L'Officiel-Hommes, March/April/May Issue 63

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Levant

Numéro 63 Mars -avril-mai 2016

N° 63 – 7,500 L.L.

ORIENTALISMES

Tahar Rahim, Ernesto Chahoud, Aljoud Loutah, Samandal, Tasnim Baghdadi, Marwan Kaabour, Hassan Hajjaj, Dj K-sets, Salon Beyrouth.

Ta h a r R a h i m e n C a n a l i .





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Sommaire 36

L’ édito

38

News

58

Le « Teddy » Saint Laurent

59

Le new treillis

60

Mention trench bien

64

Bottega Veneta

68

Focus

72

Accessoires

80

Nuit et jour

86

Dior printemps/été 2016

88

L’ esprit West Coast

104

Tod’s, l’Italie à pied d’oeuvre

106

Coeur solitaire

108

Winston Churchill

113

Abadaye dandy

118

Hermès printemps/été 2016

120

Amine Bendriouich

122

Comptoir de l’homme

126

Tahar Rahim du farceur à l’acteur

146

Èze

158

Bourge & Hammoud

188

Se prendre une veste, c’est de saison

198

New York

212

Quand le monde Arabe fait « POP ! »

216

L’orient autrement



224

Samandal redessine les frontières du réel

230

Anthony Saroufim de l’œuf à l’oeil

234

Pliages de bois

238

Les neuf merveilles du monde

246

Buenos Aires vu par Luna Paiva

250

Un verre de bourbon sous un caoutchoutier

254

Villa Badaro, le nouveau resto de quartier

257

Tutti-foodie

262

Philosophe du vinyle

266

Dans le cerveau de David Bowie

268

DJ K-sets rembobine l’orient

270

Hitlist

272

Disco Halal et délices d’orient

Levant

Numéro 63 Mars -avril-mai 2016

N° 63 – 7,500 L.L.

EN COUVERTURE

ORIENTALISMES

Tahar Rahim, Ernesto Chahoud, Aljoud Loutah, Samandal, Tasnim Baghdadi, Marwan Kaabour, Hassan Hajjaj, Dj K-sets, Salon Beyrouth.

Ta h a r r a h i m e n C a n a l i .

Tahar Rahim : en Canali. photographe Marcel Hartmann, styliste Marco Manni.



Levant

Éditeur

Tony Salame Group TSG SAL Rédaction Rédactrice en chef

Fifi Abou Dib Rédactrice et Coordinatrice

Stéphanie Nakhlé Département artistique Directrice de création

Mélanie Dagher Directrice artistique

Minja El-Hage Contributeurs Photos

Jimmy Dabbagh, Tony Elieh, Raya Farhat, Marcel Hartmann, Tarek Moukaddem Rédaction

Emile Issa, Philippine De Clermont-Tonnerre, Myriam Ramadan Yashruti Mode

Marco Manni, Pam Nasr Production Directrice

Anne-Marie Tabet Retouche numérique

Fady Maalouf Publicité et Marketing Directeur général commercial et marketing

Melhem Moussalem Coordinatrice commerciale

Stéphanie Missirian Directrice marketing

Karine Abou Arraj Directeur Responsable

Amine Abou Khaled Imprimeur

53 Dots Dar el Kotob Édité par LES ÉDITIONS JALOU SARL au capital de 606 000 € — Siret 33 532 176 00087 — CCP n° 1 824 62 J Paris 5, rue Bachaumont, 75002 Paris. Téléphone : 01 53 01 10 30 — Fax : 01 53 01 10 40 L’Officiel Hommes is published quarterly in September, December, March and July — Total: 4 issues by Les Éditions Jalou



Levant

Direction Gémets des boards exécutif et administratif Marie-José Susskind-Jalou et Maxime Jalou Directeur général, directeur des boards exécutif et administratif Benjamin Eymère Directrice générale adjointe, membre des boards exécutif et administratif Maria Cecilia Andretta (mc.andretta@jaloumediagroup.com) Assistante de direction Pascale Savary (p.savary@jaloumediagroup.com)

Publicité Direction commerciale, membres du board exécutif Anne-Marie Disegni (a.mdisegni@jaloumediagroup.com) Christelle Mention (c.mention@jaloumediagroup.com) Marina de Diesbach (m.diesbach@jaloumediagroup.com) Assistante commerciale Sara Schmitt (s.schmitt@jaloumediagroup.com) — Tél. : 01 53 01 88 30

Direction éditoriale Directeur éditorial, membre du board exécutif Emmanuel Rubin (e.rubin@jaloumediagroup.com)

Administration et finances Directeur administratif et financier, membre du board administratif Thierry Leroy (t.leroy@jaloumediagroup.com) Secrétaire général Frédéric Lesiourd (f.lesiourd@jaloumediagroup.com) Directrice des ressources humaines Emilia Étienne (e.etienne@jaloumediagroup.com) Responsable comptable et fabrication Éric Bessenian (e.bessenian@jaloumediagroup.com) Diffusion Lahcène Mezouar (l.mezouar@jaloumediagroup.com) Clients Nadia Haouas (n.haouas@jaloumediagroup.com) Facturation Barbara Tanguy (b.tanguy@jaloumediagroup.com)

Abonnements i-Abo, 11, rue Gustave-Madiot, 91070 Bondoufle — Tél. : 01 60 86 03 31 ou www.jalouboutique.com (voir page 241)

Vente au numéro France VIP, Laurent Bouderlique — Tél. : 01 42 36 87 78 International Export Press, Alain Lecour — Tél. : 01 40 29 14 51 Ventes directes diffusion Samia Kisri (s.kisri@jaloumediagroup.com)

International et marketing Management international et marketing Flavia Benda ( f.benda@jaloumediagroup.com) Développement licences Gérard Lacape (g.lacape@gmail.com) International editorial et archive manager Nathalie Ifrah (nathalie@jaloumediagroup.com) Directrice de la publicité internationale Milan Angela Masiero (a.masiero@jaloumediagroup.com) Senior manager publicité internationale Milan Claudia Della Torre (c.dellatorre@jaloumediagroup.com) Manager publicité Milan Monica Traina (m.traina@jaloumediagroup.com) Chef de produit diffusion Jean-François Charlier (jf.charlier@jaloumediagroup.com)

Publications des Éditions Jalou L’Officiel de la Mode, Jalouse, L’Optimum, La Revue des Montres, L’Officiel Voyage, L’Officiel 1000 Modèles, L’Officiel Hommes, L’Officiel Art, L’Officiel Shopping, L’Officiel Chirurgie Esthétique, L’Officiel Allemagne, L’Officiel Hommes Allemagne, L’Officiel Australie L’Officiel Azerbaïdjan, L’Officiel Brésil, L’Officiel Hommes Brésil, L’Officiel Chine, L’Officiel Hommes Chine, L’Officiel Art Chine, L’Officiel Hommes Corée, L’Officiel Espagne, L’Officiel Grèce, L’Officiel Hommes Grèce, L’Officiel Inde, L’Officiel Indonésie, L’Officiel Italie, L’Officiel Hommes Italie, L’Officiel Japon, L’Officiel Kazakhstan, L’Officiel Lettonie, L’Officiel Liban, L’Officiel Hommes Liban, L’Officiel Lituanie, L’Officiel Malaisie, L’Officiel Maroc, L’Officiel Hommes Maroc, L’Officiel Mexique, L’Officiel Moyen-Orient, L’Officiel Hommes Moyen-Orient, L’Officiel Art Moyen-Orient, L’Officiel Pays-Bas, L’Officiel Hommes Pays-Bas, L’Officiel Philippines, L’Officiel Russie, L’Officiel Singapour, L’Officiel Hommes Singapour, L’Officiel Suisse, L’Officiel Hommes Suisse, L’Officiel Voyage Suisse, L’Officiel Thaïlande, L’Officiel Hommes Thaïlande, L’Optimum Thaïlande, L’Officiel Turquie, L’Officiel Hommes Turquie, L’Officiel Ukraine, L’Officiel Hommes Ukraine, L’Officiel Vietnam

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Communication et relations presse Thomas Marko & Associés Céline Braun et Emmanuel Bachellerie — Tél. : 01 44 90 82 60 Impression, suivi de fabrication et papier Group Valpaco, 3, rue du Pont-des-Halles, 94150 Rungis Photogravure Cymagina Distribution MLP Dépôt légal à parution — Commission paritaire N° 0419K89063 — ISSN 1777-9375

Fondateurs GEORGES, LAURENT et ULLY JALOU †



ÉDITO Par Fifi Abou Dib

On est toujours à l’orient de quelqu’un, à l’Est d’un Eden, de l’autre côté d’un paradis perdu. Alors, Proche-Orient ou Moyen-Orient, qu’importent les appellations : tout dépend du sens où le soleil se lève. New York se trouve à l’orient des Etats Unis, ce qui n’en fait pas pour autant une ville d’Orient. La Chine est en face des côtes occidentales de l’Amérique, et c’est pourtant cet occident-là qui incarne pour les Américains la culture orientale. Vous ne suivez plus ? Ce n’est pas grave, laissez-vous porter par le courant. La rédaction de L’Officiel Hommes vous emmène en ce mois de mars aux confins d’un Orient fantasmé, tant et si bien qu’il explose en mille et une couleurs, saveurs, musiques et cultures. Dans cet Orient irréel, inconnu des boussoles et perdu dans une géographie obsolète, la terre est âpre mais les goûts sont suaves, la musique est barbare mais la danse sensuelle, l’homme est ombrageux mais quelques fois poète. Traçant une ellipse des bords de l’Afrique à ceux de l’Asie, caressé par la Méditerranée, tant de fois célébré par les voyageurs du 19e siècle, l’Orient est aujourd’hui rêvé par de nouveaux orientalistes. Ces artistes de génie qui n’en sont que des natifs déracinés et replantés en Europe, tracent les contours d’une nouvelle culture joyeuse et métissée, opulente et minimaliste, réprimée et éminemment libre, nostalgique et follement contemporaine. Leur style est irrésistible. Découvrons-les.

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News Par F.A.D

Façonnable, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.233, L1 Façonnable, 149 rue Saad Zaghloul, Centre-Ville, Beyrouth +961 1 99 11 11 ext.525

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Photos DR

L’AIR DE LA FRENCH RIVIERA Façonnable, mi façon, mi fashion, ce sera toujours cette combinaison immuable d’une élégance décontractée et d’un impeccable savoir-faire. L’esprit de la Côte d’Azur est présent dans les moindres fibres de son ADN, moins classique qu’il n’y paraît. Haute en couleurs, la marque célèbre en permanence le climat tempéré de la Méditerranée et la nonchalance azuréenne. On ne s’en lasse pas.


MYSTIQUE ET LAÏQUE Cette religion-là est sûrement la vraie, puisque l’humanité entière en célèbre le culte. On l’aura compris, il s’agit de la liberté pour laquelle n’importe qui serait prêt à se damner. Toute religion a ses codes. Pour True Religion, le denim fait office d’uniforme. La toile de Gène est ici un langage interprété de 1000 manières, avec pour fil conducteur ce fer à cheval qui court, en surpiqûre, sur toutes les poches. C’est tellement bien coupé, le jeans est tellement brut qu’on dit amen.. True Religion, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.264, B1 True Religion, Beirut City Center, L1, +961 1 29 19 91 True Religion, rue Souk el Tawlieh, Beirut Souks, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.585

ON S’INVENTE UN PAYS…

Photos DR

Et parce que l’été est synonyme de voyage, Junya Watanabe a inventé chez Comme des Garçons une collection démente dans laquelle toutes les civilisations ne font qu’une, déclinant, avec un art consommé du patchwork, des pièces destinées à un explorateur en pleine lue, abandonnant progressivement son costume occidental pour se parer d’éléments tribaux. Et c’est juste beau. Comme des garçons, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.104, B1 Comme des garçons en vente chez Aïzone, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.140

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COMME UN VASARELY L’art cinétique est le fil conducteur de cette collection sans complexe, forte d’un savoir-faire et d’une modernité ancrée dans les années 70. Cette saison, Pal Zileri rend hommage aux effets optiques des maîtres du 20e siècle avec un langage développé en carreaux et losanges, non sans rendre hommage, au passage, aux complexités visuelles de notre âge digital. Autant les tissus que les imprimés et les jacquard accompagnent le rythme accéléré de l’homme contemporain, connecté et globalisé. Pal Zileri, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.235, L1 Pal Zileri, en vente chez Aïshti, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.120

PARTIR POUR « ARRIVÉ » Il faut avoir connu les bagages mal fichus pour comprendre l’addiction des voyageurs fréquents à Tumi. Ce fabricant de valises est toujours en avance d’une révolution pour améliorer le transport de nos objets usuels ou précieux. Avec Tumi, c’est tellement facile de faire une valise que ça ressemble à de la magie. Tout trouve sa place, et le comble c’est que votre bagage, aussi plein soit-il, se boucle avec fluidité en une seule tentative. Il roule ensuite sans dévier de sa trajectoire et, summum du confort, il est muni d’un tag qui permet de le retracer en cas de perte. La nouvelle collection du bagagiste s’appelle « Arrivé ». Un nom qui donne envie de partir.

Photos DR

Tumi, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.236, L1 Tumi, en vente chez Aïshti, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.102

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Photo DR

CHARNU, CHARNEL, ADDICTIF Pour son nouveau parfum Dior Homme Intense construit par François Demachy, Dior a choisi pour égérie le troublant Robert Pattinson. Col relevé, regard profond et cheveux en bataille, la star britannique dégage une séduction troublante devant l’objectif de Peter Lindbergh, maître du portrait vibrant. Dans les rues de New York, Pattinson, avec son aura de rebelle moderne, laisse un sillage puissant et charpenté, floral et sexy avec une sécheresse boisée au cèdre de Virginie et où vanille, cannelle et fève tonka font entendre un appel gourmand et irrésistible. Dior parfum, en vente chez Aïshti, 131 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.104

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Burberry, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.238, L2 Burberry, rue Allenby, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.455

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Photo DR

UN AVANT-GOÛT DE L’HIVER Toujours en avance d’une saison, Burberry communique déjà sur sa collection automne hiver 2016-17. La maison a renoncé à ses lignes Brit, London et Prorsum pour créer sous la prestigieuse étiquette Burberry une fusion des trois inspirations où le classicisme de London, l’originalité de Prorsum et l’insularité de Brit ne font qu’un. Privilégiant les volumes généreux des 80’ et des 50’s, à la saison froide, Burberry sera protecteur et enveloppant avec un je ne sais quoi de militaire.



SHADES L’arceau est toujours là, fil conducteur qui a fait le succès de cette ligne de solaires dès sa première apparition il y a deux ans. Copié, plagié, détourné, il reste imperturbable, souverain, cet arceau qui redessine l’architecture du visage, intensifie le regard et structure l’attitude. Il y a, décidément, dans les lunettes Dior, de quoi intimider le soleil. Dior, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.224, L1 Dior, 131 rue El Moutran, Centre- Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.592

Gucci, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.223, L1 Gucci, 141 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.200

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Photos DR

DÉTOURNEMENTS Loin d’une mode conventionnelle et convenue, Gucci s’amuse cette saison à déplacer les codes de leur contexte habituel, créer de l’inattendu, inventer des cadavres exquis pour une collection où poésie et surréalisme ont le dernier mot. Ici et là, des abeilles se font la belle et se posent indifféremment sur des espadrilles à rayures marine, des mocassins ou des chemises. Les imprimés se lâchent. La folie est le nouveau classique.


Photo Delfino Sisto Legnani Studio, Fondazione Prada

LE MOT DE LA FIN C’est un événement pluridisciplinaire au sens noble du terme qui a lieu au siège milanais de la Fondation Prada jusqu’au 19 juin 2016. Confiée à Goshka Macuga, artiste polyvalente doublée d’une historienne de l’art, conservatrice, directrice artistique et collectionneuse, l’exposition Prada, intitulée « The son of man who ate the scroll », soit le « Fils de l’homme qui a avalé le rouleau », a pour thème le temps, les débuts, la fin, l’effondrement et la renaissance. Elle interroge notamment la technologie en tant que création humaine et menace pour l’humanité. Déployée dans les espaces du Podium, de la Citerne et de la galerie Sud de la fondation, cette exposition conforte le prestige de Prada en tant que mécène et confère à la principale activité de l’enseigne, qui est la mode, une densité insoupçonnée. C’est un événement pluridisciplinaire au sens noble du terme qui a lieu au siège milanais de la Fondation Prada jusqu’au 19 juin 2016. Confiée à Goshka Macuga, artiste polyvalente doublée d’une historienne de l’art, conservatrice, directrice artistique et collectionneuse, l’exposition Prada, intitulée « The son of man who ate the scroll », soit le « Fils de l’homme qui a avalé le rouleau », a pour thème le temps, les débuts, la fin, l’effondrement et la renaissance. Elle interroge notamment la technologie en tant que création humaine et menace pour l’humanité. Déployée dans les espaces du Podium, de la Citerne et de la galerie Sud de la fondation, cette exposition conforte le prestige de Prada en tant que mécène et confère à la principale activité de l’enseigne, qui est la mode, une densité insoupçonnée. GOSHKA MACUGA: TO THE SON OF MAN WHO ATE THE SCROLL du 4 Février au 19 Juin 2016, Fondation Prada – Milan

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Corneliani, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.217, L1 Corneliani, 225 rue Foch, Centre- Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.500

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Photo DR

POIDS PLUME Explorant la légèreté telle qu’elle obsédait Italo Calvino, Corneliani érige sa collection printemps été 2016 comme un monument à l’excellence et à la douceur de vivre. « Ma méthode de travail a le plus souvent impliqué la soustraction du poids. J’ai toujours essayé de réduire le poids, parfois des gens, parfois des corps célestes, parfois des villes; j’ai surtout essayé d’alléger la structure des histoires et de la langue » écrit Calvino. Dont acte. Corneliani traduit cette recherche entre perfection textile et élégance informelle.


