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Un effet Unesco sur tout le territoire
from Dossier UNESCO
by Kilkoa
Huit ans après l'inscription des Coteaux, Maisons et Caves de Champagne sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco, le territoire a profondément changé son rapport au tourisme. Cette reconnaissance internationale a insufflé une véritable dynamique collective, reconnue par tous les acteurs.
Le champagne et la Champagne sont intimement liés. Le breuvage réputé comporte en lui la terre qui l’a vue naître. C’est cette connexion que Pressoria, situé à Aÿ-Champagne, souhaite partager avec ses visiteurs. Et quoi de mieux pour cela que de la vivre ?
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Les cinq sens sont ainsi mis à contribution pour une expérience immersive dans ce paysage viticole unique. Un voyage sensoriel au sein d’un bâtiment patrimonial conjuguant culture et nature tout en rendant hommage à son histoire.
Un haut lieu du patrimoine architectural et industriel
L’ancien centre de pressurage Pommery est ainsi un lieu symbolique du patrimoine immatériel de la Champagne. Construit en 1902 et actif jusqu’en 2002, l’édifice renaît plus tard sous l’égide de la Communauté de Communes de la Grande Vallée de la Marne (CCGVM) qui en a fait un acteur essentiel de la valorisation de l’excellence du savoir-faire champenois. La volonté a été de conserver des traces du passé pour préserver l’âme des pressoirs et y allier la modernité de la scénographie.
Des expériences interactives et immersives
Le nouvel équipement touristique dédié aux vins de Champagne ouvre en juillet 2021 sous le nom de Pressoria avec l’ambition de rendre ludique la découverte d’un univers mystérieux. On peut toucher la craie, sentir l’odeur de la terre humide, entendre le cycle des saisons, voir évoluer les racines sous nos pieds et goûter le fruit du travail de ces Hommes. Le visiteur est plongé dans tous les détails de la vie de ce terroir si riche et de son vin à travers dix salles offrant des innovations techniques.
A la fois ludique et didactique, le parcours est rythmé d’écrans tactiles, jeux de lumière, bandes sonores, films, ambiances olfactives qui rendent vivante cette visite accessible à tous.
Enfin, pour prolonger l’expérience, Pressoria dispose d’une boutique, d’espaces à la location et organise des expositions temporaires d’artistes locaux ainsi que des rendez-vous originaux. Retrouvez « les rdv Pressoria », avec notamment des ateliers de sonothérapie, séances de yoga, foodtruck… Pressoria est une belle porte d’entrée pour découvrir la richesse des trésors de notre région.
PRESSORIA 11 boulevard Pierre Cheval, 51160 Aÿ-Champagne Réservations 03.26.77.98.77 ou contact@pressoria.com www.pressoria.com
Ouvert tous les jours sauf les jeudis, de 9h30 à 18h30
Le 4 juillet 2015, l’Unesco reconnaissait l’intérêt exceptionnel pour l’héritage commun de l’humanité des Coteaux, Maisons et Caves de Champagne. La récompense d'un travail de plus de dix ans, porté par une équipe d’élus et de professionnels du champagne, au premier rang de laquelle figurait Pierre Cheval, décédé à 66 ans, quelques mois après cette consécration collective.
