Le rôle de l’espace public dans les Bidonvilles en Amérique Latine. Lisa Elhuyar, Mémoire S9, Domaine C, Adrien Gonzalez, Caroline Mazel.
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Je remercie la Fabyd de Rosario, Hector Floriani, Mariana Monge, Gustavo Chialvo pour leurs précieuses connaissances sur les «Villas Miserias» et autres bidonvilles ainsi qu’ Adrien Gonzalez et Caroline Mazel pour m’avoir suivi et aiguillé tout au long de ce travail. Je remercie fortement Maïté Elhuyar pour l’aide fournie dans le travail de recherches et également Mathilde Belascain et Sonia Le Doze, avec qui j’ai partagé l’expérience Argentine qui nous a mené jusqu’à ce travail, mais aussi de longues discussions sur le sujet.
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-En quoi l’espace public peut-il être à la base d’une amélioration des conditions de vie dans les bidonvilles en Amérique latine? Avant-propos. p.6. Introduction p.8. 3. Une relation de dépendance due au manque de services publics. p.29. 4. Une gestion collective des espaces publics.
1. L’espace public, une notion indissociable du bidonville.p.14.
p.32.
3.L’espace public, scène d’appropriation, appartenance et rivalité.p.34.
1. Un manque d’infrastructure publique. p. 14. 2. Prise de possession de l’espace public de la ville formelle. p.15.
b. Une réalité intégrée par la communauté.
p.34.
c. Les bals funk, une manifestation du sentiment d’appartenance.
p.36.
p.16. 4. Un espace public labyrinthique caractéristique du bidonville. p.18
4. «Enclave urbaine».p.37. b. Des pratiques de consommation et de loisirs limitées. p.37.
2. Une organisation spatiale axée sur les voies de communica-
b. Des interventions publiques qui renforcent le sentiment de
tions.
stigmatisation.
1. Organisation spatiale et conséquences sociales.
p.42.
p.24. 2. Des fonctions commerciales au plus proche de la ville formelle.
p.27.
c. Des villes partitionées, des bidonvilles en rupture avec leurs alentours..
p.46.
4
b. Le recul de l’insécurité sur l’espace public.
p.70.
c. Une visibilité de l’intervention des pouvoirs publics.p.72.
1. L’espace public, une capacité de connexion spatiale et sod. «L’apparition du touriste».
ciale.p.48. a. L’espace public, outil d’articulation entre des réalités opposées.
p.73.
e. Des zones «survolées», en dehors du processus de
p.48.
b. Des volontés de projets tournés vers l’Espace public.
f. Sentiment d’appartenance et valorisation de la population. p.76.
p.50. 2. Projets d’espaces publics, intégration du bidonville à la ville-
g. L’espace public, lieu d’expression du dynamisme et de la créativité de la culture locale.
formelle.p.52.
p.78.
-
a. Désenclaver le bidonville par l’intermédiaire du téléphérique urbain, le «Metrocable».
p.52.
b. Une infrastructure qui accompagne un projet urbain global. p.54. c. Metrocable: élément d’une intervention publique plus vaste.
1. Des espaces publics labyrinthiques caractéristiques intrinsèque du bidonville.
p.83.
p.58. d. Axe de connexion et outil de développement urbain. p.64.
bidonville.
p.84.
3. Une ouverture sur la ville, une amélioration des conditions de vie
Bibliographie
p.69. a. Une mobilité urbaine accentuée.
p.69.
p.88.
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Avant-propos.
argentin ou l’humidité glaçante du court hiver qui sévit dans cette partie de la planète.
Rosario, Argentine 2012. Arrivée en bus depuis Buenos Aires, mes pensées se baladent entre tout ce que j’ai laissé au Pays basque
Comment? Telle est bien la question. Comment peut-il exister
et tout ce que je vais découvrir ici, durant plus d’une année. Mon re-
tant de précarité si proche de tant d’ostentations? N’y à-t-il pas possi-
gard se perd à l’extérieur, admirant ce pays dont je viens de fouler
bilité d’améliorer cette situation? Ces questions se préciseront au fur
le sol. Et sur le bord de la route, une image qui restera gravée dans
et à mesure des projets d’écoles auquels nous avons eu la chance de
ma mémoire et qui sera, sans le savoir, le point de départ de multi-
participer à la Fapyd2, les conférences sur ce sujet et bien evidem-
ples questionnements; de la tôle, pleins de tôles, quelques briques
ment, tout au long de nos voyages à travers cette si belle Amérique
dessinent un soupçon de ce que l’on pourrait appeler «maison». Et il
Latine.
y en a plein, des «maisons», sur le bord de cette route. J’y aperçois
Retour en france, nostalgie quand tu nous tiens! Et cette ques-
des gens, pleins de gens. Et derrière la vitre embuée de cet autobus,
tion toujours présente dans ma tête. Qu’à cela ne tienne, ce sera le
je reste sans voie, frappée par cet image, rapide mais violente, d’un
sujet de mon mémoire. Et me voilà repartie dans les méandres des
bidonville argentin. Le premier d’une longue série, plus longue que je
recherches, questionnements, nouvelles idées, changement de vi-
n’ai pu le penser à cet instant même. La confrontation se fera presque
sions, etc... Cependant, un axe de recherche reste omniprésent dans
quotidiennement; les bidonvilles, ou «villas miserias» en Argentine se
les méandres de ce travail: l’espace public. Celui que l’on n’aborde pas vraiment lorsque l’on parle de bidonvilles, de par son existence
chaque pas pouvant amener à l’orée de la «Villa». Cette vision tant
indirecte dans ces lieux, mais qui m’a attiré l’attention lors d’une
éloignée de ce que l’on peut côtoyer par chez nous, en Europe, cette
conférence de Jorge Mario Jauregui à Rosario, architecte Argen-
vie si précaire, ces «cartoneros»1 croisés à chaque coin de rue, sil-
tin exercant à Rio de Janeiro et qui travaille essentiellement sur ces
lonant la ville sur leur charette en bois et leur chevaux à la recherche
questions d’espaces publics et d’équipements publics dans les plus
du moindre morçeau de cartons, sous la chaleur écrasante de l’été
importantes favelas de cette dernière.
1 Sont appelés «cartoneros», les personnes qui collectent le carton et ses dérivés dans les poubelles de la ville. Le terme s’ est étendu à la collecte de tout objet ou artefact qui puisse se réveler utile ou avoir de la valeur. Résulte d’une entreprise individuelle, non planifiée et non salariée, réalisée par des particuliers qui obtiennent une rétribution de la vente de ses derniers.
2 Fapyd: (Facultad de Arquitectura, planeamiento y diseño), Faculté d’Architecture,planification et dessin de Rosario.
6
C’est de là que tout est parti. Et de recherches en recherches, je me suis rendue compte que «s’attaquer» ces questions là, plutôt que directement et uniquement à la question du logement est un mode d’opérations qui commence à se développer aux quatres coins de l’Amérique Latine. L’envie de m’intéresser à ces procédés et ces projets fut de plus en plus forte mais il faut avouer que je me suis heurtée à la, peut être trop récente, réalisation de ceux-ci, m’empêchant d’avoir un réel retour d’utilisation et d’appropriation de ces nouveaux espaces. sujet malgré le manque d’informations sur les conséquences de ces nouveaux projets, j’espère que l’envie d’investiguer ces questions là transparaîtra et qu’elle comblera peut être ce manque. Bonne lecture!
Photos personnelles, «Villas miserias», Rosario, projet de logement de l’association «Madres de la plaza de Mayo».
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Introduction.` l’œuvre. «L’espace public est à la fois un sujet et un instrument. C’est
Et ce phénomène ne désemplit guère: la quantité de popu-
un sujet physique, contenant et contenu, faits de formes, de ma-
lation en situation d’occupation informelle dans les métropoles La-
tériaux, de pratiques, de modes de gestion, d’éléments matériels.
tino-américaines varie d’un pays à l’autre. Allant de 5% à 10% du
C’est aussi un instrument pour une meilleure société urbaine» (Jean-
total de la population dans des pays comme l’Argentine, l’Uruguay,
Pierre carboneau (2000)).
ou le Chili, à 30% ou 50% au Mexique ou au Brésil, et atteignant les
L’espace public est une notion peu considérée lorsque l’on
60% à Caracas et 70% à Lima, l’informel devient une préoccupation
aborde la question du bidonville. Il est pourtant le réceptacle des
primordiale dans la question du développement de ces pays Lati-
principaux «maux» de ce dernier; cet espace résiduel, «déchet»
no-américains. Ainsi, « les pauvres des villes du monde entier se voient obligés de s’ins-
de vie à part entière pour les habitants de ces communautés, où le
taller sur des terrains dangereux, aussi improbables que des ver-
dynamisme et l’expression d’une culture propre de ces lieux s’y dé-
sants de montagnes excessivement escarpées ou bords et plaines
veloppe.
sujettes aux inondations. De même, ils occupent les ombres mor-
Véritables «enclaves urbaines», ces espaces sont en rup-
les abords des voies de trains et d’autoroutes»1.
ture physique, sociale et économique avec la ville formelle qui les
Ce type d’informalité, est comme en train de se transformer
entoure, et qu’il entourent de par leur évolution organique, hors de
en normalité. Ce que nous appelons «irrégularité», tend à devenir «régularité». Cette forme «d’habiter la ville», cet «habitat informel et
caractéristique de ces lieux, d’autre part . Un fort sentiment de stig-
éphémère», n’est guère exceptionnel, au jour d’aujourd’hui dans le
matisation apparaît, la différence fait peur, la ville se divise en deux
paysage Latino-américain. 1
«Planets of Slums», Mike Davis, 2006.
8
Rio de Janeiro, Brésil.
9 Localisation des bidonvilles exposés dans la deuxième partie.
Ces conglomérats physiques, sociaux et environnementaux -
de différentes dimensions, caractérisés par leur conditions spécilarité topographique et paysagère, leurs dimensions, leur degré d’organisation interne et leur dynamique économique et culturelle,
Dans une première partie, il sera question de comprendre en s’extraire des paramètres importants de convivialité, ainsi que d’une
quoi le bidonville Latino-américain se détache de la ville formelle et
intense dynamique d’échange, de créativité et gestion partagée des
en quoi cette séparation est à l’origine des principaux problèmes
faibles ressources.
en matière de qualité de vie de ces espaces. Sera donc abordée le mode de développement organique de l’espace public dans
Il existe une culture locale très forte dans chacun de ses établisse-
le bidonville, caractéristique intrinsèque de ce dernier, et donnée
ments illégaux à travers le monde, immensément créative qui fut à
importante à prendre en compte pour la compréhension de la troi-
l’origine de beaucoup de mouvements importants (art, danse, etc).
sième partie. Sera exprimée également son organisation spatiale
Ce sont des espaces vivants, communautaires où l’espace public
et sociale, les phénomènes d’appropriation et les pratiques de vie
est la scène de ces manifestations culturelles.
collective qui nous permettront de comprendre en quoi il existe une
Il sera donc question d’analyser en quoi l’espace public au sens large (espaces publics, équipements publics, interventions pu-
Les projets d’espaces publics exposés dans la deuxième partie
bliques), peut améliorer les conditions de vie dans les bidonvilles
s’appuieront sur cette analyse pour répondre à la problématique.
Latino-américains en les connectant physiquement et socialement à
Toujours dans cette première partie, il sera question d’exposer les
la ville formelle.
différentes politiques d’interventions publiques qui ont «sévit» du-
Cet espace public, sa double facette, ce côté à la fois «obscur», hors de tout contrôle, abandonné, dangereux, espace ayant ses
ville avec son «point noir»,et montrer que le bidonville est encore au-
propres lois, ses propres règles du jeux, violent, peut également être
jourd’hui une réelle «enclave urbaine» dans les grandes métropoles
source de sécurité, d’ouverture, d’échange physiques, sociaux, un
-
lieu vivant, d’expression culturelle d’une immense richesse lorsqu’il
paces publics exposés dans la deuxième partie contrastent avec ces projets antérieurs.
10
Medellin, Colombie.
11 Localisation des bidonvilles exposÊs dans la deuxième partie.
Dans une deuxième partie, il sera question d’exprimer en quoi
en perpétuelle mutation, peuvent-ils lui faire perdre son principal trait
les nouveaux projets d’espaces publics présentés ici cherchent à
de caractère, son originalité, espace labyrinthique en inachèvement
améliorer les conditions de vie dans ces bidonvilles Latino-amé-
-
ricains. Seront pris l’exemple, de Medellin en Colombie, Santiago
sée.
Léon de Caracas au Vénézuela et Rio de Janeiro au Brésil. Le Metrocable ou téléphérique urbain sera pris comme axe de com-
conduite tout au long de l’argumentation.
paraison pour analyser ces trois cas. Le choix d’un élément de projet tel que le téléphérique ur-
-
bain comme axe de comparaison est intéressant car c’est un outil
sence se fait relative, en «creux» des propriétés privées»1. Nous al-
de désenclavement de ces communautés, ainsi qu’un fort axe de
lons donc aller explorer en quoi l’architecture du vide peut-elle amé-
développement au sein des communautés.
liorer les conditions de vie dans les bidonvilles Latino-américains.
Nous verrons en quoi il améliorent les conditions de vie des habitants de ces bidonvilles en les connectant physiquement, socialement et économiquement avec la ville formelle. de mouvement dans les bidonvilles: rien n’est jamais complètement achevé, le bidonville est en perpétuel changement, mutation. On peut donc se poser la question de la préservation de ces derniers par leur urbanisation. Est-il possible de conserver ce qui est en mouvement? Nous verrons en quoi ces nouveaux projets d’espaces pu-
1 André Raymond, citation dans «L’Architecture du vide», espace public et lien civil, Jacques Beauchard et François Moncomble.
12
Santiago Léon de Caracas, Vénézuela.
13 Localisation des bidonvilles exposés dans la deuxième partie.
L’IBGE (Institut Brésilien de Géographie et de Statistiques) Dans cette première partie, il sera question d’expliquer, à travers l’analyse de l’espace public existant, en quoi les bidonvilles ap-
subnormal), c’est-à-dire, un «ensemble constitué par un minimum
paraissent comme une «enclave urbaine» dans la ville formelle. Sera
de 51 habitations occupant ou ayant occupé jusqu’à une période
abordée la notion d’espace public dans le bidonville, le processus
récente un terrain d’autrui (public ou privé), et disposés, en général,
de création informel par lequel il apparait, son organisation interne,
de forme désordonnée et dense, et dépourvus, dans leur majori-
les activités qui s’y déroulent et les processus d’appropriations à
té,
l’œuvre dans ces lieux. Nous aborderons ensuite la relation qu’il en-
celles de l’Institut Pereira Passos de Rio de Janeiro ajoute une va-
tretient avec la ville qui l’entoure.
riable supplémentaire qui est la question du revenu: «zone majori-
Cette première partie a pour objectifs de déterminer les «maux», les
tairement résidentielle occupée par une population à bas revenus et
carences, les problèmes existants sur cet espace public caractéris-
caractérisée par la précarité de l’infrastructure et des services publics, des rues étroites et un alignement irrégulier, des lots de forme
des nouveaux projets d’espaces publics cherchent à améliorer les
et de taille irrégulières, ainsi que des constructions non enregistrées
conditions de vie dans ces lieux.
et non conformes aux schémas légaux». l’accent sur l’illégalité de l’occupation du sol, d’autres sur le système
1. L’espace public, une notion indissociable du bidonville. Cette partie a pour objectif de montrer en quoi l’espace pu-
Jorge Mario Jauregui, architecte Argentin travaillant dans cer-
Pour ce faire, sera abordée tout d’abord la notion même de bidon-
manière suivante: «les bidonvilles souffrent d’un manque à plus ou
ville, son processus de création, d’évolution pour terminer sur ses
moins haut degré de
, tels que les écoles,
caractéristiques propres.
