Portfolio - Louis Laheurte

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• sélection de projets • 2021 •

• Louis Laheurte •

• architecture • urbanisme • anthropologie •


formation universitaire • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

Louis Laheurte

•••••••••••••••••••••••••

2021 Master d’anthropologie sociale (Mondes Contemporains), mention très bien. Université Lumière - Lyon II.

• laheurtelouis@gmail.com

2019 Master d’architecture (Architecture, Ville & Territoire), mention bien. • Spécialisation Recherche, félicitations du jury. • Séjour d’études à l’Université Polytechnique d’Ho-Chi-Minh-Ville, Vietnam (2018). • Séjour Erasmus à l’Université Technologique Slovaque de Bratislava (2016-2017). Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Strasbourg.

• Microsoft Office

2014 Baccalauréat, sciences économiques et sociales, mention très bien. • Section européenne (2012-2014). • Lauréat du Concours Général en histoire, mention honorable (2013). Lycée Condorcet, Belfort.

expériences professionnelles • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •

2015-19 Emploi d’été en charpente et menuiserie. • Surélévation en site occupé du centre hospitalier de Dijon (07/2019-08/2019). • Construction de logements et de bâtiments agricoles (07/2017-08/2017). • Stage dans les bureaux, en atelier et sur divers chantiers (06/2015-07/2015). ALD construction bois, Port-Lesney. 2018 Stage au sein d’un collectif d’architectes (07/2018-09/2018). • Missions administratives et préparation des candidatures et appels d’offre. • Maquettes, esquisses, rendus et détails de logements, bureaux et gare. • Réception de travaux suite à la rénovation d’un centre sportif. Ballast Architectes, Strasbourg. 2016 Stage au sein d’une agence d’architecture (07/2016-08/2016). • Esquisses d’équipements municipaux. • Visites de projets scolaires en chantier. Philippe Donzé Architecte, Besançon.

••••••••••••••••••••••••• • Suite Adobe • Autocad • Sketchup • Vectorworks • Archicad

• Twinmotion • Rhino/GH • Revit

•••••••••••••••••••••••••

langue maternelle

• Français • Anglais

C2

• Allemand B2 notions • Italien ••••••••••••••••••••••••• • Permis de conduire B ••••••••••••••••••••••••• • CV pour plus de détails

LL o

u

s

i


LAHEURTE

•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

architecture • urban design / study

• Cần Giờ District / Des nuages pour les paludiers • Quartier Neppert / Habiter les passages • Pastorale #1 • Place d’Islande

3 11 17 23

••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

• Récits ordinaires • Liminarités • Compositions carcérales / Le palais et la prison • Où enterreront-ils les baleines ? Un architecte sur le rivage •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• • Randonnée • Littérature et écriture • Dessin, collage, photo et vidéo • Musique (sonneur de cornemuse) •••••••••••••••••••••••••

31 32 33 35

ethnographies


1

Un vol immobile, Et le bruissement des feuilles Qui me réveille. Participation à Cime City, édition 2018 du festival d’architecture Bellastock (Evry).


2

I. architecture & urban design / study


Avec Kim Thien Ho, Trung Phan Dinh, Coline Maigrot, Huy Tran Nguyen Bao, Hong Anh Dang Nguyen, Malu França, Phuong Tran Thi Ha.

Thạnh An

Les paludiers de Cần Giờ

https://www.youtube.com/watch?v=TB_QlO8ebhk Bref documentaire réalisé sur place, 2018, 3’13

URBAN STUDIO - Cần Giờ

Cần Thạnh

https://www.strasbourg.archi.fr/node/221 Publication numérique des travaux réalisés, 2019, 96p.

Long Hòa

Cần Giờ District

Cần Giờ, Hô-Chi-Minh-Ville, Vietnam, 2018-2019 • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •


En descendant le fleuve.

Hô-Chi-Minh Ville compte aujourd’hui près de dix millions d’habitants. Comme dans toutes les mégapoles contemporaines, des tours de verre s’y élèvent à plusieurs centaines de mètres, tandis qu’en contrebas des franchises internationales côtoient des échoppes populaires. Lovée dans les méandres du fleuve Sài Gòn, parcourue par un vaste système de canaux, la ville compte un district, Cần Giờ, qui s’étend vers le sud sur une cinquantaine de kilomètres jusqu’à se jeter dans la Mer de Chine méridionale. Plus vaste district de la ville, il ne compte pourtant que 70 000 habitants, répartis dans quelques petites bourgades et hameaux vivant essentiellement de la pêche, la saliculture, l’ostréiculture, l’artisanat et dans une moindre mesure du tourisme. L’essentiel de son territoire est en effet couvert par une gigantesque mangrove, réserve de biodiversité reconnue par l’UNESCO, qui borde et recouvre le delta du fleuve. Après avoir servi de refuge au Bình Xuyên lors de la domination française, cette mangrove labyrinthique a par la suite servi de poste avancé au Việt Cộng lors de la guerre contre les États-Unis, qui la bombardèrent alors au napalm... À l’extrémité sud de la mangrove, une étroite langue de terre s’étire sur une dizaine de kilomètres et fait face à la mer. C’est sur ce territoire, bordé de part et d’autre par l’océan et la mangrove, qu’il nous était demandé de travailler, au plus près des quelques milliers de personnes qui y vivent, afin de proposer une série de contre-projets d’aménagement durable.

Les promoteurs et la montée des eaux.

De par ses plages de sable fin et sa position géographique, cette langue de terre suscite de nombreuses convoitises immobilières. Depuis une quinzaine d’années, les projets futuristes se succèdent sans pour autant se concrétiser. Des infrastructures routières et portuaires se multiplient pourtant tout autour, mais se résument pour l’instant sur place à des routes neuves et désertes, un polder abandonnée et une mairie flamboyante. Quelques chantiers à l’abandon et terrains clos en friche parsèment néanmoins le paysage. Ces projets fantômes, déjouant le régime foncier socialiste, permettent aux promoteurs de s’accaparer la terre, parcelle après parcelle. Ce territoire balayé par le vent est particulièrement exposée à la montée des eaux et, depuis quelques années, la salinisation des terres force les agriculteurs à se reconvertir dans la pisciculture, l’ostréiculture et la saliculture. C’est à partir de telles adaptations que notre projet se développe, le long des nombreux canaux qui sillonnent le paysage. Drainés, prolongés et consolidés, ils laissent la mer pénétrer dans les terres pour mieux l’apprivoiser et approvisionner les bassins des marais salants, assurant également la circulation du vivant, humains et nonhumains, entre la mer et la mangrove. Plutôt que de la mettre sous verre ou la raser, il s’agit de collaborer avec la mangrove qui protège la ville en amont. Il s’agit d’affirmer avec elle un payage et de réinventer une économie sociale, une politique écologique et des architectures correspondantes.

