NOUVELLES DE L’ENFER
11 FÉVRIER 2002
Des Nouvelles de l’Enfer Les conditions de vie à Polunsky Par Hank Skinner Le 11 février 2002, Chers tous, Vous m’avez souvent entendu (ou lu) parler de l’injustice et l’inefficacité du système de plaintes internes qui doit permettre aux prisonniers de faire valoir leurs droits, ainsi que la façon que les fonctionnaires ont de détourner et de déformer les faits afin de justifier notre classification à un niveau disciplinaire très restrictif. L’un des exemples les plus flagrants que j’utilise souvent est lorsqu’un détenu se masturbe dans sa cellule. Si une gardienne passe devant sa porte, regarde à l’intérieur de la cellule et le voit, elle peut prétendre, à tort, que le détenu se « masturbe en public » ce qui est très vite transformé pour finir sur un rapport disciplinaire pour « agression sexuelle ». Inutile de dire qu’un détenu, enfermé dans sa cellule, derrière une porte pleine en acier entre lui et une gardienne dans la coursive, ne pourrait jamais la toucher – donc il ne peut y avoir aucune sorte d’agression sexuelle qui, selon la loi, requiert un attouchement physique sur les parties génitales (de l’autre personne qui dit avoir été attaquée) dans le seul but d’une gratification sexuelle par la personne commettant l’agression. Même si le prisonnier recherchait l’attention de la gardienne, ce n’est, tout au plus, qu’une attitude lubrique, mais en aucun cas une agression sexuelle ou autre. Mais les fonctionnaires de cette prison qualifient cela d’agression afin d’utiliser un critère du règlement qui permet de nous placer au niveau III, qui requiert une agression caractérisée. Ils placent des détenus au niveau III pour six mois ou plus, incarcérés sans avoir accès à des produits d’hygiène indispensables, juste pour s’être tripotés. N’oubliez pas que pour nous, la masturbation n’est pas un acte sexuel en tant que tel, mais à peine un moyen de se débarrasser d’un peu de stress. Ci-dessous est le texte d’une lettre adressée au directeur James Zeller qui illustre bien pourquoi et comment ce système de classification est faussé, inadapté et arbitraire. Elle démontre aussi pourquoi ce système interne de plainte est tout à fait inadapté aux problèmes posés par les décisions aberrantes de la commission de classification. Sans aucune possibilité d’appel pour nous alors que Zeller et ses bouffons se prennent pour Dieu et que le Major Lester place les détenus en restriction disciplinaire comme bon lui semble, vous comprendrez mieux pourquoi les prisonniers ne croient plus en rien, ne respectent plus ce système sensé leur offrir un minimum de protection. Comme le directeur est le premier à ne pas respecter la loi ou le règlement, donnant de ce fait l’exemple à ses employés, il est facile de comprendre le comportement actuel des prisonniers, ils n’ont aucun autre choix. Le 11 février 2002, Monsieur le Directeur, Je me permets d’attirer votre attention sur le fait que nous avons de très grandes difficultés à faire valoir nos droits, à travers le système interne de plaintes, ici dans le bloc F du bâtiment 12. Les gardiens en charge de ce type de procédure ne viennent jamais ici pour récupérer nos formulaires de plaintes. Lorsqu’un gardien (CO III) a été attrapé en train de détruire la plainte d’un détenu, le directeur Treon avait rédigé un I.O.C. précisant que ces gardiens-là passeraient désormais quotidiennement dans les blocs de détention pour récupérer ces formulaires de la
