# ÉDITION SPÉCIALE
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04 M AI S C ’E ST N É DE PU I S LONGT EMPS ! Analyse — Sébastien Peillet 05 A .O.C. – ARTI STE À L’ORGANISAT ION CONT RÔLÉE Analyse — Tiffaine Triboire
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06 PU BL I C, S I BL É Tribune — Guillaume Loizeau 07 L’É TU DE DE S RÉ FL E XI ON S Témoignages — Julie Cloarec-Michaud 08 - 09 U BI QU I TÉ ARTI STI QU E Témoignages — Nadège Azarias 10 – 11 DE « L’ART POU R QU I ? » À « L’ART AVEC Q UI ? » Analyse — Danielle Pailler et Caroline Urbain 12 - 13 VOU L E Z-VOU S FAI RE L’ART AVEC NOUS ? Analyse — Fiona Mazeaud et Fanny Bonnin 14 - 15 4 0 0 0 0 PE R S ON N E S POU R 4 0 000 P ROJETS Interview — Louise Hochet, Youen Chéné, Quentin Bodin
Ce numéro spécial est édité pour la résidence artistique Art Vivant Art Utile par l’association Europa Production Nantes (journaleuropa.info) Avec le soutien de l’Université de Nantes - Direction de la Culture et des Initiatives Imprimé à 7 000 exemplaires par l’imprimerie : La Rochelaise
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Laura Compagnon Rémi Donaint Igor Maquet Benjamin Rullier Rédacteur en chef Marc Desmaillet
Rédacteurs Fiona Mazeaud Sébastien Peillet Nadège Azarias Fanny Bonnin Tiffaine Triboire Guillaume Loizeau Danielle Pailler Caroline Urbain Laëtitia Vigneron
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Le mécénat, le public éloigné, les institutions et la portée d’une résidence artistique ; la participation et la médiation culturelle, nécessaire sinon complémentaire... Voilà autant de questions qui nous ont hantés un moment. Tout d’abord, les œuvres d’art et les artistes sont rangés dans des cases qu’on appelle mouvements, courants, styles artistiques, définies par un changement de la manière de représenter, par une rupture dans une même époque. Ensuite, les classifications de l’art sont sources de querelles entre historiens de l’art.
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Une résidence artistique qui s’adresse à tous les acteurs des campus, qu’ils soient étudiants, chercheurs, techniciens, professeurs, employés, voilà un sacré défi ! L’angle choisi pour donner une publication qui illustrerait au mieux cette résidence ne fut pas facile à trouver. Pour cause, jouer avec une notion comme l’art, qui nous parle et nous échappe à la fois, est un exercice périlleux. Nous ne sommes pas plus experts qu’amateurs en la matière. Nous avons pris le parti du public acteur de cette résidence : vous. Les questions abordées dans ces pages sont celles que vous vous posez aussi alors que le premier acte de cette résidence nous absorbe tous déjà.
Codirecteurs de la publication
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Côté artistes, certains refusent d’être catégorisés. L’overdose de -isme laissée par le XXe siècle (expressionnisme, cubisme, futurisme, surréalisme, et j’en passe) laisserait à penser que c’est tant mieux. Ou tant pis, cela facilitait peut-être le travail de l’historien de l’art. Quoique. Les arts possèdent déjà un classement géographique, par civilisation, mais également pour la technique – la photographie, le dessin, les arts décoratifs, l’architecture... jusqu’aux arts appliqués. La vraie question est-elle « à quoi sert l’art ? » ? Robert Fillou a déclaré que « l’art rend la vie plus intéressante que l’art » dans un livre du même nom. Si tel est le cas, il nous permet aussi de comprendre la vie et l’époque de ceux qui ont créé cet art, d’en imaginer et déterminer les relations humaines, les façons de penser, les valeurs et les limites, les aspects économiques. Et le moteur de leurs créations. La mort de l’art a été annoncée de nombreuses fois ; il est encore là, empruntant une direction inattendue. Prenant forme et vie dans vos campus, dans cette résidence Art Vivant Art Utile, dans les pages de cette publication. Autant de preuves que la création n’a pas dit son dernier mot. À votre tour, faites art !
Secrétaires de rédaction Clément Bouchet Fiona Mazeaud Sébastien Peillet Fanny Bonnin Damien Zalio Tiffaine Triboire Rémi Donaint Côme Tessier Thomas Desset
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Maquettistes Graphistes Quentin Bodin Sophie-Charlotte Colrat Muses artistiques Léa Cotart-Blanco Marianne Mingant
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L’intérêt général et rien de plus. Le mécénat est un intérêt pour tous, un soutien aux artistes pour leurs productions sans contrepartie, que le contrat social doit assurer à lui seul. Si cette attitude de bon prince fait principalement penser à la Renaissance, le mécénat débute avant même que le mot n’entre dans le langage courant, avant Caius Cilnius Maecenas, dit Mécène. Nous le devons à cet homme, proche de l’empereur Auguste, patron des poètes. Le Siècle d’Auguste, réputé pour être un âge d’or culturel, doit beaucoup à ce bienfaiteur. Ovide, Virgile, Horace, Tite-Live, pour ne citer que les plus connus. Voilà autant d’hommes qui furent soutenus dans leurs travaux. Ces œuvres constituent aujourd’hui un patrimoine et un héritage culturels. Mécène fournit même un cadre propice à la production artistique, ses jardins accueillant des bibliothèques, un auditorium, des bains et des sculptures témoignant de son goût pour l’art. Les artistes le lui ont bien rendu et Virgile lui a dédicacé Les Géorgiques.
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À l’origine, le mécène n’impose aucune contrainte. Mais les termes commande et achat d’œuvre se sont vus attribuer le mot de mécénat. Nombre d’artistes ont été soutenus par les commandes de l’Église chrétienne. Après la destruction des arts païens, l’image est devenue une nécessité afin de propager la foi. Dans le cadre de sa réforme, le pape « LES Grégoire le Grand (590-604) a affirmé que IMAGES « les images permettent à l’analphabète PERMETTENT À de lire1 », écartant par là même les conflits L’ANALPHABÈTE théoriques entre iconoclastie et idolâtrie. DE LIRE » Ainsi, la papauté a assuré le rôle de mécène pendant plusieurs siècles. S’ajoutent à cette mouvance les princes de la Renaissance. Pour rayonner dans la société et s’attirer les bonnes grâces de l’Église, ces derniers finançaient des œuvres à thématique religieuse. On ne peut pas nier que la commande ait fait vivre l’artiste et, en ce sens, favorisé la création. Ce fut un soutien bien réel pour traiter des questions métaphysiques. Même sur un thème bien défini, la technique et l’esthétique restent ouvertes à l’artiste pour créer. – 1. Peintres et mécènes de la Renaissance italienne, Bram Kempers, éditions Gérard Monfort.