SOUVERAIN Parce que Prada a tout compris à la complexité de l’homme 2016. A son envie de confort et de luxe, de belles matières et de coupes parfaites, de faire sérieux tout en restant fun, de se montrer viril avec une touche de féminité, de renouer par le vêtement avec des époques mythiques dont il ne retrouve plus la vibration dans la sienne. Parce que Prada, c’est tout ça. Prada, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.231, L1 Prada, en vente chez Aïshti, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.120

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CA RUGIT DANS LE MOTEUR Aventurier du digital, pionnier du rock, songeur d’une nuit d’été, il y a en chacun de nous un esprit curieux et intrépide que Diesel salue dans une collection audacieuse et haute en couleurs. Le directeur artistique de la marque, Nicola Formichetti, libère les couleurs, s’inspire de l’art de la rue et du graffiti, mélange les ADN et crée de la joie.

LA CRÊPE COMME UNE MADELEINE La Crêperie, pour plusieurs générations, c’est cette vieille maison du début du 19e siècle, suspendue sur une falaise surplombant la mer audessus de la baie de Jounieh, où l’on allait à l’heure du goûter manger des crêpes, et où le soir, dans les caves inaccessibles aux petits qui en rêvaient, la fête battait son plein jusqu’au matin. Bonne nouvelle, non seulement ce lieu mythique a rouvert ses portes, rénové et restauré de frais, non seulement la crêpe est de retour, mais les Caves rejouent les folles nuits d’antan pour les nostalgiques de l’âge d’or du Liban.

Diesel, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.270, B1 Diesel, 129 rue Foch, Centre- Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.450 Diesel, Beirut City Center, Level 1, +961 1 28 71 87

La Crêperie, Kaslik, +961 71 20 20 22

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CAMOUFLAGE Valentino imagine pour l’automne hiver une collection masculine subtile, tout en couleurs chaudes, privilégiant l’imprimé camouflage. Dans sa nouvelle boutique-écrin du magasin Aïshti By The Sea, la marque propose dans un décor luxueux, sur fond de terrazzo en trompe l’œil gris moucheté de blanc et détails de cuivre et de merisier, un choix presque exhaustif de chaussures, accessoires, jeans, blousons et tee shirts et sweats. Valentino, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.222, L1 Valentino, en vente chez Aïshti, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.120

Camper, rue Souk el Tawlieh, Beirut Souks, Centre-Ville, +961 1 99 11 11 ext.568 Camper, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.271, B1 Camper, Beirut City Center, Hazmieh, L1, +961 1 28 71 87

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Photos DR

NOS PIEDS S’ÉVADENT Ceux qui travailleront cet été auront quand même les pieds en vacances. C’est le pari que s’est donné Camper, la marque espagnole partie d’un petit atelier de cordonnerie d’inspiration anglaise pour se lancer dans la confection des chaussures les plus créatives de l’industrie. Le derby tricolore ? Il n’y a qu’à oser. Sourire et confort garantis.


t h e o r i g i n a l a m e r i ca n b r a n d Aïshti by the sea Antelias | 04-717-716 ext 232 Aïshti Downtown Beirut | 01-991-111 Aïshti Dunes Center Verdun Street | 01-793-777


MICHAEL PITT ET KATE MOSS Allez, on joue et on se la joue ! Rag & Bone, c’est simplement la marque des stars. Il n’est pas donné à n’importe qui de convaincre Kate Moss de poser pour sa marque quand on n’en est encore qu’à sa première campagne. C’était en 2012. Depuis, bien d’autres ont incarné cette mode qui érige le style de la rue en élégance ultime. De Michael Pitt à Winona Ryder en passant par Lea Seydoux, Emile Hirsh ou Stacy Martin, tous ont accepté de bonne grâce. Cet été, ce sera nous. En blanc et gris, avec plein de sangles et de chaînes, des superpositions improbables et la fraîcheur sublime du coton et du lin naturel. Rag & Bone, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.297, L3 Rag & Bone, en vente chez Aïzone, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.140

Photos DR

LÉGÈRETÉ CHÉRIE Tout ce sérieux pour produire du fun et de la légèreté! Ils sont comme ça, chez Brunello Cuccinelli : tellement intransigeants sur la qualité que les collections collent aux saisons comme une seconde peau. Des fibres les plus naturelles aux plus techniques, tout est poids plume, décliné ce printemps en teintes claires et pastels savoureux. Les pantalons, à revers ou à tirettes, remontent haut sur la cheville pour plus de confort et de fraîcheur, le lin, satiné et chiné, imite le jeans, le coton se peigne et tout se superpose avec raffinement. Brunello Cucinelli, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.242, L2

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CE QUI RESTE QUAND ON A TOUT OUBLIÉ Après une longue absence, Ziad Antar revient sur la scène artistique libanaise auréolé d’une belle reconnaissance internationale. Cette fois, cet artiste sensible, modeste et spontané expose des images ramenées d’un séjour dans les montagnes de l’Asir, en Arabie Saoudite. De cette oasis plantée de dattes, de blé et de millet, où se promènent des gazelles, des léopards et des babouins, on ne verra pourtant rien qui ressemble à un paysage précis. Les images de Antar sont des souvenirs flous, des impressions dans tous les sens du terme. L’exposition, intitulée « After Images » et dirigée par Hans Ulrich Obrist, fait l’objet d’un livre édité par Kaph et émaillé de poèmes de Yahya Amqassim.

Photos Beirut Art Center

After Images, Beirut Art Center, Front de mer, Beyrouth, du 1e au 15 mars 2016

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Ermenegildo Zegna, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.218, L1 Ermenegildo Zegna, 62 rue Abdel Malek, Centre- Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.222

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Photo DR

SIMPLEMENT SOI Zegna ne se contente pas de dominer la mode masculine. Cette marque qui fonctionne en circuit intégré a créé sa ligne Z Zgna à l’intension de ceux qui veulent justement se démarquer. A travers des pièces où domine le révolutionnaire Techmerino, tissu poids plume et ultra résistant créé dans les laboratoires de l’enseigne, on est invité à inventer, voire à « être », son propre style. Sortir de la boîte, émerger de la foule, Zegna sait faire ça…aussi.


CÉLIBATAIRE MAIS EN KOOPLES C’est la maison française la plus rock. The Kooples célèbre depuis sa création le principe du duo dans toutes ses versions. Une seule constante : la rock attitude. Silhouettes effilées de noctambule mal nourri, du noir, du cuir, du clou, du trou, du macadam cowboy… a quoi répondent les filles avec force soies et dentelles sous des blousons de motardes qui disent qu’elles vous suivront sur des routes qui parfois ne finissent pas. The Kooples, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.287, L3 The Kooples, 148 rue Saad Zaghloul, Centre-Ville, Beyrouth +961 1 99 11 11 ext.535

Photos DR

REBELLE COMME UN SAGE L’accessoire le plus utile du printemps ? C’est la bonne vieille surchemise en denim à porter affutée, boutonnée, manches relevées, sur un polo ou un Tee ou même une chemise classique, avec un pantalon cigarette. Etrangement, le résultat est à la fois rebelle et preppy, et la silhouette nickel. Comme quoi, la marque californienne Seven For All Mankind a le talent de ratisser large, sans distinction de genre, de génération ou de tempérament. 7 For All Mankind, Aïshti by the sea, Antelias, +961 4 71 77 16 ext.263, B1 7 For All Mankind, rue Souk El Tawlieh, Beirut Souks, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.560 7 For All Mankind, Beirut City Center, Level 1, +961 1 28 71 87

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QUAND ON PARLE DOUDOUNE La doudoune, évidemment c’est Moncler. C’est le duvet fait vêtement, le confort douillet fait style, la chaleur sèche qui fait du bien par temps glacial et la coupe anti-Bibendum. L’été, Moncler est encore là, allégé pour les petites soirées frisquettes, avec une collection de gilets, de sweats, de maille coton et même de maillots de bain en tissu technique.

CHAKRA, OUVRE-TOI ! Unir, protéger, libérer. On a tous besoin d’un talisman, ce doudou pour adulte, qui rassure et donne confiance en soi, rappelle quelqu’un qu’on aime et cristallise un moment précieux qui n’en finit pas de rayonner. Le bracelet Shamballa, c’est tout cela et plus encore : Réalisé selon le principe qui, par associations de couleurs et de cristaux, relie l’individu aux sept principaux chakras de son corps, il aurait la vertu d’apaiser et de réconforter. Shamballa Jewels, en vente chez Sylvie Saliba, Achrafieh, Beyrouth, +961 1 33 05 00

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Photos DR

Moncler, en vente chez Aïshti, 71 rue El Moutran, Centre-Ville, Beyrouth, +961 1 99 11 11 ext.120


etro.com FAKHRY BEY STREET, BEIRUT SOUKS 01 99 11 11 EXT. 590


149 saad zaghloul street, NEXT TO AïSHTI downtown t. 01 99 11 11 ext. 525 AïSHTI BY THE SEA ANTELIAS T. 04 71 77 16 EXT. 233

www.faconnable.com



LE « TEDDY » SAINT LAURENT Blockbuster Par Anne Gaffié Photographe Jeremias Morandell Styliste Romain Vallos

Carte d’identité Passage n° 24, teddy « multipatch » en satin de soie brodé, chemise en coton froissé écossais, tee-shirt en coton, jean « skinny high waist » en denim, bracelets en cordons alpins « perle » et « charm palmier », pendentifs charms en argent oxydé « palmier hawaï » et « décapsuleur serpent », le tout Saint Laurent par Hedi Slimane. Signe particulier Addictif. Pas le genre de pièce à laisser traîner au vestiaire, en fait. Presqu’une œuvre d’art, certainement un collector,

pour cet objet modeux non identifié, sorti tout droit d’un cartoon hollywoodien. Son satin de soie, d’aspect plutôt académique, est entièrement rebrodé d’une constellation d’écussons en tous genres, glitter et kitsch à souhait. Des smiley, des calandres, des « yeah baby », des comics, des pizzas... Certains vendraient père et mère pour en avoir ne serait-ce qu’un. Sans parler du dos, à l’imprimé animalier « babycat » totalement incongru. Joker Le même en version noir uni, le plus sobre (look n° 72). 58


LE NEW TREILLIS Focus Photographes JOACHIM MUELLER RUCHHOLTZ Styliste emil rebek

De gauche à droite de haut en bas: Veste, KOLOR. Veste, VALENTINO. Cardigan, ERMENEGILDO ZEGNA COUTURE. Parka, DSQUARED2 et veste, GUCCI. Veste, KENZO. Parka, SAINT LAURENT par hedi slimane.

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Mention trench bien Mode Par Baptiste Piégay

Les femmes ont la petite robe noire, les hommes ont leur trench. Pièce majuscule de l’univers masculin, acmé du style mâle, il ne vieillit pas, trouvant à l’inverse une source de jouvence du côté du Yorkshire, où la maison Burberry, qui célèbre cette année ses 160 ans, lui donne vie. Né sous la forme d’une pièce d’abord imaginée au nom de la fonctionnalité, il a gagné au fil des décennies sa place sur l’Olympe de la mode. annuellement, pour répondre à une demande croissante. Thomas Burberry – que l’on ne présente plus – souffrait de rhumatismes. Pour se protéger de la pluie (cruelle pour ses afflictions), rien de plus efficace que le caoutchouc, mais il faut bien admettre qu’il est lourd et peu confortable – et d’un chic contestable. Les grands créateurs savent manier bien des talents : en petit chimiste, il réussit à imperméabiliser la toile de coton. En 1879, c’est ainsi une gabardine de fils de tissus serrés qu’il taillera. On ne dira jamais assez à quel point l’histoire de la mode s’est aussi nourrie de celle l’innovation technique... Première incarnation du trench, le « Burberry Tielocken », breveté par Thomas Burberry en 1912, a incité l’administration militaire britannique à lui en commander une version adaptée aux conflits qui ne manqueraient pas de se profiler. De nouveau, les impératifs techniques ont obligé à l’inventivité, pratique et esthétique : la tenue doit 60

permettre de monter à cheval ou de courir, comporter une ceinture pour renforcer sa capacité à lutter contre les éléments, des anneaux auxquels accrocher des outils, et ainsi de suite. Bavolet revolver, bavolet tempête… Aujourd’hui, du côté de Castleford, où ils sont réalisés, avant qu’un nouveau site ne vienne en renfort, ce ne sont pas moins de 100 procédés qui président à sa conception – la maîtrise seule du col exige un an de pratique à l’artisan. Ses détails emblématiques n’ont rien d’une coquetterie, ils sont essentiels à l’hélice de son ADN : pattes d’épaule, fermeture par agrafe au col, bavolet revolver, poignets ceinturés, bavolet tempête et, naturellement, le dessous de col reprenant le check emblématique de la maison anglaise. Humphrey Bogart (dans Casablanca), Peter Sellers (dans la série de la Panthère rose) ou Audrey Hepburn

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Un grand vêtement est une œuvre en mille-feuilles, il révèle sa beauté par fines couches successives, il traverse l’Histoire sans que la poussière ne l’alourdisse : il raconte une intrigue, déroule une mythologie, prenant sa force, comme toute mythologie, dans l’étreinte du fait brut – des ventes croissantes, une attraction jamais démentie pour la pièce –, dans l’anecdote pop pour lui faire une patine… et, enfin, il y a l’histoire intime que l’on se raconte, le rêve brodé sur l’étoffe, écusson unique à même le cœur. C’est un peu plus qu’un vêtement donc, mais pourtant ne serait-il que cela, il y aurait de quoi s’en féliciter. Les faits, alors : le 3 novembre 2015, Burberry annonçait investir 50 millions de livres (soit environ 65,5 millions d’euros), dans la construction d’une usine, au cœur du Yorkshire. Lorsqu’elle sera achevée, courant 2019, pas moins de 1 000 artisans y seront à l’œuvre. L’ambition est de tripler le volume de trenchs produits


L’ourdissage est un processus clé qui permet à chaque fil d’être enroulé sur le métier à tisser exactement à la même longueur et tension pour le même modèle. 61


(dans Breakfast at Tiffany’s) ont appliqué à leur tour une touche de vernis à cet indispensable du vestiaire. Sa versatilité et sa capacité à se réinventer – en coupe et en coloris – lui ont donné une nouvelle dimension : le trench est dorénavant synonyme du style, il l’incarne. On connaît peu de pièces qui peuvent s’en flatter. On sait Christopher Bailey, CEO et directeur général de Burberry, épris d’interactivité et soucieux que Burberry soit de plain-pied dans la modernité. Le projet récent « Art of The Trench » signalait que cet imperméable, qui mérite pour une fois d’endosser le bien usé adjectif d’iconique, faisait partie de notre paysage mode. C’est moins un manteau, même de tranchée comme le suggère son nom, qu’une armure, moins un habit qu’une carapace. Il en est de certains vêtements comme d’une cape de super héros : ils vous donnent l’illusion d’être invincible, ou plus beau – ce qui est au fond la même chose. Est-il déraisonnable d’affirmer que le trench-coat Burberry fait une des plus admirables silhouettes possibles au commun des mortels ? Et qu’il n’y a pas que Kate Moss ou Bryan Ferry (qui n’ont rien de commun, eux), à être merveilleusement sexy lorsqu’ils sanglent leur trench ? Demandez à votre armoire ce qu’elle 62

ressent lorsque vous en retirez votre trench… elle vous citerait Lamartine : « Un seul être vous manque et tout est dépeuplé. » Le trench est un peu le fil d’Ariane du style : si on déroulait tout le tissu servant à la fabrication du modèle « Heritage » en taille 42, il permettrait de jeter un genre de pont entre le Burberry Mill où est tissée la gabardine et l’usine de Castleford (authentique). On mesure sans peine, en le contemplant, l’extraordinaire travail de précision qu’il réclame : 200 heures de travail (pour un « Kensington »), une centaine de tailleurs ultra-spécialisés (ceinture, col, épaulettes, manches) pour créer environ 5 000 pièces par semaine. A présent, en quelques clics qui nous rendent artisans de nos rêves, il s’adapte à tous nos désirs, se plie à toutes nos envies. Mais il n’en est jamais allé autrement… Une fois dans sa vie, il faut l’avoir touché : sa surface, dont la couleur originelle évoque la dune de sable, le miel ou l’épiderme, a une texture unique dans l’univers de la mode. Douce, voluptueuse même, et légèrement grainée. Sous la pulpe du doigt, elle offre un aperçu de ce qui attend la pluie: une caresse, dont elle voudra qu’elle dure toujours. Sur le e-shop de Burberry, www.burberry.com

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De gauche à droite: Le fondateur de la marque, née en 1856. Une réclame, début des années 1930.


