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la bande-son de l’Apocalypse IV Horsemen
Des machines de Timothée Gainet jaillit une matière sonore asphyxiante qui pousse l’EBM dans ses extrémités les plus sombres, passe les mélodies au hachoir industriel et anime le tout d'impulsions techno survoltées. Une véritable catharsis par le bruit et la fureur.
Certains esprits catastrophistes voient dans notre époque troublée l’annonce de la fin des temps et ne seraient pas étonnés de voir bientôt apparaître les Cavaliers de l’Apocalypse. Pour Timothée Gainet, aux manettes de IV Horsemen, la référence à ces derniers « est plus d’ordre spirituel et poétique, en tant que figure dramatique intemporelle. Un message d’acceptation de l’inévitable qui nous renvoie à notre position d’entité parmi d’autres peuplant ce monde. » Sa musique pourtant constituerait la bande-son idéale des souffrances et destructions qui s’abattraient alors sur le monde. Hostiles et agressives, les machines y instaurent d’étouffantes ambiances d’une noirceur impénétrable. Chant trituré et beats techno s’insèrent dans un âpre alliage de sonorités industrielles et d’EBM, parfois aéré de dark ambient. « La brutalité de certains morceaux est une catharsis de noirceur, une libération positive, un abandon de soi dans un brouillard sonore qui me protège du monde pendant un instant », explique Timothée.
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Sous leurs allures de musique de club, les morceaux de IV Horsemen se déploient sur la durée, au point que Parade nocturne, son premier opus, prend la forme d’un copieux double album. Même s’il parvient à un rendu radical et violent, Timothée Gainet ne cherche pas à produire une musique directe et immédiate, mais privilégie la mise en place d’ambiances. « Le plus souvent, j’aime prendre le temps de faire évoluer le morceau sur la longueur même si, d’entrée de jeu, il peut y avoir un kick à tous les temps avec une grosse ligne de basse. Ce n’est pas forcément progressif, les formules de structures inhérentes à certains styles ne m’importent pas, je fais comme je le ressens. »
La sensation d’être plongé dans une obscure cérémonie, entre vocation cathartique et processus initiatique, s’impose à l’écoute de Parade nocturne. « Le côté rituel est essentiel car il me permet d’entrer dans un processus de création où les structures n’existent plus et où je m’appuie sur la perception et la sensation des sons, presque comme dans la musique concrète. » Le chant même, avec ses parties répétées telles des mantras, y est traité comme un élément de texture, toujours noyé dans les effets : « La voix joue un rôle important dans mon implication physique dans le morceau. L’action même de faire vibrer l’air qui nous entoure par notre voix pour la combiner avec des machines est une action riche de sens pour moi et crée une connexion rituelle. » Parade nocturne s’apparente plus à un exutoire libérateur qu’à une messe noire, à l’image de sa mystérieuse maîtresse de cérémonie, figure voilée qui orne sa pochette : « une entité spectrale amicale sur laquelle projeter ses peurs, ses désirs et les mystères de la vie et de la mort ». i
dfacebook.com/IVHorsemenIV
Parade nocturne aufnahme + wiedergabe
Une profonde respiration s’impose avant de s’immerger dans ce long premier album, d’abord aussi accueillant qu’un bain de goudron dans lequel flotteraient des bouts de métal acérés. Avec ses rythmiques répétitives et bruitistes, ses vocaux déformés et fragmentés, ses sonorités métalliques et ses impulsions techno agressives, l’EBM de IV Horsemen ne vise pas le confort, mais séduit au fil des atmosphères qu’elle prend le temps d’installer. Denses jusqu’à la suffocation ou troubles jusqu’à l’opacité, celles-ci dérivent entre l’agitation mécanique violente et la torpeur brumeuse hantée de voix réverbérée, tandis que quelques réminiscences de sonorités orientales donnent à l’ensemble des allures de cérémonie rituelle.