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nouvelles histoires de fantômes
GEORGES DIDI-HUBERMAN MNÉMOSYNE 42 Mnémosyne 42 est un travail conçu par Georges Didi-Huberman à l’invitation d’Alain Fleischer. Il s’agit d’un hommage à la planche 42 de l’atlas Mnémosyne consacrée aux gestes de lamentation. Le dispositif de Mnémosyne 42 se présente comme une planche d’atlas démesurée (mille mètres carrés environ) et animée. Elle est « posée » sur le sol de la verrière et se regarde depuis une coursive, comme on regarde la mer depuis le bastingage d’un bateau. Son thème est identique, mais les exemples choisis font le chemin qui va des exemples classiques chers à Warburg jusqu’au cinéma moderne et contemporain : Sergueï Eisenstein avec Pier Paolo Pasolini, Glauber Rocha avec Théo Angelopoulos, Sergueï Paradjanov avec Wang Bing, Jean-Luc Godard avec Harun Farocki… L’installation inclut aussi des images ethnologiques et des documents tirés de l’histoire politique. L’enjeu de ce travail consiste, en effet, à donner une idée de l’énergie que les survivants déploient autour de leurs morts. Elle aboutit même à une interprétation politique de la planche 42 en montrant comment les « peuples en larmes » sont susceptibles, dans certaines conditions, de s’engager dans un geste d’émancipation capable de faire d’eux des « peuples en armes ».
Mnemosyne 42 is a work conceived by Georges Didi-Huberman at the invitation of Alain Fleischer. It is a tribute to plate 42 of the atlas Mnemosyne, which is devoted to gestures of lamentation. Mnemosyne 42 is displayed as an outsize, animated atlas plate (approximately 1000 square meters). It is “set” on the floor of the glass-roofed area and is viewed from a walkway, as we would contemplate the sea from the rail of a boat. Its theme is identical, but the examples chosen follow the path that goes from the classical examples dear to Warburg right up to modern and contemporary cinema: Eisenstein with Pasolini, Glauber Rocha with Theo Angelopoulos, Paradjanov with Wang Bing, Jean-Luc Godard with Harun Farocki… The installation also includes ethnological images and documents drawn from political history. The issue at stake in this work is indeed to give an idea of the energy that survivors unfold over their dead. It even leads to a political interpretation of plate 42 by showing how “populations in tears” [“peuples en larmes”] are liable, under certain circumstances, to spark a gesture of emancipation capable of turning them into “populations with arms” [“peuples en armes”].
Georges Didi-Huberman Mnémosyne 42 (2014) Vues d’exposition / Exhibition views, « Nouvelles Histoires de fantômes », 14.02 2014 – 07.09 2014, Palais de Tokyo (Paris) Photo : Romain Darnaud / Arno Gisinger
Georges Didi-Huberman & Arno Gisinger
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Spinous Acidaspis (Boedaspis ensifer) Période ordovicienne / Ordovician period (435-505 millions d’années / million years old), Vallée du Wolchow / Wolchow Valley (Russie / Russia) Courtesy de l’artiste / of the artist
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Hiroshi Sugimoto Aujourd’hui, le monde est mort [Lost Human Genetic Archive] Cette exposition bénéficie du soutien de / This exhibition benefits from the support of Fondation Louis Roederer, amanasalto, Japan Foundation, Fukutake Foundation/Benesse Holdings, Inc., Fondation Franco-Japonaise Sasakawa et / and MARK STYLER, ainsi que du soutien technique de / as well as technical support of KORG INC.