HÔ-CHI-MINH-VILLE

4

Can Gio

Mer de Chine méridionale

••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

0

5

10

20 km

Vung Tau


1

3

6 5 4 2

0

200

500

1000 m


Au détour de la rivière. Propositions d’aménagement des berges.

1

2

Ponton flottant - parcours touristique Sensibilisation aux enjeux de la mangrove.

3

Embarcadère - parcours touristique Sensibilisation aux enjeux de la mangrove.

4

Canal navigable bordé de palétuviers Circulations douces sur la digue.

5

Canal navigable bordé de palétuviers Bassin de rétention lors des intempéries.

5

Canal nagivable et aménagé Espace public linéaire.

Canal navigable et aménagé Surélévation des habitations.

6


7

Cần Giờ // Cần ’Chaux’. Le sel comme prétexte à architecture.


Des nuages pour les paludiers.

De nombreux paysages de par le monde, au fond de vallées encaissées ou le long de côtes balayées par le vent, conservent aujourd’hui encore la trace du travail de générations de sauniers et de paludiers. L’intérêt des activités salicoles ne se mesure en effet pas à leur seule viabilité économique. Au fil des siècles, les marais salants ont également donné naissance à des patrimoines culturels mais également à de nouveaux écosystèmes. Ils constituent ainsi des repères culturels, paysagers et environnementaux indispensables pour comprendre les territoires dans lesquels ils s’inscrivent. Le projet de coopérative ici présenté reconnaît l’importance plurielle des marais salants. Le modèle de la coopérative permet en outre aux producteurs de s’organiser pour améliorer ensemble leurs conditions de travail et de vie. Un restaurant-boutique et un pavillon d’exposition, permettent en outre aux touristes, vietnamiens et étrangers, de découvrir les lieux au contact des personnes qui en prennent soin au quotidien. Pour répondre à ce programme socioéconomique, une architecture modeste s’invente, reposant sur une technique structurelle simple et vernaculaire (briques, charpente en bambou) et une forme poétique autonome.

4

8

3

2

1

Domaine salicole : 1 2 3 4

Atelier et bureaux Parking et zone de chaargement Restaurant-boutique Pavillon d’exposition

0

100

200

500 m


A

Section AA’ Atelier de conditionnement et bureaux de la coopérative.

B 9

C

B

C Restaurant, boutique et toilettes. A

Pavillon d’exposition. 0

5

10

20 m


Maquette (1/20°) du pavillon.

Section BB’

Section CC’ 10

Axonométrie (oeil de ver) du pavillon. 0

2

5

10 m


Avec Marion Delaporte, Louise Delpech, Bernardino Not.

‘Le paysage changeur’, J. Prévert, 1948.

https://www.youtube.com/watch?v=OAc54P_QEJ8 Lecture filmée sur place, 2017, 3’25

URBAN STUDIO - Mulhouse 2050

https://www.strasbourg.archi.fr/node/227 Publication numérique des travaux réalisés, 2018, 36p.

Quartier Neppert

L’écume des terrains vagues.

Le ‘quartier Neppert’ correspond à un ancien faubourg de la ville de Mulhouse qui a connu de profondes transformations liées à l’industrialisation puis à la désindustrialisation de la cité alsacienne. Cette histoire laisse aujourd’hui à voir un paysage urbain morcelé, sans grande cohérence d’une rue à l’autre, et dont les bâtiments témoignent autant d’un passé florissant que d’un présent à la peine. Le quartier conserve néanmoins un potentiel évident de développement. Sa proximité avec le centreville historique est un réel atout, alors que les axes de circulations majeurs le bordent sans le pénétrer, préservant ainsi le calme. Populaire, sa population est aussi jeune et diverse. Le quartier a déjà fait l’objet de projets d’architecture prestigieux (Lacaton & Vassal) ou d’urbanisme ambitieux (ANMA), en suspens depuis plusieurs années par manque de moyens. Les multiples friches, parkings improvisés et terrains vagues du quartier armocent donc le projet urbain qui suit. Ces espèces d’espace représentent en effet autant d’opportunités pour les habitants d’aménager eux-mêmes leur quotidien. A partir de la place et du square Neppert, au coeur du quartier, de nouvelles façons d’habiter s’inventent d’une rue à l’autre. Des équipements publics nouveaux ou rénovés consolident l’infrastructure urbaine en transformant les espaces vacants en places, parcs et bosquets tandis qu’à une échelle humaine une réactivation artistique des lieux offre de nouvelles expériences et interactions aux habitants et aux passants.

Mulhouse, France, 2017-2018 • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •


1

2

Paysages quotidiens et profils socio-économiques

4

20 %

Immigrés 3

Sans emploi

2 1

Ouvriers Employés Prof. intermédiaires Cadres et prof. intellectuelles Commerçants et patrons

Cité ouvrière

12

Retraités Neppert (2 214 hab.) Mulhouse (110 000 hab.) Source : 2016, INSEE (IRIS 1403) 3

•••

4

Centre historique

0 100

250

500 m


Réactivation artistique : Des mâts pour étoffer la ville.

L’archipel des possibles. 1 2 3 4 5

Maison des associations Nouveaux logements Ecoles Centres d’hébergement et d’insertion sociale Ecole populaire d’arts et de musique

Parc de l’ancienne caserne

Jardin semi-public

Square Neppert 3

3 ‘Habiter les passages’ 2

2 1

Rues partagées

5 4

Parvis scolaire

2 2 2 Verger et potagers

Terrain multisport


Habiter les passages.

Respectant la densité urbaine moyenne (environ 100 logements par hectare) du centre de Mulhouse, 46 unités abordables de types T3, T4 et T5 sont réparties sur une parcelle de moins de 5 000 m². Chacune dispose d’un espace privé extérieur : jardin, terrasse ou loggia, et le projet est conçu pour accueillir un parking souterrain. Les habitants disposent en outre d’un kioske-serre partagé au coeur des passages, près de jeux d’enfants et d’un bassin d’eau. Les volumes résidentiels, dont la toiture en shed et les façades en briques évoquent l’âge industriel qui a fait la fortune et l’infortune de Mulhouse, sont quant à eux tous orientés vers le Sud-Est. A l’intérieur de cet ensemble réservé sur ses façades extérieurs, la végétation assure l’intimité des logements, et transforme l’aspect des lieux au gré des saisons. Ce projet représente enfin une réconciliation du droit universel à la ville (H. Lefebvre) d’une part, et des désirs particuliers et privés, d’autre part. Comme s’en émouvait W. Benjamin, le passage est en effet une forme urbaine qui peut assurer le jeu, l’espace de dilatation dans lequel les fonctions humaines les plus contradictoires, à l’image du recueillement intime et de l’expression de soi, peuvent se manifester sans s’exclure. Les espaces publics du projet, qui le traversent et conduisent aux logements, reprennant en quelque sorte les règles de ce jeu des usages.