Les différentes cours d’Europe avaient pour habitude d’inviter ou de subventionner les artistes. Corneille touchait 1 500 livres par an de la part de Richelieu, Premier ministre de Louis XIII. Les souve-
rains participaient comme modèles aux travaux des artistes, souvent pour se glorifier. Il arrivait que ce soit plus ambigu, comme en témoigne le tableau Vertumne, que Giuseppe Arcimboldo fit de Rodolphe II du Saint-Empire romain germanique. La célèbre recomposition du visage en fruits, légumes et fleurs, que vous avez probablement réalisée durant votre enfance, a donné raison à Rodolphe II. Il a démontré le talent du peintre et son intérêt artistique. En somme, dans toute l’histoire de l’Europe, des particuliers ou des structures ont reconnu le caractère nécessaire de l’art et l’intérêt général qu’il représente. Les entrepreneurs n’ont pas fait exception. Pavel Tretyakov, un homme d’affaires russe du XIXe siècle, était passionné par la peinture. En 1881, à la fin d’une vie de philanthrope, il créa la galerie Tretyakov à Moscou, afin qu’un large public puisse accéder aux œuvres. Le mécénat ne se contente plus dès lors de subvenir aux besoins de l’artiste. Préserver le patrimoine est aussi un défi pour les mécènes. Alors, qui assure aujourd’hui le rôle de mécène ? Il semble que les entreprises privées prennent le relais. Difficile de penser que les entreprises lucratives puissent verser dans la philanthropie. La marque de montres suisses Breguet a financé la restauration du Petit Trianon en 2007. Jacques Rigaud, président de l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical), déclare que « le mécénat [des entreprises] exprime la volonté de la société civile de prendre sa part dans la définition et la mise en œuvre du bien commun », et que les entreprises ont fini par comprendre que « l’engagement dans le mécénat était conforme à leur intérêt ». Quel intérêt ? Une publicité les mettant à leur avantage, une défiscalisation de leur don. L’étude menée par l’Admical en 2008 montre que toutes les entreprises ne cherchent pas de contreparties : seules 54 % des entreprises mécènes déclarent bénéficier de la réduction d’impôt définie par la loi de modernisation de l’économie de 2008. L’ère du mécénat ne semble pas près de s’arrêter, puisque les entreprises s’y mettent. Le philanthropique l’emporte sur le lucratif.
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ANALYSE
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Depuis les années 1960, l’art tend à se démocratiser et se diversifier pour étendre ses champs de compétences. Toutefois, l’artiste indépendant peine à s’en sortir seul. Ainsi, il travaille parfois sous les conditions et contraintes d’un commanditaire. De cela naît un art participatif où l’artiste ne se contente plus de donner une œuvre à voir, mais aussi d’organiser la rencontre entre le public et son art.
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Un artiste, dans l’imaginaire collectif, se veut indépendant et c’est avant tout cette liberté de création qui lui donne son identité. Il exprime un message avec ses personnalité et sensibilité, tout en cherchant le regard nouveau du public. Jusqu’aux années 1980, l’art était susceptible d’entrer dans les musées et dans les collections des particuliers. Un art stockable et objet marchand qui existe toujours, certes, mais parallèlement, d’autres formes d’art ont vu le jour : un art de l’événement comme un art immatériel. La science, la sociologie, la communication, l’écologie sont des domaines de plus en plus investis par les artistes. Il semble que le champ de l’art soit devenu celui de tous les projets qui n’entrent pas dans une logique de rendement et d’efficacité immédiate pour l’économie et la consommation. Les nouvelles formes d’art contemporain sont la performance, l’installation, l’art biotech, le land art, l’art vidéo... Les artistes trouvent aujourd’hui de nouveaux terrains de jeu et d’expression. Et les arts appliqués en sont les premiers concernés. L’apparition de la commande artistique a modifié de nombreux aspects de la pratique de l’art et de l’artiste. Les commanditaires souhaitent toucher un public large. La créativité se joue aussi dans les institutions, normées et normalisées, dans lesquelles l’artiste a une réelle possibilité d’expression. Le mécène donne maintenant les outils pour la création artistique. C’est le cas du collectif nantais La Luna, qui investit depuis presque vingt ans l’espace urbain et propose un art « nourri des autres ». Et par « les autres », il interpelle les habitants, les commerçants ou de simples passants d’une rue, d’un quartier. Cet art participatif n’est pas un mouvement mais bien une manière de penser l’art et de le mettre en œuvre. Il implique son public dans la création physique d’une œuvre, conférant ainsi un nouveau statut à celle-ci, au spectateur-acteur et surtout à l’artiste. Bien que le travail de l’art puisse porter sur l’individualité, de l’artiste comme du public, l’action de ce dernier nécessite forcément une évolution du statut même de l’artiste : il devient alors organisateur.
L’œuvre d’art participative résulte alors QUESTIONNER, d’un processus de communication entre OBSERVER, l’institution et l’artiste, entre l’artiste et son PROPOSER, public, et entre les participants eux-mêmes. CRÉER De ce processus dépend l’œuvre d’art, témoin explicite de cette collaboration. Sa réalisation est concertée, réfléchie, et non anarchique. L’artiste participatif établit un protocole d’intervention de façon à ce que le spectateur, de manière subjective, puisse s’approprier son travail. Selon leurs modes d’engagement et les formes artistiques qu’ils inventent dans ces rencontres avec le public, les processus qui en découlent sont très différents : soit pour tisser des réseaux de solidarité, créer collectivement l’image d’un autre monde possible et dégager, grâce à la création, des espaces de respiration dans un quotidien jalonné d’habitudes ; soit en se positionnant en pédagogues de l’art contemporain. L’artiste propose une base parfois vide de contenu mais pas d’intentions, et pouvant être habitée de divers témoignages. À l’image des Mille et un bocaux de Marie-Claude Quignon, où des femmes de quartiers populaires lyonnais ont formulé le positif et le négatif de leur expérience migratoire, après un long travail d’accouchement de leur histoire. S’adapter aux contraintes nécessite que les artistes développent de nouveaux talents. Ces commandes permettent de valoriser une œuvre et son processus de création. Ce dernier n’échappe pas aux institutions qui, pour amener l’art vers un public dont l’attention est déjà hautement sollicitée, n’hésite pas à intégrer ce processus comme moteur de résidence artistique. L’artiste ne se retrouve plus alors à faire la promotion de ses œuvres. Il a l’occasion d’intégrer directement le public dans le processus créatif.
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Entrer dans une exposition, c’est bien souvent devoir répondre à des codes sociaux – converser d’une œuvre, étaler ses connaissances culturelles – mais nous ne sommes pas tous égaux face à cela, et beaucoup de critères conditionnent notre accès à l’art, plus que notre perception. La démocratisation culturelle lancée par André Malraux dans les années 1960 n’a pas eu lieu. L’État s’est érigé en mécène pour que toutes les couches de la société aient accès à l’art. La volonté était donc de cibler l’universel. Mais à vouloir viser trop large, on ne vise personne.
L’art n’est pas nécessairement gratuit. L’entrée dans un musée est souvent payante passé la majorité, ce qui en restreint considérablement le nombre de visiteurs. Même le cinéma est devenu un luxe. Bien souvent, on réfléchit à deux fois avant de débourser l’équivalent de deux repas au RU pour aller voir un film qu’on n’est même pas sûr d’aimer. Nos études nous ont sortis de force de notre cocon pour nous traîner dans les lieux où se joue l’art. Alors, pendant notre scolarité, nous avons des réductions accordées dans le cadre de passeports culturels1 car cette démocratisation culturelle prend le sens d’une lutte de l’État contre l’ignorance, au même titre qu’il combat l’obésité chez les jeunes ! Des moyens sont mis à notre disposition mais cela s’arrête lorsqu’on commence à émerger de notre caverne culturelle. Alors, on choisira des “ cultures gratuites et ouvertes à tous ” – Internet – puisque argent et art sont étroitement liés. Quelles sont les personnes invitées à des vernissages d’exposition ? Ce sont soit des artistes, soit des mécènes, principalement des individus baignant dans cet univers. Y a-t-il de la place pour moi ? Oui ? Encore faut-il le savoir. Il s’en est fallu de peu pour qu’il ne reste que le « 1 % artistique2 », la gratuité des musées le premier dimanche de chaque mois ou le street art3 pour ne pas débourser le moindre centime et pouvoir admirer des œuvres.
