L’histoire se passe aujourd’hui, dans l’ouest de la France…
1. Int. jour. Chambre d’Audrey, maison des parents. La chambre d’Audrey est trop petite pour tout ce qu’elle contient (c’est comme si Audrey avait gardé des traces de ses dix-huit années) : un clic-clac qui fait face à un lit une place, un bureau où se mélangent affaires d’école, CD et bibelots, une petite télé sur une étagère… Sur les murs, des photos (sa famille, Nanou, Yohann) accrochées sur un grand poster d’une équipe de hand-ball, des photos de musique à la mode… Audrey et Nanou sont assises en tailleur, l’une en face de l’autre, sur le petit lit. Audrey a un ordinateur portable sur les genoux et elle tape sur le clavier tandis que Nanou la regarde. Audrey a 18 ans. C’est une jolie jeune fille brune au regard très expressif, au sourire franc. Elle porte toujours des vêtements près du corps qui la mettent en valeur. Nanou a 19 ans. Elle est plus grande et plus voûtée qu’Audrey. Ses longs cheveux blonds sont parsemés de petites mèches bleues.
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Audrey tape sur « entrée », attend… Audrey : Allez ! … puis soupire. Nanou : C’est encore saturé ? Audrey : Oui… C’est chiant, merde ! Audrey pose l’ordinateur à côté d’elle. Toutes les deux toujours assises sur le lit, Audrey met du vernis bleu sur les ongles de Nanou tout en discutant. Audrey : Il nous faudrait un clic-clac dans le salon. Nanou : Mon père voudra jamais sortir un centime pour des meubles. Audrey : On fera comment alors ? Nanou : Je sais pas… Audrey : Si on prend le mien, ça va être galère quand Yohann dormira ici. Nanou ne répond rien.
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Audrey : Pour ton bac, il pourrait quand même bien te payer la moitié d’un clic-clac… Nanou : Non, il va vouloir que je prenne le canapé qui traîne dans le garage. Audrey : L’horreur bleue, là ? Ah non ! Audrey : On va regarder combien ça coûte. C’est peut-être pas si cher que ça… Le portable d’Audrey sonne. Audrey (tendant le pinceau à Nanou pour pouvoir décrocher) : C’est encore ma mère… Oui… Mais non, le site est saturé. Ça fait au moins dix fois qu’on regarde ! Mais oui, je t’ai dit que je t’appellerai… On commande un canapé sur internet… Non, je déconne… Mais oui… Bisous. Audrey raccroche. Audrey (riant) : Comment elle a flippé avec le canapé ! Audrey et Nanou se sourient. Les doigts d’Audrey désormais vernis (en rouge) tapent sur le clavier. Elle regarde fixement l’écran.
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Audrey : Ça y est, ça marche… Nanou vient se mettre à côté d’Audrey. Audrey : Tu as les codes là ? Nanou (les convocations dans la main) : Oui. Audrey (concentrée sur l’écran et la souris) : Épreuves anticipées… Brevet… Bac général… Bac technologique. (regardant Nanou) On commence par toi ou par moi ? Nanou : Par toi. Audrey : C’est quoi mon code ? Nanou (lisant la convoc) : M005200094. Leurs deux regards sont rivés vers l’écran. Audrey (tapant les réponses après avoir lu tout haut ce qui lui est demandé) : Date de naissance… Saisir le code lisible dans l’image à droite… Audrey pousse un cri de joie. Audrey : Je l’ai !
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Les deux amies se prennent dans les bras en poussant des hurlements. Audrey : Bon, à toi. Nanou, un peu inquiète, donne son matricule. Audrey fronce les sourcils en regardant l’écran. Audrey : Merde… Nanou (très inquiète) : Je vais au rattrapage ? Audrey : Je sais pas… C’est écrit « non admis »… 5 en anglais… 6 en histoire/géo… 4 en management ? ! Non… non, c’est pas possible ! Audrey regarde Nanou, comme pour se rassurer, mais Nanou est sous le choc. Audrey : Ils ont dû se gourer. Ça arrive des fois… Y’a une meuf l’année dernière, elle a cru qu’elle l’avait pas et en fait elle l’avait… Viens, on va au lycée ! Audrey pose l’ordinateur et se lève à toute vitesse. Nanou se lève mollement. De la fenêtre, on voit les deux amies se diriger vers le portail.