25.04 2014 – 07.09 2014
Hiroshi Sugimoto
À travers une œuvre où la maîtrise technique se double d’une solide armature conceptuelle, Hiroshi Sugimoto (né en 1948, vit et travaille entre New York et Tokyo) explore la nature du temps et de la perception, et les origines de la conscience. Parmi ses séries photographiques les plus célèbres, on peut citer les Dioramas (1976-), des photographies, prises dans les muséums d’histoire naturelle américains, d’animaux empaillés mis en scène dans leur environnement habituel, les Theaters (1978-), obtenues en exposant la pellicule pendant l’intégralité de la durée de la projection d’un film, ou encore les Seascapes (1980-) qui capturent l’essence de paysages marins du monde entier en n’en retenant que les éléments fondamentaux, l’air et l’eau. « Aujourd’hui le monde est mort [Lost Human Genetic Archive] » est une nouvelle facette d’une exposition que Hiroshi Sugimoto élabore depuis une dizaine d’années en juxtaposant ses collections d’objets, provenant d’époques et de cultures disparates, et ses œuvres photographiques. Les objets de sa collection sont « ses doubles » et sont indispensables à l’artiste en tant que sources d’enseignements qui lui permettent de renouveler son art. En se nourrissant de références au roman L’Étranger d’Albert Camus et aux objets ready-made de Marcel Duchamp, l’artiste a mis en scène un monde après la fin de l’humanité : une vision personnelle de l’Histoire vue depuis l’avenir. L’exposition est constituée d’une trentaine de scénarios, racontés par différents personnages fictifs : un apiculteur, un spécialiste des religions comparées ou encore un homme politique qui choisissent de préserver (ou non), pour le futur, leur patrimoine génétique individuel.
Conçue comme une sorte de ruine en résonance avec l’architecture atypique du Palais de Tokyo, l’exposition est non seulement la plus importante jamais réalisée en Europe par l’artiste, mais c’est aussi un projet unique qui témoigne de son large champ d’activité, depuis la littérature jusqu’à l’architecture. Elle est à l’image de sa tentative de comprendre l’art et l’histoire humaine selon une vaste échelle temporelle qui dépasse largement celle de l’humanité, tout en incluant sciences, religion, économie… Vers où se dirige cette humanité incapable d’empêcher sa propre destruction au nom d’une croissance aveugle ? Guidé par cette interrogation, Hiroshi Sugimoto laisse dériver son imagination et sa créativité à la rencontre du passé comme du futur. A.M.
Commissaire : Akiko Miki
Aujourd’hui, le monde est mort
Hiroshi Sugimoto Vue d’exposition / Exhibition view, « Aujourd’hui le monde est mort [Lost Human Genetic Archive] », 25.04 2014 – 07.09 2014, Palais de Tokyo (Paris) Photo : André Morin
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Thomas Hirschhorn Flamme Éternelle Cette exposition bénéficie du soutien de / This exhibition benefits from the support of GDF SUEZ, GIE France Recyclage Pneumatiques, Galerie Chantal Crousel (Paris), Fondation Jan Michalski pour l’écriture et la littérature.
25.04 2014 – 23.06 2014
Benoît Pype Chutes Libres (2013) Vue d’exposition / Exhibition view, « Des présents inachevés », 10.09 2013 – 03.11 2013, dans le cadre des / as part of Modules Fondation Pierre Bergé – Yves Saint Laurent Hors-les-murs, 12e biennale de Lyon/ 12th Lyon Biennial Photo : Raphaële Mas
Urs Lüthi Selfportrait from the Series « ART IS THE BETTER LIFE » (2002) 200 x 150 x 9 cm Courtesy de l’artiste / of the artist Photo : Urs Lüthi
Lili Reynaud-Dewar Live Through That!? (Chicago) (2013) Affiches en noir & blanc imprimées sur papier journal / Posters in black & white printed on newsprint 28 x 43 cm
Pablo Vargas LuGo Naked Boeing Mandala (1998) Plexiglas, poudre de marbre colorée / coloured marble powder Sculpture : 310 x 45 x 25 cm ; motif / motive : 240 x 160 cm Courtesy Colección Jumex (Mexico)
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All that Falls Attention à la chute Commissaires : Marie de Brugerolle & Gérard Wajcman Sur une proposition de Gérard Wajcman Curators: Marie de Brugerolle & Gérard Wajcman Based on a proposition by Gérard Wajcman
Cette exposition bénéficie du soutien de / This exhibition benifits from the support of Institut Polonais Paris.
