sans conséquence quant à la décision prise par rapport au requérant et l'article 64.03(a)(2)(A). Même si la juridiction de jugement estime que ces témoignages sont importants, le dossier du requérant ne sera pas conforme au standard de Kutzner en ce qui concerne la probabilité raisonnable de prouver son innocence.
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