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FACHO vs ANTIFA LE 13eeDES EXTRÊMES DEUXSOUS-CULTURES SOUS-CULTURESÀÀLA LALOUPE LOUPE DEUX
OLYMPIADES UN ÉTÉ AVEC LES LASCARS DE LA DALLE PHOTOREPORTAGE LE STREET ART S’AFFICHE EN XXL DANS L'ACTU DU 13e
RENTRÉE SCOLAIRE : CE QUE CHANGE LA RÉFORME DANS LE 13e MUNICIPALES 2014 * CERNÉS PAR LES ANTENNES RELAIS BON PLAN RESTO * SORTIES
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F : 3.90 € R 28895 - 0032 -
N°32
SOMMAIRE
Septembre 2013 — www.le13dumois.fr
© Carl Hocquart
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n°32
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p.03
Édito
POLITIQUE
p.06
Courrier des lecteurs
p.08
Le 13 en bref
p.48
Sélection sorties
p.12
p.57
Billet - L'inconnu-e du 13
p.16
p.58
L'image du mois
p.17
p.10
Municipales 2014, que dit le MoDem 13e ? SOCIÉTÉ
p.18
Antennes relais, ça pousse de partout — Encore des malfaçons à la Fac Diderot — Rentrée scolaire : Quoi de neuf avec la réforme ? DOSSIER
LE 13e DES EXTRÊMES vs ANTIFA FACHO DEUX SOUS-CULTURES À LA LOUPE Illustration de couverture : Jean-Baptiste Thiriet
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13e ŒIL p.28 p.34
Photoreportage : Du street-art en XXL — Reportage : Un été avec les lascars des Olympiades PORTRAIT
p.40
Milena Salvini et Isabelle Anna du Centre Mandapa
MÉTRO MON AMOUR, MA HAINE p.52
Des comédiens sur la ligne 6 LOISIRS
p.56
Un resto, un chef, une recette : Ludovic Palombra du Cacio e… Pepe — Bon plan resto : Les Pieds sous la Table
P.15
S'ABONNER
P.07
COMMANDER LES ANCIENS NUMÉROS
p.54
PAR-DESSUS LE PÉRIPH' p.44
À Ivry, le lifting urbain fait grincer des dents SPORT
p.46
Dans le seul club de footbag de Paris
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SOCIÉTÉ
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Antennes-relais : l’implantation (à marche) forcée Texte : Philippe Schaller
Avec l’arrivée du réseau de quatrième génération, la 4G, et de Free sur le marché de la téléphonie mobile, les antennesrelais fleurissent à Paris et dans le 13e. Il y en aurait déjà plus de 250 dans l’arrondissement, et ce n’est pas fini. Si les opérateurs veulent offrir la meilleure couverture possible à leurs clients, des collectifs de riverains et des médecins tirent la sonnette d’alarme. Mais qui décide de l’implantation des antennes-relais ? Les opérateurs sont-ils tout-puissants ? Les citoyens ou les maires peuvent-ils s’y opposer ? Nous avons voulu y voir plus clair.
L
es yeux rivés vers le haut des bâtiments, Marco et Marion ne voient plus que ça. « Quand on observe attentivement les toits, on se rend compte qu’il y en partout », se désole la jeune femme. En juin, trois antennes-relais de téléphonie mobile ont poussé sur l’immeuble en face de chez eux, au pied de la Butte-aux-Cailles. Marco et Marion ont décidé d’en faire leur combat. Les deux trentenaires ont sollicité l’aide des Robins des toits et de Priartem, deux associations connues pour leur lutte contre les antennes et les ondes électromagnétiques, et cherchent des riverains qui voudraient les rejoindre (1). Leur ambition : informer et mobiliser les habitants, « accomplir une démarche publique symbolique pour rendre un peu plus visible un danger sanitaire potentiel encore mal connu ». « C’est le moment de dire non », clament-ils. Il y a déjà plus de 250 antennes-relais sur les toits du 13e, invisibles à l’œil non-averti. Et ce n’est pas près de s’arrêter. Mais qui décide de leur implantation ? Lorsqu’un opérateur veut installer une antenne, il prend contact avec les bailleurs ou propriétaires potentiels et remet un dossier à l’Agence d’écologie
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urbaine, qui dépend de la Mairie de Paris. Celle-ci renvoie le dossier vers la Mairie d’arrondissement qui peut organiser une réunion avec les riverains. Elle le peut, mais n’en a pas l’obligation. « La Mairie d’arrondissement est tenue d’informer les citoyens, ça peut juste se faire via son site Internet », confirme Mao Peninou, adjoint au maire et président de la commission de concertation. Si elle donne un avis favorable, l’antenne sera installée après avis de l’Agence de l’urbanisme ; sinon, le dossier est renvoyé en commission de concertation, pour discuter à nouveau avec les maires concernés, les associations et les opérateurs. La commission de concertation, simple « chambre d’enregistrement » Discuter, mais souvent faire passer. « Les associations et même le monde politique n’ont plus leur mot à dire », soupire Janine Le Calvez, présidente de l’association Priartem, qui dénonce une simple « chambre d’enregistrement ». Au début de l’été, deux
L’unanimité des copropriétaires est normalement requise pour tout projet d’implantation. Les locataires, eux, n’ont pas leur mot à dire.