14
équipements de santé, centres culturels, installations sportives, de , des services de col-
est la pousse,
. «Comme l’ethymologie végétale du mot «fa-
vela» (qui vient d’une plante, Jatropha phyllacantha) pourrait l’indiquer, les favelas sont des
presque
. N’existe pas la
, tout
des
constituées par du moindre espace vide de la ville for-
est privé et n’existe pas non plus de normes légales sur la délimita-
melle, autrement dit, de l’espace public, l’espace collectif; l’invasion
tion entre le privé et le communautaire. Ce qui existe et une coexis-
elle-même est un acte de
tence consensuelle qui est en permanente négociation». L’on voit
Elles reproduisent le développement de l’herbe, qui pousse dans
bien ici apparaître le manque d’équipements publics, et la notion
tous les endroits «non-occupés», délaissés, les terrains vacants,
d’espaces publics appuie l’aspect résiduel de celui-ci, il n’est que le
discrètement, jusqu’à envahir totalement un espace donné, ou plutôt
«déchet» d’entités privées, il n’y a pas de réelle conscience de cet
approprié. L’invasion se produit souvent la nuit, les favelados s’or-
espace, il est pourtant le réceptacle de la plupart des «maux» du bi-
ganisent, «attaquent» un terrain vague, et le lendemain la ville se ré-
donville (nous verrons dans la deuxième partie qu’il peut également
veille avec une nouvelle «plante» à ses côtés. Elles se développent
devenir une solution d’améliorations des conditions de vie).
généralement sur des
et de
».
par les municipalités
ou les espaces laissés vides par la «machine immobilière», terrains impossibles ou trop chers à construire tels que les mornes escar-
pées, les terrains inondables et bien d’autres. Pour ce qui est de Rio, les favelas n’hésitent pas à fourmiller dans le centre même de la ville, dans le moindre endroit abandonné ou non occupé, entre les
On peut résumer le
du sol par
quartiers dits conventionnels à l’image «de l’herbe qui pousse entre
les favelas, et les bidonvilles d’Amérique latine en général, par une
les pavés, en formant des enclaves, c’est-à-dire des micro-territoires
1
qui
à l’intérieur d’autres territoires plus vastes». On voit ici, déjà, se dégager une certaine différence entre la ville formelle et le bidonville,
1
«L’Urgence permanente», Compte rendu des rencontres
une opposition physique, des «micro-territoires» pour reprendre le
internationnales de Venise et Marseille, 2000.
15
Une notion de
que l’on développera plus préci-
sément dans la troisième partie, peut se dégager dans la capacité de déplacement des favelas lorsque les conditions politiques, par
est
exemple, le demandent. Paola berenstein, dans son essai, explique
ou au sens plus large du
l’impressionnante vitesse avec laquelle les favelas se déplaçait, dis-
dans une
paraissaient pour renaître un peu plus loin, lorsque, des
il fait
de la notion de favela, . Bien qu’il paraisse secondaire aussi singulière que cette dernière, de la favela, de son
étaient mises en place par le gouver-
. La favela n’est pas seulement une accumulation de «bar-
nements, et la capacité de délocalisation de ses habitants: «Alors
raques» faites de matériaux ramassées et regroupés, empilées les
qu’une favela était complètement rasée un jour à un endroit, le len-
uns sur les autres, c’est également un
demain même elle renaissait déjà un peu plus loin».
d’espaces extérieurs qui sont tout autant d’espaces importants à
Contrairement à la ville formelle, c’est la qui est la plus
-
; sera exposée ultérieurement un
de rues, de places,
prendre en compte dans la compréhension de ce qu’est un bidonville.
exemple avec la Favela Rocinha. En effet, c’est sur les abords de cette dernière que se développe la majorité des la. Il est dit qu’elle est
de la fave-
On peut voir, de nouveau dans le texte de Paola Berenstein1,
, les limites extérieures deviennent
le centre de la favela, accueillant les activités commerciales, et des
ou expliquer la favela selon -
tions reliant les abords de la favela à ces derniers. Et c’est d’ailleurs dans ces quartiers conventionnels que partent tra-
(dont une
énoncée précédemment), représentatives des espaces identitaires de celles-ci. Elle met également en exerge la , caractéristique forte de ces espaces singuliers:
vailler tous les matins les habitants de la favela, pour une grande
Elle commence par le
, l’abri, qui sera évoqué ici briève-
partie.
ment; le «favelado»2 construit sa barraque à partir de matériaux hétéroclites trouvés un peu partout.
1 «L’Urgence permanente», Compte rendu des rencontres internationnales de Venise et Marseille, 2000. 2 Habitant de la favela. 16
Le
, l’unique préoccupation est de construire un . Il n’y a
pour la
de repères connus, toute personne étrangère s’y perd facilement» (Paola Berenstein). Ce fameux labyrinthe caractéristique des favelas et des bidonvilles de bien d’autres pays n’a
trouvés au
. De plus, on peut remarquer que
n’est
, il
, en continuelle évolution; apparaît ici la notion
les constructions dans une favela, ( et donc la favela en elle-même)
de mouvement continuel que l’on développera ultérieurement: «le
sont en
labyrinthe devient un
, mouvement; rien n’est jamais com-
plètement achevé, la
corps» (Paola Berenstein). Aucun architecte n’est venu ici élaborer , contrairement à une construction convention-
les plans de ce dédale, il est le fruit des des favelados, processus spatial
en
.
et ouvert, jamais projeté.
On peut donc être amené à dégager une certaine singularité dans la conception spatiale de ces espaces, où la
La
qu’elle expose, est celle
du parcours et à travers elle du
, et par la suite de
-
. L’on prend de la hauteur, l’échelle n’est plus celle de l’abri mais de l’ensemble des abris et des
produit qu’à posteriori dans des espaces labyrinthiques comme les favelas, ils sont le
, sans projection
antérieure.
qui les sépare ou les relie, ces entre deux espaces «privés», l’espace laissé entre les baraques qui forment les ruelles, les impasses des favelas et en quelque sorte .
des favelas» avant peut être même son «habitat», «
«C’est effectivement un espace labyrinthique, et puisqu’il n’y a pas de signalisations
, ou
-
, ils sont l’essence même de la favela.
17
Il est question, maintenant, d’aborder plus précisément la de la Favela Rocinha à Rio de Janeiro, exposée par Didier Drummond1. Nous aborderons ensuite la question de l’
ainsi que les
l’évolution des
dans les favelas.
Dans une seconde partie, il tente de saisir les à travers l’organisation et la gestion des intérêts des habitants (distribution d’eau, électricité) et des espaces collectifs ( la
à l’intérieur même de cette favela. Cette partie a pour
rue, la place, les lieux de réunion).
but de voir comment un espace public se forme sans intervention Dans une première partie sera évoquée l’ ville formelle.
. C’est à partir des
Il paraît également intéressant d’aborder les pratiques de
que les formes et l’organisation urbaine de la favela se dé-
prendre comment les nouveaux projets d’espaces publics exposés
de l’espace public, ou dans un premier temps du Habitation et espace collectif, public sont intimement liés,
-
.
Les facteurs qui déterminent le choix du premier emplacement de l’abri sont l’accès et la nature du sol. Les chemins sont amorcés et, au fur et à mesure de l’occupation du Morro, les nouveaux habitants
Didier Drummond dans son livre, «Architectes des favelas»2 analyse la
engendrées par
l’habitat particulier d’une des favelas de Rio de Janeiro, Rocinha ,
les prolongent en montant vers la place encore libre. Les habitants, lors de leur installation, recherchent le terrain le plus plat possible et généralement à proximité d’un arbre.
plus précisément d’un des quartiers les plus vieux de cette dernière.
, lui, doit respecter cer-
Il s’est appuyé sur les témoignages des habitants et de la connais-
taines règles; en effet, il est important de se plier à certaines pra-
sance d’autres quartiers plus récents pour exposer sa vision de 1 «Architectes des favelas», Collection les pratiques de l’espace, Didier Drummond, 1981. 2
Didier Drummond, Architectes des Favelas, Collection «Les pratiques de l’espace», 3. Pratiques collectives de l’espace.
règles de voisinage sont le troisième facteur d’implantation: par leur accueil et l’aide offerte à la construction de l’abri, les plus anciens acceptent le nouveau migrant dans les limites d’une appropriation
18
Ruelles de la favela Santa Marta, Rio de Janeiro, Brésil, espace labyrinthique, en perpétuel mouvement, inachèvement. Photos personnelles.
19
Effectivement, l’espace que s’approprie les habitants de la favela va plus loin que celui nécessaire pour la construction de leurs habitations, «il dépasse la stricte limite de l’abri; , lieu de repos»1. Par exemple, la cuisine ou les travaux ménagers se font souvent à l’extérieur, l’on accueille à l’extérieur également, le seuil, le palier de la
l’entraide et les relations sont étroites et les
-
suivent la loi du moindre effort. Ces cheminements se créent donc le long des courbes de niveaux au fur et à mesure de l’implantation des baraques, incitant les derniers arrivants à s’installer à la même hauteur. Si l’on regarde un quartier haut de la favela Rocinha, on peut
maison est un lieu à part entière,
constater qu’il existe d’importants espaces entre les abris, espaces
et fortement utilisé par les habitants, approprié, que ces derniers
de travail ou de dépôt, qui permettent une
délimitent par la végétation existante ou par des séparations plus symboliques que réelles.
. On peut également
remarquer la forte présence de la végétation qui est assez respectée lors des premières installations (nous verrons ultérieurement que
Sur le dessin ci-contre, l’on peut remarquer que les espaces
cela n’est plus forcément le cas lors des prochaines étapes de l’évo-
de la favela se structurent organiquement en épousant la contrainte
-
imposée par la forte pente du Morro. Une grande partie des chemins
ciée à l’habitat, les arbres servent d’appuis, assurent une stabilité
d’accès sont perpendiculaires aux courbes de niveaux et desservent
du sol et bien évidemment amènent de l’ombre, très appréciée dans
les abris qui s’orientent dans le sens des courbes. Cette implantation
cette région du globe où les températures sont relativement élevées.
en escalier peut s’expliquer par deux facteurs importants. Le premier étant celui de la
: le «favelado», dans la
Sous la poussée du mouvement migratoire, de nouveaux abris se construisent dans les parties les plus hautes et encore inoc-
logique de franchir le moins de vide possible, choisira de construire plutôt en longueur et assez étroit et il s’orientera de manière à ce
de la transformation des abris précaires en baraque (du provisoire
que le plus long côté soit posé à même le sol. La deuxième raison
au permanent) .
se réfère de nouveau aux rapports de voisinage; d’un abris à l’autre, 1
Didier Drummond, page 65.
20
Schémas réalisés à partir d’illustration de Didier Drummond, «Architectes des Favelas».
Vues en plan.
Etape 1.
Etape 2.
Etape 3.
Vues en pers.
Diminution des espaces extérieurs, au fur et à mesure de l’évolution du bidonville. L’espace public se cantonne
21
.
avec le concours de ses voisins. On peut donc voir, par exemple
En effet, l’on assiste dans cette étape de la transformation de la fa-
dans la favela Rocinha, un ancien chemin transformé en escalier par
Cette
-
vela à un lement réduit à la seule
: «A la vie sociale quasi rurale de la
d’espace de jeux pour les enfants; les habitants repoussèrent les
, qui correspondait à une , va succéder un tissu moins perméable,
où le besoin de délimiter matériellement son espace et le
limites de leur propriété en construisant des parois de planches ou de briques le long de cet escalier. Cette
transforme la relation des ha-
bitants avec leur milieu, comme expliqué dans la citation suivante:
s’expriment avec plus de force.» 1 Petit à petit,
, de circulation, voire
entre les baraques, de
par l’agrandissement de certaines, et également l’arrivée de nou-
s’incruster dans un tissu végétal, cette relation passe à un stade
veaux migrants, qui, plutôt que de monter s’installer en haut de la
typiquement urbain où les implantations nouvelles et les extensions
colline, préfèrent
des baraques ne se font plus en fonction de la présence végétale
de la favela, première zone occupée, les parcelles délaissées, ve-
mais des constructions existantes».2 C’est ainsi que les , la végétation se cantonne dans les pots, et l’on essaye tant bien que mal de garder les arbres
leur stabilité. De multiples
vont donc être
supprimées, et le sera
ou directement
les plus importants.
,
-
non utilisé par la communauté
. Il en sera de même pour les
grimpent à l’intérieur du Morro qui vont se transformer en
qui -
que chacun des habitants aménagent devant sa baraque 1
Didier Drummond,Architectes des favelas, page 66.
2 «Architectes des Favelas», Didier Drummond, page 68.
22
Dans une troisième phase de l’évolution de la favela Rocinha,
bien qu’à première vue elles n’amènent que de la promiscuité, de
qui correspondrait à l’état actuel de celle-ci, nous pouvons retrou-
l’exiguïté, elles sont aussi à la base de certains avantages clima-
ver chacun des stades précédemment décrits. Les constructions
tiques et relationnelles à mettre en valeur. La construction du pre-
ne cessent de s’installer toujours plus haut sur la colline tandis que
mier étage renferme la circulation, mais elle protège du soleil et l’air y reste relativement frais, qualités non négligeables ici. D’autre part,
, conquête des derniers morceaux de terrains libres,
la construction de ce fameux étage va rapprocher les habitations et
agrandissement des rez-de-chaussée, construction d’un étage,
donc leurs habitants, contrairement à ce que l’on a pu analyser dans
voire plusieurs. Les
les phases précédentes (chacune des baraques se refermaient à
être
vont
par la construction des rez-de-chaussée et l’aligne-
ment de la circulation. Les
sont
l’intérieur de limites fortement marquées). Ici, un nouveau tissu de relations entre les habitants par l’intermé-
au minimum et la taille des ruelles-escaliers encore limitée par la
diaire de l’étage va se créer: «La construction de vérandas qui
construction d’escaliers extérieurs. Les étages en porte-à-faux qui
viennent recouvrir la ruelle rapproche les habitants au point que par-
se développent à perte de vue ont pour effet de transformer les rues
fois, il est possible de passer d’une baraque à une autre par-des-
en de véritables boyaux, plus de place pour la végétation, le béton
sus la ruelle. De même, les fenêtres, toujours ouvertes, donnent plus
le ciment et la brique sont les seuls maîtres de ces lieux.
souvent sur la vie intérieure d’une baraque voisine que sur le Morro ou la mer et permettent aux «favelados» de communiquer de maison
La
s’effectue au détri-
ment de ce dernier qui apparaît alors comme simple
-
en maison sans devoir en sortir.»1 Nous pouvons peut être parler d’une
Si la gêne occasionnée par l’essor d’une baraque (un en-
qui se développent au dessus des espaces collec-
corbellement sur une impasse par exemple), n’entraîne aucune
tifs au sol; un
réclamation, la tolérance s’apparente à une jurisprudence et la rue
crée au-dessus du réseau de cheminement existant,
«publique» accepte subrepticement une
-
-
et de déplacements se
réduit à son maximum
-
. Cette organisation spatiale, cette relation particulière entre le privé et le public
, et
quelque part, l’espace public et l’espace privé se mélange, chacun vit à côté et avec l’autre. 1»Architectes des favelas», Didier Drummond, page 72.
23
2. Une organisation spatiale axée sur les voies de communications.
Depuis 1930, l’occupation progressive du Morro s’est faite à la fois de manière
et
: par rayonnement à partir
du pôle principal de développement situé au pied de la favela et Dans cette partie, il sera question d’aborder l’organisation
de manière linéaire le long de l’Estrada da Gavea et des . Cette
des activités commerciales, regroupées le long des principaux axes
a déterminé
de communications et au plus proche de la ville formelle, ainsi que
un découpage social de la favela, l’occupation du bas vers le haut
les pratiques de vie collective, dont l’appropriation de l’espace pu-
entraînant une première
l’oeuvre et amener d’importantes informations pour la compréhen-
La favela basse est la plus vieille, ses habitants sont les premiers
sion des nouveaux projets d’espaces publics présentés plus tard.
arrivés et les mieux lotis, à proximité des accès de la ville.
entre les quartiers hauts et
et la grande majorité d’entre-eux habitent dans des maisons en dur. -
Comme nous venons de le voir, à chacune des étapes cordes espaces privés et
tants n’ont pas d’eau, pas d’électricité et occupent des baraques
publics, agissant sur l’aspect général de la favela. Il est possible de
en bois. Récemment arrivés, ils se sont installés sur les terrains dis-
retracer cette évolution à travers l’occupation progressive du Morro
ponibles au bout des
de 1930 à nos jours au moyen de plans d’occupations de la Rocinha
abrupte, parfois à trente minutes de marche des quartiers bas.
respond un mode
qui témoignent, à des époques différentes, du développement de
, au pied de la roche
Cette opposition est nuancée par toute les
-
chacune des étapes de l’évolution. Ces plans résultent d’extrapo-
, qui témoignent d’une réelle stra-
lations faites à partir de l’analyse directe des lieux et le témoignage
de la favela. Au fur et à mesure de la montée à
des habitants. Cette évolution, abordée brièvement, montrera com-
travers le Morro, les maisons en dur disparaissent et laissent place
ment l’
aux baraques en bois puis aux abris précaires. et
de celle-ci, et comment, par la même occasion, les projets tion.
les signes d’une grande pauvreté matérielle apparaissent.
24
Partie haute de la favela Santa Marta, propice aux éboulements,partie la plus précaire de la favela, la plus enclavée. Rio de Janeiro, Brésil, photos personnelles.
Partie basse de la favela Santa Marta, consolidée, partie la plus proche de la ville formelle.Rio de Janeiro, Brésil, photos personnelles.