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JE N’ÉTAIS PAS AU MUSÉE, J’AVAIS PONEY ! – 1. paysdelaloire.fr/ politiques-regionales/ lycees/actu-detaillee/n/ pass-culture-sport/ 2. À chaque construction d’un bâtiment public, on consacre 1 % de son budget à une œuvre d’art. 3. streetartutopia.com/
Les œuvres d’art invitent à la réflexion de la démarche de l’artiste ou simplement au ressenti. Tout le monde se souvient de ses cours d’arts plastiques ou de musique au collège. Balbutiements de connaissances de l’art et démarche pour tenter de rééquilibrer des inégalités culturelles déjà présentes. Les connaissances et le goût grandissent avec l’entourage familial. Si les parents sont peu cultivés, l’enfant devra redoubler d’efforts pour élargir son horizon culturel. Et puis l’exaltation culturelle va également de pair avec le niveau scolaire. Plus on fait des études, plus on est
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amené à réfléchir sur la société et son évolution. L’art a toujours été un merveilleux indicateur de la vie sociale. Les études supérieures sont le meilleur endroit pour constater ces inégalités mais également pour les réparer. Les étudiants viennent d’horizons différents. Dans un échange profitable à chacun, tous participent à une éducation populaire. Les différentes associations et les résidences artistiques aplanissent les connaissances, les origines, les barrières sociales et le niveau culturel qui semblaient jusque-là insurmontables. Comme ce n’est pas l’art qui vient à nous, c’est à nous d’aller à lui. Mais faire des kilomètres et des kilomètres pour voir une exposition n’est pas très pratique. Ce sont dans les villes et non dans les campagnes, où la population est réduite, que l’artiste, pour devenir un personnage public, posera ses valises et autres palettes. L’art reste souvent coincé aux péages. La colline Montmartre semble plus propice aux émotions et aux émulsions culturelles que les plaines rases du Loiret. Pourtant, même Joachim Du Bellay vantait la quiétude de nos campagnes, les préférant à la cité des artistes qu’était Florence. Rien n’y fait : les villes industrielles sont désertées par les artistes pour des grandes villes déjà chargées d’un parfum artistique. Or, à Metz et à Lens par exemple, de prestigieux musées parisiens ont ouvert leur succursale. Avec une forte fréquentation, étrangère notamment, ces régions accèdent à une notoriété nouvelle. Ces musées deviennent alors vecteurs d’une nouvelle croissance économique pour ces villes. Sans oublier la culture même de leurs habitants.
L’HYMNE DE NOS CAMPAGNES
Impossible au final de se plaindre correctement, tant chacun essaye de rendre la diversité artistique et culturelle accessible. L’art est à la portée de tous, mais il entend surtout que nous nous en emparions.
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L’ÉTUDE DES RÉFLEXIONS TÉMOIG NAG ES
Telle qu’elle est transmise, la philosophie dépend de son messager ; il faut une certaine philosophie créatrice, qui n’est pas si commune. Cette matière a toujours été un peu rigide dans la manière de se présenter. Il s’agit avant tout de l’adapter pour l’amener sur le terrain des architectes, des graphistes, des designers ou des étudiants en arts appliqués.
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« RIEN NE VAUT UNE RÉFLEXION, UNE PENSÉE QUI ENGLOBE TOUT ET DONNE FORCE À SA PRODUCTION »
Il y a plusieurs manières d’aborder un projet en arts appliqués, comme n’importe quelle création artistique : soit on part d’un lieu, soit d’une idée. Les étudiants qui suivent les attentes scolaires partent d’un lieu, de quelque chose de réel ; la philosophie va les amener vers les idées associées à ce lieu. D’autres n’ont rien de palpable sous la main mais ont pourtant de grandes réflexions autour de leur projet. La philosophie se veut alors plus pragmatique. Pour le design d’espace par exemple, la philosophie doit prendre les contraintes pratiques d’une création pour les intégrer dans des contraintes plus théoriques et culturelles. Son rôle est de montrer qu’une production créative, plus ou moins libre, même d’un book d’expression artistique, doit s’intégrer dans une justification. Rien ne vaut une réflexion, une pensée qui englobe tout et donne force à sa production. Cela passe nécessairement par la justification de chaque choix. Même l’absurde se justifie. Les nouveaux étudiants arrivent en s’estimant libres, pleins de créativité et de revendications sur la liberté d’expression. Avant de se rendre compte que plus ils se veulent libres, moins ils sont encadrés et moins ils ressentent leur liberté de créer. Avec philosophie, on peut aussi aborder certains tabous de la société de manière assez simple, le handicap par exemple. Comme c’est le cas des publics éloignés et défavorisés. Beaucoup d’étudiants témoignent de bon sens, certes, mais aussi de naïveté au regard de ces publics. Pour ne pas le faire « parce que c’est bien », la philosophie va essayer de les déniaiser de leurs bons sentiments et de leur morale avant que leur projet ne se heurte auxdits tabous.
Au-delà de tous ces aspects, la création est une contrainte car il y a un rendu, un terme couramment utilisé dans les arts appliqués. La justification est liée à ce rendu. Les créatifs sont pourtant libres de tout faire sous cette contrainte. Ils doivent pour cela trouver un équilibre et découvrir qu’ils sont d’autant plus libres qu’ils acceptent la contrainte. Ça ne nécessite pas de leur donner des cours formels ou magistraux, mais de s’adapter à chacun. Ça ressemble à une consultation de philosophie : les étudiants viennent, exposent leur projet et repartent avec des références, ayant accouché des problématiques liées à leur projet. La création de lieux pour l’art est un sujet « MÊME qui n’est pas considéré comme facile. De L’ABSURDE plus, cela provoque une mise en abyme : SE JUSTIFIE » des designers créent un espace vide en le dédiant à recevoir des artistes concepteurs, un endroit de résidence. C’est comme faire un sujet sur soi-même, une sorte de thérapie psychanalytique. C’est aussi le cas avec leurs sujets portant sur le coworking. Par des manières détournées, ils travaillent à leur émancipation et au propre rapport avec leur production. Mais la philosophie, telle qu’elle peut être enseignée dans ces filières-là, prend vraiment en compte le rapport futur qu’aura le créatif avec son œuvre. Elle questionne également sur celui qui intervient dans le monde. Ainsi, le rapport entre philosophie et architecture est immense : tenter de répondre à cette grande question de la place de l’homme dans le monde. Ces deux matières aident à une réflexivité sur son activité. C’est pourquoi audelà de la philosophie, la sémiologie est également enseignée. Le monde peut apparaître sous formes de signes, de signaux. Ce sont avec ces codes que les créatifs vont pouvoir jouer.