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Après une année de tergiversations, le conseil de Paris a adopté en octobre dernier une nouvelle charte pour quatre ans, négociée avec les quatre opérateurs mobiles (Orange, SFR, Bouygues, Free). Présentée comme un compromis entre l’exposition aux ondes et la qualité de la couverture, la charte fixe un niveau maximal d’exposition de 5 volts par mètre (V/m) pour la 2G et la 3G, et de 7 V/m pour la 4G. Des données rassurantes par rapport à la loi française qui fixe des valeurs limites comprises entre 41 et 61 V/m ! La charte offre donc le meilleur cadre de France et les Parisiens sont mieux protégés qu’ailleurs. Mais pas de triomphalisme pour autant. Les associations font remarquer que les seuils ont été relevés, en contradiction avec l’engagement pris de défendre un objectif de 0,6 V/m. « À ce niveau-là, le réseau de téléphonie mobile à l’intérieur des bâtiments serait perdu », s’indignent les opérateurs. Mao Peninou, le président de la commission de concertation, rappelle que le mode de calcul a été modifié. « Désormais, c’est le pic pour chaque antenne-relais qui est retenu et non plus une mesure moyenne. » Cette nouvelle règle conduirait, selon lui, à abaisser le seuil d’exposition de 2 V/m [la limite fixée auparavant, ndlr] à 1,6 V/m.
réunions étaient organisées pour évoquer l’installation d’une centaine d’émetteurs dans la capitale. La première a tourné court lorsque les associations se sont rendu compte du temps accordé à chaque dossier. « Entre deux et quatre minutes, c’est de l’implantation forcée », enrage encore Étienne Cendrier, porteparole des Robins des toits. D’autant « qu’on a découvert un certain nombre d’installations sauvages déjà réalisées, en rupture avec les engagements pris par les opérateurs », renchérit Janine Le Calvez. Au final, seuls une quinzaine de dossiers sur la centaine « discutés » ont été reportés. Qui plus est, « ce sont rarement des refus définitifs, explique Mao Peninou, plutôt des dossiers à revoir. » Aucun espoir tangible, donc, qu’un projet d’implantation échoue. D’autant qu’avec l’arrivée de Free et de la 4G, et l’obligation – fixée par la charte (lire l’encadré) - pour la Mairie de répondre sous quatre mois à tout projet, l’implantation se fait à marche forcée. Alors les simples citoyens peuvent-ils s’y opposer ? « Non, sauf si l’on est propriétaire, et encore », confesse le président de la commission de concertation. L’unanimité des copropriétaires est normalement requise pour tout projet d’implantation. Les locataires, eux, n’ont pas leur mot à dire. En août 2009, Guy Puybaret remportait pourtant une incroyable bataille. Le TGI de Créteil interdisait l’installation d’une antenne sur le toit de son immeuble, avenue d’Italie, au nom du principe de précaution, une première pour des adultes. « Elle devait être installée à dix mètres de mon lit ! », fulmine encore le septuagénaire. Mais peu !