25
En écoutant les «favelados» décrire leur favela, cette orga-
La superposition de ces deux découpages est à l’origine d’entités
nisation sociale sous-jacente est présente dans tous les discours:
socialement et géographiquement homogènes.
« les pauvres habitent en haut, les riches en bas. En haut, on est
Déterminés de manière très organique, les quartiers en perpétuelle
loin de tout, sans eau, sans électricité.
évolution regroupent des populations allant jusqu’à 15 000 «fave-
. En haut se cachent les voleurs, les
lados», tous conscients de leur
.
marginaux qui fuient la police, c’est dangereux d’y aller même en
Ainsi, entre chaque quartier et surtout entre les habitants du haut
plein jour...». Ainsi,
et du bas de la Rocinha, existe-il une certaine
parfois une
. Par le
tivités des associations permettent de dépasser. Se dégage ici, non seulement une
A ce découpage «horizontal», se superpose une
-
déterminée par les axes principaux de pénétration dans le Morro. Chacune est comme une artère qui irrigue une zone
. Celle-ci comporte autant de diversités que la «ville formelle» elle-même. Le plan de la Rocinha réalisé en 1960 par les services du cadastre
limitée, détail important à garder en tête pour analyser les nouveaux projets décrits plus loin.
-
en effet possible de juger l’ancienneté des zones d’occupation à leur
-
densité et d’en déduire le sens de la croissance, ainsi que le mode
, la desserte de part et d’autre de l’axe de pénétration est très
organique de développement. De plus, on peut remarquer que, par
limitée en bas et se développe en montant dans le Morro à l’image d’un
endroit, la densité est telle que les
-
au point qu’il est impossible de déterminer en plan les
nombreuses vers son extrémité. Chacune des rues découpe la fave-
voies de pénétration et les cheminements secondaires. Ainsi, l’urba-
la en plusieurs zones distinctes, la densité des habitations obligeant
nisme de la Rocinha apparaît comme une e
parfois les «favelados» à sortir d’un quartier pour atteindre une baraque pourtant proche mais desservie par une autre rue.
-
-
, caractéristique importante pour la suite, tout en étant, dans les quartiers les plus anciens,
-
26
De fait, l’habitat du quartier a maintenant subi toutes les phases de transformation et l’ensemble des maisons en dur lui donne un asUn point concernant l’étude du mode d’expansion de la Ro-
de l’intérieur du Brésil que d’une favela. On peut voir ici, également,
cinha vient de l’observation des quartiers bas et notamment de
la
l’évolution suivie par le «Bairo barcelos»,
tion que se fait un «favelado» de son lieu de vie; plus la favela,
. C’est en effet, depuis ce quartier que toutes les
physiquement et structurellement à la «ville formelle»,
-
du Morro. Cette situation
plus les habitants ont le
, cette
privilégiée différencie de manière fondamentale ce quartier du reste de la favela car elle a fait naître une
qui le
qui vont suivre, projets qui tentent
, la relier à la
démarque chaque jour un peu plus. Quelques observations sur cet
«ville formelle» par des structures urbaines et architecturales sem-
espace peut nous permettre de mieux comprendre la vie de la favela
blables à celles de la ville.
et l’importance d’une activité commerciale, la force de développement que peut amener cette activité à l’intérieur de la favela. Situé
dont il contrôle l’entrée, le «bairo
Ce quartier est une véritable
de laquelle
partent tous les axes de pénétrations vers l’intérieur du Morro. Ainsi,
barcelos» est le plus ancien quartier de la Rocinha. Il se caractérise
sa situation fait de lui un
essentiellement par une
(rua do boiadeiro, rue du
«favelados» qui vont quotidiennement à la ville. Par sa dimension et
appelée «largo do boiadeiro»,
les constructions en dur qui aujourd’hui l’environnent, le «chemin du
bouvier), qui s’achève sur une
et par de nombreuses ruelles tracées parallèlement tous les vingts
obligé pour des milliers de
bouvier»
vers
mètres environ, qui desservent des lots de taille variable. La plupart des habitants de ce quartier qui, à leurs yeux, commence plus haut, «là où les ba-
boyaux parfois, rues de la favela. De ce contraste est née la première fonction symbolique de «bairo barcelos»,
-
raques sont en bois».
27
Le «chemin du bouvier», aujourd’hui asphalté par la préfecture, et la «place du bouvier» sont devenus un
qui compte plusieurs lieux de culte de diverses obédiences ainsi
et jouent un rôle primordial dans le ravitaillement de la favela en denrées alimentaires. Tous les dimanches, un grand
Cette fonction commerciale est complétée par une activité culturelle
-
qu’une maison communautaire qui abrite une crèche et une école du soir.
se tient dans la rue qui diminue de moitié entre les échoppes réalisé par les commerçants du quartier ont déterminé une organialimenter la favela. Et c’est ainsi que de , chez les habitants qui entreposent des produits durables
sation de l’espace très typique: les lots en bordure de la rue sont de taille plus importante car tout rayonne à partir de cette rue où
revendus au détail. Mais ces petits commerçants, adaptés aux besoins immédiats des «favelados», et notamment des plus pauvres
chaussée est donc réservé aux commerces qui, au prix d’agran-
qui achètent au jour le jour en toute petite quantité, ne disposent que
dissements successifs, s’accaparent les lots d’habitation situés en
rarement de denrées périssables comme le pain, le lait ou la mar-
arrière de cette façade commerciale.
garine. Cette carence dans l’approvisionnement alimentaire de la Rocinha, les prix élevés pratiqués par les revendeurs et la
le soir par des rideaux métalliques. L’étage est toujours réservé à l’habitation.
ont favorisé la fonction commerciale
Une forte activité commerciale existe donc dans la favela Rocinha,
de la «rue du bouvier» où de nombreux commerces ont prospéré
-
au point de devenir de véritables entreprises,
. Cette fameuse «rue du bouvier», a donc eu un
, elle est devenu un
-
Le long des 350 mètres de la «rue du bouvier», l’on trouve tout
, de mobilité mais également d’activités diverses et variées,
ce qui permet à un «favelado» de vivre: boulanger, boucher, épicier,
améliorant par la même occasion, les conditions de vie des habi-
petits supermarchés, quelques artisans et les innombrables bistrots
tants de la favela.
grand ouverts sur la rue inondée des dernières musiques à la mode.
28
Entre la Rocinha et la ville se sont tissés des
-
mais, bien que la favela soit l’expression violente de l’exploitation et du contraste social qui sévit L’étude de l’évolution de l’habitat de la Rocinha, du mode de
au Brésil, la
entre riches et pauvres dans la
croissance de la favela et de son organisation urbaine actuelle nous
société brésilienne risquerait de faire apparaître les «favelados» de
a déjà montré quelques
manière simpliste comme un ensemble de gens égaux dans l’exploi-
que nous
pouvons compléter par l’observation des
tation. Finalement, les relations entre favelados sont à l’image des
ou l’espace partagé, disons.
relations entre la ville et la favela. De même que la ville exploite la
Dans un premier temps, il sera question de voir comment les «favelados» s’organisent au niveau du la
favela, un petit nombre de «favelados» r
-
ainsi que
, par
-
. Ensuite, nous analyserons la
Dans l’impossibilité d’obtenir un branchement au réseau urbain, les habitants sont dans l’obligation de passer par des reven-
.
deurs qui, ayant une adresse légale au
peuvent
Mais tout d’abord , il sera question d’aborder brièvement la
recevoir l’électricité et ensuite la redistribuer. Ils installent les lignes,
: en ef-
les compteurs et amortissent leurs frais en pratiquant des prix cinq à
s à endiguer
dix fois supérieurs à la normale.
l’expansion économique par la ville, le mythe de la marginalité entre-
La
tenu par voie de presse, a été un moyen de
quartiers bas de la favela sont alimentés par un point d’eau collectif
.
est liée au même genre de
, les
installé par la préfecture et par une source découverte et exploitée
Celles-ci sont alors dénoncées comme enclaves de ruralité,
par un «favelado».
qui gâchent le site de Rio et nuisent au tourisme, et les favelados comme des voleurs paresseux qu’il est inutile d’accueillir
confort urbain, nombreux sont ceux qui, dans la «bairo barcelos» en
dans la ville; l’objectif étant de faire apparaître la favela comme le
particulier, préfèrent s’abonner au réseau privé de distribution et ins-
, comme il en a été de même ,
taller une cuve dans leur maison.
à plusieurs reprises,depuis leur apparition.
29
Taxe d’abonnement et de branchement au réseau, taxe de
Les favelados appartiennent à la catégorie des «individus qui
remplissage de la cuve, les prix sont exorbitants et là encore cinq à
n’ont pas le pouvoir, pour une raison quelconque, de s’adapter aux
dix fois supérieurs au prix pratiqué dans la «ville formelle».
nécessités et aux convenances de la civilisation contemporaine, ils
Ces privilèges, maillons supplémentaires d’une exploitation écono-
ne trouvent pas leur place dans une telle civilisation. Ces individus
mique qui ne s’arrête pas aux limites de la favela, a pour double effet
forment le
de chasser les plus pauvres de la favela et d’entretenir dans une
daptés sociaux. Le déchet humain des égarés de la communauté
prospérité croissante la petite bourgeoisie locale. Les «nouveaux
sociale constitue les groupes de la communauté civile qui s’incrus-
riches» ont tout intérêt à ce que
tent dans les favelas»1
paremment
et apcar leur monopole ne peut être
que les sociologues appellent les ina-
-
voie à un type de jugement, encore régulièrement exprimé de nos
concurrencé par les circuits économiques traditionnels qui n’osent
jours, et illustre le genre de
pas encore pénétrer dans la favela.
lados». Si l’analyse des rapports économiques entre «favelados»
Ces quelques exemples d’exploitation économique entre favelados complètent l’analyse des
-
nous a montré au contraire comme ces derniers s’étaient pliés au modèle urbain, celles des pratiques sociales liées à l’organisation
. Nous pouvons
de l’espace a mettre au jour des
-
, que la «ville formelle» a tout à leur envier. Il sera question parasitaire en milieu urbain. Elle devrait, au contraire, être considé-
d’aborder ces relations en observant la manière dont les habitants
rée comme un quartier de Rio à part entière où les favelados entre-
de la communautés
tiennent des relations économiques à l’image des relations urbaines
la favela et comment ils se les approprient.
de
traditionnellement inventoriées. Mais ces relations économiques ne doivent pas faire oublier d’entraide existante dans la favela.
et 1
Mario Bulhao, «readaptaçao social com extinçao das favelas».
30
D’importants problèmes de collecte des déchets, photo personnele, Favela Santa Marta, Rio de Janeiro, Brésil.
Une réduction de l’espace public au maximum,un prise de possession de l’espace 31 public par l’espace privé, photo personnele, Favela Santa Marta, Rio de Janeiro, Brésil.
les habitants se soulageaient à l’extérieur de la baraque tant que la
.
faible densité le permettait. Mais la situation se complique au rythme A l’échelle du groupement de maisons existe une très grande ,
Les égouts à l’air libre, peu importants en haut de la favela, atteignent
par chacun,
trois à quatre mètres de large en bas. Bien qu’ils imposent dans
les personnes se parlent de baraques en baraques,etc... A cette
certains quartiers une discipline collective de dépôt des ordures en
solidarité; tout le monde se connaît, cette dernière étant un échelle, les
, la rue est
entretenue par tous et progressivement aménagée: construction
points de ramassage le long de la route, la tentation est grande pour
d’escaliers en béton, aménagement de rigoles d’écoulement des
les «favelados» de se servir de l’égout comme d’un dépôt à ordure,
eaux de pluie. Ainsi, le traitement des cheminements, qui est le prin-
aggravant sa taille en encombrant l’écoulement normal des eaux
cipal souci collectif des habitants d’une même rue, relie de baraques
usées. Cette eau putride et nauséabonde se jette ensuite dans la
en baraques, les favelados du bas à ceux du haut, mais aucun tracé
mer. Les eaux de pluie prennent le même chemin que les eaux
à l’entité quartier est très grande et se
usées. Elles ont l’avantage de nettoyer un peu les égouts, vite assé-
manifeste, dans le traitement des problèmes d’approvisionnement en
chés lors des fortes chaleurs, mais aussi l’inconvénient de les faire
eau et surtout d’évacuation des eaux usées et des ordures comme
sortir de leur lit en bas de la favela et de se répandre sur toutes les
nous allons le voir ci-après. A l’origine de la plupart des questions
parties planes. Ainsi, lors des grandes pluies, les habitants doivent
d’hygiène que connaissent les habitants de la communauté, il y a
parfois marcher jusqu’au mollet dans un mélange d’eau et d’ordures
La
, qui est sans doute le problème crucial de la favela. Dans toute la Rocinha, les égouts se sont crées
faible section du collecteur installé par la préfecture, destiné à l’ori-
naturellement en suivant les cheminements d’accès.
gine à recueillir les eaux de pluie en passant par l’autoroute avant
Dans les premiers temps de l’occupation, l’évacuation se faisait sim-
d’atteindre la mer. Depuis peu, la prise en charge collective du pro-
plement, chacun jetait les eaux sales par les fenêtres. De même,
blème des égouts a animé plusieurs quartiers bas de la favela.
32
La gestion collective des espaces s’étend également à la : sous l’impulsion d’associa-
des salles pour l’école du soir (cours pour adultes, alphabétisation,
tions d’obédience religieuse, la construction de lieu de réunion ou
gestion ménagère, réalité brésilienne, urbanisation), des salles de
de culte résulte d’une participation de tous les membres de la com-
réunion pour différents groupes (jeunes, femmes, etc...) sans qu’au-
munauté concernée. Les règles qui déterminent cette construction
cun programme ne soit véritablement arrêté; chacun connaissant
sont les mêmes que pour l’habitat: économie de place, économie de moyen.
premières idées d’aménagement. -
lectifs, et par manque de place et de moyens ces en terme de «programme»; par exemple, l’église ca-
et apparaît comme une des
tholique de «bairo barcelos», construite très humblement, se trans-
, comme un caractéristique même de la favela, un
forme en salle de classe pour adulte le soir et une classe d’enfants
trait de caractère qui lui donne toute sa force. On peut voir aussi
le matin.
ici même, ce besoin, cette
, d’équipe-
, les habi-
ments publics qui manquent aujourd’hui dans la favela Rocinha et
tants ont construit des éléments de cloison amovible qui se posent
dans bien d’autres encore. Ces espaces ont une réelle raison d’exis-
entre les fermes en bois et le sol grâce à un système d’accrochage
ter, manque de moyens, ils se cantonnent au strict minimum. Autre
par loquet. L’entretien et les améliorations successives de l’espace
constatation également, celle de la
restent assurés en permanence par les membres de la communau-
, caractéristique essentielle de
té.
ces constructions; l
Nous pouvons également citer le projet de réhabilitation d’un an-
de même que le choix d’un parti d’aménagement; les participations
cien bar de l’association «Padre Ancheita», transformé en centre
(monétaires ou manuelles) s’effectuent sans discontinuité.
communautaire: les besoins (types de locaux, fonction, surface)
33
3.L’espace public, scène d’appropriation, appartenance et rivalité.