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main des prisonniers concernés. Nous n’avons aucun accès à la boîte réservée aux plaintes à l’emplacement D dans notre bloc et les gardiens en charge de la surveillance ne sont pas autorisés à ramasser ce type de documents pour les déposer dans la boîte. La semaine qui vient de s’écouler est un exemple parfait, le Lt Worthy n’est pas venu prendre les formulaires de plaintes lundi, mardi ou mercredi 2 – 4, 5, 6 février. Lorsque je m’en suis plaint auprès des Sergents Poole, Shomer et Griffin, Worthy est finalement venu récupérer les plaintes jeudi 7 février 2002. Lorsqu’il vient, il se rend à la boîte pour prendre les documents, signe le registre du bloc et s’en va. Ceci réduit grandement notre accès à la procédure de plaintes internes. Nous pouvons individuellement déposer une (1) plainte tous les sept (7) jours. Lorsque le gardien retarde son passage, nous avons de la chance si nous pouvons déposer une (1) plainte tous les dix ou douze (10-12) jours soit deux fois par mois au lieu de quatre. Lorsque je dépose une plainte, avec toutes les preuves nécessaires pour prouver ce que j’avance, comme par hasard, celle-ci est « perdue » et est classée sans suite. Je vous remercie de bien vouloir lire les trois (3) plaintes ci-jointes afin d’illustrer mon propos. Aucune de ces plaintes n’a été prise en considération. J’ai envoyé des I-60 régulièrement à Messieurs Worthy et McLeod, qu’ils ont ignorés, même après remis copies de ces plaintes en mains propres à Mr Worthy alors que je me rendais au parloir, et ce devant de nombreux témoins. Lorsque que vous répondez vous-mêmes à ces plaintes, vous rejetez des preuves flagrantes et n’apportez aucune solution. Prenez juste un exemple : le critère requis pour être placé au niveau III, selon le Death Row Plan*, doit être une agression avant que le prisonnier ne soit placé au niveau III. Je n’ai jamais eu de rapport disciplinaire pour agression pendant les six (6) derniers mois. Le 18 janvier 2002, j’ai déposé un appel à l’encontre d’une décision du DRCC* signée par Mr Chance. Le 7 février 2002, vous avez signé une réponse mensongère qui dit ceci (#20002084532) « votre classification disciplinaire a été revue et ajustée, elle démontre que vous avez été placé au niveau III à juste titre. Aucune autre action ou procédure n’est jugée nécessaire ». Cette réponse est mensongère puisque selon le critère du niveau III un comportement agressif ou violent caractérisé doit être constaté par la commission des délits violents commis par les prisonniers. Je n’ai jamais commis de tels actes par conséquent je ne suis pas à ma place au niveau III. Fin de l’histoire. Vous et vos sous-fifres répétez constamment le même sermon sur la responsabilité personnelle de chacun pour ses propres actions, en adéquation totale avec le règlement. Pourtant, vous vous comportez comme un hypocrite car quoi que vous fassiez, vous faites ce que vous voulez et vous tentez ensuite de trouver quelque chose dans le règlement qui vous permet de justifier vos actions. DRP 7/2000-Page 15 : « les détenus assignés au niveau II doivent être des perturbateurs chroniques qui violent le règlement, toutefois, ils ne doivent pas, dans leur passé récent (les trois derniers mois), avoir eu de comportement violent ou agressif ». DRP 7/2000-Page 16 : « les détenus assignés au niveau III doivent être des perturbateurs chroniques et avoir un comportement violent ou agressif (ie. Avoir un passif de violence, avec arme, passif de possession d’armes, agressions ou tentatives d’agression sur les employés, bagarre avec ou sans arme). Le détenu sera : A/ un risque éventuel d’évasion (avec passif d’évasion ou tentative d’évasion avec agression ou il a été déterminé que le détenu, selon les circonstances de son évasion et/ou tentative d’évasion, que celui-ci comporte un risque élevé de commettre une agression).