« Sa versatilité et sa capacité à se réinventer – en coupe et en coloris – lui ont donné une nouvelle dimension : le trench est dorénavant synonyme du style, il l’incarne. » 1

2 1. Autre signe distinctif, le fameux tartan Nova Check, qui a valeur de blason, est apparu dans les collections Burberry en 1924. 2. Les anneaux en « D », où l’on suspendait grenades, cartes et flasques… n’ont plus désormais qu’une fonction décorative.

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Bottega veneta Logorama Par Anne Gaffié

« Quand vos initiales suffisent. » Fidèle à son historique devise, qui fait passer votre identité avant la sienne, la maison Bottega Veneta a toujours revendiqué haut et fort son aversion pour le logo. Une politique complexe mais payante, pour ne pas dire visionnaire.

Depuis 1966, année de sa naissance, la marque vénitienne Bottega Veneta n’a eu de cesse de suivre, à la lettre c’est le cas de le dire, la très délicate stratégie marketing du « low profile ». Très tendance il est vrai, mais très risqué, d’un point de vue purement commercial s’entend. Cinquante années de discrétion et de subtilité, traversées sans encombre en plein changement

de siècle, pourtant marqué par une logomania proche de l’hystérie collective. Pas un imprimé monogrammé, aucun « BV » bien placé. La maison a construit son image et sa réputation presque exclusivement autour du célèbre « intrecciato », ce motif tressé au graphisme reconnaissable entre mille, et ô combien copié, devenu son signe de ralliement. Un travail 64

artisanal de haute classe, réalisé au cœur d’une villa XVIIIe siècle, sise à Montebello Vicentino, en Vénétie. Assez balèze pour permettre au logo de la marque de se la couler douce depuis un demi-siècle, en une très sage typo, douce et pointue à la fois, dont l’incroyable modernité n’a jamais eu à subir la moindre retouche. De quoi en faire rêver plus d’un.

Photos DR

L’« intrecciato», logo furtif de la maison Bottega Veneta.


santonishoes.com




LE MARCEL Focus Auteur Adrian Forlan Photographe DHAM SRIFUENGFUNG Styliste Jérôme André

Le débardeur sous-vêtement en côte, en maille ou en jersey, s’affiche aujourd’hui moins sous la chemise qu’à l’air libre. Inventé au mitan du xixe siècle à l’intention des employés des Halles (selon la légende, par un manutentionnaire ayant découpé les manches de son pull pour faciliter l’effort), il abrite les reins des courants d’air et a pris le surnom de marcel, suivant le (pré)nom de son principal fabriquant,

Marcel Eisenberg. Le marcel est le plus cruel des vêtements : il ne flatte que les corps les mieux sculptés, et aux gringalets fait une silhouette de comédie burlesque, de petit garçon se rêvant homme trop tôt (au mieux), ou d’inconscient. S’il est acquis qu’il faut danser comme si personne ne regardait, s’habiller réclame un peu de réflexion. Le marcel, dans sa simplicité

brutale, a l’immense mérite de nous rappeler que nous ne sommes pas tous, hélas, Marlon Brando.

Marcel en pantalon en laine, LANVIN. Modèle Michael Morgan chez AMCK Models Coiffeur Yusuke Monita


Hybride Focus Auteur Fabrizio Massoca Photographe Lara giliberto Styliste Loyc falque

S’il y a bien une leçon que la mode est susceptible de donner, en retenant notre attention, c’est celle de la liberté. Vis-à-vis des normes, de la convention, des habitudes, toutes ces paresses tristes. Les frères Caten à la tête de Dsquared2 le savent bien. Fomentant cette fabuleuse veste hybride entre denim et costume, ils nous rappellent à l’ordre – vive le beau désordre… Double veste en denim et laine vierge, DSQUARED2. Modèle Romain Frélier-Borda chez Rock Man Assistante photo Olivia Aine


LA FRAGRANCE Focus Auteur Adrian Forlan Photographe Grégoire Machavoine Styliste Loyc Falque

Un tube en forme de flacon – le jus imaginé (ou rêvé, peut-être ?) par l’immense nez Francis Kurkdjian, au diapason de Christopher Bailey, directeur général et directeur général de la création de Burberry – vient d’être élaboré et se nomme simplement Mr. Burberry. Ce sera assurément le parfum de cette

saison et au-delà sans doute. Il y avait bien longtemps que l’on n’avait pas découvert un élixir construit avec tant d’intelligence et de sensibilité, un sens aussi juste de la temporalité du parfum, de l’équilibre entre délicatesse et percussion, subtilité et évidence. Bon génie british libéré d’une lampe d’Aladin, Mr. Burberry fera bien des

miracles, tissant un habit de la plus fine des étoffes à même la peau. www.burberry.com Eau de toilette Mr. Burberry, disponible en 150 ml, 100 ml, 50 ml, 30 ml, et en édition collector de 1 000 ml.


LE MANTEAU Focus Auteur Fabrizio Massoca Photographe Lara Giliberto Styliste loyc falque

Ce qu’il y a de passionnant chez Ermenegildo Zegna, c’est la capacité de la maison italienne à faire mieux que réinventer le vestiaire masculin, à le travailler comme s’il s’agissait d’une page vierge. Ce somptueux manteau en cachemire Century double épaisseur avec ses carreaux madras témoigne d’un regard posé voluptueusement sur cet essentiel. Rien qu’à le regarder, nous voilà réchauffés, apaisés, consolés de tout. Manteau ceinturé à larges carreaux madras en cachemire Century double et pantalon en soie et viscose, ERMENEGILDO ZEGNA couture. Modèle Romain Frélier-Borda chez Rock Man Assistante photo Olivia Aine


ÂGE MINÉRAL Photographe Philippe Fragnière, Tony Elieh Styliste Vanessa Giudici, Minja El-Hage

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Espadrilles en toile imprimĂŠes, Gucci. Page de gauche, ceinture et lunettes de soleil, DIOR. 73



Cravate en soie imprimĂŠe, VALENTINO. Page de gauche, slippers en lin et canvas, Dolce & Gabbana. 75


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Espadrilles, Hermès. Page de gauche, pochettes “Jige” et “Good Lock” en veau, Hermès.

10,5 mm

THIS IS A CENTERED TITLE portfolio Text ERIKA ROBERTS Illustrations CHRIS EDSER

Miller Banner Light corpo 65 interlinea 73

Bodoni EF Light / italic corpo 14 interlinea 17

42 mm

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Sac à dos en cuir, Fendi.


© 2016 TUMI, INC.

NICO ROSBERG Global Citizen

TUMI.COM

Aïshti by the sea, Antelias - T. 04 71 77 16 ext. 236 • Aïshti Downtown Beirut - T. 01 99 11 11


Winston Churchill Photographe Charly gosp Styliste Loyc Falque

Rien à voir, et c’est heureux, avec une énième déclinaison du concept flou du sportswear chic. La rayure tennis donne plutôt dans la discrétion, la finesse de son trait fait comme une légère écume sur les vestes. Apparu à la fin du XIXe siècle, en Angleterre, ce motif délicat était le tartan des banquiers, selon une légende urbaine, signalant l’appartenance à telle ou telle banque. Sir Winston Churchill le tenait également en haute estime. D’autres sources assurent qu’il a d’abord été repéré sur les tenues des marins lors des régates. Et allez savoir pourquoi, mais la France appelle rayures tennis ce qui en anglais répond au nom de pinstripes…


gucci Assistant photographe Anthony Seklaoui Assistant styliste MaĂŻwenn Nicolas


DIOR HOMME


ALEXANDER McQUEEN


DSQUARED2


Av a i l a b l e a t A ĂŻ z o n e s t o r e s + 961 1 9 9 11 11

joh nva r vatos.com


Dior Printemps/été 2016

Photos DR

Par S. N


Un défilé présenté au Tennis Club de Paris qui dévoilait des bombers doublés, des pantalons ornés de zips ou des survêtements parés de motifs losanges. Entre classicisme du tailoring ultra-précis et décontraction du sportswear.


L’ESPRIT WEST COAST Quand dans quelques semaines l’esprit West Coast t’appellera, avec son parfait mélange1. d’esprit vintage, 2. de références mode et 3. de touches sportswear, tu seras bien content d’avoir déjà fait ton choix.

Par Anne Gaffié Photos Giulio Castelli et raya farhat Stylisme Romain Vallos


Trousse de toilette en toile suprĂŞme Gucci.

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Skateboard en bois d’érable imprimé léopard Saint Laurent par Hedi Slimane.

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Chemise en coton imprimĂŠ jungle J.Crew.

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Sweat-shirt en coton molleton dĂŠchirĂŠ tie & dye Saint Laurent par Hedi Slimane.

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Short de bain en coton imprimé « Les Touquans » Vilebrequin.

Mocassins en cuir tressé naturel, semelle à picots Tod’s.

Sac en tissu « OWEN » Tumi.

Tee-shirt en coton Zadig et Voltaire.

Livre « Dinner with Jackson Pollock » éditions Taschen.

Sneakers en cuir Loewe.

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Sneakers en cuir Valentino.

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Casquette en tissu Hermès.

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Mocassins Mocassins en cuir Dolce & Gabbana.

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Tapis de plage en coton couleur « Aqua » Hermès.

Bougie The Hype Noses chez Le66.

Tennis en cuir, semelle gomme et insert corde Façonnable.

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Chemise en jean Valentino.

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Chaussures de sport en veau perforé « Inside » Hermès.

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Cravatte en soie Pal Zileri.

Baskets « Surf » en cuir effet usé Saint Laurent par Hedi Slimane.

Lunettes de soleil Marc Jacobs.

Sac à dos Dolce & Gabbana.

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Ceinture en toile tricolore Prada.

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Tod’s, l’italie à pied d’œuvre Par Edson Pannier Photos Aldo Buscalferri

Entrepreneur patriote, Diego Della Valle a fait du « made in Italy » l’élément-clé de son gigantesque empire, insufflant un vent contemporain à ce savoir-faire ancestral. Pari réussi pour cet autodidacte visionnaire qui s’était donné pour mission de chausser un jour tous les grands de ce monde. le brillant sexagénaire est une figure quasi patrimoniale ! Self-made-man charismatique, il occupe aujourd’hui une place de choix dans les hautes sphères de la société italienne. Les médias nationaux lui consacrent leur une, les politiques redoutent son jugement autant qu’ils le respectent, et il jouit d’une popularité record dans l’opinion publique, jusqu’au cœur des stades, depuis qu’il a racheté la Fiorentina, le prestigieux club de foot florentin. Sauvegarder les emblèmes nationaux est même devenu pour lui un cheval de bataille : restauration de la scène de la Scala de Milan, rénovation en cours du Colisée de Rome, création d’un parc à thèmes à Cinecittà, la « Hollywood-surTibre »… il est sur tous les fronts. Cantine locavore et crèche « in-house » C’est là, dans la province de Fermo, sur la côte adriatique, que le jeune Diego Della Valle, alors âgé de 22 ans, décide, après des études de droit à Bologne 104

et une courte expérience aux EtatsUnis, de rejoindre son père Dorino au sein de la manufacture familiale. Quarante ans plus tard, l’économie de la région tient essentiellement dans la confection de chaussures, et le groupe Tod’s y est pour beaucoup. Dès 1998, Della Valle choisit d’implanter le siège de la société ainsi que les unités de productions dans la zone industrielle de Brancadoro, à quelques minutes du village de Casette d’Ete où il est né. Art à tous les étages Les bâtiments aussi annoncent la couleur. Entre escalier monumental sur mesure signé Ron Arad, peintures de Giovanni Castel et suspensions de Jacob Hashimoto, l’art est omniprésent. A l’image du hall d’entrée, où trône un globe colossal signé Felice Limosani, la plus impressionnante des nombreuses mappemondes que collectionne le CEO, dont l’esprit conquérant est un peu la marque de fabrique. Plus loin, sur les murs du couloir attenant à la

Photos DR

Exactement 787 millions d’euros, c’est le chiffre d’affaires global enregistré par le groupe Tod’s sur les neuf premiers mois de l’année 2015, soit une hausse de 6,2 % par rapport à la même période de l’année précédente. Un bilan plutôt convaincant, à l’heure où la grande majorité des acteurs mondiaux du marché du luxe connaissent quelques sévères déconvenues, notamment dans les turbulences de la consommation chinoise. En 2014, l’entreprise cotée en Bourse affichait déjà une santé de fer avec des résultats avoisinant le milliard d’euros, de quoi la conforter dans sa position de leader mondial sur le secteur des accessoires de luxe. Aujourd’hui, en plus de la maison éponyme qui engrange à elle seule 60 % des bénéfices, le groupe Tod’s compte dans son portefeuille d’autres chausseurs de renom, Roger Vivier et Hogan, ainsi que l’enseigne de prêt-àporter Fay. Cet imperturbable succès, il le doit en grande partie à l’ambition visionnaire de son dirigeant, Diego Della Valle. De l’autre côté des Alpes,


fabrique, sont accrochées les photos de célébrités chaussées des fameux mocassins Tod’s, rappelant la place privilégiée que tiennent les people dans l’histoire de la maison. C’est en effet grâce à une brillante politique de communication qui associait dans ses campagnes publicitaires icônes hollywoodiennes d’antan tels Cary Grant ou Steve McQueen au mocassin à picots né à la fin des années 70 , que la marque a étendu sa renommée à l’international. Ce sont désormais Jude Law, Brad Pitt ou George Clooney qui peuplent les murs du couloir. Des Tod’s boys terriblement premium, dont les pieds moulés sont eux aussi exposés comme des œuvres d’art dans le bâtiment adjacent ! C’est sur ces mêmes murs que d’autres photos, plus techniques, viennent rappeler

l’importance du savoir-faire dans l’esprit de l’entreprise. Une histoire de peaux Un clin d’œil à tous ces ouvriers en blouse blanche qui fabriquent ici, à la main, l’intégralité des souliers du groupe. Méthodiquement, et toujours selon le même rituel. Une fois le dessin validé par Diego Della Valle himself, il part au modelage afin d’y être proportionné, digitalisé et enfin imprimé en autant de morceaux qu’il faudra pour constituer le prototype final. Avant d’en lancer la production à grande échelle, une première version est conçue dans les règles de l’art par un département composé de 45 artisans. A leur tête, Paolo Colo redouble d’enthousiasme : « Depuis mon arrivée il y a treize ans, la 105

production n’a fait qu’augmenter. On est passé de deux-trois modèles à près de 80 aujourd’hui ! » Pour suivre le rythme, les peaux sont renouvelées chaque saison dans une large gamme de couleurs et stockées dans un « magazzino » flambant neuf, surdimensionné, à raison de 58 millions de pieds de cuir, représentant quelque chose comme 18 millions de mètres de matière première. La peinture est encore fraîche dans ce troisième bâtiment tout juste terminé, et pourtant l’histoire de la maison y a déjà pris ses marques. Le souvenir du patriarche qui a su transmettre à son fils le goût de l’artisanat n’est jamais bien loin. Au mur, on aperçoit un portrait de Dorino Della Valle, qui pose un regard bienveillant sur les lieux, à l’abri derrière ses lunettes fumées.


CŒUR SOLITAIRE

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Une chaumière pour un cœur, ça existe. On rêve d’y cultiver son beau désordre et des objets pour soi, bien à soi, rien qu’à soi. Ca ne regarde personne.

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Photographe Tony Elieh Réalisation mélanie Dagher Direction artistique minja el-hage

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1. Sac à dos, DSQUARED2 Chaussures 3. Jeans, DIESEL 4. Fauteuille, FLEXFORM 5. Tapis, AÏSHTI 6. Table, FLEXFORM 7, 9, 15, 16. GEORJ JENSEN 8. Écharpe, VALENTINO 10. Vases, ZAHA HADID 11. Cendrier, AÏSHTI 12. Pochette, DIOR 13. Porte-clés, DOLCE & GABBANA 14. Casquette, DIESEL 17. Pochette, DOLCE & GABBANA 107

18.Bracelet, DIESEL 19. TONDO DONI 20. Vases, ZAHA HADID 21. Ceinture, BRUNELLO CUCINELLI 22 et 23. GEORJ JENSEN 24. TONDO DONI 25. Table ronde, FLEXFORM 26. Lampadaire, BLEU NATURE 27. Canapé, FLEXFORM 28. Attaché-case, ERMENEGILDO ZEGNA 29. Livre, KATE MOSS BY MARIO TESTINO. 30. Haut, TRUE RELIGION 31. Serviette, DSQUARED2


nuit et jour Photographe GRéGOIRE MACHavoine Styliste Loyc Falque

Si nous sommes faits de la même étoffe que les rêves, pourquoi se vêtirait-on avec négligence quand vient l’heure de les rejoindre ? Et pourquoi, si elles sont si douces, si bienveillantes, ne pas en faire une pièce de jour essentielle ? La chemise pyjama, arrachée à son contexte naturel, se glisse avec évidence dans le vestiaire diurne. 108


Chemise en soie, DOLCE & GABBANA. 109


Chemise en viscose et soie, GUCCI. 110


Chemises en soie, MARC JACOBS. 111


Chemise en soie, ALEXANDER McQUEEN. 112


ABADAYE DANDY Par F.A.D Photographe Tony Elieh

Manteau du nomade et du fort à bras qu’à Beyrouth on appelait « abadaye », l’abaya est à la mode ce que le tapis volant est à la moquette : une chatoyante invraisemblance. Altière, avec son côté précieux et princier, nonchalante dans sa version vêtement d’intérieur, entre grand soir et petit matin, elle réclame de l’audace (encore, toujours).

