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Quand le théâtre percute
Dans un décor épuré, quatre personnages passent de simples auditions théâtrales à un oppressant cauchemar.
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© Magali Dougados
Avec Summer Break, écrit et mis en scène par Natacha Koutchoumov, la Comédie de Reims la joue cinéma dans lequel on projetterait un thriller digne de ce nom. En effet, la pièce commence comme ces teen-movies des années 90, pour finir en exploration contemporaine d’une génération proactive : au lever de rideau, quatre jeunes comédiens se retrouvent à une audition, prétendant aux rôles d’Hermia, Hélène, Lysandre et Démétrius, personnages du Songe d’une nuit d’été de Shakespeare, dont la pièce est d’ailleurs librement inspirée. Mais au fil de la répétition, rien ne va plus et rapidement, le thriller fantastique s’installe, empruntant les chemins et les codes du typique film d’horreur cinématographique.
Ce n’est pas la seule pièce de Shakespeare à laquelle s’en prend Natacha Koutchoumov : en diptyque, comme un écho, il y a aussi la pièce Après Hamlet, où elle fait revenir les fantômes de l’intrigue lors d’une rencontre bord-plateau qui tourne au malaise. Dans Summer Break, il y a cette forêt de panneaux vitrés, cette surexposition : et plus que le malaise, c’est le cauchemar. La dramaturge se saisit donc de l’œuvre de Shakespeare pour travailler autour de ses obsessions, notamment celle des métiers du spectacle vivant, celle d’être acteur, actrice, celle d’être un autre personnage, face à une salle plongée dans le noir, une intrigue dans la vie réelle. La mise en abyme étourdit tant et si bien que ces refrains du suspens et de l’épouvante épousent parfaitement l’univers littéraire classique. Tout se confond, l’endroit et l’envers du décor. A.C
4 Summer Break, du mardi 23 au jeudi 25 mai, à 20 h, à la Comédie de Reims. Tarifs : 6 à 23 €. Infos : lacomediedereims.fr
Le jeune collectif théâtral ADN, créé l’année dernière par Adélaïde Bouchenies, revient cette saison avec une nouvelle création, pour deux représentations, mercredi 24 mai et vendredi 2 juin. Après Dennis Kelly, c’est sur Sarah Kane que ces jeunes comédiens se penchent avec toute la passion qui les anime. Elles sont six sur le plateau, dirigées à la mise en scène par Mael Crunil, et elles donnent vie, à six voix donc, au monologue de « 4.48 Psychose ». Pour le metteur en scène, étudiant en théâtre en terminale au lycée Marc Chagall, ce texte est un coup de cœur. Il pensait à la monter depuis deux ans maintenant. « Sarah Kane fait preuve d’une violence inouïe, mais seulement par la parole, explique-t-il, dès ma première lecture, ça m’a touché. » En effet, « 4.48 Psychose » est l’ultime cri de cette dramaturge britannique qui s’est suicidée en 1999 à 28 ans, laissant derrière elle cinq pièces qui ont toutes remis en question, d’une façon ou d’une autre, le théâtre, lançant des défis à l’appréhension des textes et à la représentation. Elle y projette le monologue d’une jeune femme psychotique, d’un existentialisme violent et désespéré. C’est poétique, comme une exploration du langage et de l’âme humaine. C’est tentaculaire aussi.
Le collectif ADN nous l’avait déjà prouvé l’année dernière : il n’a pas peur de s’attaquer à des textes d’envergure, avec audace et passion. © Collectif ADN
Un défi, donc, auquel n’ont pas peur de répondre ces comédiennes, toutes, comme leur metteur en scène, jeunes étudiantes en théâtre, au lycée Chagall et, pour certaines, au Conservatoire de Reims. Sans grands moyens financiers et dans une autonomie de professionnels, ils livrent ensemble une version percutante de cette pièce qu’ils travaillent depuis octobre dernier, chaque semaine, en plus de leurs obligations scolaires.
4 4.48 Psychose, mercredi 24 mai à 19 h à la salle des fêtes de Saint-Brice-Courcelles et vendredi 2 juin à 18h au lycée Marc Chagall à Reims. Entrée libre. Infos : collectif-adn.net