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Les gens ont besoin de couleurs dans cet MANUELA univers grisâtre. L’art permet entre autres de découvrir, de se rendre compte, de prendre le temps. Avec mon expérience et mes voyages, j’ai choisi de représenter des maisons mobiles comme les caravanes, les yourtes, les tipis. Cette série parle tout de suite ; certains voient là une possibilité d’évasion, de nomadisme. Tout le monde ne choisit pas de vivre en caravane. L’objectif premier est de faire en sorte que les gens s’aèrent l’esprit, partent un peu plus dans l’imaginaire, qu’ils observent. Qu’ils activent ou réactivent cet imaginaire. Le travail de la couleur, le dessin, regarder autour de moi, être un peu curieuse... Depuis le tout début, je connais une fascination pour les maisons et j’ai proposé aux particuliers, lors de mes portes ouvertes, de peindre la leur. En France comme ailleurs, l’architecture des maisons varie selon les régions. Cette chose que l’on dessine souvent enfant parle aux gens. Une famille m’a demandé l’an passé de réaliser un triptyque avec l’idée que leur enfants, une fois grands, pourront repartir avec un bout de leur maison d’enfance. Ces commandes sont des challenges et m’ouvrent des portes vers d’autres univers. Récemment, j’ai eu beaucoup de contacts avec des boutiques qui diffusent mes créations et produits dérivés, cartes postales, badges, etc. J’aime le côté unique de l’objet. Mes tableaux sont des pièces uniques et je ne vais pas les passer en cartes postales. Je n’aime pas l’idée de profusion, de production énorme, de surconsommation, c’est pourquoi je ne fais que des séries limitées. Ce n’est pas évident d’établir une résidence artistique car il faut savoir transmettre de la technique. Il faut préparer les ateliers en amont avec le risque de ne pas voir se faire tout ce qui était prévu. Néanmoins, pour en avoir animé quelques-uns, je sais que les enfants les plus jeunes sont plus réceptifs au monde de l’imaginaire, tandis que des CE2 par exemple, déjà plus rationnels, ne concevaient pas qu’un ciel puisse être rouge. Mais cela reste un autre métier. Travailler avec un milieu estudiantin semble relever du défi : en revanche, travailler pour le compte d’entreprises _ manuela-art.com/ m’effraie.
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Il existe plusieurs styles en danse autres que le classique et le contemporain. D’emblée ce n’est pas un art qui paraît accessible, mais la musique et le mouvement sont des choses qui parlent à tout le monde. Il y a un caractère intuitif à cela, une osmose non par le langage, mais par le corps. Outre le rapport à la performance physique, nous sommes des interprètes d’un élan créatif. Une compagnie est un individu composé d’individus. Entre les deux danseuses et la chorégraphe, il y a des rapports viscéraux, pour ne pas être seules et parce que le partage donne un côté unique à l’investissement. Nous voulons explorer de nouveaux horizons de mise en scène, en lien avec la curiosité culturelle, en s’adaptant aux lieux, en écrivant la danse au fil des rencontres. Nous répondons aux commandes institutionnelles qui soutiennent les productions locales, parce qu’elles ont la clef des subventions. Parmi notre public, nous travaillons avec des personnes déficientes. Ces ateliers où ils sont acteurs sont faits de partages, d’échanges. Il y a une sorte d’immédiateté, une réelle joie de voir un trisomique danser par exemple. Pour les concours de danse, l’audience est déjà plus avertie, plus subjective. Au demeurant, peu importe le public ; nos thèmes sont libres et le spectateur-acteur finit par entrer dans des systématiques de jeu et de propos qui lui sont propres. L’ouverture entend avant tout une subjectivité de l’artiste. C’est la considération des hommes dans le monde. C’est comme jeter une bouteille à la mer. Ça s’adresse à qui en a envie et si on nous pose la question, on rate le but même de nos productions. Il y a ceux qui en parlent, et ceux qui font. C’est mieux de ne pas comprendre parfois, cela permet aussi de laisser la démarche artistique investir nos vies. Le spectateur idéal est toujours celui qui ne fait que passer pour, au final, rester.
Choisir son art, c’est avant tout choisir son TIAN moyen de communication. Il existe tellement de formes d’art ; en parler, c’est aussi parler du plaisir à l’exercer. Quand quelqu’un regarde une de mes œuvres, il y met du sien, de son histoire personnelle, de ses émotions. La vision adhère ou diffère selon chacun. C’est un processus instinctif qui tient de l’ambivalence humaine même : nous sommes quelque chose et son contraire. Une toile va donner un personnage, un lieu, des pistes graphiques et narratives. C’est là que chacun se fait son propre chemin. Pour le street art, ces histoires se narrent aussi dans le temps et la chimie qui altéreront les collages et offriront une nouvelle lecture. De même, peindre plusieurs toiles avec le même personnage offrent de fait d’autres versions de l’histoire. L’art est soumis aux mêmes règles de l’offre et la demande que n’importe quel produit, excepté qu’une œuvre achetée a déjà toute une histoire et un background. Il y a dans les aspects commerciaux une vision égocentrique qui n’est pas voulue ; travailler avec une galerie revient souvent à doubler le prix et ne pas pouvoir vendre directement. Il faut sortir l’art des galeries pour le rendre accessible à tous, alors qu’il y retourne malheureusement souvent vite. Le travail artistique est différent du management et de la médiation. Et la liberté artistique se retrouve un peu bridée dans le principe de répondre à une commande. Il faut se sustenter, certes, mais ce qui me plaît est d’investir un lieu et me l’approprier. Mon travail se trouve à New York, Londres, Paris, Toulouse, Le Mans, Nantes ; au Brésil, en Asie, au Mexique... Pour ce faire, j’ai rejoint le projet Street art sans frontières ; les échanges entre les 150 artistes du projet permettent une meilleure diffusion. Il y a dans ce collectif une attitude qui me plaît, comme le fait de travailler dans la mansuétude des villes. Ce sont des expériences nouvelles qui attendent au sein d’un collectif ; il y a des artistes qui te sont complémentaires. J’ai envoyé des dossiers pour monter des résidences artistiques au Brésil, un pays très axé sur le street art. Mais je ne vais pas attendre éternellement avant de faire quelque chose. C’est tout le problème de dépendre du financement d’une institution : outre les délais administratifs, tu ne sais jamais pourquoi ton projet est rejeté. Finalement, la reconnaissance de son travail par ses pairs et par le public est plus importante que d’accéder à une certaine notoriété. J’essaye de faire attention de rester accessible au public qui m’a soutenu depuis le départ.
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Rendre possible l’accès aux publics variés d’une œuvre constituée, légitimée par des experts, ou par la participation à des processus de création dans un lien de proximité avec l’artiste, les autres et soi-même. Les politiques culturelles doivent intégrer ces deux objectifs dans leurs relations aux citoyens. Ce n’est pas l’un ou l’autre : c’est ensemble qu’ils doivent faire médiation(s). L’enjeu actuel des politiques culturelles doit permettre que vivent mieux les “offrandes”, les bénéfices de la culture, tant au niveau individuel (réalisation intime, estime de soi, fierté, lien à des potentiels intimes non investis, transcendance) que collectif (établissement de lien social choisi et investi, réponse à l’isolement). De plus, cela donne modestement nos convictions : la culture – en tant qu’“objet” générique – n’est pas un supplément (d’âme) anecdotique. Elle est un droit, un bien commun essentiel, à partager, à toujours revitaliser. Enfin, pour affirmer qu’elle est plurielle, nous parlons des cultures !