A

B

A

14

B

0

10

20

50 m


15

Coupe A-A’ (structure : noyau béton - panneaux de CLT - parement en briques)

Coupe B-B’

0

1

2

5 m


16

Vue aérienne sur les terrasses des appartements et la place centrale.

Elevation Nord-Ouest 0

5

10

20 m


Wer auf die Welt kommt, baut ein neues Haus, Er geht und läßt es einem zweiten. Der wird sich’s anders zubereiten, Und niemand baut es aus. Goethe, West-östlicher Divan

17

Pastorale #1

Jura, France, 2020-2021 (en cours) • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •


18

Elevation Sud-Ouest

Elevation Nord-Ouest 0

2

5

10 m

•••••••••••••••••••••••••••••••••• ••••••••••••••••••••••••••

0

5

10

20 m


Existant : photos et maquette d’études (1/100°).

19

Rez de jardin


Interventions architecturales.

A

B

20

B

Rez de chaussée

A

0

2

5

10 m


Section AA’

21

Section BB’

0

2

5

10 m


Cuisine

Plateforme (ancienne grange)

22

Séjour


23

Place d’Islande

Strasbourg, France, 2016 • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •


Un iceberg sur le Rhin.

• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • •0

Quartier des Quinze

24

du

Rh

in

Esplanade

as

La place d’Islande, qui se partage aujourd’hui entre un terrain vague et un parking non aménagé, se trouve à un lieu et un moment charnière dans la fabrique urbaine de Strasbourg vers le Rhin. Bordée par les immeubles résidentiels modernistes de l’Esplanade au Sud et par le Quartier des Quinze, également résidentiel mais construit un siècle plus tôt, au Nord. La place, desservie par le tram qui sera à terme prolonté vers l’Est, voit en outre se côtoyer des populations diverses, en termes de classes et d’âges, du fait notamment de l’Université voisine. Afin de s’inscrire dans ces différents contextes urbain et socio-économique, le programme architectural s’adresse à différents groupes sociaux et propose 82 logements de différents types : logements pour senior dependants, maisons de ville familiale, appartements et studios. Ces logements bénéficient tous d’accès à un espace semi-public surélevé traversant l’ilôt. Une place publique près de l’arrêt de tram et des locaux commerciaux en rez de chaussée composent finalement la ‘Place’ d’Islande, mise en avant par la forme architecturale du projet.

Br

100

200

500 m


Plan troisème étage

Plan premier étage et rue intérieure A B 25

B

Plan rez-de-chaussée

Plan deuxième étage

A Section AA’

C

0

10

20

50 m

0

5

10

25 m


26

Maquette (1/200°).

Section BB’

D

de

Lo ca ux

+

T1

+

T3 -T 4T5

T2

ét ud ia nt e,

vi ll e,

co mm er ci au x

Ré si de nc e

Ma is on s

T2 -T 3

se ni or , Ap pa rt em en ts

Ré si de nc e


Carnet de détails techniques Réalisés en 2017.

500

460

60 80

300

10 230 20

Wooden batten 440 x 80 x 50 mm

500

500

500

500

470

30 170

200

803

Wooden batten 440 x 80 x 50 mm Steel structure of the bench

Gutter

Steel hand railing

500

Steel fixation

Antislip streaks

Steel structure of the bench

500

Wooden batten 440 x 80 x 50 mm 906

27

906

80

2%

420

486

950

320 420

50

Steel hand railing

500

80

50

700

Gutter

170 200

320

Steel fixation

0

370 0

22 80 40 92 10

300

10 50 10 190

3%

10

300

20 Stone pavement 22 mm Pad 80 - 110 mm XPS 40 - 10 mm XPS 92 mm Bitumen Waterproof membrane 10 mm Reinforced concrete 300 mm

Substrate 700 mm Geotextile support 1 mm Antiroot protection 10 mm Draining system 50 mm Bitumen Waterproof membrane 10 mm XPS 200 mm Reinforced concrete 400 mm Plaster 20 mm

DRAWING:

Bench & staircase: public spaces (lat. Section) SUPERVISOR: ING. ARCH. ANDREJ MACIAK, PHD.

Détail C

300

300

400

STUDENT: Louis Laheurte

PART SCALE

D #3 1/20

EVALUATION

Stone pavement 22 mm Pad 80 - 110 mm XPS 40 - 10 mm XPS 92 mm Bitumen Waterproof membrane 10 mm Reinforced concrete 300 mm

40 110

20

Antislip streaks

160

200 100 300

20

Precast reinforced concrete step

DRAWING:

Bench & staircase: public spaces (long. Section) SUPERVISOR: ING. ARCH. ANDREJ MACIAK, PHD.

STUDENT: Louis Laheurte

IPE beam

PART SCALE

D #3 1/20

EVALUATION

850

110 80 50 10

540

20

DRAWING:

Bench & staircase: public spaces (Plan) SUPERVISOR: ING. ARCH. ANDREJ MACIAK, PHD.

STUDENT: Louis Laheurte

PART SCALE

D #3 1/20

EVALUATION


Moveable part of the window

195 83 27 47

Steel fixation

Glass guard, part of the window original frame

PVC shutter box

Steel rod bearing the ornament stones PVC shutter box

120

45

Fixed part of the window

1890

200 50

1890

Ornament stone standard dimension : 530 x 1000 x 50 mm

325

1398

Fixed part of the window

10

Moveable part of the window

Aluminium frame

530

PVC window frame

1875

Glass guard, part of the window original frame PVC window frame

10 100

PVC window frame 430

Aluminium frame 115 10 30 50 50 20

70 10 95 100 10

20 20

194,5

50 150 20

DRAWING:

Détail D

Aluminium frame 0

Plaster 20 mm Metallic railing 20 mm Reinfored concrete 194,5 mm Waterproof membrane 1 mm PUR 150 mm Ornament stone 50 mm

Window as part of the façade (Section) SUPERVISOR: ING. ARCH. ANDREJ MACIAK, PHD.

195

460

140

Ceramic 10 mm Mortar 30 mm 20 PUR 50 mm 20 Reinforced concrete 50 mm Wood wool / Timber beam 140 mm Metallic railing 20 mm Plaster 20 mm

42

10

0

STUDENT: Louis Laheurte

PART SCALE

650

127 90 90

D #1 1/15

EVALUATION

28

Steel fixation 108

650

103

645

90 90 127

DRAWING:

Window as part of the façade (Elevation) SUPERVISOR: ING. ARCH. ANDREJ MACIAK, PHD.