LES ANTENNES DANS LE 13e Orange SFR Bouygues Free Antennes équipées de la 4G
Source : Agence nationale des fréquences (ANFR).
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SOCIÉTÉ
GRÂCE À LA CHARTE, LES PARISIENS SONT LES MIEUX PROTÉGÉS DE FRANCE
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Texte : Pierre-Yves Bulteau et Virginie Tauzin Photographies : Mathieu Génon
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DOSSIER
C’
était le 20 septembre 1979. Aux abords de la place de L’Abbé-Georges-Hénocque, trois hommes surgissent en plein cœur du 13e et font feu. Sous leurs balles, l’activiste de gauche Pierre Goldman s’écroule. Cet assassinat encore non élucidé sera le dernier ainsi planifié en France. L’arrivée de la gauche au pouvoir, deux années plus tard, marque la fin de la violence politique entre membres d’extrême droite et d’extrême gauche (lire l’interview de Nicolas Lebourg page 23). Pas celle de la violence radicale. Ainsi, dans les années 80-90, Paris est au centre d’affrontements incessants entre skinheads et chasseurs de skins. Ce sont les années où le leader du FN n’aime rien plus que de s’afficher auprès de gros bras comme ceux de l'Œuvre française de Pierre Sidos, plus vieille officine d’extrême droite créée en 1968 et dont le local de la rue Caillaux a été fermé au cœur de l’été suite à sa dissolution le 24 juillet dernier (lire page 20). L’Œuvre française qui se retrouvera mêlée à la mort de Brahim Bouaram, jeté dans la Seine en marge d’un défilé du 1er Mai frontiste de 1995. Et puis, plus grand-chose. Malgré la mythologie récurrente chez ces groupes, la rue appartient de moins en moins aux Tolbiac’s Toads (lire page 24). Les années 2000 signent la marginalisation des « fafs » et des « antifas ». Les mouvements Manifeste contre le FN et Ras l’front se dissolvent nationalement, réduisant à quelques milliers le nombre de leurs militants. En face, ils ne sont guère plus nombreux. Le plus souvent, ce sont des lycéens et des étudiants qui se provoquent et s’affrontent lors de « bastons éclair » en marge de rassemblements d’extrême droite. Des soubresauts idéologiques très minoritaires d’où peut encore surgir la mort. C’était le 5 juin 2013. À la sortie d’une vente privée, deux bandes se chauffent. L’altercation se solde par le décès du jeune militant antifasciste Clément Méric. Un rappel tragique et révélateur d’une société que l’on voudrait « en pleine panique morale ». Ce à quoi Louis Aragon répondait : « Si l’extrême gauche a oublié que qui veut faire l’ange fait la bête, l’extrême droite, elle, exprime la barbarie qui demeure sous la mince pellicule de la civilisation. » " P.Y.B.
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DOSSIER
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L’ŒUVRE MISE À PIED Le 24 juillet dernier, l’Œuvre française était dissoute par Manuel Valls. La plus ancienne organisation d’extrême droite, antisémite et pétainiste, tenait permanence dans le quartier chinois.
L
a façade est barricadée par deux épais volets et la porte refermée d’une lourde palissade de bois. Tout semble peint d’un seul coup de rouleau et d’une couleur unique, un blanc cassé à moitié translucide, qui à certains endroits laisse deviner les précédents passages de militants antifascistes. Un après-midi du mois d’août, on se doute qu’on ne relèvera au 4 bis rue Caillaux aucune activité. Le local était celui de feu l’Œuvre française, organisation ultra-nationaliste dissoute par le ministère de l’Intérieur en juillet, conséquence de l’assassinat de Clément Méric par un skinhead le 5 juin à Paris. Derrière cette décision politique : faire baisser le rideau à une officine aux relents racistes, antisémites et baignée dans le culte de Pétain, Brasillach, Maurras et d’autres figures liées à l’Allemagne nazie. En 1995, ce sont d’ailleurs des skinheads proches du mouvement qui jettent Brahim Bouaram dans la Seine en marge du défilé du 1er Mai. L’un des rares moments où l’Œuvre française fait les grands titres de l’actualité. Pour avoir longtemps jouxté ce local - du temps où elle n’était pas encore rue des Tanneries -, la rédaction du 13 du Mois, tout autant que la plupart du voisinage, témoignera que seul le regard attentif d’un initié pouvait apercevoir, par un interstice, un portrait de Pétain, une croix celtique, une affiche SS, ou reconnaître Pierre Sidos, fondateur du mouvement, à la caisse du G20, un peu plus loin dans la rue. Difficile, également, de remarquer ses membres vêtus d’une chemise bleue, uniforme rappelant celui des Phalangistes espagnols
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(organisation fasciste) des années 30. Des exceptions, il y en eut pourtant. Encore récemment. Les jours de Manif pour tous, le 4 bis rue Caillaux était le point de ralliement des skinheads et autres fascistes. Une cinquantaine, parfois, stationnaient en face du local, sous une voûte. À quelques encablures, pas vraiment planqués, une paire de « RG » consignaient leurs moindres faits et gestes.