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Tarek Moukaddem Photographe. Né à Beyrouth, Tarek Moukaddem est un activiste doublé d’un passionné de mode. De nombreux shoots de L’Officiel Levant portent sa signature.

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Abaya, ORIENT 499.

Eli Souaïbay Producteur, vidéaste et photographe reconnu. Né à Beyrouth, cet ancien étudiant en gestion des affaires s’est reconverti dans le cinéma en rejoignant l’école nationale du film de Copenhague.

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Joe Arida Designer. Cet esthète doublé d’un plasticien touche-à-tout a créé il y a à peine quelques années son label « La Terre est Folle », LTF pour simplifier. A ses objets et accessoires, à ses motifs de tissus s’ajoutent des créations de mode fraîches, minimalistes et pleines d’humour, comme ces abayas ornées de motifs rappelant le vieux Beyrouth. 116


Abaya, ORIENT 499.

Halim Sabbagh Cinéaste. Né à Beyrouth, cet artiste qui a longtemps travaillé dans la publicité a dirigé plusieurs courts métrages et tournages vidéo. Depuis peu, il s’attèle à son premier « long ».

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Par S. N 118

Photos DR

Hermès Printemps/été 2016


Cette saison chez Hermès, la collection est estivale, graphique et poétique. Des couleurs lumineuses qui évoquent l’été, le soleil, avec des mélanges de fleurs et rayures, des motifs sur des tops en veau velours. Une composition de silhouettes souples et sophistiquées. 119


Bendriouich ou la mode universelle Style Par F.A.D

Ce créateur déjanté s’est lancé dans la mode parce que, dit-il « je n’aimais pas comment on m’habillait quand j’étais gosse ». Citant Jaques Brel ad-libitum et à qui veut l’entendre: « le talent, ça n’existe pas, le talent, c’est avoir envie de faire quelque chose », Amine Bendriouiche met en avant son envie dévorante de faire et le travail acharné qui forge le savoir-faire. Finaliste en 2015 du Style.com/Arabia – DDFC Fashion Prize, lauréat de plusieurs prix de mode dont le premier l’a conduit en Allemagne où il vit désormais, ce grand travailleur a une prédilection pour le sarouel, un vêtement qui va aussi bien aux hommes qu’aux femmes et dont le volume offre la possibilité de jouer sur les détails. Parmi ses autres chevaux de bataille, la veste figure en tête de peloton. Ce vêtement que seuls les couturiers chevronnés osent chahuter se décline chez Bendriouich en complications et plissages. Tel blazer est doté d’ailerons (« pour permettre l’envol, dit-il en souriant») ou d’origamis imitant les

écailles. « J’ai toujours été fasciné par les surplis des impers anglais », explique le créateur. A l’arrivée, on verra défiler dans une ambiance bon enfant des hommes et des femmes portant la même tenue, parfois une robe, sans surprise, avec des effets différents. On l’aura compris, toute une philosophie se développe dans ces lignes aussi naturelles que surprenantes. Couture et conneries Derrière ABCB, la marque de Bendriouich, acronyme d’Amine Bendriouich Couture &Bullshit (couture et conneries, il y a, par delà le décalage et la provocation, une fascination initiale pour le Japon et la culture japonaise. Cette première inspiration découle directement d’un besoin de fuir une société cloisonnée, enfermée dans des dogmes et conventions qui renvoient chacun à sa classe sociale et stigmatisent autant la différence que les attitudes trop voyantes. La mode japonaise, avec sa revendication urbaine et sa singularité, 120

montre la voie au jeune créateur qui veut déjà libérer la jeunesse marocaine en l’invitant à s’approprier sa culture et à la modifier avec ses propres codes. De là nait une première collection sous le néologisme « Stounami », un jeu de mots sur « stoun » qui signifie « fun » dans le langage urbain de la jeunesse marocaine. C’est ainsi que nait aussi une collection de T-shirts totalement déjantée : « Hmar Ou Bikhir » (Âne et bien dans ma peau), avec pour emblème le lapin de Play Boy transformé en âne. Cette capsule créée par Bendriouich en association avec deux potes, l’un ingénieur et l’autre créatif publicitaire, invite les adolescents à assumer l’insulte qu’on leur lance à longueur de journée. Le Hmarboy est aussitôt adopté par la jeunesse branchée de Marrakech. Bendriouich est lancé par un âne, rien ne pouvait le rendre plus heureux. Sur son runway, un mannequin pas à l’aise dans ses escarpins se déchausse sans plus d’états d’âme et sans que rien n’affecte l’élégance de la silhouette, sarouel fluide et veste hybride,

Photos Deborah Benzaquen Casablanca

Amine Bendriouich, c’est d’abord une tignasse, ensuite un grand fou-rire. Marocain établi à Berlin, ce styliste, mais pas que, représente à 32 ans une génération de créateurs arabes touchée par la grâce de la globalisation. Ses collections se portent indifféremment par les deux sexes et ses défilés sont toujours une occasion de mettre en avant le talent de divers artistes, musiciens, danseurs ou graffitistes. Toute une ambiance.


mi trench, mi queue-de pie. Pour lancer une collection, il préfère, quand ça lui chante, créer une vidéo surréaliste, comme « Half Poet, half animal » où il déclame en voix off un poème arabe de sa composition pour illustrer un conte moral sur la fascination de l’or. Retour d’un voyage au Ghana, il s’inspire des plumages des milliers d’oiseaux qu’il a vus pour créer une collection digne d’une volière. Et non, il n’y pas de limites à l’imagination de Bendriouich . Le pouvoir de l’amour Invité par TDx à intervenir dans une conférence sur l’abolition des frontières, ce spécialiste du détournement avance l’argument de l’amour comme passemuraille, saute-ruisseau, facilitateur de miracles. Il donne pour exemple un événement qu’il organise la même semaine au Maroc où, en plus de la présentation de sa collection, plus d’un millier de personnes ont vécu un moment unique, entre concerts, party et performances d’artistes de rue et où les consommations étaient offertes. « Tous ceux qui avaient quelque chose à offrir l’ont offert. Il y avait des gens de tous les milieux et de toutes les cultures. C’est ça le pouvoir de l’amour » avait conclu ce djinn pour qui le vêtement n’est qu’un prétexte pour contribuer à l’édification d’une meilleure humanité, libre et généreuse, candide et conviviale.


Comptoir de l’homme Des crèmes, des savons de rasage, des déodorants et plus encore... prendre soin de sa peau et de ses cheveux contre le stress.

Par Stéphanie Nahklé Photographe Raya Farhat Réalisation Mélanie Dagher Direction artistique Minja el-hage

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1. Eau de Parfum « Oud Palao », diptyque. 2. Savon , L:A BRUKET CHEZ LE 66. 3. Eau de Parfum « Armani Code », Armani. 4. Huile pour le corps, L:A BRUKET CHEZ LE 66. 5. Eau de Parfum « La nuit de l’homme Intense », yves Saint laurent. 6. Carrelages, Blatt Chaya.

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1. Eau de Parfum « Tom Ford Noir extreme », Tom Ford. 2. Deodorant, Acqua DI PARMA. 3. Eau de parfum « Supreme leather », Ralph LAuren. 4. Oud Saphir Cologne, Atelier cologne. 5. Colonia club, Acqua DI PARMA. 6. Carrelages, Blatt Chaya.

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Home at last.

AïSHTI BY THE SEA level 3, Antelias, Lebanon T. 04 71 77 16 ext. 133

GROUNDPIECE SECTIONAL SOFA design by Antonio Citterio

FLEXFORM www.flexform.it


TAHAR RAHIM DU FARCEUR À L’ACTEUR A 35 ans, plus d’une vingtaine de films, une dizaine de distinctions dont deux César, l’un du meilleur acteur et l’autre du meilleur espoir masculin pour le rôle de Malik dans Un Prophète de Jacques Audiard (2010), Tahar Rahim n’est pas seulement une belle gueule. Fort de sa double culture française et algérienne ; et d’une enfance en province où l’ennui a creusé le lit du rêve, de l’imagination et du talent, cet acteur dégage une élégance naturelle et la sagesse d’une « old soul ». Conversation à bâtons rompus.


Par F.A.D Photographe Marcel Hartmann Styliste Marco Manni RĂŠalisation MĂŠlanie dagher Direction artistique Minja el-hage


Page prĂŠcĂŠdente: Manteau, GUCCI. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane. Pantalon, Pal zileri. Blazer en laine, Brunello Cucinelli. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane. Mouchoir de poche, Ermenegildo Zegna.


Manteau, Gucci.


Chemise, Saint laurent par hedi slimane.


« Il n’y a pas de drame sur le visage de Tahar. Il n’y a pas de tragédie. Il a le regard d’un enfant », disait de vous Jacques Audiard après le tournage d’ “Un Prophète”, le film qui vous a révélé. C’est vrai ça ? J’étais beaucoup plus juvénile il y a six ans. J’aurais du mal à répondre. On ne se voit pas tel que les autres nous voient. Vous avez fait une école de cinéma. A peine sorti de là, vous jouiez dans la série « La Commune ». C’est à l’école de cinéma que vous avez appris à être comédien ou bien c’est quelque chose qui se préparait en vous depuis bien plus longtemps ? Nous avions un petit module de théâtre, trois ou quatre heures par semaine. Ce n’est pas suffisant pour former un acteur, mais j’en ai gardé des notions de mise en scène. Enfant, avec mes frères et mes potes, j’étais très farceur. On adorait faire des blagues pour impressionner notre entourage. Je savais très bien me faire passer pour muet, imiter une crise de tétanie ou d’épilepsie en faisant mousser de l’aspirine dans ma bouche. On s’ennuyait, il n’y avait pas grand-chose à faire à Belfort, à part le cinéma. C’est de là que vient mon amour pour cet univers qui m’offrait une ouverture, me faisait rêver. Mais on ne devient pas acteur du jour au lendemain. J’ai pris des cours de théâtre, j’ai écumé Paris jour et nuit pour passer des castings. Par la suite, quand on devient professionnel, l’avantage c’est qu’on peut choisir. Le tournage de La Commune vous a valu d’être remarqué par Audiard, embarqué avec lui dans une voiture de production. Que vous-êtes vous dit dans cette voiture ? Je ne m’en souviens pas. Pas grand-chose sans doute. Mais il s’est souvenu de moi lors des castings d’Un Prophète. Vous avez figuré dans le clip de Sniper « Fallait que je te dise ». Un rap sur l’impossibilité d’exprimer ses sentiments. Avez-vous souffert

vous-même de cette difficulté ? Sniper, c’est un de mes premiers castings. Je ne me souviens plus des paroles de la chanson, j’étais juste content d’avoir le rôle. Personnellement, je dis facilement je t’aime à ceux que j’aime. C’est important. A propos de Love and bruises. Un film sur la jalousie. Êtes-vous jaloux ? Non ! Heureusement. C’est un sentiment toxique et douloureux. Parlez-vous beaucoup de cinéma avec votre épouse Leila Bekhti, qui est elle aussi actrice ? On en parle, bien sûr, mais ce n’est pas au cœur de nos conversations. Vous avez joué dans des films terribles : prisonnier dans Un Prophète, déporté dans The Cut, et pourtant, vous dites quelque part que vous aimeriez avoir un rôle diabolique, pourquoi ? Ce n’est pas tout à fait ce que je voulais dire. En fait je suis fasciné par les personnages qui ont abandonné tout espoir d’être bons, qui sont devenus sans foi ni loi. Comme le personnage joué par Daniel Day Lewis dans There will be blood. J’ai envie d’explorer ça, de m’exprimer dans un univers que je ne connais pas, faire aimer un personnage qu’on n’aime pas. Nous avons parlé de vous dernièrement avec Youssef Nabil. Vous figurez dans son film « I saved my belly dancer ». Que représente pour vous cette vision idéalisée d’un monde arabe qui semble avoir tourné le dos à un passé libéral et festif ? Une certaine nostalgie.


Total look, Canali.


Pull, GUCCI.


Manteau, GUCCI. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane.



Vous avez la réputation d’être très élégant. Quelle est votre définition de l’élégance ? Quels sont vos couturiers préférés ? Vous faites vous-même votre shopping ? Quand on est acteur, c’est important de soigner son image. Il faut faire rêver et se faire rêver soi-même. Je travaille avec une styliste parce que ce que j’aime n’est pas forcément ce qui me va. En général je m’habille chez Saint Laurent, Prada, Balenciaga, Lanvin. Je suis attiré par une mode contemporaine revisitée au goût des années 60, ou inversement. Que représente pour vous l’Algérie ? Y avez-vous des attaches ? Y allez-vous parfois ? L’Algérie, c’est la moitié de ma culture, le pays de mes parents. Au même titre que Belfort où je suis né et où j’ai grandi, j’y retrouve des émotions. L’Algérie, c’est aussi pour moi les vacances et les souvenirs de vacances. Vous dites que vous vous êtes cultivé vous-même. Quelles sont vos lectures préférées ? Quand j’étais petit, à chacune de mes bêtises, ma sœur aînée me punissait en me faisant lire des livres. C’était très sérieux, je devais même faire des fiches de lecture. Je me souviens surtout de La fameuse invasion de la Sicile par les ours de Dino Buzzati, du Horla de Maupassant, et du Roman de Renard. Quel est en ce moment votre livre de chevet ? En tête de mes romans préférés je citerais Un cœur faible de Dostoïevski, et j’ai lu dernièrement avec beaucoup d’intérêt Le village de l’Allemand ou le Journal des frères Schiller de

Boualem Sansal. Quelles musiques aimez-vous écouter ? Un peu tout. J’aime découvrir des air à la sauvette. Je Shazam beaucoup. Au pied levé, je dirais Bashung, Abba, Oasis, Otis Redding, The Carter Family, Nina Simone, Anthony and the Johnsons, Benjamin Clementine (un auteur compositeur que j’aime beaucoup), de l’électro, du hiphop américain, de la country, tout finalement, sauf le metal. Votre sortie préférée en soirée ? A mes débuts, j’ai fait beaucoup de petits boulots, notamment au Man Ray, la discothèque de la rue Marboeuf, à Paris. Quand j’ai eu la chance de devenir acteur, mes amis de l’époque avaient ouvert leurs propres établissements ou s’étaient déplacés ailleurs. Je les ai suivis. Votre destination de vacances préférée ? La Thaïlande, Bangkok, Chiang Mai, les îles. J’ai un ami qui vit là-bas. Quand je vais le voir, on fait le tour du pays à moto. J’aime aussi le Maroc, c’est toujours l’occasion de repas pantagruéliques, mais c’est tellement bon! Connaissez-vous Beyrouth ? J’y suis venu en 2010, je crois, pour la présentation d’Un Prophète. J’avais beaucoup aimé la ville, l’atmosphère, les gens. Qu’est ce qui vous rend heureux ? La vie, tout simplement. La joie, les plaisirs simples. Rencontrer des gens bien, échanger des idées. Faire du sport, un peu d’arts martiaux, la course à pied, le foot. Manger. Rire.


Manteau, GUCCI. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane.


Pull, DIOR HOMME. Pantalon, Ermenegildo Zegna.


Manteau, GUCCI. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane.


Blazer et pantalon, Brunello Cucinelli. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane. Mouchoir de poche, Ermenegildo Zegna.



Blazer, Brunello Cucinelli. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane. Mouchoir de poche, Ermenegildo Zegna.


Blazer, Brunello Cucinelli. T-shirt, Saint laurent par hedi slimane. Mouchoir de poche, Ermenegildo Zegna.


Chemise, Moncler. Pantalon, Corneliani.

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INTRODUZIONE

Total Look, HermÈs. Coiffure Rosine Muraire chez Dessange Maquillage Marion Robine Assistant photo Alexy Benard Assistant styliste Gauthier Leducq Studio Daylight 75011 Paris

10,5 mm

THIS IS A CENTERED TITLE portfolio Text ERIKA ROBERTS Illustrations CHRIS EDSER

Miller Banner Light corpo 65 interlinea 73

Bodoni EF Light / italic corpo 14 interlinea 17

42 mm

Tecnicamente sono rivali, ma la stima che hanno l’uno dell’altro li rende solo

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èze MM. Egon Van Praet & Thom Voorintholt Photographe MATTHIEU LAVANCHY Styliste Jérôme André


Egon : T-shirt en coton, HERMÈS. Pendentif en métal et plastique, J.W. ANDERSON. Thom : manteau en gabardine de coton, maillot en laine et sac à dos en cuir et nylon, PRADA. Pantalon en toile de laine, DIOR HOMME.