être parfois intégrée pleinement par les habitants. Si cette intégration ne s’exprime pas forcément par les actes, elle l’est au moins dans le discours. Dans la Maré, par exemple, il est animosité envers ceux d’une autre favela en raison de sa domination
Dans certaines favelas, on assiste à une , la faible impli-
par une faction ennemie. Ainsi, à Rio de Janeiro, , ce
cation des pouvoirs publics leur a longtemps laissé le champ libre pour organiser le fonctionnement interne de leurs quartiers, abou-
qui contribue à créer des
tissant à un taux de criminalité élevé (50 000 personnes décèdent
part, les déplacements en dehors de sa propre favela. Tous in-
chaque année par homicide au brésil): le processus de
, et limite, quelque , y compris les enfants, comme
-
le souligne un habitant de la Nova Holanda: «aujourd’hui, dans les . C’est à ce moment là que
écoles de Rio, les cours de récréations doivent être séparées, di-
l’on peut discerner, tout de même, une certaine restriction dans les
visées. Les enfants issues de la favela contrôlée par le Comando
déplacements d’un «favelado» en dehors de sa favela. Sauf s’il y est
Vermelho et ceux de la favela contrôlé par le Terceiro Comando ne
contraint, ce dernier évite de pénétrer seul dans d’autres favelas en
se mélangent pas, les enfants sont habitués à cet
principale la
».
raison de la présence de ces bandes, en particulier lorsqu’elles sont Le
accentue le caen raison de la crainte et du
faible attrait qu’elle sucsite chez les autres citadins, Plus généralement,
sur l’appropriation
limitant les déplacements de personnes exté-
de l’espace par ses
n’est pas à négliger. En effet, si les
rieures. Et contrairement aux idées reçues, il est peut être même
de drogue pour Rio de Janeiro mais également par exemple des
que de parcourir la «ville formelle»
34
de l’espace public marque fortement les populations de ces territoires. En haut, différents articles de journeaux Colombiens relatant des faits d’homicides, de fusillades, etc. En bas à droite, le dessin d’un enfant Colombien, sa vision de la ville de Medellin. En bas à droite, une photographie illustrant la dualité entre narcotraf-
35
-
tations étaient contrôlées puisque régulées par la musique et les animateurs et contenues par des vigiles. Aujourd’hui, ces bals de
.
bande ont disparus suite à leur interdiction par les autorités. De plus, Ces
-
, cette
, en a profondément changé
à une favela donnée, se rencontre également lors d’événements tels que le Carnaval ou les bals funk, cités précédemment. Par exemple, le soutien apporté à l’école de Samba de
Nous aborderons, avec le projet de «Metrocable» du Complexo do
la favela dans sa course pour remporter la compétition peut être un , s’accaparant le De même, les bals funk furent autrefois pour les jeunes habitants des
moindre morceau d’espace public dans de multiples favelas et à
favelas l’occasion d’exprimer cette rivalité, mais de manière plus vio-
l’origine d’une
lente, quoique encadrée, tout du moins à l’origine, lorsque les bals
culations pour les habitants, d’un important «point noir» dans les
, des cir-
conditions de vie des habitants de ces communautés. dans des clubs situés dans des
par un groupe quel-
conque. Ces événements s’articulaient autour de la mise en concurrence de deux DJ’s , issus de différents quartiers ou favelas. Chaque bande occupait un côté de la salle. Les altercations entre les deux camps y étaient institutionnalisées et ritualisées; les affrontements physiques avaient lieu uniquement lorsqu’ils étaient autorisés par l’entremise d’autres morceaux musi-
36
4. «Enclave urbaine».
Au jour d’aujourd’hui, les favelas sont présentées comme les symboles de la
Les différentes politiques d’interventions publiques ont renforcé la stigmatisation des bidonvilles Latino-américains. Les pratiques de vie s’en ressentent et la ville d’aujourd’hui a
aux cô-
tés des résidences fermées et sécurisées (Souza, 2000; Caldeira, 2000). Dans sa dimension socio-spatiale, la renvoie à l’émergence de territoires spatialement délimités, regrou-
potentiel économique et social et «bête noire» à éradiquer.
pant des populations qui vivraient repliées sur elles- mêmes et où s’exprimerait
. Cela
concoure à la permanence d’une
de la ville dans
laquelle les favelas sont considérées, depuis leur apparition sur la Dans cette partie, il sera question d’aborder l’insertion des
scène urbaine, comme des
.
habitants des favelas de Rio de Janeiro dans la ville par les pra-
De nombreux travaux ont réfuté cette vision réductrice des favelas,
tiques de consommation et de loisirs.
contestant les stéréotypes associés à leurs habitants et évoquant la
Elle s’appuie sur un article1 qui présente les résultats d’une re-
et de leur population ou l’existence de si-
cherche sur les pratiques spatiales des habitants des favelas à Rio
militudes avec d’autres quartiers populaires. Pour autant, le rapport
de Janeiro menée dans le cadre d’un doctorat. Il en ressort que
entre les favelas, leurs habitants et la ville qui les englobe, au sens
loin de l
d’intégration à la vie urbaine et d’inscription dans l’espace urbain,
qui leur est accolée, les habitants
des favelas témoignent d’une bonne expérience de l’espace urbain dans son ensemble et ont la
reste encore mal appréhendé. Dans ce contexte, l’analyse des pratiques spatiales des habitants des favelas peut contribuer à une meilleure compréhension de l’articulation favelas/ville, de cette relation si paradoxale qu’elles entretiennent. Une composante majeure du comportement des citadins renvoie en
1 «Confins», Revue franco-brésilienne de géographie / Revista franco-brasilera de geografia, 13/2011, numéro 13.
effet à l’usage et à l’expérience de la ville, à travers leurs déplacements dans l’espace urbain et les lieux qu’ils fréquentent.
37
Il s’agit en particulier de saisir les territoires de ces pratiques
de la ville, puis sur un autre type de favela située en des lieux plus
dont la distribution dans l’espace urbain apporterait des éléments
distants. Ces favelas se distinguent par ailleurs en fonction d’autres
quant à un
. En d’autres termes,
les habitants des favelas présentent-ils des espaces de vie restreints
social du quartier environnant, la topographie, la taille, l’ancienneté
que mettraient en évidence des pratiques tournées vers les lieux
et donc le degré de consolidation) mais aussi par l’intensité relative de la violence, prédominante dans l’une en raison de la présence de
et variées que peuvent offrir les grandes villes en développant des mobilités à des échelles plus vastes ? Parmis les différentes dimen-
Ainsi, Coroado est une petite favela d’environ 1 000 habitants
sions de la mobilité, nous nous concentrerons sur les pratiques de
isolée sur un bout de colline qui surplombe Laranjeiras, un quar-
consommation et de loisir.
tier résidentiel de classe moyenne-haute situé à la limite de la Zone
Cette recherche s’est appuyée sur un travail de terrain, mené
Centre et de la Zone Sud de la ville.
entre mars et septembre 2007, et ayant pour objectif de décrire et
Avec ses maisons enchevêtrées les unes sur les autres, elle
analyser les pratiques de mobilités des habitants de deux favelas
correspond à l’image typique des favelas de Rio de Janeiro. Coroa-
de Rio de Janeiro : Coroado et Nova Holanda. Des entretiens se-
do est plutôt récente pour une favela située dans le centre de l’es-
mi-dirigés ont été menés auprès de 33 habitants de ces favelas, en
pace urbain dans le sens où son processus de peuplement a été si-
trajectoire résidentielle, leurs déplacements, leur réseau social et
un bon niveau de consolidation tant du point de vue de l’habitat que
leur perception des différents lieux qu’ils fréquentent.
des infrastructures. Par contre, elle ne dispose d’aucun équipement
Le choix s’est d’abord porté sur un modèle de favela situé dans la région centrale de l’espace urbain, entendue comme es-
public sans que cela constitue un inconvénient pour la population compte tenu de leur relative proximité.
pace de concentration des activités, des services et des commerces
38
Nova Holanda elle, est une favela plane de la Zone Nord de Rio de Janeiro, secteur majoritairement composé de classes basses
sables.
,
la plupart des habitants recherchant le meilleur prix en incluant le
et moyennes. Elle compte un peu plus de 11 000 habitants et fait partie du plus grand ensemble de favelas de Rio de Janeiro, le
À Nova Holanda, compte tenu de la densité et de la diversité du
Complexe de la Maré, qui regroupe 17 favelas et près de 150 000
commerce local, la majorité des habitants fait ses courses alimen-
habitants. Ce dernier dispose d’une grande visibilité du fait de sa
taires
. Selon le Censo Maré 1, plus
qui mène à l’aéroport. Nova
de 90% des habitants y achètent leurs fruits et légumes, principale-
Holanda est une favela ancienne apparue dans les années 1960 et
ment dans les épiceries et au marché qui se tient tous les samedis
relativement bien consolidée avec la
dans la favela. De même, pour les aliments de base (riz, haricots,
-
(poste de santé, école) et commerciaux.
sucre, farine, viandes), la population se fournit dans les supermar-
Même si Nova Holanda est relativement distant du centre,
chés de la favela. Ces derniers pratiquent des prix convenables et
sa localisation à proximité d’une voie rapide, l’Avenida Brasil, em-
même inférieurs à ceux des grandes surfaces des environs, tout en
pruntée par de nombreux bus, lui assure
offrant des services similaires comme la livraison à domicile.
. Cette dernière est améliorée par un réseau de transport alternatif (vans, moto-taxis) à l’intérieur de la favela et en direction
Au contraire, à Coroado, favela plus petite et moins fournies
des quartiers voisins pour une correspondance avec le système de
en commerce, les quelques établissements locaux servent avant
transport public.
tout au dépannage en produits de première nécessité en raison des -
prix élevés pratiqués. Seuls les habitants plus vulnérables, comme
. Parmi elles, l’approvisionnement alimentaire représente le poste le plus important
plus pauvres qui ont peu d’argent à dépenser, ont recours réguliè-
dans le budget des ménages et constitue l’essentiel des déplace-
rement à ces commerces de par leur proximité ou la possibilité du
ments, en particulier des femmes qui en sont généralement respon-
crédit.
39
Si la tendance dominante fait que les habitants se fournissent
tie de l’expérience urbaine, par ailleurs le plus souvent limités à un
au plus près et au moins cher, les pratiques d’approvisionnement
seul trajet aller-retour depuis le lieu de résidence, cette approche doit être complétée par les pratiques des habitants en termes de
services offerts par les magasins. Ainsi, les habitants de Nova Ho-
loisirs et de distraction.
landa qui ont un peu plus de moyens préfèrent aux supermarchés de la favela les grandes surfaces situées dans les quartiers voisins,
, même s’ils sont
, témoignent du rap-
accessibles à pied ou en van, destinées à une clientèle supérieure
port des habitants à la ville au même titre que les déplacements par
et offrant une plus grande variété de produits (si la marque est syno-
nécessité. Tous les loisirs ne sont pas pour autant un facteur obli-
nyme de qualité, acheter ces produits est aussi un signe de prestige
gatoire de mobilité. Dans leur majorité, ils se
social témoignant de la participation à la consommation de masse).
, voire du domicile. Les pratiques de loisirs dépendent
Les autres types d’achats, moins fréquents, comme les vêtements
en premier lieu de la disponibilité de temps libre et des revenus
par exemple, ne se font que très rarement dans les boutiques des
pour une partie de la population des favelas, en particulier les plus
favelas. Lorsqu’elles existent, ces dernières sont en majorité desti-
pauvres qui doivent multiplier les activités ou allonger leur temps de
nées aux femmes.
travail pour pouvoir survivre.
Pour certains services comme les banques et la poste, gé-
Le domicile est un lieu important d’usage du temps libre que l’on
néralement absents des favelas, les habitants se rendent dans les
passe en famille et le plus souvent devant la télévision, l’activité pré-
centres secondaires situés à proximité. Ils vont à la banque assez
férée et la plus pratiquée par les habitants de Nova Holanda (Censo
rarement, tout au plus une fois par mois, la plupart des opérations
Maré).
pouvant se faire dans des distributeurs ou par téléphone, pour ceux
famille ou des amis, organisent des fêtes et des barbecues sur la
qui possèdent un compte bancaire : à Nova Holanda, ils ne repré-
terrasse ou
sentent qu’un tiers de la population. Les déplacements par nécessité ne représentant qu’une par-
40
Globalement, on observe des différences dans les espaces
-
de vie des habitants selon le genre et la génération : les femmes et
ment qu’un ballon. A noter que les cybercafés, constituent un lieu de
les personnes âgées sont plus enclines à rester à la maison que les
plus en plus couru par une partie des jeunes, leur donnant l’opportu-
jeunes et les hommes. La plupart des femmes interrogées avouent
nité de se divertir sur Internet ou de jouer à des jeux vidéo à moindre
en effet être casanières et aimer passer du temps au domicile pour
frais.
faire leurs « petites choses ». Elles se sentent plus à l’aise et en sé-
Cependant, l’activité la plus répandue dans la favela concerne
curité chez elles, et dans la mesure du possible préfèrent largement
sans doute la
recevoir que rendre visite.
religion occupe une place de tout premier plan dans le quotidien des
Néanmoins,
habitants. Dans le Complexe de la Maré par exemple, où se situe
des maisons conduit à
pour les en-
. À l’instar du pays tout entier, la
Nova Holanda, elle concerne plus de 40 % des habitants (Ceasm,
fants et de convivialité pour les adultes. Les jeunes y jouent au ballon
2000). Des
ou aux billes, les mères discutent sur le pas de porte, alors que les
favelas, quelle que soit leur taille.
des
Les autres activités dans les favelas se résument pour l’esautour des placettes ou des coins des rues.
sentiel à fréquenter les bars et sont donc réservées aux adultes. Dans les petites favelas, comme Coroado, les distractions nocturnes . Dans cer-
étant peu nombreuses, les habitants vont chercher l’animation dans
taines favelas, la pratique de l’espace public interne peut néanmoins
les environs. Dans les favelas où la vie locale est un peu plus déve-
rencontrer des obstacles.
loppée comme à Nova Holanda, les habitants sortent régulièrement
Toutefois, l’offre de loisirs dans les favelas, à Coroado comme
dans les établissements de la favela. D’ailleurs, les jeunes apprécient beaucoup la favela pour son aspect festif. Les week- ends sont
et les hommes des favelas,
, et en premier lieu
très animés, la musique est présente partout et la
.
du football, représente une part essentielle des loisirs. S’il est de loin
On se retrouve entre amis dans les bars de la favela qui ont pignon
le sport de plus populaire au Brésil toutes classes confondues, c’est
sur rue, autour d’une bière pour discuter et aussi chanter ou dan-
souvent le seul que l’on peut pratiquer dans les favelas compte tenu
ser lorsque ces derniers proposent des karaokés ou accueillent des
de
concerts.
Chaque favela est équipée de
41
Des évènements en plein air sont régulièrement organisés sur la place de la favela, dont les principaux sont le
traduire par des
té-
(comme
moignant alors de la volonté de recherche de commerces et de loi-
expliqué précedemment), qui attire tous les samedis la jeunesse lo-
sirs, comme le centre-ville ou les shoppings centers, et des espaces
cale venue danser toute la nuit, et les concerts de pagode à l’am-
publics comme les plages et les parcs.
Par ailleurs, les associations locales organisent également
.
des animations ouvertes à tous comme des bingos ou des célébrations pour la fête des mères et la Saint Jean, festivité traditionnelle du Nordeste. Ces dernières constituent un rendez-vous important pour la population mais restent occasionnelles. Si la plupart des habitants sortent généralement dans leur favela ou à proximité c’est parce que c’est plus économique, plus pratique et pliqué et risqué.
Pour comprendre et analyser plus précisément les nouveaux projets d’espaces et d’équipements publics qui seront exposés ultérieurement, il paraît intéressant de revenir sur nos pas, évoquer
tants des favelas enquêtés reste
des habi-
les différentes politiques d’interventions de l’Etat, qui ont longtemps
vers la fa-
stigmatisé le bidonville,et la relation que ces derniers ont pu avoir
vela et ses environs, pouvant conduire à la conclusion d’un . Pour la plupart, les pratiques du quotidien se déroulent à l’intérieur de la favela, ou au niveau des espaces de centralité les
politiques basées sur une transformation de l’espace public diffèrent de par leur angle d’attaque. Pour ce faire, sera pris l’exemple de Rio de Janeiro au Brésil, qui sera notre ligne conductrice.
plus proches. Toutefois, ces pratiques, notamment lorsqu’elles ne relèvent pas du domaine du nécessaire peuvent éventuellement se
42
Dans les années 1920, Le mot favela renvoyait à un type de
tive n’est pas sans objectifs précis, elle s’accompagne de la
localisation; les pentes des mornes. Mais également, de façon péjorative, à un habitat de construction précaire qui se distinguaient par sa
, son
, mais eut pour conséquence l’implantation du mot dans le lexique technique de l’urbanisme2.
et son
.
Au cours des années 1940, le débat politico-administratif
Ses habitants étaient accusés
et
et
condamnait fermement les favelas de Rio, le phénomène étant asso-
au désordre. L’image de Rio, la «ville merveilleuse», était menacée
cié à une
par la
tion de ses habitants, pour la première fois appelés «favelados», se
que constituaient les favelas. Cette représentation dominait la vision et le diagnostic des ré-
formateurs brésiliens ou étrangers. Ainsi, l’urbaniste français Alfred
la
et insistait sur
de reloger les habitants dans des maisons ouvrières.
-
renforce, les reproches qui leur étaient adressés l’étant aussi à tous les pauvres de l’époque.
Agache, dans son projet d’aménagement de la ville de Rio de 1930, présentait la favela comme une
. La
Cependant, toujours dans les années 1940, la favela commence à se révéler comme un noyau important d’opposition politique,
. C’est dans cette phase que
En même temps, le nouveau mode de vie qui s’organisait dans ces espaces devenait une source de la
.
sur les
-
de ces lieux était mis en relief par tous ceux qui le valorisaient: des peintres (Tarsila do Amaral, Portinari), des écrivains (Costallat,
dans les quartiers de la «ville formelle». .