20 20 194,5

STUDENT: Louis Laheurte

PART SCALE

D #1 1/20

EVALUATION

50 150 20

Plaster 20 mm Metallic railing 20 mm Reinforced concrete 194,5 mm Waterproof membrane 1 mm PUR 150 mm Ornament stone 50 mm

DRAWING:

Window as part of the façade (Plan) SUPERVISOR: ING. ARCH. ANDREJ MACIAK, PHD.

STUDENT: Louis Laheurte

PART SCALE

D #1 1/15

EVALUATION


29

Sous un ciel enfin Clément, la pluie battante Berce mon sommeil. Altane imaginée en 2017 sur et pour les toits d’Ixelles (Bruxelles).


30

II. ethnographies


Ein Architekt, der dieses sah, stand eines Abends plötzlich da und nahm den Zwischenraum heraus und baute draus ein großes Haus. Der Zaun indessen stand ganz dumm, mit Latten ohne was herum. Ein Anblick grässlich und gemein. Drum zog ihn der Senat auch ein. Der Architekt jedoch entfloh nach Afri- od- Ameriko. Morgenstern, Der Lattenzaun

31

Récits ordinaires

Entretiens préliminaires à un projet d’atelier, interrogeant le programme prévu (marché couvert et logements collectifs)


Here someone lived

A palace under a bridge

The ramparts’ gate

32

The Backhoe Blues

Photographies tirées d’une enquête conduite sous la direction de Douglas Harper, sociologue et photographe.

The shack, the blocks and the summer student protest

Liminarités


Lieu

Au détenu, la prison offre le même sentiment de sécurité qu’un palais royal à l’invité d’un roi. Ce sont les deux bâtiments construits avec le plus de foi, ceux qui donnent la plus grande certitude d’être ce qu’ils sont – qui sont ce qu’ils voulurent être, et le demeurent. La maçonnerie, les matériaux, les proportions, l’architecture sont en accord avec un ensemble moral qui laisse indestructibles ces demeures tant que la forme sociale dont ils sont le symbole tiendra.

Vue d’une cellule par l’oeilleton.

Genet, Journal du Voleur

Vue des yoyos suspendus en façade.

Compositions carcérales / Le palais et la prison

Espace

Compossibilités : Pénitentiaire et carcéral.

Mes différentes recherches sur la prison s’inscrivent dans le cadre d’une analyse du pouvoir de punir, interrogeant la double disposition des lieux et des corps, ainsi que les expériences quotidiennes de l’enfermement. Poursuivant une perspective transdisciplinaire et mobilisant de nombreux cadres conceptuels à partir d’une enquête de terrain et d’entretiens, je cherche à éclairer le sens de la peine et la condition carcérale au XXIème siècle, mais également les rapports qu’entretiennent pouvoir et architecture d’une part, et pouvoir et nourriture d’autre part. Ces enquêtes conduisent entre autres à distinguer le temps pénitentiaire (imparti par les juges) de la durée carcérale (vécue par les personnes), les lieux (conçus stratégiquement) de l’espace (pratiqué tactiquement), et le régime pénitentiaire de la cuisine carcérale. Au-delà des dispositions légales, réglementaires, architecturales ou nutritionnelles, il est en effet nécessaire de relever les compositions quotidiennes, c’est-à-dire les multiples manières possibles, tolérées ou non, d’interpréter, appliquer, résister et (dé)jouer l’ordre imposé.


La souffrance des uns et la satisfaction des autres entretiennent un lien troublant dans l’acte de punir. Aujourd’hui encore, deux violences caractérisent la prison : une violence pénitentiaire, stratégique, qui dispose des lieux et y enferme des corps, et des violences carcérales, tactiques, entre les détenus, les surveillants ou contre soi. En confinant et en exposant les corps, le dispositif architectural réalise et éventualise ces différentes violences.

Violences de l’architecture.

L’architecture est en effet, entre autres choses, une technique de pouvoir, à la fois symbolique et physique, consistant à disposer des lieux et des corps. En imposant un certain ordre à l’espace et aux corps, l’architecture manifeste de fait un certain ordre social, économique ou politique. Instrumentale, elle nécessite des procédures et des agents, opérateurs et techniciens, et peut servir des fins plus ou moins morales. Entre inclusion et exclusion, soumission et transgression, le moindre dispositif architectural implique toutefois une multitude de subjectivations, c’est-à-dire de compositions possibles. L’architecture disciplinaire applique ainsi une certaine violence, douloureuse ou plaisante, visant à prévenir, contrôler et redresser les déviances. Cette architecture prolifère sous diverses formes plus ou moins sophistiquées et bienveillantes dans la ville anthropophage (commerces, bureaux, entrepôts...). Nos prisons, nos camps, nos hospices et jusqu’à certains de nos ‘‘espaces publics’’ relèvent cependant d’un autre ordre. Ne visant plus à inclure et assimiler, ils relèvent plutôt d’une disposition anthropémique, relégant les sans-papiers, sans-domiciles, marginaux, pauvres, vieux et délinquants, dans le cadre du gouvernement contemporain des indésirables.

Le projet ethnographique.

L’ethnographie relève et analyse les sens conférés, les émotions, les discours, les gestes, les pratiques des individus et groupes sociaux dans leur environnement et leurs contextes. Archéologie du présent, au sens conféré par l’architecte et ethnographe Kon Wajirō, l’ethnographie enregistre les recompositions quotidiennes des sociétés humaines. L’enquête ethnographique (avec ses différents modes de relevé : notes, dessins, vidéos, etc...) et l’analyse anthropologique proposent ainsi une démarche complémentaire et une dimension réflexive au projet architectural, permettant de l’inscrire et l’appréhender dans l’espace social qu’il affecte. Pour ces deux pratiques, il s’agit en effet d’étudier, comprendre et repenser nos manières d’habiter, agencer et composer le monde. 34 • Premier terrain en prison et engagement associatif avec le Génépi, 2018-2019. • Compositions carcérales. Lieux, disposition et topologie d’une Maison d’arrêt, Mémoire-recherche, ENSAS, 2019, 146p. dir : B. Morovich & M. Dietschy. • Service civique au sein de Prison Insider, ONG engagée pour la collecte et diffusion de données relatives aux conditions de détention dans le monde, 03/2020 - 09/2020. • Axonométrie, • Plan type d’un étage de détention, • Plan perspective d’une cellule type, Maison d’arrêt de Strasbourg, 1988.