Huit ans après, tous les Champenois, ou presque, savent que leur région est inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco, mais beaucoup ne savent pas forcément ce que cela recouvre. « Globalement, on voit l’impact, il y a un élan international de visiteurs qui est plus important, une qualité d’accueil bien supérieure et des propositions touristiques foisonnantes, confirme Frédéric Dricot, gérant du bar à champagne C La Nautique à Épernay et observateur avisé de la vie touristique champenoise. Mais on a parfois du mal à matérialiser ce que ça veut dire, l’Unesco. »
Ce bien, c’est d’abord trois zones : une centrale qui regroupe les trois secteurs des coteaux historiques entre Hautvillers et Mareuil-sur-Aÿ, de la colline Saint-Nicaise à Reims et de l'avenue de Champagne et du Fort Chabrol à Épernay, une zone tampon tout autour et enfin une zone d’engagement qui concerne l’ensemble de l’AOC Champagne. « C’est la complexité de notre site qui est un paysage culturel s’étendant sur 320 communes, admet Amandine Crépin, directrice de la Mission Coteaux, Maisons et Caves de Champagne, l’association chargée de faire vivre et de préserver cette inscription. C’est très grand, ça peut être difficile à appréhender par rapport à une cathédrale, par exemple, qui est un patrimoine au sens classique. En plus d’un territoire, il y a toute une dimension immatérielle, liée au savoir-faire des Hommes. » Mais selon la directrice de la Mission, ce 4 juillet 2015 a tout changé pour notre territoire. « Aujourd’hui, quand on évoque la Champagne, on voit les coteaux, les architectures des maisons de négoce, les villages de vignerons, les caves… Ça a permis de donner du contenu à une destina- tion qui n’en avait peut-être pas. C’est tout le paradoxe de cette région qui fabrique un produit mondialement connu, dans une région qui l’est beaucoup moins. » Bien avant l’Unesco, il y avait les routes touristiques du Champagne, un ensemble de circuits fléchés à travers le vignoble champenois. Même si la Champagne profitait depuis longtemps de la manne touristique, ces quelques centaines de panneaux joliment décorés étaient sans commune mesure avec l’effet Unesco. « En 2015, il y a eu plus de 1 000 retombées médiatiques à travers toute la planète. On a parlé du territoire dans le monde entier, se souvient Amandine Crépin. L’inscription, c’est une reconnaissance internationale. Ensuite, un chemin s’est construit, il y a eu une prise de conscience collective. »
Pour Dominique Lévêque, maire d’Aÿ depuis 1989, proche de Pierre Cheval et donc fin connaisseur du dossier, l’Unesco est venue couronner un travail entrepris plusieurs années auparavant. « C'est un facteur déclenchant, mais il y avait déjà eu une prise de conscience extrêmement forte que l’œnotourisme était une carte à jouer. » Selon les chiffres de l’office de tourisme d’Hautvillers qu’il a compilés, pour 11 % des visiteurs, la première raison qui les a poussés à visiter la Champagne, c'est l’Unesco. « Ça peut paraître assez faible en comparaison du champagne, qui est à 41 %, mais c’est un tout qui fait l’attractivité de notre région. L’Unesco, c’est la cerise sur le gâteau. »
Hautvillers, justement, berceau du champagne depuis qu’elle a accueilli le moine Dom Pérignon à la fin du XVIIe siècle, profite depuis plusieurs décennies d’une fréquentation touristique importante. Mais alors qu’il y a quelques années encore, les visiteurs ne pouvaient être accueillis que le week-end ou sur rendez-vous, les bars à champagne y ont poussé comme des champignons. C’est le cas également à Épernay (lire par ailleurs), mais aussi dans les villages, où de plus en plus de vignerons ont compris l’importance de recevoir les touristes sur les exploitations. « En presque dix ans, on constate que la Champagne a beaucoup évolué, notamment dans sa mise en valeur touristique, analyse Amandine Crépin. Les d’offres d’accueil et la fréquentation des sites se sont multipliées. » C’est vrai aussi pour les activités culturelles et de loisirs avec, par exemple, le musée d'Épernay, le centre d'interprétation Pressoria à Aÿ, de nouvelles balades dans les coteaux en trottinettes, en 2CV, en van ou encore en Mehari électrique, mais aussi en matière d’hôtellerie et de logement. On pense bien évidemment à la montée en gamme de l’offre, symbolisée par l’ouverture du Royal Champagne, à Hautvillers, en 2018, de la Caserne Chanzy, face à la cathédrale de Reims, un an plus tard, ou encore de Loisium en Champagne, à Mutigny, l’été dernier. Toutefois, les propositions plus abordables ne sont pas en reste. « À Aÿ et Hautvillers, le nombre d’investisseurs étrangers qui veulent racheter des maisons pour faire des locations saisonnières a explosé, constate Dominique Lévêque. Ça devient difficile de trouver un logement pour les jeunes couples,
Épernay en profite à fond
car il y a une augmentation importante du foncier. On a l’accord du préfet pour limiter ce phénomène, mais ça montre que l’enjeu touristique est devenu quelque chose de majeur. »
Selon la directrice de la mission Coteaux, Maisons et Caves de Champagne, l’effet produit par l’Unesco ne se limite pas au tourisme, il est aussi local. « De plus en plus de Champenois ont pris conscience qu’ils vivent dans une belle région, en sont fiers et le revendiquent, note Amandine Crépin qui observe également une évolution dans la pratique des acteurs champenois. Le regard et la prise de conscience environnementale et paysagère de la filière a complètement changé. Du fait de l’inscription, mais aussi du contexte global lié au dérèglement climatique. »
Et c’est bien là tout l’intérêt de cette liste du patrimoine mondial : protéger les sites et les monuments dont la sauvegarde concerne l'humanité.