Lucio Cardoso) et des compositeurs de Samba. De cette double
-
lecture émerge l’idée d’une
-
que les textes de l’époque rendent manifeste. Ce type d’habitat, qui se développait rapidement dans la capitale, se vit reconnaître une , dont l’article 349 proposait des éléments 1
1
. Mais cette reconnaissance administra«Codigo de obras» 1937.
2 En 1939, lors de la publication du «Grande e Novissimo Dicionario da Lingua Portuguesa» (Freire 1939-1944), le mot fut enfin répertorié avec un sens autre que botanique.
43
A partir des années 1960, les sciences sociales entrent en
gitimité de leur existence (droit de maintien dans les lieux au-delà
scène. Les travaux se réclamant de la théorie de la marginalité socomme solution politique, comme dans les années 1960, 1970. .
Par ailleurs, le terme
(communauté), très pré-
sent dans le champ de l’action politique et sociale, entend valoriser comme une catégorie savante désignant un espace singulier, une .
la favela en mettant en lumière leur
mais aussi
sociale et culturelle.
Elle était aussi souvent présentée comme une réponse à la
.
crise du logement des catégories pauvres, l’accent étant alors mis
En parallèle, avec la diffusion médiatique du paysage et
sur le caractère collectif de l’occupation qui avait présidé à sa créa-
des modes de vie des «favelados», le terme s’est internationalisé.
tion.
Les médias contribuèrent également à la diffusion mondiale d’une Les débats s’intéressèrent ensuite davantage à
-
, aux mouvements sociaux, à renforcer les images de ce lieu comme espace socialement différencié. La favela en vint alors à symboliser
La favela, tout au long de l’histoire de Rio de Janeiro, fut
, au premier plan desquels
considérée principalement comme une
. Se conforta ainsi la théorie de la , celle d’une
, où la favela représente l’autre
moitié.
. Son importance et sa participation dans le contexte de la ville, était perçu et assumé uniquement pour
, l’image de la violence
qui lui est désormais associée renforce la , les classes dites dangereuses d’aujourd’hui. Pourtant, la réalité des favelas est devenue plus complexes.
-
. De la même manière, pour motif de
et de la
de sa population,
les politiques gouvernementales envers les favelas s’orientaient vers son
La reconnaissance, dans la constitution de 1988, d’une certaine lé-
44
.
.
.
La favela est considérée comme une maladie de la ville. Le foyer de tous les crimes et dépravations. La favela est vue comme un ensemble marginal. La Favela comme tremplin vers la ville, moment nécessaire pour l’intégration.
. Extirpation du tissu urbain. Transfert et réinstallation des habitants dans des ensembles d’habitations.
Groupes de maisons provisoires, projets visant la diminution du passage par la favela.
Les habitants sont vus comme des migrants.
.
La favela comme expression physique des contradictions urbaines. Perception de la permanence des favelas. Les habitants sont vus comme des travailleurs.
-Construction à grande échelle. -Coopération, auto-construction. -Tolérance des invasions. -Urbanisation et récupération des favelas. -Tentatives de soltutions au problème de la terre.
.
Nécessité de récupération des terrains urbanisés par un boom immobilier et garantir la construction civile. Les habitants sont considérés comme des pauvres, ségrégation.
Transfert des favelas, constructions d’ensembles d’habitations populaires à initiative privée en échange de concessions du pouvoir public.
.
Augmentation de % de populations carentes, augmentation de la misère sociale. Les habitants ne sont pas considérés comme des êtres mais comme une masse.
Constructions d’ensembles d’habitations gouvernementales. Lancement du programme Favela-Barrio.
Préparation des événements sportifs mondiaux. La Favela est considérée comme un enjeu économique et touristique important. Les habitants sont considérés comme des citoyens de la ville formelle.
Accélération du programme favela-Barrio. Lancement de grands projets urbains. Intégration des favelas au tissu urbain.
.
45
L’évolution récente des favelas, notamment les plus anciennes, laisse penser qu’elles ne sont plus exclusivement un lieu marginal,et de pauvreté mais que d’autres catégories, moyennes ou Dans cette partie, sera abordée le processus de séparaque les dictionnaires continuent à donner au mot favela le sens de
tion actuel de la ville formelle et du bidonville dans l’objectif de voir
bidonvilles, l’espace des favelas tend à se
comment les nouveaux projets d’espaces publics participent à la
: consolidation des constructions, apparition
connexion de ces entités opposées.
de plusieurs étages, aménagements d’infrastructures de base, dé-
La nouvelle géographie planétaire plante un scénario peu en-
veloppement d’un marché immobilier et de marchés de biens et de
courageant, où de plus en plus de personnes vivent dans des bi-
services, installation de certains services publics.
donvilles, espaces précaires et chaotiques ( aujourd’hui, ils sont aux
Toutefois,derrière ce brouillage des images, le succès du mot, qui en fait aujourd’hui une catégorie utilisée dans d’autres régions du monde, tient à l
toujours énoncée au Brésil entre les ,
de
et
alentours de milles millions). Ils se développent surtout en Amérique Latine, dans les pays «en voie de développement. C’est à partir des années 1970, que naissent les mega-bidon-
qui s’exprime sous la forme
villes dans le monde. Les années 1980 peuvent être considérées
(asphalte), ce dernier mot désignant les
comme le moment où apparait la précarité dans l’aire post-industrielle, stimulant l’hyperconsommation et produisant un excédent
certaines favelas comme quartier général et lieu de vente, renforce cet
énorme de chômeurs qui contribuèrent à l’augmentation incontrôlée
et contribue à . Nous verrons ultérieurement
des grands centres urbains d’Amérique Latine.
comment le gouvernement brésilien tente aujourd’hui de redorer l’image de ses favelas.
46
Une
du centre traditionnel et une
sans
des favelas s’est récemment accéléré, dans la décen-
-
nie antérieure, la population des secteurs informels avait grandit de
, qui se
1,91% par an. Le nombre de «favelados» passe à plus d’un million
développent de la périphérie jusqu’au centre. Désertion et extention
aujourd’hui2 à Rio et représente 30% de la population urbaine du
sont un contrepoint de
Brésil.
ractérisé par
comme
, mais résul-
tant d’une structure socio-économique qui Ces processus ont contribué à côté, la
.
Au Mexique, 50% de la population urbaine vit dans des aires
la ville, avec d’un
(de l’attention de l’Etat) et de l’autre la ri-
informelles. Lima abrite, quant à elle, 70% de sa population dans des bidonvilles. Ces chiffres nous montrent que le
(manifestation séparative de guettos de richesse).
dans ces grandes métropoles Latino-Américaines; ce
Divisée, une partie formelle, contrôlée par les pouvoirs publics, et
qui réellement détermine la structure urbaine est la condition de l’in-
son opposée, la partie informelle, les bidonvilles, livrée à sa propre
formel. Mais
chance, avec ses propres règles.
spatiale: il domine les relations de production, les relations sociales
n’est pas seulement un attribut de la question
et les relations politiques. Rio de Janeiro, dans la période des derniers recensement, le taux moyen de croissance démographique de la ville, a été de 0,73%
Longtemps stigmatisée, cette
a souffert de
par an, supérieur au 0,67% annuel de la période antérieure (1980 à
nombreuses politiques d’interventions publiques visant son éradica-
1991).
tion. Après avoir exprimé certaines des politiques publiques qui ont En considérant séparément les secteurs formels et informels
sévi à Rio de Janeiro durant une longue période, nous verrons en
(favelas), la différence est considérable. Le taux de croissance des
quoi, les nouveaux projets d’espaces publics se différencient nette-
secteurs informels est de 2,4% par an, alors que le reste de la ville
ment, de par leur processus d’intégration à la ville, de ces politiques
dissent en un an ce que «l’asphalte»1 tarde 6 ans à faire. Et 1
d’éradication antérieures.
-
La ville formelle.
47
relation avec la ville, s’implantent dans un territoire, dans un premier temps. Ensuite, dans une situation comme celle de l’Amérique Latine, où de
dans la jouissance de l’urbanité, pour une
1. L’espace public, une capacité de connexion spatiale et so-
partie des citoyens, sont à l’œuvre, la question se résume à com-
ciale.
ment
, entre les extrêmes. Comment
-
contact des type de
, comment
, comment mettre en , comment chercher un certain
entre le «formé» et le «difforme», entre
-
Pour Idelfonso Cerdà1, l’urbanisme est «l’ensemble des acleur fonc-
Dans le cas de l’Amérique Latine, il est nécessaire donc, de
tionnement comme l’ensemble des principes, doctrines et règles
-
tions tendant à
les constructions et à
qu’il faut appliquer pour que les constructions et leur regroupement, loin de réprimer, d’affaiblir et de corrompre les facultés physiques,
de l’urbanisme traditionnel en même temps que l’espace anthropo-
morales et intellectuelles de l’homme social, contribuent à
logique. Repenser l’espace de la ville depuis le «sans forme», depuis le chaotique jusqu’à «l’urbain», et l’espace public, en suivant des stratégies de connexion qui créent la dimension du public (le
. L’urbanisme et avec lui, l’espace public, ne peuvent pas ré-
sentiment d’appartenance, de citoyenneté) dans le privé, sans ac-
soudre tous les problèmes politiques et sociaux, mais ils peuvent être un 1
, pour que les politiques publiques, en
Barcelone, 1867, «théorie générale de l’urbanisation».
48
En haut,photo de la Bibliothèque Santo Domingo, Medellin, Colombie, en bas à gauche, institution éducative La Candelaria, crée sur l’axe du Metrocable. En bas à droite, Metrocable de Medellin. (Documents «Universidad nacional de Colombia).
L’espace public et les équipements ont une capacité de connexion d’entités socialement et physiquement opposées. En cela, ils peuvent être49 un outil de réponse à l’amélioration de conditions de vie des populations concernées.
des attributs urbains qui soient capables de générer un et, à travers L’on a pu observer, dans la partie antérieure, que la plupart
, engager un
-
du privé à partir du privé, c’est-à-dire, à partir
des interventions publiques exercées par l’Etat de Rio, était tournée vers
ou la
considération pour
, sans aucune , l’espace public.
Aujourd’hui, il y a une
de ces «blocks»,
de ces grands ensembles d’habitat: «La stratégie a échoué. Elle a
en terme de valorisation que d’amélioration de la qualité de vie et d’environnement. La question est alors
, et non transformer brutale-
ment en détruisant ce qui existe sinon, en , y incorporer des éléments qui permettent une évolution.
, qui ne se transforme jamais en réel espace public, sinon en espace où s’installe le
L’insertion du nouveau dans l’existant est une opération soigneuse, qui demande une
-
»1. Ils se transforment en
d’écoute de la demande pour ensuite l’interpréter d’un point
lieux désagréables pour demeurer et à utiliser. Ne fonctionnent pas
de vue architectural et urbanistique. L’architecture ne doit pas consi-
même les aires sportives. Ces ensembles d’habitat de Caracas, à
dérer ces projets comme s’il s’agissait d’assistanat ou de construc-
Rio de Janeiro,en passant par Buenos Aires, n’ont pas été capables
tions pauvres.
de générer un sentiment d’appartenance.
N’importe quelle considération d’intervention au nom de la
«En plus de créer des unités résidentielles, il faut «faire la ville», qui est bien différent de construire des maisons ou des ap-
soigneuse de
partements. Cela implique de répondre, à la fois, aux nécessités
cherchant non pas à détruire des équilibres éxistants, mais d’intro-
premières, et de le faire de telles manières à créer un environnement
duire des valences à partir des renforts du potentiel productif de
stimulant pour la vie, le contact et l’évolution sociale» (Jorge Mario
chaque lieu, cherchant des équilibres délicats entre l’existant et le
Jauregui).
nouveau., tâche qui demande des formes de communications spé-
Il ne s’agit pas de repartir à zéro, tout détruire pour tout re-
,
-
construire. Il s’agit justement, à partir de ce qui existe, d’introduire 1
Jorge Mario Jauregui: «From Oedipus complex to Manguinhos
50
La ségrégation sociale et spatiale, de laquelle l’informel est une des conséquences, implique une bataille sociale incessante dans laquelle intervient l’Etat au nom de l’ordre et du progrès, chermelles, mais toujours du point de vue des intérêts des élites économiques et politiques, dans la perspective de garantir le contrôle social. Pour cette raison, les projets de structurations spatiales et sociales doivent être conçus comme élément de médiation dans cette «bataille», et fonctionner pour permettre une trève dans laquelle la discussion de l’intérêt général de la ville rencontre un point de Dans les grandes métropoles d’Amérique Latine, il est nécessaire de créer, aujourd’hui, des environnements physiques qui favorisent l’inclusion sociale (en combattant les murs, les clotures, , avec des milieux collectifs accessibles depuis les transports publics, allant contre la prolifération des «shopping centers» interconnectés.
Favela Santa Marta, photo personnelle. Ici, l’espace public se cantonne à d’étroits escaliers enclavés et les toits des baraques comme espace public, lieu de rassemblement.
51
2. Projets d’espaces publics, intégration du bidonville à la ville formelle.
. Nous verrons donc comment, cet axe de communication peut être à l’origine de certaines améliorations non négligeables et comment il peut être un axe de développement important, voire
Après avoir analysé la situation existante, le fonctionnement du Bidonville et notamment de ces espaces publics, par l’analyse
primordial et une articulation avec la ville formelle, dans ces lieux si particulier.
plus précise des favelas de Rio de Janeiro au Brésil et appuyé sur les dysfonctionnements internes ainsi que les liens que ce dernier -
entretient avec la «ville formelle», il s’agira maintenant d’aborder plusieurs
développés dans différents Bi-
donvilles à travers l’Amérique Latine et expliquer en quoi il peuvent améliorer les conditions de vie des habitants. Seront abordés tout au long de cette argumentation, les cas de Medellin en Colombie,
Installer un téléphérique dans des quartiers populaires à l’habitat précaire et aux problèmes sociaux complexes,
Santiago Léon de Caracas et Rio de Janeiro au Brésil.
. En effet, il est souvent accom-
Il sera également question de voir en quoi ces nouveaux projets d’espaces publics
jusqu’à présent et quelles sont leurs caracté-
pagné d’un
, découlant de ce dernier ou
en parallèle avec celui-ci. Il peut être prétexte à une urbanisation plus poussée grâce à
(es-
paces publics et équipements publics). Le téléphérique urbain est Ces trois projets seront abordés avec, pour
,
-
, installé dans ces Bidon-
rents projets d’espaces et d’équipements publics amenés par cette
villes, faisant partie intégrante d’un projet urbain ou venant en aval
volonté de création d’une mobilité urbaine, alors inexistante jusqu’à
le téléphérique urbain ou
présent, à l’intérieur des différentes communautés exposées. à
dans ces communautés, où, comme
Ces trois projets ont des , en cela il peuvent être comparables et l’on peut différencier les différents apports ou les différents
un outil intéressant pour permettre de
processus en marche.
52
Les villes sont pensées à la hauteur de l’homme, on les tra-
après, a pour objectif principal de
verse en bus, à pied, en train, en métro, dès qu’elles sont traversées
-
par le ciel, on change non seulement notre perception de la ville mais aussi l’organisation même de celle-ci. Le sol est en partie libé-
. La ligne de Santo Domingo à Medellin a projeté le téléphé-
ré. Si un lui, véritable
et crée malgré des limites, le téléphérique
rique sur la scène internationale par son image de moyen de trans-
, permet de raccommoder le territoire
port urbain novateur et a séduit de nombreux pays d’Amérique la-
, et c’est le pari qu’ont choisi de
tine. En 2010 et 2011 ont été ouvertes, respectivement, une ligne de
avec un
relever certains pays d’Amérique Latine pour tenter une nouvelle
téléphérique à Caracas, Venezuela et une à Rio de Janeiro, Brésil.
approche en terme de résolution des problèmes rencontrés dans
Il faut observer, d’ailleurs, que ces villes, reprenant le modèle de
leurs bidonvilles.
Medellin, l’ont «reproduit» dans des cas socio-urbains, plus ou
Le téléphérique a du mal à se défaire de cette image d’infrastructure
moins similaires : quartiers populaires à l’habitat précaire, connais-
lourde qui marque fortement le paysage, lorsqu’il n’est plus dans
sant d’importants problèmes socio-économiques, ainsi qu’une to-
son milieu «naturel» comme celui de nos montagnes par exemple, il
pographie complexe. Nous verrons en quoi ils se différencient les uns des autres.
vue, hors de ce dernier. Et pourquoi pas? C’est ce que les Colombiens ont eu l’audace de faire, avant tout autre, à Medellin:
-
. En effet, La ville présente de nombreux quartiers de cartels de la drogue, responsables de nombreuses violences urbaines. Le téléphérique urbain, dans les trois cas présentés ci-
53
tion proche des 45 millions d’habitants, les trois quarts occupant des
Nous allons ici aborder le cas de Medellin en Colombie, dont le projet de téléphérique urbain installé dans la communauté de
Medellín est la seconde ville la plus importante de Colombie
, contrai-
par sa population et la seconde agglomération urbaine par sa su-
rement au projet de Rio de Janeiro ou encore de Caracas qui, eux,
-
découlent du projet urbain en lui-même, ne se développe pas en
nomiquement et démographiquement. Située sur la Cordillère des
Santo Domingo
parallèle comme ici. Avant d’expliquer ce projet, il semble important de comprendre pourquoi ce
de par la com-
paraison avec les anciennes interventions réalisées et le contexte
d’autre de la rivière de Medellin le long de la vallée d’Aburrá. Autrefois considéré comme la capitale mondiale du meurtre, elle tente depuis une vingtaine d’années de
socio-économique existant jusqu’à présent.