• Le palais et la prison. Ethnographie des pratiques alimentaires en détention, Mémoire, Lyon II, 2021, 154p. dir. : M. Cros & Y. Bouagga.


35

Retour à Cần Giờ [Extraits]

Dieux du foyer et dieux du paysage.

Les demeures de Cần Giờ sont le plus souvent modestes, de plein pied ou avec un unique étage, mais dressées et entretenues avec un soin évident. Certaines se résument à une ossature de bambous fixée dans un sol de terre battue, les cloisons et la toiture tressées de palmes sechées, quand d’autres surélevées sur une dalle de béton, sont construites en parpaing avec un toit de tôle ondulé. Malgré ces différences notables, toutes cependant présentent une disposition commune, avec un seuil conséquent, protégé par une avancée de toiture sous laquelle les espaces privés et publics se confondent et où les activités domestiques et économiques s’enchevêtrent. Toutes également possèdent au moins un autel. Si le foyer des vivants, parfois placé sous la bénédiction d’Ông Táo le dieu-lare des cuisines [McAllister & Luckman, 2015]1 assure l’alimentation des vivants ; l’autel, le foyer des ancêtres, entretient quant à lui la présence des morts et témoigne du souvenir respectueux des vivants à leur égard. Alors que la fumée de l’encens y grise souvent les photos en noir et blanc de proches disparus2, s’y mêlent aussi des objets rituels animistes, bouddhistes ou bien encore des portraits de l’oncle ‘‘Hô’’ et d’autres personnages historiques et mythiques.

On peut ainsi voir le seuil, le foyer et l’autel de chaque maison comme des dispositifs analogues, les uns assurant et modulant les rapports avec le monde des vivants, à l’extérieur et à l’intérieur, et l’autre avec le monde des ancêtres. C’est d’ailleurs, dans les modestes habitations de Cần Giờ, à proximité immédiate du seuil et du foyer que les autel sont le plus souvent placés. Ce respect prononcé et spatialisé pour les ancêtres représente un point déterminant de la culture vietnamienne [Nguyen-Rouault, 2001 ; Jellema, 2007], que les guerres du siècle dernier ont rendu d’autant plus nécessaire mais qui connaît aussi d’importantes transformations contemporaines du fait des recompositions sociales, de l’exode rural et d’une urbanisation effrénée. Ces pratiques tendent ainsi à s’effacer dans les nouveaux quartiers luxueux visités en amont du fleuve Saïgon. Si les mânes des ancêtres demeurent en paix dans l’espace domestique, c’est également le paysage qui s’avère peuplé d’une myriade de divinités et d’esprits. La moindre région et la moindre ethnie du Viêt Nam dispose ainsi de ses propres esprits tutélaires et de divinités particulières. Bien que la mythologie traditionnelle chinoise se décline largement dans les croyances traditionnelles septentrionales, à l’image de celle des Đạo Mẫu, réincarnations de Liễu Hạnh, fille de l’Empereur de Jade, sont aussi le produit de multiples réinterprétations historiques. Ce sont enfin de nouvelles religions qui naissent au XXème siècle de la rencontre avec l’Occident chrétien, à l’image du syncrétisme caodaïste.

Où enterreront-ils les baleines ? Un architecte sur le rivage


Le paysage spirituel et la vie quotidienne des Vietnamiens, a fortiori en dehors des grandes villes, restent largement marqués par les cultes des divinités locales et des génies tutélaires, dont les fêtes et les monuments rythment encore le temps et l’espace des communautés. Sans prétendre à une cosmogonie propre, ces croyances n’en sont pas moins vivaces et déterminantes dans la vie de tous les jours. C’est d’ailleurs ce que relève Nguyễn Văn Huyên dans le delta du Fleuve Rouge [Nguyen, 1938] ou Georges Condominas dans un village Mnong-Gar des hautsplateaux centraux [Condominas, 1957]. C’est encore ce qu’il faut relever à Cần Giờ et dans le delta du fleuve Saïgon où une divinité géniale représentée sous les traits d’une baleine est vénérée, comme dans la grande majorité des communautés de pêcheurs le long du littoral méridional et central du Viêt Nam.

Cá Ông3, le Grand-Père Baleine.

Quelques jours après notre arrivée, nous fîmes la rencontre d’un couple, un homme de 74 ans et sa quatrième épouse, installés sur une parcelle à quelques mètres seulement de la plage. Leur maison se trouvait le long d’une piste de terre et de sable. Elle s’ouvrait sur toute sa longueur le long d’un chemin poussiéreux et sur un jardin ravissant à l’arrière. Le toit semblait flotter sur de frêles colonnes métalliques quelques mètres au-dessus d’une dalle en béton. De discrètes parois sur les côtés dissimulaient les espaces intimes. Dans un coin, en évidence, de l’encens s’élevait d’un autel. Nous discutâmes longuement.

Trung et Kim, deux camarades architectes, se relayaient pour traduire leurs propos en anglais. Evoquant leur vie quotidienne, la conversation en vint rapidement au ‘‘Grand-Père Baleine’’. Voici ce que mes notes conservent des dires de la femme : ‘Mon frère partit en mer au début de la saison de pêche, en janvier, et aperçut Grand-Père Baleine [cá ông] mourant. Son bateau fit naufrage quelques jours plus tard et il ne put revenir à terre qu’au bout de plusieurs jours. […] J’ai moi-même failli faire naufrage le jour de la fête du GrandPère Baleine. Sur le point de couler, nous avons prié et nous avons alors senti une force venir du fond de la mer et nous maintenir à la surface.’

Chaque cétacé apparaît ainsi comme un avatar de la divinité. Le malheur de l’animal, souvent un cachalot ou une baleine à bosse, annonce le malheur du marin qui l’aperçoit et chaque créature est capable de transmettre et porter les bonnes grâces de la divinité. Pour les communautés de pêcheurs, les sauvetages opérés par Grand-Père Baleine relèvent toujours plus d’une histoire personnelle que d’une mythologie lointaine. De fait, Grand-Père Baleine croise les familles de pêcheurs sur des générations et c’est à lui qu’il incombe de ramener à terre les marins naufragés ou leurs âmes perdues en mer. Un lien étroit, une intimité qui est aussi un peu une parenté, et donc un ensemble d’obligations réciproques existent ainsi entre Grand-Père Baleine et les familles de pêcheurs [Lantz, 2009]. Aussi le culte de la baleine est-il inextricablement lié au culte des ancêtres.

