En d’autres termes, nous avançons !

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En d’autres termes, nous avançons ! En quatre ans, depuis sa création, « Décoloniser les arts » n’a cessé de poser les bases de sa pratique et de clarifier ses objectifs. Dès le début, ce qui nous a intéressé était notre propre décolonisation, la décolonisation de nos esprits : comprendre comment s’étaient insinuées en nous des images, des représentations, des points aveugles, une ignorance de notre propre histoire, un manque d’outils théoriques. L’état des lieux du monde des arts et de la culture — Qui était à la direction ? Qui travaillait dans les coulisses, qui nettoyait, gardait les lieux ? Quelles programmations étaient proposées ? Quelle place dans les écoles d’art, de théâtre, de cinéma et de musique était donnée à ce qui a pris le nom de « diversité » ? — ne nous avait apporté aucune surprise. Au-delà de l'observation de la « diversité » des origines ethniques ou sociales, notre analyse exigeait d'emblée une plus grande attention à la multiplicité des récits et des mémoires, des formes et structures présentes dans la société française – les traces de son long passé colonial et de son présent postcolonial, comme de la colonialité qui continue d'y être à l’œuvre. Nous ne voulions nous arrêter ni à une dénonciation ni à une demande d’inclusion. Nous savions que la décolonisation est un long processus, toujours renouvelé et que nous avions à notre disposition pour accomplir cette tache, une vaste bibliothèque d’essais, de pièces de théâtre, de poésie, d’ouvrages historiques, d’une cinématographie, ainsi que nos propres expériences. Nous voulions développer des outils de pensée et d’analyse pour compenser notre propre ignorance et celle que nous constations au cours de rencontres – une ignorance entretenue par le système éducatif, les médias, les institutions culturelles et artistiques. En effet, malgré les réels progrès constatés dans la réécriture de l’histoire par celles et ceux qui sont exclu.e.s des récits dominants — des artistes et des chercheur.es, au sujet de l’esclavage colonial, du colonialisme, des représentations racistes et sexistes, des histoires de l’art, du cinéma, du théâtre, de la danse et de la musique —, malgré des expositions, des rencontres, des colloques, des pièces de théâtre, des documentaires, il suffit d’assister à un débat public pour entendre s’exprimer le sentiment « qu’on ne sait pas, pas assez, pas suffisamment ». Ce sentiment, que nous partageons, nous le prenons au sérieux, il vient d'élèves de collèges et lycées, d’associatifs, d’étudiant.e.s, d’universitaires. En le prenant au sérieux, nous cherchons à éviter une position en surplomb, de celle ou celui qui détiendrait la vérité, d’autant plus que « l’âge de l’accélération » dans lequel nous vivons – accélération des techniques de communication et de diffusion, accélération de la globalisation néolibérale, accélération des échanges— et la multiplication des questions qui se posent à nous exigent d’adopter une attitude d’apprenant.e.s. Au vu de certaines réactions défensives concernant la décolonisation des arts, nous avons pensé qu’il était nécessaire de publier un ouvrage dans lequel nous préciserions nos idées mais aussi dans lequel nous inviterions des artistes racisé.e.s à décrire leurs pratiques. L’ouvrage est paru en septembre 2018 aux éditions de L’Arche sous le titre Décolonisons les arts. Au regard des attentes qui s’exprimaient dans des rencontres et des débats, nous avons décidé d’ouvrir une université, sous la forme d’une séance mensuelle dont le format n’est pas fixe, mais pensé en fonction du sujet ou des textes mis en débat. L’Université Décolonisons les Arts (UDLA) s’est ouverte en octobre 2018. DLA n’est certes pas la seule initiative dans le champ de la décolonisation des savoirs. À l’université, dans des écoles d’arts, des centres culturels, des collectifs, lors de festivals, des questions sont posées qui font écho aux nôtres : analyse des représentations, recherche et


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