Polyptyques : un dialogue amoureux Du 15 février au 18 mars 2018
Annie Paule Thorel
Le pays où le ciel est toujours bleu
Venise jaune, Venise vert, Venise rose, Venise violet, 2017 Encaustique sur toile, 200 x 520 cm (4 x 200 x 130 cm)
Ces polyptyques ont été pensés spécialement pour cette exposition. Leccé et Venise construisent un développement atmosphérique dans l’architecture du lieu. Ils sont placés en dialogue avec un choix de tableaux de la série Linya, créant une expansion et une présence panoramique. Les polyptyques projettent dans l’espace des imbrications complexes et provoquent une expérience à la fois de continuité et de rupture. La structure verticale permet des transitions d’équilibre et de déséquilibre de la ligne, de la masse, de la densité des couleurs, de la lumière. C’est une construction ouverte axée sur chaque vocable. Chaque couleur est une entité en attente d’utilisation. Ses qualités, dans la balance de l’œil, ont été construites : tonalité, épaisseur, intensité. Leur conjugaison suscite des tensions et des vibrations, qui vivent dans l’espace de la toile. La dynamique d’achèvement est la réactivité et l’improvisation : ajouter, retirer, remplacer, alléger, densifier, faire reculer ou avancer, selon la tournure prise par l’ensemble et trouver une justesse, une respiration et finalement une unité qui impose un silence, un arrêt. Ce dialogue de peintures est une façon d’expérimenter un corps à corps dans lequel chaque série, par sa gestuelle, crée une dynamique particulière de temporalité, de construction de la surface, de la lumière et de la présence. Les peintures présentées dans l’exposition ne peuvent être assimilées au mouvement géométrique, concret, minimal. Même si elles s’y réfèrent, elles gardent leur liberté au sein de systèmes ouverts. La recherche de la matière picturale est pour moi une part essentielle de la pensée de l’œil. Un regard qui a intégré les leçons de l’histoire contemporaine sans allégeance particulière, si ce n’est à celui du langage plastique et de ses riches possibilités. Un regard attentif au dévoilement. J’ai choisi une grammaire simple, presque banale, la ligne. La ligne est un défi : une ambition de peinture, la qualité d’une composition, une manière de poser la couleur, de travailler la lumière, un point de vue, la volonté de faire surgir une vision. Dans la droite ligne des peintres qui travaillaient des ciels, des mers… Annie Paule Thorel, le 3 février 2018
LeccĂŠ 1, 2, 3, 2017 Encaustique sur toile, 170 x 300 cm (3 x 170 x 100 cm)
Tyria/Linya bleu/magenta, 2017 Quadriptyque, encaustique sur bois, 50 x 100 cm
Linya vert, 2016 (dĂŠtail) Encaustique sur toile, 100 x 80 cm
Linya rouge, 2017 ; Linya vert, 2016 ; Linya bleu c, 2016 ; Linya bleu, 2016 ; Linya gris, 2015 ;
Linya jaune, 2016 - Encaustique sur toile, 100 x 480 cm (6 x 100 x 80 cm)
Linya jaune g, 2015 Encaustique sur toile, 160 x 90 cm
À la ligne Des lignes. Des lignes comme des partitions, des répétitions, des espacements – mouvement. Lignes froides lignes chaudes lignes jamais reprises. À nouveau la couleur – répéter. Reprendre sans reprendre : réinventer l’espace, peut-être.
Leccé 2, 2017 Encaustique sur toile, 170 x 100 cm
La peinture d’Annie Paule Thorel se déploie sur des surfaces que nous avons vu croître ces dernières années. Elle assemble les panneaux, réassemble, modifie l’accrochage jusqu’à coller à la surface qui porte les peintures, oblitérant toute impression de fond. Nous ne savons plus où nous sommes : devant, cela s’étend et pourtant se resserre. Récemment, elle employa le mot « octave ». C’était pour couvrir les murs d’une chapelle, un octogone blanc dédié autrefois au chant, à l’oraison. Ici, en revanche, ce sont de longs murs, propres à l’étalement de la peinture, à des tableaux en lignes – lignes horizontales, quand sa peinture ellemême est faite de verticales avec ou non de légères oscillations. Le mur, pour elle, est comme cette surface blanche de la toile préparée. Des murs d’avant la peinture. Sait-elle pourquoi elle peint ? Elle sait du moins pourquoi elle a opté un jour pour une expression qui exclut le langage, la forme articulée, la narration. De l’enregistrement des bandes magnétiques qui furent pendant un temps – assez longtemps sans doute – son mode de communication parallèle, l’artiste a conservé le rythme épisodique qui fait vibrer les fréquences chromatiques. De Mondrian, le poète psychologue Ivan Barzakov
dit toujours : « Il plie la couleur ». Mais Annie Paule Thorel ne plie pas – ou alors c’est pour mieux déplier. Aucune surface n’est assez vaste, aucun horizon (le mot est faussé) assez élargi. On peut se retirer dans un tel silence, mais en se laissant envahir par les ondes. Un peu plus. Un pas, encore ; ou un mouvement de recul. Se reprendre, se ressaisir – comme à tout moment elle le fait ellemême. Cela est, et il n’y a plus rien autour. Croirait-elle plus à la peinture qu’à la parole ? Pourtant, ces étranges partitions tendues, ces rythmes qui couvrent les bords de « notre » espace, l’occupent, l’investissent – comme on est pris soudain par une émission. Quelque chose qui vous attire ou vous appelle. Qui vous retient. Un bruit tout d’abord, puis le bruit devient son. Ensuite vient le sens. Il peut être diffus, peu perceptible, mangé par l’émotion qui vient à la rencontre des sonorités du dehors. Sa peinture est hertzienne. (Écrit le cinquième jour de l’année du Chien)
François Michaud
Conservateur en chef, musée d’Art moderne de la Ville de Paris
Venise vert, 2017 Encaustique sur toile, 200 x 130 cm
En savoir + Annie Paule Thorel
www.anniepaulethorel.com
Le POCTB Le pays où le ciel est toujours bleu, POCTB - collectif d’artistes, est un label de création et de diffusion dans le domaine de l’art contemporain. Ce label propose une programmation dans son espace d’exposition situé à Orléans et hors les murs avec La borne, microarchitecture de création et de monstration itinérante en région Centre - Val de Loire. Direction artistique : Sébastien Pons / Laurent Mazuy
Le pays où le ciel est toujours bleu Quartier Carmes - 5 rue des Grands-Champs à Orléans - 02 38 53 11 52 - www.poctb.fr
Graphisme : Sébastien Pons
Le POCTB adhère aux actions de Cultures du Cœur du Loiret pour rendre la culture accessible à tous.
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