L’histoire personnelle peut, avec le culte de la baleine, également se confondre dans l’histoire nationale. C’est en effet jusqu’à l’héritier impérial Gia Long qui en 1783 aurait été sauvé d’un naufrage par un cétacé. Quelques décennies plus tard, à partir du milieu du XIXème siècle, des titres d’amirauté sont même décernés par le pouvoir impérial aux avatars échoués du Grand-Père Baleine [McDonald, 2003]. Quant à l’origine de ce culte, plusieurs sources l’attribuent aux Chams, ethnie arrivée au Viêt Nam depuis l’Indonésie au cours du premier millénaire EC. On retrouve en outre différents cultes de la baleine4 tout le long de la côte occidentale du Pacifique [Parnwell, 2013a], d’Aotearoa (Nouvelle-Zélande) [Gagné, 2015] au Sud jusqu’au détroit de Béring et la mer des Tchouktches [Lantis, 1938] au Nord, en passant par certains ports cantonais [Heller, 2020] et nippons [Naumann, 1974]. 1. Le culte de ce dieu débonnaire, qui rassemble souvent en une seule entité les autres divinités domestiques (Ông Công et Bà Táo), diffère d’une région à l’autre et trouve des équivalents dans plusieurs pays voisins. 2. L’importance de cette mémoire vivante des ancêtres et les guerres dévastatrices qu’a connu le Viet Nam au cours du XXème siècle ont conduit à une reconfiguration des confins du monde des vivants et du monde des morts. Des formes rituelles inédites de possession sont en effet apparues afin d’en quelque sorte ménager un espace de parole aux morts dépourvus de sépulture et dont les éventuels descendants ne peuvent honorer proprement la mémoire [Sorrentino, 2018]. 3. Ông marque un respect certain et signifie en général monsieur ou seigneur en vietnamien, tandis que cá signifie poisson. La baleine, cá ông, est donc littéralement le seigneurpoisson. Ông permet toutefois aussi de s’adresser à un aîné, un grand-père et c’est ainsi que nos amis vietnamiens le traduisaient le plus souvent (‘grand-pa fish’). 4. Contrairement toutefois aux Maoris,, Japonais, Aléoutes, Yupiks ou Inuits, les pêcheurs vietnamiens ne chassent ni ne consomment la chair des cétacés.


Une île en fête.

Parmi les obligations des pêcheurs et de leurs proches envers le génie de la baleine, les plus importantes sont sans doute d’en honorer les avatars à l’occasion de célébrations régulières. Deux temporalités cérémonielles s’exercent alors en parallèle. D’une part une fête annuelle, Nghinh Ông, est organisée. À Cần Giờ, celle-ci se déroule généralement en octobre. Particulièrement faste, elle rassemble jusqu’à plusieurs dizaines de milliers de personnes pour des processions à terre et des régates en mer. Si ont par ailleurs lieu des discours officiels, ce sont bien davantage les représentations théâtrales et les banquets qui attirent les foules. Si je n’ai malheureusement pas pu assister à cette fête annuelle, j’ai toutefois pu me rendre sur une petite île, Thạnh An, à une heure de navigation au Nord de Cần Thạnh. Là s’y déroulait une autre forme de fête, l’anniversaire d’un enterrement de l’un des avatars du génie. Pris par la magie du lieu, voici ce que j’avais alors pu noter dans mon journal : Il fallut déranger la police locale afin qu’elle nous autorise à passer quelques heures sur l’île, qui se révéla alors au détour du petit port. À première vue, le village de maisons basses et rapprochées semblait la recouvrir. […] Plus nous nous rapprochions du coeur de l’île, plus nous parvenaient les musiques de karaokés que les habitants improvisaient ici et là. En approchant de la place des temples, nous pûmes suivre une musique distincte, une mélodie rendue criarde par son amplification. Le plus grand des temples, abritant un Bouddha massif, avait été transformé pour l’occasion en théâtre.

Des bancs d’écoles, avec leurs tables inclinées, faisaient face à une scène légèrement surélevée. Dessus, trois femmes d’âges différents, toutes maquillées et parées d’atours rutilants et d’interminables plumes effectuaient danses et chants traditionnels. Elles étaient accompagnées par quelques musiciens dissimulés sur le côté. […] Je restai ainsi absorbé de longs instants, avant finalement que la chaleur étouffante ne me délogea. Je rejoignis alors quelques amis qui s’apprêtaient à pénétrer dans un autre temple. Le gardien, qui était aussi le doyen du village, nous invita à rentrer et nous nous déchaussâmes. Suivant les conseils de Pham, je déposai un faisceau d’encens sur l’autel, qui se trouvait entre une maquette de l’un des esquifs colorés utilisés par les pêcheurs et un coffre de bois imposant. Le gardien confia à Pham, qui le savait probablement déjà, que ce dernier contenait les reliques de la baleine que l’on célébrait aujourd’hui.

Une seconde temporalité cérémonielle est ainsi induite par l’échouage de chaque animal. Celleci s’étend sur plusieurs années avant de finalement se dissiper. Ce cycle commence toujours avec la personne trouvant le cadavre du cétacé échoué sur la plage. Cette personne est alors désignée comme ‘fils de la Baleine’. Après qu’il en ait fait part au reste de la communauté, celle-ci se rassemble pour s’organiser et recouvrir l’animal d’un voile rouge. Les rites funéraires durent alors trois jours à compter du lendemain de la découverte. Des processions, sur terre et sur mer, sont alors conduites tandis que des chants sont entonnés. Suite à quoi, l’animal est transporté sur la terre ferme et enterré sous un tumulus. Les trois mois suivant l’enterrement, le fils de la Baleine doit en porter le deuil pour tout le village. Puis, trois années après la mise

en terre, les os sont finalement déterrés et lavés avec soin avant d’être à nouveau enterrés définitivement dans un cimetière dédié ou d’être entreposés dans un temple. De nouveau, la communauté se rassemble et organisent des festivités. L’anniversaire de l’échouage de la baleine s’inscrit alors dans le calendrier lunaire et une cérémonie, qui associent rituels, représentations théâtrales, régates et banquets, est tenue chaque année à la même date, probablement jusqu’à ce que le souvenir de la baleine s’estompe. Ces rites sont à bien des égards, notamment dans leur subtile manière d’imbriquer les lieux et les temps de différentes croyances, exemplaires du syncrétisme vietnamien. Bouddha veillant ainsi à la représentation théâtrale donnée en l’honneur du Grand-Père Baleine.

La tombe de l’amiral.