— Wallerand de Saint-Just
« LE FN N’A AUCUN ATOME CROCHU AVEC L’ŒUVRE FRANÇAISE » Secrétaire départemental et trésorier du Front national, Wallerand de Saint-Just se présente aux municipales à Paris. Le 13 du mois : Comment avez-vous réagi à l’annonce de la dissolution de l’Œuvre française et des Jeunesses nationalistes ? Wallerand de Saint-Just : Nous n’avons pas vraiment d’opinion sur le sujet car nous ne les connaissons pas. Nous sommes un mouvement politique qui a pour principal objectif de se présenter à des élections, donc nous n’avons aucun atome crochu avec eux. Ces gens vivent dans la rancœur, avec une nostalgie pour Pétain. Ils finiront confits dans des bocaux et on les mettra sur des étagères.
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DOSSIER
— Récit
LE 13 A COGNÉ © DR
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Les Tolbiac's Toads.
Ils étaient environ 200 de chaque côté et s’étrillaient à coups de battes de base-ball dans le Paris des années 80. Alors que les Tolbiac’s Toads se formaient autour de l’université et que la bande de Batskin, alias Serge Ayoub, commençait à s’imposer, les quartiers du 13e se réveillaient pour « nettoyer la capitale des fachos », comme ils disaient.
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L’
ancien chef des Red Warriors tient un bar à Paris, du côté de Ménilmontant. Un bar comme les autres ou presque : si, à 44 ans, Julien Terzics ne fait plus partie d’un gang depuis longtemps, son rade est le point de chute des antifas parisiens. Sur son teeshirt noir, une inscription en lettres blanches : « Antifa Motorbike Club », preuve que les premières amours ne sont pas enterrées. Il commence par la fin : « Dès 1990, ç’en était fini de cette période où on se disputait la rue. Les skins se planquaient et de toute façon il n’y avait plus d’idées. Les jeunes qui rejoignaient les chasseurs volaient, cassaient des vitrines. On était plus dans le même délire. » Kim, son compagnon de descentes (voir encadré), qui habitait alors l’avenue d’Ivry, confirme : « On a rayé les Tolbiac’s Toads du 13e en 1989. Il n’y en avait plus dans les rues, ils restaient dans leurs permanences. »
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— Photoreportage 13e ŒIL
Street art Longtemps confiné aux murs à l’abandon et aux squats, le street art est aujourd’hui l’apanage de la municipalité du 13e qui, en passant commande auprès d’artistes mondialement connus, décore la ville sur des pans gigantesques. N’en demeure pas moins une pratique spontanée et officieuse très prégnante.
Fresque réalisée au 93 rue Jeanne d'Arc par Shepard Fairey, alias OBEY, en juin 2012. L'artiste américain s'est forgé une réputation internationale en créant la célèbre affiche « Hope » pour la campagne électorale de Barack Obama en 2008.