. Longtemps La Colombie est un pays divers, carte plurielle d’expressions culturelles,
, culture et une
cartel de la drogue et de la violence, elle se reconstruit petit à petit, -
-
conséquence d’une société qui évolue avec
,
bar, le 2 décembre 1993. À cette époque, . Aucun
que la Colombie aspire à surpasser représente bien plus qu’une
aménagement social et urbain ne voyait le jour, les conditions de vie
confrontation politique ou millitaire, et recueille la complexité d’un
des quartiers défavorisés étaient misérables. La violence faisait partie du quotidien et aucun changement
pays dominés par des groupes minoritaires au prix de , dans un contexte global immoral et pervers de tra-
n’était à l’œuvre. Les Colombiens adulaient naturellement les indivi-
-
dus qui montraient un intérêt direct à leurs situations. Pablo Escobar, -
gènes»1. -
tamment lors de son opération
en 1982 qui
vilégiée, sur un territoire de 1 141 748 kilomètres carrés, avec une
a permis la construction de 500 maisons pour une partie de la classe
richesse naturelle qui semble de pas avoir de limites et une popula
défavorisée. Idolâtré par les jeunes, respectés par les plus anciens, il a aidé les plus pauvres grâce à l’investissement de l’argent « sale».
54
Aujourd’hui, ce temps-là est révolu, le taux de criminalité a très fortement diminué et
-2. L’espace public, dans le cadre de la culture et de l’éducation, constitue le nouveaux lieux à développer pour permettre la rencontre
tion.
et la cohabitation ; -3.Le système de transport métropolitain doit être complètement révolutionné pour que la mobilité soit une chance pour la ville.
C’est à travers des projets urbains, réalisés avec l’investissement public que la municipalité mène aujourd’hui le
Suite à l’élection de Sergio Fajardo à la municipalité de Medellin, plusieurs projets sociaux et culturels se sont multipliés. De
. Sergio Fajardo, élu à en 2003, a totale-
2003 à 2007, soit la durée de son mandat, de nombreux espaces ont
ment changé les priorités de la ville, allouant un budget important et
été créés dans l’idée de permettre un meilleur lien social au sein de
une attention particulière pour l’investissement public, et l’aménage-
la ville. Le nouveau plan social passe par la rénovation d’écoles, de
ment social.
bibliothèques, de routes, mais aussi dans le logement et l’intégration
Entre 2003 et 2007, Medellin, deuxième ville du pays, s’est
sociale. Plusieurs actions visant à «éduquer le peuple» sont égale-
construit sur un modèle de ville nouvelle avec des résultats concrets.
ment mises en marche.
Elle aspire à devenir une ville moderne, avec la construction de
Durant cette période, le développement du transport urbain s’est
grands équipements. Une ville pour la rencontre citadine, avec de
également accéléré. Les investissements ont notamment permis la
. Au travers de
construction du très surprenant Metrocable dont il est question ci-
ses politiques urbaines, la capitale du département d’Antioquia a initié le chemin de la paix et de l’équité, en élaborant
après. Une
-
pour les habitants des quartiers les moins sécurisés. Limitant le risque et les rencontres malencontreuses durant les 40 minutes de -
marche nécessaire pour gravir à pied les hauteurs de la ville où se trouvent les quartiers les plus déshérités.
Le programme de « reconstruction de la ville » s’appuie sur trois grandes orientations : -1.Les indicateurs de développement humain et de qualité de vie doivent orienter l’investissement public.
55
tème de transport urbain pour répondre aux problématiques de
En ce sens, les ressemblent aux objectifs visés par la ville
l’extension de leur réseau de transport de certaines zones dont la
de Rio de Janeiro, celle-ci ayant une volonté de redorer son image également , notamment au vu des
-
La topographie,
,
-
tel que le métro, tramway,
cé ce dernier en les accueillant ainsi que tous les efforts au niveau
bus articulés, etc. L’installation d’un téléphérique urbain est alors
des interventions publiques urbaines qu’ils génèrent. Cependant,
proposé par M. Luis Ramón perez Carillo. En parallèle, la mairie de
l’on peut déjà apercevoir ici une certaine différence. Medellin prend le problème à bras le corps, elle tente d’améliorer la situation pour
, une baisse de l’insécurité et au
. Nous verrons ultérieure-
développement urbain. Ceci passait entre autre, par l’amélioration
de Rio et de Caracas sont à aller chercher
des conditions d’accès, et l’installation d’un réseau de transport...
. L’on peut donc se poser la question
C’est alors que sont nés les PUI (Projet Urbain Intégral), et cette no-
ment que les à des
tion d’urbanisme social.
.
Le projet de metrocable s’est donc développé Deux phases sont à distinguer dans le projet de Medellin : la , il est le
d’un ensemble plus large d’interven-
-
tions, qui comprend également les projets de restructuration urbaine
. Ce premier projet de Metrocable dans la capitale
(PUI) exposés ci-avant, mais également des nouveaux projets d’ha-
d’Antioquia est à l’initiative du Metro de Medellín et de l’Alcaldía de Medellín. C’est la rencontre entre le PUI (Projet Urbain Intégral) et le
bibliothèques publiques, de parcs, d’écoles encadrant une impor-
développement du système de transport massif de l’entreprise Me-
tante zone d’habitat informel.
tro de Medellín: le responsable de cette entreprise, M. Luis Ramón Perez Carillo et son équipe, se sont intéressés à ce nouveau sys-
56
2004, 2008. Metro de Medellin, Ltda.
Mairie de Medellin.
-Amélioration des conditions d’accès. -Installation réseaux de transports (dont metrocable).
-Développement urbain global. -Volonté d’amélioration des conditions de vie des quartiers précaires. -Baisse insécurité.
Téléphérique urbain inclu dans un projet global.
PUI
57
Les 5 projets de Parcs-Bibliothèques, ouverts en 2003 et 2007
pas un projet urbain de grande échelle, sinon qu’il est
-
ont énormément impacté les aires les plus vulnérables, physique-
dans celui-ci, du moins pour le cas de Rio, il découle
ment et socialement. Ces équipements urbains à usage multiples
d’une volonté d’améliorations des conditions de vie menées par de
intègrent des services tels que les fonctions traditionnelles d’une bi-
-
bliothèque, d’informations locales, initiation à la lecture, une offre lu-
tions urbaines des différents gouvernements.
dique et récréative, culturelle, ainsi que des espaces de rencontre et
Comme nous avons pu le voir dans la première partie, la sé-
de participation communautaire. Le succès des Parcs-Bibliothèques
grégation socio-spatiale est particulièrement caractéristique de la
est du en grande partie au fait qu’il proposent une solution pour renforcer les communautés à travers des services éducatifs et culturels.
entre la zone sud, aux quartiers aisés voire très riches, et la zone nord, doté d’un centre d’affaires, foyer économique, mais où se
accomplissent la rant des
, géné-
concentrent aussi majoritairement les quartiers pauvres, grimpants à
et développant une certaine vi-
talité dans ces communautés, physique et virtuelle. Elles sont un réel service aux habitants et une
1,4 millions d’habitants vivant dans l’une des 600 favelas ou autres -
lotissements irréguliers de la ville.1
et touristes. En ce sens, elles diet morales entre la ville formelle
Avec le programme
(voir tableau ci-contre),
(qui, comme son nom l’indique a pour but principal de transformer aucune. Elle devient alors un symbole de cette réussite d’urbanité
les favelas en quartier à part entière), démarré en 1994, la proposi-
sociale pour le quartier comme pour la ville, cet urbanisme social
tion du maire est
et
prôné par la ville dans nombre de ces projets.
-
Nous allons à présent exposer le cas de Rio de Janeiro et de Santiago Léon de Caracas, dont le «Metrocable» n’accompagne
1 «Metrocables», Téléphérique urbain, l’exemple de l’Amérique latine, Compte-rendu d’enquête pour Urbanistes Du Monde.
58
1.
Compléter ou construire la structure urbaine principale.
2. Offrir les conditions environnementales qui permettent la lecture de la favela comme un quartier de la ville.
3.
Introduire les valeurs urbanistiques de la ville formelle: rues, places, mobiliers et services publics.
4.
Consolider l’insertion des favelas dans le
de la ville.
5.
Implanter des actions à caractère social, en construisant des jardins d’enfants, stimulant des programmes de création et accroisement des revenus, formations professionelles, activités sportives, culturelles et récréatives.
6.
Promouvoir la régularisation urbanistique et l’attribution de titres de propriétés des terrains.
59
Selon le secrétaire Municipal de l’habitat, Sergio Magalhaes,
Le programme est fondé sur les pré-
le changement essentiel qui s’établit dans les années 90, dans les
mices de l’intégration de valeurs culturelles et fonctionnelles sur l’es-
interventions de la mairie, est de
pace public, qui doit être accessible à toute la population. , le substituant à la nole savoir professionnel contemporain, ne peuvent se constituer en un
ville». C’est-à-dire, substituer l’action isolée de construction de mai-
privilège des minorités qui habitent la zone «noble» de la ville, plus
sons, par l’organisation d’une structure urbaine, où les strates de
dense et plus riche, placée tout au long de la côte, depuis Flamengo
la population exclues du service public s’intègrent à la dynamique
jusqu’à la Barra de Tijuca. C’est aussi un droit des citoyens qui oc-
fonctionnelle et vitale de la «ville formelle».
cupent les 80% du territoire intérieur de Rio, anonyme, gris, la «ville 1
.
Le programme Favela-Barrio fait partie intégrante de la politique d’habitat (voir tableau ci-contre) de la ville de Rio, instituée en 1993. Son principal objectif est
-
, incluant les projets d’infrastructure urbaine,
Aujourd’hui, en parallèle de cette volonté de transformation et de connexion des quartiers informels à la ville, Rio cherche également à améliorer son image à l’étranger. Tous les regards sont tournés vers elle avec la préparation des
résultats sociaux, à travers l’intégration et la transformation des favela en quartier. Il est important de connaître les bases de ce pro-
: la Coupe du Monde de Football en 2014 et les Jeux Olympiques de 2016. C’est pour Rio l’occasion de
gramme pour comprendre les nouveaux projets urbains exposés ultérieurement réalisés dans le cadre de ce programme. Il y a là la volonté que cette population pauvre, qui entretient des valeurs, une culture et des traditions éminemment urbaine,
C’est
, deux objectifs, qui va
amener Rio de Janeiro au projet de Metrocable dont il est question ici.
-
« 1 «Programa Favela-Barrio», Mairie de Rio de Janeiro, compte-rendu de présentation digitale.
60
Construir ou compléter la structure urbaine principale (assainissement et démocratisation des accès) des favelas consolidées et offrir les conditions sociales et ambientales de transformations et d’intégration de la favela comme quartier de la ville.
1. 2. .
3.
Promouvoir la régularisation urbanistique des parcelles irrégulières, dans le but d’obtenir des standars de salubrité et régulariser la situation de la propriété de la terre.
Promouvoir l’attribution de titre de propriété de la terre aux habitants de parcelles urbaines, ayant pour but de répandre la base légale d’occupation du sol.
. Vide/ recomposition du tissu urbain. Récupérer les logements établis dans les quartiers du centre ville qui se trouve en
4. .
5.
Rétablir les populations qui habitent dans des aires à risques, ou lorsque ce n’est pas possible, éliminer le risque d’ébou-
.
6. Carioca.
7.
lements dans les aires concernées.
Financer la demande d’immeubles dans des aires dotées d’infrastrctures et d’intérêt pour la classe moyenne. Stimuler la participation de petites et moyennes entreprises dans la production de logements.
Rétablir des conditions décentes d’habitat dans les favelas entre 100 et 500 familles.
.
61
Le Complexo do Alemão qui accueille le téléphérique urbain, est un regroupement de plusieurs favelas (de dix à quinze selon les
Complexo do Alemão est retenu comme site d’implantation pour son potentiel d’usagers.
-
sources) qui s’étend aujourd’hui sur cinq collines de la zone nord. Il est un des projets phare du réaménagement de Rio. 180 000 personnes y vivent alors que l’IDH du quartier n’était que de 0,587 en 2009, soit le plus faible de Rio.
Le téléphérique du Complexo do Alemão s’intègre donc dans un
Plaque tournante du commerce de la drogue, le Complexo
projet beaucoup plus global, contrairement à Caracas.
do Alemão concentrait, jusqu’à récemment, 40% des crimes de la ville. En 2007 le Commando Vermelho, puissant cartel de la drogue,
partie du fait de sa position privilégiée dans la ville : dans le centre
contrôlait la totalité du secteur. Plusieurs interventions policières vio-
ville,
lentes entre 2007 et 2010, ont permis l’avancée des travaux du projet
L’intégration d’une infrastructure telle que le Metrocable valorise le
du Complexo do Alemão. En 2004, il a fait l’objet d’une longue étude
quartier. D’autre part, San Agustin a été choisi pour sa taille. En effet,
socio-urbaine - « Plan de développement urbain du Complexo do
choisir un quartier peu étendu permettait à la ville de
Alemão » - étude commandée par la municipalité de Rio de Janeiro
-
, avant
et dirigée en partie par l’architecte urbaniste, Jorge Mario Jauregui. Ce projet, s’étalant sur une
très emprunté et du río Guaire.
beaucoup plus grand tel que Petare (l’un
, découpée
des plus grands quartiers à l’urbanisation informelle d’Amérique La-
en cinq périodes de quatre ans, propose plusieurs projets alternatifs
tine), en cela il s’intègre dans un éventuel projet urbain de grande
pour un aménagement durable et évolutif du Complexo do Alemão.
ampleur, bien qu’il fasse pour l’instant objet de test pour un éventuel
En 2007, parallèlement à ce « Plan de développement urbain » vient
développement.
se greffer le projet de téléphérique. Après une série d’études sur les différents «Morros» de la ville, le
62
2011. Programme Favela-Barrio, 1993. Accueil événements sportifs mondiaux.
-Accélération du programme Favela-Barrio. -Grands projets urbains (PAC).
Projet Phare Plan de développement du Complejo Do Alemão.
Equipements publics.
Réseaux de transports dont Téléphérique Urbain.
Espaces publics.
63
cueillir d’autres marchés plus haut dans le bidonville permettant aux familles les plus reculées d’avoir accès à ces commerces de proxi-
mité) ainsi que la possibilité de se raccorder aux services publics
-
de la ville tels que le ravitaillement en eau et électricité, qui manque encore dans certaines parties,
.
En plus d’être un nouveau moyen de transport qui diminue
également
qui permettrait que certains fa-
sensiblement les temps de trajet, sa caractéristique principale est
velados entretiennent avec des revendeurs, (comme expliqué anté-
de devenir un
rieurement), en ce qui concerne ces derniers.
im-
portant. Nous avons vu dans la description de la Rocinha, dans la
Pour Jorge Mario Jauregui, architecte en chef du projet, à
première partie, que les commerces se cantonnait à la partie basse de la favela, le long de la «rue du bouvier», véritable axe commer-
d’équipements. Les six stations de la ligne ne remplissent pas uni-
cial, de rencontres, d’échange et
quement la fonction de station de transports. Il les appelle des
, ainsi que la «place du bouvier» accueillent le
-
, elles sont associées à des services : commerces, banques, services sociaux, etc. Le programme du Complexo do
marché; -
Alemão comprend : une bibliothèque, des centres d’aide juridique,
Comme dans les schémas
des centres d’aide à la gestion du travail, des équipements sportifs
ci-contre, nous pouvons observer qu’à partir de cette ligne de Me-
et de loisirs, un hôpital, 3000 unités d’habitations, l’aménagement
trocable apparaissent une multitude de programmes, pensés en
du parc de la Serra da Misericórdia, ainsi que la restructuration des
même temps que les différents projets mais également à posteriori,
voies existantes et la construction de nouvelles.