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CONCRÈTEMENT COMMENT FAIRE VIVRE CE PROJET COMMUN ?
– 1. Concept développé par Geneviève et Claude Paquin, de l’agence Tertius.
Partons d’un exemple concret. L’Orchestre national des Pays de la Loire veut renouveler et rajeunir ses publics. La communication auprès de cibles jeunes et l’octroi de tarifs très faibles produisent peu d’effets. Alors, des “détours expérientiels” s’inventent avec l’université. Bastion d’un public jeune, elle choisit d’exercer sa responsabilité culturelle et sociétale en développant une politique volontariste, en complément des acteurs professionnels, au service d’objectifs partagés, notamment de démocratisation culturelle. Une master class est alors coproduite et animée par les cuivres de l’orchestre pour la fanfare de l’université. Ces musiciens joueront ensemble, professionnels et amateurs, sur les campus dans des lieux non dédiés à la culture pour créer la surprise. Par ces interventions impromptues, on contourne les freins cognitifs associés au genre esthétique : « La musique classique ce n’est pas pour moi ! ». Créons ainsi les conditions d’une expérience sensible, sensorielle, sensuelle ! Créons des chocs émotionnels qui ouvriront les interstices du désir de la réception et de la participation culturelle ! Faire vivre une dynamique au processus éphémère pour des traces durables (en soi, dans la relation au genre esthétique, sur les représentations associées à une pratique).
Prenons un autre exemple qui éclaire la diversité des processus qui s’invitent et s’inventent pour permettre une proximité entre art, cultures et citoyens. La création du panier culture repose sur la volonté de dessiner un circuit court entre artistes et habitants. Ce dispositif est à l’origine fondé sur différents principes : volonté de solidarité entre artistes, découvertes partagées entre spectateurs, convivialité, originalité tant dans les œuvres proposées au partage que dans les modalités de rencontre. Puis, cette expérimentation se teste, est confrontée à la réalité de sa mise en œuvre : des artistes dont les objectifs peuvent être différents – voire divergents –, des modes de coopération aidés et entravés par le déploiement d’Internet, des citoyens contributeurs qui peuvent être difficiles à trouver, des temporalités différentes, voire contradictoires (temps de l’événement et temps médiatique éphémères, temps long des transformations sociales)… Une expérimentation apprenante qui a du sens, au service d’une vision renouvelée et innovante des liens entre art, cultures et habitants !
Ces exemples nous montrent que faire vivre les contributions individuelles et collectives de la culture appelle et mobilise différents modes de transmissions (ascendants, descendants), modes de coopération, situations et contextes (dans les murs, hors les murs) permettant l’aller-retour entre une institution et les espaces publics du territoire. une démarche qui a une forte valeur symbolique : « La culture vient vers nous ! » Ils éclairent certains des défis des politiques culturelles : comment favoriser confiance (en soi pour oser aller vers des propositions, pour oser faire ; en la communauté associée à une pratique ; envers les institutions), proximité (géographique, identitaire, avec l’artiste et le processus artistique), et appropriation (dans un dialogue entre soi et l’objet culture) ? Comment mettre en place une politique de la relation1 ?
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Éclairons notre réflexion de la typologie proposée par Poirier2 : elle lui donne un cadre opérant pour nos débats. Cet auteur distingue en effet trois acceptions de la culture. Tout d’abord, une acception restreinte, ciblée sur les catégories historiquement établies de définition des arts et de la culture. Ensuite, une acception intermédiaire, qui tient compte de l’élargissement du domaine culturel mais demeure ciblée sur les activités artistiques et culturelles. Les activités associées aux jeux vidéo ou au web sont intégrées car elles impliquent pour les participants une composante artistique et culturelle. Enfin, une acception large (Unesco, Mexico, 1982) : « La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. » Cette conception de la culture considère les individus dans leur pluralité. Elle la pose comme une composante du développement humain, une source d’enrichissement réciproque et un facteur d’identité. Si notre vision repose sur cette dernière définition, il nous apparait que « la culture est la circulation du sens » (Patrice Meyer-Bisch)3. Et pour aller plus loin, convenons que la culture peut être appréhendée comme « la création et la circulation d’œuvres et de textes qui possèdent du sens, de la signification pour les individus en tant que créateurs, récepteurs et diffuseurs actifs culturellement » (Christian Poirier, 2013).
MAIS AU FAIT, DE QUELLE(S) CULTURE(S) PARLE-T-ON ? SINGULIER OU PLURIEL ?
UNE DYNAMIQUE D’INTERACTIONS ET DE MÉDIATIONS À FAIRE VIVRE AVEC CONVICTION !
On le voit, il ne peut plus s’agir seulement aujourd’hui de créer les conditions de l’accès à l’offre culturelle, mais de créer les conditions de la participation citoyenne, les conditions d’un possible qui renvoie chacun à ses responsabilités. Les processus de cocréation, les démarches
I
participatives y contribuent avec toutes les diversités de forme qu’illustrent les exemples qui viennent d’être décrits. Il s’agit d’élargir les fonctions et les champs de la médiation, qui devient plurielle et systémique : des médiations descendantes associées à des médiations horizontales (entre professionnels, externes et internes aux institutions) et ascendantes. On observe donc un élargissement des catégories d’acteurs qui s’engagent dans la mise en œuvre de ces systèmes de médiation, notamment par un maillage intensifié avec les acteurs sociaux du territoire.
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En somme, renforcer les liens entre cultures et citoyens passe par des défis à relever : en faire une priorité dans les choix politiques du vivre ensemble, faire évoluer les représentations de la culture des publics, citoyens et professionnels concernés, s’appuyer sur la créativité et favoriser les compétences collectives pour concevoir et mettre en œuvre des dynamiques de médiations. Prônons alors le dialogue entre des cultures substantielles (contenues dans les œuvres) et des cultures subjectives (dans la manière d’être), entre enracinement et arrachement au connu. Que ces rencontres, échanges féconds entre démocratisation (élargissement des publics), démocratie (expression des diversités culturelles en présence) et citoyenneté culturelle se poursuivent ! Les enjeux et responsabilités que chacun porte doivent dialoguer, et non s’opposer dans de vains combats de hiérarchie ou de territoire, pour permettre aux objets artistiques et culturels dans leur diversité, de mieux rayonner et de créer ouvertures et joies partagées ! N’est-ce pas là l’essentiel ?
EUROPA — FAITES ART !
« – 2. « La participation culturelle des jeunes à Montréal : des jeunes culturellement actifs », Christian Poirier, INRS, recherche réalisée pour Culture Montréal, 2012. 3. Coordonnateur de l’Institut interdisciplinaire d’éthique et des droits de l’homme, et chaire Unesco des droits de l’homme et de la démocratie, université de Fribourg, Suisse.