C’
Texte : Virginie Tauzin Photographies : Mathieu Génon
XXL
est avant tout une sympathique idée de balade, à laquelle on n’aurait pas pensé il y a encore quelques années. Le décor de l’arrondissement s’est doté de couleur et de poésie, c’est vrai. En long et en large. Sur des murs d’immeubles hauts de dix étages, sur des enceintes de cours d’école, dans les grandes avenues comme dans les rues plus étroites, dans chaque quartier. Ce que l’on nomme le street art prend de la place et s’affiche aux yeux des passants. Les monstres de Cyklop habillent les potelets de trottoir rue Goscinny, un éléphant au trait blanc sur fond noir (œuvre de Baudelocque) habite rue Bobillot, tandis qu’à la Butte-aux-Cailles un toucan, une bombe de Miss.Tic, des étoiles de Jef Aerosol et autres collages champignonnent et se renouvellent sans cesse. Qu’est-ce qui a changé ? Michel Palacios, dit Paëlla, artiste et résident des Frigos depuis 1985, retrace la petite histoire : « Les murs ont toujours permis aux artistes de s’exprimer, mais avant, dans les années 80, ils trouvaient des murs abandonnés, ici aux Frigos comme dans les squats de la rue Watt, et généralement sur tous les murs jusqu’au Quai de la gare. Puis les graffeurs de banlieue, avec leurs tags, sont venus les remplacer, montrer qu’eux aussi pouvaient signer. L’art de rue s’est progressivement déplacé vers des endroits plus fréquentés, et il est devenu à la mode . » Ce qui a changé, c’est aussi qu’on nous invite à regarder. Le 8 juin dernier, au 2 rue Emile Deslandres, dans le quartier
Croulebarbe, le maire Jérôme Coumet présentait en grande pompe la peinture de Seth, alias Julien Malland, réalisée dans le cadre des journées portes ouvertes de l’association Lézarts de la Bièvre, partenaire de la mairie. « Les institutions ont récupéré le phénomène, même si Jérôme Coumet est sincèrement un amateur de ce type d’art », poursuit Paëlla. Les partenariats, notamment avec la galerie Itinerrances, se sont multipliés, offrant des pans de murs à des artistes très connus comme C215, l’Américain Obey ou le chilien Inti. « Nous payons la peinture et tout le matériel nécessaire, explique Catherine Van de Wyngaert, membre de l’association Lézarts de la Bièvre, mais avec les subventions de la municipalité et aussi, un peu, de Paris Habitat. » Les œuvres sont en effet presque toujours réalisées sur des bâtiments publics, sauf quand une copropriété en fait la demande. « Les gens que cela intéresse sont invités à le faire, précise Catherine Van de Wyngaert, nous pouvons les financer avec nos subventions. » « Il ne faut pas peindre un mur à tout prix simplement parce qu’il n’y a rien dessus, oppose Paëlla. L’initiative de la municipalité est difficilement critiquable, cela met de la couleur dans la rue, mais il est difficile de ne pas y voir une stratégie de communication. » Sur les centaines de peintures, pochoirs, stickers, mosaïques, graffitis ou affiches visibles dans l’arrondissement, très peu sont ainsi institutionnalisés, et beaucoup réalisés sans autorisation par des artistes moins exposés. !
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35˚lasur
Un été avec les jeunes des Olympiades
Texte : Jérémie Potée Photographies : Mathieu Génon
dalle
Dix jours durant, on est allé voir ces jeunes hommes qui végètent toute la journée dans un recoin des Olympiades. Il y a des « petits » et des « grands » ; quand certains se bougent pour s’offrir d’autres horizons, d’autres ont décroché, qui ont connu ou connaissent encore la prison. En guise de fil rouge surprise, des anciens de la « bande des Spartiates », telle que nommée par des médias au moment de leur mise en cause dans un fait divers de sinistre mémoire, trois ans plus tôt. Rencontre estivale avec ces gamins des quartiers pour qui les vacances sont un concept obscur.