Pull en viscose, VALENTINO. Polo en laine, LANVIN. Pantalon en toile de laine, DIOR HOMME.


Sweat en coton et polo en laine, CANALI. Pantalon en toile de laine, DIOR HOMME. Pendentif vintage.


Pull en coton et viscose, Marni.


Manteau en coton, RAF SIMONS. Pantalon en laine technique, Lanvin.


Blouson zippĂŠ en soie et laine, LOUIS VUITTON. Chemise en coton, MARNI. Pantalon en toile technique, PRADA.


Blouson zippé sergé de laine, ERMENEGILDO ZEGNA COUTURE. Pull en viscose, KENZO. Pendentif vintage.


T-shirt zippé en coton et sous-pull en coton, HERMÈS.


Modèles Egon Van Praet chez Tomorrow Is Another Day Thom Voorintholt chez Rebel Management Groomer Yann Boussand Larcher chez Call Me Agent Assistant styliste Loyc Falque


Manteau en tissu technique, manteau zippé en soie, polo en laine et pantalon en laine technique, LANVIN. Sac à dos en cuir et nylon, PRADA.



Photographe Tarek Moukaddem Styliste Pam NASR Réalisation Mélanie Dagher Direction artistique MINJA El-HAGE



Gilet, Dsquared2. Jeans, DIor.


INTRODUZIONE

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De gauche à droite: Veste, DOLCE & GABBANA. Polo, ETRO. Jeans, THE KOOPLES. Veste, pantalon et chaussures GUCCI. T-shirt, DOLCE & GABBANA. Veste, THE KOOPLES. Pantalon, ARMANI JEANS. T-shirt, DSQUARED2. Chemise et t-shirt, THE KOOPLES. Polo, DIOR HOMME. T-shirt, TRUE RELIGION. Jeans, DIESEL. Ceinture, MOSCHINO. et Chaussures, PRADA.


Polo, DIOR. T-shirt, TRUE RELIGION. Jeans, DIESEL. Ceinture, MOSCHINO. Chaussures, PRADA.



Chemise, DSQUARED2.


Chemise, BURBERRY. Sweat, THE KOOPLES.


Bague, zadig & voltaire. Sweat, Civil.


Veste, DOLCE & GABBANA. Jeans, Dior homme.


Veste, THE KOOPLES. Jeans, ARMANI JEANS. T-shirt, DSQUARED2.


Polo, DIOR HOMME.


Veste, Diesel.


Veste, valentino. Sweat et pantalon, DOLCE & GABBANA. Sneaker, New balance.


Chemise, BURBERRY. Sweat, THE KOOPLES.




Chemise, Etro. Pantalon, DSQUARED2. Collier, JACOB COHEN.


Veste, GUCCI. T-shirt, DOLCE & GABBANA.



Veste, DOLCE & GABBANA. Polo, ETRO.


De haut en bas: Veste, GUCCI. Chemise et T-shirt, THE KOOPLES.



Veste, DIOR HOMME.


Chemise, DIOR HOMME. Boucles d’oreilles, Zadig & voltaire.


Veste, SAINT LAURENT. Chemise, Zadig & voltaire. T-Shirt, AFFLICTION. Collier, SAINT LAURENT.


Veste, Valentino. Collier, Saint Laurent.


Coiffure Ivan chez Velvet Management Assistant photo Eli Abi Acar


SE PRENDRE UNE VESTE, C’EST DE SAISON La veste, chez l’homme, c’est un peu le baromètre de son humeur du jour, mais aussi celui des tendances de la saison. Certaines pièces sont manifestement nouvelles, d’autres nous rappellent étrangement de vieux souvenirs d’enfance. Toutes ont, quoi qu’il en soit, un message à faire passer, et mieux vaut le faire savoir avant qu’il ne soit trop tard. Photographe Romain Bernardie-James Styliste Romain Vallos


ENGAGÉ Costume complet trois-pièces en coton, chemise en popeline de coton et cravate en soie à micromotifs, le tout DSQUARED2.


À LA COULE Veste oversize en laine, chemise oversize à col « Yves » en coton écossais, tee-shirt col rond effet usé en coton, skinny jean en denim stretch, pendentif « Charm croix » en laiton, argent oxydé et vieil or, pendentif « Décapsuleur serpent » en laiton et argent oxydé, bague « Mini strie » en argent et argent oxydé, bague « Palmier » en laiton et vieil or, bracelet « Multicabochons » en laiton et argent oxydé et casquette army « Yeah baby » en coton, le tout SAINT LAURENT PAR HEDI SLIMANE.


SPEED Veste droite en laine surpiquée, chemise en chambray imprimé bolides, maille zippée en laine, teeshirts à manches longues en jersey, pantalon droit en toile et sac à dos en gabardine de nylon, le tout PRADA.


INTELLO Costume en soie jacquard à motifs carreaux madras, veste croisée six boutons et pantalon ample à ceinture coulissée, chemise en popeline de coton et pull à col rond en cachemire, le tout ERMENEGILDO ZEGNA COUTURE.


DYNAMIQUE Veste croisĂŠe quatre boutons et pantalon de jogging en laine, DOLCE & GABBANA.


CURIEUX Costume droit deux boutons en laine microtexturée, tee-shirt zippé esprit base-ball en soie bicolore, chemise en soie, débardeur résille en coton, pendentifs avec clé en métal et résine, et en toile monograme peinte,le tout LOUIS VUITTON.


TECHNIQUE Costume droit deux boutons en toile de laine à micro-rayures bâton, veste à poches zippées à tirette « Ruban » et pantalon étroit, chemise à col boutonné en popeline de coton rayé avec motif camouflage « Formative Future », et cravate en faille de soie, le tout DIOR HOMME.


LÉGER Veste de costume en laine et mohair, chemise en coton, cravate en dentelle et pantalon en laine, le tout Burberry. Reproduction d’un smiley en cuir d’ANYA HINDMARCH.


ROMANTIQUE Veste droite deux boutons métal en twill extensible, pantalon en laine, blouse en soie, broche fleur en soie et coton, et bagues en métal vieilli, le tout GUCCI.


New York M. xavier buestel Photographe Jody Rogac Styliste Katie Burnett


Costume en laine mĂŠlangĂŠe et chemise en viscose, LANVIN.



Veste en laine, Ermenegildo Zegna Couture. Marcel en coton technique, Lanvin. Pantalon en coton, Corneliani.


Chemise en cuir, Jil Sander. Jeans Levi’s vintage et foulard vintage.


Veste et pantalon en chanvre, gilet en coton, chemise en coton, chaussures en cuir, Comme des Garรงons Homme Plus.


Trench en toile de coton enduite et veau velours brodĂŠ, Gucci.



Manteau en laine, Dries Van Noten. Chemise en soie, Valentino. Pantalon en laine, Marc Jacobs.


Manteau en laine, Valentino. Sweater et pantalon en maille technique 3D, Kenzo. Modèle Xavier Buestel chez Rock Man Groomer Cecilia Romero chez The Wall Group avec les produits Oribe Set designer Julia Wagner Assistantes styliste Lauren Piven, Cindy Ortiz


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QUAND LE MONDE ARABE FAIT « POP ! » Dossier Par F.A.D

Photos DR

Ils sont à cheval entre deux cultures, métissent l’esprit des origines avec celui du monde et clament leur identité complexe en couleurs vives. Hassan Hajjaj est un marocain de Londres, Marwan Kaabour est un Libanais de Londres, Tasnim Bagdadi une Marocaine de Cologne. Ils ont en commun des parcours qui les ramènent en boucle du pays natal au pays d’adoption avec une égale fascination pour les villes, l’art des rues et l’esthétique de la consommation de masse. Tous les trois sont des artistes reconnus qui ont trouvé leur place sur les plateformes les plus influentes de l’art contemporain.

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Hassan Hajjaj Né à Larache, au Maroc, cet artiste qui vit entre Marrakech et Londres est surnommé l’ « Andy Warhol marocain ». De fait, ses portraits hybrides encadrés de cannettes de boissons gazeuses sur fond de tissus populaires rappellent irrésistiblement l’esthétique de la dérision cultivée par le pape de la pop. Dans son univers, les hommes sont des djinns à lunettes en tarbouche et babouches fluo, les femmes sont des apparitions glamour et décalées, qui adorent enfourcher des motos et des mobs et détourner hijabs et boubous en délires monogrammés. A 55 ans, il fait partie des puissantes scuderia de la Taymour Grahne Gallery de Londres, de Gusfrod, L.A. et de Third Line Dubai. Son dernier film A day in the Life of a henna girl, de la série iconique Kesh Angels, a été présenté a Art Basel en juin 2015. 213


Marwan Kaabour

Photos DR

Cet artiste graphique né à Beyrouth a fait ses études à l’AUB avant de passer son master à Londres, au London College of Communication, en 2011. Cinq ans, c’est quand même rapide pour se faire une griffe dans l’univers exigeant et capricieux de l’art, mais le talent s’impose de lui-même. Pupille de Barnbrook, l’un des studios de design les plus célèbres du Royaume Uni, il collabore à la communication et à l’image de marque d’Art Basel, Victoria & Albert Museum, Thames & Hudson, Serpentine Galleries et plus près de nous, Café Younès et Bachar Assaf. Son cheval de bataille ? Le détournement d’objets du quotidien en armes de changement massif, tant social qu’esthétique. Son univers est rempli d’objets hétéroclites qu’il collectionne au hasard, dans la rue et sur les marchés. Ils finissent toujours par trouver leur place. 214


Tasnim Bagdadi Elle est historienne de l’art doublée d’une illustratrice, ce qui rend son travail inséparable d’une certaine densité. Née à Cologne d’une famille marocaine, Tasnim Bagdadi a été précocement rattrapée par la curiosité de ses origines et de l’héritage culturel de ses ancêtres. Assistante de recherches à l’université de Münster, elle se spécialise dans les livres d’art islamiques, les miniatures persanes et mogholes et l’orientalisme en général. Par ailleurs passionnée de design et de culture pop, ayant abordé et écumé tous les médias, de la photo à la mode, de l’art digital au graphisme, elle se lance dans un projet de roman graphique où se mêlent fiction et éléments biographiques. En freelance, elle est aussi directrice artistique et adore créer des concepts pour l’industrie du papier. Son travail artistique place la femme orientale au cœur d’un univers coloré où gravitent des objets symboliques qui racontent leur histoire.

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Réorienter : Changer l’orientation. Reorient est une publication qui célèbre les arts contemporains et la culture du Moyen-Orient. A partir d’un jeu de mots, ce titre est aussi une plateforme qui offre une perspective nouvelle et moderne sur la région et ses diverses cultures. Il a été créé en 2012 par l’écrivain et critique d’origine iranienne Joobin Bekhrad. 216

Portrait Sassan Behnam Bakhtiar, Fondation Behnam Bakhtiar 2016, photos DR

L’ORIENT AUTREMENT


Publication Par Emile Issa Salué par des institutions et publications prestigieuses telles que Christie’s, Art Dubai, Canvas, Harper’s Bazaar, Art Arabia, Cornucopia, The Cairo Review of Global Affairs, The Guardian, Newsweek, et le Huffington Post, pour ne citer que quelques-uns, Reorient a vu ses articles republiés dans diverses langues par les magazines et sites artistiques les plus en vue de la planète. Loin des carcans de la politique, de la religion, des idéologies et des partis, ce projet doit son succès aux efforts d’une multitude de contributeurs à travers le monde. Son fondateur et rédacteur en chef Joobin Bekhrad saisit chaque occasion de mettre en avant des artistes et personnalités du Moyen Orient portant en eux une vision artistique alternative en même temps qu’un message humaniste, « Car, dit-il, la vision occidentale de cette partie du monde se limite quelques fois à l’actualité sanglante véhiculée par les médias sur les violences qui secouent le Moyen-Orient. Rares sont ceux qui ont une vision plus large du bouillonnement culturel qui anime aussi cette région. Je

pense par exemple à la scène de l’art contemporain en Iran, aux films cultes du cinéma iranien, aux textes de Yashar Kemal ou encore à la photographie d’Ara Guler. J’ai donc créé cette plateforme afin d’extraire l’Autre du flou réducteur, du danger exotique et du mystère qui l’entoure. Il faut voir les jeunes aujourd’hui à Téhéran se mettre sur leur trente-et-un pour déambuler sur Valiye Asr Avenue et s’amuser jusqu’à l’aube ! J’ai voulu que le monde fasse plus ample connaissance avec des voix exceptionnelles comme celles de Feyrouz, Oum Koultoum et Googoosh. Le travail ingénieux des graffeurs egyptiens et saoudiens occupe aussi une place de plus en plus importante, tant dans leur domaine que dans Reorient. Il est temps que nous commencions à apprécier la diversité et la richesse incroyables qui palpitent au coeur de cette région du monde malgré tous les troubles politiques. » Quels sont les défis qui se présentent pour Reorient aujourd’hui ? Notre indépendance et notre vision 217

globale de la région sont une force, mais aussi un challenge. Se concentrer sur un pays en particulier, par exemple, comme l’Iran ou la Turquie, pourrait nous attirer davantage de soutien et de fonds, mais rares sont les sponsors qui envisagent la région dans son ensemble. D’autre part, les conflits secouant les différents pays nous imposent beaucoup de prudence. Il n’est pas facile de contenter tout le monde. D’ou notre devoir d’impartialité. Quel est votre plus grand succès à ce jour ? La bonne nouvelle, c’est que nous avons la chance de recevoir des contributions et articles de collaborateurs du monde entier. Nous recevons aussi un nombre incroyable de messages d’encouragement de la part de personnes qui nous disent combien nos articles leur ont donné envie de visiter l’Iran, la Turquie, le Liban… Pour ce qui est de la recette du succès, concernant la nouvelle génération d’écrivains et d’artistes issus du MoyenOrient, il faut considérer que l’authenticité est reine. En écrivant sur des sujets qui nous passionnent, nous sommes


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Photos DR


Ci-dessus à gauche,« Take Me to This Place, I Want to Do the Memories » par Vartan Avakian, Raed Yassin et Hatem Imam. Ci-dessus à droite, Ali Azimi.

conscients de donner beaucoup de plaisir aux lecteurs qui reconnaissent dans nos textes un souffle particulier. Nous nous abstenons cependant d’écrire dans le seul but de plaire. C’est un exercice dans lequel, très vite, on perd pied et l’audience se lasse de ce manque de crédibilité. En revanche, parvenir à un succès commercial est une autre histoire. Pour l’heure, nous nous attachons à faire connaître le plus grand nombre possible de nouveaux artistes intéressants, les derniers en date étant Ali Azimi et Vartan Avakian. Qui sont-ils? L’Iranien Ali Azimi, figure du rock à Londres, a eu un parcours atypique, multiple et d’une richesse exceptionnelle. Ingénieur mécanique de formation, Ali attire l’attention du public en 2009 avec son groupe « Radio Tehran » lors du lancement de l’album « 88 ». C’est suite aux troubles qui secouent son pays à cette époque qu’il décide de s’établir au Royaume-Uni. Empreintes d’une joie de vivre

incomparable, ses chansons telle « Aghaye Past » (Monsieur Méchant) résonnent et font écho aux hits de David Bowie lors de sa phase Ziggy Stardust avec au passage, quelques clins d’oeil aux Beatles. Ali fusionne les notes fraiches et les éléments nostalgiques. Cela donne à sa musique une vibration particulière qui ressort dans la construction des ses clips vidéos. On notera au passage la mise en scène en stop-motion (technique d’animation) de poupées habillées dans le style de la jeunesse iranienne d’aujourd’hui. Ali, qui a les pieds sur terre et la tête dans les étoiles, témoigne : « Je suis un Iranien composant de la musique en Farsi, une sorte de rock-star en miniature. J’ai beau être populaire pour la communauté des expatriés, je ne sais pas si je serai le bienvenu en Iran de sitôt. » Vartan Avakian est lui aussi un artiste qui célèbre ses racines levantines de manière décalée. Basé à Beyrouth, il explore la culture pop des pays qu’il visite. D’origine arméno-libanaise, il est passé de la recherche d’archives audio-visuelles et de films d’action de série B réalisés au Liban à la documentation du visage 219

toujours en mutation de Beyrouth. L’autodérision et la bouffonnerie sont la marque de fabrique de certains de ses travaux où il recycle les photos de studios glanées dans les différents pays arabes avec ses partenaires Raed Yassin et Hatem Imam. Eclectique, dans certaines de ses créations il interroge tout aussi bien le monde de l’imaginaire que l’univers de la mémoire parallèle. Joobin, quant à lui, déborde de créativité et met son énergie au service de ses nombreux projets futurs : des collaborations avec d’autres medias, des podcasts ainsi que des projets vidéos en commun. Son objectif à court terme ? « Mettre en circulation de plus en plus de produits dérivés et de belles éditions en papier » Reorient, tel un coffre à trésor, regorge d’artistes rayonnants et d’un potentiel grandissant. A leur façon, ses contributeurs se font fort de redonner des couleurs à un Moyen-Orient qui en a bien besoin. Pour suivre Reorient www.reorientmag.com


