Welcome
in Vienna
ISBN 978-2-919070-94-7 Dépôt légal janvier 2014 Imprimé en France © 2014 LettMotif pour l’édition française © 2009 Theodor Kramer Gesellschaft pour l’édition originale Éditions LettMotif 105, rue de Turenne 59110 La Madeleine – France Tél. 33 (0)3 66 97 46 78 Télécopie 33 (0)3 59 35 00 79 E-mail : contact@lettmotif.com www.edition-lettmotif.com Photos © Le Pacte, Welcome in Vienna 2011 Édité avec l’aimable autorisation de la Theodor Kramer Gesellschaft, Vienne
Georg Stefan Troller
Welcome
in Vienna Scénario de la Trilogie d’Axel Corti
Titre original : Wohin und zurück
Traduit de l’allemand par
Alexandra Cade
Ouvrage traduit avec le concours du Ministère autrichien de l’enseignement, des arts et de la culture (Bundesministerium fßr Unterricht, Kunst und Kultur).
Première partie Dieu ne croit plus en nous
Personnages Ferry Tobler Gandhi Alena Mehlig Wolf Kron Dr Fein Dolba et beaucoup d’autres
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WELCOME IN VIENNA
Dans une cave délabrée d’immeuble. L’indication : Vienne, 10 novembre 1938 apparaît à l’écran. De la terre battue. Des ouvertures condamnées par des planches. L’endroit est plongé dans la pénombre. Au début de la scène, on entend de la musique : le Quintette de Schubert. Puis, en son off, du bruit, la sirène d’une voiture de pompiers. Des appels mêlés. Vous l’avez ? Eh ben ! c’est pas trop tôt. Les camions sont là ? Ah ! mais ils sont où ? Faut toujours les attendre. Mais où qu’il est son gamin ? Qui ? Son fils à lui, à Tobler. Qu’est-ce que j’en sais. Il a dû filer en douce. Mais ils sont où les camions maintenant ? Amène-moi celui-là dans la cour, j’vais lui faire faire un peu d’gymnastique. Allez, avec les autres. Ces Juifs, ils nous créent que des emmerdes. (etc.) La porte de la cave s’ouvre. Ferry se précipite à l’intérieur. Il allume la lumière, barricade l’entrée et se fige,
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hors d’haleine. Puis il se dirige rapidement vers la fenêtre du fond. Elle est en hauteur et donne sur la cour. Il grimpe sur une caisse, regarde au-dehors. Juste devant la fenêtre, on voit passer les pieds de gens qui courent en rythme, et plus loin, deux SA. Ce sont eux qui font faire de la « gymnastique » aux Juifs capturés. Un SA : Plus vite, plus vite. 1, 2, 3, 4 – 1, 2, 3, 4 ! Les pieds repassent devant la fenêtre. Un SA (en voix-off) : À terre ! Debout ! À terre ! Debout ! (il accélère) À terre ! Debout ! On voit les Juifs se mettre à plat ventre puis se relever. Un SA (en voix-off) : Plus vite, sale Juif ! On entend un coup. Un chapeau roule devant la fenêtre de la cave. Gros plan. La caméra se rapproche ensuite de Ferry qui a les yeux écarquillés. Devant l’immeuble des Tobler. On aperçoit l’enseigne de leur petit magasin de tissus. La vitrine est entièrement brisée. L’intérieur est sens dessus-dessous. La concierge balaie les débris de verre. Puis elle se dirige vers la cage d’escalier pour la nettoyer. Dans l’escalier. Le policier Fuchs descend. La concierge : De quoi il a l’air, le Tobler ? Fuchs (il hoche la tête) : Pas beau à voir. Mais faut comprendre la colère populaire. Qu’est-ce que ce Juif avait besoin d’assassiner notre ambassadeur à Paris ? (il se lave les mains au lavabo de l’entrée) La concierge : Je me demande comment ils ont pu le laisser sortir, dans l’état où il est.
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WELCOME IN VIENNA
Fuchs (il s’essuie les mains avec son mouchoir) : À mon avis, il a sauté du camion. La concierge : On appelle pas le docteur ? La porte de la cave s’ouvre doucement. Fuchs (il remonte) : Pour lui, y’a plus besoin de docteur. Ferry passe prudemment la tête au-dehors. La concierge : Doux Jésus ! Fuchs (il continue à monter les escaliers) : Vous êtes allée voir la synagogue ? Brûlé, le temple, brûlé de fond en comble. (il disparaît) La concierge : Mais c’est le jeune Monsieur Tobler ! Ben ça alors ! Et vous êtes resté caché en bas pendant tout ce temps ? Ferry : Mon père est revenu ? La concierge : C’est que… Faut pas monter tout de suite. Ferry se précipite vers les escaliers. La concierge : Montez pas ! Soyez raisonnable, j’vous dis ! (elle le suit) Deux hommes chargés d’un poste de radio imposant descendent. Fuchs les accompagne. Ferry : Mais c’est notre poste de radio ! Fuchs (gêné) : Il est… Il est confisqué ! (il s’adresse aux deux hommes) C’est bon, continuez !
L’appartement de la famille Tobler. Monsieur Tobler gît mort sur le lit. Son corps, enveloppé dans un drap, est encore maculé de sang.
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