C
haque jour en milieu d’après-midi, fuyant la fournaise et l’inoccupation, un attroupement de bonshommes se forme au débouché d’un passage commerçant menant à la dalle. À la charnière des mois de juillet-août – Cahuzac en commission d’enquête parlementaire, le déraillement du train espagnol, le bébé de la belle-fille de la Queen -, l’actualité qui leur est parvenue est celle des violences de Trappes, échauffourées estivales provoquées par l’ennui. Si l’écho de la banlieue se répercute sur le béton du 13e, la torpeur parisienne n’est pas comparable, moins encore aux Olympiades. Les grandes avenues du quartier chinois ne montrent plus leur frénésie habituelle, mais on circule encore beaucoup sur la dalle, véritable carrefour piéton du 13e arrondissement. Attablés à la terrasse d’un vaste café tenu par des Asiatiques, des étudiants de retour de Chine partagent leurs souvenirs et babillent sur le cadre local, « pensé comme un petit village dans la ville. » À cinquante mètres d’eux, les « gars du passage » feraient plutôt penser à une cité sensible. Ainsi en est-il de cet endroit : avec son architecture inspirée de celle des paquebots, il agrège des réalités toutes différentes. Riches, pauvres et étudiants ont en commun cette esplanade cernée par des barres HLM, moins hautes que ces tours aux appartements cotés d’où l’on peut s’offrir une sacrée vue de Paris. L’année dernière, occupé à tenter de résumer la dalle des Olympiades dans le cadre d’un dossier « spécial 40 ans », Le 13 du mois donnait la parole à un grand frère en rogne. Son propos, publié en cette présidentielle gorgée de discours excessifs, avait quelque chose d’un exutoire. Les boucs émissaires des cités voyaient, avec la défaite de Sarkozy, disparaître leur pourfendeur en chef.
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À l’été 2013, c’est grâce à Olivier que nous avons pu taper l’incruste parmi les jeunes gars repliés dans un interstice du monstre Olympiades. À l’époque, il en parlait comme des « petits ». L’âge de ceux qui restent là à l’année oscille en réalité entre la fraîche majorité et la trentaine bien tapée, avec enfants à charge. Les grands, comme Olivier, n’en sont jamais bien loin, au propre comme au figuré : ils n’ont pas plus de boulot que leurs cadets et traînent quelques condamnations pas si lointaines. Eux-mêmes ont d’ailleurs toutes les peines du monde à définir ces 18-25 ans dans la dèche. En dessous, dans leur langage, il y a les « petits » ; au-dessus, les « grands ». Mais entre les deux ? De jeunes hommes au chômage, comme une bonne part de leur génération d’âge. À ceci près que sans boulot à Paris, pas de vacances possibles hors de Paris. Alors, il y a ces formes géométriques à occuper – arcades, passages et rambardes savamment entremêlés, presque ludiques. Et les potes qui se succèdent, surgissant de toute part, faisant et défaisant le groupe. Ils ne sont pas pour rien dans leur désœuvrement, mais il est un fait que les structures socio-éducatives ne sont pas armées pour les prendre en charge : près d’eux, il y a un Espace jeune dont ils n’ont cure. Il y a quelques raisons à cela. La nuit en prison, la journée sur la dalle La première d’entre ces raisons, c’est que certains sont déjà pris en charge par l’administration pénitentiaire. Dès le premier jour, on croise Adama. Il est en semi-liberté, roule en trottinette sur la dalle, va et vient parmi ses potes tous réunis sur leur muret, à l’issue d’un passage face au Lidl. Il s’intronise la tête de file du groupe de jeunes gens, !
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13e ŒIL
Il y a ces formes géométriques à occuper – arcades, passages et rambardes savamment entremêlés, presque ludiques. Et les potes qui se succèdent, surgissant de toute part, faisant et défaisant le groupe.
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PORTRAIT
— Milena Salvini et Isabelle Anna du Centre Mandapa
Ballades en
Kerala
Créé en octobre 1975 par Milena Salvini et Roger Filipuzzi, le Centre Mandapa fait résonner, depuis 38 ans dans le 13e arrondissement, les contes et musiques du Kerala. Détails d’une histoire hors norme avec ses deux actuelles directrices, Milena Salvini et sa fille Isabelle Anna. Texte : Pierre-Yves Bulteau Photographies : Mathieu Génon
À droite : Isabelle Anna (au premier plan) et sa mère, Milena Salvini, à droite.