-
En ce qui concerne Medellin et la communauté Santo Domin-
. Il est
go, l’architecte du maitre d’ouvrage du Metrocable, Patricia Bus-
alors aisément imaginable que cet axe transperçant le bidonville
tamante, concepteur des stations et de leur environnement très
puissent amener des commerces à l’intérieur même de celui-ci et
proche explique qu’elle a également proposé quelques
et sans projet préalable. L’on constate d’ailleurs une 1
avec eux toute une série d’aménagements (places qui pourront ac1 «Metrocables», Téléphérique urbain, l’exemple de l’Amérique latine, Compte-rendu d’enquête pour Urbanistes Du Monde.
jouxtant ce Metro.
64
Ligne J. Opération de logements.
Ligne K. Espaces publics. Réseaux de bibliothèques+ écoles.
Nouveaux quartiers?
Espaces publics au abords des stations. Espaces alentours? Réseaux de transport de la ville.
Stations sociales. Quartiers survolés? Nouveaux projets de ligne de téléphérique.
Centres d’aide à la gestion du travail.
Logements (3000 unités d’habitations.
(commerces, banques, servces sociaux).
Bibliothèque.
Equipements sportifs et de loisirs + Parc.
Stations sociales Centres d’aide juridique.
Medellin, Colombie.
Restructuration des voies existantes + construction de nouvelles.
Téléphérique urbain, Metrocable.
Téléphérique urbain, Metrocable.
Schéma, effet «levier», axe de développement du metrocable dans les projets de Caracas, Rio.
65
La projection du développement urbain accompagnant cette infrastructure, s’est basée sur
Une seconde ligne est également en conception à Medellin, Colombie. Pour cette seconde ligne, la ligne J de San Javier,
. Les équipements publics, espaces pu-
le PUI2 a débuté par la conception du projet urbain contrairement
blics, et les éléments de transports (téléphérique mais aussi les
à la première (ligne K). Ce projet urbain dans la «Comuna»3 de
voieries) ont guidé ce projet.
San Javier, suit les mêmes lignes directrices que le projet autour
A Santiago Léon de Caracas, l’équipe d’architectes-urba-
de la ligne K. Cependant les objectifs n’ont pas été exactement
nistes ayant travaillé en relation avec les acteurs sociaux et habitants, continue aujourd’hui cet échange pour développer de nou-
d’espaces publics, mais également, ici, tout un quartier de nou-
veaux espaces urbains en lien avec les stations, à destination des
situé au-dessus de la favela que le Metrocable
. La communauté avec l’aide de
survole. Nous ne sommes donc pas seulement dans l’amélioration
l’agence d’architecture Think Tank a proposé au Métro de Caracas
de la qualité de vie des habitants, mais aussi dans la création d’un
de nouveaux aménagements urbains, comme des jardins en ter-
nouveau quartier. L’élaboration de la mise en œuvre de ces deux
rasse ou l’aménagement d’une « route touristique».
lignes actuellement en fonctionnement à Medellín semble donc in-
habitants et
versée. Pour la ligne K, l De
vont débuter
dans les trois territoires, ce qui montre le succès de cette infrastruc-
( comme expliqué dans la partie précédente), alors que pour la ligne J,
-
ture de transport dans ces espaces enclavés. Rio de Janeiro, va accueillir celui du Morro da Providencia, et
A Caracas, c’est la même effervescence, un nouveau «Me-
ligne dans la favela Rocinha, une des plus grande favela d’Amérique
munidades de Mariches, Guaicoco et La Dolorita, totalisant environs
latine, dans la zone sud de Rio. Une certitude, la ligne du Complexo
93 000 personnes.
do Alemão, a projeté Rio sur la . 1
«Metrocables», Téléphérique urbain, l’exemple de l’Amérique latine,
Compte-rendu d’enquête pour Urbanistes Du Monde. 2 Projet Intégral Urbain qui intègre cette ligne-ci. La première ligne de Metrocable, elle, s’est développé en parallèle du PUI. 3 «Communauté», nom donnée aux bidonvilles de Medellin.
66
Metrocable Bibliothèque «Parque Espana»
Santiago léon de caracas.
Espace public
Institution éducative,La Candelaria.
Téléphérique urbain: axe de développement d’espaces urbains et équipements publics.Il crée un effet-levier tout le long de son développement et
67
L’Association française de
mingo,en Colombie par exemple, a été prolongée jusqu’au Parc
développement (AFD) a signé en mai dernier avec le maire Alonso
Arvi, réserve naturelle située à
Salazar, un crédit sur 20 ans de 250 millions de dollars (185 millions
d’excursion des habitants aisés de Medellin…
et lieu favori
d’euros) pour la construction d’une ligne de tramway sur pneus de 4,2 km et de deux nouvelles ligne de «Métrocâbles», dans le cadre d’un nouveau PUI qui concerne 33 quartiers et près de 400.000 per-
-
d’une effervescence de projets, espaces publics, équipements publics, voies de communications, logements, etc.
sonnes, à l’est de la ville. Un réel
Ce système d’infrastructure lourde apparaît ici comme «
se met en place dans les trois
communautés concernées, la création d’un téléphérique urbain, et
Il y a en effet un véritable
engagé par ce té-
léphérique urbain, qui, non seulement, connecte la population au réseau de transport existant de la ville formelle, leur donnant accès
et d’équipements publics améliorant la qualité de vie des habitants,
au «confort» de celle-ci mais qui développe également une cer-
de
taine activité commerciale, sociale, économique, urbanistique en
transport tels que celui-ci, et de nouveau avec lui, des éléments de
développant les espaces «vides», en ouvrant les perspectives, en
projets comme ceux exposés antérieurement.
y amenant des espaces éducatifs, de rencontre et de solidarité, en
Le métrocâble a également une vocation de puisque la ligne qui dessert depuis 2004 le bidonville de Santo Do-
désenclavant tout simplement ces communautés jusqu’ici relativement stigmatisées.
68
3. Une ouverture sur la ville, une amélioration des conditions de vie.
Il y a donc une forte amélioration de la mobilité des populations isolées et défavorisées à Médellin comme à Rio de Janeiro ou
Après avoir montré qu’il peut être à l’origine d’un véritable
Caracas.
, d’un important axe de développement, il sera ques-
Le téléphérique urbain, dans le cas de Medellin et de Rio de
tion ici, d’aborder concrètement les effets, les conséquences, posi-
Janeiro, se raccroche au système de réseau existant de la ville (Il
tives ou négatives, de l’implantation d’un système de «Métrocâbles»
existe une connexion directe avec le Métro de Medellin par exemple.
sur les pratiques quotidiennes des habitants des communautés
Ses trois tronçons et quatre stations permettent l’embarquement et
concernées. .
Quelque soit la taille du Bidonville concerné ainsi que du
La ligne de téléphérique du Complexo do Alemão, Brésil est
projet imaginé (Rio de Janeiro et Medellin ayant «frappé fort» au
ouverte depuis juillet 2011. Passé le moment de la découverte, elle
niveau de l’ampleur, quant à Caracas, il reste encore anecdotique),
est aujourd’hui beaucoup moins utilisée. Cela s’expliquerait en par-
et quelque soit sa fréquentation plus ou moins forte suivant les lieux,
tie par la gratuité de la ligne durant les 2 premiers mois. A Caracas
l’amélioration des conditions de mobilité est indéniable, et
également, la fréquence d’utilisation du téléphérique est relative-
-
. Par exemple, pour le Metrocable de Me-
ment faible.
dellin, le temps de transport pour les résidents des zones les plus
Le manque d’études préalable quant au tracés de la ligne
hautes, le temps de trajet pour rejoindre la ligne de métro principale
expliquerait cette faible fréquence (la ligne a une forme de U qui ne
est passée de
, Metrocable emprunté par 1 000
correspond peut être pas au lieu). Ici, les aménagements urbains ne
000 de passagers par mois, fonctionnant 20 heures par jour et 355
sont pas présents à l’échelle du quartier, et peu de travail en amont
jours par an. Il est donc une réponse adaptée à ces espaces escar-
avec les habitants a été effectué. L’on note ici, l’importance de l’accompagnement de ces infrastructures de transport par un réel projet
dans la description de la favela Rocinha de la partie I.
de développement urbain.
69
De nombreux pays d’Amérique Latine commencent à envi-
rique Latine empêche les habitants de jouir librement de celui-ci.
sager le téléphérique comme une solution de transport urbain pour
C’est le cas par exemple à Nova Holanda, exposée antérieurement.
métropolitain ou tramway, le téléphérique permet de
La présence du
est un
et a l’avantage d’être construit rapidement.
pour leur vie, d’enrôlement dans des activités déviantes ou tout simplement les protéger de la vision des armes et de la drogue, certains parents ne laissent que très rarement leurs enfants sortir dans la
qui se limiterait au transport par câbles. En revanche, relié à un réseau de transport mixte, elle peut être une solution pour l’accès aux
elle, échappe à ces problèmes en semblant être imperméable à la
quartiers rencontrant certaines problématiques communes avec les
violence. Dès lors, les habitants apprécient d’autant plus de pouvoir
projets exposés auparavant. Le Metrocable, obéit donc à un
laisser leurs enfants s’amuser à l’extérieur en toute sécurité.
Ces grands projets, se sont accompagnés pour la plupart
-
d’une visant à
, notamment à Rio de Janeiro, -
, qui s’y sont développées. Depuis l’implantation de la preMarta2 constitue un des principaux argument en faveur des politiques menées dans ces zones. Aux dires des autorités, l’objec-
. Nous avons vu dans la première partie que la présence narco1
Citation de Sylvia Ostrowetsky (2001), «L’espace public»,
Thierry Pacquot, Collection Repères, 2009.
publics de base dans les quartiers livrés à la terreur et à la loi de la jungle depuis des décennies»3. 2 Au sud de Rio de Janeiro, dans la partie la plus touristique de la ville. 3 Madeleine Praxel, «La «pacification» des favelas de Rio», AFP, 26 octobre 2012. 70
Une vingtaine d’opérations ont déjà été menées et l’objectif est l’installation de 40 UPP dans 120 des 1000 favelas de Rio de
privées, pourraient désormais être assurés par ces dernières. -
.
-
Le principal objectif est d’ordre symbolique et économique, les autorités Carioca souhaitant montrer leurs capacités à sécuriser la ville
. On
avant la tenue de la Coupe du Monde de football et des Jeux Olym-
peut ici se poser la question des
de ces poli-
piques. Elles s’attachent pour ce faire à redorer l’image de Rio sur la
tiques publiques, qui ont pour objectif principal de répondre aux at-
scène internationale et à calmer les craintes exprimées en matière
tentes internationales et non aux réelles demandes des populations,
de sécurité.
bien qu’elles améliorent, par la même occasion, les conditions de vie de ces dernières.
, ou du moins pour cer-
: la hausse des prix touche l’ensemble de la ville, avec une augmentation des loyers de plus de 16% en
tains bidonvilles, aux
et les habitants de ces com-
moyenne en 2011, pouvant aller jusqu’à 50% en bord de mer2. Dans
munautés peuvent aller et venir plus sereinement qu’auparavant, donnée non négligeable dans l’amélioration des conditions de vie.
à celle des autres quartiers de Rio»3 . Dans le même élan, la poli-
Les habitants n’ont plus à traverser, chaque jour, des zones dangereuses. Le «citadin» extérieur à la favela peut, aujourd’hui en-
trer dans celle-ci. Nous en avons fait l’expérience, à la favela Santa Marta à Rio de Janeiro, où il était, il y a encore quelques années,
zones avant les événements des années à venir. -
complètement impossible d’y pénétrer. Aujourd’hui c’est chose
, notamment en devenant imposables, et les
possible, à condition de respecter certaines règles de bon sens et
Les «favelados», eux, pourraient devenir des
services publics de base, auparavant majoritairement contrôlés par 1 «La Politique de Rio à l’épreuve des Favelas», Club du Millénaire. 2 Charles Gautier, «A Rio, la «pacification» des favelas fait grimper les loyers», Le Figaro, 18 Novembre 2011. 3 Ibid.
d’être accompagné d’un habitant de la communauté.
71
En Colombie, depuis le début du projet, les données ont montré que les
chaque recoins de la ville.
.
Les principaux chefs paramilitaires ont été extradés en 2008
-
. Nous avons encore beaucoup de travail à faire».
vers les Etats Unis. «Depuis la démobilisation, leurs troupes, de sertion», explique Daniel Mauricio Vasquez, membre de la mairie de Medellin. Il s’agit de programmes scolaires (certains ont pris les armes si jeunes qu’ils sont quasi illettrés), de formations à divers mé-
A Rio de Janeiro, Jorge Mario Jauregui parle de sa vision
tiers, de sensibilisation à l’esprit d’entreprise. Mais le taux de réus-
du projet, « L’objectif principal est de désenclaver le Complexo do Alemão ». Pour ce faire, il est nécessaire de donner une
conservent des activités peu claires. D’autre replongent carrément».
par la construction de nouvelles centralités : stations de transports, services de proximité, édi-
en concevant, esthétiquement, des parcs plai-
à priori dans une favela, puisque c’est une agglomération d’entités
sants et linéaires, des terrains de jeux et des trottoirs dans les zones
privées.
qui étaient,
velas de Rio de Janeiro ont commencées avec le programme Favela
«Nous voulons amener aux
Les interventions du service public dans les fa-
Bairro en 1993. Ces interventions se limitaient essentiellement à des
, à travers des espaces pu2
. Et il ajoute: «nous
rage public, un système d’assainissement ou encore le recouvre-
devons être dans
ment des voies.
1 «Gouvernance locale, mobilité urbaine et réduction de la pauvreté. leçons de Medellin, Colombie», séminaire, paris, 9 Décembre 2010. 2 «El diario El País, de España, destacó la transformación social y cultural de Medellín», mardi 26 Novembre 2013.
lourde » qu’un téléphérique et ses stations,
Installer une infrastructure aussi « souvent absente dans les périodes
précédentes.
72
En Colombie, le projet de téléphérique et de Parcs-Bibliothèques sont une «
par l’innovation et la modernité.
qui rappelle aux
Pourtant, force est de constater, que des améliorations sociales sont
résidents que le gouvernement local s’est converti en leader du dé-
indéniablement à remarquer. Les apports en services sociaux et en
veloppement humain de ses citoyens, passant de la fonction prin-
développement humain sont une réussite notable et la baisse de la
cipal de gérent de la police et de l’armée au leader du développe-
violence a transformé la vie de tout un quartier.
ment humain de ces citoyens»1. Les quartiers ont également noté les changements générés grâce à ces équipements publics: amélioration de la vivacité et participation publique, augmentation de la Le touriste, «petit animal curieux», n’avait pas encore foulé
loi et de l’ordre dans les rues.
le sol des bidonville. C’est maintenant chose faite. Une C’est espaces sont des lieux qui génèrent une certaine vie
se développe de plus en plus dans les favelas
en commun dans la communauté; on peut y trouver des personnes
notamment, et «grâce» aux «Metrocâbles» installés dans les bidon-
qui lisent, qui discutent, qui font des exercices, qui jouent de la mu-
villes exposés précédemment. Dans les trois cas, il est question de tourisme, Par contre, comme il est expliqué dans les schémas ci-après, dans chaque cas, il dé-
Certaines
parlent du fait d’implanter un
téléphérique dans des quartiers précaires, comme d’une « ». Introduire une infrastructure novatrice de technologie avancée dans ces quartiers serait une manière de se détour-
voile une volonté de projet différente; par exemple, à Rio, la ligne est moins utilisée qu’au départ, mais fonctionne assez bien touristiquement. Elle attire de plus en plus de visiteurs; forme inédite de tourisme, un nouveau réseau se crée. Des
, proposent
ner des véritables nécessités des communautés et de donner une image forte d’une politique urbaine en faveur d’un développement
d’en haut, les visites se
1 La Inversión Social en los Parques Biblioteca de Medellín. http://blogs.iadb.org/ciudadessostenibles/2013/06/21/la-inversion-social-en-los-parques-biblioteca-de-medellin/.
73
avec l’arrivée des
-
face à la vo-
, un réel projet d’améliorations des
lonté d’améliorations des conditions de vie des habitants. Cette
conditions de vie des habitants de la communauté, pour la commu-
constatation peut s’élargir à tous les projets de Rio en général, les
nauté.