06.06 2014 – 07.09 2014
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Ed Atkins
Bastards
Ed Atkins Ribbons (2014) Installation trois canaux vidéo HD 16/9 image 4/3 avec trois canaux son surround 4.1 / Three channel 4:3 in 16:9 HD video with three 4.1 channel surround soundtracks Courtesy de l’artiste / of the artist & Cabinet Gallery (Londres / London) & Isabella Bortolozzi Galerie (Berlin)
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Photo : © Justine Emard / Le Pavillon Neuflize OBC 2013-2014
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100 ANS PLUS TARD Avec / With :
Lucas Biberson & Guillaume Henry Sophie Bonnet-Pourpet Rebecca Digne Elke Marhöfer & Mikhail Lylov Sébastien Martinez Barat Karin Schlageter Clémence Seilles Shuhô Chai Siris Antonio Vega Macotela Yonatan Vinitsky Une collaboration entre Shuhô, maître d’ikebana au temple Ginkaku-ji (Jishô-ji), et le Pavillon Neuflize OBC, sur une proposition de Sumiko Oé-Gottini. / A collaboration between Shuho, master of Ikebana at Ginkaku-ji (Jisho-ji) Temple, and the Pavillon Neuflize OBC, proposed by Sumiko Oé-Gottini. Cette exposition bénéficie du soutien de / This exhibition benefits from the support of Neuflize OBC, institut français, Ambassade de France au Japon – Institut français et du / and of Hyatt Regency Kyoto – ORIX Real Estate & Leisure.
06.06 2014 – 13.07 2014
MICHAELA EICHWALD
Le Palais de Tokyo accueille l’artiste Michaela Eichwald, lauréate du prix Lafayette 2012, pour sa première exposition personnelle en France. Née en 1967, Michaela Eichwald a vécu de nombreuses années à Cologne, évoluant au sein d’un groupe d’artistes et d’intellectuels. Elle étudie d’abord la littérature et la philosophie, puis commence à créer des œuvres plastiques. Elle se consacre ensuite exclusivement à cette pratique. L’année 2008 représente pour Michaela Eichwald une véritable rupture puisqu’elle décide alors de partir vivre à Berlin. Elle eut rapidement le souhait de quitter cette nouvelle ville, mais elle y réside et travaille toujours aujourd’hui. Ces dernières années, son travail a été présenté dans de nombreuses expositions personnelles et collectives, en Allemagne et à l’étranger. Parmi lesquelles : « Knotti Times », Silberkuppe (Berlin, 2013), « Ergriffenes Dasein. Artist, Writer, Mentalist », Reena Spaulings (New York, 2013), « KW69 #7 Kalin Lindena », Kunstwerke Berlin (2011), « The White Columns Annual », White Columns (New York, 2011). Évoluant dans une sphère à la limite de l’underground, Michaela Eichwald développe une œuvre multiforme alliant pratique plastique et écriture. Ses peintures, collages et sculptures, aux formats variés, créés à partir de matériaux divers (papier, tissus, objets, etc.), forment de grands ensembles au sein desquels chaque création possède son existence propre. Superposant les couches de peinture ou recouvrant les volumes de résines et de vernis, l’artiste convoque les matières et engage un processus dans lequel sa propre subjectivité est en dialogue permanent avec l’expérimentation. Les formes qu’elle réalise sont le fruit d’états émotionnels, de moments particuliers, mais aussi de phases où les mots participent à l’élaboration de l’œuvre grâce à l’écriture et à la poésie. Sur le blog uhutrust.com, l’artiste consigne au quotidien ses pérégrinations, ses pensées, ses observations et ses réactions à l’actualité. Elle y publie des photos qu’elle prend elle-même ou qu’elle trouve sur Internet. Elle y décrit parfois les étapes de travail dans lesquelles elle est alors plongée. Comme un journal de bord à partager publiquement, uhutrust.com témoigne du regard de l’artiste sur le monde.
Michaela Eichwald est engagée dans une réflexion sur le monde de l’art et ses modes de fonctionnement. Comment exister et vivre en tant qu’artiste ? Comment créer et produire, et dans quelles conditions ? Pour elle, les moments de création sont le fruit d’une situation et d’un contexte particuliers, comme, par exemple, la disponibilité d’un espace de travail ou le fruit d’un échange intellectuel. C’est un ensemble de données qui se réinvente au cas par cas et provoque l’alchimie qui permet à l’œuvre de se réaliser. À l’occasion de son exposition au Palais de Tokyo, l’artiste réalise de nouvelles œuvres, explorant, hors de toute contrainte, l’instant même, la page blanche que représentent les quelques semaines précédant l’exposition. K.J.