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B/ une menace pour la sécurité de l’établissement sur la base de preuves documentées de plusieurs violations disciplinaires (de nature agressive ou violente) ; ou C/ une menace pour l’ordre et la sécurité de l’établissement, à la sécurité physique de ses employés ou des autres détenus à cause d’un comportement violent ou agressif, ce qui inclut les détenus préalablement identifiés et confirmés en tant que membres d’un gang de rue ». L’abréviation « i.e » est utilisée pour citer les extraits du règlement est en fait une abréviation latine « id est » qui signifie en Anglais « that is » ou « that is to say » (c’est à dire) et préface une explication ou une clarification. En d’autres termes, le critère requis pour le niveau III est, comme il est écrit, le seul et unique critère requis et vous n’êtes pas libre d’y ajouter vos « interprétations » personnelles. Mon dernier délit « violent » datait du 24 août 2001, lorsque le gardien Whitfield a tenté de me pousser dans ma cellule mais en fait à essayer de me fracasser contre la porte alors que je ne pouvais l’arrêter puisque j’étais menotté derrière le dos. Je me suis penché pour éviter que ma figure ne tape contre la porte et Whitfield s’est cogné contre moi. Pour justifier son utilisation excessive de la force, il m’a faussement accusé de « l ‘avoir agressé » ce qui d’ailleurs n’a causé aucun dégât physique ou autre. Il y a de cela plus de six (6) mois maintenant, donc deux fois la durée requise pour redescendre au niveau II. D’où votre réponse incorrecte à l’étape 1 de la plainte I-127 #2002084532. Soit vous corrigez cette erreur, soit je vous assigne au tribunal à titre individuel pour avoir violer mes droits constitutionnels en ayant enfreint également le règlement. J’attends votre réponse avec impatience. Sincèrement, H.W. Skinner #999143 * Death Row Plan : vient en complément du règlement général qui définit les conditions d'incarcération. Le Death Row Plan comporte des conditions particulières qui ne s'appliquent qu'aux condamnés à mort. * DRCC – Death Row Classification Commission
Ceci étant dit, ces prisonniers à qui on a confisqué leurs affaires – Paul Colella 999045, Eddie Johnson 999236, Rich Rhoades 999049 et Richard Cartwright 999224, pour n’en citer que quelques uns – ont tous essayé patiemment de récupérer leurs livres, magazines, fournitures, timbres, papiers juridiques et autres affaires qui avaient été illégalement confisquées selon les ordres de Zeller. Ils en ont parlé avec les gradés, déposé des formulaires I-60, rempli la paperasse nécessaire, rien n’y a fait. Certains d’entre eux attendent depuis plus de quatre (4) mois des objets qu’ils ne peuvent pas remplacer et qui n’auraient jamais dû être confisqués de toutes façons. Imaginez un peu leur frustration quand ils ont des timbres et des stylos dans leurs affaires, mais que la cantine n’en a plus, ils ne peuvent pas utiliser ce qu’ils ont (puisque c’est le service des objets personnels qui les garde) et ils ne peuvent pas non plus en acheter d’autres en attendant. Samedi matin, le 9 février 2002. C’est encore la Bérézina. Ils se sont tous rebiffés dans la cour de récréation et ont refusé de sortir tant que leurs affaires ne leur sont pas rendues. Les équipent se sont suivies toute la journée, passage à tabac après passage à tabac. Le Major Hunter les a même laissés utiliser un lance-grenade 37mm, ils ont menacé Paul avec et ils l’ont utilisé sur Rick. Il raconte qu’ils ont essayé de lui tirer dans la tête. Ils ont raté mais ça a fait ricochet sur le mur et il a été blessé. C’est de la folie. Ce 37mm est utilisé pour disperser une foule, comme dans une cour de récréation de population générale qui ferait la taille d’un terrain de foot quand il y a 200 ou
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300 prisonniers qui se révoltent. Ce n’est pas conçu pour être utilisé dans un espace confiné comme l’une de nos petites cours de récréation qui n’est faite de 4 murs en béton et de verre avec une petite ouverture vers le ciel mais qui, en fait, est à peine plus grande que notre cellule de récréation intérieure. Vous vous souvenez peut-être, il y a quelques années, à la prison d’Estelle le directeur (Fred Figuroa, je crois que c’était son nom) s’était fait virer pour avoir autorisé l’utilisation d’une de ces armes à 37mm à l’intérieur d’une cellule. Ce qu’ils ont fait à Rick n’est pas différent, en fait, c’est même pire d’une certaine manière. Je ne sais pas où tout cela va nous mener mais une chose est certaine, tout prend des proportions hors de contrôle en l’absence d’une intervention pour rectifier le tir, ça va finir par causer la mort d’un de ces prisonniers, ou en défigurer un à vie. Je vous demande à tous de prier pour nous. Hank Skinner #999143 PS. Paul Colella va écrire un rapport détaillé à propos de ce qu’il s’est passé.
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