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Le livre d’Annie Lacroix-Riz « La non-épuration en France de 1943 aux années, 1950 »����������������������������������������������������

Notre Réveil, avec retard, tient à porter à la connaissance de tous, le livre d’Annie Lacroix-Riz « La non-épuration en France de 1943 aux années, 1950 » publié chez Armand Collin, 2019

A un moment de troubles, commençait à régner dans notre pays, le travail scientifique de l’auteur Annie Lacroix-Riz mérite d’être connu du plus grand nombre à l’heure que notre République au plan intérieur et au plan international. Ce qu’Annie Lacroix-Riz étudie dans cet ouvrage de façon systématique, la non épuration de fait au sortir de l’occupation nazie, apparaît aujourd’hui crûment comme constituant une des causes des phénomènes funestes, politiques, sociaux, culturels auxquels nous assistons aujourd’hui, avec le retour des mêmes fausses idées portées le plus souvent par les descendants ou les héritiers intellectuels de ceux qui avaient déjà failli de 1940 à 1945 et qui, globalement, ont continué à jouir après la libération de leurs privilèges mal acquis. Cet ouvrage prolonge d’ailleurs un autre travail clef du même auteur car il annonçait avant 1939 les tendances qui se faisaient jour au sein des classes possédantes françaises prêtes à brader leur pays pour maintenir leurs privilèges et collaborer avec celui qui allait être l’envahisseur, l’oppresseur et l’exterminateur : Le choix de la Défaite : Les élites françaises dans les années 1930, Paris, Armand Collin, 2008. Il s’agit toujours des mêmes élites, celles de l’entre-deux-guerres, celles de la capitulation et de la collaboration, et celles de la non épuration et donc de la continuité après l’occupation. Dans cet ouvrage, de 664 pages, nous retrouvons tous les éléments qui devraient permettre à un chercheur ou à un citoyen voulant comprendre la situation de son pays de découvrir et de comprendre pourquoi les milieux, les personnages, les réseaux qui ont participé activement au cours de l’occupation nazie à la collaboration politique, policière, économique, culturelle n’ont pas été déracinés après 1945. Pour résumer l’ouvrage, comme l’écrit ALR, constatons que « Papon ne fut pas l’exception mais la règle » (p. 512). Ont donc non seulement survécu à ladite épuration tout un groupe, tout un milieu, toute une classe en fait, qui ont conservé pour une grande part leurs réseaux de pouvoir, qu’ils allaient mettre ensuite au service et des guerres coloniales et de l’arrimage anticommuniste de la France à la puissance d’outre-Atlantique, avant de reprendre langue avec une Allemagne fédérale largement rebâtie par les occupants nord-américains sur la base des milieux allemands qui avaient participé au nazisme et qui poursuivaient leur combat anticommuniste sous l’égide du même parrain américain qui allait mettre en place, dans la foulée du plan Marshall, lui aussi, un « nouvel ordre européen » répondant sur plusieurs points cruciaux aux rêves caressés, sous une forme adoucie, par les nazis et leurs collaborateurs européens. Hormis quelques personnages symboles trop connus et visés par l’épuration, surtout des « danseurs, journalistes, acteurs » (p. 514), la cohorte des politiciens, généraux, amiraux, banquiers, industriels, ecclésiastiques compromis garda dans la plupart des cas ses biens, ses privilèges, ses réseaux de pouvoir, ses complicités. Et ce sont leurs descendants et associés qui semblent devoir continuer à diriger la France jusqu’à aujourd’hui. S’appuyant sur une bibliographie considérable, des documents originaux et des études approfondies, américaines, britanniques, allemandes, françaises s’étendant sur toute la période et toute la France mais les colonies et protectorats, ALR analyse le sort de personnages se mouvant au sein d’un milieu occupé à collaborer politiquement, économiquement, dans les activités policières, la répression, la déportation des juifs, la diplomatie en direction des Etats de l’Axe, du Vatican et des Etats-Unis. On comprend dès lors comment une classe dirigeante se maintient aux affaires par-dessus les aléas de la conjoncture dès lors qu’elle n’a qu’un seul véritable ennemi, les classes travailleuses, donc les communistes. Car c’est l’anticommunisme, la peur du communisme, qui explique et légitime la continuité de ces élites funestes avant, pendant et après la guerre, jusqu’à leur engagement dans l’appui aux guerres coloniales, à l’adhésion à l’OTAN, à la « construction européenne », à la reconstitution du « couple franco-allemand ». L’auteur de ce livre détruit pan par pan le mythe d’une épuration de masse, violente, radicale, sauvage. Dans le livre, résident les raisons qui expliquent pourquoi on se doit de redécouvrir la face noircie de notre histoire et pourquoi le lecteur engagé aujourd’hui pour « l’amitié, la solidarité, la mémoire, l’antifascisme et la paix » ne peut manquer d’avoir lu ce livre et de le faire connaître autour de lui.

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Bruno Drweski (Extraits)

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