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S
ans même avoir franchi la minuscule porte d’entrée, on la devine. Courge majestueuse, vernie et ornée de décorations typiques. Caressée par cet archet courbe, elle est l’instrument « bourdon », indispensable au bon déroulement d’un concert de musique classique indienne. La tampura et ses cordes, uniquement jouées à vide, accentuent la tonique et la quinte durant l’exécution du râg. Elle permet au chanteur d’obtenir tous les sons et les modulations possibles et de sublimer ses chants. En cette fin juin, les habitués se pressent au Centre Mandapa. Habitants du 13e ou de la couronne parisienne, pour rien au monde ils ne rateraient l’un des concerts si spécifiques à cet espace entièrement dédié à la promotion des arts du spectacle traditionnels et contemporains. Le monde et ses cultures y sont les invités permanents, tandis que l’Inde en est la clé de voûte. L’aventure débute en octobre 1975, quand Milena Salvini et son mari Roger Filipuzzi tombent sur cet ancien laboratoire de radiologie, au 6 de la rue Wurtz. « C’était un hangar en ruine, se souvient la programmatrice, d’épaisses lunettes fumées vissées sur le regard. Mon mari est parti des fondations pour construire à neuf
ce théâtre. Cela fera 38 ans en octobre. » La devanture confidentielle et son hall d’entrée ressemblent à s’y méprendre à ceux de ces salles paroissiales dédiées au théâtre ou au cinéma d’art et essai. Là aussi, l’accueil y est franc, décontracté. Après avoir acheté son billet, l’eau d’une bouilloire fumante n’attend que de tourbillonner dans une tasse de thé. Puis l’on perçoit, encore feutrée, bientôt de plein niveau, cette tampura entraînant l’harmonium hindou et la flûte bansuri. Les spectateurs sont lovés dans des gradins quasi pleins. Les mélopées s’envolent en ce 25 juin si particulier, douloureux même pour Milena Salvini et sa fille Isabelle Anna. Sur scène, le chanteur Pandit Shyam Sundar Goswami offre ses plus beaux récits. Ceux-là mêmes qu’il avait produits le 16 juin 2009, date du décès de Roger Filipuzzi. « Acousticien, c’est lui qui a fait en sorte que le plateau sonne aussi bien », poursuit sa femme. Faisant du Centre Mandapa un lieu réputé dans le monde entier chez les artistes du kathak et du kathakali, deux disciplines contées et dansées, parfaites synthèses de la tradition sacrée et séculière de la région du Kerala. Un État situé au sud-ouest de la péninsule indienne que Milena Salvini connaît bien pour l’avoir arpentée durant les années 1964-1965. « À l’origine, j’ai une formation de danse pantomime et puis, !
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PORTRAIT
5 DATES Octobre 1975 : Création du Centre Mandapa au 6 de la rue Wurtz. 1980 : Grande nuit du conte avec Catherine Zarcate, considérée comme la plus grande conteuse du siècle. Fin 1985 : Le Mandapa fête ses 10 ans. Le centre accueille le danseur cambodgien Norodom Sihamuni, alors professeur de danse classique dans un conservatoire de danse parisien. Il deviendra par la suite roi du Cambodge. 2005 : Mandapa fête ses 30 ans. Le centre aura notamment accueilli le danseur malais Lari Léong, décédé du sida, et le danseur et chorégraphe français Gigi Caciuleanu. 16 juin 2009 : Décès du fondateur/ créateur du Mandapa, Roger Filipuzzi.
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PAR-DESSUS LE PÉRIPH'
— Grand lifting urbain à Ivry
En attendant les pelleteuses L’un des plus grands projets d’aménagement d’Île-de-France oppose la mairie communiste d’Ivry-sur-Seine à certains des 400 habitants concernés. Cette opération de développement urbain de plus d’1 million de mètres carrés implique le départ de propriétaires qui comptent ne pas se laisser faire.