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BEIRUT SOUKS, SOUK EL TAWILEH T. 01 99 11 11 EXT: 560 AÏSHTI BY THE SEA, ANTELIAS T. 04 71 77 16 EXT. 263 BEIRUT CITY CENTER, HAZMIEH, LEVEL 1 T. 01 287 187 ALSO AVAILABLE AT ALL AÏZONE STORES IN BEIRUT, DUBAI, AMMAN



Samandal redessine les frontières du réel BD Par Emile Issa

Samandal. En arabe, salamandre. Omar Khouri, Hatem Imam, Lena Merhej, L’Fdz, et Tarek Naba’a ont créé ce magazine de BD à Beyrouth, en 2007. Savaient-ils déjà qu’il répondrait à son nom, traversant de part en part, en se glissant dans les failles, le grand mur de l’incompréhension qui, sous nos latitudes, ne cesse d’alimenter les malentendus ? Savaient-ils surtout qu’ils y seraient piégés ? Ghosn, Raphaelle Macaron, Sara Sukhun, Yazan Al-Saadi, et Zeina Bassil. Sanctionnés par la censure « Samandal » vient de lancer un nouveau numéro issu de la collaboration de plusieurs auteurs libanais et internationaux. Un recueil qui paraît sous le sceau de l’incertitude et s’annonce comme le dernier. A moins que… En effet, à la suite d’une illustration extraite d’une planche de Lena Merhej prenant au mot certaines expressions pour en dénoncer la violence, le collectif Samandal est condamné en 2009 par le tribunal des imprimés à une très lourde amende. La case en question évoque un juron courant du libanais dialectal : « brûle ta religion », qui se dit un peu comme « tabarnac », « osti » ou « 2 24

crisse » en québécois. « Ils ont donc « brûlé notre religion », plaisante avec amertume Léna Merhej sur le site www. samandalcomics.org. Les finances du collectif sont sérieusement entamées et ils doivent désormais recourir au crowdfunding (financement participatif) pour poursuivre l’aventure. Géographie Le nouvel ouvrage de Samandal a pour titre « Géographie ». Tout au long de cet album collectif, Samandal mue et se revêt d’écailles neuves, chatoyantes, nées de la flamme qui, dans la légende des salamandres, fait rejaillir l’espoir des profondeurs opaques de la nuit. Les illustrateurs y ont planché sur des thèmes relatifs à la composante spatiale de l’environnement où ils évoluent : Voyages, rêves d’ailleurs, promenades,

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Telle la créature amphibie et curieuse, juchée à l’orée de deux mondes, les bandes dessinées de « Samandal » prospèrent dans la dualité, s’aventurent dans les brisures des identités meurtries et ramènent à la lumière les questionnements refoulés tout au long de la guerre civile libanaise. En un triptyque complémentaire, s’y côtoient l’image et le mot, le divertissement et la substance, l’expérimental et le traditionnel. Au départ, « Samandal » est une organisation bénévole, à but non-lucratif, vouée à la promotion de l’art de la bande dessinée au Liban et dans le reste du monde. Elle a à son actif 15 numéros et deux anthologies ainsi que plusieurs événements liés à la BD et au film d’animation depuis sa création. Le collectif s’est récemment élargi pour inclure Michèle Standjofski, Barrack Rima, Joseph Kai, Ghadi


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contraintes, découverte et retour vers soi, parsèment les pages qui défilent à la recherche de l’autre lieu, du village à la ville, du pays d’ici à un autre continent, du monde extérieur au monde intérieur. Ils y évoquent tour à tour l’oppression du béton, les défis posés par une urbanité chaotique, le besoin d’évasion mais en même temps de racines. Tantôt délicates, tantôt incisives, les plumes des bédéistes évoluent à travers les obstacles pareilles au reptile acrobate qui leur sert de totem, sans cesse aux aguets, à la recherche de plus de chaleur humaine, d’authenticité et de liberté. Michèle Standjofski insuffle, entre les cordons en noir et blanc de son périple routier, des notes de verdures comme autant d’interludes de couleurs qui ponctuent son retour aux sources à travers les villages libanais de Lehfed, Mayfouk et du Hermel. Paul Rey dans « Beirut Shelter » met en scène un jeune architecte à Beyrouth qui s’interroge sur la drôle d’époque dans laquelle nous vivons, quand le patrimoine architectural est inexorablement dilapidé au milieu d’une situation régionale explosive trainant

partout son lot malheureux de victimes et de refugiés. Exemple de l’absurdité de cette condition, un intérieur en bois tout droit venu des chalets alpins, reconstitué dans un appartement en plein Beyrouth n’étonne personne, ni le client, ni son entourage. Mais il plonge l’architecte - croisement de Howard Roark et de Peter Keating dans « La Source Vive » de Ayn Randt- dans un grand moment de solitude au milieu de tant de bulles d’ego surdimensionnés. D’autant plus que la grisaille des traits au crayon-mine accentue l’ambiance glauque d’une ville urbanisée à outrance, cendrée par les tuyaux d’échappements. Joseph Kai illustre le besoin d’agir et de découvrir. Certains de ses personnages rentrent au pays, d’autres le quittent. Le narrateur souvent se superpose à l’auteur, assailli par les sollicitations tantôt aimables, tantôt inquisitives de ses voisins et de l’actualité locale et régionale. La route semble être sa seule maison. Sitôt arrivé dans un lieu, il est encore en partance, en quête d’un monde meilleur. Serait-ce déjà ailleurs ? 226

Karen Keyrouz, dans « Flux et Reflux », illustre le thème de l’errance, de la recherche d’un jardin intérieur dans un quotidien surchargé et stérile. Dans cette brillante réflexion sur les introspections de « Carole », la protagoniste trouve son sable chaud dans les bras réconfortant de son compagnon, loin de ses attaques de paniques nocturnes et de son angoisse existentielle de la mort, toujours incomprise par son entourage mais surtout, d’abord, par elle-même. Mijo, bédéiste égyptien, apporte sa contribution en arabe sur la vie quotidienne au Caire. Barrack Rima dénonce les autodafés dans une région qui menace de perdre progressivement sa culture millénaire et sa traditionnelle ouverture. La place manque ici pour citer tous les auteurs ainsi que la richesse de leurs travaux. Raison de plus d’aller découvrir les « histoires graphiques d’ici et de là » dans «Géographie », le dernier album de Samandal qui ne devrait surtout pas être l’ultime, tant que nous aurons besoin de salamandres pour traverser nos innombrables cloisons.


Depuis sa création il y a 140 ans, la maison George Hakim n’a cessé de se développer pour devenir la marque qui défie le temps. Aujourd’hui, l’ouverture de leur nouvelle boutique à Aïshti by the Sea Jal El Dib, est l’aboutissement de leur ascension et leur savoir-faire. La consolidation de leur notoriété dans le monde de la joaillerie, à travers leurs œuvres et leurs innovations, répond aux goûts d’une clientèle exigeante et sophistiquée. En 2015, George Hakim a célébré les 140 précieuses années. Ils sont les orfèvres les plus anciens et les plus reconnus dans la région. Leurs parures audacieuses et élégantes sont très recherchées des collectionneurs internationaux. George Hakim, une compagnie familiale, l’inégalable dans l’expertise des diamants et des pierres précieuses, transmet un héritage imposant de talents, d’attention et des valeurs qui sont véhiculés de génération en génération comme les fascinants joyaux de leurs réalisations. Grâce au know-how de George Hakim et de la 4eme génération, la maison a lancé la magnifique série ornée de diamants des montres suisses «Alain Philippe», devenue un nom apprécié dans l’univers des montres de luxe. George Hakim, Aïshti by the Sea à Jal el Dib, vous invite dans son nouvel espace luxueux au rez-de-chaussée.




ANTHONY SAROUFIM DE L’ŒUF À L’ŒIL Architecture Par F.A.D

Architecte et photographe, Anthony Saroufim s’est penché sur le cas de l’Oeuf de Beyrouth. L’architecture de cet ancien cinéma, créée par Joseph Philippe Karam en 1965, est déjà révolutionnaire pour l’époque. Dix ans plus tard, l’Oeuf se retrouve sur la ligne de démarcation de la guerre civile, au cœur même des combats qui séparent la ville en deux. Saroufim est fasciné par ce bâtiment en ruines, criblé de stigmates, qui symbolise le destin de la ville : étouffée dans l’œuf ou en éternelle gestation ? Il le place au cœur de sa thèse et nous parle de sa démarche.

D’où et quand est venue votre passion pour la photographie ? Le fait d’avoir vécu l’après-guerre et la reconstruction tant physique que sociale de Beyrouth, m’a donné une réelle envie d’immortaliser le perpétuel changement du tissu culturel et urbain. Une reconstruction qui se situerait au niveau physique

dans l’architecture et moral dans la photographie. Que cherchez vous à produire ou montrer à travers vos photos ? Pour moi la photographie devrait documenter et représenter le réel et le vécu d’une génération. Même l’acte de prendre une photo devrait venir d’une envie naturelle de représenter une situation ou une scène dans la transparence de sa réalité. A quoi reconnaît-on votre touche sur un cliché ? Son côté naturel et cette sensation de spontanéité parfois brutale que j’aimerais

transmettre à travers mes photos. Existe-t-il un caractère commun entre vos paysages et vos scènes érotiques ? Non je ne vois pas les corps comme des plaines ou les montagnes comme des corps humains. Les paysages au même titre que les corps dans les scènes érotiques ont chacun leur niveau de naturel… Que représente pour vous l’Oeuf ? Qu’est-ce qui vous a poussé à l’explorer à travers l’objectif ? Pour moi l’Oeuf représente une architecture « impossible » qui existe dans le présent tout en cessant d’être depuis sa destruction partielle. Elle est impossible à cause de sa situation

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De vos deux identités, celle d’architecte et celle de photographe, laquelle vous définit le mieux ? Mes passions pour la photographie et l’architecture se sont développées simultanément et on pourrait même dire qu’au fil des années l’une s’est enrichie de l’autre.


présente en état de ruines alors que son futur reste indéterminé. Les espaces annulés par la destruction de la guerre deviennent synonymes d’architecture impossible quand les dégâts occasionnés par le conflit sont toujours présents et que les bâtiments deviennent inhabitables et perdent leur fonction. L’exploration de l’œuf et de ses blessures à travers l’objectif de ma camera m’a mis dans la peau d’un soldat qui explore la même vue mais à travers l’œilleton de son arme. L’optique, dans ce cas, met en relation l’arme et la caméra, la fonction de l’arme et celle de l’œil sont confondues dans la visée. Pouvez-vous décrire votre démarche, au moment d’aborder l’Oeuf en tant que sujet ? On sent que vous vous êtes beaucoup attardée sur la structure, les piliers qui le soutiennent, ça vous intriguait, la manière dont il est suspendu ? La structure créée autour de l’Oeuf rappelle les échafaudages des sites de construction qu’on voit presque partout dans Beyrouth. L’intervention a donc un aspect « nonfini » qui fige le projet dans un espace temporel précis dans l’histoire: la fin de la guerre et le début de la reconstruction.

Cela confère donc à l’Oeuf une infinité de possibilités futures. La structure ajoutée sert non seulement à lier les lentilles optiques et le parcours fait de passerelles et d’escaliers, mais aussi à soutenir l’Oeuf et à retisser les zones les plus endommagées, donc intéressantes à explorer. Cette intervention peut être comparée à une opération chirurgicale appliquée sur la peau de l’Oeuf. Ma démarche au moment où je devais imaginer une intervention architecturale consistait à retracer son histoire. Avec le début de la guerre, ce cinéma ayant perdu ses spectateurs devient lui même spectateur de la guerre et assiste aux différents cycles de la vie de Beyrouth : L’optimisme de l’avant-guerre, les quinze ans de destruction, et la reconstruction de l’après-guerre. La question que je me suis posée est comment comprendre aujourd’hui les conséquences de la guerre a travers l’Oeuf ? Comment voir ce que l’Oeuf a vu ? Qu’avez-vous découvert en explorant l’Oeuf ? En explorant l’Oeuf, je me suis attardé sur les sentiments que cet ancien cinéma provoque. C’est un espace concret qui

héberge l’imaginaire, et qui a le pouvoir de juxtaposer en un seul lieu réel plusieurs espaces, plusieurs emplacements qui sont en eux-mêmes incompatibles. C’est ainsi que le cinéma est aussi une très curieuse salle au fond de laquelle, sur un écran à deux dimensions, on voit se projeter un espace tridimensionnel. Les visiteurs se trouvent dans une sorte de rupture absolue avec leur temps et leurs repères habituels. C’est donc en voulant créer un projet qui marie l’architecture et la photographie que l’idée de transformer l’Oeuf en une géante camera obscura m’est venue. Une des possibilités futures de l’Oeuf pourrait être de lui redonner sa fonction initiale de cinéma mais en le transformant en une camera obscura qui fonctionne comme une grande camera dont le but est de reproduire et de projeter à l’intérieur les environs de la ville de Beyrouth. La lumière de la scène extérieure doit passer par un trou provoqué par l’impact d’une balle, à travers lequel elle frappe les surfaces intérieures de l’Oeuf, reproduisant l’image à l’envers mais sans en altérer la couleur et la perspective. Cela non seulement montre comment nos yeux fonctionnent, mais montre aussi que le monde dans


lequel nous vivons est, en fait, une illusion. Quel sera votre prochain projet ? Mon prochain projet est en rapport avec les immeubles inachevés qu’on voit presque partout au Liban. Ces structures figées pour toujours dans leur phase de construction m’attirent. Notes sur l’Oeuf : Les gradins abandonnés du théâtre n’appartiennent plus aux spectateurs et s’intègrent dans la nouvelle morphologie de l’espace visité. Cet abandon remet en question la place qu’occupait autrefois le

spectateur. Ce théâtre devient le théâtre de sa propre histoire qui a pour fin d’exposer une relation singulière entre l’architecture, le temps, et la lumière. Dans son état endommagé, le monolithe de Beyrouth inspire de nouvelles formes de pensée et de compréhension architecturales. De nouvelles conceptions de l’espace mettent en évidence le potentiel de l’être humain qui peut s’intégrer et s’adapter à toute situation tout en restant libre. Les nouveaux espaces qui devraient êtres construits sur les vestiges de la guerre ne célèbrent pas la destruction de l’ordre établi. Au contraire, ils assument, et avec fierté, non seulement ce qu’ils

ont subi et perdu mais aussi ce qu’ils ont gagné. Construire sur les formes brisées de l’ordre ancien appelle une nouvelle catégorie d’ordre qui nécessite la réinvention. Les fissures des murs et les dégâts créés par les explosions et les incendies sont des formes et des configurations complexes et uniques sur les plans historique et significatif. Aucune ruine de guerre ne ressemble à une autre, mais elles partagent toutes un point commun: elles ont entraîné des effets imprévisibles sur les personnes enfin libérées de la guerre. Nous nous trouvons alors à l’aube d’une nouvelle façon de penser, de vivre et de mettre en forme l’espace reflétant l’individualité et l’invention.


Portrait Lelya Halabi, photos DR


PLIAGES DE BOIS Design Par F.A.D

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Native de Dubaï, Aljoud Lootah fait partie de cette génération d’Emiratis qui a assisté en direct au développement fulgurant d’une région sortie des sables de main d’ homme, pour rivaliser en une poignée d’années avec les plus grandes métropoles du monde. Fière de ses origines, cette jeune designer s’est fait connaître aux Dubaï Design Days avec ses meubles origami en bois, feutre et cuivre. Conversation avec une créatrice disciplinée.



des cuirs. Il s’agit des matériaux les plus courants, disponibles aux EAU. C’est l’usage que j’en fais qui fait la différence. Dans la série Oru (meubles en bois imitant l’origami), j’ai utilisé du bois et du tissu pour créer des objets géométriques inspirés des pliages japonais. Le bois a été travaillé de manière à donner l’illusion du papier plié.

Qui sont les artistes ou designers qui vous inspirent ? Difficile de choisir. Je dirais Nika Zupanc et Patricia Urquiola.

Le succès est-il venu rapidement ? Loin de là ! Tout dans la vie nécessite organisation et travail acharné pour aboutir. Il m’a d’abord fallu quelques années pour m’établir en tant que designer et installer ma marque. Par la suite, avec l’aide de ma famille, de mes amis et de ma communauté, et le soutien du gouvernement, j’ai réussi à atteindre le stade où je me trouve actuellement.

Cherchez vous à transmettre un message à travers vos créations ? Il y a toujours une histoire derrière mes conceptions, mais ce qui m’intéresse surtout, c’est l’idée de contraste entre la forme et la fonction. Je compose mes designs en mixant silhouettes traditionnelles et éléments contemporains. Je me suis surtout impliquée dans des projets qui interprètent singulièrement la culture émirati, le savoir-faire traditionnel et le design contemporain.