Simon Ksiazenicki
S’il y a bien une ville qui a profité de l’inscription des Coteaux, Maisons et Caves de Champagne sur la Liste du patrimoine mondial de l’Unesco, c’est bien Épernay. En huit ans, le visage de la ville a profondément changé. La rénovation de l’avenue de Champagne avait bien été inaugurée en 2009, mais l’Unesco a accéléré la mutation de la capitale du champagne. Sur l’artère la plus riche du monde, sous laquelle « dorment » plus de 200 millions de bouteilles stockées dans 110 km de caves, les bars à champagne ont fleuri aux portes des maisons et depuis 2021, la rénovation du château Perrier a permis l’ouverture du musée du vin de Champagne et d'archéologie régionale. « On a la chance d’avoir un musée extraordinaire qui est un attrait fabuleux pour la destination champagne, se réjouit Laurence Prévot, directrice de l’office de tourisme d’Épernay. C’est devenu une porte d’entrée à part entière du territoire et un aimant pour attirer d’autres publics, notamment des familles. »
En deux ans, le musée est devenu une porte d’entrée pour les touristes. © l'Hebdo du Vendredi
Outre ce grand projet patrimonial, la ville s’est également dotée d’un ballon captif, une attraction touristique qui permet de matérialiser, dans les airs, une partie de ce bien, de l’avenue de Champagne aux coteaux historiques situés entre Hautvillers et Mareuil-sur-Aÿ. Et les initiatives privées ont suivi : « Il y a une effervescence des projets sur l’ensemble du territoire, avec l’émergence d’agences œnotouristiques, de nouveaux parcours de visite dans les maisons et chez les vignerons et d’offres d’hébergement », analyse Laurence Prévot qui cite notamment le projet hôtelier qui doit voir le jour en 2025, sur l’esplanade Charles-de-Gaulle rénovée, au cœur d’Épernay. Sans compter les Airbnb... Surtout, la crise sanitaire mondiale n’a pas grevé cette belle dynamique. Dès l’an passé, le retour des touristes a été « spectaculaire », avec des clients qui étaient sortis des radars, tels les Américains, les Anglais et les Scandinaves. Il n’est en effet plus rare d’entendre parler d’autres langues que le français dans les rues d’Épernay et plus seulement en été. Les grandes maisons de champagne attirent, mais pas seulement. « Il y a un produit magique, le champagne, mais Épernay coche beaucoup d’autres cases. On est une ville à taille humaine, entourée d’un cadre naturel magnifique qu’est le vignoble. Les visiteurs recherchent de plus en plus ce tourisme d’expérience inédite et sur-mesure. » En 2022, 3,7 millions de visiteurs extérieurs ont été recensés par l’agglomération d’Épernay (source : Flux Vision Orange).
Les initiatives, publiques et privées, se sont multipliées à Épernay depuis l’inscription. © l'Hebdo du Vendredi
Et selon la directrice de l’office, le tourisme en Champagne a de beaux jours devant lui. « Le potentiel de développement est très fort. Avec la Coupe du monde de rugby en 2023, les Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024 et les dix ans de l’inscription Unesco et les 100 ans de l’avenue de Champagne en 2025, on est très optimiste. »
Bateau Champagne Vallee
Des croisières au cœur des vignes : Promenade, déjeuner ou dîner.