Commissaire : Katell Jaffrès
MICHAELA EICHWALD
Michaela Eichwald Wanderungen mit Simone Weil [Périgrinations avec Simone Weil / Wanderings with Simone Weil] (2014) Acrylique, huile, encre de Chine, vernis sur cuir synthétique / Acrylic, oil, indian ink, varnish on synthetic leather 210 x 130 cm Photo : Marcel Koehler
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Alessandro Piangiamore 11.07 2014 – 07.09 2014 Alessandro Piangiamore (né en 1976, vit et travaille à Rome) pousse la création artistique dans ses retranchements les plus techniques, mais aussi les plus poétiques. Faisant dialoguer, dans des installations composites, des objets et des images de toutes natures, il propose une relecture de leur aspect visuel et de leur sens réciproques. Ainsi, les aspérités du corail sont soulignées par l’image d’un volcan en éruption ou des sculptures produites par le vent mettent en valeur la puissance de la nature… L’artiste invite le spectateur à s’interroger sur ce qu’il croit voir et à redécouvrir ce qu’il ne voit plus. Son nouveau projet, Primavera Piangiamore, consiste en un dialogue entre les sculptures de la série La cera di Roma – des panneaux enduits de la cire de cierges récupérés dans les églises de Rome –, questionnant le sens d’un rituel séculaire, et des sculptures en verre – de tailles et de formes différentes –, une cavité scellée renfermant un parfum à l’intérieur de chacune d’elles. Ces parfums proviennent de nombreux anonymes, ayant accepté de faire don de leur « odeur » à l’artiste. Pour sceller ces sculptures à une température proche de 1 000°C, à laquelle tout liquide s’évapore instantanément, l’artiste a eu recours au savoir-faire d’artisans verriers. Par un procédé quasi alchimique, incrusté, ici, au sein même du bloc de verre, le parfum ne peut pas s’évaporer et reste imperceptible. D.B. & L.E.
Alessandro Piangiamore (b. 1976, lives and works in Rome) pushes artistic creation up against the most technical wall, but also the most poetic. Placing objects and images of all kinds in a dialogue with each other in his composite installations, he proposes a new reading of their visual aspect and their reciprocal meanings. Thus the roughness of coral is highlighted by an erupting volcano or sculptures produced by the wind emphasize the power of nature... The artist invites the viewer to question what he thinks he sees and to rediscover what he no longer sees. His latest project, Primavera Piangiamore, consists in a dialog between sculptures from the series La cera di Roma—panels coated in wax from votive candles collected from the churches of Rome—, questioning the meaning of a secular ritual, and glass sculptures of varying sizes and shapes, inside which a sealed cavity contains perfume. These perfumes come from a number of anonymous donors who accepted to give their “odor” to the artist. In order to seal the sculptures at a temperature close to 1000°C—a temperature at which any liquid would instantly evaporate—the artist turned to the technical knowledge of glass-makers. Following a quasi-alchemical procedure, the perfume, embedded inside the glass block, cannot evaporate and thus remains imperceptible. D.B. & L.E.
Curator: Daria de Beauvais
Commissaire : Daria de Beauvais
1 Untitled (volcano) (2012) Corail, carte postale, piédestal en bois / Coral, postcard, wood pedestal 30 x 30 x 100 cm Courtesy de l’artiste / of the artist & Magazzino (Rome) 2 Images préparatoires pour / Concept images for Primavera Piangiamore (2014) Dimensions et support variables / Dimensions and media variable Courtesy de l’artiste / of the artist & Magazzino (Rome)
3 La cera di Roma (2012) Bougies fondues en cire de palme, cire de carnauda, paraffine et cire d’abeille / Melted beeswax, paraffin, carnauba and palm wax candles 205 x 125 x 4 cm (chacun / each) Vue de l’exposition / Exhibition view, MACRO, Museo d’Arte Contemporanea Roma (Rome) Courtesy de l’artiste / of the artist & Magazzino (Rome) Photo : Giorgio Benni