Au coeur de Cần Thạnh, c’est-à-dire à côté du marché où les pêcheurs déchargent directement du pont des navires leur cargaison sur les étals, se trouve un édifice se démarquant des habitations qui l’entourent. Lăng ông thủy tướng, la tombe de l’amiral, est le principal édifice dédié au culte de la baleine à Cần Giờ. Comparés à d’autres temples implantés ailleurs sur la côte, celui-ci est sans doute bien modeste. Ses façades ocres et son toit de tôle abritent néanmoins plusieurs autels somptueux et les restes de nombreuses baleines. Le squelette de l’une d’entre elles est même reconstitué sur une douzaine de mètres. Quelques dizaines de centimètres seulement permettent alors, sur l’un des côtés, de circuler et d’en faire le tour. Sur les murs, une foule de sinogrammes côtoie des textes en caractères latins. Sans doute parmi eux se trouvent les diplômes d’officiers de marine encore aujourd’hui conférés aux cétacés échoués.


Alors qu’une unique et étroite rue dessert le temple et le marché qui lui est accolé, ces deux lieux demeurent incontournables pour comprendre l’urbanisme de Cần Thạnh. Ils constituent en effet un seuil décisif entre la mer et la terre, une articulation entre l’économique, le politique et le domestique. Lors des festivals et cérémonies, c’est en outre vers ce lieu que les régates marines et processions terrestres convergent. En regardant le cadastre, on réalise enfin aisément que le temple et le marché, implantés à l’extrémité orientale de la langue de terre, génèrent en quelque sorte la logique urbaine de la bourgade. Le bâti le plus ancien et resserré, les parcelles les plus étroites, s’élargissent ainsi progressivement dès lors que l’on s’éloignent du temple et du marché. Le temple est ainsi le lieu où se croisent les activités, les spatialités et les temporalités de la communauté1. Il constitue ainsi un lieu particulièrement intéressant pour aborder la question du jeu complexe entre le politique et le spirituel au Viêt Nam. Aujourd’hui, des représentants politiques participent aux cérémonies et processions qui passent par le temple. Pendant les années qui ont suivi la chute de Saïgon en 1975, le parti communiste a pourtant largement limité l’influence de ces innombrables cultes des campagnes. Marxiste-léniniste, le nouveau régime imposa un quasi athéisme d’État inédit au Viêt Nam. Une différence fondamentale entre la religion et les croyances, une foi pieuse d’une part et des superstitions d’autre part, devait être faite. Il est pourtant difficile au Viêt Nam de tracer une séparation nette entre religion, croyances et spiritualité. Aussi le régime adopta une autre politique dès le Đổi mới de 1987.

L’ouverture à l’économie de marché de ce ‘‘renouveau’’ fut en effet contemporaine d’une nouvelle tolérance envers ces croyances dans les années 1990. Ainsi, le Nghinh Ông de Cần Giờ finit par être reconnu comme patrimoine immatériel national par le ministère de la Culture et du Tourisme en 2013. Cette ouverture aux cultes et cette élasticité de l’idéologie marxiste soulignent sans doute la dimension politique des croyances, tant pour les communautés qui s’organisent en fonction d’elles que pour l’État qui trouve là une certaine légitimité et un moyen de contrôler les populations [Jammes & Sorrentino, 2015]. Selon des observations établies dans les provinces centrales de Đà Nẵng et Quảng Nam, le culte de la baleine n’est ainsi plus tant menacé par l’État autoritaire et l’idéologie marxiste que par le tourisme [Lantz, 2009 ; Parnwell, 2013b]. Selon eux, alors que les nouvelles générations se détournent de plus en plus de la pêche traditionnelle et parfois de ses croyances, c’est d’abord le développement du tourisme qui fragilise le culte de la baleine. Les temples les plus imposants sont en effet muséifiés, fétichisés, passant sous le contrôle des autorités qui les transforment en attraction pour touristes, quand les plus petits sont tout simplement rasés, libérant ainsi la place pour des projets immobiliers luxueux sur le littoral. Si Cần Giờ n’est pas (encore) une destination touristique aussi populaire que Đà Nẵng, cette question devrait prochainement aussi s’y poser. Reste cependant à voir qui arriveront les premières, des vagues promises par la mer ou des vagues promesses du tourisme. ***

La Baleine et le Léviathan.

En 1990, Jean Malaurie et une équipe scientifique franco-soviétique partirent étudier un vaste complexe archéologique découvert quelques années plus tôt aux confins de la Tchoukotka [Malaurie, 2005]. S’étendant sur plusieurs kilomètres d’île en île, l’ensemble comprend notamment une ‘‘allée des Baleines’’ de plusieurs centaines de mètres le long de laquelle s’alignent les squelettes de cétacés. L’anthropologue croit alors avoir trouvé en ce lieu reculé la ‘‘Delphe de l’Arctique’’ ainsi qu’une pure expression géo-poétique2, un espace ne pouvant se définir et s’appréhender que par-delà les distinctions opérées entre culture et nature, l’homme et son monde. Les baleines, que ce soit en Tchoukotka ou au Viêt Nam, suscitent ainsi parmi certaines sociétés une architecture et un paysage qui manifestent une relation entre l’humain et le non-humain dépassant la dichotomie naturaliste au coeur de l’entreprise moderne. Les monuments de l’événement comme les lieux du quotidien3, dont l’usage ne sont pas réservés au seul être humain, sont ainsi peuplés par une foule de non-humains : par les animaux domestiques, mais aussi surtout par les esprits des ancêtres, dieux-lares, génies tutélaires, et les avatars du Grand-Père Baleine. Cette relation, ces espaces et les croyances populaires 1. Dans certaines communautés de pêcheurs implantées au centre du Viêt Nam, c’est en outre à proximité immédiate du temple que se nouent les relations d’affaires entre armateurs, capitaines et équipages. 2. C’est au poète écossais Kenneth White que l’on doit la popularité de ce concept. Il en situe la révélation lors d’un voyage en 1978 dans l’estuaire du Saint-Laurent au Canada, bien connu pour être un havre prisé par de nombreux cétacés. 3. Ainsi l’architecture traditionnelle des Inuits du détroit de Béring réarrangeait-elle les squellettes des cétacés chassés pour composer jusqu’à l’espace domestique des habitations.