VOULE
ANALYSE
-VOUS FAIRE
À la fin des années 1950 un terme germe peu à peu dans l’esprit de nombreux artistes en Europe : la participation. La nouveauté de ce concept réside dans la volonté d’abolir la barrière invisible entre le public, l’œuvre et l’artiste au sein même du processus de création. Depuis la formation du groupe ZERO en Allemagne à aujourd’hui, tout nous pousse à penser cette notion autrement. Si les raisons de cette tendance sont diverses, on peut clairement évoquer le contexte de l’aprèsguerre, la politique répressive et autarcique de certains États et le besoin d’un art ludique et désacralisé comme terreau propice au fleurissement d’œuvres participatives. De l’art pour qui ? Si la réponse est pour l’artiste égotique, ses pairs et une poignée de gens laissée au hasard, alors, de l’art pour quoi ? De cet élan, plusieurs groupes d’artistes se croisent et se superposent un peu partout sur le continent, dans un but précis : faire tomber les carcans usés de l’art pour lui donner une forme sans cesse renouvelée, où l’humanisme et l’activisme occupent une place prépondérante.
12 L’AN ZÉRO
– grandpalais.fr/fr/article/ le-groupe-zero revue-emulations.net/ archives/n9/duchesneau
Il démarre concrètement le 11 avril 1957, date à laquelle se tient la première des nombreuses expositions du groupe ZERO – bientôt rebaptisé Zero – à Düsseldorf. Ses membres fondateurs, les Allemands Heinz Mack et Otto Piene, suivis en 1961 par Günther Uecker, sont considérés comme les premiers théoriciens de cette idée d’accessibilité de l’œuvre (notons les expériences antérieures des dadaïstes, plutôt tournées vers le public de théâtre). Ils vont faire de la lumière et du mouvement leurs principaux axes de recherche, se rapprochant de l’art cinétique. Dans leur revue Zero, ils soulignent la nécessité d’une base transcendant leurs productions, par une utilisation dérivée de notions universelles. Ils développent également le principe d’unicité, repris à chaque exposition, sur une seule et même soirée. On retrouve alors dans cette exploration brève et intense l’ancêtre du happening. Mais créer ces bulles artistiques où le spectateur réfléchit à la création ne suffit pas. Ces démarches novatrices doivent être projetées dans l’espace public. Il faut amener l’artistique dans la rue, donc dans le quotidien. On y perçoit les racines du street art, qui débutera son expérimentation urbaine à la fin des années 1960. Leur Zero ne s’approche en rien d’un nihilisme exacerbé. Au contraire, il est tout : point de départ et éternel recommencement, pour que jamais l’art ne revête une forme figée, ni que l’œuvre soit achevée. Rejoint par une centaine d’artistes en Europe et au-delà, Zero décide de sa mort en 1967,
ze Ma
d
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L’ART na
Fio
LE JE CRÉE ET TUE AUSSI
pour des raisons éthiques et de divergence d’opinions.Le champ d’expérience est vaste et des artistes se réunissent à Amsterdam, sous le nom de groupe NUL, à Milan avec le Gruppo nucleare, à Paris avec le Groupe de recherche d’art visuel (Grav), ou encore à Zagreb avec la Nouvelle Tendance – bientôt internationale – et le Op Art avec le Hongrois Victor Vasarely, dont les travaux sur les effets d’optique ont largement inspiré la création graphique. En France, des penseurs tels que Derrida, Barthes et Foucault revendiquent eux aussi la nouvelle position du spectateur dans l’art. Entre conception, réalisation et instrument-extension, l’individu intègre peu à peu l’espace de création de l’œuvre. Ces mouvements contestataires des dogmes établis se font critiques politiques et sociétaux. Ils tendent à l’utilisation de matériaux contemporains et forcent l’interrogation du public. Placé dans une position plus ou moins confortable, celui-ci est non seulement poussé à sa libre interprétation, mais amené à créer une nouvelle dimension à l’œuvre, riche de chacun. L’artiste doit alors s’effacer et faire naître le contexte propice à l’acceptation du public. Le metteur en scène polonais Jerzy Grotowski a, pour la première fois, bouleversé les codes du théâtre en amenant le spectateur à monter sur scène et à être mêlé aux comédiens.
LE JEU CRÉE ET TU AUSSI
Différents processus de participation se distinguent dont l’œuvre parcours et l’œuvre ludique, pouvant apparaître parfaitement imbriqués. Le divertissement joue un rôle important ici. L’artiste n’impose pas l’action du public, il lui propose une interaction avec son œuvre. Il lui laisse le pouvoir, que celui-ci soit mû par un refus ou par une acceptation. Le spectateur n’est plus simple regardant, il devient composant de l’œuvre. Le mouvement est une des données fondamentales de la participation : le corps est mis à contribution si l’artiste en force les conditions. Ici, l’art cinétique et l’art optique combinent le déplacement et l’amusement. Ces
EUROPA — FAITES ART !
NOUS
AVEC
T
ANALYSE
Le jeune artiste lituanien Ernest Zacharevic UN PETIT a participé au festival d’art George Town VÉLO, DEUX en Malaisie d’une manière plutôt originale. TÊTES Grand habitué des associations incongrues nin entre objets et trompe-l’œil, il a installé un vrai vélo on B y derrière lequel il a dessiné, avec sa patte réaliste, deux nn Fa enfants sourire collé aux lèvres. Il a par la suite invité chaque Malaisien qui le souhaitait à se prendre en photo devant ce drôle de vélo et à partager celle-ci sur Facebook. En bon artiste 2.0, il a donné l’adresse exacte de l’endroit où se trouve son œuvre, via Google Maps. À – force d’être “tagué”, le street artist qui préfère le pinceau houhouhaha.fr/ ernest-zacharevic à la bombe va assurément se faire un bon réseau !
?
mouvements se jouent pour l’un de l’action du vent, d’un élément motorisé ou du spectateur sur son œuvre, et pour l’autre des illusions créées par notre cerveau suivant notre position. Au gré des artistes et toujours dans cette volonté d’impliquer le public dans l’art, d’autres sens et plus particulièrement l’ouïe et le toucher viennent s’ajouter ou se soustraire à la vue. Aujourd’hui, les lieux où l’œuvre artistique prend place ont changé. Ils se sont déplacés pour traverser les murs et se poser sous l’œil, aguerri ou non, de chacun. Il semble que l’œuvre participative soit (presque) partout, même en classant dans une catégorie parallèle les ateliers et les centres socioculturels. Elle s’étend sur une échelle locale, dans les musées, les universités, par la médiation, le jeu, les éléments interactifs proposés… Les enjeux de cette inclusion du public dans l’art, autrefois liés à une contestation de la politique et de la société, sont désormais piliers démocratique et citoyen des directions prises par les décideurs publics et les directeurs de dispositifs culturels. Et le brouill-art s’installe sur l’origine, le choix objectif et la visée de l’œuvre dans tout cela.