événements sportifs mondiaux semble
favelas concernées étant les plus proches du centre, ou celle ayant
L’arrivée d’un certains type de tourisme semble ici quelque
un fort intérêt économique et spatial, proches des lieux importants
peu précoce. Avant même la résolution totale des problèmes in-
ou convoités, avec de belles vues et des endroits stratégiques.
ternes, les volonté premières sont tournés vers les investissements
A Caracas, c’est le même constat. La communauté, avec l’aide de Think Tank a proposé au Métro de Caracas de nouveaux
extérieurs, pour Caracas par exemple, ou internationaux, pour Rio de Janeiro.
aménagements urbains, dont l’aménagement d’une « route touristique. ». Rappelons que les forces de l’ordre sont présentes à chaque station
-
et qu’il est encore imprudent à tout étranger au quartier de s’aven-
.
turer trop longtemps hors de ces-dernières. A Caracas, il est donc
limité aux alentours des stations car certains lieux sont encore dif. Le quartier concerné est
phérique, et plus généralement les espaces publics du projet. Le
tants.
point de départ de ce projet, la volonté première ne sort peut être
Mais certains problèmes surviennent, notamment la question
pas des entrailles du quartier concerné mais du centre de la ville de
de
Caracas.
de vie des quartiers et leurs cultures diffèrent. Le risque que les rési-
Quant à Medellin, et contrairement aux deux autres projets, elle s’attaque clairement aux bidonvilles les plus dangereux, les
; le type d’habitat survolé n’est plus le même, le niveau
dants qui habitent sous les lignes de transport par câble ressentent un
dans leur intimité est relativement impor-
74
1. Volonté interne.
La volonté de la Colombie de développer de grands projets urbains est totalement interne et tournée vers sa population, pour sa population, en situation précaire.
3. Ex. Medellin.
Colombie.
Ex. Rio De Janeiro.
Intervenant extérieur.
2.
Vénézuela.
Brésil.
Une intervention extérieure, l’arrivée des grands événements sportifs mondiaux à amener le Brésil à améliorer les conditions de vie dans ses favelas.
Test.
voir si ce système de téléphérique fonctionne, avant de l’implanter dans un bidonville de plus grande échelle.
Schémas exprimant les différentes volontés qui ont amené à la création des grands projets urbains.
75
Le «Metrocable» est un outil intéressant de développement,
Il a également été remarqué, à Santo Domingo, que le quartier d’habitations précaires survolé ne possède pas encore
mais de par sa
les mêmes types d’aménagement que ceux existants (voieries, es-
zones, encore vouées à elle-mêmes.
scolaire...).
, il laisse de côté certaines
est encore très présente dans le quartier, -
espaces survolés peuvent être
-
tion.
.
Dans les projets de Medellin et de Caracas, une attention a
Il est vrai que les axes de communication tels ceux que font apparaître aujourd’hui les tramways ou, ici, les téléphérique urbains,
été portée sur la
ordonnent de nouveaux lieux publics en ligne; ceux-ci générant un
projet.
dans le processus de
Pour ce qui est de Rio de Janeiro, Jorge Mario Jauregui dé-
espace public émergent. Mais, simultanément, l’urbanisation en rhizomes se poursuit
plore l’absence d’échanges avec la population durant la conception et la réalisation du projet. Aucune étude sociale, plus récente et plus
De la même façon et à d’autres échelles, les routes départe-
ciblée que celle de 2004, n’aurait été effectuée concernant le projet
mentales et les nationales, puis les autoroutes sont venues mettre en
de téléphérique. Le travail d’étude sociologique auprès des habi-
valeur les paysages et rapprocher les agglomérations, faisant appa-
tants commence seulement aujourd’hui, dirigée par l’entreprise de
raître des maillages urbains étendus à l’intérieur desquels les villes
transport.
et les bourgs se sont rapprochés dans des réseaux départementaux et régionaux. L’on peut alors penser que le
A Caracas, au contraire, le travail « communautaire » consistait à mener une action entre le maître d’ouvrage, le constructeur et
,
le concepteur. D’après les informations obtenues , des sociologues
amené par l’infrastructure de transport qu’est le «Metrocâble», expli-
et psychologues, appartenant au collectif «Sembrando-Huella»(col-
qué antérieurement, englobera, dans un futur proche, ces espaces
lectif de quartier), en relation avec le gouvernement central, ont per-
survolés, en rupture avec la ville formelle mais également ici, avec
mis de faire le lien entre les habitants,
les territoires du bidonville irrigué par le téléphérique urbain.
.
76
Autre projet de Metrocable dans communautés plus grandes. Développement de nouveaux espaces. Route tourisitique. Objectifs réels du projet?
Marché communautaires.
Espaces artisanat+ musique. Espaces d’exposition. Gymnases. Espaces survolés.
Espaces éloignés.
Téléphérique urbain, Metrocable.
Projet de logement, expropriation.
Schémas du développement réticulaire, Santiago léon de caracas. Se pose ici la question des espaces survolés ainsi que les objectifs réels du projet au vue du développement du tourisme. 77
risent ces nouveaux espaces, les entretiennent et cette participation
Ils ont travaillé avec les habitants très tra-
citoyenne accroît de sentiment d’appartenance à la communauté. L’intégration d’une infrastructure telle que le «Metrocâble»
mené et de la part du métro et surtout de la ville. Ces études sociales ont permis notamment l’accès des architectes
valorise donc le quartier. Une habitante nommera ce projet ; un projet-drapeau. Entendons par là un projet
Pour Maria Eugenia (à la fois habitante de San Agustin, « guardia
porteur d’une image positive et dynamique de ce territoire.
patrimonial » pour la compagnie C.A. Metro de Caracas, membre du collectif Sembrando-Huella et du groupe Apollo Comunitario), le contexte sociogéographique était quasiment identique que celui de Medellin ou Rio, avec cependant des distinctions dans les relations San Agustin, à Caracas, est un quartier connu pour être un
avec la communauté. Selon elle, la présence d’habitants parmi les équipes travaillant sur le terrain à Caracas a été l’occasion d’un vé-
des
, et où l’artisanat et le théâtre
ritable travail social.
sont très présents. Au-delà de la simple réponse à la commande, Think Tank a et de sa popu-
donc proposé l’intégration aux stations, d’espaces publics au ser-
-
vice de la communauté : espaces d’expositions, espaces dédiés à
. Les habitants reconnaissent et s’approprient des
l’artisanat et à la pratique de la musique. Mais le Metro de Caracas,
espaces quand ils sont faits pour eux et selon leurs besoins. Ainsi,
voulant éviter des interférences d’activités entre le fonctionnement
une étude sociale bien menée, donne une légitimité au projet au-
du «Metrocable» et celui de ces espaces publics (horaires, per-
près de ses principaux concernés : les habitants de la communauté.
sonnel, sécurité), a décidé de ne pas ouvrir ces espaces pourtant
Sans celle-ci le projet prend le risque de ne pas répondre de façon
dédiés à la communauté. Il faut préciser cependant qu’ils ont été
optimale à leurs besoins et de s’en éloigner.
approuvés lors de l’avant-projet et ont été construits.
Le lation passe par
Ce procédé fait naître un fort une exacerbation du
et chez les habitants;
de par la justesse du projet, pensé avec eux et pour eux, ils valo-
78
Années 50. Années 80.
Années 60.
Années 70.
Années 90. Stations metrocable Axe metrocable.
Tracé du «metrocables» en rapport avec l’évolution historique de la communauté. Le «Metrocable» se développe linéairement, il laisse donc hors de celui-ci les espaces périphériques.
79
Cette intervention qui parait «façadiste», facile, loin de la ré-
Dans ces espaces, se manifeste comme une , malgré le
-
, produit de crises économiques successives, de la corrup-
alité des favelas, transforme le lieu en
, en at-
traction touristique et, en quelques sortes,
tion gouvernementale et le manque de politique publiques pour
que les gens ont de la favela, ceux de l’extérieur mais aussi la vision
contenir les événements.
qu’ont les personnes qui vivent là, d’eux mêmes. Ces œuvres de rue
De multiples mouvements artistiques sont nés dans les lieux les plus pauvres et les plus malfamés: on peut prendre l’exemple de certaines
contribuent également au
,
exprimé antérieurement.
comme le Tango à Buenos Aires dans les de San Telmo et La Boca à une autre époque,
la samba et le «funk» maintenant à Rio, où des sports comme le football qui semble être une activité sine qua non dans ces lieux et
Cet espace informel, précaire, est aussi un lieu où se jouent des processus vitaux marqués par les
-
, commerces, informations et représentations changeantes
d’où sortent généralement les plus grands génies de la discipline
de la vie. Il y a dans
, une
comme
(Maradona par exemple, est né dans une «Villa Miseria»1 de Lanus,
source d’échanges permanents entre les personnes, et qui peut
Argentine):
fonctionner comme une référence pour l’ensemble de la société, une référence pour une coexistence des différences, en situations de carence et d’environnement physiques sans qualité. Ces espaces pré-
tion d’espaces publics permettent la manifestation de cette source
sentent donc une
, de créativité et
gestion partagée des faibles ressources. Et c’est dans ce sens, que
créatrice, caractéristique des bidonvilles Latino-américains. pour l’utilisation des moyens
L’espace public peut également être le support d’oeuvres artistiques populaires. C’est le cas dans la favela Santa Marta, à Rio de Janeiro, où une peinture murale
matériels et humains.
, embellit les
façades de quelques baraques, alors bien consolidées. 1
«Villa Miseria», nom donné aux bidonvilles Argentins.
80
En haut, l’oeuvre «Favela Painting», Favela Santa Marta, en bas, les murs de l’école de Samba de la favela Santa Marta sont l’expression de la 81 culture et du dynamisme local.(photos personnelles).
de ces nouveaux
Medellin, le réseau de Parc-Bibliothèques parsemant les quar-
espaces publics et équipements publics, les informations manquent
tiers sensibles de Medellin s’est accompagné de la construction
à l’appel. Les quelques photos de ces nouveaux espaces nous
de 41605 m2 d’espaces publics, un investissement total de 75 000
En ce qui concerne
laissent penser qu’ils sont utilisés de
mais salles d’études individuelles et de groupe, des collections de livres
souvent issues de dossier de présentation de projet sorties tout
pour les enfants, les jeunes et les adultes, des ludothèque ainsi que 1
. Pour ce qui est du parc scolaire, 128
quelconque retour objectif de ces projets. Cependant, nous avons
institutions éducatives ont été construites pour un total de 78313m2,
vu dans la première partie que les habitants de la favela Rocinha
14323m2 d’espaces publics, et 11 720 étudiants.
ainsi que ceux de Nova Holanda et Coroado -
Ces projets de téléphérique urbain, accompagnés de projet
... Connais-
de développement global pour le cas de Medellin et de Rio de Ja-
sant maintenant, de par la description faite antérieurement ainsi que
neiro,
les quelques photos de la favela Santa Marta, l’espace réservé à la rue, qui n’est autre que le résidus d’entités privées, il est facile-
pour la réalisation de ces projets, l’amélioration des conditions de
ment imaginable que ces nouveaux espaces publics telles que les
-
places aux abords des stations, les gradins en plein air ou les aires
tacle d’une dynamique sociale, économique et artistique caractéris-
de jeux pour enfants soit arpentés régulièrement.
tique de ces lieux mais surtout parce qu’ils les connectent à la ville
Pour ce qui est des équipements publics, il a été expliqué, toujours dans cette première partie cette volonté, ce besoin de lo-
formelle, il
ces territoires jusqu’alors stigmatisés, de par
une
caux de rassemblements, ces espaces jusqu’à présent cantonnés
, amenant un réel
au strict minimum, un même espace pouvant accueillir plusieurs
à des populations en
fonctions, plusieurs programmes. Là encore, l’apport d’écoles ou
proie à la honte, qui ont, pendant très longtemps, été rejeté de la
formations objectives, nous pouvons peut être nous appuyer sur quelques chiffres; dans le cadre du PUI (projet urbain global) de
1 Chiffres provenant du dossier de la Mairie de Medellin en accord avec la EDU (Empresa de desarollo urbano, Municipio de Medellin), «la transformacion de medellin, un urbanismo social».
82
-
L’idée même d
dré dans un territoire informel, cette volonté d’«absorber» le bidonAvec cette idée d’espace-mouvement, de transformation
?
dans le temps, d’éternel changement, Paola Berenstein pose la question de la
.
Elle expose ici son idée de garder cette particularité de participation et de mouvement. Mais «est-il possible de conserver ce qui est en mouvement?». Elle nous amène à penser «Même si cette idée peut paraître
1. Des espaces publics labyrinthiques caractéristiques intrinsèque du bidonville.
par trop contradictoire, dans le cas de la sauvegarde des favelas (et surtout de leur esthétique), il est pourtant clair que si l’on veut vraiment les conserver, ce n’est ni leurs abris, ni leurs ruelles, mais leur
Les favelas sont en
, n’achèvent jamais
mouvement même à travers ses acteurs, les habitants, qu’il va falloir préserver.».
en
, voire instable; en cela ils se
Il serait donc question d’intervenir de manière minimale, en suivant les
«S’il y a une notion esthétique dégagée par l’espace des favelas, elle
, les lignes de déterritoriali-
sation des favelas déjà existantes, respecter le
serait, par conséquent, une
-
, c’est-à-dire en suivant le processus et l’es»1: espaces en fuite, éternels
thétique des favelas commencés par les favelados eux-mêmes, en
déplacements, transformation, mouvement du parcours, expérience
dépit de la logique prônée par les architectes et urbanistes: «il fau-
du cheminement sinueux dans l’espace public.
drait
ou mieux, de
L’espace-mouvement est
au moment d’intervenir
,
dans les favelas, pour qu’au lieu de créer des quartiers ordinaires et
ce sont eux qui le parcours et en même temps qui le façonne. Dans
ennuyeux on puisse garder le mouvement, c’est-à-dire la vie même
la favela, l’habitant construit et aménage lui-même son espace.
des favelas»2.
1 Paola Berenstein Jacques, «esthétique des favelas», l’Harmattan, 2002.
2 Paola Berenstein Jacques, «Les Favelas de Rio, un enjeu culturel», L’Harmattan.
83
des particularités du bidonville.
urbains, à l’image de la ville environnante, vient en quelque sorte
-
l’espace du bidonville. qui en fait un lieu singulier, unique. Venir
les condtions de la métropole avoisinante
amène une réelle amélioration de conditions de vie des habitants mais venir instaurer le même processus de projet à l’oeuvre dans les villes, sur des espaces singuliers que sont les bidonvilles viendrait qu’est le mouvement, . Ce physique si particulier, quelque part presque mystique,
, sans -
cessant, perpétuel est ce qui fait du bidonville un espace atypique, est ce qui interroge, et qui fascine par la même occasion. Cette acharnement contemporain à vouloir absorber, lisser ces espaces vernaculaires peut être à nouveau vu comme une manière d’éradiquer ces territoires, la volonté étant de les doter des mêmes infrastructures, des mêmes espaces de vie commune que la métropole alentour, donc de les fondre dans cette dernière, jusqu’à leur disparition même.
84
«il faudrait suivre le mouvement des habitants au moment d’intervenir dans les favelas, pour qu’au lieu de créer des quartiers ordinaires et ennuyeux on puisse garder le mouvement, c’est-à-dire la vie même des favelas», Paola Berenstein.
85
Dessin personnel représentant les méandres labyrinthiques, caractéristique des bidonvilles.
nier dans son
dans son rapport avec son environnement, et pas seulement de l’intérieur.
Ces
Ces projets de structuration et recomposition des centralités
, tournés vers l des bidonvilles concernées, par un travail
de
des espaces publics, ont aidé les membres des
communautés à
demandent un
et une coordination des
différentes instances du pouvoir public; il doit être couplé avec un processus de participation de l’intelligence locale (le savoir des per-
et un
parmis les résidents de la ville, de par le sentiment d’appartenance,
sonnes habitant dans ces lieux) en dialogue avec les savoirs disci-
d
plinaires coordonnées par des experts professionnels.
amenés par ces espaces qu’ils
.
cartels de la drogue présents aux quatre coins du bidonville. Les habitants se sentent élevés au rang de qui ont de tout temps été «maltraité» par la Société. Ces
La question que ces exemples amènent est, comment, à par-
, eux
tir des particularités qui parlent du
, cette volonté sociale, ce
de
, de
, de
,
, est-il possible de créer une certaine
nouvel intérêt pour ces communautés revitalisent ces espaces et améliorent notablement la vie des prochaines générations, grâce à -
vivre par eux mêmes et d’évoluer. La
, qui se dégage du d
permettant d’apporter les services publics de première nécessité mais également une diminution
des projets exposés;
expression de
du sentiment de stigmatisation et une ouverture aux possibilités phy-
la culture et du dynamisme présent dans ces lieux. Cependant, les
siques économiques et sociales que la ville a à offrir.
importantes améliorations des conditions de vie apportée par ces
Ces projets d’espaces publics, grâce à leur et
entre des réalités opposées, ont su
répondre à un problème majeur, abordé jusque là uniquement sous
Face à la
la forme d’une résolution des problèmes d’habitat ou faisant directe-
privatisation, plus que jamais la
ment appel à des politiques d’éradication, en s’attaquant à ce der-
pose comme maintenance du
et à leur se
86
87
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