correspondantes témoignent à cet égard de la survivance d’une ontologie animiste [Descola, 2015] cohabitant à Cần Giờ sans trop de peine avec d’autres modes d’existence, tels ceux des paludiers arrivés d’autres régions, ou des premiers touristes. Le génie tutélaire est encore une certaine expression du génie du lieu, du genius loci cher au géographe Augustin Berque comme au théoricien Christian Norberg-Schulz [Norberg-Schulz, 1979 ; Berque, 1990]. Le culte de la baleine apparaît en effet comme une précieuse phénoménologie des lieux, une manière de les comprendre et de leur conférer du sens, d’y composer en somme un milieu entre humains et non-humains. L’Allée des Baleines, les maisons traditionnelles inuits et les hummocks du Grand Nord manifestent ainsi un vaste milieu polaire, dans lequel des communautés humaines éparses composent leur monde avec les animaux, leurs ancêtres, les esprits et les éléments. Comme le rappellent les chercheurs et activistes engagés auprès des Inuits, les fondations de ce milieu boréal sont toutefois de plus en plus mises à mal par d’importants bouleversements sociaux, économiques, politiques et climatiques. La situation de Cần Giờ est quelque peu différente. Entre la mer où les navires croisent les baleines, les plages où elles viennent s’échouer, les tumuli où elles sont ensevelies et les temples où leurs restes sont finalement entreposés, un monde se compose également. Mais ce monde est perméable à la ville qui s’étend et s’élève en amont du fleuve. Des paquebots sillonnent déjà la mangrove et de nouvelles infrastructures se succèdent tout autour. Les encarts publicitaires et les projets fantômes rappellent en outre les convoitises dont ce monde préservé aux marges de la métropole fait l’objet. Les pêcheurs et Grand-Père Baleine sont à cet égard

contraints de résister, s’adapter et composer avec cette autre créature, plus monstrueuse, qu’est le Léviathan1. Si les cultes de la Baleine et leur géopoétiques propres se limitent à quelques régions, l’ombre moderne du Léviathan s’étend tout autour du globe. Frank Lloyd Wright en offrit, en 1901 à Chicago, une description mémorable [Skjonsberg, 2015]. Contemplant la formation des mégapoles américaines, Il prédit la centralisation croissante du pouvoir ainsi que la perte d’échelle et de sens qui risquaient d’accompagner leur essor. Ses projets d’aménagement rural-urbain (Broadacres Cities, Living City, etc...) peuvent ainsi être compris comme autant de tentatives visant à contenir le Léviathan. Déployant une lecture amorale2 de la ville devenue entre-temps globale, Rem Koolhaas embrassa à la fin du siècle une position radicalement contraire. L’idéalisme cynique, le dépassement de toutes les échelles et l’abdication à tous les pouvoirs dont le Léviathan, apparaissant comme le seul horizon, tant architectural qu’anthropologique, réaliste sinon désirable [Koolhaas & Mau, 1995]. L’exposition de l’AMO et Koolhaas organisée en 2020 au Guggenheim de New York et intitutlée ‘Countryside : The future’ a été perçue par beaucoup comme le témoignage d’un intérêt tardif pour les confins et l’au-delà des métropoles. L’hétéroclicité des situations compilées, tout comme le cas particulier de Cần Giờ, manifestent certainement une indétermination potentielle entre le civilisé et le sauvage, le global et le local, le dense et l’épars. La Baleine et le Léviathan esquissent deux horizons possibles qui, chacun à leur manière, entérine le dépassement de ces vieilles distinctions. Ainsi la Baleine décentre-t-elle homo sapiens parmi le vivant, dans un monde ouvert à l’autre, au non-humain, et où écologie et politique sont étroitement liées,

quand le Léviathan, génie du non-lieu, symbolise une hubris ontologique, une économie politique transformant tout, jusqu’à l’humain, en ressource à à concentrer, liquéfier, exploiter et épuiser. En plein anthropocène [Tsing et al., 2017], la Baleine et le Léviathan représentent deux manières d’habiter et agencer le monde, deux tendances se disputant l’imaginaire architectural contemporain. Au-delà des croyances traditionnelles inuits ou vietnamiennes ici évoquées, le génie du vivant qui s’avère aujourd’hui nécessaire peut prendre bien des aspects et dégager bien des perspectives scientifiques, morales ou esthétiques. Une géopoétique originale et de nouvelles architectures s’esquissent de fait déjà, des confins reculés jusqu’au coeur des villes globales3, ménageant des futurs désirables sur cette planète qu’on nomme la Terre [Fitz & Krasny, 2019]. 1. Les relents hobbesien et eschatologique de cette figure ne sont évidemment pas anodins. La figure du Léviathan apparaît également dans le Moby Dick d’H. Melville(1851), qui la dépeint comme un reflet, une projection refoulée de l’homme dépassé par son histoire et son pouvoir de destruction sur le monde. 2. A l’entrée ‘Architecture’ de son Dictionnaire critique (1929), Georges Bataille esquissait déjà certains des enjeux à venir : ‘‘Les hommes ne représentent apparemment dans le processus morphologique, qu’une étape intermédiaire entre les singes et les grands édifices. [...] Toute une activité terrestre actuellement, et sans doute la plus brillante dans l’ordre intellectuel, tend d’ailleurs dans un tel sens, dénonçant l’insuffisance de la prédominance humaine : ainsi, pour étrange que cela puisse sembler quand il s’agit d’une créature aussi élégante que l’être humain, une voie s’ouvre – indiquée par les peintres – vers la monstruosité bestiale ; comme s’il n’était pas d’autre chance d’échapper à la chiourme architecturale.’’

3. A l’instar des ‘Ducklands’ imaginés par l’architecte Cedric Price à la place des anciens quais d’Hambourg en 1989-1991 et proposant un large poumon végétal, presque féral, au coeur de la cité hanséatique [Doucet, 2019].


Bibliographie. BERQUE, Augustin, Médiance. De milieux en paysages, Géographiques Reclus, Montpellier, 1990, CONDOMINAS, Georges, Nous avons mangé la forêt de la pierre-génie Gôo. Chronique de Sar Luk, village Mnong Gar, Mercure de France, Paris, 1957, 491p. DESCOLA, Philippe, Par-delà nature et culture, Gallimard, Paris, 2015 [2005], 792p. DOUCET, Isabelle, « Anticipating fabulous futures », e-flux Architecture, 2019 FITZ, Angelika, KRASNY, Elke (ed.), Critical care : Architecture and urbanism for a broken planet, MIT Press, Cambridge, 2019, 303p. GAGNE, Natacha, « De la souveraineté perdue à la souveraineté retrouvée : Voyage vers l’avenir sur le dos des baleines », Religiologiques, n°32, 2015, p.65-91 HELLER, Natasha, « Using Mazu to teach key elements of Chinese religions », Education About Asia, n°1, vol.25, 2020, p.26-31 JAMMES, Jérémy, SORRENTINO, Paul, « Géopolitique des religions au Viêt Nam. Les voies multipolaires d’une société civile confessionnelle », Hérodote, n°157, 2015/2, p.112-125 JELLEMA, Kate, « Everywhere incense burning : Remembering ancestors in Ðôi Moi Vietnam », Journal of Southeast Asian Studies, n°3, vol.38, 2007, p.467-492

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