S
abrina Mokrani est arrivée à Ivry-sur-Seine en 1975 avec ses parents, qui y tenaient un hôtel-restaurant. Elle a depuis repris l’affaire familiale, située tout près de la gare RER, boulevard de Brandebourg. « Je suis bien située, j’ai investi beaucoup ici », raconte-t-elle, assise à l’une des tables de son restaurant flambant neuf. Elle vient de finir des travaux de rénovation qui ont pris deux ans. Mais elle n’aura pas terminé de payer son crédit, qui prend fin en 2020, qu’elle sera sans doute déjà partie. Comme 400 autres Ivryens, elle a appris qu’elle était située dans la zone d’aménagement concerté (Zac) d’Ivry Confluences, un grand projet de rénovation urbaine qui va l’obliger à déménager. Située dans le quartier Ivry-Port, en bord de Seine, cette opération, qui s’étend sur 145 hectares, va durer
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Texte : Rozenn Le Carboulec Photographie : Mathieu Génon au moins jusqu’en 2025. Elle prévoit notamment la construction de 570 000 m² de bureaux, commerces et locaux d’activités, environ 4 500 logements, des équipements universitaires et culturels, le prolongement de la ligne 10 du métro ou encore un parc de 3,5 hectares. Pour ce faire, la ville doit détruire 400 lots : « Des copropriétés, dont une partie est déjà vide car en état d’insalubrité, des locataires, qui seront relogés dans le cadre d’une Maîtrise d’œuvre urbaine et sociale (Mous), et des propriétaires », détaille Romain Marchand, maireadjoint en charge du développement urbain. « Pas vivable de rester dans cette incertitude » Jamale Lahyane est responsable du collectif Ivry sans toi(t), créé pour porter la voix des personnes opposées à
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Par Emmanuel Salloum — Photographie : Mathieu Génon
LOISIRS
— Bon plan resto : Les pieds sous la table
À LA COOL Ce petit restaurant du quartier Croulebarbe propose tartes et salades en formules intéressantes le midi, des plats originaux à la carte et un brunch fameux le dimanche, dans une atmosphère des plus plaisantes.
S
ur le boulevard Arago, le choix est nombreux pour qui veut se restaurer. Pourtant, ce restaurant malin a su se démarquer, ne serait-ce que par son cadre : une quinzaine de couverts en terrasse, quelque peu isolés par les passiflores ; la même chose à l’intérieur, où les tons chaleureux des murs et la façade vitrée inondent la coquette salle de lumière. N’Drin N’Guessan, pâtissier de formation passé par les cuisines de la Bellevilloise, a en outre plusieurs tours dans son sac pour se distinguer des brasseries alentour. « Pas de frigo, pas de friteuse », insiste-t-il. Son truc à lui : les tartes et les salades, en formule le midi à prix raisonnable. Avec en best-seller la salade de jeunes pousses et légumes de saison, quenelles au curry, œufs pochés et parmesan. Les tartes, simples mais honnêtes, offrent un panel de saveurs assez varié. À la carte, le chef se fait plaisir en proposant une belle sélection de viandes et de poissons finement travaillés selon la saison.
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La carte de la rentrée, pas encore prête à l’heure où nous écrivons, devrait au moins contenir une soupe de melons avec vinaigre balsamique et basilic en entrée, un steak de thon au fenouil et des côtelettes d’agneau sauce caramel et gingembre en plat. Et on ne saurait que vous conseiller les délicieuses penne au poulet et courgettes agrémentées d’épices façon tajine. En dessert, laissez-vous tenter par le fondant chocolat blanc et les tartes sucrées maison du chef, notamment la galette praline, spécialité lyonnaise qui trahit ses origines. Enfin, il ne faut surtout pas rater le très copieux brunch du dimanche, avec jus de fruit et boisson chaude, brioche maison, délice « surprise » (souvent crêpe ou pain perdu), un plat chaud (burger, bagel ou tartine grillée), et fromage blanc. En prime, vous profiterez d’un concert privé ou d’un massage assis, compris dans le prix (18€). Et bientôt, vous pourrez même vous faire livrer le brunch à domicile. Sans concert ni massage, bien entendu… !
LES PIEDS SOUS LA TABLE — 44 boulevard Arago Ouvert tous les jours sauf le dimanche soir et le lundi Brunch le dimanche de 12h à 16h Réservations au 06.99.27.93.10 www.lespiedssouslatable-restaurant.fr/
LE CHEF RECOMMANDE — L’Alimentation générale, 49 boulevard Arago (juste en face du restaurant) : « Une épicerie hors du commun qui propose une excellente sélection de légumes frais » Le Margen’s, 65 rue Mouffetard, 5e : « Un pub sympa, avec une très bonne ambiance » L’Angolo, 42 rue Broca, 5e : « Des spécialités italiennes originales et de premier choix »