Parmi vos créations, quelles sont celles qui vous tiennent le plus à cœur ? Je n’ai pas de pièce préférée. Le processus de création est passionnant en soi et chaque pièce me tient à cœur. Le tabouret « Unfolding Unity » est le premier objet que j’ai créé et exposé. C’est un peu Quelle est votre définition du design parfait ? ma pièce signature. Les tapis Misnad et Un objet ou un article parfait est le produit Uwairyan me sont chers en raison de leur d’un équilibre entre séduction esthétique forte référence culturelle. La série Oru et fonctionnalité efficace. tient une place particulière dans mon cœur parce qu’il s’agit de ma première collection Les matériaux que vous employez sont-ils officielle, celle avec laquelle j’ai participé commandés sur-mesure ou disponibles sur aux Dubai Design Day 2015. le marché ? En terme de matériaux, j’utilise surtout de De combien de personnes est composée la matière première non traitée, du bois, votre équipe aujourd’hui ? des tissus, du cuivre, de l’acier, du plexi, Pour le moment, je travaille seule dans 236

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Qu’est ce qui, dans votre culture ou dans votre imaginaire, a déclenché votre passion pour le design ? Je viens d’un milieu très artiste. L’amour du design, de l’art et de la créativité s’est toujours transmis au sein de ma famille. J’ai toujours été fascinée par les motifs et je suis quelqu’un de très « visuel » depuis mon enfance.


un petit studio à la maison. Mais j’espère déménager dans les mois à venir dans un vrai bureau. A ce moment-là j’envisagerai de recruter une petite équipe. Sur quoi planchez vous en ce moment ? Je travaille sur une collection de meubles et de luminaires pour Dubai Design Days 2016. Avez-vous reçu une formation de designer de produits ? J’ai étudié les médias appliqués avec une spécialisation en arts graphiques. Je crois que ma culture graphique m’a servi de base solide et m’a permis de former mon jugement sur ce qui peut être esthétiquement séduisant tout en ayant une fonctionnalité satisfaisante. Le design graphique obéit à des règles qui fonctionnent bien avec le design de produits. Les deux domaines ont des bases communes. Quelle personne ou personnage vous a le plus impressionnée dans votre enfance ? Mes parents. J’admire leur force et leur sagesse. Quelle sorte d’enfant étiez-vous ? Très active. J’adorais le basketball et le baseball. A l’école, j’adorais les cours d’arts. Je prenais des cours supplémentaires pour apprendre la peinture sur soie et la peinture à l’huile. Etiez-vous une rebelle ? Pas le moins du monde. L’adolescence, c’était mes années calmes.

Avez-vous toujours vécu à Dubaï ? Sinon, dans quelle autre ville auriez-vous aimé vivre ? Je suis une Emirati. Je suis née et j’ai grandi à Dubaï. Je ne crois pas que j’aurais aimé vivre n’importe où ailleurs. Cette ville-pays m’a formée et a fait de moi celle que je suis aujourd’hui. Quelles sont vos sources d’inspiration ? Tout ce qui m’entoure. Les motifs, les plis, les formes sont au cœur de mon inspiration. La culture traditionnelle et l’artisanat des Emirats sont aussi une source d’inspiration majeure pour mon travail.

Quelle est votre destination de vacances favorite ? Paris Votre film préféré ? Forrest Gump Que lisez-vous en ce moment ? « Damn good advice for people with talent » de George Lois.

A quoi ressemble une journée d’Aljoud Lootah ? Je me réveille à 6h 30, parcours mes emails en prenant mon petit-déjeuner et planifie les réunions, visites d’ateliers de production ou d’usines dans la matinée. A 16h 00 je file à la gym pour une heure de crossfit, reviens à la maison pour travailler sur les tâches en attente dans ma liste « à faire ». Ensuite, je passe la soirée avec ma famille, rédige une liste « à faire » pour le lendemain, et je vais au lit à 10h 30. Quels sont vos lieux favoris à Dubaï ? Les plages. Je crois que les plus belles plages sont à Dubaï ! Comment décririez-vous votre style personnel ? A quoi ressemble votre intérieur ? Mon style est très moderne et minimaliste. J’aime l’association du blanc et noir avec des détails en cuivre. 237

Page de gauche de gauche à droite de haut en bas, tapis «Uwairyan» et «Misnad», «Unfolding Unity

Stool» et l’ installation «Yaroof» à JBR Dubai. Ci-dessus, la chaise «Oru».


Les neuf merveilles du monde

Réalisé avec Louis Vuitton et édité par Steidl, “For Friends” est une invitation au voyage. Pour “L’Officiel Hommes”, les deux auteures nous livrent un avant-goût des moments sublimes et des endroits de rêve qu’elles ont partagé avec leurs amis cosmopolites.


Portfolio Auteure Alessandra Borghese Photographe ALESSANDRA D’URSO Autrefois, voyager était considéré comme une aventure pour quelques privilégiés ; aujourd’hui, grâce aux moyens de transport moderne, c’est une expérience à la portée de tous. Mais pouvoir connaître des lieux “spéciaux” avec des maîtres de maison d’exception reste un immense privilège. For Friends est un hommage à l’amitié et au voyage. Une expérience inspirée par un mode de vie et de voyage hors du temps que l’objectif d’Alessandra d’Urso a su arrêter grâce à des images intimes et poétiques. Ce projet révèle une façon d’être ensemble, à la fois simple et élégante, fondée sur une culture enracinée dans le passé qui continue néanmoins à

vivre dans le présent en regardant vers le futur. Il a fallu plus d’une année pour le réaliser avec neuf destinations et un peu plus de quatre-vingts amis soutenus par Louis Vuitton, maison dont l’ADN porte l’esprit du voyage. Nous avons pu créer des moments intimes entre amis, dans des lieux merveilleux, riches en culture et traditions, captés par les photos en noir et blanc d’Alessandra d’Urso et publiées dans un livre du subtil éditeur allemand Gerhard Steidl. Les groupes changeaient chaque fois ; l’âge, la profession et la nationalité variaient ; cependant les différences étaient toujours plus enrichissantes. 239

L’objectif était de partager une expérience unique, différente des rencontres rapides auxquelles notre rythme de vie nous contraint au quotidien. En feuilletant ce livre, me reviennent à l’esprit les nombreuses situations vécues avec les amis qui nous ont accompagnées tout au long de ces voyages. Moments de liberté et d’aventure, d’une vie authentique et gorgée d’une saveur que l’on n’oublie pas facilement. Je pense à l’atmosphère suspendue et ancestrale dans le désert égyptien, à cheval parmi les pyramides ou en compagnie de la famille Younes dans leur polo club ; aux palmiers merveilleux de la plage de Kahala, à Honolulu, devant la maison Sarofim ;


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aux toreros au sang bleu de Jerez de la Frontera au cœur de l’Andalousie ; aux élégants lévriers confortablement assis sur les canapés du château du Champ-deBataille en Normandie ; à la très belle et romantique piscine cachée dans l’ancien palais Echavarria à Carthagène ; au bleu de la mer de Corfou où les fonds marins semblent dessinés par un grand maître de la peinture. Déjà, le comte de Beaconsfield disait : “Comme tous les voyageurs, j’ai vu plus que ce dont je peux me souvenir, et j’ai plus de souvenirs que ce que j’ai pu voir.” For Friends est l’histoire d’une expérience, où le temps n’a plus de prise et où la simplicité, l’élégance et un style de vie particuliers nous donnent envie de dire : “J’aurais aimé y être.” Traduction Alessandra Daniel

Ci-dessus, de gauche à droite et de haut en bas : dans le désert, près des pyramides. Julián López dans l’arène privée de Fuente Rey. Les bottes de Fermín Bohórquez Domecq. Alvise Orsini avec le petit renard du château de Champ-de-Bataille de Jacques Garcia. Les lévriers de Jacques Garcia sur les canapés de son château en Normandie. Superbe méduse dans la mer au large de Corfou. Un petit renard à côté d’un sac dessiné par Frank Gehry pour Louis Vuitton. Les pieds d’Alessandra d’Urso dans l’hélicoptère survolant les jardins de Champ-de-Bataille. La piscine de la maison de Felipe Echavarria à Carthagène, en Colombie. Patrick Pottier et ses lévriers. Les mains du magicien John Steiner. Page à gauche : les palmiers de Honolulu. Page précédente : les chevaux de polo de Farouk Younes dans le désert d Abu Sir, en Égypte. 24 1

L’objectif était de partager une expérience unique, différente des rencontres rapides auxquelles notre rythme de vie nous contraint au quotidien



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148 SAAD ZAGHLOUL STREET, DOWNTOWN BEIRUT / AÏSHTI BY THE SEA, ANTELIAS


BUENOS AIRES VU PAR LUNA PAIVA

I. SCULPTURES Une des villes au monde les plus “habitées” par le marbre et le bronze. Ces matières se transformèrent en sculptures d´avant-garde par les mains d´artistes européens et argentins du début du XXe siècle. Les magnifiques parcs dessinés par le Français Charles Thays abritent des centaines de sculptures des artistes français de l’époque : Rodin, Bourdelle, Cain, Carrier-Belleuse qui font de Buenos Aires un musée en plein air. Parc de Palermo, place du Congrès.

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Photos luna paiva

I


“Je suis née à Paris en 1980. A l’âge de trois ans je suis partie vivre à Buenos Aires. Plus tard, je suis revenue en France pour faire mes études et après quelques années, je suis rentrée en Argentine où j’ai trouvé le contexte idéal pour réaliser mon travail. Toujours partagée entre Paris et Buenos Aires, j’ai pu développer un regard objectif sur Buenos Aires, une ville chaotique et charismatique.”

II

II. KAVANAGH Phare de la modernité, la structure en béton armé la plus haute du monde à l´époque de son inauguration en 1936 : le Kavanagh combine art déco et rationalisme, New York et Paris, arbres et fleuve dans les terrasses jardin. A deux pas de là, le bar Florida Garden est un incontournable pour apprécier l’esprit Porteño. Florida 1065.

III

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III. BELGRANOR Les vestiges des quartiers jardins apparaissent comme des spectres de la Belle-Epoque. Belgrano R reste un des plus beaux quartiers secrets de Buenos Aires. Av de los Incas.


IV. FONDERIE Une des choses qui m’attache le plus à Buenos Aires ce sont les collaborations qui surgissent à partir de rencontres. Les trois frères Buchhass sont la 4e génération de fondeurs venus d’Allemagne en 1920, et c’est dans leur fonderie que j’ai trouvé l’espace idéal pour apprendre le métier de sculpteur et travailler le bronze. V. GIRALDA Depuis 1951, rien n’a bougé au café La Giralda. Austère et original, il est situé au milieu des théâtres et des cinémas de la ville. Devenu un classique, aujourd’hui des artistes et écrivains s’y donnent rendez-vous pour prendre un chocolat chaud avec des churros faits maison servis avec fierté et précision par Guillermo qui travaille ici depuis 25 ans. Av. Corrientes 1453. VI. BRUTALISME Une des grandes œuvres du brutalisme latinoaméricain, le bâtiment s’érige comme un pachyderme en béton dans les eaux éclectiques du quartier bancaire de Buenos Aires. Reconquista 101. V IV

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X

VII. CANTERO Obsédée par les plantes combinées aux motifs et textures de l’architecture que l’on retrouve dans les entrées des immeubles de Buenos Aires (Cantero), j’ai commencé à les documenter photographiquement depuis quelques années afin d’en faire un livre. Ces sortes de capsules de décompression entre la trépidation des rues et l´intimité de chez soi déploient un grand panorama de styles restés intacts dans le temps. Quartiers de Belgrano et Palermo. X. LIVRAISON DE VIANDE La viande en Argentine, dans la rue et dans les assiettes. Tous les matins, des camions arpentent la ville pour livrer de la viande. Des bêtes entières sur le dos des livreurs, des images frappantes qui font partie de l’iconographie de la ville. XI.ZOO Le zoo de Buenos Aires est une mise en scène de cohérence fragmentaire où se mélangent animaux, arbres et bâtiments des cinq continents en plein centre-ville. República de la India 3000. À VOIR www.lunapaiva.com

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Un verre de bourbon sous un caoutchoutier Lieu Propos recueillis par Philippine de Clermont-Tonnerre

Une ambiance Art Déco, des cocktails dans les règles de l’art et du jazz plein les oreilles... A Hamra, le Salon de Beyrouth convoque les années folles américaines dans une villa méditerranéenne. Raya Kazoul raconte. ai présenté un dossier de 200 pages avec mes références artistiques : beaucoup d’Art déco et les bars de jazz emblématiques de New York. Il était très enthousiaste. J’aime la géométrie des choses, le coté graphique et la fonctionnalité des meubles et objets des années 40.

Vous avez ouvert il y a un mois. Comment ça marche jusqu’à présent ? Bien ! Je dois dire que nous avons beaucoup de chance. Le Salon de Beyrouth a déjà ses habitués, des gens qui reviennent. Nos clients ont entre 28 et 60 ans. Le Salon de Beyrouth c’était quoi avant ? Une garderie ! L’immeuble appartient à la même famille depuis sa construction en 1937. L’architecture est un mélange d’Art déco et d’influences méditerranéennes.

Qu’est ce qu’on ne trouve qu’au Salon de Beyrouth ? Je dirai que pendant la journée, c’est un havre de paix verdoyant. C’est un lieu de vie en plein milieu de la ville, et pourtant c’est assez calme. On peut déjeuner et diner entre amis ou simplement venir prendre un verre. On a de la musique live, donc on peut découvrir des artistes locaux. Je ne sais pas s’il existe beaucoup de lieux comme ca ! La nourriture aussi vaut vraiment le détour.

Comment s’est déroulé l’aménagement des lieux ? Tout a été fait sur mesure: le bar, le plafonnier, les appliques, les tables et même les porte-manteaux. J’ai découvert le travail de l’architecte Antoine Makhlouf il y a deux ans. Je lui

Justement. Quelles sont vos spécialités ? On a travaillé avec un consultant, Wael Lazkani. La carte est à l’image du lieu : classique et en même temps au goût du jour. Les prix sont très abordables. Parmi les entrées, les aubergines 250

grillées avec de la feta sont vraiment délicieuses, et côté plats, nous avons un ragout d’agneau et un poulet enrobé de bacon avec une sauce à l’amande, tous les deux exquis ! En pâtisserie on retrouve les classiques : baba au rhum, chocolate whisky tart. Notre religieuse au café est à mourir, avec ses trois boules bien kitsch ! Et le whisky ? Le choix est très grand. On a du Sazerac, du Old fashioned ou du Kyushiki pour n’en citer que quelques uns sans tout dévoiler ! Nos cocktails sont réalisés dans les règles de l’art, comme au début du XXe siècle à La Nouvelle Orléans et à New York. Moustapha est passionné par la mixologie qui est l’art du mélange des boissons. On utilise beaucoup le bourbon, du rhum ou de l’absinthe ; pas du tout dans les sentiers battus. Pour nous, la vodka Cranberry est un casse-kiffe ! Vous avez aussi deux arbres... Oui ! Il s’agit d’un caoutchoutier et d’un frangipanier. On a vraiment travaillé la végétation. Ces plantes sont

Photos Karim Sakr

Qui se cache derrière le Salon de Beyrouth ? Moustapha Makky, mon partenaire dans la vie, et moi-même. Il est dans la restauration, je suis dans la mode. Je lui ai communiqué ma vision. Au début il voulait en faire un bar à whisky. C’est en commençant que nous avons eu envie de nous lancer dans un projet plus ambitieux.