2. Ext. jour. Rue lotissement & rue maison Nanou. Audrey et Nanou marchent l’une à côté de l’autre.
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Audrey téléphone tandis que Nanou écoute de la musique d’une oreillette. Audrey : Oui, c’est bon, je l’ai… Audrey écarte le téléphone de son oreille à cause du cri que pousse sa mère. Audrey : … Ben non, c’est ça le problème… C’est écrit qu’elle l’a pas du tout, alors on va au lycée aller voir sur les panneaux d’affichage parce que c’est super bizarre là… Ouais… Ouais, ouais. Bisous. Elles s’éloignent vers le centre du bourg. À l’arrêt de bus, Audrey regarde les horaires affichés puis l’heure sur son portable. Audrey : Il est dans 20 minutes. Audrey s’assoit à côté de Nanou qui a le dos rond, la tête penchée en avant et de la musique dans une oreille. Audrey allume une cigarette. Les deux amies fument la même cigarette en discutant. Audrey (espérant être rassurée par Nanou) : Franchement, 5 en anglais, c’est pas possible. Nanou : Ben… je me doutais qu’il me foutrait une note pourrie ce gros con… Il arrêtait pas de me poser des questions, avec sa sale gueule là… Il voyait bien que je
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coinçais et il continuait exprès… je pensais 8-9, un truc comme ça, mais pas 5… Audrey : Et le management ? Tu m’as dit que tu l’avais géré ça… Nanou tire sur la cigarette sans répondre. Audrey : Il était cool le sujet, non ? Il ressemblait à celui du dernier devoir. Nanou tend la cigarette à Audrey. Nanou : Je vais rentrer. Audrey : Tu veux pas voir les panneaux ? Nanou : Ça sert à rien… Je l’ai pas, je l’ai pas ! Je le sais que je l’ai pas… J’ai pas envie de voir tout le monde qui se dit : « Elle a pas son bac »… Audrey : Tu crois l’ordi ? Nanou : Ça sert à rien de s’inventer je sais pas quoi… Nanou se lève. Nanou (partant) : À plus tard.
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Audrey, stupéfaite, regarde Nanou sans répondre. Nanou s’éloigne. Audrey tire sur la cigarette. Nanou entre dans une maison mal entretenue, visible de l’arrêt de car. Audrey, le regard perdu, finit seule la cigarette.
3. Int. nuit. Chambre d’Audrey, maison des parents. Audrey est assise sur le rebord de sa fenêtre avec Yohann. Yohann est un grand brun de 19 ans avec du gel dans les cheveux pour faire de petites mèches. Il a un regard rieur qui donne facilement l’impression qu’il se moque. Audrey et Yohann partagent un pétard. Yohann est détendu ; Audrey, fermée. Yohann : Peut-être que tu peux rester ici et faire les allers et retours. Audrey ; Je vais pas me faire 2 heures de train tous les jours. Yohann : Tu leur demandes une bagnole ! Audrey (après un soupir) : N’importe quoi… Yohann : Une bagnole, ça leur coûterait moins cher qu’un appart à tes parents…
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Audrey : Quelle merde… Audrey tire sur le pétard.
4. Int. jour. Chambre d’Audrey, maison des parents. Audrey et Yohann dorment dans le clic-clac déplié. Quelqu’un frappe à la porte. Audrey (ouvrant un œil) : Quoi ? Sylvie (hors-champ) : Audrey, on mange ! Audrey : Déjà ? Sylvie (hors-champ) : Il est midi et demi ! Audrey : Merde… Sylvie (hors-champ) : Allez, dépêchez-vous. Audrey soupire puis embrasse Yohann pour le réveiller.