– PartOUT ? Certains artistes comme Marina
elle est assise durant six heures
Abramovic vont bien plus loin dans
dans un état aussi neutre que
leur démarche. Ils ne veulent pas
possible et entourée d’objets (lotion,
seulement faciliter un accès à l’œuvre,
pistolet, fouet, hache, scalpel…).
ou faire participer “pacifiquement”
Elle en laisse au public une totale
le public, ils décident de le heurter.
liberté d’utilisation. La conclusion
Pour eux, le lien qui se crée doit être
est troublante : les actes violents
fort, violent, amenant à une réflexion
sont nombreux et bien plus présents
sur soi et sur les autres. Chacun
que les gestes qui la placent hors
est un instrument manipulé par des
de danger. Certains objets tels
forces intérieures et extérieures qui
qu’une rose sont même détournés
le dépassent. Dès les années 1970,
en instruments de torture. À la fin de
cette artiste serbe met en scène son
la séance, elle se lève et regarde les
corps comme lieu d’expériences pour
gens, tandis que ces derniers prennent
le spectateur. Au cours de l’une de ses
la fuite par peur du regard porté sur
performances poussée à l’extrême,
eux.
L’œuvre Horizons constitue la première LES des six installations du parcours artistique ÉTUDIANTS Les sentiers de l’eau, imaginé par l’artiste TOUCHENT Tadashi Kawamanta. L’idée est de faire DU BOIS redécouvrir la Camargue via un chemin au fil de l’eau. Le plasticien japonais a alors intégré dans ce projet, lancé en 2010 et implanté au mas du Pont de Rousty, des étudiants en école d’art, d’architecture et de paysage. Lors de workshops, ils ont donc collaboré et aidé à construire cette œuvre, toute de bois vêtue, matériel de prédilection de cet artiste. Le 1er mars 2013, – l’inauguration de cette structure a eu lieu et le projet nouveauxcommanditaires.eu/ fr/25/120/ suit à présent son cours.
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JR pratique l’art du collage photographique TON grand format un peu partout dans le monde. UNIVERS Suite au prix TED qu’il a remporté en 2011 IMPITTORESQUE ? en Californie, il met en place un projet participatif, Inside Out, dans lequel il propose à chacun de faire passer le message qu’il souhaite. Un projet citoyen et ambitieux qui vise à « transformer le monde » et qui l’amène de l’Équateur au Népal, en passant par le Mexique ou encore la Palestine. Cet art international a du succès, 120 000 collages ont voyagé dans plus de 108 pays différents depuis mars 2011. Les thèmes abordés parlent de diversité, de violence, d’espoir ou – encore du changement climatique. Il semble qu’entre les insideoutproject.net/ fr/about citoyens du monde entier et JR, ça colle ! En 2008, dans le cadre du week-end EMBOÎTER artistique « Ça tchatche », organisé par LE PA-RTICIPANT les Subsistances, un lieu culturel lyonnais, les plasticiens et chorégraphes autrichiens Daniel Aschwanden et Peter Stamer décident de faire parler les habitants du quartier de la Guillotière via des boîtes de 2 m 3 chacune. Les deux artistes distribuent entre trente et magazine boîtes et proposent à des personnes d’origines linguistiques très différentes de raconter leur histoire à travers leurs propres photos, dessins, légendes… Ils travaillent aux côtés d’associations qui relaient ce projet auprès de leur public, comme des étudiants en art, afin que chacun mette en place sa propre boîte. L’objectif des Subsistances est le suivant : « Rendre palpable une identité lyonnaise tissée d’intimités les plus diverses. » N’est-ce pas là un comble –peterstamer.com/ pour deux artistes venus de Vienne, de travailler avec urban-projects/ les-boites-de-lyon/ des habitants pour découvrir d’où ils viennent ?
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0 0 4 00 PE O 0 4 P UR 0 0 INTERVIEW
Malgré toutes ces pages, il restait encore beaucoup de questions soulevées avec l’arrivée d’une résidence artistique sur les différents campus de Nantes : la médiation, l’œuvre participative, le rapport entre l’artiste et son public. Et vice-versa. C’est donc au trio concepteur du projet Art Vivant Art Utile d’en faire les frais.
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À qui s’adresse cette résidence ? Louise Hochet : Aux universitains. Ce sont les étudiants, les chercheurs, les enseignants et techniciens, et toutes les personnes qui composent la population d’une université. Nous nous sommes demandé comment appeler toute cette population et cette dénomination semble être la plus juste. Quentin Bodin : On développe des pratiques qui deviennent des prétextes pour des temps de rencontre collectifs, par des dispositifs créatifs de plusieurs ordres : ateliers partagés, constructions et réflexions communes... avec l’idée de ne pas s’adresser uniquement à un public d’initiés.
Existe-t-il un art mort et inutile ? Youen Chéné : L’intitulé vient du processus de travail sur une question ouverte. « En quoi la poésie peutelle guider mon parcours professionnel ? » Art Vivant Art Utile est à la fois une affirmation et une question, posée à nous et aux universitains. Comme nous venons tous des arts appliqués, par essence, l’art nous est utile. Il doit aussi amener la vie, le dynamisme sur les campus. L : Derrière le vivant se cache l’humain. Nous sommes amenés à interagir avec les gens pour Art Vivant Art Utile. Nous cultivons le vivre ensemble. Beaucoup d’étudiants, de participants se demandent en quoi une proposition plastique les concerne. Ici, ça peut vous être utile. Faire une signalétique avec des plasticiens sur un campus où tout le monde se perd, c’est de l’art. Une pensée ne va pas être seulement utile pour une résidence mais aussi pour un quotidien. L’art peut s’appliquer à quelque chose. Où le projet puise-t-il son origine ? Q : La programmation est issue de la rencontre avec les universitains qui voulaient se prêter au jeu dans les BU, en octobre 2013. C’est avec leurs récits et histoires que nous avons composé les équipes, les lieux d’intervention, etc. pour mieux répondre aux problématiques qui ont été soulevées. C’est une démarche de dialogues, de concertations qui nous a amenés au fur et à mesure à concilier nos attentes et celles de l’université.
L : D’abord une histoire d’amitié avant d’être un projet professionnel. Suite à une rencontre avec la Direction de la culture et des initiatives (DCI), nous avons eu carte blanche et proposé un projet à l’université de Nantes. Le postulat de base a été rédigé par Youen et moi-même, avant de faire appel à Quentin : nous voulions une image, une identité visuelle forte. Sa démarche esthétique correspondait à ce projet. Nous sommes de cette famille pour qui un art participatif doit s’infiltrer dans les vies quotidiennes.
Un projet artistique se passe-t-il de contraintes ? L : Nous avions carte blanche pour cette résidence artistique, certes, mais aussi un contexte défini dans ses grandes lignes. Il fallait répondre également à ce que recherche la DCI. Rien n’a été refusé dans nos propositions mais ce sont surtout les consignes de sécurité qui auraient pu nous empêché d’accomplir ce que nous voulions. Nous ne faisons pas de feu dans une université ! Nous ne sommes pas dans une structure culturelle qui ne fait que ça ; nous avions proposé un projet plus important, mais les contraintes budgétaires sont inhérentes à cette institution. Alors, on décide d’accepter les règles du jeu, on ne se dit pas qu’on va tout changer mais on va composer avec toutes ces paramètres. Ça nous oblige à être très malléables. C’est à la fois un atout et une difficulté. Y : C’est notre métier que de faire ainsi. Une institution, y compris dans sa représentation concrète, un bâtiment, un lieu avec toutes ses règles, ses contraintes, voilà pour nous autant de supports de création. On a tous l’habitude de travailler avec des cahiers des charges. La contrainte est la matière première dont se nourrit le métier de designer. Résidence artistique ou événement culturel ? Y : C’est une problématique importante quand on travaille au milieu d’universitains ; comment faiton pour les mobiliser aussi longtemps autour d’une action ? L’événement est une réponse car il cristallise toutes les actions et les gens à un moment très précis. Le principe même d’une résidence se
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0 PR JETS O définit par son implication temporelle. L’intérêt est aussi de voir l’artiste à l’œuvre, d’en démystifier la pratique car il construit sur place et en collaboration. Le processus est intéressant puisque l’arrivée est le chemin. L : La résidence est faite de temps forts, de rendezvous en compagnie des collectifs et des artistes. Nous nous emparons de l’événement comme vecteur de projet. Une semaine d’atelier nous permet de nouer contact avec les participants : cela devient un projet. Les temps de restitution et les temps festifs sont mis à son service.