“Pour nous, la vodka Cranberry c’est un casse-kiffe !”

celles qu’on trouverait sur un balcon de nos grand-mères. Nous avons beaucoup de fougères, par exemple. Etes-vous « laptop friendly » en journée ? Oui, bien sûr ! On peut trouver au Salon de Beyrouth la tranquillité pour travailler le matin, pour prendre son café et être productif toute la journée. Quels artistes peut-on venir écouter en soirée ? Donna Khalifé, Arthur Satyan, un pilier du jazz local, Avo Tutunjian, un saxophoniste exceptionnel. Le dimanche on organise “un piano bar” avec Marc Ernst. Le Salon de Beyrouth est directement inspiré des jazz bars américains. Nous sommes même allés à New York et à la Nouvelle Orléans pour faire nos recherches. En même temps c’est suffisamment calme pour que les gens puissent s’entendre. Nous voulons vraiment que les gens discutent, se rencontrent et échangent. Salon de Beyrouth - rue Abdel Baki, Clemenceau, Beirut - ouvert tous les jours de 9h30 à 2h, brunch jusqu’à 16h. 251



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Villa Badaro, le nouveau resto de quartier



Badaro est un quartier résidentiel formé au milieu des années 1950 le long de la frontière orientale de Horsh Beyrouth , forêt de pins plantée par l’émir Fakhreddine au 17e siècle, dans le but d’arrêter l’avancée des sables poussés par les vents du sud vers la ville de Beyrouth. Depuis, ce secteur a revêtu plusieurs caractères. Lieu Par Myriam Ramadan Yashruti Au milieu des années 50, de nombreuses familles riches d’Alep et de Damas, fuyant leur pays en raison des lois de nationalisation, s’y sont installées. La rue principale porte le nom de Habib Badaro, un homme d’affaires qui y avait établi sa fabrique de textiles. A partir de 2013, l’ouverture de quelques pubs a remis Badaro sur la carte des quartiers «hip » après une première tentative dans les années 1970, aussitôt avortée en raison de la guerre. Aujourd’hui, de nombreux restaurateurs avec une solide expérience du métier s’y sont implantés. Villa Badaro fait partie de ces nouvelles adresses à découvrir. Ce restaurant qui privilégie la cuisine internationale appartient à l’enthousiaste Nemer Saliba (27 ans) et à son ami d’université Ali Saleh. L’établissement est niché dans une ancienne villa libanaise datant des années 1950 et menacée de démolition. Nemer, diplômé en marketing de l’Université américaine de Beyrouth, a réussi à se faire un nom dans le business nocturne, ayant ouvert en juillet 2010 son premier pub, « The Speakeasy », sur la rue Hamra alors en pleine expansion. Mais il avait dû se résoudre à le fermer en 2013, quand le secteur a subitement connu une regression provisoire, notamment pour des raisons sécuritaires. A son actif, également, la création, en 2012, de deux « pop up » clubs : « Uberhaus » et « Garten », construits au moyen de conteneurs pouvant être montés 256

et démontés pour être rebâtis n’importe où ailleurs. « Ce concept est novateur et économique, souligne Nemer, car il permet au promoteur d’échapper aux contraintes financières d’une construction en dur et en lieu fixe. » Selon lui, ce mode est parfait pour une ville comme Beyrouth qui vit une instabilité permanente, ce qui rend les gros investissements parfois difficiles. De plus, la société « Uberhaus » propose aussi l’organisation d’évènements musicaux. Pour ce qui est de Villa Badaro, ce restaurant a ouvert ses portes en novembre 2015. La beauté de l’endroit réside dans son très beau jardin et dans l’authenticité de l’intérieur que les propriétaires ont voulu garder tel quel: les murs ont été décapés au feu pour restituer à la demeure son esprit d’origine. Si le décor est moderne à l’intérieur, à l’extérieur il est bucolique, avec le jardin qui occupe un vaste espace. Nemer Saliba a voulu créer ce restaurant « pour les habitants de Badaro ». « Je voudrais qu’il vive sa vie, qu’il bénéficie d’une croissance naturelle. Je voudrais surtout que ce soit un endroit où les gens du quartier aiment se rendre », affirme-t-il. Comme Villa Badaro est son premier restaurant, Nemer a voulu privilégier une carte simple et de bons produits, au goût et à la portée de tout le monde. Et puis, attendez-vous à un menu brunch les samedis, à partir du printemps prohain.


Par F.A.D Photographe jimmy dabbagh

TUTTI-FOODIE Baklavas, fallafel, shawarma, lahm-bi-ajine, glace au lait- pistache, mhalabieh, knéfeh, fleurs d’oranger confites, cocktail de fruits, grenades pressées… des parfums, des odeurs, des humeurs, des saveurs, des envies folles, la rue, les épiciers, les klaxons, les passants, le soleil, les souvenirs, Beyrouth. 257






PHILOSOPHE DU VINYLE Musique Par F.A.D

A 35 ans, Ernesto Chahoud n’est rien moins qu’une créature nietzschéenne pour qui, sans la musique, la vie serait tout simplement une erreur. C’est donc avec l’acharnement et la passion d’un activiste qu’il collecte et collectionne, depuis son adolescence dans Beyrouth en guerre, les 45 tours vinyle oubliés du Moyen Orient des années 60 et 70. Des sons chauds et festifs, du disco au baladi en passant par le funk, la soul et le hiphop arabe auxquels se sont ajoutés récemment, après un séjour de Chahoud en Ethiopie, des airs tout aussi rares et précieux de la Corne de l’Afrique. Premières pépites Ayant envahi l’ancien magasin de chaussures de sa famille dans une

ruelle de Bourj Hammoud, ce DJ éclectique doublé d’un organisateur d’événements culturels, triplé d’un producteur de concerts a fait de ce lieu, rebaptisé Darsko, le conservatoire de l’une des plus exhaustives collections de soul sur 45 tours du Moyen Orient. Sa collection de vinyles a commencé à la fin des années 80 quand, au seuil de l’adolescence dans un Beyrouth dévasté, il s’est mis à la recherche de ces galettes en déshérence dont les gens se débarrassaient pour acheter des CD. Ses premières pépites sont des Fleetwood Mac, des Bob Dylan, des John Mayall, notamment Blues Brakers avec Eric Clapton et les Bluesbrakers. Ces premières émotions, reçues au hasard, par tâtonnement mais de plein fouet, vont déterminer la suite de sa 262

quête. S’y ajouteront les raretés éditées par Studio Baalbeck ou la Voix de L’Orient charriant tout le folklore du Liban et de la Méditerranée orientale, entre danse du ventre, mélopées et parodies occidentales. Reconnu par les puristes comme le DJ sur vinyle le plus recherché du monde arabe et l’un des inspirateurs les plus influents de la scène musicale beyrouthine, Ernesto Chahoud, à travers sa plateforme musicale et artistique Beirut Groove Collective, accueille tous les mois, dans un de ces lieux qui flairent bon leur underground tels que Zico House ou Radio Beirut, des soirées groove qui font revivre le patrimoine musical libanais d’avantguerre, surtout les compositions d’Elias Rahbani que traversent parfois des rythmes Motown.

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Il s’appelle Ernesto Chahoud, mais ce nom est moins connu de son public que des tablettes de la faculté de philosophie où il prépare son agrégation. En revanche, son alias, DJ Spindle, magicien du 45 tours vinyle et des sets kitsch et envoûtants du Beirut Groove Collective qu’il a fondé en 2009, est une idole. Virée dans l’univers de ce drôle de bonhomme qui étudie le jour et mixe la nuit, mi Jekyll, mi Hyde ; mi Clark Kent et mi Superman.


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Une réponse à la saturation Aucun événement n’est encore annoncé dans l’immédiat sur la page Facebook de Beirut Groove Collective, depuis la soirée hommage, le 13 février dernier, à Clarence Reid, alias Blowfly, roi du rap et de la soul pornographique, disparu le 16 janvier dernier. En revanche, avec un passage de 8mn sur Arte dans le magazine Tracks, le 23 février, et de 6mn sur BBC une semaine plus tard, Ernesto Chahoud se révèle sans conteste l’étoile montante d’une scène musicale internationale saturée et en quête d’authenticité. Les sons qu’il enchaîne réveillent une nostalgie bon enfant et créent des atmosphères à la fois planantes et chaleureuses. Une eau matricielle dans laquelle il fait bon se laisser couler.


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David Bowie Dans le cerveau de... Par Adrian Forlan Illustrations Adam Hayes

Des grands anciens qui ont ravi nos parents, Bowie demeurait le plus mystérieux : Dylan se moque de tout ou presque (avec génie, encore), les Stones ne pensent qu’à leurs impôts, McCartney

a tout donné, Leonard Cohen médite. L’Anglais, lui, aura encore publié avant de nous quitter un album* extraordinaire de vitalité et d’inventions. Un grand musicien qui a aussi pensé un 266

univers esthétique complet, compris l’apport décisif des nouvelles technologies, et théorisé de nouveaux modèles ­économiques en précurseur. * Blackstar , David Bowie (Iso/Columbia)

Illustration JellyLondon.

Une pop star ? Oui ! Un visionnaire ? Oui ! Un entrepreneur ? Aussi ! Bowie a été tout cela. Avertissement : on ne sort pas indemne de la visite d’un cerveau tant agité par les idées… Qui forcément manquera.


Des personnalités multiples Ziggy Stardust, Aladdin Sane, Halloween Jack, Thin White Duke, Pierrot… jusqu’à sa disparition programmée sur la pochette du récent The Next Day, sur laquelle son visage était recouvert d’un carré blanc, le chanteur a multiplié les masques. Fan du théâtre de

Un défricheur

Un businessman incertain

Il a fait découvrir le Velvet Underground et Jacques Brel aux Anglais, les sons électroniques à toute l’Europe qui tardait à s’y mettre, il a importé aussi le théâtre kabuki en Occident et n’a pas hésité à se plonger dans le cinéma scandaleux de Nagisa shima. Dernier coup d’éclat : inviter la crème du jazz contemporain sur son nouvel album.

En 1997, il vend à ses fans un genre de bon du Trésor : les Bowie Bonds. En renonçant à dix ans de royalties, le chanteur a touché 55 millions de dollars, qui lui ont permis de racheter à son ancien manager les droits sur l’ensemble de son catalogue. En 2004, les souscripteurs, à qui étaient promis 7,9 % de taux d’intérêt, regrettaient amèrement leur investissement qui avait perdu la quasi-totalité de sa valeur, suite à l’effondrement des ventes de disques.

Brecht, Bowie a toujours eu le génie de la mise en scène de soi, à distance, à travers des personnages éphémères.

Un geek En 1998, il met sur pied un site Internet aux multiples facettes : il lui permet de compter sur sa communauté de fans, à qui il peut vendre en direct sa musique, et un deuxième site, pour vendre les œuvres d’artistes jugés prometteurs, en échange d’une commission modeste. En 2000, le magazine Computer World l’a installé, aux côtés de Larry Ellison et de Bill Gates, dans le Top 20 des visionnaires de la technologie.

Des légendes Il aurait été l’amant de Mick Jagger, serait mort dans les années 2010, aurait vécu uniquement de lait frais et d’héroïne dans les années 1970. Spoiler : de ces trois mythes, seuls deux sont avérés…

Un artiste complet Son clip pour Blackstar*, folle embardée anxiogène vers une planète inconnue, rappelle que peu d’artistes de sa notoriété ont à ce point travaillé la dimension esthétique. Le succès de l’exposition « David Bowie Is », de Londres à New York en passant par Paris, atteste que son public en a bien conscience : elle a compté plus d’un million de visiteurs...

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Un prophète « En 2012, le copyright sera mort, disait-il en 2002. La musique sera comme l’eau courante ou l’électricité… Il faudra donner beaucoup de concerts, parce que c’est tout ce qu’il restera à faire. » Songer qu’il a fait ces prédictions des années avant l’avènement des Deezer et autre Spotify, lui confère une aura de Cassandre pop.


Dj K-Sets rembobine l’Orient Musique Par F.A.D

Il s’appelle Manuel Sanchez, né en 1979, espagnol comme son nom l’indique. Il porte moustaches et casquette et se cache derrière des lunettes de soleil. Cet artiste multidisciplinaire se bat avec ses propres armes pour un Moyen Orient pacifié. Obsessionnel, il collectionne de Madrid à Alep, d’Istanbul à Beyrouth, de Téhéran à Berlin, de Amman au Caire, des cassettes de chansons populaires qu’il mixe et reconvertit en tubes sous le label Dj K-Sets. orientale. De chaque chanson il saisit la magie secrète et la transforme, alchimiste de la table de mixage, en or sonore. Bic et ruban magnétique Au cœur d’une époque où le son, porté par une technologie exigeante, ne tolère aucune imperfection ; où le moindre enregistrement passe par le filtre auto-tune ne laissant aucune chance à l’hésitation ou à la spontanéité, Manuel Sanchez réhabilite le tremblement de la bande magnétique qui, au cœur des années 90, faisait encore partie des mœurs. Certes, le ruban brun (ou blanc, ou noir), fin et délicat, avait une fâcheuse tendance à se faire mordre par les bobines de lecture. Il fallait alors le rembobiner au moyen d’un Bic, opération que toute une génération savait maîtriser en râlant un peu. La cassette, cette drôle de mini-boîte à musique à deux trous crantés, qui avait commencé sa carrière dans un format imposant, représentait pourtant, avec ses chuintements, l’ultime avancée en matière de technologie sonore avant l’avènement du CD qui tend à s’éclipser à son tour, laissant place à des supports de moins en moins tangibles. L’étui à cassette était lui-même un chef d’œuvre de kitsch. Au grésillement du fond répondaient les couleurs criardes de la forme. Autant d’éléments qui font 268

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Sa page Facebook (Dj K-Sets) est inscrite sous le label « Cause ». Derrière les photos de l’artiste en bleu de travail se battant avec des tuyaux techniques tentaculaires, se révèle, en effet, l’homme d’un combat. Manuel Sanchez mène une double action d’archiviste conservateur et d’agent culturel déjanté. Transporté par son désir de promouvoir la culture du Moyen Orient et de faire aimer cette région à travers sa musique, il a réussi à mobiliser tous ses amis et amis d’amis qui contribuent à son projet en lui ramenant de tous les coins de cette partie du monde une multitude de sons, tantôt crachés par les autoradios des taxis collectifs, tantôt charriés par les marchands ambulants. Le son de la rue arabe, juive, iranienne, stambouliote ou tzigane, tambourins et mélodies sirupeuses, inscrit sur les rubans usés des cassettes en déshérence, est pour ce Banksi de la musique, ce graffitiste du tabla, ce pape de la pop « arte povera », un trésor inestimable. Depuis 2001, il rafle les pistes piratées sur lesquelles des voix noyées dans des effluves d’eau de rose, de kebabs et de falafels modulent des cris d’amour et chantent la misère ordinaire. Non seulement il les rafle : il stocke, il accumule, boulimique, ces rythmes lancinants qu’on écoute d’abord avec les pieds et qui aussitôt gagnent les bras et les hanches, ondulent en vous et vous lancent dans d’incontrôlables sarabandes autour de la Méditerranée


de la cassette, ou K7, ou K-set, donc, une pépite vintage dont Dj K-sets fait son miel. Ces seins-là Envie de danser ? Ne laissez pas ces fourmis vous ronger les jambes. Les titres de Dj K-sets annoncent un programme en forme de courant électrique : « Middle East Taxi Tapes », « Middle East Hippie Age », « Middle East Sexy Girls », « Canaanite Galaxy », « Tehran Electro Tunes », « Cinnamoon Club », les couvertures rappellent celles des Play Boy ou des vieux SAS revendus sous le manteau par les bouquinistes de la rue Hamra. S’y emmêlent, sous des torrents de « habibi, hayati, ahibbak » (mon amour, ma vie, je t’aime), des portraits évocateurs de bimbos sur-refaites dont les noms défilent sur les panneaux qui jalonnent les autoroutes : May, Nawal, Maria, Grace ou Haifa. Elles ont bien-sûr ce regard-là, irisé par des lentilles teintées, et ces lèvres-là, et ces seins-là et ce nombril qui joue les points de fuite dans une perspective que les premiers accents du tambourin prolongent à l’infini. 269


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DISCO HALAL ET DÉLICES D’ORIENT Il y a très longtemps, on ne sait plus quand, les DJ se sont mis à passer, en fin de fin de soirée, des sets de musique arabe. Aux premiers accents des mizmars et des tambourins, les engourdis par l’alcool et les basses secouaient leur torpeur et dansaient comme un seul homme. Voici, en onze titres, la playlist magique des nuits beyrouthines imaginée par Richard Kahwagi, artiste polyglotte et polyvalent, amateur d’eaux gazeuses et de typographies détournées. Playlist Par RICHARD KAHWAGI Orientalisme funk psychédélique pour danse du ventre.

1. Joseph Salame – Do you love me (4:42, 1986) “Do you love me, ya habibi, ya habiiibi, ya habiiiiiiibiiiiiiii” 2. David Bowie – The Secret Life of Arabia (3:46, 1977) David Bowie, Dewood Bou 3id en libanais. 3. Annabelle – Fuis Lawrence d’Arabie (5:13, 1987) Un air disco italien chanté par une franco-algérienne singer sur un anglo-arabe. C’est clair ? 4. Elias Rahbani And His Orchestra – Liza… Liza (7:43, 1978) Cet album coquin exhibe en couverture une incroyable paire de seins nus.

8. Jade ft. Tala & Georgette Sayegh – Bouchar (6:18, 1969/1974/2014) Une musique instrumentale synthé-pop revisitée par la légendaire Georgette Sayegh, remixée par Jade, avec Tala en vedette. Boum ! 9. Raja Zaher – Drum Sequence (Psychemagik Edit) (4:31, 1980/2012) Le Libano-américain Raja Zaher édité par le duo londonien Psychemagik.

6. Maya Yazbek – Disco Cocktail (11:46, 1986) Un medley arabe à la sauce disco. (Vous avez vu ce que j’ai fait, là ?) 11. Yasmine Hamdan – Bhebak ya Habibi Une reprise de l’iconique « Love to Love you Baby » de 7. Ihsan Al-Munzer – Shish Kebab (1980) Donna Summer par Yasmine Hamdan. 272

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10. The Abdul Hassan Orchestra ‎– Arabian Affair / Desert Dance (6:33, 1978) une bande de Hollandais déguisés en arabes et une danseuse du ventre nommée Yonina. Parce que… pourquoi pas ?

5. The Ritchie Family – Arabian Nights (14:31, 1976) Un medley disco à la sauce arabe.


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