5. Ext. jour. Terrasse, maison des parents. Audrey et ses parents habitent une maison de lotissement des années quatre-vingt-dix. Les petits jardins de toutes les maisons sont collés les uns aux autres, même si les thuyas ont poussé. Dans le jardin, une vieille balançoire et un petit toboggan en plastique tout neuf. Il fait beau. Le barbecue fume.
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Sylvie, Christian, Cédric, Orélie et Méline sont attablés dehors. Sylvie et Christian, les parents d’Audrey, ont tous deux un peu moins de 50 ans. Leurs gestes, leurs corps, leurs habitudes, leurs préoccupations montrent leur origine populaire. Christian a une allure débonnaire. Sylvie s’habille « jeune », fait attention à elle. Cédric est le frère d’Audrey ; il a 26 ans. Il est marié à Orélie, une blonde renfrognée. Cédric et Orélie ont une petite fille de 3 ans : Méline. Christian, vêtu d’un tee-shirt « Vive les dimanches », se sert un verre d’apéritif. Cédric (tendant son verre) : Tiens papa, tant que tu y es ! Main dans la main, Audrey et Yohann, ensommeillés, sortent de la maison et apparaissent sur la terrasse. Audrey : Salut ! Orélie : Vous sortez du lit ou quoi ? Audrey : Ben ouais… Audrey et Yohann font le tour de la table pour embrasser tout le monde.
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DÉJÀ PARU
FRAGILE(S) UN FILM DE MARTIN VALENTE DELICATESSEN UN FILM DE JEUNET/CARO
Bac en poche, Audrey décide de poursuivre ses études à la fac de Rennes. Elle quitte le cocon familial, son amie d’enfance, son copain… Au contact de sa nouvelle colocataire, elle découvre le militantisme politique. De désillusions en difficultés, Audrey croise le chemin des jeunes du GRAL, un groupe de squatters qui lui propose de vivre autrement et lui offre une nouvelle vision du monde. Audrey choisit de partager leur expérience, de plus en plus radicale…
Scénario d’Emmanuelle Mougne et Bénédicte Pagnot
LA CITÉ DES ENFANTS PERDUS UN FILM DE JEUNET/CARO LE FABULEUX DESTIN D’AMÉLIE POULAIN UN FILM DE JEAN-PIERRE JEUNET TOUT CE QUI BRILLE UN FILM DE GÉRALDINE NAKACHE ET HERVÉ MIMRAN ET SOUDAIN, TOUT LE MONDE ME MANQUE UN FILM DE J. DEVOLDÈRE VOIR LA MER UN FILM DE PATRICE LECONTE L’ENFANT DE L’HIVER UN FILM D’OLIVIER ASSAYAS
Scénario complet et dialogues du film
UNE NOUVELLE VIE UN FILM D’OLIVIER ASSAYAS
Avant-propos et interview
L’EAU FROIDE UN FILM D’OLIVIER ASSAYAS
de Bénédicte Pagnot
TRÈS BIEN, MERCI UN FILM D’EMMANUELLE CUAU NOS VIES HEUREUSES UN FILM DE JACQUES MAILLOT TROIS MONDES UN FILM DE CATHERINE CORSINI LE VOYAGE EN ARMÉNIE UN FILM DE ROBERT GUÉDIGUIAN
Réjouissons-nous que les éditions LettMotif contribuent à redonner à l’outil scénario ses lettres de noblesse. Quand la plupart de leurs concurrentes n’éditent que des découpages après tournage, elles proposent depuis l’année dernière une collection de véritables scénarios. scenario-buzz.com
J’AIME REGARDER LES FILLES UN FILM DE FRÉDÉRIC LOUF PLEIN SUD UN FILM DE LUC BÉRAUD THE GIRL FROM MONDAY UN FILM DE HAL HARTLEY LES YEUX CLAIRS UN FILM DE JÉRÔME BONNELL 110 EN DESSOUS DE ZÉRO SCÉNARIO INÉDIT DE JEUNET/CARO
www.edition-lettmotif.com