Quel est l’enjeu de cette expérience ? L : C’est un projet artistique super stimulant, de l’ordre du laboratoire car nous n’avons pas tout écrit en amont. Ce projet arrive en réaction à quelque chose. Pour nous, c’est passionnant de l’écrire à trois, au fur et à mesure. On va essayer d’aller là où nous ne sommes pas attendus. Y : Le laboratoire en effet ! Ça a été très intéressant de construire ce canevas dans la mise en œuvre, un protocole expérimental où nous invitons quelqu’un, ou un groupe de personnes, dans un lieu particulier et pour une question particulière, en lui demandant de produire un art vivant puis un art utile. Réunir ces conditions, c’est jouer au chimiste fou. L’enjeu est d’attendre de voir ce que va produire cette chimie sur les œuvres et les gens. Qui est le médiateur ? Le projet ou son public ? Y : Il y a deux stratégies : en faisant participer les universitains, en tant que cocréateurs, et en les plaçant dans une posture de spectateur. Depuis les installations au jour le jour, jusqu’aux moments de restitution après chaque intervention. L : Nous voulons nous situer à la frontière entre l’installation et la performance. On peut écouter une émission faite par Radio Charrette, repartir avec ses cartes, ses affiches. Pour nous, c’est aussi un retour sur ce qui est fait. En interrogeant les universitains, les quatre Art Vivant Art Utile se construisent aussi avec des personnes identifiées sur les campus. Q : Ce projet est très riche dans sa globalité.
Nous nous trouvons à la fois à la planification et à intervenir comme acteurs de sa réalisation. L’espace universitaire est stimulant. Il y a beaucoup de partenariats qui sont développés, et autant de projets tutorés. Par exemple, l’IUT Infocom de la Roche-sur-Yon fait face aux mises en pratique de problématiques de création ou de communication. Nous apportons notre savoir et nos expériences pour les guider dans la création du site internet de la résidence, être en charge des contenus, des mailings, des réseaux sociaux. Cela donne une série d’ateliers menées sous forme d’unité d’enseignement et de découverte (UED), à Nantes et La Rochesur-Yon : un rendez-vous hebdomadaire, tous les mardis pendant deux heures, sur la thématique de la communication extraordinaire. Et c’est ouvert à tous ! Il leur est demandé de réfléchir à des systèmes de communication différents de ce qui se fait aujourd’hui, de les concevoir ensemble et les réaliser plastiquement et physiquement. Les insérer de façon très simple dans l’environnement universitaire, dans les rues... En parallèle, un travail d’archives est mis en place chaque mois de résidence, à compter de janvier, jusqu’en avril 2014. Celui-ci sera distribué sur les campus en quatre parties qui formeront un objet-catalogue. Est-ce une action éphémère ou un acte pérenne ? L : Au-delà des installations, les campus auront la possibilité de se saisir de ce qui leur est proposé maintenant et de le poursuivre. Ces installations seront fonctionnelles un certain temps. Qu’elles vivent leur vie ! Elles disparaîtront ou seront exploitées, le changement fait aussi partie de la vie d’un campus. Tout n’est pas figé dans le temps, comme une fresque qui ne supporterait pas le graffiti. L’université est pleine de tout. C’est incroyable de se retrouver plongé dans une institution qui grouille de monde, avec tous ses possibles, ses ressources, ses personnes. C’est une énorme boîte à outils. Quasi à chaque nouvelle rencontre s’ouvre un projet. 40 000 personnes sur un campus comme celui de l’université de Nantes, c’est potentiellement 40 000 projets !
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VIVAN
ier Du 10 au 20 févr ère isi ta ur Co la de campus on La Roche-sur-Y T UTILE 02 ART VIVANT AR rmes Vives Signes avec Fo et le Fabricatoire
vrier u 7 fé antes a r e i janv rie - N Du 20 Lombarde UTILE 01 s T u R camp VIVANT A phonique io T d R a A rio R rrette Scéna Radio Cha c e av
Mercredi 19 févr ier 18h - campus de la Courtaisière La Roche-sur-Y on RESTITUTION de l’Art Vivant r Art Utile de Form rie es Vives fév cal antes et du Fabricatoi 0 t re di 2 u Bo e - N van Jeu h - a rderi rt Vi es 18 mba e l’A Viv Lo N d mes e pus UTIO e For atoir m ca STIT ile d abric RE rt Ut du F A et
vrier i 6 fé Jeud cafétéria ntes Na à la 16h - barderie - ivant V m t r o L A l’ s u e e camp TUTION d Charrett I io REST ile de Rad t Art U
ART
u 18 avril, Du 20 janvier a Utile Art Vivant Art c les se fabrique ave universitains e (les habitants d n a N tes) l’Université de dre l’art et tente de ren utile à leur vie sur les campus.
Retrouvez l’actua lité de ce projet sur : blogs.univ-nantes .fr/artvivantartuti le
Quatre arts viv ants arts utiles par quatre collectifs de cr éatifs : Radio Charrett e fera entendre le s mondes parallèles du ca mpus Sciences, Form es Vives et le Fabricato ire imagineront un e signalétique po ur le campus de La R o sur-Yon, la Brich chee Foraine révèlera des pro menades sur l’ilôt de la F leuriaye, et le Collectif E TC ré-inventera le grand hall de Tertre.
mars au 28 uriaye 0 1 u e D Fl us la camp arquefou ILE 03 C UT e ART ANT romenad V I V P T e n n R i A ora llatio Insta a Briche F l avec
uite rod lture e, p enc de la cu ersité id s iv é is ion l’Un te r Cet Direct es de par tro e la tiv par s initia t mené és, s e it et d ntes, e urs inv ienne, a e tic de N s créat t, plas r, e e ne jeun e Hoch , desig phiste. é is a Lou n Chen din, gr o e You entin B u et Q
r Rendez-vous su t endan les campus et p tion, stitu les temps de re ialité ! en toute conviv
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Du 14 au 24 avril Sur les campus Du 7 au 18 avril Nantes l’U de niversité de Vivant campus Tertre rt l’A de - Nantes RESTITUTION ART VIVANT AR T UTILE 04 Art Utile du Collectif ETC Expérimentatio n d’espace et de la résidence Art Vivant avec le Collectif s des petites ETC Art Utile à traver liées formes bleues ion à la programmat al iv st Fe N du FU
s Jeudi 27 mar al oc B au 18h tes barderie - Nan campus Lom N RESTITUTIO Utile rt A t an iv V de l’Art ine ra de la Briche Fo
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